Consulat
Premier Empire

Eylau

Le chirurgien Percy à Eylau

Pierre-François Percy est né à Montagney (Haute-Saône) le 28 octobre 1754. Reçu docteur à Besançon en 1775, il entre au service militaire l’année suivante et obtient un brevet de chirurgien. Inspecteur général en l’an XII, membre de l’Institut en 1807, baron de l’Empire après Wagram.

Eylau, le 9 février 1807 - Percy est chirurgien en chef de la Grande Armée ; il assiste à la bataille d’Eylau et sera d’ailleurs immortalisé dans le tableau de Gros en train de secourir un soldat russe. Il raconte le lendemain de la bataille d’Eylau...


[...] e retour du champ de bataille où plus de trois cents blessés français restaient étendus, sans qu’il fut possible d’aller jusqu’à eux, je suis revenu à nos hangars. En passant, j’ai vu Sa Majesté observant du haut d’un mamelon et à cheval les mouvements des Russes ; plusieurs fois dans le jour, elle a été le point de mire de plus d’une batterie, et près d’elle il est tombé cinq ou six obus, dont les éclats ont volé autour de sa personne. J’ai trouvé le service chirurgical de nos hangars en pleine activité, mais quel service ! Des jambes, cuisses et bras coupés, gelés avec les corps morts devant la porte ; des chirurgiens couverts de sang ; des infortunés ayant à peine de la paille pour eux et grelottant de froid ! Pas un verre d’eau à leur donner ; rien pour les couvrir ; le vent soufflant de toutes parts sous les remises dont le soldat enlevait les portes pour former son bivouac à quelques pas de là. J’ai fait apporter quelques brassées de paille déjà brisées pour couvrir un peu ces braves gens ; les portes de grange ont été rétablies du côté où la brise soufflait le plus fort, et, après avoir exhorté mes collaborateurs, distribués par moi de tous cotés, à tenir bon à l’ouvrage le plus longtemps qu’ils pourraient, je suis retourné à mes équipages, à un quart de lieue de là. Je me suis assuré, en passant devant le bivouac des charrettes d’ambulance, qu’on donnerait du bouillon à la plupart des blessés ; j’ai fait porter des chandelles aux chirurgiens, ainsi qu’une nouvelle provision de linge et quelques caisses d’instruments de plus. 

(Percy a ce jour là cette conversation avec Napoléon)

[...] Avez-vous beaucoup de blessés ?  Sire, je crois que nous en avons pansé quatre mille. - Les blessures sont-elles graves ? Il y en a mille qui sont de la plus grande gravité. - Combien perdrez vous de blessés sur ce nombre ? - Le tiers, parce que la mitraille et les éclats d'obus ont fait les plus grand ravages.

Il (l'empereur) a demandé à Monsieur Lombard (commissaire des guerres) s'il avait du monde pour le seconder. Il lui a été répondu qu'il n'y avait ni économes, ni employés, ni infirmiers, mais que nous ne manquions ni de linge de charpie, ni d'instruments, etc.

Quelle organisation, dit l'Empereur, quelle barbarie !

Sire, a ajouté Monsieur Lombard, lorsqu'on est sûr d'être supprimé à la paix, quelque bonne conduite que l'on ait eue pendant la guerre la plus pénible et la plus périlleuse, il est difficile qu'on ait du zèle et qu'on se décide á suivre une armée comme employé ou comme infirmiers.

[...]

Tout ce que j'ai vu et entendu ne sortira jamais de ma mémoire.

 

Extraits des "Mémoires de Percy"