Novembre 1802   


Rouen, 2 novembre 1802

Au consul Cambacérès

J'ai reçu votre lettre, Citoyen Consul. Il faut, à quelque prix que ce soit, faire arrêter le chevalier de Coigny, et le garder au Temple sous bonne et sûre garde.

Depuis trois jours que je suis à Rouen, je n'ai cessé de parcourir les différentes positions de la ville et de visiter les manufactures. J'ai lieu d'être extrêmement satisfait de tout ce que je vois ici.

J'ai assisté hier à une fête que m'a donnée la ville. La société était très-belle et très-nombreuse.

J'assisterai demain au soir à une fête du commerce. Le matin j'irai à Elbeuf, pour y voir les fabriques.

J'aurai parade, jeudi, à Rouen. Je verrai la halle vendredi, jour de marché, où elle est très-curieuse à voir.

Je partirai immédiatement pour le Havre, où je serai samedi ou dimanche.

Je reviendrai par Dieppe et Beauvais, où je coucherai. Je désire que vous en préveniez le préfet, et que vous y envoyiez un piquet de 50 chasseurs et de 50 grenadiers à cheval.

Je resterai trois jours au Havre et un jour à Dieppe. Je ne prévois pas être à Paris avant le 20 du mois.


Rouen, 2 novembre 1802

Au citoyen Joseph Bonaparte

Faites mes compliments à Mme Joseph. Elle fait de si belles filles, que l'on peut se consoler de ce quelle ne vous a pas donné un beau garçon.

Je suis aussi content de Rouen que de Lyon. Cette ville me donne des preuves d'attachement qui me touchent.

Tout ici est consolant et beau à voir, et j'aime vraiment cette belle, bonne Normandie. C'est la véritable France.

Je vous prie de croire que rien ne peut altérer mon attachement et mon amitié pour vous, pour votre épouse et pour tout ce qui vous touche.


Rouen, 2 novembre 1802

A l'archevêque de Lyon (Joseph Fesch, 1763-1839)

Monsieur l'archevêque de Lyon, je suis arrivé depuis trois jours à Rouen; j'ai été extrêmement satisfait du peuple de ce département, et j'ai lieu de l'être de l'esprit du clergé, et spécialement de l'archevêque.

Il est temps que vous partiez, sans tarder davantage, pour votre diocèse; que vous y meniez un train de maison décent, mais sans luxe, vous proportionnant au train des maisons les plus considérables de Lyon, du préfet et du général commandant la division. Vous devez agir avec dextérité, mais réellement placer le plus de constitutionnels possible, et bien vous assurer ce parti. Vous ne devez point vous dissimuler que cette question de constitutionnels et de non- constitutionnels est, parmi le grand nombre de prêtres, une question religieuse, mais n'est, dans les chefs, qu'une question politique. Vous devez unir à cela un grand respect et une grande considération pour le Pape, pour les vertus et pour l'opinion, comme autorité, de l'archevêque de Paris.

Je désire que vous m'envoyiez votre mandement avant de le publier et de le faire imprimer. Enfin vous me déplairiez infiniment et feriez un grand mal à l'État, si vous choquiez les constitutionnels. J'aime encore mieux que quelque forcené s'éloigne de vous que de voir les constitutionnels s'en séparer.

N'oubliez pas que, sur le théâtre où vous allez être placé, vous serez l'objet de tous les regards. Ayez une grande sévérité de mœurs, une grande tenue, et soyez tout entier aux devoirs de votre place. Affectez de ne point vous mêler de politique; si on vous présente des pétitions pour moi, dites que votre ministère est la religion. Ne vous livrez point trop à votre zèle ardent, même pour l'administration des hospices et pour les pauvres.

Votre premier soin, le soin qui vous occupera plusieurs mois, c'est d'administrer les sacrements à votre diocèse, de concilier vos prêtres, de les connaître et d'organiser votre église. Lyon a été un grand centre de travail, et il y a un grand nombre de prêtres qui étaient voués à un parti ennemi de l'État; n'employez pas ceux-là, et, si vous croyiez devoir en employer quelques-uns, faites-moi connaître votre travail, et je les éloignerai, de ma propre volonté. Enfin, dans la position délicate où vous êtes, ne pas faire assez est un grand inconvénient peut-être; mais faire trop est le plus grand de tous les maux. Méfiez-vous de la vivacité de votre caractère, et de votre promptitude à prendre un parti et à vous avancer.

L'évêque de Chambéry n'avait point les talents nécessaires. J'aimerais assez que votre première démarche fût de prendre par la main un de ceux qui ont le plus de consistance dans le parti réfractaire, sans être cependant trop exagéré, et un de ceux qui ont le plus de consistance dans le parti constitutionnel, de les bénir et de les embrasser à la fois, en leur disant que l'union et la fraternité sont la base fondamentale de la religion. Quelque chose de saillant en ce genre serait d'un bon résultat pour la religion et un bien pour l'État.

Quant aux hâbleurs qui vous diront que les constitutionnels se sépareront des non-constitutionnels, répondez que ce qui est de votre ministère n'est pas du leur, et que toute démarche et tout sentiment que produirait l'orgueil serait un péché que vous devrez réprouver; que vouloir humilier son voisin, c'est se ressouvenir qu'il a été ennemi, et que, dès lors, c'est violer le premier principe de la loi. Les archevêques et les évêques d'aujourd'hui ne sont pas les archevêques et les évêques de 1789; ce sont ceux qui approchent le plus de la primitive Église. Vous avez assez de science, et vous connaissez assez la doctrine et les maximes de notre religion pour puiser des règles de conduite et des maximes dans la religion même, sans parler du bien de l'État.

Pénétrez-vous bien de ce que je vous exprime dans cette lettre. C'est la manière de faire le bien de la religion et de l'État, de s'attirer l'estime et la confiance de tous les partis, et de m'être agréable.

Le Pape m'a fait connaître que vous alliez être incessamment promu au cardinalat.


Rouen, 2 novembre 1802

NOTE POUR LE MINISTRE DES FINANCES

Je verrais avec peine que le château de Laeken fût démoli; je préférerais le faire acheter 500,000 francs par le domaine.

Je désire que le ministre des finances prenne, en conséquence, des mesures.


Rouen, 2 novembre 1802

Au citoyen Talleyrand, ministre des relations extérieures

Je reçois, Citoyen Ministre, vos lettres des 9 et 10 brumaire.

Le roi de l'île de Sardaigne ne se résoudra pas à aller dans son île, par répugnance de localité. Je ne serais pas éloigné de conclure avec lui un traité portant :

1° Qu'il cède et renonce, pour lui et ses successeurs, au Piémont, et qu'il reconnaît le peuple français légitime possesseur et souverain le ce pays;
2° Que, de notre côté, nous nous engagerions à payer, sa vie durant, la pension au roi de Sardaigne qui vient d'abdiquer, et 500,000 francs au nouveau roi, payables pour lui et même pour ses enfants, leur vie durant;
3° Que nous leur garantirions la propriété, et souveraineté de l'île de Sardaigne, et lui donnerions en toute souveraineté et propriété Piombino, Orbitello avec un arrondissement, formant en tout au plus 50,000 âmes, et où il y eût une ville et un palais pour sa résidence.

Cette possession porterait le titre de duché de Piombino, ou de la principale ville qui serait dans son arrondissement.

Étant ici en l'air, sans carte, sans renseignements, je ne puis désigner la limite de l'arrondissement qu'on pourrait lui donner; mais causez-en directement avec Marescalchi ou avec le ministre de Toscane, sans qu'ils s'en doutent (ces individus connaissent toutes les villes et positions de la Toscane) , et envoyez-moi un rapport avec une carte. Vous sentez qu'il nous serait facile, en cédant le duché de Parme au roi de Toscane, d'obtenir la rétrocession de ce district.

Je vous ferai connaître définitivement le parti qui me paraîtra le plus utile, et la manière dont je pense que cette négociation pourrait être conduite.

La lettre du régent de Portugal m'a paru moitié dilatoire, moitié satisfaisante, et peut-être, comme vous le pensez, l'un et l'autre à la fois. Je suppose que vous en avez reçu la copie; ainsi je ne juge pas convenable de vous l'envoyer. Voyez M. de Souza; dites-lui qu'il expédie un courrier à sa cour; qu'il dise que j'ai reçu la lettre du régent, que je ne puis me désister de mes prétentions; que le moyen que demande le régent de Portugal est simple; que moi, je laisserai l'affaire du ministre en Portugal dans la situation où elle se trouve, sans le renvoyer à Lisbonne et le laissant quelque temps en disgrâce; que lui, sans rien dire des motifs, nomme un autre ministre, mais ôte Almeida et ce misérable douanier; que, de mon côté, je nommerai un autre ministre à Lisbonne; et sans que l'Europe se doute de rien, sans que cela ait fait aucun bruit, cette affaire se trouvera terminée; qu'il est impossible que le Portugal retrouve en Europe crédit, puissance, si le ministre actuel reste, puisqu'il est évident qu'il nous a manqué et qu'il est entièrement dévoué à nos ennemis.


Elbeuf, 3 novembre 1802

PAROLES DU PREMIER CONSUL EN VISITANT LES MANUFACTURES D'ELBEUF

Cette ville est une ruche où, heureusement, il n'existe pas de frelons. Les magistrats sont heureux d'avoir à gouverner des hommes laborieux; le travail assure à la fois le repos de la société et le bonheur de l'individu.


Rouen, 3 novembre  1802

Au consul Cambacérès

J'ai reçu, Citoyen Consul, votre lettre du 11 brumaire.

J'ai visité hier différentes manufactures de Rouen. Ce matin, à huit heures, je suis parti pour Elbeuf pour visiter cette ville, qui ne forme qu'une seule manufacture. Je l'ai trouvée dans le meilleur état. Sa prospérité s'est accrue d'un tiers depuis 1788. Il y a dans tout ce département un attachement au Gouvernement, franc et dégagé de toute autre pensée. On y retrouve les avantages de ce système de 1789 qui avait armé la nation entière et l'avait réunie dans le même mouvement. Depuis le négociant ou le fabricant le plus riche, et qui, pendant la révolution, ont eu le plus la réputation d'aristocratie, jusqu'au dernier homme du peuple, ils sont tous réunis.

Les nouveaux amnistiés y vivent tranquilles et sans considération. On envoie à Maret directement des notes pour le Moniteur.


Rouen, 4 novembre 1802

Au consul Cambacérès

Je reçois, Citoyen Consul, vos deux lettres du 12 brumaire.

Je ne verrais pas grand inconvénient à ce que vous fassiez arrêter le nommé Giguet, imprimeur, s'il y a la moindre probabilité qu'il ait reçu de l'argent de l'étranger pour imprimer des libelles.

Faites faire une nouvelle perquisition pour arrêter le chevalier de Coigny. Nous avons besoin d'un exemple, il faut le donner.

J'ai assisté hier au soir à une fête que m'a donnée le commerce, qui a consisté en une comédie de société et un bal.

Je monte à cheval pour passer la parade. Le soleil vient de se lever et le temps est superbe.

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A dix heures du soir.

J'ai passé la parade, qui a été fort belle. J'ai été fort content de la tenue des troupes. L'affluence était immense. Le ministre de la marine est parti ce soir. Demain, à six heures du matin, je pars pour le Havre.


Rouen, 4 novembre 1802

Au citoyen Talleyrand, ministre des relations extérieures

Vous devez, Citoyen Ministre, faire connaître au citoyen Otto, ainsi qu'au général Andréossy :

1° Que l'état du continent tel qu'il était alors, et rien que cet état, ne porterait aucun préjudice à l'état actuel, puisqu'à l'époque de la signature du traité d'Amiens et un mois après nous avions en Suisse 10,000 hommes, en Piémont 30,000 hommes, et dans la République italienne près de 40,000 hommes; que, par conséquent, en demandant l'état tel qu'il était à la paix d'Amiens, ils ne peuvent pas se plaindre de l'état aujourd'hui ;
2° Que le roi d'Angleterre n'ayant voulu reconnaître ni la République italienne, ni la République ligurienne, ni la République helvétique, l'état du continent ne pouvait être garanti par l'Angleterre, puisqu'elle ne le reconnaissait pas ;
3° Que le traité d'Amiens n'en parle d'aucune manière, et dès lors l'Angleterre n'a rien à demander en bon droit;
4° Que, d'un autre côté, nous avons aussi à demander l'état des Indes tel qu'il était à l'époque du traité; et cependant il s'y est opéré de grands changements ;
5° Qu'il est vrai que l'état des négociations d'Allemagne, où le nom même du roi d'Angleterre ne se trouvait pas cité, était fait pour irriter la nation ; mais que ce n'est pas la faute du Gouvernement français, mais celle du Gouvernement anglais;
6° Que l'esprit d'irritation constante qu'entretiennent les journaux, la protection accordée aux brigands, aux évêques rebelles, aux Bourbons, l'argent qu'on continue à donner aux émigrés, ne peuvent que nous maintenir dans la plus grande méfiance; qu'on ne doit donc s'attendre à aucune confidence, à aucun concert intime, tant que l'on n'aura pas pris un parti qui fasse cesser l'état de disposition hostile du Gouvernement anglais contre le Gouvernement français;
7° Que, si même notre commerce réciproque se trouve sans concert, on doit encore l'attribuer à la même cause, qui empêche de compter sur rien de stable de la part d'une nation d'où il ne revient que des accents de fureur, des provocations à la mort, des trames, des complots ;
8° Que, quant à la Suisse, nous ne souffrirons pas que l'Angleterre s'en mêle, parce quelle ne s'en occuperait que pour y semer le désordre ; ce serait un nouveau Jersey d'où l'on fomenterait des troubles contre la France.

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Je pars demain à six heures pour le Havre. Il est difficile d'être plus satisfait que je le suis de tout ce pays-ci. 


Le Havre, 6 novembre 1802

Au consul Cambacérès

Je suis parti de Rouen, Citoyen Consul, vendredi à six heures du matin. Je me suis arrêté à Caudebec, à Yvetot et à Bolbec. Je suis arrivé au Havre à six heures du soir. J'ai fait ma route au milieu d'une population immense, obligé de m'arrêter à chaque pas. Il est difficile de se faire une idée de tous les sentiments que j'ai recueillis sur mon passage. Dans tous les villages, à la porte des églises, les prêtres, le dais dehors, entourés d'une grande foule, chantaient des cantiques et jetaient de l'encens.

L'illumination du Havre était extrêmement recherchée. J'ai passé la journée d'aujourd'hui à visiter cette ville et ce port intéressants. Demain, je visiterai l'intérieur des bassins. Lundi, je visiterai la garnison. On doit ce jour-là lancer un petit bâtiment. Mardi j'irai à Honfleur, et mercredi je partirai pour Dieppe. Mon voyage, comme vous voyez, est retardé de quelques jours ; mais il m'est difficile de faire autrement.


Dieppe, 10 novembre 1802

Au consul Cambacérès

J'ai reçu, Citoyen Consul, vos lettres des 16 et 17. Il faut faire toutes toutes les lettres dont était porteur M. de Stainville, en se fondant sur ce principe, qu'il a été à la solde des Anglais, qu'il a porté les armes contre la République, et que des renseignements de Londres, qui ne m'ont jamais trompé, m'ont appris qu'il avait été à Londres pour se faire payer d'une pension que lui font les Anglais.

Vous avez parfaitement fait de faire éloigner la seconde représentation de Molière chez Ninon. Il faut tancer le chef du bureau des théâtres pour n'avoir pas senti qu'une phrase comme celle-là pouvait donner lieu à quelque scandale.

Je ne vois pas d'inconvénient à ce que vous nommiez qui vous jugerez le plus digne, soit pour le tribunal de Trèves, soit pour la judicature vacante.

Je suis arrivé à Dieppe hier à six heures et demie du soir. La ville était illuminée avec un goût particulier; mais je me trouve logé, par vanité de petite ville, dans une très-mauvaise maison, où toutes les cheminées fument.

J'ai traversé Fécamp, Saint-Valery. La route du Havre à Dieppe étant une route de traverse, les voitures ont dû souvent marcher au pas, ce qui a mis les habitants des villages environnants à même de me suivre sur tout mon passage, et souvent nous avons lié conversation ensemble. Tout ce que j'ai vu, soit dans ce pays, soit dans l'esprit du peuple, m'a paru extrêmement satisfaisant.


Dieppe, 11 novembre 1802

Au consul Cambacérès

Je reçois, Citoyen Consul, votre lettre du 19. Je crois que vous avez mal fait de relâcher M. de Stainville; c'est un acte de faiblesse.

Je ne conçois rien à la conduite de Portalis. J'avais ordonné, non une fois, mais dix fois, que les évêques ne déplaceraient aucun curé, provisoirement, et cependant on fait toujours le contraire. Si, cependant, Portalis en a donné l'ordre, les préfets et les évêques doivent être coupables, et il trouve toujours leur conduite toute simple.

Une secte orgueilleuse et implacable a voulu vexer les constitutionnels : ils se sont défendus, et le peuple les a soutenus.

Écrivez 

au grand juge que je désire qu'on ne fasse aucune poursuite, ni contre les constitutionnels, ni contre le peuple de Carcassonne. Mon intention est que, dans ce diocèse plus que dans aucun autre, il y ait beaucoup de constitutionnels.

En général, même dans le diocèse de Rouen, ils ont été trop abandonnés, et, quoique je ne puisse me plaindre des choix ni de Rouen, ni du Havre, ni de Fécamp, ni de Dieppe, il est vrai, cependant, que même l'archevêque de Rouen les tient trop à l'écart. Je désire que vous fassiez éclaircir s'il est vrai que le cardinal Caprara ait imposé une déclaration aux constitutionnels, celle de rentrer dans le sein de l'Église : il paraîtrait bien extraordinaire que Portalis n'en ait rien su.

Enfin il parait convenable que Portalis et le grand juge prennent des renseignements avant d'approuver l'organisation des diocèses.


Dieppe, 1

Au consul Cambacérès

J'ai des renseignements très-précis, Citoyen Consul, sur l'abbé David. Si cet individu n'a pu être arrêté au départ, il sera très-urgent de ne rien ébruiter, afin de le saisir au retour avec tous ses papiers. C'est un des agents les plus actifs de Pichegru.

Je suis de retour d'une visite que je viens de faire au Tréport. Demain, avant le jour, je me mettrai en route pour Gisors.

Je serai à Paris, au plus tard, samedi au soir.


Dieppe, 11 novembre 1802

Au citoyen Portalis, conseiller d'État, chargé de toutes les affaires concernant les cultes

Je n'ai pu être que vivement affligé, Citoyen Conseiller d'État, des troubles qui viennent d'avoir lieu à Carcassonne et de la mauvaise conduite que tiennent certains évêques. Vous n'avez donc pas prévenu les préfets que je n'entendais pas qu'il y eût aucun changement provisoire ? Si vous en avez donné l'ordre, comment ne me proposez-vous pas la destitution des préfets qui contreviennent à des instructions aussi positives ?

Je désire que vous me prépariez un rapport sur cet objet à mon arrivée.

Je ne comprends pas non plus comment le cardinal Caprara a pu imposer une nouvelle déclaration aux prêtres constitutionnels, en exigeant d'eux la formule de rentrer dans le sein de l'Église. Vous trouverez ci-joint le rapport du chef de légion de gendarmerie sur cet objet. Je désire que vous ayez sur cet objet une explication avec le cardinal Caprara.

Dans ce diocèse-ci même, je suis à m'apercevoir qu'on désire plus de constitutionnels qu'il n'y en a. Quelque abandon qu'on puisse faire d'eux, ils ont la majorité de l'opinion.


Paris, 11 novembre 1802

A l'archevêque de Lyon

Monsieur l'archevêque de Lyon, je continue à penser que votre présence dans votre diocèse est nécessaire. Je vois avec peine, dans la lettre que vous m'avez communiquée, que vous écrasez les constitutionnels; vous ne les traitez pas de la même manière que les anti- constitutionnels. Cependant, les uns sont bien plus vos amis et ceux de l'État qu'une partie des autres. Votre lettre au chef des anti-constitutionnels est de l'huile sur le feu ; vous rendrez plus exigeants des gens qui paraissent l'être déjà trop.

Il est évident que les hommes qui sont de retour à Paris ont mal agi avec les constitutionnels, en se vantant, avec si peu de dextérité et tant d'orgueil, qu'ils s'étaient rétractés. Je vois donc avec peine que votre conduite n'est pas propre à ramener la tranquillité, et que vous ne faites que donner de l'orgueil à des hommes qui en ont trop.

Le parti extrême des réfractaires est votre ennemi ; par cette conduite, les constitutionnels seront vos ennemis ; votre conduite sera donc faible et vacillante, et n'aura pas ce caractère qui doit vous faire estimer.

Je regarde votre lettre au chef des anti-constitutionnels comme un compte rendu d'un subordonné à un supérieur, tandis que cela ne le regarde pas. Vous ne faites point là la figure d'un archevêque; vous faites la figure d'un curé envers un grand vicaire. Vous ne devez jamais entrer dans ces discussions avec vos subordonnés. C'est être ennemi du repos de l'église et de l'état que vouloir, par satisfaction de son orgueil, écraser un parti et triompher où il n'y a pas sujet de triomphe. Le concordat n'est le triomphe d'aucun parti, mais la conciliation de tous.

Ne vous laissez pas environner par des hommes qui, ayant été subordonnés toute leur vie, en ont nécessairement l'empreinte et le caractère.

Ce qui s'est passé entre vous et tel pénitent ne regarde pas vos subordonnés, et, quand vous blâmez un parti, vous, devez surtout avoir attention de ne pas le faire connaître à l'autre, et, au contraire, par cette réserve, vous acquerrez l'estime et la confiance de tous les partis, et vous gouvernerez votre diocèse. Votre conduite, portant le caractère de la faiblesse, n'aura pas cette réunion unanime de tous les suffrages, qui ne va pas sans l'estime de caractère et de réserve. Quant à quelques réfractaires exagérés, dès qu'ils seront connus, je les ferai enlever. Méfiez-vous beaucoup des sulpiciens, je vous le répète : ces hommes ne sont attachés ni à l'État, ni à la religion; ce sont des intrigants.


Dieppe, 11 novembre 1802

Au citoyen Talleyrand, ministre des relations extérieures

Je vous envoie, Citoyen Ministre, les pièces relatives aux affaires de Suisse. Je vois avec peine que l'on n'ait pas adopté la mesure que j'avais prescrite, de déclarer une vingtaine d'individus comme ne devant plus être employés. Si le général Ney trouve des difficultés à faire faire cette opération par le sénat, il faut qu'il envoie les noms des vingt individus qui passent pour ennemis déclarés de la France, et les fasse arrêter comme otages.   


Dieppe, 11 novembre 1802

Au citoyen Talleyrand

Les instructions, Citoyen Ministre, que vous avez données au général Beurnonville ne me paraissent pas suffisantes. Il faut encore passer un office à M. d'Azara, pour lui faire connaître que la conduite du ministère, qui fait tout ce qu'il peut pour nous nuire et nous déplaire, ne s'accorde pas avec les sentiments du roi et avec ce que j'ai le droit d'attendre de l'Espagne.


Dieppe, 12 novembre 1802

Au citoyen Portalis, conseiller d'État, chargé de toutes les affaires concernant les cultes

Je vous prie, Citoyen Conseiller d'État, d'écrire une circulaire aux préfets dans les arrondissements desquels les diocèses ne sont pas encore définitivement organisés, pour leur faire connaître que mon intention est que tous les constitutionnels qui ont de bonnes mœurs soient traités favorablement, et que, dans les observations qu'ils feront sur le travail des évêques, ils fassent connaître les hommes qu'on aurait pu placer, et que l'esprit de parti aurait pu éloigner.


Paris, 14 novembre 1802

DÉCISION

Demande d'une indemnité adressée au Premier Consul par le citoyen Pindray, officier de la 55e demi-brigade,
pour la perte de ses biens vendus au profit de la République pendant qu'il était à l'armée.
Le ministre des finances se fera faire un rapport sur l'affaire, pour reconnaître si, lorsque les biens ont été vendus, c'est sur le chef de l'officier, ou si ce n'est pas sous le nom d'un père, frère, allié.

Si les biens étaient sur le chef de cet officier, il ne reste plus qu'à savoir si l'officier a été au corps sans interruption depuis la loi sur les émigrés.

Le ministre écrira au ministre de la guerre pour demander l'extrait des contrôles où cet officier aurait été compris, année par année, depuis 1790.

Six individus du corps, du grade d'officier ou de sergent, se rendront au greffe du tribunal. Le commissaire du gouvernement, après avoir exigé le serment de dire la vérité, leur demandera la déclaration qu'ils ont vécu et servi avec l'officier dont il s'agit. Il renouvellera cette interpellation pour chacune des années qui se sont écoulées depuis 1791.


Paris , 15 novembre 1802

CIRCULAIRE AUX MINISTRES

Le Premier Consul rappelle aux ministres les dispositions de l'arrêté du 18 fructidor au VIII; il désire qu'ils se conforment d'une manière invariable aux règles établies dans cet arrêté, et d'après lesquelles chaque ministre, ayant un crédit ouvert pour le mois courant par un arrêté pris dans les derniers jours du mois précédent, doit expédier, dans les dix premiers jours du mois auquel s'applique son crédit, toutes les ordonnances pour les besoins de son service. Le ministre du trésor public ne peut faire rentrer dans la répartition qu'il présente à l'approbation des Consuls, au conseil général du 15, aucune dépense dont l'ordonnance ne soit portée dans le bordereau qui lui aura été adressé par le ministre ordonnateur avant le 10 de chaque mois. La répartition ayant été approuvée le 15, le payement des ordonnances s'ouvre le 21. Toute ordonnance qui n'aurait point été faite dans les dix premiers jours du mois ne pourra être acquittée. Il n'y a d'exceptions à cet égard que celles reconnues par l'arrêté du 19 vendémiaire an IX, contenant une nouvelle rédaction de l'article 8 de celui du 18 fructidor ci-dessus cité.

Au conseil général des finances du 15 de chaque mois, le ministre du trésor public présentera les bordereaux des ordonnances qui lui auront été adressées par chaque ministre. Ces bordereaux contiendront les noms des individus à qui les ordonnances seront destinées, le montant de l'ordonnance, et l'espèce du service pour lequel chaque ordonnance sera délivrée.


Saint-Cloud, 17 brumaire 1802

Au citoyen Regnier, Grand-Juge, ministre de la justice

Citoyen, le Premier Consul désire que vous proposiez un règlement portant pour disposition principale que, lorsqu'un tribunal d'appel aura cassé une sentence d'un tribunal de première instance, le jugement du tribunal d'appel sera notifié au greffe du tribunal de première instance dont la sentence aura été réformée.


Saint-Cloud, 17 novembre 1802

Au citoyen Bigot de Préameneu

Le Premier Consul pense, Citoyen, que votre législation sur les douanes est insuffisante dans les peines et la procédure :

Dans les peines, en ce qu'un homme qui fait la contrebande ne court pas la chance d'une peine infamante, dans ce sens que, si le prévenu est riche, il trouve moyen de s'échapper sans demeurer quelque temps aux fers; on ne lui suppose aucune flétrissure;

Dans la procédure, en ce que l'esprit des jurés en général attache peu d'intérêt aux douanes; que, communément, ils sont pris dans les villes qui croient devoir à la contrebande leur principal moyen de prospérité.

Le Premier Consul désire que vous fassiez connaître dans un rapport l'ancienne législation française, celle de l'Angleterre, et celle qu'il conviendrait d'adopter.



Saint-Cloud, 17 novembre 1802

NOTE

L'opinion du Premier Consul est que le trésor public est en retard des traites de coupes de bois de l'an IX, au moins pour quatre millions ;

Qu'au 1er brumaire, sur le quartier de germinal et celui de messidor an X, il restait à effectuer au moins la moitié des rentrées.

Personne ne porte plainte, parce que les receveurs remboursent à échéance et que l'intérêt du particulier est satisfait.

Le trésor public ne s'aperçoit de rien, parce que le résultat n'est autre qu'une diminution de recettes en bons à vue.


Saint-Cloud, 17 novembre 1802

Au citoyen Talleyrand, ministre des relations extérieures

Je vous prie, Citoyen Ministre, de faire passer à la cour de Madrid, à la cour de Florence et à la cour de Naples, des notes officielles pour demander qu'il ne soit souffert dans ces États aucun cordon ni croix tenant aux anciens ordres de France.

Vous aurez une conférence avec M. de Lucchesini; vous lui ferez sentir que, dans plusieurs cours de I'Europe, on ne souffre plus que l'on porte des ordres qui véritablement sont un outrage à la France; qu'aujourd'hui, à Varsovie et dans toutes les parties de la Prusse, et même à Berlin, des émigrés portent des croix et des cordons; que nous désirerions que le roi de Prusse, de son propre mouvement, donnât cette preuve d'attachement à la République, en ordonnant que, sous quelque prétexte que ce soit, aucun individu ne pourra paraître avec des marques distinctives de l'ancienne cour.

Écrivez dans le même sens au citoyen Marescalchi, en Ligurie, en Hollande, en Suisse, à Hambourg, à Francfort et dans les différentes villes d'Allemagne; car, nos ambassadeurs ne sachant pas quelle est l'opinion du Gouvernement sur cet objet, on laisse souvent subsister dans ces pays d'anciennes distinctions.    


Saint-Cloud, 17 novembre 1802

DÉCISION

On propose aux Consuls de décider que les conscrits supplémentaires seront constamment à la disposition du
ministre de la guerre, soit pour compléter les contingents, soit pour recruter employés dans les colonies, ou recevoir telle autre destination qu'il jugera convenable. On fait observer que cette mesure, qui ne saurait être trop tôt annoncée, parait la seul qui puisse déterminer les conscrits à se présenter.
Tout individu qui ne s'est pas présenté à la commune pour obéir à la loi sera sur-le-champ arrêté, à la diligence de la gendarmerie et des officiers en recrutement, et  envoyé au corps.

Faire de cette disposition une lettre aux préfets, pour leur faire connaître que, dans les villes où  il y aurait eu un trop grand nombre d'individus non présentés, ils peuvent commencer le travail.

Au 1er nivôse, tous les suppléments seront envoyés aux armées, et les plus récalcitrants aux colonies.

Communiquer au général Moncey pour mettre à l'ordre de la gendarmerie.


Saint-Cloud, 17 novembre 1802

NOTE POUR LE MINISTRE DE LA GUERRE

Le Premier Consul ayant ordonné, dans son voyage, de faire conduire au Val-de-Grâce plusieurs militaires très-blessés, le ministre de la guerre est invité à ordonner que l'on épuise, pour les guérir, tous les moyens et toutes les ressources de l'art.


Saint-Cloud, 17 novembre 1802

Au citoyen Portalis, conseiller d'État, chargé de toutes les affaires concernant les cultes

Je vous prie, Citoyen Conseiller d'État, de faire donner 20,000 francs à l'évêque de Vannes, dont 10,000 francs pour servir à l'ameublement particulier du palais épiscopal qui doit lui servir de logement, et 10,000 francs pour être distribués en gratifications aux ecclésiastiques de son diocèse dont il serait le plus satisfait.

Témoignez-lui la satisfaction que j'ai de ses services et de sa conduite, et dites-lui que je compte toujours sur son activité et son zèle pour continuer dans les mêmes principes et éclairer ce bon peuple; que, s'il arrivait que, pour des courses multipliées ou des tournées nécessaires dans son diocèse, il eût besoin d'argent, je vous ai donné l'ordre de tenir à sa disposition jusqu'à concurrence de 50,000 francs, qu'il pourra successivement demander, tant pour lui que pour des aumônes à faire, soit aux prêtres, soit aux malheureux, en choisissant ceux qui sont le plus attachés au Gouvernement.

Faites-lui sentir, en même temps, qu'il est inutile de donner aucune publicité à cette mesure.


 Saint-Cloud, 17 novembre 1802

A l'évêque d'Orléans

Monsieur l'évêque d'Orléans, l'ordre est donné pour que le couvent des Carmes, à Vannes, soit destiné au logement de l'évêque, et j'ai donné au citoyen Portalis l'ordre de payer à cet évêque 10,000 francs, pour qu'il puisse se procurer tout ce qui pourrait lui manquer.

Je vois avec plaisir l'activité que vous avez mise à concilier les intérêts d'une classe d'hommes nombreuse; ce qui est à la fois un service rendu à l'État et à la religion.


Paris, 18 novembre 1802

ARRÊTÉ

ARTICLE ler. - La cathédrale de la ville d'Alexandrie, qui encombre la place d'armes, sera démolie. Les matériaux seront employés aux fortifications.
ART. 2. - Les ministres de l'intérieur, des finances, et de la guerre sont chargés de l'exécution du présent arrêté.


Saint-Cloud, 18 novembre 1802

Au citoyen Lacuée, aide de camp du Premier Consul

Vous trouverez ci-joint deux états des employés des douanes et des employés forestiers. Je désirerais deux choses : 1° que l'on pût faire faire des revues, soit en totalité, soit en partie, pour être sûr que nous ne sommes pas trompés sur le nombre d'hommes existant; 2° un projet qui donnât une organisation uniforme à tous ces individus, en leur donnant un habillement et armement qui les mit à même, en cas d'événement, de prêter secours et main-forte à la gendarmerie.


Saint-Cloud, 18 novembre 1802

ARRÊTÉ

ARTICLE ler. - Les curés des villes dont les maires sont nommés par le Premier Consul sont curés de première classe.
ART. 2. - Chaque année, le Premier Consul, sur la demande des évêques, fera passer de la seconde à la première classe les curés qui se seront distingués par leur zèle, leur piété et les vertus de leur état.
ART. 3. - Les traitements ecclésiastiques seront payés par trimestre.
Le premier jour de chaque trimestre, le conseiller d'État charge des affaires des cultes remettra l'état des curés qui existaient le premier jour du trimestre précédent.
Cet état présentera le montant de leur traitement et celui de la pension dont ils jouissent, et dont il sera fait déduction sur leur traitement.
Cette déduction n'aura lieu qu'à compter du ler vendémiaire dernier.
Les traitements des curés septuagénaires n'y seront pas assujettis. 
ART. 4. - Le ministre du trésor public présentera les demandes de fonds au conseil général des finances du 15, de manière que les fonds soient faits et qu'au jour de l'échéance de chaque trimestre le payeur des dépenses diverses de chaque département en effectue le payement.
ART. 5. Le payeur des dépenses diverses de chaque département soldera les traitements ecclésiastiques sur l'état dressé par l'évêque; le décompte en sera fait à la préfecture, et visé par le préfet.
ART. 6. - Chaque curé devra être porteur d'une lettre par laquelle le conseiller d'État chargé des affaires des cultes lui fera connaître que le Gouvernement a agréé sa nomination, faite par l'évêque, et fixera l'époque de laquelle datera son traitement.
ART. 7. - Le trésorier du Gouvernement sera chargé du payement des traitements ecclésiastiques des diocèses de Paris, de Versailles et de Meaux.
ART. 8. - Les ministres de l'intérieur et du trésor public et le conseiller d'État chargé des affaires des cultes sont chargés de l'exécution du présent arrêté.


 Saint-Cloud, 18 novembre 1802

Au citoyen Barbé-Marbois, ministre du trésor public

Le citoyen Maret, Citoyen Ministre, vous enverra l'arrêté relatif au payement des curés.

Le citoyen Estève remettra au trésor public les 950,000 francs qui lui ont été versés pour vendémiaire an XI.

Pour l'an X, il ne sera pas exercé de retenue sur les pensions, de manière que vous pouvez faire solder sur-le-champ les 200 curés nommés dans l'an X. Le citoyen Portalis fera, dans la première semaine de frimaire, pour le trimestre, ce qu'il aurait dû faire dans la première semaine de vendémiaire, de manière que dans ce trimestre vous soyez en mesure de faire solder le premier trimestre de l'an XI à tout le monde.

Dans la semaine, avant dimanche, le citoyen Portalis peut vous remettre la division de ces 200 curés en deux classes, savoir : ceux nommés par le Premier Consul, et les autres.

Comme pour l'an X, pour le solde de cette somme, il ne faudra pas 50,000 francs, il sera inutile de faire un fonds exprès pour cet objet, vu que le citoyen Estève a encore des fonds appartenant à l'an X pour le culte, et, quoique j'aie d'autres besoins, j'estime que, si ce qui reste dû sur les traitements ne va qu'à 50, à 100, ou même à 900,000 francs, vous pouvez les demander au citoyen Estève, sans être obligé de faire un nouveau fonds sur l'exercice de l'an X.


Saint-Cloud, 18 novembre 1802

Au citoyen Portalis, conseiller d'État, chargé de toutes les affaires concernant les cultes

Le citoyen Maret, Citoyen Conseiller d'État, vous remettra l'arrêté relatif au payement des curés :

Je désire que, dans la journée de samedi, vous remettiez au trésor public l'état des 900 curés nommés, divisés en deux classes : ceux des communes, nommés par le Premier Consul, et les autres.

Tous ceux nommés dans le trimestre de germinal seront payés à dater du ler germinal; ceux nommés dans le quatrième trimestre le seront du ler messidor.

Vous aurez soin de faire le travail général, au 5 vendémiaire, de tous les ecclésiastiques nommés, avec la pension dont ils jouissent. Vous me remettrez ce travail le 5 frimaire.


Saint-Cloud, 19 novembre 1802

ARRÊTÉ

ARTICLF 1er. - Il y aura un directeur général du musée central des Arts.
ART. 2. - Il aura sous sa direction immédiate le muséum du Louvre, le musée des monuments français, le musée spécial de l'École française à Versailles, les galeries des palais du Gouvernement, la monnaie des médailles, les ateliers de chalcographie, de gravures sur pierres fines et de mosaïque, enfin l'acquisition et le transport des objets d'art.
ART. 3. - Les membres du musée central des Arts cesseront leurs fonctions à dater du ler frimaire prochain.,
ART. 4. - Un architecte, un professeur d'antiquités, un commissaire expert, un garde des dessins et de chalcographie, et un secrétaire, seront nommés et révoqués par le Gouvernement, sur la proposition faite par le directeur général au ministre de l'intérieur.
ART. 5. - Les membres de l'administration actuelle jouiront, à titre d'administrateurs honoraires et de gratification annuelle, de la moitié du traitement qui leur était accordé pour l'an XI. Ceux d'entre eux qui rempliront une des fonctions indiquées dans l'article précédent recevront en entier leur traitement.
ART. 6. Il sera assigné un logement au directeur général.
ART. 7. Toutes les dépenses de traitements, entretien, réparations, acquisitions, transport d'objets d'art, seront ordonnancées par le ministre de l'intérieur.
ART. 8. - Le ministre de l'intérieur est chargé de l'exécution du présent arrêté.


Paris, 19 novembre 1802

ARRÊTÉ

ARTICLE ler. - Aussitôt après la circonscription des paroisses et des succursales d'un diocèse, les préfets remettront, au ministre des finances et au conseiller d'État chargé de toutes les affaires concernant les cultes, un état des églises et des presbytères qui ne se trouveront pas employés dans cette circonscription.
ART. 2. - Les préfets ne pourront mettre en vente aucune des églises, aucun des presbytères non employés dans la circonscription des diocèses, qu'après avoir obtenu une décision du ministre des finances.
ART. 3. - Les ministres de l'intérieur et des finances sont chargés de l'exécution du présent arrêté.


Saint-Cloud, 19 novembre 1802

Au citoyen Regnault de Saint-Jean d'Angely, président de la section de l'intérieur au Conseil d'État

Le règlement, Citoyen, pour les opérations à faire dans le département de la Seine, en exécution du sénatus-consulte du 16 thermidor, n'a point été présenté. Le Premier Consul désire que vous en accélériez la rédaction et la discussion.

Il désire, en même temps, que vous soumettiez à l'examen de la section les questions suivantes :

Peut-on être, en même temps, président d'une assemblée de canton et d'un collège électoral ?

Peut-on nommer un président d'une assemblée de canton hors du canton ?

Le Premier Consul invite aussi la section à s'occuper:

1° D'un projet d'acte de nomination des présidents; 
2° D'un projet de lettre au président de chaque assemblée, pour la convocation de l'assemblée, et d'un extrait des délibérations des Consuls pour la convocation et tous les détails qui doivent être prescrits, lequel sera joint à cette lettre ;
3° D'une lettre du Premier Consul au chef de légion de gendarmerie, visée par le grand juge, au général commandant, visée par le ministre de la guerre, pour leur annoncer la convocation de l'assemblée, et leur faire connaître que, le président en ayant la police, ils doivent, pour cet objet, obtempérer à ses réquisitions.

Dans le projet d'acte de nomination on adoptera, autant qu'il sera possible, la solennité des anciennes formes, et on insérera une formule de serment appropriée aux fonctions, et placée assez naturellement pour que l'acte ne paraisse pas avoir pour objet d'imposer un nouveau serment.


Saint-Cloud, 20 novembre 1802

Au général Berthier, ministre de la guerre

Vous trouverez ci-joint, Citoyen Ministre, une note sur les dernières dépêches du général Chasseloup. Vous pouvez lui donner ordre que, lorsqu'il aura fait les dispositions nécessaires pour répondre aux observations contenues dans cette note, et qu'il aura mis en train les travaux d'Alexandrie, il se rende à Paris avec les plans et les devis, afin d'arrêter les ouvrages à ordonner pour remplir le but du Gouvernement sur cette place si importante.

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NOTE SUR LES FORTIFICATIONS D'ALEXANDRIE

I. On voudrait faire d'Alexandrie une place de première force. On ne craindrait pas d'y dépenser une dizaine de millions.
II. On n'a pas trouvé, dans les dépêches du général Chasseloup, du 3 brumaire, qui ont été communiquées, la réponse aux questions suivantes :
l° Est-il possible de faire une inondation rasant le glacis, et se prolongeant à 3 ou 400 toises de la place, de manière à faire concourir surtout les eaux à la défense de la place ?
2° Si les eaux peuvent concourir à défendre la place sans en augmenter l'étendue déjà trop grande, on voudrait un système de fortifications où la citadelle, la ville et le nouveau fort que l'on ferait du côté de la Bormida, fussent le plus possible indépendants l'un de l'autre, de manière que, deux de ces trois fortifications prises, l'autre pût encore non-seulement servir pour capituler, mais encore résister un certain nombre de jours.
3° L'inondation de la Bormida, du côté de Marengo, est moins avantageuse que le long de la place, soit du côté d'Asti, soit du côté de Bassignana.
4° L'opinion de tous les généraux et officiers qui ont défendu Alexandrie est que la première chose à faire est de disposer tout le local à 600 toises de la place, et surtout de donner un autre cour à la petite rivière; opération qu'on a toujours éloignée, ce qui est 1a cause du peu de défense de la place.
5° Après ce travail, celui du creusement des fossés, pour se servi des terres pour couvrir la place et faire entrer le Tanaro, paraît être le plus urgent ;
6° Et enfin les deux ouvrages que l'on projette dans les îles du Tanaro ; mais il faudrait les faire de manière qu'ils pussent servir à la ville contre la citadelle, et à la citadelle contre la ville.
III. On est entièrement de l'avis du général Chasseloup sur la destination du vieux château : d'y centraliser tous les établissements de l'armée, fonderie, salles d'armes, etc., en ne laissant aucun d'établissement militaire à Turin.
IV. On désirerait que l'on désignât dès aujourd'hui tous les bâtiments que l'on trouverait dans la ville, propres à caserner 6,000 hommes, à établir des hôpitaux pour 5,000 malades, et des magasins pour l'approvisionnement de 20,000 hommes pendant un an.
V. On désire que le général Chasseloup ordonne sur-le-champ tous les travaux nécessaires à la citadelle, et surtout pour la disposition du local à 600 toises de la place; qu'il retourne faire un voyage à Alexandrie, pour s'assurer encore par lui-même de tout le parti que l'on peut espérer des inondations, et qu'il visite les principaux établissements nationaux.


Saint-Cloud, 22 novembre 1802

Au consul Lebrun

Je vous prie, Citoyen Consul, de me faire connaître ce que l'on pourrait faire pour améliorer la situation de l'esprit public et surtout du local de Beaupreau (arrondissement d'Angers).


Saint-Cloud, 23 novembre 1802

Au citoyen Chaptal, ministre de l'intérieur

Je vous prie, Citoyen Ministre, d'apporter vendredi un compte général de nos blés et farines, et l'état de situation de nos approvisionnements au ler frimaire, avec l'état des 300,000 quintaux confiés à Vanlerberghe, et l'état des lieux où il doit les tenir en magasin.


Saint-Cloud, 23 novembre 1802

Au contre-amiral Decrès, ministre de la marine et des colonies

Les cinq vaisseaux partis de Brest, Citoyen Ministre, savoir l'Argonaute, l'Aigle, etc., se rendront, trois à Gênes, un en Corse, à Ajaccio, et l'autre dans la rade de Livourne.

Les trois vaisseaux de Gênes embarqueront chacun 5 à 600 hommes. Vous donnerez l'ordre que l'on frète sur-le-champ à Gênes deux gros bâtiments de transport, pour embarquer 4 à 500 hommes, vu que la légion polonaise, qui doit s'embarquer à Gênes, sera au plus de 2,400 hommes.

Le bâtiment de Livourne embarquera un bataillon de 600 hommes de la 60e de ligne.

Le bâtiment qui se rendra à Ajaccio embarquera un bataillon de 600 hommes de la demi-brigade helvétique.

Mais il est nécessaire, pour n'éprouver aucun retard et pour empêcher la désertion, que ces vaisseaux partent de Brest munis des vivres, de manière qu'arrivés à leur destination ils n'aient qu'à faire leur embarquement et à disparaître.

Je désirerais que ces trois convois pussent se réunir, car le général Leclerc attache une grande importance à ce qu'une certaine masse de forces lui arrive à la fois. J'imagine qu'il sera convenable de les faire réunir tous au détroit.

Le convoi de Toulon, composé del'Indomptable, du Mont-Blanc et du Duquesne, porterait un bataillon de la 20e, un de la 23e, et un de la 14e légère, chacun complété à 700 hommes, et dès lors faisant en tout 2,100 hommes.

Le convoi formé de l'Aatalanteet autres porterait 1,200 hommes, soit des restes de la légion polonaise, soit des restes de la 86e, soit des restes des bataillons d'expédition.

Je ne vois pas de difficulté à ce que le second convoi parte le plus tôt possible; mais il paraît également être dans le désir du général Leclerc que le convoi de l'Indomptableet des trois bataillons puisse se réunir au détroit avec les convois de Gênes et de Livourne, ce qui ferait arriver à la fois dans la colonie 5 à 6,000 hommes de troupes fraîches et bien disposées, si cela toutefois n'a pas trop d'inconvénients.

Vous ferez partir du Havre 300 hommes, dont 900 du bataillon des étrangers, et de Dunkerque 300 hommes des déserteurs français ou anglais.

Je désirerais que vous pussiez vous procurer, pour le 20 frimaire, de quoi embarquer an Havre 1,900 hommes, et pour la même époque, à Dunkerque ou Ostende, 1,200 autres hommes. Faites-moi connaître si vous croyez trouver facilement des moyens de transport dans ces deux places.


Saint-Cloud, 23 novembre 1802

Au contre-amiral Decrès

Je vous renvoie les lettres de la Martinique et de Cayenne. Le secrétaire d'État vous enverra les autres. Les mesures proposées par le citoyen Hugues me paraissent, au premier coup d'œil, pleines de bonnes choses.

1° Il est urgent que vous me fassiez un rapport et que vous me présentiez un projet d'arrêté au prochain travail.
2° Il me paraît plus urgent encore de fréter un bâtiment et de faire partir sur-le-champ tous les canons et autres munitions de guerre nécessaires pour compléter l'armement de la Martinique.
3° Présentez au prochain travail un projet d'arrêté pour rendre le plus exclusif possible aux nationaux le commerce de Cayenne avec les îles de la Martinique, Tabago, Sainte-Lucie et de la Guadeloupe.


Saint-Cloud, 23 novembre 1802

Au général Berthier, ministre de la guerre

Je vous prie, Citoyen Ministre, de donner ordre au Général Murat de faire connaître aux officiers de la légion polonaise qu'ils seront au service de la République et prendront numéro dans nos corps dès leur arrivée à Saint-Domingue, où la première légion s'est déjà distinguée; qu'ils s'embarqueront à Gênes sur des vaisseaux de guerre; qu'ainsi ils feront le passage promptement et commodément.

Après quoi, ce général donnera l'ordre à cette légion de se rendre à Gênes, où elle s'embarquera sur l'escadre qui doit y arriver à chaque instant.

Donnez ordre également à ce général de compléter un bataillon de la 60e à 600 hommes, et de le tenir à Livourne prêt à s'embarquer sur un vaisseau de guerre qui viendra le prendre.

Donnez ordre au général commandant la 23e division militaire de réunir à Ajaccio un bataillon de la demi-brigade helvétique, de compléter ce bataillon à 600 hommes, et de le tenir prêt à s'embarquer sur un bâtiment de guerre qui se rendra à cet effet dans le port d'Ajaccio.

Donnez ordre au général commandant la 8e division militaire de compléter un bataillon de la 14e légère à 700 hommes, et de l'envoyer à Toulon pour être embarqué sur les bâtiments de l'État.

Faites également connaître au général Cervoni qu'indépendamment des 1,600 hommes à fournir par les différents corps pour former les bataillons qui s'embarqueront à Toulon, il peut placer les conscrits et autres individus qu'il aurait, afin de porter, s'il était possible, ces bataillons à 800 hommes.

Il est nécessaire de nommer un général de brigade pour se rendre à Gênes, et un pour se rendre à Toulon, afin de commander chacune de ces expéditions.


Saint-Cloud, 24 novembre 1802

Au citoyen Corvisart

Je vous prie, mon cher Corvisart, d'aller voir le grand juge et le citoyen Lacépède. L'un est malade depuis huit jours, ce qui me fait craindre qu'il ne tombe entre les mains de quelque mauvais médecin; l'autre a sa femme malade depuis longtemps; donnez-lui un bon conseil qui puisse la guérir; vous sauverez la vie à un homme bien estimable et que j'aime beaucoup.


Saint-Cloud, 24 novembre 1802

DÉCISION

Projet d'arrêté qui attribue aux préfets du palais la surveillance et la direction principale des théâtres de la République et des Arts. Je prie le citoyen Cambacérès de se concerter avec le citoyen Lebrun pour un projet définitif. Ne faudrait-il pas que les préfets travaillassent avec le ministre pour l'administration ?

Saint-Cloud, 24 novembre 1802

Au général Pérignon, vice-Président du Sénat Conservateur

Mon cher Général, votre idée relative au tableau à faire pour la séance du 3 fructidor an X me paraît belle et bonne.

Pour moi, tout ce qui me met au milieu d'un corps aussi distingué me flatte et me plaît.

Je vous salue affectueusement. 


Saint-Cloud, 24 novembre 1802

Au citoyen Laplace

Je recevrai, Citoyen, avec un grand intérêt, le travail que vous aviez fait sur les monnaies, au bureau des poids et mesures. Faites quelques recherches sur cette matière, et envoyez-moi un petit mémoire, le plus court et le plus clair possible. Faites-moi connaître également, d'une manière positive, ce qu'a fait Newton sur cet objet.


Saint-Cloud, 25 novembre 1802

Au citoyen Talleyrand, ministre des relations extérieures

Je vous prie, Citoyen Ministre, de faire prendre 500 exemplairesde l'Argus, pour la Martinique, Saint-Domingue, Sainte-Lucie, Tabago, Cayenne, en recommandant de les répandre dans toutes les îles anglaises.


Saint-Cloud, 26 novembre 1802

Au citoyen Chaptal, ministre de l'intérieur

Mademoiselle de Neufcarrère, de Pithiviers, Citoyen Ministre, a fait des efforts extraordinaires, pendant l'épidémie qui a régné dans cette ville, pour secourir des malheureux. Je désire que vous lui témoigniez ma satisfaction et le désir que j'ai de faire pour elle quelque chose qui lui marque l'estime que m'inspire sa conduite, et que vous mettiez à sa disposition une somme de 20,000 francs, tant pour l'indemniser des avances qu'elle a faites que pour distribuer le surplus aux malheureux qui auraient le plus souffert et qui auraient le plus besoin de secours, m'en rapportant entièrement à son esprit de charité et à ses sentiments de bienfaisance.


Saint-Cloud, 26 novembre 1802

Au citoyen Laplace

Citoyen Laplace, sénateur, tout ce que j'ai lu de votre ouvrage m'a paru si parfaitement clair, qu'il me tarde de pouvoir consacrer quelques semaines à en achever la lecture; j'éprouve le regret de ne pouvoir y donner le temps et y porter l'attention qu'il mérite. C'est pour moi une nouvelle occasion de m'affliger de la force des circonstances qui m'a dirigé dans une autre carrière, où je me trouve si loin de celle des sciences. Je vous remercie de votre dédicace, que j'accepte
avec grand plaisir, et je désire que les générations futures, en lisant votre Mécanique céleste, n'oublient pas l'estime et l'amitié que j'ai portées à son auteur.


Saint-Cloud, 27 novembre 1802

Au roi d'Espagne
                         
J'ai reçu la lettre qu'il a plu à Votre Majesté de m'écrire, en date du 18 octobre. Je la prie de faire recevoir à la Reine mon compliment de condoléance (sic) sur la mort du duc de Parme. Votre Majesté sait parfaitement que, depuis deux ans, la République française aurait été en droit de prendre possession desdits États, d'après le traité du 21 mars 1801, et Votre Majesté elle-même n'ayant manifesté le vœu, pour le duc de Parme, que de lui procurer une ville pour terminer doucement sa vie. Mais, toujours empressé de saisir les occasions d'être agréable à Votre Majesté, je n'ai point pressé l'exécution du traité, et j'ai plusieurs fois donné l'assurance au feu duc de Parme, qui en était vivement inquiet, du désir que j'avais de faire naître des circonstances qui pussent concilier les différents intérêts. Votre Majesté sent aujourd'hui qu'il m'est impossible de violer de mon propre mouvement un traité signé et ratifié, et que l'Europe ne pourrait voir qu'avec jalousie et quelque déplaisir que, pendant le temps que le prince Ferdinand est privé de ses États et que le roi de Sardaigne, auquel s'intéressent plusieurs princes, est sans compensation des pertes qu'il a essuyées, Sa Majesté le roi de Toscane obtint, indépendamment de son royaume, un accroissement aussi considérable et qui, dans les siècles passés, a été l'objet de longues discussions et de guerres sanglantes. La République française est dans ce moment-ci en possession des États de Parme, et plusieurs sollicitations ont déjà été faites par d'autres puissances. Cependant je saisirai avec un grand empressement tout ce qui pourrait remplir le désir de Votre Majesté; mais cela ne pourrait jamais être sans une compensation équivalente, dont les Florides pourraient faire partie; et même, supposant que la France et Votre Majesté se trouvassent d'accord dans leurs intérêts respectifs, je ne pourrais encore rien promettre, jusqu'à ce que je me sois assuré de la possibilité de terminer différentes discussions avec d'autres puissances, dont ce pays est dans ce moment l'objet.


Saint-Cloud, 27 novembre 1802

Au capitaine général Leclerc, commandant en chef l'armée de Saint-Domingue

Le général Boudet, mon cher Leclerc, Ornano et votre aide de camp Brugnière sont arrivés, en raison inverse de leur départ et dans une même semaine. Je vous ai suivi avec une vive sollicitude, et je prends un bien grand intérêt aux maux que vous souffrez; ils sont, je l'avoue, plus forts que je ne l'avais calculé. Ce climat a été bien affreux cette année.

Je pense que, dans les premiers jours de brumaire, vous avez dû recevoir la 86e, qui, acclimatée à Tarente, composée de vieux soldats, et arrivant dans une saison favorable, vous sera d'un bon et utile secours. Un vaisseau de guerre et deux frégates sont partis de Toulon avec 1,200 hommes; je compte qu'ils vous seront rendus dans le courant de nivôse. Deux autres convois arment en ce moment, l'un à Toulon, l'autre à Gênes, et sur des vaisseaux de guerre : ils vous porteront 6,000 hommes; j'espère que vous les aurez dans le courant de pluviôse. Une expédition qui part de la Hollande, avec 3,000 hommes, vous arrivera quinze jours après cette lettre, c'est- à-dire à la fin de nivôse. Enfin deux expéditions, chacune de 1,200 hommes, se préparent en ce moment à Dunkerque et au Havre. Mais ne laissez pas passer toute la mauvaise saison, et, dès l'instant que vos troupes se seront un peu remises, que les pluies auront à leur tour fait du mal aux brigands, et que vous aurez reçu une partie de ces différents convois, entrez en campagne; car, après ce qui vous est arrivé, il n'y a rien à espérer que dans l'hiver; cependant ce qui a eu lieu cette année est bien extraordinaire.

J'espère que vous tirerez un bon service du général Watrin, qui a de l'ardeur et du courage.

N'en voulez pas au ministre de la marine, qui fait tout ce qu'il peut pour vous et vous aime plus que vous ne paraissez le croire.

Le ministre vous expédie les différentes récompenses accordées à votre armée. Croyez que je sens vivement les services que vous avez rendus; et votre gloire sera entièrement consolidée lorsque, par le résultat de votre seconde campagne, vous aurez rendu la tranquillité à cette belle et vaste colonie, qui est l'objet de la sollicitude et des espérances de tout notre commerce.

Je suis très-content de la conduite qu'a tenue Paulette. Elle ne doit point craindre la mort, puisqu'elle mourrait avec gloire en mourant dans une armée et en étant utile à son mari. Tout passe promptement sur la terre, hormis l'opinion que nous laissons empreinte dans l'histoire.

Je suis fort content de votre beau-frère et de votre sœur; quand vous lirez cette lettre, elle aura augmenté votre famille.


 Saint-Cloud, 30 novembre 1802

Au citoyen Gaudin, ministre des finances

Je vous prie, Citoyen Ministre, de me faire connaître quels sont les dix départements de la République les plus surchargés de l'imposition foncière, et quels sont les vingt départements qui le sont le moins.


Saint-Cloud, 30 novembre 1802

NOTE

Les départements du Golo et du Liamone sont dans une position particulière; étant séparés par la mer, ayant des mœurs différentes, la police a besoin d'être faite avec plus de vigueur. On désirerait un projet d'arrêté qui contint les dispositions suivantes :

1° La police de la 23e division sera faite par un adjudant commandant qui, à cet effet, pourra travailler avec le commissaire du Gouvernement près le tribunal criminel, pour accélérer le jugement des procès. Il pourra ordonner les mouvements des troupes et prendre des mesures tendant à faire arrêter les assassins, désarmer les communes où les familles se font la guerre, et enfin correspondre avec tous les agents chargés de la haute police, sans qu'il puisse se mêler ni de l'administration des finances, ni de l'administration du pays, qui est entièrement du ressort du préfet.
2° Le préfet ne doit avoir aucune action sur le payeur des dépenses de la guerre.
3° Les ingénieurs des ponts et chaussées devront faire connaître à l'adjudant commandant tous les travaux qu'ils feront pour les communications des routes, et celui-ci devra donner son opinion sur les travaux à faire, sans cependant rien changer aux travaux une fois arrêtés, ni s'immiscer dans les détails de la comptabilité.
4° Il pourra, dans les circonstances urgentes, lancer des mandats d'arrêt contre des individus qui conspireraient contre la sûreté publique, les mandats d'arrêt attribués par l'article . . . de la Constitution.
Il en instruira le tribunal criminel et les préfets, qui, chacun de leur côté, en rendront compte au ministre de l'intérieur et au grand juge, et il en rendra compte au ministre de la guerre.
5° Il aura une action de police sur la correspondance, à l'île, de manière que son paquet devra toujours lui être donné deux heures avant que les lettres ne soient distribuées aux citoyens.

Renvoyé au citoyen Regnaud , conseiller d'État, pour présenter un projet d'arrêté.


Saint-Cloud, 30 novembre 1802

Au citoyen Chaptal, ministre de l'intérieur

Vous trouverez ci-joint, Citoyen Ministre, l'arrêté que j'ai pris relativement au général Jourdan.

Faites-lui connaître la satisfaction que j'ai de son administration, le désir que j'ai de le voir près de moi, et l'intention où je suis de le proposer au Sénat, comme il le désire. Je ne me suis décidé à le rappeler que par la raison de sa mauvaise santé. Il laissera la direction de toutes les affaires à un homme de son choix, jusqu'à ce que j'aie nommé quelqu'un pour le remplacer.