Février 1801


Paris, 2 février 1801

Au citoyen Talleyrand, ministre des relations extérieures

Faites connaître, Citoyen Ministre, au citoyen Belleville, qu'il est possible que, par la paix avec l'Empereur, la Toscane reste à la République, au moins jusqu'à la paix maritime; qu'il vous fasse connaître la forme de gouvernement que l'on pourrait, dans ce cas, provisoirement y établir; qu'il a la confiance du Gouvernement et qu'il doit agir avec force et vigueur.

Faites connaître, par un courrier extraordinaire, an général Murat, qu'il doit se porter sur la croisière des routes d'Ancône à Home, du côté de Cividale, pour se trouver en communication directe avec Ancône;

Qu'en supposant que les Napolitains évacuent Rome et rentrent chez eux, il doit se porter sur leurs frontières de Naples, sans donner aucune inquiétude à la ville de Rome;

Que le ministre de la guerre lui aura fait connaître plus en détail les intentions du Gouvernement sur les mouvements militaires;

Qu'il doit faire connaître au Pape que, quels que soient les événements avec Naples, quand même l'obstination du roi de Naples devrait le forcer à s'y porter, il ne passera point par Rome, à moins que le retour des Napolitains dans cette ville ne l'y oblige;

Qu'il ne doit conclure aucun armistice avec le roi de Naples, si ce n'est pour quinze jours; qu'il doit se contenter de demander la liberté de Dolomieu et de tous les Français détenus en Sicile, et l'évacuation, par les Napolitains, du château Saint-Ange et de tout l'état de Rome, même de Bénévent.

Il demandera également qu'on n'envoie plus de vivres aux Anglais à Malte, et qu'on ne les reçoive plus dans les ports du royaume de Naples.

Vous direz au général Murat qu'on attend M. de Gallo à Lunéville, et qu'on verra s'il est possible de traiter avec le roi de Naples;

Que je lui recommande toujours de faire partir le plus possible de bâtiments d'Ancône pour l'Égypte, et d'envoyer à Cività-Vecchia un agent qui prendra les ordres du citoyen Belleville pour faire partir de ce port deux bâtiments pour l'Égypte.


Paris , 2 février 1801 

Au citoyen Talleyrand

J'ai lu avec attention, Citoyen Ministre, ce qui est relatif aux prêtres. J'ai rédigé le projet ci-joint; il est susceptible de quelques corrections de style. La bulle me paraît aussi avoir besoin d'être bien retouchée.

M. Spina (Archevêque de Corinthe, envoyé à Paris par le Saint-siège) pourra envoyer ce projet de convention par un courrier à Rome; mais je désire faire partir de suite le citoyen Cacault (François Cacault, 1743-1805, diplomate. C'est lui qui va faire aboutir les négociations concordaires) pour Rome, avec le titre de ministre plénipotentiaire ou de chargé d'affaires. Il sera chargé de discuter cette convention, et en même temps les intérêts temporels de la République. Faites connaître au citoyen Cacault sa destination, pour qu'il s'y prépare.

Il serait porteur d'un double plein pouvoir: un pour le spirituel, l'autre pour le temporel. La convention serait signée à Rome par lui et un individu désigné par le Pape.

Il faudrait que le Pape envoyât en même temps à M. Spina sa ratification, qui serait échangée à Paris vingt-quatre heures après l'arrivée du courrier. Le Pape enverrait aussi la bulle signée, et tout resterait secret jusqu'au temps convenable.

Vous sentez bien qu'il n'y a pas un instant à perdre.

Vous ferez connaître au citoyen Cacault qu'il est nécessaire que le général Murat signe avec lui l'une et l'autre convention.


Paris, 4 février 1801

Au citoyen Talleyrand

Le général Saint-Cyr, conseiller d'État, va se rendre à Madrid. Avant de partir, il prendra vos instructions.

Faites-lui connaître que sa mission a deux buts:

1° Que, si la cour de Portugal entre en négociation, le ministre français puisse se servir de sa présence à Madrid pour avoir des conditions plus avantageuses;

2° Que, si les Espagnols sont véritablement résolus à faire guerre, il puisse diriger toutes les opérations en prenant toutes mesures propres à épargner l'orgueil castillan. Il concevra et arrêtera les plans militaires qui doivent être exécutés, et s'entendra avec l'ambassadeur (qui n'est autre, alors, que Lucien Bonaparte) pour les faire accepter au prince de la Paix avec ménagements nécessaires.


 Paris, 4 février 1801

Au citoyen Talleyrand

Je vous prie, Citoyen Ministre, d'expédier un courrier à Madrid pour faire connaître à l'ambassadeur de la République la nomination et le départ du général Saint-Cyr, et pour lui apprendre que général Ganteaume est sorti de Brest le 3 pluviôse, avec sept vaisseaux de guerre, deux frégates et 4,000 hommes de débarquement; que la destination est pour l'Égypte; que nous espérons qu'à l'heure qu'il est il aura passé le détroit; que nous espérons en recevoir des nouvelles de Madrid; qu'il faut cependant qu'il continue à garder secret sur cet objet;

Les frégates la Justice et l'Égyptienne sont sorties de Toulon le 4 pluviôse, avec 500 hommes et des munitions de guerre pour l'Égypte;

Qu'il est nécessaire que l'on se remue un peu à Madrid et que l'on arme la flotte de Cadix, car, bien certainement, les Anglais ne pourront pas avoir une forte escadre dans la Méditerranée, dans Baltique, dans les mers du Nord et devant Brest. 

Faites sentir combien je trouve honteux pour la monarchie espagnole que deux vaisseaux en bloquent sept devant Cadix; si ce ne sont plus ces fiers Castillans qui soumirent le nouveau monde, que du moins ils ne se laissent pas abattre au point de devenir la dernière nation du monde.

Deux mauvaises frégates anglaises nous inquiètent dans le golfe du Lion: exigez qu'une petite escadre sorte de Barcelone et aille croiser dans le golfe du Lion.

Réitérez à l'ambassadeur le désir que j'ai de voir rappeler Mazarredo; qu'on lui donne une place honorable en Espagne; mais il n'a ni le génie ni le cœur de la guerre.

Dites-lui que la Russie, le Danemark et la Suède sont de plus en plus irrités contre l'Angleterre, et l'Angleterre contre ces puissances ;

Qu'on ne peut obtenir la paix qu'en sortant de cette léthargie où la puissance espagnole est tombée;

Que tous les jours des convois de cent voiles passent le détroit pour alimenter Malte et l'escadre anglaise ; que ces convois ne sont escortés que par deux vaisseaux et quelques frégates;

Que quatre ou cinq vaisseaux qui sortiraient de Cadix dans un moment favorable feraient éprouver aux Anglais une perte immense;

Que les escadres batave, danoise, suédoise, russe se remuent, tant dans la Baltique que dans la mer Noire; l'Espagne seule ne fera-t-elle rien?

Que l'ambassadeur fasse sentir au prince de la Paix qu'au lieu de la Toscane c'est Naples même que nous pourrions donner an jeune prince de Parme, royaume sur lequel il a des droits incontestables; que je désirerais connaître ce prince et qu'il vînt à Paris;

Qu'il doit bien faire sentir au prince de la Paix que ce n'est qu'en se montrant d'une manière vigoureuse que nous aurons la paix que désirent toutes les puissances , hormis l'Angleterre, qui vient de donner une preuve récente de sa haine en faisant courir sur les pêcheurs.

La puissance de l'Espagne ne peut pas être réduite à quinze vaisseaux; elle doit faire les plus grands efforts pour en réunir autant à Cadix et à Carthagène.

Je désire que l'ambassadeur envoie à Cadix un de ses secrétaires de légation, avec ordre de garder le secret sur la mission du général Ganteaume, de nous tenir au courant de tous les mouvements de la Méditerranée, et d'activer les armements de Cadix et de Carthagène.


Paris, 4 février 1801

Au citoyen Talleyrand

Je vous prie, Citoyen Ministre, d'expédier dans la nuit un courrier au général Murat, qui arrive, demain 16, à Foligno, et se dirige sur Rome.

Vous lui ferez connaître que mon intention est qu'il n'aille point à Rome, pour ne donner au Pape aucune espèce d'inquiétude. S'il en est temps encore, il s'arrêtera à Cività-Castellana et fera connaître au Pape qu'il y restera jusqu'à ce qu'il ait appris si les Napolitains veulent évacuer le château Saint-Ange et tout le territoire du Pape.

Si le Pape obtient l'évacuation du château Saint-Ange et de la Campagne de Rome, le général Murat lui fera connaître qu'il ne s'avancera pas dans ses Etats et qu'il se contentera de pénétrer par la Sabine dans le royaume de Naples.

Sur la réponse contraire que ferait le Pape, le général Murat s'avancera sur Rome; mais, dans ce cas, il prendra les mesures les plus vigoureuses pour qu'il ne soit question d'aucune espèce de révolution et que le Pape reste paisible possesseur de son pays.

Le général Murat fera connaître au roi de Naples que le marquis de Gallo a reçu ses passe-ports pour se rendre à Paris; mais que le préalable à toute négociation, c'est qu'il doit fermer aux Anglais les ports de son royaume.

Comme il est plus de minuit, vous ne pourrez expédier le courrier que demain. Vous lirez dans le Moniteur plusieurs lettres que j'ai fait insérer dans le système que le . . . . . . (une partie de la lettre manque).

Ajoutez-y un projet de lettre que Murat signera et enverra à l'ambassadeur russe près le roi de Naples; cette lettre dira:

1° Que la seule chose qui puisse l'empêcher d'aller à Naples, c'est que le roi reconnaisse la protection spéciale de l'Empereur de Russie, et mette embargo sur tous les bâtiments anglais, jusqu'à ce que ceux-ci aient reconnu le principe de la souveraineté des mers;

2° Que, surtout, le roi de Naples n'envoie aucune espèce de vivres à Malte, et qu'il fasse usage de l'influence qu'il pourrait y avoir pour favoriser l'expédition que pourraient faire la France et la Russie réunies pour arracher Malte aux Anglais et la rendre à Malte.


Paris, 4 février 1801

Au général Berthier, ministre de la guerre

Vous trouverez, Citoyen Ministre, dans le Moniteur de demain, la relation que vous a envoyée le chef d'état-major du général Murat, et plusieurs lettres de ce général.

Vous lui enverrez plusieurs exemplaires de ce Moniteur; il verra par là le sens dans lequel il doit se conduire.

1° Engagez-le à bien protéger son pare d'artillerie, qui me paraît fort aventuré à Ancône, et à ne point s'engager sans avoir avec lui toute son artillerie et de nombreuses munitions: avec un corps d'élite comme le sien et beaucoup d'artillerie, on est toujours invincible;
2° Qu'il ne dépasse point Cività-Castellana, et qu'il place ses troupes sur les frontières napolitaines, sans passer par Rome;
3° Qu'il assiste à quelques grandes fonctions ecclésiastiques, pour convaincre le peuple que nous ne sommes point ennemis de la religion ;
4° Qu'il demande que les ports soient fermés aux Anglais , la liberté des Français, et la restitution des objets pris par les Napolitains à Rome et qui appartiennent aux Français;
5° Qu'il attende l'artillerie et les troupes que le général Brune a eu ordre de lui envoyer;
6° Qu'il ne permette pas qu'un seul Italien réfugié aille à Rome, et qu'il ne souffre rien de ce qui pourrait inquiéter le gouvernement romain;

Quant à la paix, c'est une question composée qui, dans la position où est l'Europe, ne se décide pas dans un cas particulier; que M. Gallo a un passe-port pour se rendre à Paris, mais qu'il peut annoncer qu'il ne sera pas écouté, si, au préalable, on ne met pas l'embargo sur les bâtiments anglais.


Paris, 4 février 1801

Au général Berthier

Vous recevrez, Citoyen Ministre, l'arrêté qui envoie en Espagne le général Saint-Cyr.

Vous lui fournirez les fonds nécessaires pour son voyage.

Vous lui ferez connaître que l'intention du Gouvernement est qu'il soit chargé de la direction de la guerre contre le Portugal. Le prince de la Paix, qui a pris le commandement en chef, n'est point militaire, ce qui rend nécessaire l'envoi d'un officier aussi distingué. Le général Saint-Cyr doit se conduire d'après les indications de l'ambassadeur en Espagne et éviter de choquer l'orgueil castillan.


Paris, 4 février 1801

Au citoyen Forfait, ministre de la marine et des colonies

Vous trouverez ci-joint, Citoyen Ministre, un arrêté. Vous donnerez pour instruction au préfet et an vice-amiral Joyeuse de faire sortir ces vingt vaisseaux toutes les fois que le port serait bloqué par moins de dix-huit.

Vous leur ferez sentir qu'il est nécessaire d'obliger les Anglais à tenir plus de vingt vaisseaux devant Brest, ce qui les empêchera d'envoyer des forces aussi considérables, et aussi promptement qu'ils le feraient sans cela, à la suite du contre-amiral Ganteaume.

Que, d'ailleurs, il sera impossible que l'expédition que l'on projette pour le commencement du mois prochain puisse avoir lieu, si l'on ne parvient pas à chasser les deux ou trois vaisseaux qui sont constamment entre Brest et Lorient. On croit qu'en saisissant le moment opportun, et en choisissant six on sept bons vaisseaux, on pourrait faire un coup d'éclat qui forcerait les Anglais à être plus circonspects. Notre apathie sur ce point leur a donné une confiance qui nous est très-nuisible.

Donnez l'ordre au préfet maritime de Lorient d'envoyer plusieurs officiers jusqu'à Nantes, avec l'ordre de visiter tous les ports et toutes les anses, et de faire partir pour Brest tous les bâtiments chargés de vivres et d'autres objets.

Je donne, à cet effet, l'ordre au général Bernadotte de fournir 100 hommes de cavalerie, divisés en quatre patrouilles; à la suite de chacune d'elles sera un officier d'état-major et un officier de marine désigné par le préfet maritime.


 Paris, 4 février 1801

ARRÊTÉ

ARTICLE ler. - Indépendamment de l'escadre de six vaisseaux du contre-amiral Dordelin (Alain-Joseph Dordelin, 1764-1826), il sera armé et mis en rade à Brest dix vaisseaux et trois frégates, qui seront choisis par le préfet maritime.
ART. 2.- Ces dix vaisseaux avec dix espagnols seront autorisés à sortir, en totalité ou en partie, pour favoriser l'entrée dans le port de Brest des différents convois de vivres.
ART. 3. - Le vice-amiral Villaret-Joyeuse se rendra à Brest pour prendre le commandement de ces vingt vaisseaux. Il aura sous ses ordres deux contre-amiraux désignés par le ministre de la marine.
ART. 4.- Il ne pourra sortir qu'avec l'autorisation du préfet maritime.
ART. 5.- Le ministre de la marine est chargé de l'exécution du présent arrêté.


 Paris, 4 février 1801

Au citoyen Forfait, ministre de la marine et des colonies

Je vous prie, Citoyen Ministre, de me faire un rapport particulier sur le Téméraire, l'Audacieux et l'Éole, qui sont portés dans vos états comme à refondre, et de me faire connaître s'ils ne pourraient pas servir à une expédition comme celle d'Irlande.


Paris, 4 février 1801

Au citoyen Forfait

Les frégates la Muiron et laCarrère, Citoyen Ministre, sont dans le cas de porter du 18. Comme ces deux frégates, quoique peu marcheuses, sont à même de soutenir un combat, je désire que vous les fassiez armer avec du 18, pour ne pas leur ôter le seul avantage qu'elles aient.

Les vaisseaux le Banel et le Frontin ne peuvent servir sans doute qu'à des passages de troupes; ces deux bâtiments peuvent, dans l'occasion, porter 7 à 800 hommes pour une petite traversée. Il n'est donc pas prudent d'exposer tant de monde à être pris par une seule frégate. D'un autre côté, s'il est constant que les Anglais ont plusieurs vaisseaux de 60 et même de 50 canons, je désire que le Banel et le Frontin soient armés de 60 canons de gros calibre, de manière à pouvoir se battre contre un vaisseau de 50 et à ne rien craindre d'une frégate de la force de l'Égyptienne, sauf à ne porter pour leur armement que l'équipage qu'on y mettrait s'ils étaient armés en flûte, lorsqu'ils serviront à transporter des troupes, qui, dans ce cas, servent les batteries.

Nous avons vu plusieurs fois, depuis peu; le port de Toulon bloqué par deux frégates. Aujourd'hui même Livourne est désolé par une frégate.

Une petite division composée du Frontin, duBanel, de la Muiron et de la Carrère, ne craindrait la rencontre d'aucune frégate.

Je vous prie de donner l'ordre au préfet maritime de faire armer le Banel et le Frontin, ainsi que la Carrère et la Muiron, et de les faire sortir toutes les fois que le port de Toulon serait bloqué par une, deux ou trois frégates, on même par un vaisseau et deux frégates. Le préfet ferait sortir cette division dans le golfe du Lion, s'il apprenait que des frégates ennemies continuassent à désoler notre commerce de Cette à Marseille.

Nommez un officier d'un mérite distingué pour commander cette petite division.

Il est très-constant que les Anglais n'ont que onze vaisseaux de guerre dans la Méditerranée, qui sont épars sur cette mer, du Bosphore au golfe du Lion et au détroit.


Paris, 4 février 1801

Au citoyen Forfait

Le citoyen Savary, mon aide de camp, qui arrive de Brest et qui a passé par Lorient, m'assure que le vaisseau l'Union est prêt, mais qu'il manque de matelots. Vous savez l'importance que j'attache au départ de ce vaisseau pour Rochefort. Le préfet maritime a dit au citoyen Savary qui croyait qu'il ne serait pas possible de trouver les équipages nécessaires.

Plutôt que de retarder le départ de ce vaisseau, je préférerais que le préfet lui donnât l'équipage des deux frégates; et, dans ce cas, le contre-amiral Lacrosse partirait de Brest ou de Nantes.

Expédiez un courrier extraordinaire à Lorient, afin d'activer le départ de l'Argonaute et de l'Union, et prenez toutes les mesures nécessaires pour compléter l'équipage de l'Union.

Pressez par le courrier extraordinaire le départ de Nantes des déportés. (ceux de la liste établie après l'attentat de la rue Saint-Nicaise)


Paris, 4 février 1801

ARRÊTÉ

ARTICLE  1er.- Quatre lieutenants ou capitaines de vaisseau, nommés par le préfet maritime de Lorient, chacun à la tête de 30 hommes de cavalerie et de 30 hommes de gendarmerie de la marine, feront constamment des patrouilles de Lorient à Nantes.
ART. 2. - Le préfet maritime de Lorient désignera la portion de la côte que chacun deux devra parcourir.
ART. 3. - Le but de ces patrouilles sera, 1° de faire partir tous les bâtiments destinés à l'approvisionnement de Brest et qui ne profitent pas, par négligence, des temps favorables; 2° de surveiller les lougres et autres bâtiments ennemis qui correspondent avec la côte ; 3° de visiter les batteries de côtes et de punir sévèrement les chefs de pièces et canonniers qui ne restent pas à leur poste.
ART. 4. - Le ministre de la marine donnera à ces officiers de marine 1,200 francs pour se monter.
ART. 5. - Le général en chef de l'armée de l'Ouest dirigera, le plus tôt possible, 120 hommes de cavalerie sur Lorient.
ART. 6. - Les ministres de la marine et de la guerre sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent arrêté.


Paris, 4 février 1801

ARRÊTÉ

ARTICLE 1er. - Il sera tenu, le ler ventôse prochain, à Brest, un conseil extraordinaire d'administration, composé du préfet maritime, du chef de l'administration, de l'ingénieur constructeur en chef, de l'officier commandant en rade et de chacun des capitaines désignés pour commander les vaisseaux en construction.
ART. 2. - Le but de ce conseil sera d'aviser aux moyens d'achever la construction des vaisseaux ci-après désignés : le Vengeur, le Cassard, le Quatorze-juillet, le Tonnerre, la frégate le Zéphire
ART. 3. - Il sera dressé un procès-verbal dans lequel on fera mention des objets qui n'existeraient pas à Brest et qui sont nécessaires pour achever lesdits bâtiments.
ART. 4. - Le conseil se fera remettre sous les yeux les procès-verbaux de situation des différents bâtiments qui auraient été condamnés, pour s'assurer si l'on ne pourrait pas trouver quelques pièces propres à la construction desdits bâtiments.
ART. 5. - Le conseil proposera également les mesures qu'il croira convenable de prendre pour tous les autres bâtiments qui se trouvent dans le port et qui ne sont pas en commission.
ART. 6. - A la même époque du ler ventôse, il sera tenu à Rochefort, Lorient, Dunkerque, Toulon et le Havre, des conseils d'administration, pour déterminer le parti qu'il y a à prendre sur tous les bâtiments hors de service dans les ports de chaque préfecture maritime.
ART. 7. - Le ministre de la marine est chargé de l'exécution du présent arrêté.

 


Paris,  4 février 1801

ARRÊTÉ

ARTICLE 1er.- Le ministre de la marine prendra toutes les mesures nécessaires pour que les bâtiments dont les noms suivent soient achevés, armés et prêts à mettre à la voile dans le courant de floréal: à Rochefort, la République-Française, le Héros; à Lorient, le Scipion, le Brutus.
ART. 2. - Les préfets maritimes, assistés de l'ingénieur en chef des ports de Rochefort et de Lorient, et des capitaines. désignés pour commander les vaisseaux ci-dessus nommés, dresseront, au ler  ventôse, au 1er germinal, au ler floréal, au ler prairial, un procès-verbal de la situation de ces bâtiments et de ce qui a été fait dans le courant du mois pour l'achèvement de ces vaisseaux. Chaque membre pourra insérer dans le procès-verbal ce qu'il pense qu'on aurait pu faire pour accélérer l'ouvrage.
ART. 3. - Les procès-verbaux feront mention non-seulement de la situation du corps du butinent, mais encore de son armement et gréement.
ART. 4. - Le ministre de la marine enverra une expédition du présent arrêté aux préfets maritimes de Lorient et de Rochefort.
ART. 5. - Le ministre de la marine est chargé de l'exécution du présent arrêté.


Paris, 4 février 1801

Au général Berthier, ministre de la guerre

Les frégates la Justice et l'Égyptienne ne sont parties de Toulon qu'avec 1,000 fusils, ce qui provenait de ce qu'il n'y en avait pas. Je vous ai demandé 8 on 9,000 fusils à Rochefort. Faites-moi connaître, par un rapport particulier, les mesures que vous avez prises pour les y faire passer : car, s'ils n'y étaient pas promptement rendus, notre opération se trouverait compromise.


Paris, 5 février 1801

Au citoyen Chaptal, ministre de l'intérieur

Je désirerais, Citoyen Ministre, que vous envoyassiez cinq de nos principaux ingénieurs des ponts et chaussées, pour visiter et prendre connaissance des cinq canaux qui ont été projetés pour joindre l'Oise et la Somme à l'Escaut. Je désire que le citoyen Prony (Gaspard Riche de Prony, 1755-1839, ingénieur et mathématicien) soit chargé du canal de Saint-Quentin, et que ces ingénieurs partent après-demain, afin que, le 22 ou le 23 de ce mois, le conseiller d'État chargé des ponts et chaussées puisse les réunir à Saint-Quentin, et être à même de présenter un premier rapport sur celle de ces cinq communications qu'il conviendrait de choisir.


Paris, 6 février 1801

 NOTE POUR LE MINISTRE DE L'INTÉRIEUR

1° Le Gouvernement ne soldera, à compter du 1er germinal, que 30,000 enfants trouvés;
2° La répartition de ce nombre sera faite par le ministre de l'intérieur entre les départements.
3° Le tableau de cette répartition sera imprimé, ainsi que celui des enfants annoncés comme enfants trouvés et entretenus comme tels par le Gouvernement, q ni existaient au le, vendémiaire. On ne peut se dissimuler que, dans un grand nombre de départements, on mettait à la charge de l'État comme enfants trouvés des enfants dont les père et mère étaient connus et mariés.
Ce tableau sera destiné à faire connaître toute l'étendue de l'abus qui s'était établi.
4° Les préfets prendront, à l'avenir, toutes les mesures propres à prévenir cet abus, et renverront à leurs parents tous ceux des individus qui auraient été ou qui seraient présentés comme enfants trouvés et qui auraient une famille.
5° Les secours accordés aux filles-mères seront supprimés comme contraires aux bonnes mœurs; celles qui, par leur état de maladie, auraient besoin de secours, adresseront aux établissements de bienfaisance.


Paris, 6 février- 1801

Au général Berthier, ministre de la guerre

Toutes les expéditions parties de Toulon, Citoyen Ministre, n'avaient que le quart des fusils demandés. Un courrier extraordinaire qui arrive au ministre de la marine lui annonce qu'il n'y a encore à Rochefort que 500 fusils, ce qui retarde le départ des frégates l'Africaine et la Régénérée. Ainsi vous voyez qu'aucune des mesures que vous prenez sur cet objet ne réussit, et que les opérations les plus importantes du Gouvernement sont vivement compromises.


Paris, 6 février 1801

ARRÊTÉ

ARTICLE 1er.  L'adjudant commandant Caffarelli se rendra jusqu'à la frontière de la République à la rencontre de l'ambassadeur russe, et il raccompagnera jusqu'à Paris.
ART. 2. - Les ministres de la guerre et de la police donneront des ordres pour que cet ambassadeur soit escorté jusqu'à Paris par des détachements de cavalerie et de gendarmerie.
ART. 3. - Les administrateurs des postes donneront des ordres pour que tous les relais nécessaires soient prêts sur son passage.
ART. 4. - Le ministre des relations extérieures donnera à l'adjudant commandant Caffarelli ders instructions particulières.
ART. 5. - Les ministres de la guerre, des relations extérieures, des finances, et de la police générale, sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent arrêté, qui ne sera pas imprimé.


Paris, 7 février 1801

CIRCULAIRE AUX MINISTRES.

Le Premier Consul me charge, Citoyen Ministre, de vous rappeler que les fonds de l'an IX doivent être inviolablement appliqués aux dépenses de l'au IX; que toute distraction de ces fonds, pour acquitter des dépenses qui appartiennent à des années antérieures, serait un acte illégal qui vous exposerait à toutes les rigueurs de la responsabilité.

Le Premier Consul vous invite à faire un examen sévère de toutes les parties qui ont été acquittées jusqu'à ce jour, et à vérifier s'il n'y a point eu quelque interversion qui ait échappé à votre vigilance,

Dans le cas où cette vérification révélerait quelque infraction à la règle, des mesures rigoureuses devraient être prises contre les chefs de division de votre ministère dans les bureaux desquels les erreurs auraient été commises.


Paris, 7 février 1801

Au général Berthier ministre de la guerre

Je reçois, Citoyen Ministre, votre lettre du 18 pluviôse. Les mesures n'ont pas été prises avec assez de précision pour être certain que les fusils arriveraient  à Toulon.

Effectivement, la date des premiers ordres qui ont été donnés est du 24 frimaire, et les fusils n'étaient à Lyon que le 17 nivôse.

On n'a pas non plus pris de précautions pour que les fusils arrivassent à Toulon par terre depuis Avignon, et les frégates parties le 4 pluviôse n'avaient que 1,000 fusils, et, dès lors, je regarde cette expédition comme manquée.

Cependant ce ne sont pas 3,000 fusils que vous deviez envoyer à Toulon, mais 6,000 pour les douze expéditions décadaires et 4,000 pour les frégates. Au lien de 10,000, vous n'avez donné des ordres que pour 3,000, et les mesures ont été si mal prises que ces 3,000 fusils ne sont pas arrivés. Aussi aucun bâtiment décadaire n'a pu partir qu'avec 100 ou 120 fusils, ce qui fait que le but du Gouvernement se trouve également manqué.

Quant aux expéditions de Rochefort, ce ne sont pas 9,000 fusils, mais 4,000 que l'on a demandés pour l'expédition des frégates. Il paraît que les mesures ont été prises de manière que les fusils partis de Nantes le 17 nivôse n'étaient pas arrivés le 9 pluviôse à Rochefort, en sorte que l'on peut regarder à peu près cette expédition comme manquée.

Je ne puis que vous témoigner l'extrême mécontentement du Gouvernement sur la négligence et le peu d'exactitude que l'on met à des opérations aussi importantes.

Faites faire des recherches sur les registres des transports militaires, il doit y avoir des coupables; faites-les punir sévèrement, et servez-vous pour cela de l'autorité que vous avez. Vous pouvez prévenir le citoyen Delille que si, le 10 ventôse, les fusils, ne sont pas arrivés d'après l'engagement qu'il a pris toute son administration servira d'exemple.


Paris, 7 février 1801).             

Au général Berthier

Je vous prie, Citoyen Ministre, d'écrire au général Quantin que le Gouvernement est satisfait de l'activité qu'il met à déjouer les tentatives des Anglais sur Belle-Île; qu'il est sans inquiétude sur cette place, parce qu'il compte entièrement sur son zèle. Le général Quantin fera traduire à une commission militaire les individus  qu'il a fait arrêter.

Vous ferez imprimer la lettre que vous écrirez au général Quantin.


Paris, 7 février 1801

ARRÊTÉ

ARTICLE ler. - Le préfet du département du Rhône, accompagné du général commandant la division et du commissaire ordonnateur se rendra à la boulangerie militaire de Lyon, pour constater la nature du pain que l'on distribue aux soldats.
ART. 2. - Le ministre de la guerre est chargé de l'exécution du présent arrêté.


Paris, 7 février 1801

Au général Brune, commandant en chef l'armée d'Italie

J'ai reçu, Citoyen Général, vos différentes lettres. On a fait imprimer vos lettres, comme vous le désiriez. L'annonce de la capitulation de Mantoue était utile pour décider l'armistice de Lunéville, qui nous donne cette place.

Vous êtes, à ce que j'espère, dans ce moment-ci, dans Mantoue; j'en attends la nouvelle avec impatience. Il ne faut pas rompre l'armistice, parce que tout paraît jusqu'à présent prendre une tournure pacifique.

Vous devez lever de fortes contributions sur les pays vénitiens, parce que vous les évacuerez à la paix, et que ce sera autant de ressources de moins pour nos ennemis.

Mettez tous vos soins à faire solder à la troupe non-seulement le courant, mais encore ce qui peut lui être dû sur l'an VIII.


 Paris, 8 février 1801

Au général Berthier, ministre de la guerre

Le Premier Consul désire, Citoyen Ministre, que vous fassiez connaître aux inspecteurs aux revues le mécontentement que le Gouvernement a ressenti lorsqu'il a appris que, dans les divisions de l'armée de l'Ouest, ils autorisent le payement de la solde à des officiers réformés, admis à l'activité par toute autre autorité que la sienne.

Vous êtes invité à adresser une circulaire aux commissaires ordonnateurs et aux inspecteurs aux revues, pour leur représenter que si, à dater du ler ventôse, un pareil abus se renouvelait, il y aurait lieu à l'exercice d'une responsabilité sévère.

Vous voudrez bien, Citoyen Ministre, faire connaître aux inspecteurs généraux qu'il serait convenable que, par une circulaire, ils indiquassent de nouveau, d'une manière claire et précise, 1° que les officiers des troupes qui doivent toucher leurs appointements sont uniquement ceux qui se trouvent compris dans l'état d'organisation de chaque corps; 2° que les officiers d'état-major brevetés par le ministre, et portés dans les états que le ministre de la guerre envoie tous les trois mois au ministre des finances et que le trésor public transmet aux payeurs, sont les seuls qui ont droit à un traitement; 3° que les commandants d'armées doivent être payés en se conformant, pour le nombre des individus et pour la quotité du traitement, aux règlements généraux qui existent à cet égard.


Paris, 8 février 1801

DÉCISION

Le ministre de la marine propose de faire frapper des médailles exclusivement destinées aux citoyens qui se seraient distingués par quelque action de dévouement et d'humanité. Il a  souvent regretté de ne pouvoir ainsi récompenser des marins.Approuvé les vues du ministre; il se concertera avec le ministre  de l'intérieur pour faire exécuter les modèles des médailles.

Paris, 9 février 1801

Au général Berthier, ministre de la guerre

Le Premier Consul est informé, Citoyen Ministre, que le payeur de la 13e division militaire a acquitté une somme de 112,914 francs, sur l'exercice de l'an IX, comme fonds mis à sa disposition par arrêté du général en chef. Le Premier Consul désire que vous fassiez connaître à ce payeur que cette somme ne lui sera pas passée en compte, si le crédit n'a pas été ouvert par vous, et si le payement n'a pas été autorisé par le trésor public.

Les comptes du payeur portent des articles intitulés, Divers acquits, Remboursement d'états : le Premier Consul désirerait avoir des renseignements sur ce que l'on entend par ces mots, usités dans les comptes de ce genre.


Saint-Quentin, 10 février 1801(Bonaparte est du 9 au 12 février à Saint-Quentin)

Aux Consuls de la République

Je suis arrivé à Saint-Quentin hier, à quatre heures après midi.

J'ai été toute la matinée à cheval pour visiter le canal. Le temps est froid, et il a beaucoup neigé ici.

Tout ce que j'ai vu des projets et du commencement d'exécution du canal de Saint-Quentin me paraît satisfaisant. Je suis descendu par l'escalier dans le souterrain.

La nature des terres a le double avantage de rendre le canal souterrain d'une exécution facile, et cependant de n'avoir pas généralement besoin d'être soutenues par une voûte.

Les manufactures si intéressantes de la ville de Saint-Quentin et environs environs, qui employaient 70,000 ouvriers et faisaient rentrer en France plus de quinze millions de numéraire, ont dépéri des cinq sixièmes. L'on désirerait bien ici que nos dames missent le linon à la mode, sans donner aux mousselines cette préférence absolue. L'idée de ranimer une de nos manufactures les plus intéressantes et que nous possédons exclusivement, et de donner du pain à un si grand nombre de familles françaises, est bien faite en effet pour mettre à la mode les batistes. D'ailleurs, n'y a-t-il pas déjà assez longtemps que les linons sont en disgrâce ?


  Paris, 13 février 1801

MESSAGE AU SÉNAT, AU CORPS LÉGISLATIF ET AU TRIBUNAT

La paix du continent a été signée à Lunéville (Le 9 février 1801); elle est telle que la voulait le peuple français. Son premier vœu fut la limite du Rhin; des revers n'avaient point ébranlé sa volonté, des victoires n'ont point dû ajouter à ses prétentions.

Après avoir replacé les anciennes limites de la Gaule, il devait tendre à la liberté des peuples qui lui étaient unis par une commune origine, par le rapport des intérêts et des mœurs.

La liberté de la Cisalpine et de la Ligurie est assurée.

Après ce devoir, il en était un autre que lui imposaient la justice et la générosité.

Le roi d'Espagne a été fidèle à notre cause et a souffert pour elle; ni nos revers ni les insinuations perfides de nos ennemis n'ont pu le détacher de nos intérêts: il sera payé d'un juste retour. Un prince de son sang va s'asseoir sur le trône de Toscane. Il se souviendra qu'il le doit à la fidélité de l'Espagne et à l'amitié de la France; ses rades et ses ports seront fermés à nos ennemis et deviendront l'asile de notre commerce et de nos vaisseaux.

L'Autriche, et c'est là qu'est le gage de la paix, l'Autriche, séparée désormais de la France par de vastes régions, ne connaîtra plus cette rivalité, ces ombrages qui, depuis tant de siècles, ont fait le tourment de ces deux puissances et les calamités de l'Europe.

Par ce traité, tout est fini pour la France; elle n'aura plus à lutter contre les formes et les intrigues d'un congrès. 

Le Gouvernement doit un témoignage de satisfaction au ministre plénipotentiaire qui a conduit cette négociation à cet heureux terme. Il ne reste ni interprétations à craindre, ni explications à demander, ni de ces dispositions équivoques dans lesquelles l'art de la diplomatie dépose le germe dune guerre nouvelle.

Pourquoi faut-il que ce traité ne soit pas le traite de la paix générale !... C'était le vœu de la France; c'était l'objet constant des efforts du Gouvernement; mais tous ses efforts ont été vains. L'Europe sait tout ce que le ministère britannique a tenté pour faire échouer les négociations de Lunéville.

En vain un agent autorisé par le Gouvernement lui déclara, le 9 octobre 1800, que la France était prête à entrer avec lui dans une négociation séparée : cette déclaration n'obtint que des refus, sous le prétexte que l'Angleterre ne pouvait abandonner son allié. Depuis, lorsque cet allié a consenti à traiter sans l'Angleterre, ce Gouvernement cherche d'autres moyens d'éloigner une paix si nécessaire au monde.

Il viole des conventions que l'humanité avait consacrées, et déclare la guerre à de misérables pêcheurs.

Il élève des prétentions contraires à la dignité et aux droits de toutes les nations.

Tout le commerce de l'Asie et des colonies immenses ne suffisent plus à son ambition; il faut que toutes les mers soient soumises à la souveraineté exclusive de l'Angleterre.

Il arme contre la Russie, le Danemark et la Suède, parce que la Russie, la Suède et le Danemark ont assuré, par des traités de garantie, leur souveraineté et l'indépendance de leur pavillon. Les puissances du Nord, injustement attaquées, ont droit de compter sur la France. Le Gouvernement français vengera avec elles une injure commune à toutes les nations, sans perdre jamais de vue qu'il ne doit combattre que pour la paix et pour le bonheur du monde.


Paris, 13 février 1801

Au citoyen Talleyrand, ministre des relations extérieures

Le ministre de la marine donne l'ordre au contre-amiral Dumanoir de se rendre en Espagne et de prendre vos instructions avant de partir.

Le but de son voyage est,

1°. - De visiter les ports du Ferrol, de Cadix, de Carthagène et de Barcelone, et de me donner tous les renseignements nécessaires sur la situation actuelle de la marine espagnole;

2° De traiter tout ce qui serait relatif à l'exécution du traité que nous avons avec l'Espagne, par lequel elle doit nous donner six vaisseaux de guerre;

3° D'accélérer le départ des trois frégates pour Livourne et d'une escadre, la plus forte possible, pour la Méditerranée.

Vous adresserez directement le contre-amiral Dumanoir à l'ambassadeur de la République à Madrid, avec l'instruction de ne rien faire que par le canal de cet ambassadeur.

Vous ferez connaître à ce dernier le but du voyage du contre amiral Dumanoir, afin qu'il le seconde de tous ses moyens.

Lorsque Sa Majesté Catholique aura désigné les trois frégates qui doivent se rendre à Livourne, le contre-amiral Dumanoir se rendra au port pour accélérer leur départ.

L'ambassadeur de la République fera comprendre au ministère espagnol qu'il faut enfin, à quelque prix que ce soit, que nous devenions maîtres de la Méditerranée;

Que les quinze vaisseaux espagnols qui sont à Brest, et les quinze français qui s'y arment, avec la présence d'une armée sur la côte, obligeront toujours l'Angleterre à tenir quarante vaisseaux dans ces parages pour s'opposer à cette escadre;

Qu'il faudra que l'Angleterre oppose au moins douze vaisseaux aux quinze bataves qui seront prêts avant peu de temps;

Qu'ils ne peuvent pas garder moins de trente vaisseaux pour bloquer la Baltique, ce qui fait quatre-vingts vaisseaux de guerre;

Que la France aura quinze vaisseaux de guerre dans la Méditerranée avant l'équinoxe.

Si le roi d'Espagne réunit quinze vaisseaux pour les joindre aux français, les Anglais, qui vont avoir les ports de Lisbonne, de Sicile, de Naples fermés, seront hors d'état de tenir trente vaisseaux dans la Méditerranée.

Cela étant, je ne mets pas en doute qu'ils n'évacuent Mahon, dans l'impossibilité où ils se trouveront de tenir dans la Méditerranée.

Dans les quinze vaisseaux que doit armer l'Espagne, elle pourrait nous en donner trois sur les six qui nous sont destinés, et alors il ne lui resterait que douze vaisseaux à armer, ce qui certes n'est pas au delà de ses forces et de son pouvoir.

Pour prendre nos trois vaisseaux, nous pourrions envoyer sur deux frégates une portion des équipages.

Si cela est possible, il faut que cela soit indépendant des trois vaisseaux que l'Espagne doit envoyer au Brésil, ce qui lui serait d'autant plus facile, qu'en nous cédant trois des quinze vaisseaux qu'elle a à Brest,  les équipages pourraient lui servir à armer ses autres bâtiments.

L'ambassadeur de la République doit donc employer toute son influence pour que les escadres du Ferrol, de Carthagène, de Cadix, soient armées pour agir de concert avec les quinze vaisseaux français qui ne tarderont pas à être dans la Méditerranée.

Si cela est nécessaire, les vaisseaux armés du Ferrol pourraient sur-le-champ passer à Cadix, et, dans tous les plans qui seraient arrêtés, le contre-amiral Dumanoir se rendrait dans les ports pour accélérer le départ et instruirait parfaitement le Gouvernement de ce sur quoi l'on peut compter.

Si, dans le traité de paix avec le Portugal, la clause de nous remettre les trois vaisseaux qui nous ont bloqués à Alexandrie est admise, le contre-amiral Dumanoir pourra désigner à l'ambassadeur ces trois vaisseaux.

Le contre-amiral Dumanoir pourra arrêter avec l'amiral espagnol toutes les mesures à prendre pour conduire à Toulon les trois vaisseaux espagnols.

Enfin, si la cour d'Espagne consent à nous donner quatre ou cinq des frégates qui sont désarmées dans ses ports, le contre-amiral Dumanoir sera envoyé pour ne prendre que des frégates bonnes marcheuses et qui pourraient nous être utiles.

Vous recommanderez à notre ambassadeur de faire sentir à la cour d'Espagne combien il est honteux de laisser bloquer toutes ses côtes par une on deux frégates, et combien il sera difficile à l'Angleterre d'entretenir une flotte nombreuse dans la Méditerranée, s'il y a au détroit une forte escadre qui s'empare des convois venant de Londres.

Répétez encore à notre ambassadeur qu'après ce que nous venons de faire, de céder la Toscane au duc de Parme, et d'après même ce que nous pourrions peut-être faire un jour, de le mettre sur le trône de Naples, j'ai droit de m'attendre à plus de vigueur dans les armements maritimes.

Je désire que notre ambassadeur obtienne une décoration pour M. Gravina, dont je suis très-content, et le rappel de Mazarredo, qui est une ganache.


 Paris, 13 février 1801

Au citoyen Talleyrand

Je vous prie, Citoyen Ministre, de faire connaître à l'ambassadeur de la République à Madrid qu'il serait nécessaire que, dans cette circonstance, le roi d'Espagne expédiât d'un port quelconque trois frégates qui se rendraient à Livourne. Ces frégates pourront, pour faire une route sûre, passer par le détroit de Bonifacio, et auront soit les ports de la Rivière de Gênes, soit ceux de la Corse, pour s'y réfugier.

Le but de cette expédition est,

1° D'éloigner une frégate anglaise qui croise constamment devant Livourne pour intercepter les communications avec l'île d'Elbe;
De mettre le commandant français qui est à Livourne à même de profiter d'un moment favorable pour faire débarquer des troupes à l'île d'Elbe et empêcher les Anglais de s'en emparer.
Au moyen de la croisière de ces trois frégates, le port de Livourne ne pourrait être bloqué que par deux vaisseaux de guerre anglais, ce qui leur est impossible par la disposition de leurs forces dans la Méditerranée.
D'ailleurs, s'il était possible que l'Espagne expédiât, avec ces frégates, deux ou trois vaisseaux de guerre, le but de cette opération n'en serait que mieux rempli; mais, comme cela entraînerait des retards, que l'on obtienne le départ des trois frégates quatre ou cinq jours après l'arrivée du courrier, ce qui n'empêchera pas l'escadre de Cadix de pouvoir, lorsqu'elle sera prête, se rendre à Lisbonne.
Aux considérations des avantages qui résulteront de cette expédition pour la guerre maritime, se joignent ceux qui résulteront de la satisfaction des nouveaux sujets du duc de Parme de se voir protéger par le pavillon d' Espagne.


Paris, 13 février 1801

Au citoyen Talleyrand

Par le traité secret, Citoyen Ministre, qui a été conclu avec l'Espagne, elle doit nous donner six vaisseaux de guerre. Il est indispensable que ces vaisseaux nous soient remis le plus tôt possible. Nous désirerions que Sa Majesté Catholique voulût nous donner trois de ceux qui sont à Brest et trois de ceux qui sont à Cadix ou à Barcelone.

Il est également indispensable que nous ayons, dans le plus court délai, la renonciation du duc de Parme au duché de Parme et la substitution de la Toscane au jeune duc, qu'il faudrait se presser d'envoyer à Paris, afin que ce prince fût le plus tôt possible installé, à Florence.

Quant au titre de roi, si cela flatte beaucoup Sa Majesté Catholique, nous l'installerons en cette qualité et le ferons reconnaître par toute l'Europe.

Quant au Portugal, indépendamment des conditions insérées dans le traité, nous désirerions quinze on vingt millions, mais surtout les quatre vaisseaux de guerre et la frégate qui m'ont bloqué à Alexandrie. Faites sentir à l'ambassadeur d'Espagne le genre d'importance que je mets à cette condition: indépendamment des vaisseaux, c'est un exemple à donner aux petites puissances pour les accoutumer à respecter la France, et à ne se mêler qu'autant que cela est inévitable de la querelle des grandes puissances.

Vous ferez également connaître à l'ambassadeur de la République à Madrid que nous désirons conserver la portion de l'île d'Elbe qui appartient à la Toscane, et que nous espérons y réunir celle qui appartient au roi de Naples.

Dans nos arrangements avec Naples, nous obtiendrons la réunion à la Toscane de tout le pays de Piombino; dans ce cas, je désirerais que l'Espagne, nous donnât quatre on cinq frégates des dix qui sont dans ce moment-ci désarmées dans le port de Barcelone.

Vous lui ferez également connaître que je regarde comme une chose importante qu'il obtienne de la cour une interprétation qui lève toutes les difficultés qui se présentent aux douanes d'Espagne.

Les linons et les batistes, en entrant en Espagne, ne payent pas de droits; mais les uns et les autres ont souvent une lisière de coton de couleur, et alors quelques douanes les soumettent à des droits très-forts, tandis que d'autres les en affranchissent. Il serait donc essentiel que le roi d'Espagne fît connaître que le règlement qui assujettit à un droit de douane les cotons manufacturés ne porte pas sur les linons et batistes qui n'ont qu'une petite lisière de coton. On pourrait même, si cela était jugé nécessaire, fixer une proportion, par exemple les cinq sixièmes de lin et un sixième de coton par pièce.


 Paris, 13 février 1801

Au citoyen Talleyrand

Il faudrait, Citoyen Ministre, s'empresser d'entamer une négociation avec l'Helvétie, par laquelle elle nous céderait tout le Valais jusqu'à Brigg, et le Simplon jusqu'au Novarais, afin que cette route fût toujours libre pour la République. Nous céderions à l'Helvétie les pays que nous a donnés l'Empereur par le traité de Lunéville.


Paris, 13 février 1801

Au citoyen Joseph Bonaparte, ministre plénipotentiaire à Lunéville

On a publié ce matin, Citoyen Ministre, le traité de paix de Lunéville. Il a rempli parfaitement l'attente du Gouvernement.

Le citoyen Talleyrand vous écrit pour vous autoriser à venir à Paris. Je ne veux pas écrire à M. de Cobenzl. Je ne puis le traiter que comme un ministre ordinaire. Dans le commencement de cette négociation, il a manqué à son caractère. Cependant il sera vu ici avec plaisir, et il n'y a pas d'inconvénient qu'il y vienne. Dans ce cas, il ne serait pas sage et il paraîtrait peu convenable que vous lui montrassiez la même intimité que la première fois. On avait fait alors pour lui ce que l'on fait aujourd'hui pour M. Kalitchef, c'est-à-dire venant pour lever tous les obstacles et conclure la paix, et non pas pour gagner du temps et profiter de la confiance particulière que j'avais en lui pour faire réussir le système de M. de Thugut. Il n y a pas cependant d'inconvénient à lui dire que, s'il n'avait pas eu le bon esprit de rester à Lunéville, on aurait imposé à la Maison d'Autriche des conditions plus dures.

Il me reste un mot à vous dire: la nation est contente du traité, et, moi, j'en suis particulièrement satisfait.

Mille choses à Julie. 


 Paris, 13 février 1801

Au général Berthier, ministre de la guerre

Vous ferez connaître, Citoyen Ministre, au général Murat que le général Brune a ordre de le renforcer de 2,000 hommes de cavalerie et de 10,000 hommes d'infanterie;

Que le lieutenant général Soult a ordre de se rendre à son armée pour commander son avant-garde;

Qu'il ne doit point faire d'armistice sans les conditions qui lui ont été communiquées par le ministre des relations extérieures, et, de plus, sans la permission de pouvoir occuper, jusqu'à la paix maritime avec l'Angleterre, les principaux point du golfe de Tarente avec 8,000 hommes de garnison et une libre communication avec Ancône. Dans ce cas, le général Soult sera chargé de commander ce corps, qui serait spécialement composé de quatre demi-brigades formées des dépôts de l'armée d'Orient et d'autres corps, pour les compléter jusqu'à concurrence de 8,000 hommes d'infanterie, 1,000 hommes de cavalerie et 24 pièces d'artillerie.

Le reste de l'armée se tiendrait pour pouvoir protéger la communication avec ce corps.


 Paris, 13 février 1801

Au général Berthier

Je vous prie, Citoyen Ministre, de réitérer les ordres pour que toutes les places du Piémont, dont la démolition a été ordonnée, le soient entièrement au ler floréal, spécialement Tortone.

Nommez un commissaire chargé de l'exécution de vos ordres.

La place de Cherasco, quoique fortifiée en terre, mérite une attention particulière.


 Paris, 13 février 1801

Au général Berthier

Vous donnez, Citoyen Ministre, au général Tilly le titre de général en chef par intérim. Cela est contraire aux usages militaires, puisqu'on ne peut prendre ce titre qu'avec une commission de général en chef.

Les généraux se prévalent des titres et grades que leur donnent les bureaux pour toucher les appointements qui y sont attachés, et continuent à prendre ces titres. Je vous prie de recommander à vos bureaux la plus grande sévérité sur cet objet.


Paris, 13 février 1801

ARRÊTÉ

ARTICLE 1er. - Les places de Düsseldorf, de Kehl, d'Ehrenbreitstein, et tous les autres postes militaires situés sur la rive droite du Rhin, seront démolis.
ART. 2. - Le ministre de la guerre prendra des mesures pour qu'au 10 germinal prochain ces démolitions soient terminées, et que l'artillerie, les matériaux, etc., soient transportés sur la rive gauche.
ART. 3. - Le ministre de la guerre est chargé de l'exécution du présent arrêté, qui ne sera pas imprimé.


Paris, 13 février 1801

ARRÊTÉ

ARTICLE 1er. - Les châteaux de Vérone, la tête de pont de Porto-Legnago, situés sur la rive gauche de l'Adige, la Chiusa vénitienne, les meilleurs bastions de l'enceinte de Trévise, de Padoue et de Vicence, seront démolis.
ART. 2.  - Le ministre de la guerre prendra les mesures pour que cette démolition soit effectuée avant le le, germinal prochain.
ART. 3.  - Le ministre de la guerre est chargé de l'exécution du présent arrêté, qui ne sera pas imprimé.


Paris, 13 février 1801

Au citoyen Forfait, ministre de la marine et des colonies

Je vous prie, Citoyen Ministre, d'envoyer, par des courriers extraordinaires, à Toulon et à Brest, le Moniteur de ce jour, qui contient le traité de paix.

Vous donnerez l'ordre au préfet maritime de Toulon de faire partir sur-le-champ un bâtiment pour en porter la nouvelle à Tunis, et plusieurs bâtiments pour en porter la nouvelle en Égypte, et spécialement la frégate la Badine, sur laquelle il fera embarquer jusqu'à 2,000 fusils de ceux qui pourraient se trouver à Toulon ou à Marseille, et 12 on 15,000 boulets de tous les calibres, avec 200 hommes de passage, dont 150 conscrits et 50 canonniers et marins de toute espèce. Vous recommanderez au préfet de faire embarquer, sur cette frégate, de l'acier, du fer et des outils de toute espèce, ainsi que des médicaments et des chirurgiens.

Vous donnerez au commandant de la Badine un papier cacheté, pour qu'il l'ouvre en mer et tienne secret, par lequel vous l'informerez de l'expédition du général Ganteaume et vous le mettrez à même de connaître ses vaisseaux.

Ordonnez que sur toute la côte, et surtout sur celle qui avoisine la côte d'Angleterre, on fasse des décharges d'artillerie à la pointe du jour, à neuf heures et à midi.


Paris, 14 février, 1801

RÉPONSE  A UN DISCOURS PRONONCÉ PAR LE PRÉSIDENT DU CORPS LÉGISLATIF.

Le Gouvernement reçoit avec plaisir la députation du Corps législatif.

Le peuple ne goûtera pas encore tous les bienfaits de la paix, tant qu'elle ne sera pas faite avec l'Angleterre. Mais un esprit de vertige s'est emparé de ce Gouvernement, qui ne connaît plus rien de sacré; sa conduite est injuste, non-seulement envers le peuple français, mais encore envers toutes les puissances du continent; et, lorsque les gouvernements ne sont pas justes, leur prospérité n'est que passagère.

Toutes les puissances du continent feront rentrer l'Angleterre dans le chemin de la modération, de l'équité et de la raison.

Mais la paix intérieure a précédé la paix extérieure.

Dans le voyage que je viens de faire dans plusieurs départements, j'ai été touché de l'accord et de l'union qui régnaient entre tous les citoyens. On ne doit attacher aucune importance aux harangues inconsidérées de quelques hommes.

Le Gouvernement se plaît à rendre justice au zèle du Corps législatif pour la prospérité du peuple français, et à son attachement pour le Gouvernement. En mon particulier, je désire que vous lui fassiez bien connaître la confiance que j'ai en lui, et combien je suis sensible à cette démarche spontanée, et au discours que vient de m'adresser son président.


Paris, 14 février 1801

RÉPONSE A UNE DÉPUTATION DES MEMBRES BELGES DU CORPS LÉGISLATIF.

Il n'était plus au pouvoir du Gouvernement de transiger pour les neuf départements qui formaient autrefois la Belgique, puisque, depuis leur réunion , ils font partie intégrante du territoire français. Il est cependant vrai de dire que le droit publie, tel qu'il était à cette époque reconnu en Europe, a pu autoriser des individus, qui voyaient dans S. M. l'Empereur leur légitime souverain, à ne pas se reconnaître comme Français.

Mais, depuis le traité de Campo-Formio, tout habitant de la Belgique qui a continué à reconnaître l'Empereur pour son souverain et est resté à son service a par cela seul trahi son devoir et sa patrie. Depuis ce traité, les Belges étaient donc Français, comme le sont les Normands, les Languedociens, les Bourguignons.

Dans la guerre qui a suivi ce traité, les armées ont éprouvé quelques revers; mais, quand même l'ennemi aurait eu son quartier général au faubourg Saint-Antoine, le peuple français n'eût jamais ni cédé ses droits, ni renoncé à la réunion de la Belgique.


Paris, 14 février 1801

Au général Berthier, ministre de la guerre

Je vous prie, Citoyen Ministre, de donner les ordres les plus sévères aux armées du Rhin et d'Italie pour que les prisonniers de guerre venant des prisons d'Autriche et faisant partie des corps qui sont dans l'intérieur de la République leur soient fidèlement envoyés et ne soient pas retenus pour être incorporés dans d'autres corps.


Paris, 14 février 1801

Au citoyen Forfait, ministre de la marine et des colonies

Je vous prie, Citoyen Ministre, d'écrire au préfet maritime à Brest que je vois avec peine que l'escadre française, mouillée avec l'escadre espagnole, ne prend point part aux fêtes des Espagnols, quoique ceux-ci prennent part à celles que nous célébrons. Donnez, je vous prie, des ordres en conséquence.  


Paris, 15 février 1801

Au citoyen Chaptal, ministre de l'intérieur

Le Premier Consul est informé, Citoyen Ministre, que quelques préfets se croient autorisés à interpréter les actes du Gouvernement; il sait que plusieurs d'entre eux ont pris des mesures d'où il résultait une extension aux dispositions des arrêtés.

Les Consuls désirent que les préfets soient avertis par votre correspondance qu'il est de leur devoir de se conformer littéralement aux arrêtés , à moins que, sur des représentations adressées par eux aux ministres, ils ne se trouvent autorisés par des instructions précises.


Paris, 15 février 1801

Au citoyen Gaudin, ministre des finances

Le Premier Consul désire , Citoyen Ministre, que vous lui fassiez connaître par quels moyens on s'assure de l'exactitude des bons de caisse qu'envoient les receveurs généraux, et si ces comptables n'envoient des bons que pour le montant de l'argent qui est dans leur caisse.

En supposant à cette question une réponse affirmative , le Premier Consul a remarqué qu'alors le receveur général n'envoie des bons de caisse que pour une portion de sa recette, puisqu'en effet elle se compose non-seulement des versements faits dans sa caisse, mais encore des fonds qui se trouvent dans celles des receveurs particuliers, préposés dont le nombre égale celui des sous-préfectures.

Ne résulte-t-il pas de cette disposition des choses que le receveur général, donnant, en payement des effets tirés sur lui par le trésor publie, des bons sur les receveurs particuliers, libère d'autant les fonds de sa propre caisse, et peut, pendant un intervalle de temps assez considérable, disposer de ceux-ci pour son intérêt particulier?

Le Premier Consul vous invite à vous occuper des moyens que vous jugeriez propres à prévenir ou réprimer cet abus.

Ne pourrait-on pas exiger, par exemple, que les sous-préfets fissent passer, toutes les décades, aux préfets, un extrait de procès-verbal constatant l'état des fonds existant dans la caisse du receveur particulier, et qu'ensuite le préfet, en visant les bons de caisse du receveur, fit mention sur ces bons de l'état de la caisse des receveurs particuliers, conformément aux procès-verbaux des sous-préfets?

Le Premier Consul vous invite, Citoyen Ministre, à lui faire connaître si vous jugez cette mesure exécutable, ou à lui proposer un autre moyen qui tendrait au même but.


 Paris, 15 février 1801

Au citoyen Gaudin

Le Premier Consul est informé, Citoyen Ministre, que le receveur général des Côtes-du-Nord ne tient pas registre des bordereaux recette des receveurs particuliers de son département; qu'ainsi ce comptable rend impossible le contrôle de la recette générale par la recette des arrondissements; que cette impossibilité est d'autant plus constante, qu'il n'a pas cru devoir rédiger des bordereaux pour sa recette d'arrondissement du chef-lieu.

Ce comptable a dit avoir trouvé cette marche établie par ses prédécesseurs, et qu'il n'avait pas cru devoir la changer. Il n'a point remarqué qu'il pourrait en résulter qu'un receveur général aurait ainsi la faculté de ne se charger en recette qu'à sa volonté, et que, s'il était d'intelligence avec les receveurs particuliers, il pourrait abuser des fonds versés par les contribuables; que d'ailleurs, par cette marche subversive de toute comptabilité, il présentait chaque mois un  reste à recouvrer qui n'existait réellement pas.

Le Premier Consul désire, Citoyen Ministre, que vous preniez tous ces faits en considération ; que vous portiez votre examen sur tous les receveurs qui pourraient avoir la même opinion que le receveur général des Côtes-du-Nord et suivre les mêmes usages. Il invite à lui faire un rapport sur cet objet.


Paris, 15 février 1801

Au général Berthier, ministre de la guerre

Le Premier Consul désire, Citoyen Ministre, que, par un prompt, rapport, vous lui fassiez connaître quels sont les motifs qui ont pu déterminer le directoire général des hôpitaux à ne pas se conformer au règlement même de son institution, on du moins à n'exécuter qu'avec lenteur la réforme d'une partie des hôpitaux militaires donnée par l'arrêté du 24 thermidor (An VIII).

Il avait été convenu que, partout où les hôpitaux civils pourraient suppléer les hôpitaux militaires, ces derniers seraient supprimé. Cette mesure avait le double avantage de procurer de l'économie dans le service et un service plus favorable aux malades. Le Premier consul désire savoir si elle a été exécutée.


 Paris, 15 février 1801

Au général Berthier

Le Premier Consul me charge de vous inviter, Citoyen Ministre, à lui faire un rapport particulier sur l'établissement de l'hôpital militaire d'instruction de Rennes.

Il désire principalement connaître si cet hôpital d'instruction est organisé d'une manière exactement conforme aux dispositions du règlement du 24 thermidor an VIII, et si l'emploi d'un nombre aussi considérable d'officiers de santé est formellement autorisé, par le règlement ou par tout autre acte du Gouvernement.

Je joins à cette lettre l'état de ces officiers.


16 février - 28 février 1801