Avril 1801


Paris, 1er avril 1801

Au prince royal de Danemark

J'envoie auprès de Votre Altesse Royale mon aide de camp, chef de brigade, Lauriston. Je le charge de lui dire tout l'intérêt que je prends aux affaires présentes du Danemark.

La Suède, la Russie et la Prusse, plus à portée, vous donneront, dans tous les cas, un secours quelconque. De mon côté, vous pouvez compter que je ferai tout ce qui sera convenable et possible. Au reste, je ne pense pas que les Anglais soient assez osés pour toucher terre : dans ce cas, Votre Altesse les recevrait comme ses aïeux les ont reçus autrefois.

Je prie Votre Altesse Royale de croire à l'intérêt tout particulier que je prends à sa situation et à ses succès.


Paris, ler avril 1801

Au général Berthier, ministre de la guerre

1° Ordre à 150 hommes du 19e de dragons de partir le 13 germinal(3 avril), pour être rendus à Niort en douze jours, et faire partie du corps de la Gironde. Ce détachement aura sous son escorte un million.
2° Envoyer le plus promptement possible des habits à Rochefort. Il est probable qu'avant dix jours ces troupes seront embarquées.
3° Donner au général Chabot l'ordre de presser 300 matelots sur la Loire, et de les envoyer, sous bonne escorte, à Rochefort, à l'amiral Bruix.
4° Rappeler aux officiers d'artillerie en résidence qu'ils sont responsables des envois de fusils.
5° Ordre au général Thiebault de se rendre à Poitiers, pour y prendre le commandement des troupes qui s'y rendent.
6° Ordre au chef de bataillon Labadie, officier d'artillerie, de se rendre à Bordeaux; cet officier est destiné à s'embarquer.


Paris, 1er avril 1801

Au général Leclerc, commandant le corps d'observation de la Gironde

J'ai reçu votre dernière lettre, Citoyen Général. Le ministre de la guerre va vous faire passer tout ce que vous demandez, surtout ce qui est relation à vos dépenses extraordinaires, dont je sens que vous avez d'autant plus besoin que vous passez dans un pays étranger (Leclerc vient d'être mis à la tête du corps expéditionnaire chargé de soutenir l'Espagne dans sa guerre contre le Portugal. La paix bientôt signée mettra fin à "la guerre des oranges", durant laquelle Leclerc ne combattra pas).

Six demi-brigades d'Italie et du Rhin sont en route pour se rendre à Bordeaux.

Je pense que vous avez donné ordre au bataillon de la 63e, qui était à Saintes, de vous rejoindre.

Vous devez laisser filer votre avant-garde huit on dix jours en Espagne avant de la rejoindre. Passez-en la revue à Bayonne, et puis retournez à Bordeaux, après avoir pris des mesures, pour sa marche, avec les commissaires espagnols.

De retour à Bordeaux, vous organiserez la division qui sera à la disposition de l'amiral Bruix, et celle qui va se rendre à Bordeaux pour, de là, passer en Espagne.


Paris, ler avril 1801

Au citoyen Savary

Aide de camp du Premier Consul, à Rochefort

J'ai reçu votre lettre du 7 germinal. Un million partira d'ici pour Rochefort, le 13 germinal, sous l'escorte de 150 dragons du 19e régiment, qui sont destinés à faire partie du corps d'observation de la Gironde. Il sera rendu à Niort en douze jours.

Il paraît que le contre-amiral Dordelin n'est pas encore parti de Brest; du moins le télégraphe ne m'en a rien appris.

Deux escadrons du 24e de chasseurs, formant 300 hommes , deux bataillons de la 90e, formant 1,000 hommes, deux compagnies d'artillerie, quinze ouvriers d'artillerie et un caisson d'outils, six pièces de canon, partent le 13 pour se rendre à Poitiers, où ils feront partie du corps de la Gironde. Ils pourront, selon les circonstances, être embarqués.

Le général de brigade Thiebault se rend à Poitiers pour y recevoir toutes ces troupes .

Le général Leclerc doit fournir douze pièces d'artillerie avec leur approvisionnement, plusieurs officiers supérieurs d'artillerie et 50 charretiers.

L'amiral Bruix doit avoir soin d'embarquer, indépendamment des fusils, le plus de pièces de rechange qu'il pourra, une centaine d'ouvriers de l'arsenal,, charpentiers, menuisiers, maçons, avec leurs outils, au moins dix grosses bigornes.

J'aurais désiré qu'il pût faire lester une frégate ou une grosse corvette en saumons de plomb, boulets de tous calibres, fers de tous les échantillons; parlez-lui-en pour qu'il le fasse, s'il le peut.


Paris, 1er avril 1801

A l'amiral Bruix

Le citoyen Savary, mon aide de camp, vous fera part, Citoyen Général, de différents détails relatifs aux préparatifs de votre expédition.

Le contre-amiral Dumanoir a arboré, à Cadix, son pavillon sur trois bons vaisseaux que le roi d'Espagne nous a donnés, approvisionnés de vivres pour trois mois. Les officiers doivent être partis en poste de différents ports. Une levée que l'on a faite dans les ports d'Espagne produit 200 matelots français; 74O matelots, provenant de l'expédition du capitaine Landolphe et rendus à Lisbonne, sont en chemin pour Cadix.

Un bataillon de 400 hommes d'infanterie est parti de Toulouse pour se rendre à Cadix.

Ainsi, vous voyez que ces trois vaisseaux se trouveront avoir à peu près la moitié de leurs équipages.

Cinq vaisseaux espagnols qui étaient au Ferrol vont se rendre également à Cadix. Je désire que vous me fassiez connaître si vous pensez qu'il vous convienne, dans le cas où ces cinq vaisseaux ne seraient pas partis, de les joindre à vous en passant, et, dans le cas où ils seraient à Cadix, si vous avez les moyens de compléter les équipages des trois autres vaisseaux qui sont à Cadix et de renforcer d'autant votre escadre.

Tâchez d'emmener avec vous le plus de bricks ou d'avisos ou d goélettes que vous pourrez; prenez-en à Nantes , à Brest, à Bordeaux; vous pourrez les désarmer ensuite à Cadix pour armer les trois vaisseaux. La frégate la Thémis, qui est à Bayonne, avait reçu l'ordre de se rendre à Cadix avec le plus d'équipage possible. Envoyez un officier à Bayonne, pour savoir ce qu'est devenue cette frégate. Vous êtes le maître d'ordonner toute autre manœuvre qui tendrait an même but.

Deux grosses frégates sont aussi sorties du Havre; si elles n'ont pas de mauvaises rencontres et q    u'elles arrivent avant votre départ à Rochefort, elles vous seront d'une grande utilité.

Si les frégates de Nantes sont en état, prenez-les; et, dans le cas contraire, attirez à vous beaucoup de bâtiments légers. J'ai toujours vu que ces petits bâtiments étaient garnis de matelots, et des meilleurs.

La frégate l'Africaine a été prise. Il paraît que l'on avait mis 400 hommes de passage; c'était le double de trop. Nous n'avons aucune nouvelle de la Régénérée.

L'Égyptienne et la Justice sont entrées à Alexandrie.

Le contre-amiral Ganteaume a mis à la voile le 2 germinal. Les anglais n'ont certainement que treize vaisseaux dans la Méditerranée. L'amiral Calder, avec sept vaisseaux, a été à Saint-Domingue.

Les anglais font voile pour la Baltique avec dix-huit vaisseaux.

Si vous pouvez partir dans ces quinze jours, il est probable que vous ferez ce que vous voudrez, au moins pendant un bon mois, où vous irez.


Paris, 2 avril 1801

Au citoyen Gaudin, ministre des finances

Les Consuls voient avec peine, Citoyen Ministre dans lesrapports des conseiller d'état chargés de missions dans les divisions militaires, qu'il existe des différences considérables, dans les comptes des payeurs, entre leurs recettes et leurs payements. Dans presque toutes les divisions, les payeurs laissent arriérer la solde, et gardent en caisse des fonds suffisants pour y faire face.

Les Consuls vous invitent, Citoyen Ministre, à pendre les mesures que vous jugerez les plus convenables pour faire cesser un abus aussi coupable, et pour que les payements s'effectuent à mesure des versements, de manière qu'il ne reste jamais de deniers oisifs dans les caisses despayeurs.


Paris, 2 avril 1801

Au citoyen Gaudin

Il résulte, Citoyen Ministre, des états remis par le payeur de la Rochelle au citoyen Fourcroy, conseiller d'état envoyé dans la 12e division militaire, et vérifiés sur ses registres le 8 nivôse au IX, que la trésorerie avait envoyé 31,653 francs 49 centimes pour la solde de l'an VIII, et que ce payeur a soldé 132,389 fr. 39 cent sur l'an VIII: ainsi, un excédant de 100,735 fr. 90 cent. sans autorisation;

Qu'au 8 nivôse il n'avait soldé que 120,696 fr. 85 cent. sur l'an IX; ce comptable n'avait donc soldé que 253,086 fr. 94 cent dans le premier trimestre, sur les années VIII et IX, taudis qu'il avait reçu: 

1° Pour l'an VIII . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31,653 fr. 49 cent. 
2° Pour l'au IX . . . . . . . . . . . . . . . . .. . . 487,867 fr. 70 cent.
3° En un encaisse an ler vendémiaire, et un versement du receveur général sur les contributions indirectes de l'au VIII . . . . . . . . . . . . . .  . . . . . . . . . .  25,712 fr. 13 cent.
                                                    -----------------------------
                                                                 545,233 fr. 32 cent.

Il n'avait payé que. . . . . .  . . . . . . . . . .   253,086 fr. 24 cent.
Ainsi il y a un excédent de recette de .... 292,147 fr. 08 cent.

que ce payeur gardait dans sa caisse, au lieu de l'employer au payement de la solde.

Cependant, le prêt de la troupe, pour le premier trimestre, était arriéré.

Le Premier Consul vous invite à faire interroger ce payeur, par le préfet, sur ces questions:

1° Pourquoi, au 1er nivôse, n'avait-il pas soldé à la troupe les deux premiers mois, puisqu'il avait l'argent en caisse ?

2° Pourquoi a-t-il soldé, sur l'an VIII, plus qu'il n'était autorisé à payer ?

Le préfet fera dresser procès-verbal des réponses de ce payeur, afin que vous puissiez juger le degré de confiance que mérite ce comptable; et, comme de payeur parait avoir besoin de surveillance, le Premier Consul vous invite, en outre, à ordonner une vérification extraordinaire, pour les six premiers mois de l'an IX, qui détermine ce qu'il a reçu et payé.

Vous verrez, par l'état ci-joint, remis par le payeur de Nantes, qu'il devait, au 1er nivôse, des sommes considérables. Le Premier Consul vous invite à prendre à son égard de semblables mesures.


Paris, 3 avril 1801

DÉCISION

Le Conseil d'État rend compte d'une pétition de demoiselle Charlotte Depuget , demandant le rapport d'un arrêté du Directoire, en date du 25 messidor an Vl. Cet arrêté annulait une décision de l'administration départementale de  la Marne, qui avait déclaré nulles et
illégales les ventes, faites par le district  de Vitry, des domaines de Villers-le-Sec et Maupas appartenant à la pétitionnaire.
 Renvoyé à la section des finances, le Gouvernement n'approuvant pas que, sous quelque prétexte que ce puisse être, la vente d'un bien vendu comme propriété nationale puisse être annulée.

Paris, 3 avril 1801

Au général Berthier, ministre de la guerre

Donnez l'ordre, Citoyen Ministre, au général Chasseloup de commencer, sans perdre de temps, à fermer Porto-Legnago du côté de l'Adige, et dresser un projet en règle pour augmenter, soit par l'inondation, soit par des ouvrages extérieurs, la défense de cette place; de faire reprendre, sans le moindre retard, les travaux de Rocca-d'Anfo : de manière qu'avant la fin de l'année ces deux places se trouvent organisées et susceptibles d'une première défense.

Vous ferez observer au général Chasseloup qu'il doit se procurer, à Porto-Legnago, deux batteries en forme de cavaliers, qui dominent le plus possible la rive opposée.


Paris, 3 avril 1801

Au général Berthier

Il est très-important, Citoyen Ministre, d'avoir de très-bonnes cartes de tout le pays compris entre l'Adige, le Pô et l'Adda.

Je désire que vous nommiez une commission d'ingénieurs géographes pour lever cette partie de l'Italie, qui sera probablement le théâtre de nouvelles guerres, sur la même échelle que la grande carte de l'Italie.

On pourra par la suite, si on le juge à propos, continuer ce travail pour le reste de l'Italie. 

Je désirerais que l'on travaillât à cette carte avec assez d'activité pour qu'elle se trouvât achevée dans le courant de l'an X.


Paris, 3 avril 1801

Au citoyen Forfait, ministre de la marine et des colonies

J'ai lu avec attention, Citoyen Ministre, le projet d'arrêté sur l'organisation des colonies.

Il m'a paru qu'à l'article 10 on pourrait ôter la partie de cet article qui dit que les actes du préfet colonial seront timbrés au nom de la République française et du capitaine général: c'est donner à celui-ci trop d'autorité.

L'article 11 ne m'a pas paru convenable: ce n'est pas le commandant en second qui doit succéder au capitaine général, mais le préfet colonial.

Il m'a paru aussi que les prérogatives du capitaine général étaient un peu trop grandes. Je désire que vous les diminuiez un peu.

Je vous renvoie le projet à l'effet d'y faire les trois changement dont je vous ai parlé. Du reste, je le trouve bien.


Paris, 3 avril 1801

Au citoyen Forfait

Je vous envoie, Citoyen Ministre, des observations sur la consommation des vivres des deux premiers mois de l'an IX. Il en résulte que l'on a l'adresse de nous faire payer la ration20 sous au lieu de 17, et que nous avons distribué par jour plus de 79,000 rations.

Je vous ai demandé, en vous renvoyant l'état de l'an VIII, plusieurs explications qui doivent être également données pour cet état-ci.


Paris, 3 avril 1801

Au citoyen Forfait

Une lettre que je reçois de Flessingue, en date du 9 germinal, Citoyen Ministre, me rend compte qu'il n'y a dans ce port qu'une seule frégate, la Poursuivante, et ne me parle pas de l'Incorruptible.Faites-moi connaître, je vous prie, s'il est arrivé quelque accident à cette frégate.

La même lettre m'annonce que l'équipage de la Poursuivante est arriéré de quinze mois et se trouve dans la plus grande misère. Faites-lui donner deux mois de solde.


Paris, 4 avril 1801

Au citoyen Abrial, ministre de la justice

Le Premier Consul est instruit, Citoyen Ministre, que dans les départements de la Lys, de l'Escaut, des Deux-Nèthes et de Jemmapes, on n'observe nullement les règlements sur les formalités relatives aux écrous des départements. Dans presque toutes les maisons d'arrêt ou de détention, on reçoit un individu sur le simple ordre du commissaire du Gouvernement, au lien d'exiger la représentation du mandat d'arrêt et du jugement, et de les transcrire sur le registre, afin de pouvoir mettre en liberté le condamné à l'expiration de son temps et sans ordres ultérieurs.

Le Premier Consul vous invite à faire cesser cet abus et à procurer la stricte exécution des lois sur cet objet.


Paris, 4 avril 1801

Au général Berthier, ministre de la guerre

J'ai lu, Citoyen Ministre, avec la plus grande attention, les mémoires envoyés par le général Marmont. Ils m'ont paru contenir des dispositions extrêmement sages.

Demandez au général Marmont un rapport sur Alexandrie; pourrait-on faire facilement dans cette place un établissement pareil à celui qu'il propose pour Pavie?
2° Au lieu de diviser l'équipage de siége de l'armée d'Italie en deux équipages, un pour Fenestrelle, et l'autre pour Pavie, il paraîtrait plus convenable d'en former quatre : le premier pour Fenestrelle, le deuxième pour Pavie, le troisième pour Gavi ou Gênes; le quatrième serait dirigé et destiné à passer un jour en Égypte.

Je désirerais que l'équipage de campagne fût divisé en cinq: le premier pour Fenestrelle, le deuxième pour Pavie, le troisième pour Gênes, le quatrième destiné à passer en Égypte, le cinquième pour être placé dans le Valais, dans le lieu où on jugera à propos de construire un petit fort depuis le Simplon à Genève. En attendant que la route soit faite, cet équipage pourrait être placé à Domo-d'Ossola.

Demandez au général Marmont une distribution de toute son artillerie d'après ces différentes données. Il faudra qu'il distribue ses harnais de la même manière.

Demandez-lui si les ordres qui ont été donnés de transporter une portion de l'artillerie de Coni au delà du col de Tende, et une portion de celle de Turin au delà du mont Cenis, ont été exécutés. Dans le cas contraire, qu'il prenne toutes les mesures pour que cela soit fait au commencement de la bonne saison; qu'il fasse construire à la Case et sur le plateau du mont Cenis un hangar en forme de magasin, pour placer cette artillerie, qui est destinée à armer deux forts que le Gouvernement a intention de faire construire pour défendre ces deux vallées.

Quant au grand-duc de Toscane, il faut qu'il lui laisse toute l'artillerie nécessaire pour armer Livourne, surtout du côté de la mer.


Paris, 5 avril 1801

Au général Berthier

Vous ferez connaître, Citoyen Ministre, au général Murat, que dans le mot étape doit être comprise la solde, et que, dans le procès-verbal de ratification, cela sera positivement expliqué, quoique la chose s'entende de soi-même; qu'ainsi le général Soult doit faire dresser un état exact de ses corps, et que la solde sera fournie par la caisse du roi de Naples.

Le général Murat doit renvoyer dans la Cisalpine toutes les troupes cisalpines; il ne doit laisser entrer aucune troupe étrangère dans royaume de Naples.

Le général Monnier ne me paraît pas propre à commander une division à Pescara. Je désire que le général Murat y envoie le général Mathieu.

Le général Murat doit recommander au général Soult,

1° De maintenir une sévère discipline;
2° De ne se mêler d'aucune révolution;
3° De comprimer tous les partis;
4° De faire connaître, ainsi que ses officiers, que nous ne voulons point révolutionner Naples; et que nous sommes aujourd'hui sincèrement réconciliés avec le roi de Naples.

Mon intention est que le général Soult et son état-major aille à la messe les jours de fête, avec la musique; qu'il vive bien avec les prêtres et avec les officiers du roi de Naples;

Que, si le général Soult a 10,000 hommes et s'il y en a 3,000 à Pescara, le général Murat se trouve considérablement soulagé;

Que la division qui restera à Ancône doit y avoir ses étapes;

Que le général Murat prenne toutes ses mesures pour occuper Porto-Longone et Porto-Ferrajo;

Que nous sommes tellement obérés par la rentrée de toutes les armées sur le territoire de la République, qu'il nous est impossible de lui envoyer un sou;

Qu'il prenne toutes les mesures pour que les ressources provenant de la Toscane rentrent fidèlement dans la caisse de l'armée;

Qu'il est indispensable que l'on occupe principalement Tarente, et que l'on fortifie le port de manière que notre escadre s'y trouve à l'abri d'une escadre supérieure;

Que j'attends aujourd'hui que toute l'activité du général Murat se portera à occuper l'île d'Elbe;

Qu'il peut écrire en Corse pour que le commandant prépare, à Bastia ou à San-Pelegrino, une expédition d'un bon bataillon de la 23e pour entrer dans cette île. De la plage de Piombino à l'île d'Elbe il n'y a pas loin. Il me tarde d'autant plus d'apprendre que nous sommes maîtres de cette île, qu'elle nous offre un port très-considérable pour nos escadres.

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Le ministre de la marine a des dépêches à envoyer en Italie; faites-les-lui demander avant d'expédier votre courrier.


Paris, 5 avril 1801

Au citoyen Forfait, ministre de la marine et des colonies

Le 25 de ce mois, les ports de Tarente, d'Otrante, de Brindisi, etc., seront occupés par l'armée d'observation du Midi.

Le général Villeneuve se trouve avec cette avant-garde. Donnez l'ordre au citoyen Menars, qui est en Italie, de s'y rendre également.

Envoyez deux capitaines de frégate, deux lieutenants et quatre enseignes, pour être employés aux différents commandements des ports de cette presqu'île.

Donnez l'ordre à tous les officiers et matelots qui sont sur les lacs d'Italie de se rendre à marche forcée sur Tarente, pour y être mis sous les ordres du contre-amiral Villeneuve.

Écrivez pour que les Turcs remettent à Otrante ou à Tarente tous les marins qu'ils doivent nous renvoyer.

Envoyez un ingénieur de marine, afin de connaître les ports de la terre d'Otrante, en prendre les plans et les sondes; il travaillera sous la direction du contre-amiral Villeneuve.

Le contre-amiral aura le titre de contre-amiral commandant la marine de l'armée d'observation du Midi; le citoyen Menars, celui de chef d'administration: il sera sous les ordres du premier.

Faites connaître par une instruction détaillée au contre-amiral Villeneuve ce qu'il a à faire :

1° Reconnaître celui des ports d'Otrante, de Tarente, de Brindisi ou tout autre, qui pourrait recevoir une flotte de vingt vaisseaux, la protéger contre une escadre ennemie plus forte; fixer dans ce port le chef-lieu de l'administration de la marine; prendre sur-le-champ des mesures pour armer quelques batteries, de manière défendre cette rade;
2° Faire partir plusieurs petits bâtiments pour l'Égypte; en expédier un à Derne, qui ira mouiller à Bombah, où il doit y avoir un établissement français;
3° Faire connaître en Égypte les ports où les frégates pourront entrer, ceux qui recevraient des vaisseaux de guerre, et enfin ceux qui recevraient tous les petits bâtiments.

Recommandez à ce général de vous instruire promptement et détail de toutes les nouvelles de la mer et spécialement de l'Égypte et de vous faire le plus tôt possible la description des principaux ports et des sondes.

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Le ministre de la guerre fait partir un courrier; vous pouvez lui envoyer vos dépêches.


Paris, 6 avril 1801

Au général Berthier, ministre de la guerre

Par les différents traités, Citoyen Ministre, les deux parties de l'île d'Elbe qui appartenaient an grand-duc de Toscane et au roi de Naples appartiennent aujourd'hui à la République; il est question d'en prendre possession le plus tôt possible.

Donnez l'ordre au général Murat de faire partir de Livourne et de Piombino deux expéditions, et de ne négliger aucun moyen de s'emparer de cette île.  

L'île de Capraja peut être un point de départ très-favorable.

Donnez l'ordre au citoyen commissaire en Corse, de faire partir des côtes de Corse une expédition de 5 ou 600 hommes, qui partirait en même temps que celles de Livourne et de Piombino, afin de prendre possession de l'île d'Elbe.

Je désirerais envoyer un commissaire extraordinaire pour gouverner momentanément l'île d'Elbe.

Faites-moi connaître si le citoyen Saliceti est dans le cas de remplir cette mission.

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Le ministre de la marine fait partir un courrier pour Toulon; envoyez-lui vos dépêches.


Paris, 6 avril 1801

Au citoyen Forfait, ministre de la marine et des colonies

Je vous prie, Citoyen Ministre, de faire connaître par un courrier extraordinaire au préfet maritime à Toulon que la paix a été conclue avec le roi des Deux-Siciles(depuis le 29 mars, à Florence); que tous ses ports sont fermés aux Anglais et ouverts aux Français;

Que le lieutenant général Soult et le contre-amiral Villeneuve occupent la terre d'Otrante et les ports de Tarente, Brindisi et Otrante;

Qu'il expédie le plus promptement possible un bâtiment à Tanis, pour y porter cette nouvelle; un autre à Tripoli; un troisième directement en Égypte.

Les deux premiers bâtiments auront l'ordre de se rendre de Tunis et de Tripoli dans l'endroit où ils croiront trouver le contre-amiral Ganteaume, pour lui annoncer cette nouvelle.

Le préfet engagera également quelques corsaires particuliers à se rendre à Brindisi et à Otrante, d'où ils seront à même de faire une grande quantité de prises des bâtiments anglais venant et allant de
Trieste et de Venise.

Vous donnerez l'ordre au préfet maritime de faire partir le plus tôt possible les frégates la Bravoure, le Succès, la Carrère, la Muiron, pour Livourne. Ces bâtiments doivent servir à l'occupation de l'île d'Elbe (cette occupation est prévue dans le traité de paix) . Si ces bâtiments ne sont pas prêts à la fois, il les fera partir deux à deux.

Il fera également partir pour Livourne, et pour le même objet, la demi-galère et deux ou trois chebecs de la même force, propres à escorter des petits bateaux destinés à faire une descente dans cette île.

Écrivez, par la même occasion, au citoyen Miot, en Corse, pour lui annoncer la paix avec Naples, et lui faire connaître l'utilité dont serait une expédition de 500 hommes qui s'embarquerait sur la côte de Corse pour aborder à l'île d'Elbe. Il faudrait avoir soin d'y joindre quatre pièces d'artillerie. Cette opération aurait lien dans le même temps où le général Murat ferait partir de Livourne et de Piombino différentes expéditions pour prendre possession de cette île.

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Le ministre de la guerre a des dépêches à faire passer en Corse, envoyez-les-lui demander.


Paris, 6 avril 1801

Au citoyen Forfait

Vous trouverez ci-joint, Citoyen Ministre, les dépêches que je reçois de Brest. Faites connaître au préfet maritime que j'attache la plus grande importance à la prompte arrivée du contre-amiral Dordelin (Alain-Joseph Dordelin, 1764-1826) à Rochefort. Si, pour protéger son départ, il est nécessaire que le général Gravina (Charles Gravina, 1756-1806, amiral espagnol - assurera la protection de l'expédition de Saint-Domingue) sorte, il pourra, à sa volonté, rentrer à Brest ou se rendre à Rochefort, où il complétera tous ses vivres et se trouvera en mesure de faire toute autre expédition.


Paris, 7 avril 1801

ORDRES DICTÉS AU CITOYEN TALLEYRAND

Envoyer le traité du 21 mars 1801 avec l'Espagne au citoyen Moreau Saint-Méry, à Parme, qui le communiquera officiellement à la régence, et, dès lors, la régence est dissoute. L'infant pourra s rendre ou à Florence, ou à Venise, ou à sa campagne. On lui coutinuera le même traitement jusqu'à ce que tout soit définitivement arrangé. Le château de Colorno et tous les meubles, argent, bijoux, papiers, le comte Ventura s'en emparera au nom de son pays.

L'administration du pays restera telle quelle est, mais tout se fera au nom de l'administrateur général; les impositions, les revenus, etc., au jour de la mort de l'infant, appartiennent à la République française; avant la mort, ils appartiennent au roi de Toscane. Du reste, faire les choses le plus largement possible; rien ne nous appartient que la souveraineté du territoire, depuis le moment de la mort. Le régiment qui composait les troupes de l'infant passera au service du roi d'Étrurie; il se rendra en Toscane et sera dirigé sur Florence.

Toutes les pensions de retraite seront continuées à être payées, ainsi que les dettes qui sont une charge du sol. Les gardes du corps et tout ce qui composait la cour resteront à Colorno à faire leur service auprès des princesses filles, et seront payés jusqu'à l'arrivée à Florence du roi d'Étrurie.

Le général Murat enverra son régiment de cavalerie et une demi- brigade d'infanterie avec un seul général de brigade pour commander les troupes, en lui faisant connaître que le citoyen Moreau Saint-Méry est l'administrateur du pays, dont il appuiera les mesures.

Envoyer un seul commissaire des guerres pour l'administration des troupes, que le citoyen Moreau Saint-Méry fera payer sur les revenus du pays.

Faire connaître à M. Azara les mesures que l'on a prises, pour qu'il en informe son cabinet.

Faire dire que nous ne voulons pas de ce pays.

La question est de savoir si nous le réunirons à la République italienne ou si nous le réunirons au royaume de Toscane. Si le roi d'Espagne veut qu'il soit réuni à la Toscane, il faut qu'il nous donne les Florides.


Paris, 7 avril 1801

DÉCISION

Le chef de brigade Marpaude demande une indemnité pour payer ce qu'il doit au général Lannes et pour se rendre dans son pays. Il prie le premier Consul de donner des ordres pour que le jeune Colignon, dont le père a été tué à Saint-Jean-d'Acre, soit admis au PrytanéeRenvoyé au général Lannes pour lui donner ce dont il a besoin, et lever toutes les difficultés qui s'opposent à l'entrée du citoyen  Colignon au Prytanée. Je rendrai au général Lannes tout ce qui sera nécessaire.

Paris, 7 avril 1801

Au citoyen Forfait, ministre de la marine et des colonies

Vous trouverez ci-joint, Citoyen Ministre, le rapport du général Desfourneaux (sur le combat de l'Africaine). Vous voudrez bien en faire faire un grand nombre de copies, que vous adresserez à chaque vice-amiral, contre-amiral, capitaine de vaisseau, de frégate, lieutenant de vaisseau, de frégate, etc. Vous leur ferez sentir l'inconvénient qu'il y a de vouloir toujours tirer à démâter, et combien est vrai, dans toutes les circonstances, ce principe qu'il faut commencer par faire le plus de mal possible à son ennemi.

Vous écrirez au général Desfourneaux une lettre de satisfaction sur la bonne conduite qu'il a tenue pendant le combat.


Paris, 8 avril 1801

Au citoyen Forfait

Le roi d'Espagne, Citoyen Ministre, vient de nous accorder trois autres vaisseaux à Cadix. Il est indispensable de faire partir sur-le-champ et en poste les états-majors et les officiers mariniers les plus essentiels pour l'armement des vaisseaux. L'ambassadeur espère pouvoir réunir à Cadix 200 matelots français, qui, joints aux 400 envoyés de France, feront un fond de 200 hommes par vaisseau.

En outre, les matelots suédois et danois des bâtiments sur lesquels on a mis l'embargo demandent du service, pourvu qu'on leur paye une avance sur le traitement. Expédiez un courrier au citoyen Dumanoir à Cadix, pour vous entendre avec lui sur ces objet. Faites un fonds à Cadix, tant pour payer quelques mois d'avance aux matelots que pour accélérer les armements des vaisseaux. Faites-moi connaître ce que vous aurez fait sur ces différents objets. J'espère que toutes les mesures que vous prendrez seront telles, que, dans un mois, les vaisseaux pourront mettre à la voile.


Paris, 9 avril 1801

DÉCISION

A la suite de deux traités avec l'Espagne, Lucien Bonaparte demande le portrait du Premier Consul pour le Prince de la Paix, et divers présents
pour le premier secrétaire et le premier officier de la secrétairerie, à Madrid
1° Le Gouvernement français  ne donne de présents que pour  les traités de paix et d'alliance.
2° Aucun des traités ci-dessus n'est dans ce cas. Pour la paix de Portugal , on fera les présents d'usage.
3° Rien de ce qui se fait n'est au hasard. Le rôle d'un ambassadeur est beau lorsqu'il remplit ses instructions et aide par là le développement des plans généraux.
4° Je n'enverrai jamais mon portrait à un homme qui tient son prédécesseur au cachot et qui emploie les moyens de l'inquisition. Je puis m'en servir, mais je ne lui dois que du mépris. 

Paris, 9 avril 1801

Au citoyen Talleyrand, ministre des relations extérieures

Vous trouverez ci-joint, Citoyen Ministre, une lettre pour le Directoire exécutif de la République batave. Je désire que vous la remettiez sous cachet volant au Citoyen Schimmelpennick, que vous lui en donniez lecture, et que vous lui disiez que ce que je dois à ceux qui ont combattu avec gloire s'oppose à ce que j'empêche le retour du général Augereau en Batavie; mais qu'on lui fera donner des ordres positifs pour qu'il ne s'immisce pas dans les affaires civiles et politiques, et que, dès l'instant que l'honneur du général Augereau sera à couvert, on fera en sorte d'envoyer en Batavie l'homme qui conviendra au Directoire.


Paris, 9 avril 1801

Au Directoire exécutif de la République Batave

Citoyens, les soldats qui défendent leur patrie méritent l'estime et reconnaissance de leur gouvernement. Ils ne sont pas plus stipendiés que les rois, princes ou magistrats, sous quelque titre que ce soit, qui gouvernent le pays.

Le général Augereau a des droits, par la bonne conduite qu'il a tenue à la tête de l'armée qui est en Batavie, à quelques remerciements de la part de la République batave.

Il se rend en Batavie pour y réunir son armée, la cantonner, vous voir.

Il est trop bon soldat pour ne pas connaître les égards qu'il doit au gouvernement dont il est l'ami; mais aussi le gouvernement devrait mettre plus de loyauté à le défendre.


Paris, 9 avril 1801

Au président du 

Citoyen Président du Directoire exécutif de la République batave, j'ai reçu la lettre que vous m'avez écrite de la part de votre gouvernement. Faites-lui connaître, je vous prie, que, dans toutes les circonstances et dans toutes les occasions, je lui donnerai des preuves de la bienveillance et de l'amitié qui lient les deux peuples.

Vous paraissez désirer, par votre lettre, que le général Augereau ne conserve pas longtemps le commandement de votre armée.

Vous ne pouvez pas vouloir déshonorer celui qui a commandé vos troupes avec gloire et succès, et contribué à votre indépendance.

Vos ancêtres confièrent à la Maison d'Orange la première magistrature en récompense de ses services militaires. Ils ne croyaient pas que les militaires fussent de simples stipendiés. Ils savaient qu'ils leur devaient plus que de l'argent: de l'honneur, de la considération, et au moins de la justice.

Citoyen Président, je désire être agréable à votre gouvernement. Je me flatte qu'il voudra bien s'en rapporter à moi dans cette circonstance.


Paris, 9 avril 1801

Au citoyen Talleyrand, ministre des relations extérieures

Je vous renvoie votre projet de constitution de l'Helvétie; il ne m'a pas paru qu'il y eût rien de bien. J'ai cherché un moyen de les concilier, et vous trouverez ci-joint quelques articles principaux : remettez-les-moi bien développés et avec les changements que vous croirez nécessaires, et cela en gardant le plus possible le secret, afin de tâcher d'en finir le plus promptement possible.


Paris, 11 avril 1801

À l'amiral Bruix, à Rochefort

Le roi d'Espagne, Citoyen Général, nous a donné trois nouveaux vaisseaux.

Le contre-amiral Ganteaume est rentré à Toulon. Il y a été obligé par un abordage qui a eu lieu entre le Dix-Août et le Formidable. Il faudra dix ou douze jours pour réparer le Dix-Août.

Le contre-amiral Dordelin trouve beaucoup de difficultés dans sa sortie. Je crains qu'il ne nous fasse perdre une grande partie de la campagne. Je désirerais que vous partissiez de Rochefort avec vos cinq vaisseaux, le plus de frégates et de matelots possible, pour vous réunir à Cadix avec les six vaisseaux du contre-amiral Dumanoir et les cinq vaisseaux du Ferrol qui doivent en être partis, à l'heure qu'il est, pour Cadix. Ces forces, jointes aux sept vaisseaux du contre-amiral Ganteaume, vous mettraient à même de remplir également votre mission. Les forces du contre-amiral Dordelin et de l'amiral Gravina, jointes aux vaisseaux bataves et à ceux que l'on arme à Brest, agiraient de manière à donner beaucoup d'occupation aux Anglais.

Au reste, ceci ne serait que dans le cas où le contre-amiral Dordelin ne pourrait pas sortir. Le ministre le presse tous les jours par le télégraphe.

J'attends le retour de mon courrier pour envoyer de nouveaux ordres au contre-amiral Ganteaume.

Le lieutenant général Soult occupe Otrante, Tarente, Brindisi, etc.

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Dans ce nouveau projet, penseriez-vous qu'il fût bon que le contre-amiral Ganteaume vînt à votre rencontre jusqu'au détroit? il porterait 7 ou 800 matelots à Cadix.


Paris, 12 avril 1801

Au citoyen Joseph Bonaparte

L'empereur de Russie est mort, dans la nuit du 24 au 25 mars (En fait, Paul Ier a été assassiné, le 11 mars), d'une attaque d'apoplexie. La vive douleur que je ressens de la mort d'un prince auquel je portais tant d'estime ne me permet pas d'entrer dans de plus grands développements. Son fils aîné lui a succédé et a reçu le serment de l'armée et de la capitale.


Paris, 12 avril 1801

Au citoyen Talleyrand, ministre des relations extérieures

Je vous prie, Citoyen Ministre, d'envoyer au citoyen Otto la note ci-jointe. Vous lui ferez connaître que je désire qu'après avoir présenté cette note il tâche que l'on fasse arrêter Dutheil et Georges, et que, si on ne les livre pas au Gouvernement français, au moins on les tienne en arrestation pour qu'on les envoie en Amérique.


Paris, 12 avril 1801

ANNEXE À LA NOTE PRÉCÉDENTE

Le soussigné a reçu l'ordre de son gouvernement de présenter à S. Exc. M. Addington la note suivante:

L'Europe a retenti de l'événement du 3 nivôse (la machine infernale). Le crime qui, pour attenter à la vie du Premier Consul, a compromis la population innocente d'une partie de la ville de Paris, a un caractère d'horreur presque sans exemple dans l'histoire moderne.

Le Premier Consul est bien loin de penser que l'ancien ni le nouveau ministère soit capable d'avoir ni soldé ni commandé un crime qui serait désavoué parmi les hordes les moins civilisées.

Cependant le nommé Dutheil et le nommé Georges, tous les deux en Angleterre et soldés par le Gouvernement britannique, sont les ordonnateurs de ce crime et de beaucoup d'autres ayant tous pour résultat de tuer quelques malheureux. Deux journalistes soldés ont publiquement fait, à Londres, l'apologie de ce crime et manifesté des regrets de ce qu'il n'a pas réussi.

L'état de guerre qui existe entre les deux peuples a sans doute brisé une partie des liens qui unissent naturellement les peuples voisins. Mais les Anglais et les Français, pour être en guerre, en sont-ils moins, les uns et les autres, une nation civilisée et européenne? et le droit des gens, qui adoucit les maux de la guerre, ne défend-il pas d'accorder protection à des monstres qui déshonorent la nature humaine ?

C'est à Sa Majesté Britannique à agir, dans cette circonstance, selon les sentiments de sa conscience, les lois de sa religion et les principes de sa politique.

Quant au Premier Consul, il déclare hautement que, si un pareil crime avait été commis à Londres, il se serait empressé de faire arrêter et livrer aux tribunaux d'Angleterre les auteurs de ce crime, bien plus, si un individu, après avoir attenté à la vie du prince ou d'un de ses principaux ministres, eût cherché son refuge en France, le Premier Consul en eût agi comme Fabricius vis-à-vis du roi d'Épire.


Paris, 12 avril 1801

Au général Berthier, ministre de la guerre

Vous trouverez ci-joint, Citoyen Ministre, un arrêté. Vous ferez attention qu'il est antidaté de dix jours; cela est fait avec intention. Vous en ferez faire la remarque an général Jourdan pour qu'il n'en soit pas étonné.

Vous direz au général Jourdan que je désire qu'une des six subdivisions ou préfectures soit Verceil. Cette préfecture devrait s'étendre jusqu'à la Dora-Baltea, sans cependant comprendre le territoire d'Ivrée ni la vallée d'Aoste.

Une autre subdivision devra être celle d'Alexandrie, qui, outre ses 400,000 habitants, devra comprendre tout le district de Voghera, depuis la Scrivia jusqu'à Acqui.

Donnez au général commandant l'armée d'Italie l'ordre d'envoyer dans le Piémont jusqu'à concurrence de six demi-brigades, six régiments de cavalerie, un bataillon d'artillerie avec des pièces et des attelages.

Recommandez à l'administrateur général de placer une demi-brigade dans chaque chef-lieu de préfecture, et de cantonner la cavalerie dans les lieux les plus convenables. Outre le pain, les soldats devront avoir, en Piémont, de la viande ou une indemnité. Comme le roi de Sardaigne avait toujours une armée de 90,000 hommes, il y aura des bâtiments et des lits militaires.

Il faut que l'administrateur général trouve dans les ressources du pays les masses et la solde des troupes, jusqu'à ce que, au ler messidor, les revenus du Piémont rentrant dans le trésor public, vous y pourvoyiez.


Paris, 12 avril 1801

ANNEXE A LA PIÈCE PRÉCÉDENTE

Les Consuls de la République, voulant remédier aux abus de tout espèce qui se commettent dans le Piémont, et aux différentes plaintes; résultats inévitables de l'anarchie qui désole cette belle contrée, arrêtent provisoirement les dispositions suivantes :

TITRE 1er

ADMINISTRATION MILITAIRE

ARTICLE ler. - Le Piémont formera une division militaire, dont le quartier général sera à Turin.
ART. 2. - Le général commandant la division devra, dans tous les cas extraordinaires, obtempérer aux réquisitions de l'administrateur général. Il correspondra directement avec le ministre de guerre.
ART. 3. Cette division militaire sera partagée en six subdivisions; chacune d'elles sera commandée par un général de brigade.
ART. 4. Il y aura dans le Piémont un ordonnateur et deux commissaires des guerres.
ART. 5. Il y aura une direction d'artillerie et du génie, organisée conformément au règlement du 15 nivôse an VIII.
ART. 6. Le nombre des commandants d'armes qu'il devra avoir dans le Piémont sera déterminé par l'administrateur général, d'après les bases établies par le règlement du 26 germinal an vill. Le traitement des commandants d'armes sera déterminé conformément au même règlement.
ART. 7. Les étapes seront organisées suivant le mode prescrit par le règlement du 1er fructidor an VIII et par les arrêtés des 19 frimaire et 19 pluviôse an IX.
ART. 8. A compter du ler messidor prochain, les services de la division du Piémont, en vivres, fourrages, etc., seront faits par les mêmes compagnies qui font le service des divisions de la République.

TITRE II.

ADMINISTRATION CIVILE

ART. 9 Le général Jourdan est nommé administrateur général du Piémont.
ART. 10. L'administrateur général aura un conseil composé de six membres; les membres composant le gouvernement actuel du Piémont feront partie de ce conseil.
ART. 11. Chaque subdivision militaire formera une préfecture; elle aura un préfet et un conseil de préfecture.
ART. 12. Chaque préfecture sera divisée en quatre, ou au plus en six sous-préfectures, ayant chacune un sous-préfet.
ART. 13. Il y aura dans chaque municipalité un maire et des adjoints.
ART. 14. Il y aura dans chaque préfecture, sous-préfecture et municipalité, un conseil général, le tout conformément à la loi du 28 pluviôse an VIII.

TITRE III

FINANCES.

ART. 15. Le ministre des finances enverra dans le Piémont un commissaire extraordinaire, qui, sous la direction de l'administrateur général, organisera le service de la trésorerie.
ART. 16. Il est sursis à la vente des domaines nationaux dans le Piémont, de quelque nature qu'ils soient.
ART. 17. Le ministre des finances y enverra un régisseur de l'enregistrement, pour y organiser l'administration des domaines nationaux.

TITRE IV

ART. 18. L'organisation de l'ordre judiciaire civil sera établie, pour le Piémont, suivant le mode déterminé par la loi du 27 ventôse an VIII et par celle du 29 ventôse an IX.
ART. 19. Il y aura à Turin un tribunal d'appel pour tout le Piémont.
ART. 20. La justice criminelle sera rendue par des tribunaux spéciaux, composés de trois juges et de cinq militaires.
ART. 21. Les Barbets et tous les individus pris les armes à la main seront jugés par des commissions militaires extraordinaires.
ART. 22. L'ordre judiciaire du Piémont ressortira du tribunal de cassation de la République. Le ministre de la justice enverra un substitut du commissaire près le tribunal de cassation, pour, sous la direction de l'administrateur général, organiser l'ordre judiciaire.

TITRE V

POLICE

ART. 23. La police sera administrée, dans le Piémont, suivant le mode établi par la loi du 28 pluviôse an VIII et par celles des 27 ventôse même année et 7 pluviôse an IX.
ART. 24. Il y aura une division de gendarmerie organisée conformément à la loi du 28 germinal an VI et aux règlements sur cette matière. Le ministre de la guerre enverra, à cet effet, un général de gendarmerie à Turin.
ART. 25. Les ministres sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent arrêté, qui ne sera pas imprimé.


Paris, 12 avril 1801

Au général Berthier, ministre de la guerre

Le Premier Consul a fait, Citoyen Ministre, sur les états remis par le bureau des remontes, différentes observations sur lesquelles il désire que vous lui fassiez un rapport.

Le dépôt de Versailles a reçu 3,103 chevaux, suivant l'état remis par le commandant du dépôt; cependant l'état n° 3, remis par le bureau des remontes, porte à 3,512 les chevaux fournis par sept fournisseurs. Il y avait au dépôt de Versailles, au 1er vendémiaire, 10 chevaux; il se trouverait donc dans les fournitures des entrepreneurs un déficit de 454 chevaux.

Les états de recette du commandant du dépôt de Versailles ne font pas mention des 1,226 chevaux portés dans l'état n° 4,comme livrés par le Bec, de 209 chevaux livrés par le dépôt de Rouen, des 209 chevaux livrés par le dépôt de Vaugirard, d'un cheval livré par le dépôt de Compiègne, quoique ces quantités de chevaux soient portées en recette dans les états de ces différents dépôts, Si ces différentes livraisons avaient été effectuées et étaient parvenues au dépôt de Versailles, ce dépôt devrait rendre compte de 1,504 chevaux, indépendamment des 454 ci-dessus.

Le dépôt du Bec, d'après ses états, se trouverait avoir envoyé à Milan 2,235 chevaux; à Turin, 700; à Pavie, 884; à l'armée d'Italie, 200. Ce dépôt aurait donc envoyé en Italie 4,019 chevaux. Cependant le dépôt de Rouen, d'après ses états, se trouve avoir envoyé en Italie 400 chevaux; celui de Vaugirard, 100 chevaux; celui de Versailles, 1,151 ; ce qui ferait 5,670 chevaux envoyés en Italie, indépendamment des livraisons opérées par le dépôt de Lyon, qui a été exclusivement destiné à cette armée. Le résultat est contraire à toute vraisemblance. Le dépôt du Bec, suivant ses états, aurait envoyé à Sampigny 1,400 chevaux, qui, joints à 39 chevaux envoyés de Versailles, à 431 de Rouen, à 132 de Vaugirard, et à 124 livrés par le dépôt de Lyon, pour les équipages des vivres, formeraient au dépôt de Sampigny une recette de 2,196 chevaux. Cette quantité suffirait, et au delà, à l'attelage de 500 caissons, et présente un résultat tout aussi peu probable que le précédent.

D'après les états, le dépôt de Vesoul aurait reçu 101 chevaux, dont on justifie; mais on ne porte pas dans la recette 300 chevaux livrés par le dépôt de Rouen, 8 par celui de Mons et 171 par celui de Compiègne; ce qui forme une recette de 479 chevaux; la dépense n'étant que de 101, il reste à justifier de l'emploi de 378.

Quant au dépôt de Lyon, il paraît extraordinaire que l'on n'en ait aucun compte, depuis le 8 frimaire. Il devra justifier de l'emploi non-seulement de 718 chevaux livrés par les fournisseurs, mais encore de 785 envoyés par le Bec, de 416 envoyés par Rouen, d'un cheval envoyé par Vaugirard et de 385 envoyés par Compiègne : total, 2,305. On justifie de l'emploi de 232 chevaux, il reste à justifier de celui de 2,073 chevaux.

Indépendamment de ces observations, plusieurs autres irrégularités ont frappé le Premier Consul, relativement aux livraisons faites aux dépôts et à celles effectuées à différents corps.

On ne peut arriver à des résultats satisfaisants qu'en ayant pour l'an IX un état pareil à celui, sous le n° 2 pour la levée de l'an VIII.

Le Premier Consul désire,

1° que vous suspendiez toute espèce de fournisseurs de chevaux;
2° qu'il lui soit remis deux états pareils à celui n° 2, l'un, des chevaux fournis en l'an VIII et de leur répartition aux différents corps, l'autre, des chevaux fournis pour l'an IX, avec leur répartition.

Il vous invite, en même temps, à préparer un projet d'arrêté ayant pour objet d'établir le mode d'après lequel doit s'opérer la retenue des chevaux donnés aux corps pour l'an IX.


Paris, 13 avril 1801

Au citoyen Talleyrand, ministre des relations extérieures

Faites connaître, Citoyen Ministre, au général Jourdan que le ministre de la guerre lui envoie un arrêté qui règle provisoirement l'administration civile et militaire du Piémont. Mandez-lui que cette organisation est bien un premier pas vers la réunion, mais que ce pas n'est point décisif; qu'il doit donc se conduire, dans cette circonstance, avec la plus grande circonspection.

Il doit avoir pour point de vue l'effet que pourraient produire ses démarches et ses propos sur les puissances étrangères et sur l'intérieur du pays.

Sur les puissances étrangères: il doit s'efforcer de faire connaître que cette mesure a été prise pour remédier aux maux et aux abus qui se commettent par les agents français et piémontais.

Sur l'intérieur du pays : il doit se servir du principe d'amalgame qui a réussi au Gouvernement français: étouffer toutes les haines, et surtout montrer une grande considération pour les prêtres. Je désire qu'il aille à la métropole, tous les jours de fête, occuper avec le Gouvernement la place d'honneur; qu'il m'envoie à Paris six individus avec le titre de notables du Piémont. Je voudrais que, parmi ces six, il y en eût deux qui entendissent l'état de leurs finances, deux l'administration intérieure, deux les affaires temporelles et religieuses de leurs prêtres; qu'il y eût des hommes considérables par leur naissance et cependant d'un esprit un peu raisonnable. Ces députés donneraient au Gouvernement tous les renseignements nécessaires pour achever l'entière réunion du pays, soit en reculant les barrières des douanes, soit par une similitude d'organisation départementale.

 Il peut, d'ailleurs, dans ses propos de tous les jours, faire comprendre que, quelque chose qu'il arrive, il n'est pas probable que le Gouvernement français consente jamais au retour du roi de Sardaigne, puisque les revenants ne peuvent jamais être d'un bon augure pour ce Gouvernement.

Faites connaître à M. de Saint-Marsan que j'ai été tellement mécontent de la manière dont le roi de Sardaigne s'est montré dans ces circonstances, et du peu de confiance qu'il a montré en moi et dans le Gouvernement, que je suis plus éloigné que jamais de lui faire du bien; que je consens encore à le reconnaître pour prince de Sardaigne, mais que je veux que M. de Saint-Marsan parte sur-le-champ pour Naples, pour faire connaître au roi de Sardaigne que je ne recevrai aucun plénipotentiaire qu'au préalable l'embargo ne soit mis sur les bâtiments anglais dans tous les ports de la Sardaigne, et que tous les émigrés corses et agents anglais, qui excitent les insurgés de Porto-Vecchio et les malheurs de la Corse, soient arrêtés et livrés à Bonifacio. Vous lui donnerez des passe-ports pour qu'il parte demain au soir; vous lui direz qu'il pourra revenir lorsque les deux conditions ci-dessus seront remplies.

Si M. de Lucchesini vous en parle, vous ne lui répondrez point; vous lui direz que nous n'avons pas discuté avec le roi de Prusse les affaires d'Italie.

Vous direz à M. de Kalitchef que j'ai été indigné du peu d'égards que m'a montré le roi de Sardaigne dans toutes ces négociations; que d'ailleurs le duc d'Aoste, qui est en Sardaigne, ne cesse d'envoyer du blé à Malte, d'aider les Anglais, d'inquiéter nos bâtiments, de fomenter des troubles en Corse; que tant d'insultes d'un souverain qui n'existe plus m'ont fait perdre la patience; que, du reste, rien n'est décidé ai perdu.


Paris, 13 avril 1801

Au citoyen Fouché, ministre

Voici, Citoyen Ministre, des notes sur la fidélité desquelles je peux compter:

1° Georges a fait passer de l'argent dans le Maine
2° Chandelier, que vous connaissez, est à Londres.
3° Le 20 germinal, à deux heures, on a rencontré dans la rue de la Loi deux individus nommés Eward; ce sont deux frères. Ils sont connus chez Georges sous le nom de Barco. Ils sont nés dans les environs d'Elven. Ils sont les satellites de Georges et ses expéditionnaires habituels.

L'aîné est d'une taille mince et petite. Le jeune est petit, d'une figure brune et pleine. Ils sont tous les deux déguisés; quoiqu'ils aient de bons yeux, ils portent des lunettes, pour tromper. Le jeune a de longs favoris.

Un troisième sabreur de Georges a été vu à Paris, le 20 germinal, au palais du Tribunat, à sept heures du soir; son nom de guerre est Sans-Quarlier.

Guillot, qui va fréquemment de Paris à Versailles, a reçu dernièrement 15,000 francs de Hambourg; il doit bientôt en recevoir autant. C'est un de leurs associés, ainsi qu'un nommé Brancas, dont on ignore le véritable nom.

Tous ces individus sont dirigés par Limoëlan.

On dit que le commissaire de Versailles est un homme intelligent. Il serait peut-être utile que vous le fissiez venir, et que vous lui accordassiez des fonds pour établir une police secrète dans le département de Seine-et-Oise. Offrez 12,000 francs à celui qui fera arrêter Limoëlan, et 6,000 francs pour les autres.

Faites mettre Carrega dans les cachots de Bicêtre, et faites-le interroger sur ces individus, en lui ôtant toute communication. Faites arrêter la femme de ce Carrega.

Renvoyez de Paris, en surveillance dans leur département, le frère Aréna (Joseph Aréna, 1771-1802, l'un des auteurs présumés de la conspiration des poignards) et Multedo, ainsi que Gauthier (de l'Ain).

Parmi les individus de Georges que vous tenez, il vous sera facile, en les faisant interroger, d'avoir des renseignements sur ceux dont je vous parle. Peut-être que la famille Carbon et Carbon (François Joseph Carbon, 1756-1801. L'un des principaux artisan de l'attentat de la rue Saint-Nicaise, à cette date en prison) lui-même pourraient vous donner des renseignements sûrs.


Paris, 13 avril 1801

Au général Leclerc, commandant le corps d'observation de la Gironde

J'espère qu'à l'heure qu'il est, Citoyen Général, vous êtes entré sur le territoire espagnol.

Faites-moi connaître l'état de situation précis de chacun de vos corps en infanterie, cavalerie et artillerie, avec les généraux et adjudants commandants. Tirez-moi de peine au sujet de l'habillement; je serais fâché que ces troupes fussent vêtues d'une manière inconvenante. Entrez dans des détails sur cet objet. Vous recevrez vos vivres du roi d'Espagne, mais le trésor publie vous enverra la solde. Faites-moi connaître si celle de germinal et de floréal est assurée.

Si les corps qui sont destinés à marcher, artillerie, infanterie, cavalerie, sapeurs, tout compris, ne se montent pas à 8,000 hommes, faites marcher sur Bayonne les bataillons des 92e et 93e demi- brigades. Dans ces 8,000  hommes doivent cependant être compris les trois bataillons de l'Ouest, que vous aurez toujours le temps d'envoyer à Cadix, si, avant que les opérations commencent, les demi- brigades d'Italie ne sont pas arrivées.

Sans avoir aucune espèce de luxe, il est cependant convenable que vous ayez le train nécessaire pour faire les honneurs de votre corps.

Ayez soin de mettre à l'ordre que vous recommandez aux officiers et aux soldats de faire honneur à la nation française, non-seulement par leur bravoure, mais encore par leur discipline et par leur respect pour les coutumes et préjugés des peuples qu'ils traverseront. Je verrais avec plaisir que les chefs des corps allassent à la messe avec leur musique les jours de fête, et que, dans les villes où il y a un évêque, on lui fit une visite de corps, comme c'est l'usage chez eux.

Le bataillon de la 16e a ordre de se rendre à Bayonne; activez-en le départ de la 10edivision : il n'a pas besoin d'attendre les troupes qui le doivent remplacer.

J'imagine que chaque demi-brigade a sa musique, que l'on pourrait babiller avec quelque luxe.


 Paris, 13 avril 1801

DÉCISION

AU MINISTRE DE LA MARINE

Nous ne pouvons vous donner une réponse satisfaisante sur l'abordage des vaisseaux le Formidable et le Dix-Août.Le procès-verbal d'abordage du premier et le simple rapport du capitaine Le Gouardun au général Ganteaume se contredisant, ces deux pièces ne peuvent suffire pour porter un jugement qui doit être prononcé par un conseil de guerre, à bord de l'amiral, sur les tables de loch, et sur les questions faites aux officiers en service sur ces
vaisseaux. Ces événements se multiplient trop et ont des conséquences trop funestes au bien du service pour ne pas être examinés avec le plus grand appareil et la plus grande publicité. 

Il sera tenu un conseil, à bord du vaisseau amiral, à Toulon, pour tirer au clair l'affaire de l'abordage. Quel que soit le résultat le conseil devra particulièrement se faire rendre compte des faits suivants :1° Y avait-il dans la feuille des signaux un signal pour indiquer une manœuvre à faire la nuit? 2° Ce signal a-t-il été fait ou non? A-t-il été aperçu ou non? 3° Quelles sont les causes de la contradiction qui existe dans les rapports? Quels sont les motifs militaires de celui qui a fait le rapport où la vérité n'est pas observée ?

Paris, 15 avril 1801

Au citoyen Talleyrand, ministre des relations extérieures

Vous trouverez ci-joint, Citoyen Ministre, quelques observations sur la constitution batave.

Faites connaître au ministre de la République que mon intention est de n'exercer aucune influence ouverte sur un parti quelconque;

Qu'il peut cependant suggérer les idées contenues dans les observations, mais seulement comme conseil. Je n'attache aucune importance à ce qu'elles soient ou non suivies; j'en attache seulement à ce que nous ne soyons pas singés par la chambre électorale et par la cession au gouvernement de l'initiative des lois, et à ce que le directoire soit composé de plus de sept membres.


Paris, 15 avril 1801

ANNEXE A LA PIÈCE PRÉCÉDENTE

Les idées sur la constitution de la Batavie me paraissent susceptibles de quelques observations:

1° Le collège des électeurs me parait trop singer notre Sénat conservateur, et je désire absolument qu'il n'y ait aucune espèce de singerie.
2° La seconde chambre devrait toujours délibérer en secret; l'on pourrait alors lui laisser l'initiative de la loi, sur un message secret du gouvernement demandant telle loi pour un but déterminé. Les ministres pourraient être admis, et toujours en secret, pour discuter cette loi.
3° Le corps législatif ne peut pas ratifier les traités de paix, puisque, sans cela, le gouvernement n'aurait pas le droit de traiter. Au lieu de ratifier, il faudrait mettre une formule qui portât que le corps législatif approuve le traité comme ne contenant rien de contraire à la constitution, à l'intégralité du territoire et à la liberté batave, observation qui n'a pas lieu pour les déclarations de guerre.
4° Puisqu'ils désirent un directoire j'aimerais mieux qu'il portât le nom de sénat et fût composé de dix membres, dont quatre géreraient les ministères de la marine, des finances, de la guerre et de la justice, sans qu'aucun des quatre pût jamais être le président.
Le président du sénat, qui pourrait l'être pendant trois ou six mois, prendrait le titre de grand pensionnaire ou tout autre. Il aurait le sceau, la signature, la présidence, le commandement de la garde, etc.
5° Je crois qu'il serait utile que le sénat ne fût point nommé par le corps législatif, sans quoi il n'en est que le commis.
6° Les nominations à la législative, au lieu d'être censurées par une chambre électorale, pourraient l'être par une commission ad hoc et momentanée du corps législatif lui-même.

Il vous sera facile de faire sentir qu'un directoire de cinq ou sept membres, qui n'administre aucune branche, ne peut pas gouverner: ou chaque directeur s'attache à une partie, et le ministre n'est plus que son secrétaire général, et dès lors le ministre, qui est le principal responsable et le principal travailleur, ou ne travaille plus ou n'a pas le crédit nécessaire pour traiter des affaires qu'il connaît cependant mieux que le directoire qui s'en mêle. Au lieu que, par la manière proposée, les ministres se trouvent avoir l'ascendant nécessaire pour pouvoir se soutenir et faire valoir leur opinion, et sont cependant contenue, réprimés par leurs collègues, et spécialement par le grand pensionnaire et les six membres qui ne tiennent à aucun ministère.

Dernière et principale objection.

On n'a pas assez tiré parti de l'ancienne division en provinces, que semblaient, jusqu'à un certain point, exiger les localités; on aurait pu satisfaire chaque province par une organisation particulière, et y trouver un nouveau ressort, soit pour la nomination du sénat ou quelque autre fonction nécessaire à la loi.


Paris, 15 avril 1801

Au citoyen Talleyrand, ministre des relations extérieures

Le projet de constitution pour l'Helvétie me paraît convenable avec ces changements-ci:

Il ne me paraît pas que le portefeuille des relations extérieures doive être donné à un bailli, pas même à un conseiller; je voudrais que ce fût un homme nommé par l'avoyer et hors du sein du sénat, afin que l'avoyer se trouvât avoir quelque crédit sur les relations extérieures.

L'article 11 du titre III ne me paraît pas convenable. Il faut que la conscription des cantons soit réglée par la constitution, et non par une diète, qui dès lors formerait convention. D'ailleurs, si les habitants du pays adoptent ces bases, ils présenteront des moyens d'exécution.

Je vous autorise donc à présenter au gouvernement actuel le projet de constitution comme ayant l'assentiment du Gouvernement et comme m'ayant paru le plus propre à concilier les intérêts de leur puissance et de leur localité, et les mettre dans le cas de jouir de la protection de toutes les puissances.


16 avril - 30 avril