1 - 15 mars 1806


Paris, 1er mars 1806

ARRÊTÉ

ARTICLE Ier - Les statues des généraux Dugommier, Custine, Hoche, Joubert, Caffarelli et Leclerc seront exécutées en marbre.

ART. 2. - La somme de 90,000 francs affectée à ces travaux sera payée, savoir : 15,000 francs sur le budget de l'an 1806, et 45,000 francs sur le budget de l'an 1807.

ART. 3. - Les marbres seront fournis aux artistes, ou il leur en sera tenu compte.

ART. .4. - Ces six statues devront être terminées pour le salon de l'an 1808. Passé cette époque, elles seront considérées comme n'étant pas acceptées, et les artistes qui en auraient été chargés regardés comme inhabiles aux travaux que le Gouvernement pourrait ordonner dans la suite.

ART. 5. - L'intendant général de la Maison de l'Empereur et le directeur général du musée Napoléon sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent arrêté, qui ne sera point imprimé.


Paris, 1er mars 1806

CONSEIL D'ADMINISTRATION DE L'INTÉRIEUR

Le Ministre de l'intérieur fait un rapport sur les écoles spéciales.

L'Empereur charge le ministre de l'intérieur de faire imprimer tous les états propres à faire connaître les progrès et la situation des écoles spéciales; un mémoire dans lequel on examinera quels sont les besoins de l'Empire dans ce genre d'institution, et la question de savoir s'il y a en France assez d'écoles spéciales de médecine, de droit, de mathématiques, d'astronomie, de dessin, de musique, etc. M. Fourcroy est invité à rédiger un mémoire qui fasse connaître les résultats utiles produits par l'étude de la botanique depuis cinq ans. 

Le ministre de l'intérieur présente les projets de décrets dont la rédaction avait été ordonnée par l'Empereur pour l'établissement d'un pensionnat à l'école de droit et au conservatoire de musique, et sur les bâtiments qui peuvent être ajoutés à l'école polytechnique.

Ces projets de décrets sont adoptés.


Paris, 2 mars 1806

A M. Talleyrand

Monsieur Talleyrand, je suis assez surpris que, le 15 février, mon chargé d'affaires se trouvât encore à Cassel. Je suis surpris aussi de la note de M. Cetto. Il est vrai que le roi de Bavière m'en a remis une sur le même objet, mais je n'y ai jamais fait de réponse. Il faut laisser tomber cela. On ne doit point mettre mon nom en avant lorsqu'on n'a point de pièces. Je ne vois pas pourquoi la cour de Bade ne profiterait pas de l'abbaye de Heitersheim comme l'Autriche. Cependant il ne faut se prononcer ni pour ni contre; il faut seulement engager à prendre patience. La situation de l'ordre de Malte est incertaine; je me trouverais d'ailleurs engagé à le maintenir dans le pays vénitien et à Naples, et je ne sais pas encore ce que je ferai à cet égard. Dites à M. Cetto qu'il ne faut jamais se servir de mon nom lorsqu'on n'a point de traité. En général, profond silence sur les affaires de Malte, comme si elles n'existaient pas.


Paris, 2 mars 1806

Au maréchal Bernadotte

Mon Cousin , j'ai reçu votre lettre d'Anspach du 21 février. Faites insensiblement enlever les armes de Prusse, et faites-les remplacer partout par celles de Bavière; mais faites cela avec toute la décence possible. N'oubliez pas de dire, dans toutes les circonstances, toute sorte de bien du roi de Prusse; mais faites entendre, dans vos conversations, que le sort d'Anspach est irrévocablement fixé et que cette province appartient pour jamais à la Bavière. Nourrissez votre armée avec le produit des contributions ordinaires; payez votre solde, si cela est possible.

Le prince Joseph s'est emparé de tout le royaume de Naples. Tenez-vous constamment sur vos gardes, et envoyez-moi les renseignements qui vous parviendraient sur ce qui se passerait d'important à Bayreuth et sur tous les points qui vous avoisinent. Vous savez que le maréchal Augereau est avec 30,000 hommes à Francfort, et le maréchal Lefebvre à Darmstadt avec 24,000.


Paris, 2 mars 1806

Au prince Eugène

Mon Fils, Savary a dû vous écrire pour que vous fassiez partir une quinzaine de gendarmes d'élite pour Naples. J'ai reçu vos lettres des 23 et 24 février. Les levées de volontaires et autres de cette espèce dépensent de l'argent et ne sont d'aucun résultat. Veillez à ce que les conscrits soient bien exercés, et que vos dépôts soient bien tenus. J'approuve beaucoup la formation du corps dalmate; donnez- lui un bon chef; écrivez en Dalmatie pour qu'on le complète. Cette province fournissait autrefois beaucoup de troupes à la république de Venise.


Paris, 2 mars 1806

Au prince Eugène

Mou Fils, je reçois votre lettre du 25 février. Je n'approuve point la répartition proposée par le général Chasseloup. Je ne veux pas dépenser un sou à Pizzighettone, pas un sou à la Rocca d'Anfo; tout au plus 200,000 francs à Mantoue. Je vous ai déjà écrit que je voulais dépenser cette année 1,200,000 francs à Palmanova et 800,000 francs à Osoppo. Il faut que le général Chasseloup ne perde pas une heure. D'abord, il s'agit avant tout de tracer autant de demi-lunes qu'il y a de fronts et de les revêtir, ainsi que les contrescarpes, cette année; cela est même plus pressé que les contrescarpes autour de la place actuelle. Je m'en rapporte aux ingénieurs pour ces ouvrages, qui sont de la première nécessité. Qu'on travaille, sans perdre un instant, à Palmanova et à Osoppo. Les évènements se précipitent aujourd'hui avec une telle rapidité qu'il ne faut pas s'en reposer sur les apparences. Que les demi-lunes soient d'abord tracées à Palmanova; il ne faut que 1,200,000 francs pour commencer ces travaux; pour le reste, j'aurai le temps de recevoir les plans et de les approuver. Quant à Osoppo, on peut commencer à l'approvisionner et travailler aux opérations les plus importantes. Je vous ai déjà fait connaître que les travaux à faire, pour cette année, à Mantoue, se bornaient à revêtir les demi-lunes de Pietole. Si je puis dépenser davantage à Palmanova et Osoppo, je le ferai volontiers. On ne saurait mettre trop tôt ces places en état de défense : qu'elles le soient au 1er janvier 1807.

------------------------

Dites à Auguste que le mariage de Stéphanie Beauharnais, que j'ai adoptée pour ma fille, est conclu; que j'attends le prince de Bade demain, et que le mariage se fera incontinent. Stéphanie est une très-jolie personne, le prince de Bade est très-content de son mariage, et même la Margrave, qui, depuis mon passage, est extrêmement bien pour moi.


Paris, 2 mars 1806

Au prince Eugène

Mon Frère, Tascher m'apporte votre lettre du 18 février. Si les galériens vous gênent, vous pourrez très-bien me les envoyer en France. Les Jésuites, commencez par les renvoyer tous chez eux. Il doit y en avoir très-peu de Napolitains. Je ne reconnais point cet ordre. Miot doit, à l'heure qu'il est, être arrivé. Je vous ai envoyé cinq ou six auditeurs, jeunes gens dune grande probité, qui ont suivi le Conseil d'État depuis un an et qui ont du talent. Le capitaine de vaisseau Jacob, officier distingué, que je vous ai envoyé, doit aussi vous être arrivé. Chassez Sibille, qui est un voleur. Je charge le général Radet, qui est à Milan , de se rendre près de vous pour organiser et commander votre gendarmerie. Berthier, Saligny ne valent pas mieux que le chef d'état-major que vous avez. Selon mon opinion, vous vous formez des idées un peu fausses. Il faut voir les  hommes de près pour savoir ce qu'ils valent. J'espère que vous occupez tous les forts et que vous les avez fait approvisionner. Soyez inflexible pou les voleurs. Masséna est haï de toute l'armée; vous devez bien vous convaincre aujourd'hui de ce que je vous ai dit plusieurs fois, que cet homme n'a point l'élévation nécessaire pour conduire des Français. Arcamba doit être arrivé. Je viens de donner l'ordre à Dubreton de se rendre à Naples. Toutes les fois que vous aurez un chef d'état-major qui vous plaira mieux, vous êtes le maître de le prendre. J'ai donné ordre que l'on fasse partir le colonel Gentili pour Naples. J'espère que vous serez content de Radet. Quant au pavillon, que voulez-vous que je vous dise ? Vous savez quels gens sont ces Turcs. Je leur ai fait reconnaître le royaume d'Italie; vous pouvez assurer les Napolitains que leur pavillon sera respecté un peu plus tôt, un peu plus tard. Essayez de leur donner mon pavillon; les officiers de marine que vous avez savent comment cela se fait. Je fais écrire à Alger et à Tunis. Je vous envoie Forfait pour préfet maritime; employez-le de la manière que vous jugerez la plus convenable. J'approuve fort tous les choix que vous avez faits. J'ai ordonné que tous les Napolitains qui sont dans le royaume d'Italie vous fussent envoyés. Masséna a tout pris. Il faudrait lui faire conseiller de rendre les trois millions qu'il a pris; vous pourriez employer à cela Saliceti. Dites-lui qu'il le voie, qu'il le prévienne que Solignac a déclaré officiellement qu'il avait reçu en don trois millions; qu'il faut qu'il les rende, sans quoi, dans le compte, que je publierai au mois de mai, de la levée des contributions de l'armée, il y sera porté tout au long comme ayant reçu cette somme, avec les pièces justificatives; je nommerai une commission de sept officiers pour le faire condamner à la rendre. Cela est extrêmement sérieux.

Vous êtes trop circonspect. Naples peut fort bien vous donner quatre ou cinq millions.

Je fais demain l'ouverture du Corps législatif. Annoncez mon arrivée prochaine à Naples; Naples est si loin, que je n'ose pas vous promettre d'aller jusque-là; mais il n'y a pas de mal à l'annoncer, tant pour l'armée que pour les peuples du pays.

Le général Dumas avait d'abord l'ordre de se rendre en Dalmatie; l'ordre que je lui ai envoyé d'aller à Naples ne l'a pas rencontré. Je viens de le lui faire réitérer. Sebastiani n'est pas guéri de sa blessure.

Les embarras dans lesquels vous vous trouvez arrivent toujours. Je vous recommande de ne pas marcher sans gardes; pour cela, Composez votre garde de quatre régiments de chasseurs et de hussards. Formez-vous aussi deux bataillons de grenadiers tirés des grenadiers de l'armée et une compagnie d'artillerie légère. Mettez bien ceci dans vos calculs , que, quinze jours plus tôt ou plus tard, vous aurez une insurrection. C'est un événemement qui arrive constamment en pays conquis. Je ne sais si vous ne pourriez pas vous aider d'Alquier ou de David, qui sont à Rome; faites-leur écrire de vous joindre. Il y a plusieurs consuls de Sicile dans les États de Naples; vous pouvez vous en servir. Vous n'avez pas besoin du ministre de la marine pour renvoyer Bavastro et Sibille. Faites-leur notifier par le capitaine Jacob que je leur donne l'ordre de se rendre en France. Quelque chose que vous fassiez, vous ne vous soutiendrez jamais dans une ville comme Naples par l'opinion. Pourvoyez à ce qu'il ait des mortiers dans les forts, et des réserves pour punir promptement l'insurrection qui éclaterait. Arrivez promptement à un désarmement. Le général Saint-Cyr doit être arrivé. C'est un homme qui ne laisse pas que d'avoir de l'expérience et qui vous sera utile. Je vous ai envoyé les généraux Donzelot et Lamarque. Ce sont deux officiers distingués. Donzelot pourrait être un assez bon chef d'état-major; je ne sais pas jusqu'à quel point il serait meilleur que César Berthier; mais vous devez être plus certain de l'attachement de Berthier. J'imagine que vous avez du canon dans vos palais et que vous avez pris toutes les mesures pour votre sûreté. Vous ne pourrez trop veiller sur tout votre monde. Les Français sont d'une confiance et d'une légèreté sans exemple. Gallo doit vous avoir joint; il proteste d'un dévouement sans bornes. Cette lettre vous sera portée par un officier de gendarmerie que vous pourrez garder : c'est un homme adroit et qui pourra vous servir dans la police. Tous les embarras que vous éprouvez dans ce moment, on les éprouve toujours dans des circonstances pareilles aux vôtres. Désarmez ! désarmez ! Mettez de l'ordre dans cette immense ville. Tenez vos parcs dans des positions où la canaille ne puisse pas prendre vos canons. Calculez que vous aurez une émeute ou une petite insurrection. Je désirerais beaucoup pouvoir vous aider de mon expérience dans de pareilles matières; j'ai su cependant, par le peu que Tascher m'a dit, que vous vous en tirez bien.


Palais des Tuileries, 2 mars 1806

DISCOURS PRONONCÉ PAR L'EMPEREUR À L'OUVERTURE DE LA SESSION

Messieurs les Députés des départements au Corps législatif, Messieurs les Tribuns et les membres de mon Conseil d'État, depuis votre dernière session la plus grande partie de l'Europe s'est coalisée avec l'Angleterre. Mes armées n'ont cessé de vaincre que lorsque je leur ai ordonné de ne plus combattre. J'ai vengé les droits des États faibles opprimés par les forts. Mes alliés ont augmenté en puissance et en considération; mes ennemis ont été humiliés et confondus. La Maison de Naples a perdu sa couronne sans retour. La presqu'île de l'Italie tout entière fait partie du grand empire. J'ai garanti, comme chef suprême, les souverains et les constitutions qui en gouvernent les différentes parties.

La Russie ne doit le retour des débris de son armée qu'au bienfait de la capitulation que je lui ai accordée. Maître de renverser le trône impérial d'Autriche, je l'ai raffermi. La conduite du cabinet de Vienne sera telle, que la postérité ne me reprochera pas d'avoir manqué de prévoyance. J'ai ajouté une entière confiance aux protestations qui m'ont été faites par son souverain. D'ailleurs les hautes destinées de ma couronne ne dépendent pas des sentiments et des dispositions des cours étrangères. Mon peuple maintiendra toujours ce trône à l'abri des efforts de la haine et de la jalousie. Aucun sacrifice ne lui sera pénible pour assurer ce premier intérêt de la patrie.

Nourri dans les camps, et dans des camps toujours triomphants, je dois dire cependant que, dans ces dernières circonstances, mes soldats ont surpassé mon attente. Mais il m'est doux de déclarer aussi que mon peuple a rempli tous ses devoirs. Au fond de la Moravie, je n'ai pas cessé un instant d'éprouver les effets de son amour et de son enthousiasme. Jamais il ne m'en a donné des marques qui aient pénétré mon cœur de plus douces émotions. Français ! je n'ai pas été trompé dans mes espérances. Votre amour, plus que l'étendue et la richesse de votre territoire, fait ma gloire. Magistrats, prêtres, citoyens, tous se sont montrés dignes des hautes destinées de cette belle France, qui, depuis deux siècles, est l'objet des ligues et de la jalousie de ses voisins.

Mon ministre de l'intérieur vous fera connaître les événements qui se sont passés dans le cours de l'année. Mon Conseil d'État vous présentera des projets de lois pour améliorer les différentes branches de l'administration. Mes ministres des finances et du trésor public vous communiqueront les comptes qu'ils m'ont rendus. Vous y verrez l'état prospère de nos finances. Depuis mon retour, je me suis occupé sans relâche de rendre à l'administration ce ressort et cette activité qui portent la vie jusqu'aux extrémités de ce vaste empire. Mon peuple ne supportera pas de nouvelles charges; mais il vous sera proposé de nouveaux développements au système des finances dont les bases ont été posées l'année dernière. J'ai l'intention de diminuer les impositions directes, qui pèsent uniquement sur le territoire, en remplaçant une partie de ces charges par des perceptions indirectes.

Les tempêtes nous ont fait perdre quelques vaisseaux, après un combat imprudemment engagé. Je ne saurais trop me louer de la grandeur d'âme et de l'attachement que le roi d'Espagne a montré dans ces circonstances pour la cause commune. Je désire la paix avec l'Angleterre; de mon côté je n'en retarderai jamais le moment; je serai toujours prêt à la conclure, en prenant pour bases les stipulations du traité d'Amiens.

Messieurs les Députés au Corps législatif, l'attachement que m'avez montré, la manière dont vous m'avez secondé dans les dernières sessions, ne me laissent point de doute sur votre assistance. Rien ne vous sera proposé qui ne soit nécessaire pour garantir la gloire et la sûreté de mes peuples.


Paris, 2 mars 1806

Au maréchal Soult

J'ai reçu votre lettre du 17 février. J'ai lu avec intérêt le mémoire qui y était joint. Continuez à m'en envoyer de pareils; et tâchez de donner à M. de la Rochefoucauld les renseignements que vous auriez, surtout sur la manière dont il pourrait se faire informer des mouvements militaires des Autrichiens.


Paris, 3 mars 1806

DÉCISION

Notre intention étant que la princesse Stéphanie Napoléon, notre fille, jouisse de toutes les prérogatives dues à son rang, dans tous les cercles, fêtes et à table, elle se placera à nos côtés; et, dans le cas où nous ne nous y trouverions pas, elle sera placée à la droite de Sa Majesté l'Impératrice.      


Paris, 3 mars 1806

ARRÊTÉ (voir l'article à ce sujet)

ARTICLE 1er. - Les sujets ci-après désignés seront exécutés en peinture, pour les sommes affectées à chacun desdits sujets, savoir :

1° L'Empereur haranguant le 2e corps d'armée sur le pont du Lech, à Augsbourg;
2° L'armée autrichienne prisonnière de guerre, sortant d'Ulm, défilant devant Sa Majesté et à l'instant où elle parle aux généraux vaincus;
3° Surprise du pont du Danube à Vienne, au moment où le prince Murat, le maréchal Lannes et le général Bertrand persuadent aux généraux de les laisser passer;
4° Charge des gardes impériales russes; Rapp présentant à l'Empereur les drapeaux, les canons, le prince Repnine et plus de 800 prisonniers nobles, de la garde russe;
5° L'entrevue de l'empereur Napoléon et de l'empereur François II en Moravie;
6° La 76e demi-brigade retrouvant ses drapeaux dans l'arsenal d'Innsbruck;
7° L'Empereur pardonnant aux révoltés du Caire sur la place d'Ezbekyeh;
8° Les comices de Lyon.

Les huit tableaux ci-dessus seront exécutés dans la proportion de 3 mètres 3 décimètres de haut sur 4 ou 5 mètres de large; le prix affecté à chacun desdits sujets sera de 12,000 francs; ci, pour les huit, 96,000 francs.

9° L'entrée de Sa Majesté dans la ville de Munich, à l'instant où les Bavarois viennent au-devant d'elle;
10° Le mariage de S. A. R. le prince Eugène avec la princesse Augusta de Bavière;
11° Le passage de l'isthme de Suez et Sa Majesté visitant les fontaines de Moïse;
12° L'arrivée et l'entrevue de Sa Majesté avec Sa Sainteté à Fontainebleau.

Ces quatre tableaux seront exécutés dans la proportion de 1 mètre 8 décimètres sur 9 mètres 2 décimètres; le prix affecté à chacun sera de 6,000 francs; ci, pour les quatre, 24,000 francs.

13° La Vierge de la victoire, tableau pour la chapelle des Tuileries; ce tableau sera payé 6,000 francs.
14° Le combat du Formidable, commandé par Gilles Troude (Aimable-Gilles Troude, 1762 - 1824) à Algésiras (Bataille navale d'Algésiras, 6 juillet 1801), qui démâta un vaisseau anglais et força l'amiral Saumarez à l'abandonner, quoiqu'il eût quatre vaisseaux à lui opposer.

Ce tableau sera exécuté dans la proportion de 2 mètres 9 décimètres de haut sur 3 mètres de large, et sera payé 8,000 francs.

ART. 2. - La somme de 134,000 francs, affectée au payement de ces quatorze tableaux, sera payée, savoir : 67,000 francs sur le budget de l'an 1806, et 67,000 francs sur le budget de l'an 1807.

ART. 3. - Tous ces tableaux seront placés dans le palais impérial des Tuileries, après l'exposition publique au salon du musée Napléon fixée au 15 août 1808.

ART. 4. - Tous les artistes qui, à cette époque, et sans motifs plausibles, n'auraient pas terminé leur ouvrage, seront considérés comme inhabiles aux travaux que le Gouvernement pourrait ordonner dans la suite.

ART. 5. - L'intendant général de la Maison de l'Empereur le directeur du musée Napoléon sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent arrêté, qui ne sera pas imprimé.


Paris, 3 mars 1806

A M. Talleyrand

Monsieur Talleyrand, portez des plaintes au prince de Nassau de ce qu'il souffre à Deutz un recruteur autrichien. Je ne veux point de recruteurs allemands si près de moi. J'apprends qu'ils se rende partout, et qu'il doit même en venir à Francfort. Faites remettre à ce sujet une note à la diète de Ratisbonne. Vous y établirez que l'Autriche n'a pas le droit de recruter dans les États d'Allemagne, et que les princes, villes ou États qui recevront des recruteurs autrichiens chez eux seront considérés, s'il survenait une guerre, comme faisant cause commune avec l'Autriche. Faites dire à Francfort que la ville ne doit point souffrir de recruteurs autrichiens. Écrivez dans ce sens à mes ministres en Allemagne; que tous protestent que je ne veux point de recruteurs autrichiens; qu'il faut que l'Autriche recrute chez elle. Faites beaucoup de bruit de cela, et parlez-en ici au chargé d'affaires des villes hanséatiques.


Paris, 3 mars 1806

A M. Talleyrand

Monsieur Talleyrand, en relisant avec attention les lettres de M. Lesseps, que je vous renvoie , je vois que M. Czartoryski argue d'un traité qui existe entre les deux États. Faites-moi un petit rapport là-dessus. Il me paraît que nous avons plus à gagner qu'à perdre, car mon principal but est d'encourager le commerce. Si donc je suis engagé par un traité à ne pas confisquer les marchandises, je désire que vous écriviez à M. Lesseps (Mathieu-Maximilien-Prosper, comte de Lesseps, 1774-1832) une lettre, qu'il puisse montrer, dans laquelle vous direz que j'ai trouvé la réclamation de la Russie juste, et qu'elle a raison; que j'ai donc donné l'ordre que l'article 45 du traité de 1786 fût mis à exécution, et que l'on datât, en conséquence, de telle époque. Vous aurez soin de mettre pour époque le jour où l'armée russe est entrée dans la Pologne autrichienne, car c'est celle de la déclaration de guerre. Cependant rédigez votre lettre de manière à ne pas vous engager à rendre les bâtiments pris à la mer avant ladite époque, car je n'entends dater que de la déclaration de guerre; et il ne vous échappera pas que la Russie ne veut ne pas être en guerre que pour arguer de ses anciens traités.


Paris, 3 mars 1806

A M. Talleyrand

Monsieur Talleyrand, je vous renvoie les papiers de votre correspondance. J'en ai retiré la lettre de Francfort, que j'ai communiquée à M. Mollien; il vous la renverra. J'ai gardé tout ce qui a rapport au projet d'organisation du grand empire. Plus je lis ce que vous m'avez présenté sur cet objet, plus je vois que rien n'est mûr. Il me manque beaucoup de données. Il serait facile de se les procurer. M. Alquier, à Naples, et M. Dauchy, à Venise, pourraient faire sans bruit la recherche nécessaire. Il y a, dans l'un et l'autre pays, des fiefs qui tombent avec les souverains; plusieurs s'éteignent chaque année. Mon intention est de m'emparer de tous, pour les faire servir à récompenser mes officiers. Cela d'ailleurs aurait plus d'un but; ces fiefs, mis dans la main des Français, formeraient un entourage au nouveau roi, pour lequel sa force militaire n'en est pas un suffisant. Envoyez à MM. Dauchy et Alquier des instructions pour cet objet.


Paris, 3 mars 1806

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, vous trouverez ci-joint un décret qui nomme M. Lagrange, capitaine au 9e régiment de dragons, second secrétaire la légation à Vienne (Son nom sera étroitement lié à la prise de la ville, en 1809). Vous le ferez venir et vous lui ferez connaître que mon intention est qu'il tienne une note exacte de la force des régiments autrichiens et des lieux où ils se trouvent; qu'à effet il doit avoir dans son cabinet une boite divisée par cases, dans chacune desquelles il mettra des cartes portant le nom des généraux des régiments et des garnisons, et qu'il changera de cases selon les mouvements qu'ils subiront. Tous les mois, il vous adressera, ainsi qu'aux relations extérieures, le relevé de ces mouvements, et ajoutera les changements que les régiments pourraient éprouver dans leur organisation. Cette mission est très-importante. Il faut que M. Lagrange s'y livre tout entier, et qu'il ne se déplace pas un bataillon autrichien que je n'en sois instruit. Vous lui ferez connaître que la marque de confiance je lui donne en le chargeant de cette mission.

-----------------

Je vous envoie une douzaine d'exemplaires de mon discours au Corps législatif; vous le ferez mettre à l'ordre de l'armée.


Paris, 3 mars 1806

Au prince Eugène

Mon Fils, je reçois enfin des états tels que je les demande contenus dans le rapport du ministre des finances. Voilà ce que j'appelle des états. Je les ai lus avec une grande attention. J'imagine que le ministre en a gardé des copies. Je n'ai lieu d'être fâché que de que vous ne m'ayez pas envoyé ces états plus tôt. Je désire avoir des renseignements sur celui qui a pour titre : « Elenco di alcuni fel devoluti alla regia camera per l'estinzione delle linee investite". Savoir ce que cela rend, et ce que cela deviendra dans la nouvelle législation du royaume d'Italie pour ceux qui seraient encore dans les mains des particuliers. 


Paris, 3 mars 1806

A M. Prina, ministre des finances du royaume d'Italie

J'ai reçu votre travail du 22; je l'ai trouvé en très-bon ordre, et dans une forme qui m'est tout à fait convenable. J'ai reconnu là une nouvelle preuve de votre zèle et de votre attachement à ma personne.


Paris, 3 mars 1806

Au prince Eugène

Mon Fils, je reçois votre lettre du 25 février et le décret que vous avez pris. Ce décret s'est croisé avec un autre que vous aurez reçu pour liquider ces arriérés. Ce qui est dû pour les réquisitions doit être pris sur les fonds qui étaient affectés aux travaux du port de Volano et sur le produit du sopra imposio. Faites liquider strictement toutes les fournitures; il est impossible qu'on ait fourni six millions. Faites payer les mois de février et mars qui sont dus à mon trésor impérial.

Je vous laisse le maître de diminuer le nombre des commandants et adjudants de place français , hormis ceux des places fortes, où je désire qu'il y en ait; si vous en avez dans d'autres places, envoyez- les au prince Joseph, qui en aura besoin d'un grand nombre.

Donnez des ordres pour que les deux frégates l'Adria et l'Aquila,et les bricks le Pollux et l'Orion, soient en état d'appareiller pour nettoyer la côte de la Dalmatie des corvettes et bricks anglais. Si vous pouvez y joindre l'Austria, à laquelle vous donnerez le nom d'Austerlitz, cela vous formera une division qui vous sera très-utile, et qui empêchera le golfe d'être bloqué par une frégate et des bâtiments légers.

Le prince Joseph a besoin d'officiers français; tous ceux dont vous n'auriez pas besoin à votre état-major, envoyez-les-lui, sans vous débarrasser de ce que vous auriez de pire, mais en les mêlant. Je crois avoir envoyé à Palmanova le général qui commandait à Peschiera. Envoyez à Peschiera et à Osoppo un bon chef de bataillon français comme commandant d'armes.


Palais des Tuileries, 4 mars 1806

MESSAGE AU SÉNAT

Sénateurs, voulant donner une preuve de l'affection que nous avons pour la princesse Stéphanie Beauharnais, nièce de notre épouse bien-aimée, nous l'avons fiancée avec le prince Charles, prince héréditaire de Bade; et nous avons jugé convenable, dans cette circonstance, d'adopter ladite princesse Stéphanie Napoléon comme notre fille. Cette union, résultat de l'amitié qui nous lie depuis plusieurs années à l'électeur de Bade, nous a aussi paru conforme à notre politique et au bien de nos peuples. Nos départements du Rhin verront avec plaisir une alliance qui sera pour eux un nouveau moyen de cultiver leurs relations de commerce et de bon voisinage avec les sujets de l'Électeur.

Les qualités distinguées du prince Charles de Bade et l'affection particulière qu'il nous a montrée dans toutes les circonstances nous sont un sûr garant du bonheur de notre fille. Accoutumé à vous voir partager tout ce qui nous intéresse, nous avons pensé ne devoir pas tarder davantage à vous donner connaissance d'une alliance qui nous est très-agréable.


Paris, 4 mars 1806

A M. Talleyrand

Monsieur Talleyrand, la demande de M. Masserano est juste. La Toscane ne payera plus de subsides, quand le port de Livourne sera fermé aux bâtiments anglais. Il faut que le commerce anglais soit prohibé en Toscane et l'entrée des marchandises des manufactures anglaises défendue. J'ai ordonné qu'à compter du ler avril la reine d'Étrurie cesserait de payer des subsides à mon trésor France. Écrivez en conséquence à M. de Beauharnais.


Paris, 4 mars 1806

Au maréchal Augereau

Mon Cousin, je reçois votre lettre du 24 février. Il ne faut pas entrer dans le pays de Berg; 2,500 chevaux peuvent très-bien vivre dans l'étendue du pays que vous occupez. D'ailleurs les choses ne peuvent rester longtemps dans l'état actuel. Je vous enverrai avant peu de nouveaux ordres. En attendant, faites reposer et réparer vos troupes, et surtout les dragons de la division du général Bourcier. 


Paris, 5 mars 1806

A. M. Fox

Monsieur, j'ai mis la lettre de Votre Excellence sous les yeux de Sa Majesté. Son premier mot, après avoir achevé la lecture, a été :

« Je reconnais là les principes d'honneur et de vertu qui ont toujours animé M. Fox. Remerciez-le de ma part, et dites-lui que, soit que la politique de son souverain nous fasse rester encore longtemps en guerre, soit qu'une querelle aussi inutile pour l'humanité ait un terme aussi rapproché que les deux nations doivent le désirer, je me réjouis du nouveau caractère que, par cette démarche, la guerre a déjà pris, et qui est le présage de ce qu'on peut attendre d'un cabinet dont je me plais à apprécier les principes d'après ceux de M. Fox, un des hommes les mieux faits pour sentir en toutes choses ce qui est beau, ce qui est vraiment grand. »

Je ne me permettrai pas, Monsieur, d'ajouter rien aux propres expressions de Sa Majesté Impériale et Royale. Je vous prie seulement d'agréer l'assurance de ma plus haute considération. 


Paris, 5 mars 1806

DÉCISION

Le ministre de la marine prie l'Empereur de faire examiner s'il serait possible d'établir dans l'intérieur un on plusieurs bagnes pour y recevoir environ 2,000 condamnés aux fers.

S'occuper d'un projet pour en envoyer à la paix 4 ou 5,000 à Cayenne.


Paris, 5 mars 1806.

A M. Fouché

Faites mettre quelques articles dans les journaux qui fassent connaître avec quelle verge de fer les Russes gouvernent la Pologne. Chaque maison est inondée de troupes; on a désarmé tous les citoyens et les arrestations sont nombreuses.


Paris, 5 mars 1806

EXPOSÉ DE LA SITUATION DE L'EMPIRE (Ce rapport a été préparé par Champagny)

(voir le texte)


Paris, 6 mars 1806

NOTE POUR LE GRAND JUGE

La section de législation examinera :

1° S'il n'est pas convenable de déclarer que toutes les hypothèques prises par les Juifs faisant l'usure sont nulles et de nul effet;
2° Que, d'ici à dix ans, ils seront inhabiles à prendre hypothèque;
3° Qu'à dater du 1er janvier 1807 les Juifs qui ne posséderont pas une propriété seront soumis à une patente et ne jouiront pas des droits de citoyen.

Toutes ces dispositions peuvent être particulièrement appliquées aux Juifs arrivés depuis dix ans et venus de Pologne ou d'Allemagne.


Paris, 6 mars 1806

A M. Lavalette

Faites connaître à Fiévée que je suis très-mécontent de la manière dont il rédige son journal. Il est ridicule que, contre les règles du bon sens, il veuille donner croyance à tout ce que disent les papiers allemands pour faire peur des Russes. Il est ridicule de dire qu'ils mettent 500,000 hommes sur pied, tandis que , dans la coalition même, la Russie ne fournissait qu'une centaine de mille homme lorsque l'Autriche en fournissait 300,000. Mon intention est qu'il ne parle des Russes que pour les humilier, atténuer leurs forces, prouver combien leur fatras de réputation militaire et les éloges de leurs armées sont peu fondés.


Paris, 6 mars 1806

A M. Fouché

Il est temps enfin de mettre un frein aux journaux; ils alarment perpétuellement le commerce et la nation sur les Russes. Rien n'est plus ridicule et plus plat. C'est là la tâche des Anglais et même des Russes. Il faut leur défendre de parler des armées russes, à moi de les réduire à leur juste valeur. La Russie n'a pas, dans tout son empire, 220,000 hommes sur pied. Le Journal de l'Empire est plus alarmiste; il nous met sans cesse les Russes sous les yeux.

Le Moniteur ne doit parler de la Russie que par des articles communiqués par les relations extérieures.


Paris, 6 mars 1806

A M. Talleyrand

Monsieur Talleyrand, mon intention est que les articles politiques du Moniteur soient faits par les relations extérieures. Et quand j'aurai vu , pendant un mois; comment ils sont faits, je défendrai autres journaux de parler politique autrement qu'en copiant les articles du Moniteur.


Paris, 6 mars 1806

A M. Talleyrand

Monsieur Talleyrand, il faut écrire que ce M. Gianti soit chassé de Rome, s'il est vrai qu'il ait suscité l'insurrection d'Arezzo.

Il faut soutenir la Bavière dans ses prétentions sur l'Autriche. Puisqu'il n'est question que de Würzburg dans le traité, il faut que l'Autriche s'en tienne là; c'est bien assez.

Il faut faire demander à Tunis les Lucquois, en déclarant qu'ils sont sous ma protection. Présentez-moi un projet de réponse au prince Morousi.


Paris, 6 mars 1806

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, nous sommes enfin d'accord avec la Prusse. Dans deux jours, je vous enverrai mes derniers ordres pour l'armée, et je vois avec plaisir que le moment de votre retour n'est pas éloigné. Le roi de Bavière m'a écrit une lettre et M. Talleyrand m'a communiqué une liste de récompenses qu'il veut donner, qui m'ont paru assez ridicules; parlez-lui-en de ma part. Verdière n'a rien fait. Tilly n'a rien fait. Saint-Laurent n'a rien fait de suffisant. Je ne les approuverai que pour Léopold Berthier, pour Éblé, pour Songis, Kellermann. En remplacement, je verrai sans peine qu'elles soient données à Salligny, à Malher, à Ordener, à Beaumont, ou à Klein, ou à Walther. Le corps de Bernadotte n'a pas plus fait que les autres. Puisque le roi de Bavière veut donner des distinctions, qu'il les répartisse dans les différents corps d'armée : dans ceux de Ney, de Soult, de Bernadotte, de Davout, de Murat. Laplanche-Mortière et Dupas en méritent aussi plus que d'autres.

Quand j'ai voulu donner à des Bavarois des décorations de la Légion d'honneur, j'ai demandé au roi de Bavière sa liste; il était convenable qu'il me demandât la mienne.

Quant à Canisy et Villoutreys, c'est une affaire de cour; il n'y a pas d'inconvénient.


Paris, 6 mars 1806

Au prince Joseph

Mon Frère, je reçois votre lettre du 22 février. Faites fusiller impitoyablement les lazzaroni qui donnent des coups de stylet. Ce n'est que par une salutaire terreur que vous en imposerez à la populace italienne. Le moindre avantage que puisse procurer la conquête de Naples, c'est d'entretenir votre armée de 40,000 hommes. Frappez une contribution de trente millions sur tout le royaume. Votre marche est trop incertaine. Il faut que vos généraux, vos soldats, soient dans l'abondance. Trente millions ne sont rien pour le royaume de Naples. Vous avez sans doute fait réunir les prêtres, et vous les avez rendus responsables du moindre désordre. Les lazzaroni doivent avoir des chefs. Au premier mouvement, chassez-en 12 ou 15,000 Naples. S'ils ont des chefs, il faut qu'ils répondent de tout. Quelque chose que vous fassiez, sachez que vous aurez une insurrection. Désarmez-les. Vous ne me parlez point des forts; s'il est nécessaire, faites établir trois ou quatre batteries, comme j'avais fait au Caire, qui puissent jeter des bombes dans les différents quartiers de Naples. Vous ne vous servirez jamais de ces instruments meurtriers, mais leur existence en imposera à la ville. Le royaume de Naples n'est point épuisé; vous avez de l'or partout, puisque partout vous avez des fiefs, des impositions aliénées. Gardez-vous de confirmer les abus de l'ancien régime; il faut que dans quinze ou vingt jours, par un décret de vous ou de moi, tout soit rapporté, et que toute aliénation de domaine et même d'imposition, quand même elle aurait eu lieu de temps immémorial, soit annulée, et qu'un système d'imposition égal et sévère soit établi. Naples doit vous rendre une centaine de millions, sans compter la Sicile; il ne les rend pas parce qu'on y a suivi l'ancien système des rois d'Espagne, lorsqu'ils administraient le pays par des vice-rois. Je vous ai envoyé des officiers de marine; je vous ai envoyé autant de bâtiments que j'ai pu; ils n'arriveront pas aussi vite qu'il le faudrait peut-être, mais ils arriveront. J'ai ordonné qu'on vous envoyât de Toulon 1,200,000 rations de biscuit. Vous n'avez point d'argent, mais vous avez une bonne armée et un bon pays qui doit vous en fournir. Faites faire les préparations du siège de Gaète. Vous me parlez de l'insuffisance de vos moyens militaires : avec deux régiments de cavalerie, deux bataillons d'infanterie légère et une compagnie d'artillerie, il y a de quoi mettre en désarroi toute la canaille de Naples. Mais la première de toutes les choses est de ne pas manquer d'argent; vous ne pouvez en avoir que de Naples. Une contribution de guerre de trente millions arrangera tout et vous mettra à votre aise. Parlez-moi un peu des forts. J'imagine qu'ils dominent la ville, et que vous y avez nommé des commandants ad hoc. Il faudra bientôt vous occuper d'organiser gendarmerie.

-----------------

Les sentiments qui vous naissent à votre entrée à Naples naissent toujours à la première entrée en pays conquis. Naples est plus riche que Vienne et n'est pas aussi épuisée. Milan même, lorsque j'y suis entré, n'avait pas un sou. Encore une fois, n'attendez pas d'argent de moi. Les 500,000 francs en or que je vous ai envoyés sont la dernière somme que j'enverrai à Naples. C'est moins encore par le cas que je fais de trois ou quatre millions que j'en agis ainsi que pour le principe. Levez trente millions; soldez votre armée; traitez bien vos chefs de corps et vos généraux, et organisez votre matériel.


Paris, 7 mars 1806

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, ce courrier, qui se rend à Francfort, continue sa route sur Munich. J'ai envoyé l'ordre au maréchal Augereau de renvoyer la division batave en Hollande et de faire partir la division Dupont pour Düsseldorf. Instruisez de cela le roi de Bavière; dites-lui que la division Dupont se rend à Düsseldorf pour occuper Wesel et tout le duché de Clèves.

Recommandez au maréchal Bernadotte de profiter de sa présence à Anspach pour prendre possession de tous les fiefs de la noblesse, surtout de ceux litigieux entre Anspach et Bayreuth, afin que, quand je remettrai ce pays au roi de Bavière, il n'ait aucun sujet de difficulté avec la Prusse.

Dans le traité de Vienne, la Prusse se réservait un territoire équivalent à 20,000 âmes de population; dans le dernier traité, cet article est retranché; la Bavière doit posséder Anspach tout entier, avec tous les biens de la noblesse immédiate. Quand le Roi vous aura remis un état de tous les fiefs de la noblesse immédiate, intermédiaires entre Anspach et Bayreuth, le maréchal Bernadotte en fera prendre possession, de manière qu'Anspach, avec toutes ses dépendances, soit sujet de la Bavière.


 Paris, 1 mars 1806

Au maréchal Augereau

Mon Cousin, toutes mes difficultés avec la Prusse paraissent être levées. La ville de Francfort n'a payé que deux millions de sa contribution; il faut qu'elle paye les quatre millions. Déclarez que mes troupes y resteront jusqu'à ce que cette somme soit soldée.   

Faites partir, immédiatement après la réception de la présente lettre, la division Dumonceau pour la Hollande; vous la dirigerez sur Nimègue. Dirigez la division Dupont, composée des 9e, 32e et 96e régiments, sur Düsseldorf. Le général Dupont recevra là des ordres qui lui seront portés par un de mes aides de camp. Faites-moi connaître par un courrier le jour où ce général arrivera à Düsseldorf avec sa division; le départ de ces 10,000 hommes débarrassera d'autant vos environs. En général, désormais faites plutôt des mouvements qui vous replient sur Francfort que des mouvements en
avant qui puissent alarmer.


Paris, 7 mars 1806

Au prince Eugène

Mon Fils, j'ai reçu votre lettre du ler mars. Je suis comme vous surpris et fâché de ce qui arrive à l'archevêque de Bologne. Écrivez au préfet que, s'il est encore question de cette affaire, je ferai mettre la tante et la fille à Bicêtre; vous traduirez ce mot par un mot équivalent à Milan; que j'honore le cardinal Oppizzoni et que je n'entends pas qu'une entremetteuse et une fille compromettent une personne aussi respectable, quand même il serait vrai qu'il eût eu des faiblesses. Qu'il ne soit donc plus question de cela.


Paris, 7 mars 1806.

DÉCISION

M. Lebrun demande à l'Empereur l'autorisation de prendre, dans la caisse du receveur de Gênes, des fonds pour le payement des pensions religieuses.

Renvoyé au ministre des finances, pour lui faire connaître que je n'approuve pas que l'on sorte des règles ordinaires; que les pensions religieuses ne sont pas plus sacrées que mon armée, et qu'on peut se procurer de l'argent sans violer les caisses.


Paris, 8 mars 1806

A M. Talleyrand

Monsieur Talleyrand, je ne vois pas d'inconvénient à rouvrir les communications avec Hesse-Cassel, pourvu que l'on ne souffre à cette Cour ni Taylor, ni Humboldt, ni Drake, ni Spencer Smith, ni Wickham, ni tout autre individu qui aurait été mêlé dans les tripotages antérieurs, ou qui serait susceptible d'être soupçonné d'avoir autorisé de pareilles intrigues.


Paris, 8 mars 1806

Au roi de Bavière

Monsieur mon Frère et Cousin, je reçois la lettre de Votre Majesté. J'ai chargé le maréchal Berthier d'avoir l'honneur de la voir, pour lui demander que les marques de satisfaction qu'elle veut donner à des officiers francais fussent réparties sur les différents corps d'armée, sans être exclusivement réservées à aucun, et qu'elle choisît des hommes qui puissent recevoir et donner de la considération en France à sa décoration. Il faut pour cela que ce soient des hommes distingués par leur courage et par leurs services, afin que des hommes plus que médiocres n'obtiennent pas une distinction si honorable.

J'ai en quelques difficultés avec la Prusse, qui ne prétendait rien moins que de ne pas me donner Anspach ni Wesel. Mais un nouveau traité a été fait à Paris et vient d'être ratifié; toutes les difficultés sont donc levées aujourd'hui, et Votre Majesté va entrer en possession d'Anspach sans retard; elle le possédera entier et sans aucune soustraction. J'ai chargé le maréchal Berthier de vous demander la note des biens immédiats voisins d'Anspach pour qu'il puisse en prendre possession. Il faudrait que Votre Majesté les tînt de moi et les reçût de Bernadotte, pour s'éviter tout différend à ce sujet avec la Prusse. Que Votre Majesté fasse passer ses ordres au maréchal Bernadotte, afin que, quand je lui remettrai Anspach, il fasse planter des poteaux avec vos armes pour limites avec la Prusse, afin qu'il n'y ait plus de difficultés lorsque vos troupes entreront pour garder le pays et que celles de Prusse se retireront.

Ayant tenu ainsi mes engagements pour Anspach, il me reste à réclamer de Votre Majesté la remise du pays de Berg. Je désire que Votre Majesté nomme un commissaire pour me remettre le pays. La division Dupont s'y rend pour prendre aussi possession de Clèves et de Wesel.


Paris, 8 mars 1806

Au général Dejean

Le comité des inspecteurs aux revues dit qu'il y avait à nouveau dans l'intérieur, pendant germinal an XIII. . . 220,839 hommes.

Vous m'avez dit, dans votre rapport, qu'il faut ajouter à ce nombre :

Les militaires détenus près les conseils de guerre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 439 
Les condamnés au boulet . . . . . . . . . . 824 
Les dépôts de conscrits. 762 
Les gardes-côtes . . . . . . . . . . . . . . 3,841 
Les prisonniers de guerre . . . . . . . . . . 1,814 
Les militaires escortés par la gendarmerie. 8,330 
Les prisonniers de guerre en marche. 87 
Les prisonniers de guerre escortés. . 175 
Les déserteurs escortés . . . . . . . . . . . 13

Total . . . . . 237,124 

Le fournisseur ne demande des rations que pour . . . . . . . . . . . . . . . . . .. . . 234,331 
Différence . . . . . 2,793

Le comité dit qu'il y avait à nourrir, à l'intérieur, pendant le même mois de germinal . . . . . . 26,653 hommes

En y ajoutant ce que vous indiquez dans votre rapport, montant à . . . . . . . . . . . . . 367

Il y aurait eu à nourrir. . . . . . . . . . . 27,020 

L'entrepreneur n'a fourni que . . . . . . . . 22,612

Différence . . . . . 4,408

Vous voudrez bien me dire par qui les hommes ont été nourris. Observez qu'il y a une différence de plus de 7,000 hommes.

En floréal, la chose change dans l'intérieur; le comité ne porte à nourrir que . . . . . . . . 211,850 hommes.
En ajoutant à ce nombre ce que vous demandez dans votre rapport . . . . . . . . . . . . 17,601

Total à nourrir . . . . . 229,451 

L'entrepreneur prétend avoir nourri . . . . . 248,593

Différence . . . . . 19,142

Pendant le même mois, à l'intérieur, le comité ne porte à nourrir que . . . . . . .  . . . . . 25, 72 52 hommes.

En y ajoutant ce que vous indiquez . . . . . 261

Il n'y aurait eu à nourrir que . . . . . . . . . 26,013 

L'entrepreneur prétend avoir nourri . . . . . 26,543

Différence. 530

Pendant le mois de prairial, pour l'intérieur, le comité ne porte à nourrir que . . . . . . . . . . 216,780 

Plus, pour ce que vous indiquez . . . . . . 19,197

Total à nourrir. 235,977 

L'entrepreneur prétend avoir nourri . . . . . 247,857

Différence . . . . . 11,880

Pendant le même mois, à l'intérieur, le comité dit qu'on doit nourrir . . . . . .. . . . . . 31,857 hommes.

En ajoutant ce que vous demandez. 277

Total . . . . . 32,134 

Le munitionnaire ne demande que la nourriture de . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24,527

Différence . . . . . 7,607

Vous voudrez bien m'indiquer les causes de ces différences que je ne conçois pas, et qui sont bien faites pour m'inspirer une égale défiance et contre les travaux du corps des inspecteurs aux revues et contre les comptes du munitionnaire général.

Il est effrayant, sous plusieurs rapports, de voir que la gendarmerie a escorté chaque jour environ 10,000 militaires. Veuillez me faire un rapport sur ces conduites, et me faire connaître la manière dont cela est constaté.

J'ai vu, par vos états, qu'il y a toujours environ 400 hommes détenus près les conseils de guerre. C'est beaucoup trop. C'est preuve que les conseils mettent beaucoup de lenteur dans leurs opérations. Veuillez vous faire rendre compte de cet objet et prescrire plus de célérité.

Parmi les différences qui m'ont frappé dans vos états, il y a celui des camps.

En germinal, l'entrepreneur dit avoir nourri, au camp de Toulon, 151 hommes, et le comité n'y porte rien.

Pendant le même mois, le comité suppose le camp de Brest de 13,878 hommes, et l'entrepreneur n'a nourri que 10,233 hommes.

A l'armée des côtes, le comité suppose 99,228 hommes, et le fournisseur ne demande que pour 91,450.

En floréal, le camp de Brest et celui des côtes sont beaucoup moins pour le comité que pour le fournisseur.

En prairial, c'est le fournisseur qui est moins fort que le comité. Que sur la surface entière de mon vaste empire il y ait quelques petites différences entre le comité et les entrepreneurs, cela est pardonnable; mais il ne l'est pas que dans l'enceinte étroite d'un camp il y ait une variation aussi grande.

Vous me proposerez des moyens pour faire cesser de pareils désordres.


Paris, 8 mars 1806

Au prince Joseph

Mon Frère, je vois que vous promettez, par une de vos proclamations, de n'imposer aucune contribution de guerre; que vous défendez que les soldats exigent la table de leurs hôtes. A mon avis, vous prenez des mesures trop étroites. Ce n'est pas en cajolant les peuples qu'on les gagne, et ce n'est pas avec ces mesures que vous donnerez les moyens d'accorder de justes récompenses à votre armée. Mettez trente millions de contribution sur le royaume de Naples; payez bien votre armée; remontez bien votre cavalerie et vos attelages; faites faire des souliers et des habits; tout cela ne peut se faire qu'avec de l'argent. Quant à moi, il serait par trop ridicule que la conquête de Naples ne valût pas du bien-être et de l'aisance à mon armée. Il est impossible que vous vous teniez dans ces limites-là. Appuyez-vous, si vous voulez, d'un ordre de moi. Je vous l'ai déjà écrit, je vous le répète : ne vous engagez pas à maintenir les fiefs ni les différentes aliénations qui ont été faites aux impositions, car il est nécessaire d'établir à Naples un système d'imposition foncière et d'imposition d'enregistrement comme en France; et enfin, s'il faut donner des fiefs, il faut les donner à des Français qui soutiennent la couronne. Je n'entends pas dire que vous ayez fait fusiller aucun lazzarone, cependant je sais qu'ils donnent des coups de stylet. Si vous ne vous faites pas craindre dès le commencement, il vous arrivera des malheurs. L'établissement d'une imposition ne fera pas l'effet que vous imaginez; tout le monde s'y attend et la trouvera naturelle. C'est ainsi qu'à Vienne, où il n'y avait pas un sou, et où l'on espérait que je ne mettrais pas de contribution, quelques jours après mon arrivée j'en ai mis une de cent millions de francs : on a trouvé cela fort raisonnable. Vos proclamations au peuple de Naples ne sentent pas assez le maître. Vous ne gagnerez rien en caressant trop. Les peuples d'Italie, et en général les peuples, s'ils n'aperçoivent point de maître, sont disposés à la rébellion et à la mutinerie. Pénétrez-vous bien que, si les circonstances n'ont pas voulu que vous ayez de grandes manœuvres militaires à faire, il vous reste la gloire de savoir nourrir votre armée et tirer du pays où vous êtes des ressources de toute espèce; cela fait une grande partie de l'art de la guerre. Une quarantaine de Napolitains, gens de lettres ou ayant du talent, ont reçu l'ordre de se rendre à Naples; la plupart sont de bons sujets qui vous seront utiles. Pendant bien du temps vous ne pourrez vous passer à Naples du secours d'une armée française. Je dirigerai beaucoup de recrues sur les corps qui sont à Naples.

Le nouveau cabinet anglais paraît avoir des principes plus raisonnables que l'ancien, si j'en dois juger par une lettre de M. Fox, qui donne avis à la police d'un projet formé pour m'assassiner. Il nomme l'individu et donne des détails sur la manière dont on devait s'y prendre, et il fait connaître qu'il écrit par ordre exprès du Roi.

La Prusse, par le traité que je viens de faire avec elle, vous a déjà reconnu. La facilité de votre administration et la prospérité de vos enfants dépendent des mesures administratives que vous prendrez d'ici à trois mois. Il faut rechercher les abus pour les détruire, et anéantir la dette. Je ferai tout cela par des décrets avant que vous soyez roi de Naples. Vous vous trouverez avoir vos contributions en caisse, et vous pourrez avoir une marine et une armée de terre. Je dis une marine, car vous sentez bien que vos communications avec la Sicile, la protection de vos côtes soit contre les Barbaresques, soit contre les Anglais, exigent que vous ayez au moins trois vaisseaux de ligne et six frégates. Mes affaires ne sont pas encore entièrement préparées; mais il serait possible que je fisse Louis roi Hollande. Il est plus certain que je vais donner les duchés de Clèves et de Berg au prince Murat; tout cela est fait.

Je ne laisserai à Naples et en Sicile que le nombre de troupes que vous voudrez y maintenir et que vous croirez nécessaire à votre sûreté. Dans mon opinion, vous ne pouvez garder pendant p1usieurs années moins de 30,000 Français dans l'un et l'autre de ces pays.

On peut composer cette force en portant les corps au grand complet, ce qui est beaucoup moins coûteux. Si 20,000 hommes vous suffisent, j'en serai fort aise.

Les Anglais se sont emparés du cap de Bonne-Espérance.

Je vous recommande, en outre, de ne pas prendre d'engagement qui empoisonnent l'avenir de votre règne.

Envoyez-moi tous les matériaux sur les mesures odieuses dérivant du droit de conquête qu'il serait nécessaire de prendre, en faisant cependant le moins de tort possible au pays.

Il faut établir dans le royaume de Naples un certain nombre de familles françaises qui seront investies des fiefs, soit provenant de l'aliénation qui serait faite de quelques domaines de la couronne, soit de la dépossession de ceux qui ont des fiefs, soit des biens des moines, en diminuant le nombre des couvents. Dans mon sentiment, votre couronne n'aurait aucune solidité si vous n'aviez autour de vous une centaine de généraux et de colonels et autres, et des officiers attachés á votre Maison, possesseurs de gros fiefs dans les royaumes de Naples et de Sicile. Je pense que Bernadotte, Masséna devraient être fixés à Naples avec le titre de prince, et avec de gros revenus qui assurassent la fortune de leur famille. Ce moyen, je le prends pour le Piémont, pour l'Italie, pour Parme; il faut qu'entre ces pays il ressorte la fortune de 3 ou 400 officiers français, tous jouissant de domaines qui seraient dévolus à leur descendants par droit de primogéniture. Dans peu d'années , cela se mariera dans les principales maisons, et le trône se trouvera consolidé de manière à pouvoir se passer de la présence d'une armée française, point auquel il faut arriver. Nos discussions entre Naples et la France ne seront jamais pour y maintenir des troupes, car la France sera toujours portée à ne pas laisser des troupes à Naples, afin de les avoir toujours réunies contre les ennemis qui pourraient lui survenir encore.

Je compte donner la Dalmatie à un prince, ainsi que Neufchâtel que j'ai acquis de la Prusse. Il y a une centaine d'individus, anciens gardes du corps, bons sujets, et qui pourront vous servir, en les mêlant avec la noblesse napolitaine, pour former quelques compagnies de vos gardes du corps.

J'imagine que vous êtes en marche sur la Sicile.

Ne perdez pas un moment pour diviser votre territoire en divisions militaires, ou en gouvernements et en intendances, ou en préfectures; je pense que vous pouvez faire du royaume de Naples au moins douze préfectures ou départements, sans y comprendre la Sicile. Il me semble que quatre tribunaux d'appel seraient plus que suffisants.


Paris, 8 mars 1806

Au prince Eugène

Mon Fils, les 3e bataillons et les dépôts des corps de l'armée du général Marmont qui sont en Hollande se mettent en route le 25 mars, pour se rendre en Italie, où ils arriveront à la fin de mai. Ils forment une force de 4,500 hommes. Souvenez-vous bien de placer les dépôts pendant l'été dans les montagnes, sans quoi tous les hommes périront à cause de l'extrême différence du climat de Hollande avec celui d'ltalie. Placez-les pendant les mois de juin, juillet, août, septembre et octobre, du côté du Cadorin et dans toutes ces hautes parties. Ils se trouveront là près de l'armée du général Marmont, dans un air assez pur et moins exposés aux chaleurs d'Italie.


Paris, 8 mars 1806

Au prince Eugène

Mon Fils, je reçois votre lettre du 2 mars, où il est question de la maison qui a fait la contrebande d'argent. Je ne vois pas comment ces ces négociants ne sont pas coupables de contrebande; elle est bien réelle. S'ils avaient fait la demande de faire passer de l'argent pour le service de l'armée, le ministre des finances de France l'eût permis, en prenant des moyens sûrs pour qu'il arrive à sa véritable destination. Quand on est pris à faire la contrebande une fois, on l'a faite plusieurs, et il est très-probable que ces négociants l'ont aussi faite à Livourne. Quant à la question de savoir s'il est avantageux pour la France de laisser passer son numéraire, c'est une question qui ne peut être décidée si légèrement et qui est beaucoup plus compliquée qu'elle ne vous l'a paru. C'est donc une affaire qu'il faut laisser tomber.


Paris, 9 mars 1806

Au général Dejean

Monsieur Dejean, mon intention est d'employer cette année 600,000 francs aux fortifications permanentes de Boulogne. Le but que je me propose est assez facile à comprendre : c'est de mettre la flottille, qui est désormais un établissement permanent, à l'abri d'une surprise ou brûlée par l'ennemi. Les opérations d'un siège sont toujours longues, et la pensée de le faire dans un pays comme la France en éloigne toute tentation. Des ouvrages de campagne ont été faits autour de Boulogne, et je les crois bien entendus. Je désire que vous me remettiez, mercredi prochain, les plans et la note des travaux à faire cette campagne pour employer les 600,000 francs de manière qu'à la fin de la campagne, c'est-à-dire en novembre, Boulogne soit beaucoup plus fort qu'il ne l'est aujourd'hui. Une pareille somme sera dépensée l'année prochaine, et ainsi de suite, jusqu'à l'achèvement des fortifications, de manière qu'elles soient vraiment respectables.

Je désirerais qu'avec cette somme on pût revêtir ou faire les contrescarpes de tous les ouvrages avancés, de manière que, se trouvant ainsi à l'abri d'un coup de main, on ne pût ouvrir la tranchée, sur quelque point qu'on se présentât.

Vous verrez, par le budget, que j'accorde cette année 300,000 francs pour les travaux de Kehl, et 300,000 francs pour ceux de Cassel. Je voudrais ne faire de fortification permanente à Cassel que l'ouvrage qui soutient toute l'inondation.

Je donne 500,000 francs pour les travaux de Juliers. Présentez-moi la note de ce qui doit y être fait cette année. Il faut qu'avant la fin de la campagne cette place ait un degré de force de plus et soit en état de soutenir un siège.

Je donne 300,000 francs pour les travaux de Venloo. Il me parait que ce qui est le plus important à faire, c'est, 1° de réparer les ouvrages qui rendent possible l'inondation; 2° de faire ou un ouvrage ou un réduit à la gauche de la Meuse, de manière à être maître de passer sur une rive ou sur l'autre, et d'éloigner l'ennemi de ce côté de la place. Je n'ai pas besoin de dire que, dans ces ouvrages, il ne doit rien être dépensé pour bâtiments militaires. Présentez-moi les projets le plus tôt possible, pour que j'arrête ce qui sera fait cette année.


Paris. 9 mars 1806

Au prince Murat

Expédiez sur-le-champ un de vos aides de camp à Francfort, qui suivra la marche du corps du général Dupont; il sera porteur d'une lettre de vous au général Dupont, par laquelle vous lui annoncerez que vous serez rendu à Cologne le 15 mars.

Vous partirez de Paris lorsque vous le jugerez convenable, et vous vous dirigerez sur Cologne dans la journée du 16 mars.

Vous tiendrez la moitié de la division Dupont à Düsseldorf, et l'autre moitié à Wesel, de manière que cette seconde moitié y soit rendue le 18, où la prise de possession de cette place doit avoir lieu. Si une partie de la division Dupont ne pouvait être arrivée le 18 à Wesel, vous ramasserez dans le département de la Roër 3 ou 400 hommes que vous y enverrez. 

Le général Beaumont, votre aide de camp, est nommé par moi commissaire pour prendre possession de la place de Wesel. M. Talleyrand vous donnera copie du traité qui a été fait pour cet objet. Beaumont sera rendu le 18 à Wesel; il vous instruira de tout. Personne ne fera de proclamation.

J'ai écrit au maréchal Berthier de vous envoyer directement à Cologne l'autorisation du roi de Bavière pour l'occupation du duché de Berg. Du moment que vous aurez reçu cette autorisation, vous chargerez le général Dupont d'en prendre possession. Mon intention est que cette occupation n'ait lieu que vingt-quatre heures après que mes troupes seront dans Wesel. Lorsque vous en serez maître, que les Prussiens auront évacué le duché de Clèves, et que la possession du duché de Berg aura été prise, c'est-à-dire vers le 20 ou le 21, vous vous rendrez à Düsseldorf; vous y serez reçu avec tous les honneurs dus à votre rang, et vous notifierez, tant dans le duché de Berg que dans le duché de Clèves, mon décret impérial qui vous nomme prince de Berg et de Clèves.

Vous procéderez sur-le-champ à recevoir le serment de vos nouveaux sujets. Vous ne ferez aucun changement dans l'administration et vous aurez soin, avant votre arrivée, que les troupes bavaroises, s'il y en a, soient en marche pour retourner chez elles.

Je vous enverrai le décret impérial du moment que je connaîtrai votre arrivée à Cologne; de là vous dirigerez tous les mouvements pour l'occupation de Wesel et du duché de Berg.

Vous tiendrez secrètes toutes ces dispositions. Vous trouverez ci-joint l'ordre au général Dupont de suivre tous vos ordres.


Paris, 9 mars 1806

Au général Rapp

M. Talleyrand vous remettra des lettres de moi, que vous porterez au général Barbou, et par lesquelles je l'autorise à remettre la forteresse de Hameln à la garnison prussienne. Immédiatement après que vous les lui aurez remises, vous vous rendrez à Hambourg; vous verrez les postes qu'occupe l'armée prussienne. Le roi de Prusse s'étant engagé à fermer ses ports de l'Elbe au commerce anglais par un traité fait entre nous, vous me rendrez compte de la manière dont ce traité s'exécute. Vous verrez ce qu'il y a de nouveau à Wesel à votre arrivée. Vous descendrez à Francfort, de Francfort à Mayence et de là vous reviendrez à Paris. Vous tiendrez note de tout, et vous vous arrêterez dans ces places le temps nécessaire pour vous mettre au fait de tout ce qui peut m'intéresser sous tous les points de vue.


Paris, 9 mars 1806

Au général Barbou (Gabriel Barbou d'Escourières, 1761-1827)

Monsieur le Général Barbou, le général Rapp, mon aide de camp, vous remettra l'ordre ci-joint, auquel vous voudrez bien vous conformer. Vous enverrez en Hollande le 19e régiment d'infanterie de ligne; arrivé sur la frontière de cet État, il enverra demander des ordres au général Michaud, commandant mes troupes en Hollande. Les dépôts des autres corps se rendront à Cologne, où ils attendront de nouveaux ordres. Comme la plus étroite amitié m'unit dans ce moment-ci avec la Prusse, vous aurez soin d'avoir toute espèce de bons procédés pour les officiers du roi de Prusse. Vous vous rendrez à Hanovre, et vous correspondrez de là en votre qualité de commissaire chargé de l'exécution de la convention. Vous y resterez jusqu'à nouvel ordre, et vous communiquerez à mon ministre des relations extérieures tout ce qui viendra à votre connaissance. Le roi de Prusse s'est engagé à fermer tous les ports de l'Elbe et du Hanovre au commerce anglais. Vous instruirez mon ministre des relations extérieures de la manière dont s'exécutera cette clause du traité.


Paris, 9 mars 1806

Au général Oudinot

Vous vous rendrez à Neufchâtel et vous prendrez possession, en mon nom, de cette principauté. Vous ordonnerez que toutes les contributions se lèvent comme à l'ordinaire. Vous aurez soin de ne rien changer aux douanes qui séparent Neufchàtel de la France. Vous confirmerez toutes les autorités. Vous ferez confisquer les marchandises anglaises qui se trouvent dans le pays. Il y a plusieurs négociants qui en ont fait venir une grande quantité de Bâle, dans le dessein de les répandre en France, espérant que les barrières des douanes se lèveraient. Vous aurez soin de faire maintenir une bonne discipline.

Vous disposerez vos troupes de manière qu'elles soient bien et qu'elles puissent se reposer.

Vous aurez un bon langage pour la Prusse. Vous ferez publier et afficher la proclamation suivante :

"Au nom de S. N. l'Empereur et Roi, mon souverain, je viens prendre possession de la principauté de Neufchâtel, que le roi de Prusse lui a cédée. Les troupes sous mes ordres maintiendront une sévère discipline. En retour, elles seront accueillies des habitants avec les sentiments qu'ils leur doivent."

Vous ne dérangerez du reste rien à l'administration jusqu'à ce que je vous aie fait passer de nouveaux ordres.


Paris, 9 mars 1806

Au vice-amiral Decrès

C'est une bien mauvaise méthode que celle d'attendre an dernier moment pour demander des matelots. Allemand n'est pas parti. A quoi peuvent servir 300 soldats à bord de son escadre ? Ordonnez qu'on ramasse à Rochefort des enfants qui serviront comme novices.

On en formera des matelots; au lieu que des soldats, cela n'avancera à rien.


Paris, 9 mars 1806

Au prince Eugène

Mon Fils, je reçois votre lettre du 3 mars. Je vois avec peine que les Autrichiens sont sur la droite de l'Isonzo. Vous m'avez cependant écrit, il y a quatre jours, que votre aide de camp, qui en était revenu, avait pris des mesures pour faire occuper ces postes avant eux; mais il paraît que le général Marmont a pris le bon parti en n'évacuant point Trieste que les Autrichiens n'aient évacués ces positions. Je désire que vous m'envoyiez l'itinéraire du corps du général Molitor, jour par jour, avec des notes qui me fassent connaître en détail la route qu'il a suivie, les habitants et la nature du terrain. Vous ferez tracer cette reconnaissance sur une carte que vous m'enverrez. Envoyez-moi aussi le plan de Zara et celui des places fortes de la Dalmatie et de l'Albanie, ainsi que des plans et des détails sur l'Istrie, afin que je connaisse les secours dont pourraient m'être ces provinces dans une guerre. Partez bien du principe que j'ai besoin d'argent. Faites expédier par mer les draps, les souliers et tout ce qui est nécessaire à la division qui est en Dalmatie. Chargez les ingénieurs de faire une reconnaissance des routes de Zara et de Raguse à Constantinople et à Belgrade. Envoyez
d'Anthouard (Charles-Nicolas d'Anthouard de Vraincourt, 1773-1852. Premier aide-de-camp d'Eugène) passer trois mois dans les montagnes de la Dalmatie, les reconnaître et faire un mémoire sur les points dont on pourrait partir pour attaquer la Turquie. Indépendamment d'Anthouard, chargez les officiers du génie de faire la même reconnaissance; chargez-en aussi des ingénieurs géographes, mais sans donner l'alarme.

Vous êtes maître de mettre sur le pied de paix l'armée d'Italie. Mes peuples d'Italie ne doivent s'attendre à aucune décharge d'imposition; je ne puis les traiter plus favorablement que mes peuples de France; mes dépenses sont trop considérables, tant pour la marine que pour la terre.

----------------

Que toutes les reconnaissances que l'on fera, soient faites sans apparence, et sans alarmer les Turcs et les autres puissances.


Paris, 10 mars 1806.

A M. Talleyrand

Monsieur Talleyrand, je reçois votre compte de l'an XIII. Vous avez en caisse 239,000 francs. Cette somme est nécessaire pour rembourser M. Estève d'une dépense secrète relative aux relations extérieures; faites-la-lui remettre demain ou après-demain , et envoyez-m'en le reçu , afin que j'arrête vos comptes et vous donne décharge de 752,000 francs. Envoyez-moi pour votre compte de l'an XIII un état divisé par colonnes; la première colonne contiendra ce qui vous a été accordé par la loi du budget; la seconde colonne, ce qui vous a été accordé sur le fonds de réserve; la troisième, le total de votre crédit de l'année ; la quatrième colonne, ce qui était ordonnancé au 1er vendémiaire an XIV sur chaque chapitre; la cinquième, ce qui était ordonnancé au 1er janvier 1806 ; la sixième, ce qui l'a été pendant janvier et février jusqu'au ler mars; la septième, ce qui était ordonnancé sur l'an XIII au 1er mars; la huitième, ce qui vous reste de crédit sur chaque chapitre; la neuvième, le supplément du crédit dont vous croyez avoir besoin pour les dépenses faites.

Le même état pour l'an XII ; par ce moyen, je connaîtrai parfaitement votre situation. Je crois que vous devez également à M. Estève pour l'an XII. Comprenez-le dans vos besoins, car il faut absolument que cette avance de la liste civile soit payée, cette dépense étant constante et relative aux affaires extérieures.


Paris, 11 mars 1806

Au maréchal Berthier

Mon Cousin , je reçois votre lettre du 5 mars. Je vois que vous calculez qu'il y a plus de temps que je suis parti de Vienne que je n'en ai mis à y venir. Je sais ce que cela veut dire; mais je vous enverrai bientôt mes derniers ordres.

Vous avez prévu juste. Mon intention est qu'il déserte le plus d'Autrichiens possible, et que les Bavarois, les Wurtembergeois, les Prussiens, les Badois en prennent autant qu'ils pourront. Écrivez à Munich, à Stuttgart et à Karlsruhe, de fournir des escortes aux prisonniers autrichiens qui passeront sur leur territoire; mais que, sous aucun prétexte, il n'y passe point de troupes autrichiennes; on ne doit le souffrir d'aucune manière; ce serait une subversion de notre principe. Dites bien haut que, sous quelque prétexte que ce soit, les troupes autrichiennes ne doivent point passer leurs frontières. Les prisonniers autrichiens seront escortés par les troupe de Bavière, de Wurtemberg et de Bade; et, comme de raison, elles prendront le plus qu'elles pourront en route, et laisseront déserter tous ceux qui voudront déserter.


Paris, 12 mars 1806

A M. Mollien

Monsieur Mollien vous trouverez ci-joint un décret que je viens de prendre. Faites partir demain, avant midi, un inspecteur du trésor très-sévère. Le payeur de l'armée d'Italie sait comment et par qui les 4,020,000 francs ont été soustraits ; il faut qu'ils rentrent dans sa caisse. Une partie est à Milan; l'autre est en lettres de change entre les mains d'un nommé Ardant. J'ai donné ordre à la police de le faire arrêter; il a eu l'impudence de faire des reçus signés de lui. Le principal est de retirer l'argent. Deux millions se trouveront, ayant été soustraits aux contributions, de Trieste et de différentes villes du pays vénitien. Chargez l'inspecteur que vous enverrez de prendre des renseignements du payeur, pour savoir ce qui est rentré de la vente du vif-argent des mines d'Idria; il doit être rentré plusieurs millions dont on ne voit nulle part de traces et qui ont été soustraits pour des intérêts particuliers.


Palais des Tuileries, 12 mars 1806

DÉCRET

NAPOLÉON, Empereur des Français, Roi d'Italie,

Voulant fournir aux soldats qui composent nos armées une nourriture plus abondante, qui conserve leur santé et qui contribue à fortifier leur constitution,

Sur le rapport de notre ministre de la guerre,

Notre Conseil d'État entendu,

Nous avons décrété et décrétons ce qui suit

ARTICLE Ier. A compter du 1er mai prochain, il sera fourni une masse d'ordinaire, laquelle sera administrée par les capitaines, sous la surveillance des colonels et des chefs de bataillon des corps.

Cette masse sera composée,

1° Des cinq centimes que nous avons accordés par notre arrêté du 24 frimaire an XI ;
2° De 10 centimes que nous accordons par le présent décret, lesquels ne seront payés qu'aux hommes présents sous les armes;
3° Du restant de la solde, prélèvement fait de la masse de linge et chaussures et des deniers de poche.

ART. 2. - Moyennant cette masse, les compagnies seront tenues de procurer au moins trois onces de pain blanc pour la soupe par chaque soldat, une demi-livre de viande et des légumes nécessaires à son ordinaire.

ART. 3. - Les capitaines pourront ou traiter pour la fourniture du pain de soupe, ainsi qu'il est prescrit par l'arrêté du 24 frimaire an XI , ou faire acheter le pain de soupe par les chefs d'ordinaire; ils pourront de même, pour la fourniture de la viande, ou traiter avec des bouchers ou entrepreneurs, ou faire faire boucherie, on faire acheter la viande par les chefs d'ordinaire.
Dans les villes ou autres lieux où il est ou sera établi des octrois sur les bestiaux ou sur la viande, les troupes y seront soumises comme le reste des citoyens.

ART.4. - Les capitaines ne pourront employer ou laisser employer aucun des deniers de la masse d'ordinaire à aucune autre destination que celle prescrite par l'article 2.

Toute répartition des deniers de cette masse entre les membres de l'ordinaire ou tous autres est absolument prohibée. Les économies appartiendront aux compagnies, seront conservées dans la caisse des corps et réservées pour parer aux accroissements de prix que le pain, la viande ou les légumes pourront éprouver.

ART. 5. - Le colonel ou autre chef des corps se fera représenter chaque mois les registres de la masse d'ordinaire de chaque compagnie et le visera.

Il visera fréquemment quelques-uns des livres que les chefs d'ordinaire doivent tenir, afin de s'assurer de la pleine et entière exécution des articles 2 et 4 ci-dessus.

ART. 6. - Les inspecteurs et sous-inspecteurs aux revues vérifieront, viseront, lors de leurs revues, les registres des masses d'ordinaire de toutes les compagnies; les officiers généraux, inspecteurs d'armes, les arrêteront définitivement.

Les uns et les autres s'assureront de la régularité et de la bonté de la gestion de ladite masse et particulièrement de l'exécution des articles 2 et 4 ci-dessus.

ART. 7. - En conséquence de ces dispositions, toutes nos troupes, dans quelque lieu qu'elles se trouvent, seront traitées de même et n'auront droit à aucune augmentation.

ART. 8. - Lorsque des corps seront mis sur le pied de guerre, il leur sera fait, sur la masse d'ordinaire, une retenue de 15 centimes, et, en échange, il leur sera fourni en nature quatre onces de pain de munition en supplément de la ration , une demi-livre de viande et deux onces de légumes.

ART. 9. - La surveillance des masses d'ordinaire et de leur emploi sera dans les attributions du ministre directeur de l'administration de la guerre.

ART. 10. - Nos ministres de la guerre, de l'administration de la guerre et du trésor public, sont chargés, chacun en ce qui les concerne, de l'exécution du présent décret.


Paris, 12 mars 1806

Au général Dejean

Envoyez chercher Solignac (Jean-Baptiste Solignac, 1773-1850. Mis en cause pour un détournement de 500.000 francs), il m'a fait une déclaration inexacte. J'ai de Trieste, Padoue, Vicence, etc., des renseignements précis. Que Solignac vous fasse une déclaration nette. Je veux avoir jusqu'au dernier sou. Si je ne l'ai point, je nomme une commission de sept colonels pour faire des enquêtes, et je fais condamner Solignac et qui de droit, par ce tribunal, à des peines infamantes : ils ont trop abusé. S'il vous déclare même jusqu'à six millions avec tous les détails pour les retrouver, bien; sans quoi, faites-le arrêter.


Paris, 12 mars 1806

Au prince Joseph

Mon Frère, j'ai reçu l'état de situation de votre armée du ler mars. J'espère qu'à l'heure qu'il est vos troupes occupent tous les points du royaume de Naples. Vous avez de l'artillerie à Capoue et à Naples; vous ne devez être arrêté par aucune difficulté pour assiéger Gaète. Ne faites pas tirer inutilement quelques coups de canon; mettez trente ou quarante pièces de canon en batterie et approvisionnez votre parc de manière à pouvoir faire un feu soutenu. En huit ou dix jours de tranchée, vous vous emparerez de la ville, si tant est qu'elle se défende jusque-là. Il faut tâcher, si cela est possible, de leur intercepter, par des batteries placées de droite et de gauche, la communication avec la haute mer. De toutes les mesures que vous pourrez prendre, c'est celle qui leur causera le plus de frayeur et qui influera le plus sur leur moral.

Je ferai acquitter le mandat de 500,000 francs que vous m'annoncez. Aussitôt que j'ai reçu votre lettre, j'ai fait écrire à M. James.

Vous avez 40,000 hommes; c'est plus qu'il ne vous en faut pour conquérir la Sicile et Naples.

Fesch vous aura instruit de mes difficultés avec la cour de Rome. Je ne veux point qu'elle entretienne aucun ministre des puissances avec lesquelles je suis en guerre. Je ne la laisserai jouir de son indépendance et de sa souveraineté qu'à ces conditions. C'est dans ce sens que vous devez vous en expliquer.

Mettez de l'énergie dans votre organisation.


Paris, 12 mars 1806

Au prince Joseph

Mon Frère, je vous ai envoyé 500,000 francs en or de mon royaume d'Italie; j'ai ordonné qu'au payât vos 500,000 francs de traites; c'est tout ce que je puis faire pour l'armée de Naples. Mes armées sont très-nombreuses; elles rentrent et exigent des dépenses immenses; ma marine exige aussi de très-fortes dépenses. Il m'est impossible de suffire à de nouveaux frais. Jusqu'à cette heure vous administrez trop mollement le royaume de Naples. Ce n'est pas la manière de conduire ces peuples. Je me vous ai envoyé, dans l'ordre civil, que quelques auditeurs, jeunes gens qui apprendront bien vite l'italien et qui sont probes.

Il est de toute impossibilité que je vous envoie 1,500,000 francs par mois pour le service de l'armée de Naples. Mettez une imposition de guerre de trente millions sur le royaume de Naples. Il est extraordinaire qu'il ne rende pas le tiers de ce que rend le royaume d'Italie. Vous montrez trop de douceur au commencement; il est nécessaire de ne pas commencer votre administration mollement. Toutefois, arrangez-vous pour vous suffire. Prenez les biens de tous ceux qui ont suivi la Cour.

Vous trouverez ci-joint copie d'un décret pour faire rentrer dans la caisse du payeur les sommes qui ont été détournées. Masséna et Solignac ont détourné six millions des contributions de l'armée d'Italie; il faut qu'ils rendent jusqu'au dernier sou.

Vos 1,400,000 francs de lettres de change seront payés. Envoyez-moi le bordereau, parce que je suis assuré d'un fonds de 2,700,000 francs qui a été retrouvé. Faites donner à Masséna le conseil de rendre les six millions qu'il a pris. S'il les rend vite, c'est le seul moyen de se sauver : car, s'il ne les rend pas, je nommerai une commission militaire, qui siègera à Padoue, pour faire des enquêtes; car enfin, c'est un trop grand brigandage. Souffrir que le soldat meure de faim, soit sans solde, et prétendre qu'on a reçu, en don, des provinces, des sommes qui lui étaient destinées, c'est par trop imprudent; il n'y a plus moyen de faire la guerre. Faites surveiller Saint-Cyr. Le détail de leurs dilapidations est inouï; c'est par les Autrichiens que je l'apprends, et ils en ont rougi eux-mêmes; ils ont laissé passer des farines pour venise. Le mal va trop loin. Le remède, je l'y porterai. Je donne ordre d'arrêter Ardant : c'est un agent de Solignac , qui doit être à Paris ou à Milan. Sil était à Naples, faites-le arrêter, et envoyez-le sous bonne et sûre escorte, à Paris.

Vous aurez vu que Flachat a été condamné à un an de fers et que ses transactions ont été annulées.


Paris, 12 mars 1806.

NOTE POUR LE MINISTRE DES FINANCES

Dans votre compte des finances de cette année vous portez, à l'état des recettes du chapitre III, 16,400,000 francs, comme rentrés au ler vendémiaire an XIII, sur les moyens extraordinaires. Il y a erreur.

Il était rentré :
                  l° 19,200,000 d'Italie,
                  2° 1,000,,000 de Gênes,
                       2,000,000 de Parme,
                          180,000 d'Étrurie,
                  et 25,000 de Piombino;
ce qui fait beaucoup plus que vingt-deux millions.

Vous portez à la colonne Vente des domaines nationaux 9,900,000 francs, pour produit effectif, d'après l'état du trésor. Il faut porter vingt millions, puisque nous avons encore des domaines.

A l'état des dépenses, page 3, il faut mettre une colonne de plus pour la distribution du fonds de réserve, et une autre pour le total.

Il ne faut point mettre les cent millions de l'administration de la, guerre comme payés.


Paris, 12 mars 1806

DÉCISION

Le ministre de la guerre propose de renvoyer de l'école militaire impériale de Fontainebleau les élèves pensionnaires Delamoussay et Touyard, pour s'être
battus avec les baguettes de leurs fusils qu'ils avaient aiguisées.

Les faire mettre en prison pour quinze jours.


Paris, 12 mars 1806

Au prince Eugène

Mon Fils, vous trouverez ci-joint un décret que vous tiendrez secret, parce que l'agent du trésor va partir. Vous aurez bien soin que les 2,710.0,.0100, francs que vous avez soient versés dans la caisse du payeur. Faites faire des enquêtes par le conseiller d'État Dauchy; je veux avoir jusqu'au dernier sou. Lorsque mon armée n'est pas payée, c'est une indignité de friponner de cette manière. Si Ardant est à Paris, il sera arrêté dans la journée de demain. Si ces sommes se montent à plus de quatre millions, je veux le savoir. Je prendrai les mesures nécessaires pour les recouvrer. Il faut cependant que vous ne vous montriez pas personnellement trop; ne faites juste que ce que vous devez faire; si vous êtes même sûr que les 2,700,000 francs ne sortiront pas, vous pouvez attendre l'arrivée de l'agent du trésor. 

Envoyez-moi le bordereau des traites qui sont sur Paris, afin que j'en fasse séquestrer le montant. 

Vous trouverez ci-joint un bordereau que m'envoie le prince Joseph. Je ne comprends pas trop ce que veut dire l'observation. Est-ce la solde qui n'est pas payée ? Prenez des renseignements pour qu'on ne paye pas double solde. Faites-moi connaître la situation de la solde de tous les corps de l'armée de Naples, et faites vérifier leur comptabilité par un inspecteur aux revues.

----------------------

Indépendamment des 4,020,000 francs, il y a des villes qui ont donné aussi des contributions. Prenez tous les renseignements et aidez l'inspecteur du trésor. Je désire savoir ce qu'est devenu le produit des mines d'Idria; elles doivent avoir rendu plusieurs millions.


Paris, 12 mars 1806

A M. Talleyrand

Monsieur Talleyrand, les états que vous m'envoyez pour l'an XI et l'an XIII ne sont que des analyses; je voudrais des détails, mission par mission, budget par budget. Les relations extérieures s'augmentent tous les jours, et nous avons la guerre ! Il est nécessaire d'avoir un budget et d'en exécuter tous les chapitres.


Paris, 13 mars 1806

Au prince Eugène

Mon Fils, je vois, par votre lettre du 7, que tout se met en mouvement du côté d'Osoppo et de Palmanova; j'attache à ces travail plus grande importance; je suis bien aise que Chasseloup mi envoyé les plans. Mais ces deux places ne suffisent pas; écrivez à Marmont qu'il fasse des reconnaissances depuis Palmanova jusqu'à Cividale et Caporetto. J'ai perdu de vue ces localités, que j'ai cependant bien connues; mais, autant que je peux m'en souvenir, du moment qu'on sort de Goritz et qu'on a monté la vallée de l'Isonzo, il devient impossible de se porter sur Udine; il n'y a aucun chemin de voiture. Ainsi, dans toute la vallée de l'Isonzo, on ne peut aller à Udine que par Caporetto, par le grand chemin de Cividale, que par Venzone, c'est-à-dire par Osoppo, et enfin que par Gradisca, c'est-à-dire par Palmanova. S'il en était ainsi, mon intention serait d'avoir sur le chemin d'Udine à Caporetto une place forte. Il faut donc que Marmont fasse la reconnaissance du pays et qu'il choisisse le lieu.

Ce ne serait point une place de dépôt; ce serait une place qui renfermerait tout le système défensif à établir dans la vallée; mais, pour cela, il faut des localités faites exprès. S'il était impossible de trouver un site qui fermât la vallée qui conduit de Caporetto à Cividale, alors un simple fort dans une belle position, le plus près possible de la frontière ennemie, pourrait suffire. Ce fort, maîtrisant la grande route, gênerait toujours d'autant les opérations de l'ennemi, les surveillerait, et servirait de magasin naturel aux corps qui seraient placés pour défendre le débouché de Caporetto.

Il serait nécessaire de reconnaître la chiusa vénitienne qui se trouve située entre Pontebba et Osoppo. Existe-t-elle ? Est-elle en bon état ? Que faut-il faire pour la mettre dans le cas de fermer tout à fait la vallée et de servir d'avant-poste à Ossopo? Je vous recommande bien de veiller aux approvisionnements de Palmanova, d'en surveiller l'armement, d'y réunir graduellement une grande quantité de bois, d'y faire établir une belle manutention, capable de cuire pour toute une armée.

Faites-moi connaître le nombre de pièces d'artillerie qui sont arrivées de Vienne sur le territoire de l'Italie. J'ignore également de quelle manière Venise et son territoire sont armés, et la quantité d'artillerie que je possède là. Faites-moi passer des états abrégés qui me fassent connaître la situation des choses.


Paris, 13 mars 1806

Au prince Eugène

Mon Fils, j'ai reçu l'état de situation que vous m'avez envoyé. Sur l'état des commandants d'armés, je n'en vois pas pour Osoppo; cela serait pourtant bien plus nécessaire qu'à Reggio, Padoue et Lodi. Je vois que le 5e régiment d'infanterie de ligne n'a que 1,600 hommes en Dalmatie, 710 hommes tant embarqués qu'au dépôt, 286 aux hôpitaux, et 304 prisonniers de guerre; total, 2,900 hommes, sur lesquels il n'y a que 1,600 présents à la division. D'abord les prisonniers de guerre doivent être rentrés depuis longtemps. Pourquoi y a-t-il 700 hommes au dépôt ? Voyez à les faire partir au fur et à mesure pour rejoindre; ils s'instruiront bien mieux à leur corps que dans les dépôts isolés.

Le 23e a 131 prisonniers de guerre; comment se peut-il que ces prisonniers ne soient pas rentrés ? Le 79e a 800 hommes à son dépôt, le 81e en a 400; faites passer la revue de ces dépôts, et, du moment qu'il y aura 150 hommes prêts à partir, faites-les marcher.

Je vois que les deux compagnies de sapeurs ne sont qu'à 40 ou 50 hommes; complétez-les à 100, en y envoyant des conscrits de la réserve. Je vois que l'artillerie n'est portée qu'à 62 hommes; complétez-la également sur le pied de 100 hommes, soit par des conscrits, soit par des canonniers que vous prendrez dans les dépôts. Comment les compagnies du régiment italien ne sont-elles que de 98 hommes ? Portez-les au grand complet de guerre.

Mon intention est que tous jours, avant de vous coucher, vous jetiez un coup d'œil sur la Dalmatie pour prévoir ses besoins de toute espèce et vous occuper des moyens d'y pourvoir. Vous devez avoir des nouvelles de ce pays toutes les semaines, alternativement par un officier du général Molitor, par un officier de votre état-major général, et tous les mois un de vos aides de camp doit parcourir cette province et vous faire connaître tous ses besoins. Cette division reste sur pied de guerre; j'y ai dix-huit bataillons; mon intention est que, sous peu de temps, ces cadres soient portés à 18,000 hommes. Cette force est nécessaire, non-seulement pour en imposer à l'Autriche, mais aussi pour contenir les Turcs et seconder mes mesures politiques. Pourquoi le général Molitor n'a-t-il qu'un aide de camp ? Il lui en faut trois. Pourquoi le général Delegorgue est-il sans aide de camp ? Un général du génie et trois officiers ne sont pas en nombre suffisant. Deux commissaires des guerres ne sont pas assez. Je ne vois point d'adjoints d'état-major; il en faut au moins quatre avec l'adjudant commandant.

Le 13e de ligne a beaucoup trop de monde à son dépôt.

Les deux compagnies françaises qui sont en Istrie ne sont que de 83 hommes; portez-les toutes deux au grand complet. La compagnie italienne n'a que 47 hommes; complétez-la également. La division de l'Istrie, qui n'est que de 3,500 hommes, doit être portée au grand complet de guerre, c'est-à-dire à 7,000 hommes. Un seul commissaire des guerres n'est pas suffisant.

Pourquoi, à l'article du 9e de ligne, porte-t-on 300 hommes en dépôt à Vérone ? Puisque le dépôt est maintenant réuni avec le régiment, tout cela devrait être confondu.

Je vois avec peine que vos régiments de cuirassiers soient si faibles; le 4e n'a pas 400 chevaux, et le 6e n'en a que 330; de manière qu'ils ne font que 700 chevaux. Mon intention est que la grosse cavalerie soit toujours sur le pied de guerre, c'est-à-dire portée à 600 chevaux. Les corps doivent avoir de l'argent en caisse; pourquoi les colonels le laissent-ils dormir ? Il faut qu'ils envoient en remonte et vous devez veiller à ce que des mesures soient prises pour qu'au plus tard au mois de juin ils aient les 660 chevaux. Réunissez les dépôts et placez-les dans les lieux les plus convenables pour leur instruction. C'est dans la grosse cavalerie que doit être, au plus haut degré, la science de l'homme à cheval. J'ai été extrêmement content de tous les combats de la cavalerie à la Grande Armée; mais les hommes, individuellement, ont besoin d'instruction. Je vois avec plaisir que ces régiments sont forts en hommes. Le 61e seulement, n'a pas ce qu'il lui faut; il vous sera facile de lui donner, sur les conscrits de la réserve , une soixantaine d'hommes. Le 19e de chasseurs est bien faible; comment n'est-il que de 300 hommes ? Comment le 23e n'est-il également que de 300 hommes ? Je donne ordre au dépôt du 23e, ainsi qu'à celui du 15e de se rendre en Italie; il faut que ces régiments puissent, dans le courant de l'été, vous offrir 2,400 chevaux pour entrer en campagne; ils n'en ont que 1,500; ils doivent avoir de l'argent; informez-vous de ce qu'ils en font.

Faites passer la revue de tous les dépôts de l'armée de Naples. Pourquoi le dépôt du 19e, pourquoi celui du 10e de ligne, qui est fort de 600 hommes, pourquoi celui du 20e, qui en a 500, celui du 42e, qui en a 600, etc., n'envoient-ils pas à leur régiment ? Vous avez donc dans les dépôts de l'armée de Naples 9,000 hommes et 700 chevaux. Faites-moi connaître comment sont organisés ces dépôts. Est-ce le 3e et le 4e bataillon qui s'y trouvent, ou sont-ce
des dépôts inorganisés? Mon intention est que ce soient des bataillons; car, si éloignés de leurs corps, il serait très-dangereux de n'avoir que des dépôts sans organisation.

Vous portez le 62e à Mantoue; j'ai lieu de croire qu'il est à Modène; si cela est vrai, ce sont des erreurs qu'il faut éviter. Tous ces dépôts ont-ils leur habillement ? Envoyez votre chef d'état-major les inspecter un à un et dans le plus grand détail, et dites au général Charpentier qu'il doit mettre un grand soin dans la rédaction des états qu'il m'enverra; que le temps n'est plus où les états restaient enfouis dans les cartons de la guerre, que tout me passe sous les yeux; il faut donc qu'il m'instruise, par les états qu'il m'enverra, comme si je voyais moi-même ces dépôts.

Faites-moi connaître combien chacun de ces corps doit recevoir de conscrits de l'an XIV, si on pousse leur instruction et s'ils sont habillés. Le régiment d'artillerie italienne est bien faible : portez-en les compagnies à 100 hommes. Je vois que cette artillerie est répandue partout, à Padoue, à Vicence, etc. Réunissez tout ce qui n'est pas dans les places fortes, afin de profiter de la belle saison pour l'instruire. Portez donc votre surveillance sur les régiments français de votre armée, sur les dépôts de l'armée de Naples, et enfin sur l'armée italienne; réunissez le plus d'artillerie italienne que vous pourrez à Pavie, pour qu'ils puissent faire leur polygone pendant tout l'été.

Faites partir le 20 mars un nouvel état de situation qui me fasse connaître votre position au 15 mars, et que je trouve dans les notes tout ce qui pourra me mettre à même de connaître la situation des dépôts et les raisons de leur accroissement ou de leur diminution. Faites-moi aussi connaître à cette même époque le nombre de places vacantes dans chaque régiment, le nombre des conscrits arrivés à votre armée et dans les dépôts de l'armée de Naples depuis le dernier état, et enfin ce qui vous est arrivé du dépôt général de Strasbourg, et dans quels corps vous les avez distribués.

D'ici à deux mois, l'air va devenir malsain en Italie. Votre principale étude doit être d placer mes troupes dans des pays sains; c'est parce que j'ai souvent porté cette attention jusqu'à la minutie que j'ai eu si peu de malades, et, depuis, c'est parce qu'on a négligé ce soin et qu'on a mis les soldats dans les marais et sur les bords du Pô qu'on a eu tant de malades. Brescia, Vérone, Salo, Udine, Bologne, Rimini, voilà les pays les plus sains de l'Italie. Mantoue, Peschiera, Porto-Legnago sont extrêmement malsains. Pendant quatre et cinq mois de l'année, il faut n'y avoir que de très-petits détachements, et même n'y mettre que des Italiens. Vicence, Bassano, Trévise sont très-sains. Padoue est moins sain. Venise doit être malsain. Étudiez donc avec soin vos cantonnements, et joignez à l'état du ler avril les dispositions projetées pour le ler mai.


Paris, 13 mars 1806

A M. BÉRENGER, DIRECTEUR DE LA CAISSE D'AMORTISSEMENT

Monsieur Bérenger, dans le bordereau que vous m'avez remis de la situation de la caisse d'amortissement, je vois que vous avez maintenant à la Grande Armée, en caisse, en numéraire. 1,100,000 francs.

Retours attendus de Hambourg, qui seront probablement reçus avant le ler avril . . . . . . .2,800,000 francs.
Traites qui échoient à Paris, en mars, avril et mai.                                                              630,000
Sur Amsterdam . . . . . . . . . . . . . . . . 1,200,000
Sur Hambourg . . . . . . . . . . . . . . . .  1,200,000
Sur Francfort . . . . . . . . . . . . . . . .    1,280,000
Sur Augsbourg . . . . . . . . . . . . . . .   1,400,000

Ces sommes me sont très-nécessaires ; et, dans le courant de mai, j'aurai besoin de leur totalité, du soir au matin. Il faut donc que ces sommes existent dans votre caisse, en espèces, et non représentées par des billets de banque ou des effets quelconques.


Paris, 14 mars 1806

A M. Talleyrand

Monsieur Talleyrand, vous verrez dans la journée M. de Vincent; vous lui direz que j'entends passer de l'Isonzo en Dalmatie par terre; que la république de Venise y avait passage, et qu'il serait absurde de m'avoir donné la Dalmatie, si l'on me refusait les moyens d'y communiquer par terre. Enfin il faut parler clair : si l'on ne veut point m'accorder cette communication, je n'accepte point la Dalmatie, et j'ordonne que mes troupes ne quittent point Braunau; car me refuser ce qu'on accordait à la république de Venise, c'est m'ôter cette province et ne pas remplir les conditions du traité.

-----------------

Tâchez que M. de Vincent expédie, dans la journée, un courrier à sa cour; car dites-lui bien que mes troupes qui devaient quitter l'Allemagne ont reçu l'ordre d'y rester, et que certainement je ne laisserai pas 10,000 hommes en Dalmatie isolés, sans communication.


Paris, 14 mars 1806

Au prince Eugène

Mon fils, voici un décret que j’ai pris. Comme j’imagine que le ministre de la guerre ne vous l’expédiera que dans deux ou trois fois vingt-quatre heures, je vous l’envoie à l’avance pour que vous le fassiez mettre aussitôt à exécution. Nommez un inspecteur aux revues qui soit votre confiance. Mon intention est que, ces divisions de dépôt une fois organisées, il ne sot plus fait aucun mouvement des dépôts sur Naples sans mon ordre.

(Mémoires du prince Eugène)


Paris, 14 mars 1806

Au prince Eugène

Mon fils, mon intention est quel 'arsenal et tous les établissements d'artillerie de mon royaume d'Italie restent fixés à Pavie, et que, sous quelques prétexte que ce soit, on ne puisse les mettre ailleurs, et que les établissements d’artillerie de mon armée 

française en Italie soient placés à Padoue ou à Vérone, je vous laisse le choix. Faites-moi connaître par le retour du courrier le point que vous choisissez; que ce soit celui où il y a. le plus de magasins et d’établissements. Mon intention est que tout l’équipage de campagne de 1’armée française soit réuni à Vérone, et que les régiments d’artillerie à pied et à cheval destinés à servir à l’armée d’Italie, qui sont à Plaisance, se rendent à Vérone, afin qu’ils soient entièrement dans l’armée.

Vous trouverez ci-joint l’état des objets d’artillerie qui doivent être arrivés à Palmanova; il y a, non-seulement de quoi armer Palmanova, Osopo et la nouvelle place que je veux établir à Cividale, mais on peut en faire refluer sur Mantoue; faites faire l’armement et les affûts nécessaires, afin que les places de Palmanova et d’0sopo se trouvent parfaitement garnies.

Envoyez-moi un état de toutes les pièces d’artillerie de campagne qui sont en Italie appartenant à la France, et de celles qui appartiennent au royaume d’Italie, en distinguant celles qui seraient aujourd’hui à l’armée de Naples, afin’ que je prenne un décret qui règle la portion de l’équipage de campagne qui doit rester à Palmanova en dépôt, la partie qui doit rester à Vérone au parc général et la partie qui doit rentrer en France, c’est-à-dire du coté d’Alexandrie.

(Mémoires du prince Eugène)


Paris, 14 mars 1806

A M. Talleyrand

Monsieur Talleyrand, il est trois pays que je désirerais bien avoir pour arrondir le prince Murat : d'abord les abbayes d'Essen et de Werden; cela ne fait que vingt mille âmes; après, le comté de Lamarck; enfin le comté de Wittgenstein. Les deux premiers appartiennent à la Prusse; je ne sais trop à qui appartient le troisième; faites-m'en un rapport. Je désire que vous cherchiez ce qu'on pourrait céder à la Prusse en échange; il y a autour d'elle des petits princes dont les États sont à sa convenance. Dites qu'Essen et Werden appartiennent à Clèves, car c'est une des nouvelles possessions acquises par la Prusse.

Je désire que vous me fassiez un rapport pour donner Francfort à Darmstadt, qui indemniserait Hesse-Cassel et Nassau; ceux-ci céderaient les pays contigus au duché de Berg; Hesse-Cassel céderait l'enclave près du Rhin , qui serait donnée à Bade. Il faut que cette affaire soit terminée promptement et ratifiée en moins de vingt jours.

Est-il utile que le prince Murat prête foi et hommage à l'empereur d'Allemagne ? N'est-ce pas moi qui le garantis ? Faites des instructions à M. de la Rochefoucauld pour qu'il donne communication des nouvelle destination du duché de Berg et de Clèves. Vous ne parlerez à M. de Haugwitz que le 16 de ce que je veux faire pour le prince Murat et des augmentations que je désire lui faire obtenir.


Paris, 14 mars 1806

A M. Talleyrand

Monsieur Talleyrand, j'ai vu ce soir M. Ver Huell. Voici mots à quoi j'ai réduit la question : la Hollande est sans
exécutif; il lui en faut un : je lui donnerai le prince Louis. On fera un pacte par lequel la religion du pays sera respectée; le prince gardera la sienne, et chaque partie de la nation gardera la sienne. La constitution actuelle sera conservée, hormis qu'au lieu d'un Pensionnaire il y aura un roi. Je n'aurai pas même de difficulté à lui donner le titre de stathouder. Du reste, la constitution  sera la même. Schimmelpenninck présidera le conseil des puissances. Dans toutes les relations extérieures, dans le gouvernement des colonies et dans toutes les affaires d'État, les actes seront au nom du stathouder ou du roi. Il me semble que cela devrait être fait très-promptement. Confirmez M. Ver Huell dans ces idées, et qu'il parte après-demain. Rédigez-moi un projet, et envoyez à La Haye une personne adroite pour suivre cette affaire. Il faudrait que le château du Loo et les domaines en dépendants fussent donnés au prince, avec des moyens de soutenir la splendeur de son rang. C'est une affaire à laquelle je suis décidé; cela, ou bien la réunion. Les arguments sont que, sans cela, je ne ferai rendre aucune colonie à la paix, au lieu que non-seulement je ferai rendre toutes les colonies , mais je leur ferai même entrevoir que je procurerai la Frise. Enfin il n'y a plus un moment à perdre. Il faut q'avant vingt jours le prince Louis fasse son entrée à Amsterdam.

Pourquoi ferais-je rendre des colonies que l'on laissera toujours prendre sans résistance ?


Paris 14 mars 1806

DÉCRET

Sire, j'ai arrêté, après avoir consulté M. Denon, et d'après l'avis de la classe des beaux-arts de l'Institut national, les dispositions préliminaires pour préparer l'exécution des ordres de Votre Majesté à l'égard de la colonne qu'elle a décidé d'élever à la place Vendôme.

Mais il reste, Sire, une intention à donner à ce monument; les vœux de la nation française l'ont désignée. Votre Majesté l'avait d'abord destinée à recevoir la statue de Charlemagne; mais elle a, depuis, rendu cette statue à la ville d'Aix-la-Chapelle.

Que Votre Majesté daigne me permettre de lui dire qu'elle se rendrait aux sentiments unanimes de ses sujets si elle consentait à ce que cette colonne, formée avec le bronze des canons enlevés à l'ennemi, servît à consacrer les souvenirs d'une campagne qui vient de marquer une époque si glorieuse à l'histoire de la France; à ce que cette colonne, exécutée sur les proportions de la colonne Trajane, fût surmontée de la statue du prince qu'elle chérit.

Quelle autre statue pourrait occuper la place que celle de Charlemagne laisse vacante ?

Quoi de plus naturel que de retracer les événements de cette guerre, les noms des compagnons de vos victoires, sur le même bronze qui en compose les trophées !

Notre ministre de la guerre mettra à la disposition de notre ministre de l'intérieur, pour être employée à la construction de la colonne d'Austerlitz, la quantité de cent cinquante mille livres pesant de bronze en pièces de canon prises tant sur les Russes que sur les Autrichiens. Ces pièces seront choisies parmi les moins propres au service.


Paris, 14 mars 1806

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, je vous ai fait connaître que je désirais que vous fissiez passer une convention pour régler de quelle manière je dois communiquer avec la Dalmatie, et fixer le nombre des journées d'étapes. La république de Venise jouissait de cette communication; d'ailleurs me donner la Dalmatie sans les moyens d'y communiquer, c'est ne me rien donner et exposer mes troupes à être coupées et perdues.

Tant que cette convention ne sera pas faite, je n'évacuerai pas Braunau, car c'est me refuser l'exécution du traité que de me refuser une chose si évidemment juste. J'ai fait tenir le même langage à M. de Vincent. Mon intention est que mon armée ne bouge pas de ses positions que cette convention n'ait été faite.

---------------------

Prévenez que toutes mes troupes ne bougeront de l'Allemagne que cette mauvaise difficulté qu'on me fait ne soit levée. Écrivez au maréchal Soult de se mettre en mesure de soutenir Braunau, et donnez des ordres positifs pour qu'il ne soit pas évacué.


Paris, 14 mars 1806

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, mon intention est que mon armée reste en Allemagne jusqu'à ce que j'aie des réponses positives de la cour de Vienne relativement aux affaires de Dalmatie.

Cependant je sens qu'il est urgent de soulager les Etats du roi de Bavière, et, en même temps, de rapprocher mon armée de chez moi; car je ne puis douter que la cour de Vienne cesse e refuser une chose qui est si juste. Vous ordonnerez en conséquence les dispositions suivantes : le corps du maréchal Ney partira d'Augsbourg, emmenant avec lui la division de dragons de Walther, et se rendra à petites journées, de manière à fatiguer le moins possible mes soldats, par Memmingen à Engen. Il se cantonnera dans toute l'étendue de la principauté de Forstenberg, et vivra aux dépens de cette principauté, sans faire supporter aucune charge au pays de Bade ni à la Bavière. Le maréchal Ney attendra là de nouveaux ordres. Infanterie, cavalerie, artillerie, tout doit être en état.

Le maréchal Davout se rendra, avec son corps d'armée, à Oettingen, et cantonnera ses troupes dans toute cette principauté, qui est très-étendue, puisqu'elle fait 70,000 âmes , sans être à charge d'aucune manière à la Bavière. Il enverra une de ses divisions occuper entièrement la seigneurie de Limburg, et une autre occuper toute la principauté de Hohenlohe; si son séjour se prolongeait plus longtemps que je ne le pense, elle pourrait même s'étendre dans le Mergentheim. Les principautés d'Oettingen , Limburg et Hohenlohe forment plus de 100,000 âmes; son armée doit vivre là à son aise, sans fatiguer aucun de mes alliés. Par ce moyen la Bavière se trouvera déchargée de nourrir deux corps d'armée, et cela me donnera le temps de faire toutes mes dispositions générales, puisque ces corps d'armée ne seront pas rendus avant le 25 dans leurs cantonnements.

Le maréchal Soult se trouve avoir une grande quantité de cavalerie; je ne vois pas d'inconvénient qu'elle se déploie et prenne plus d'espace, et même qu'une de ses deux divisions de cavalerie se prolonge sur le Lech, du côté d'Ingolstadt et de Neuburg.

Vous pouvez renvoyer le quartier général et tous les bagages à Ulm. Je désire cependant que, de votre personne , vous restiez encore quelques jours à Munich.

Le payeur général de l'armée, qui est à Strasbourg , a de l'argent en caisse. Donnez ordre que tous les corps d'armée envoient leurs payeurs à Strasbourg, pour toucher la solde pour janvier et avril. J'imagine qu'aucun corps n'a encore reçu la solde de janvier. Vous aurez soin de vérifier à combien se monte la solde de l'armée, pour qu'il ne soit pas payé plus qu'il ne faut. Vous en enverrez l'état général au payeur général à Strasbourg. Les payeurs particuliers attendront des ordres à Strasbourg et seront toujours prêts à partir pour se rendre dans les villes où leurs corps d'armée doivent passer le Rhin , et y verser dans les caisses des corps la solde de janvier et avril, de manière que, du moment que les corps seront en France, on puisse faire à tous les soldats de l'armée un double prêt, jusqu'à ce que les quatre premiers mois de l'année soient payés.

Comme les régiments de cavalerie de la réserve sont aujourd'hui dispersés dans les corps d'armée, vous donnerez ordre au payeur du prince Murat de se rendre à Strasbourg. Donnez ordre aux quartiers maîtres de ces régiments de s'y rendre aussi, afin qu'ils reçoivent des mains du payeur du prince Murat leur solde, et la payent à leur corps du moment qu'ils passeront le Rhin.

Vous aurez reçu mon décret pour les fourrages. Il faut donc aussi que les quartiers-maîtres reçoivent, à Strasbourg, leur masse de fourrages, que le ministre Dejean leur fera fournir de là même caisse du payeur général, pour que les corps, à leur passage du Rhin, aient des fourrages et puissent se rendre à leur destination. Chaque corps sera prévenu, huit jours d'avance, de l'endroit où passer le Rhin et de la route qu'il doit tenir.


Paris, 15 mars 1806

A M. Fouché

Je vous envoie l'état des personnes âgées de plus de soixante quinze ans sur les têtes desquelles reposent des rentes. Je suis fondé à penser qu'il y en a un grand nombre qui sont mortes, mais qui vivent pour toucher leurs rentes. Si on pouvait en découvrir quel-unes et en faire un exemple sévère, ce serait d'un très-bon résultât pour le trésor. Faites faire des enquêtes par les commissaires de police et la gendarmerie, pour porter un terme à cet abus.


Paris, 15 mars 1806

Au prince Murat

Vous trouverez ci-joint la proclamation que vous ferez deux jours après que vous aurez pris possession des duchés de Clèves et de Berg, c'est-à-dire le 23 ou le 24 du mois. Le titre que vous prendrez dans tous vos actes sera : Joachim, Prince et Amiral de France, duc de Berg et de Clèves. Vous commencerez par faire ôter les armes de Bavière et de Prusse, et vous les ferez remplacer provisoirement par celles de Berg dans la duché de le duché de Berg, par celles de Clèves dans le duché de Clèves. Je vous ferai passer incessamment les armes que vous devez prendre. Vous ne ferez mettre nulle part les armes françaises. Vous ne devez pas non plus, dans aucun de vos actes, prendre le nom de Murat.


Paris, 15 mars 1806

DÉCISION

Sire, les duchés de Clèves et de Berg étant les fiefs de la couronne impériale d'Allemagne, le prince qui les possède est vassal de cette couronne, et, comme tel, ne peut se dispenser de la prestation de foi et hommage.

Votre Majesté garantit au prince la possession et la souveraineté de ces duchés, mais sans le soustraire aux obligations qui naissent de sa qualité d'État d'Empire et du lien féodal.

Au reste, cette prestation de foi et hommage n'est, dans l'état présent des choses, qu'une pure formalité.

M. Talleyrand dit là justement ce que je veux laisser en discussion. Mon intention est de laisser cela dans la plus grande obscurité. Je déciderai avec le temps si ces duchés seront fiefs de l'empire germanique ou fiefs de mon empire. Il faut donc gagner du temps. En attendant, j'espère que la chambre impériale de Wezlar voudra bien m'en laisser prendre possession en liberté.


Paris, 15 mars 1806

A M. Talleyrand

Monsieur Talleyrand, je lis la proclamation que vous a remise M. de Haugwitz. Je ne perds pas un moment pour déclarer que je la trouve extrêmement mauvaise; elle blesse la vérité et ma dignité. Je suis surpris que vous ne m'ayez pas communiqué cette proclamation, et que vous ne l'ayez pas empêchée de partir. Je ne sais si j'ai bien lu, mais il me semble que votre billet dit qu'elle est partie. Je ne puis que vous témoigner mon extrême mécontentement d'avoir pris sur vous d'approuver une proclamation aussi étrange. Si je comprends bien, l'intention de la Prusse en l'envoyant, c'était qu'elle me fût soumise; elle ne devait donc pas partir sans que j'en aie eu connaissance. Déclarez qu'elle est contraire à ma dignité et aux engagements que j'ai pris. Je n'ai point forcé la Prusse à prendre le Hanovre, puisque je lui ai laissé l'alternative de laisser les choses comme elles étaient avant la guerre. En vérité, je ne puis concevoir votre manière de faire les affaires; vous voulez faire de votre chef et ne vous donnez pas la peine de lire les pièces et de peser les mots. Je serais vraiment très-fâché, la Prusse ayant des égards pour moi en me communiquant cette proclamation , de me trouver obligé d'avoir de grandes discussions avec elle pour cela. Apportez-moi ce soir des explications sur cette affaire.


Paris, 15 mars 1806

Au prince Eugène

Mon Fils, que vous gardiez un ou deux officiers napolitain qui vous sont nécessaires pour la carte géographique, je n'y vois pas d'inconvénient; que vous regrettiez la masse de ceux que vous envoyez à Naples, vous avez tort. Si c'étaient des officiers qui eussent eu une grande expérience de la guerre, ce serait tout simple; mais la plupart seront remplacés par des hommes de familles riches du royaume. Nommez donc à leur place des jeunes gens des différentes provinces, surtout des Brescians. Je vous autorise à prendre des Vénitiens. Mais il faut que ce soit des gens qui possèdent. Que jour et nuit ils travaillent à leurs manœuvres, et ne perdent leur temps; ils deviendront dans peu des officiers aussi bons que ceux que vous laissez là.

J'aurai égard à la demande des manufacturiers de crêpes de Bologne.


Paris, 15 mars 1806

Au prince Eugène

Mon Fils, je suis bien aise que la grande décoration de l'ordre de la Couronne de fer que je vous ai envoyée vous ait fait plaisir. Je suis heureux des circonstances que je puis trouver de vous témoigner mon amitié. Rien ne saurait ajouter aux sentiments que je porte; mon cœur ne connaît rien qui lui soit plus cher que vous; ces sentiments sont inaltérables. Toutes les fois que je vous vois déployer du talent, ou que j'apprends du bien de vous, mon cœur en éprouve une satisfaction bien douce.


16 - 31 mars 1806