16 - 30 novembre 1806


Berlin, 16 novembre 1806

Au roi de Naples

Votre aide de camp Clary arrive, et je reçois en même temps votre lettre du 30 par la poste de Mayence. Vous verrez, par les bulletins, que les affaires prospèrent ici et que mon armée est sur la Vistule; que la Pologne est animée du plus grand enthousiasme. Je suis maître de toutes les places fortes. J'ai fait dans la campagne 140,000 prisonniers, dont 20,000 de cavalerie. J'ai pris plus de 800 pièces de canon et 250 drapeaux et étendards. L'armée et la monarchie prussienne n'existent plus.


Berlin, 16 novembre 1806

A l'Impératrice

Je reçois ta lettre du 11 novembre. Je vois avec satisfaction que mes sentiments te font plaisir. Tu as tort de penser qu'ils puissent être flattés; je t'ai parlé de toi comme je te vois. Je suis affligé penser que tu t'ennuies à Mayence. Si le voyage n'était pas si long, tu pourrais venir jusqu'ici, car il n'y a plus d'ennemi, ou il est au delà de la Vistule, c'est-à-dire à plus de cent vingt lieues d'ici. J'attendrai ce que tu en penses. Je serai bien aise aussi de voir M. Napoléon.

Adieu, ma bonne amie, tout à toi.

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J'ai ici encore trop d'affaires pour que je puisse retourner à Paris.


Berlin, 16 novembre 1806

A M. Cambacérès  

Mon Cousin, j'ai reçu votre lettre du 8. Où avez-vous été chercher que l'Espagne était entrée dans la coalition ? Nous sommes au mieux avec l'Espagne, et cela prouve bien le danger des fausses nouvelles. Toutes les places fortes sont entre mes mains. Le roi de Hollande retourne de sa personne dans ses États pour en organiser la défense. Tous les 3e bataillons, que j'ai laissés en France, offriront à la belle saison un renfort de 40,000 hommes; les vingt bataillons que j'ai laissés en Bretagne, y compris ceux de la marine, en formeront 20,000. Me portant à Varsovie, où mes avant-postes sont déjà, pour rétablir la Pologne, l'Elbe et l'Oder seront bien gardés, et le maréchal Mortier restera toujours avec 40,000 hommes dans le nord de l'Allemagne pour contenir les Anglais et les Suédois; et moi-même je suis placé en échelons pour le secourir en trois jours, s'il le fallait. Ce qu'il y a de fait, c'est que je suis décidé à en finir. Ceci est jeu d'enfant. Quant aux prisonniers, qu'est-ce que 100,000 hommes répartis dans toute la France ? La plupart seront contents, travaillant chez les cultivateurs.


Berlin, 16 novembre 1806

Au général Dejean

Monsieur Dejean, je reçois votre lettre par laquelle je vois évidemment que vous n'avez rien fait pour le 5e escadron de cavalerie dont j'ai ordonné la formation. Vous écrivez aux colonels des régiments qui sont au milieu de la Pologne, qui n'ont pas le temps de lire vos lettres, ou qui même ne les reçoivent pas; vous n'arriverez ainsi à aucun résultat. Il faut nommer les officiers de 5e escadron parmi les officiers réformés. Vous êtes arrêté par la difficulté de savoir si ce sont des officiers de cuirassiers ou d'autres régiments de cavalerie que vous choisirez : cela devait d'autant moins vous arrêter que, quelque décision que vous eussiez prise, cela ne pouvait m'importer, et que, dans la circonstance, tout ce que vous auriez fait eût été bien. Vous n'êtes pas assez tranchant, et vous ne vous pénétrez pas assez de la situation des choses. Je désire que, vingt-quatre heures après la réception de ma lettre, tous les officiers soient nommés, pourvu que vous ne les preniez pas dans l'armée et que vous ne nommiez pas des freluquets de 1792. Nommez-moi des hommes qui aient fait une partie des campagnes et qui soient bons sujets.

Quant aux régiments de cuirassiers qui sont en Italie et qui rejoignent l'armée, j'ai laissé les 4e escadrons en Italie pour qu'ils s'y forment. Par ce moyen, toutes les mesures qui sont prises pour la conscription ne souffrent aucun dérangement. Du moment que je saurai que les cadres des 5e escadrons sont formés et existent, je rappellerai les 4e escadrons à l'armée. On demande ici à grande force des hommes de cavalerie à pied ; 800 ont été envoyés à Cassel; mais il y en a besoin de 800 autres; il en faudrait aussi ici. Veuillez donc envoyer des officiers passer la revue des dépôts, pour en faire partir tous les hommes disponibles à pied, avec leurs selles, leurs manteaux, leurs bottes et leurs armes; on leur donnera ici des chevaux. Il faut cependant laisser les hommes nécessaires pour soigner les chevaux. Les conscrits n'ont pas besoin de rester plus de huit jours aux dépôts. J'ai 60 à 70,000 hommes de cavalerie. Je suis persuadé qu'il y a encore en France plus de 10,000 hommes aux différents dépôts. Pour les chevaux qui, par le résultat des marchés, ne doivent être levés qu'en janvier, on aura le temps de fournir les hommes. Il faut laisser seulement des hommes pour les chevaux qui restent. Tout le reste, faites-le marcher. Il faut donc que vous m'envoyiez l'état de situation des hommes existant aux dépôts des différents régiments de cavalerie au 15 novembre; du nombre de chevaux qui arriveront en conséquence des marchés passés pour le ler janvier; de ceux à réformer, ce qu'il faut faire le plus tôt possible, et des chevaux qui peuvent partir des dépôts au 15 décembre et au ler janvier, et enfin du nombre des hommes que vous ferez partir; je désirerais qu'il fût au delà de 6,000 hommes ou de 4,000 au moins. J'ai bien vu, dans votre rapport, des ordres que vous aviez donnés pour cet objet; il faut presser ce travail, en faisant inspecter les dépôts par des officiers supérieurs et par des généraux. J'ai donné au roi de Bavière plusieurs centaines de chevaux que j'ai levés dans le pays de Baireuth, parce que je n'avais point d'hommes pour en avoir soin.


Berlin, 16 novembre 1806

Au maréchal Kellermann

Mon Cousin , je n'approuve point les observations du général Marescot. Je ne veux point de la place de Hanau ; faites-la démolir.


Berlin, 16 novembre 1806

Au maréchal Berthier

Je vois avec peine que vous ne me rendez jamais de compte de ce qui se passe sur les derrières. Les commandants doivent toujours vous écrire ; cela ne s'exécute pas. Le commandant de Spandau doit, tous les jours, vous envoyer une ordonnance, ainsi que celui de Potsdam. Il faut qu'un officier soit chargé de tenir cette correspondance et de leur écrire lorsqu'on ne reçoit pas de leurs nouvelles pour leur demander compte de ce qui se passe. Il sera bien tranquillisant, quand je serai au fond de la Pologne, d'apprendre, par la correspondance des commandants de place, qu'il n'y a rien de nouveau.


Berlin, 16 novembre 1806

Au général Chasseloup

Je vous envoie un plan de la forteresse de Rinteln; faites-moi connaître ce que vous en pensez. Envoyez quelqu'un la voir. Si cette place est dans l'enclave de Hesse-Cassel et si elle me rend maître du Weser, je serais assez disposé à la garder et à raser Nienburg et Hameln.


Berlin, 16 novembre 1806

Au maréchal Mortier

Mon Cousin, comme je pense que vous êtes arrivé à Hambourg et qu'il est urgent que vous ayez des instructions, je commence par vous donner celle d'occuper la ville, d'en désarmer entièrement les habitants, d'occuper Cuxhaven, de fermer hermétiquement la rivière, d'empêcher qu'aucun Anglais puisse s'échapper, de vous assurer des maisons des banquiers anglais, de faire mettre les scellés sur la banque, de saisir toutes les marchandises anglaises, n'importe à qui elles appartiennent, de n'avoir aucun égard pour les Anglais et les Russes, de faire arrêter même les consuls de ces deux nations, et d'empêcher toute espèce de communication avec l'Angleterre. Peu de temps après ceci, vous enverrez un régiment faire la même chose à Brème; le même corps sera chargé d'occuper Cuxhaven, de fermer le fleuve et d'établir deux batteries pour empêcher le passage de l'Elbe et du Weser; provisoirement vous l'interdirez à la navigation de toutes les nations. Vous vous emparerez de tout ce qui appartiendra à la Prusse et à l'Angleterre. Il y a beaucoup de bois de construction qui appartiennent à la Prusse. Je n'ai pas besoin de vous dire que le principal est de commencer par le désarmement et par l'arrestation de tous les Anglais de naissance, même des banquiers anglais établis dans ce pays depuis vingt ans; ils doivent me répondre des voyageurs français arrêtés à la mer. Vous les enverrez tous en France. Votre commandement s'étendra jusqu'à Lubeck, où vous ferez la même opération. Le prince de Ponte-Corvo doit avoir évacué Lubeck pour venir à Berlin et vous consigner les canons et magasins pris dans cette ville. Vous aurez soin que mes intérêts soient gardés.


Berlin, 16 novembre 1806

Au général Mortier

Mon Cousin, je reçois vos lettres du 12 et 13. J'ai donné l'ordre au général Savary de se rendre devant Hameln pour prendre le commandement des troupes que vous y laissez, de les réunir devant cette place, de faire venir de Cassel le 12e d'infanterie légère, et d'en serrer vivement le blocus en construisant des redoutes et faisant venir de Rinteln des obusiers pour bombarder la place et la forcer à se rendre. Je pense que vous devez laisser devant Hameln toute la division hollandaise, hormis les deux tiers de la cavalerie, que vous devez garder. Je sais qu'elle peut vous être nécessaire. Ces mesures prises, votre corps, que je pense réuni actuellement à Hambourg, sera beau, puisqu'il sera composé des 2e et 4e d'infanterie légère, et d'un régiment italien, et des 22e, 65e et 72e de ligne et de vingt-quatre à trente pièces d'artillerie; tout cela doit vous faire prés de 14,000 hommes. Je fais donner ordre aux 15e et 5e, qui arrivent le 20 à Wesel, de se rendre à Hambourg. Mais je vous recommande de réunir tous les Hollandais devant Hameln; ce qui, joint au 12e d'infanterie légère, qui s'y rendra de Cassel, donnera au général Savary les moyens de prendre cette place, où je ne suppose pas qu'il y ait plus de 5,000 Prussiens.


Berlin, 16 novembre 1806

Au prince Jérôme

Mon Frère, le 2e de ligne bavarois est bien faible, ainsi que le et le 3e de ligne. Voyez les généraux bavarois, pour qu'ils fassent venir des recrues pour les compléter. Il doit y avoir dans la Silésie beaucoup de moyens d'habillement, et de manufactures où vous devez trouver des draps, des tanneries. Tout ce que vous pouvez réunir, il faut le diriger sur Küstrin.


Berlin, 16 novembre 1806

32e BULLETIN DE LA GRANDE ARMÉE

Après la prise de Magdeburg et l'affaire de Lubeck, la campagne contre la Prusse se trouve entièrement finie.

Voici quelle était la situation de l'armée prussienne en entrant campagne.

Le corps du général Rüchel, dit de Westphalie, était composé de 33 bataillons d'infanterie, de 4 compagnies de chasseurs, de 45 escadrons de cavalerie, d'un bataillon d'artillerie et de 7 batteries, indépendamment des pièces de régiment.

Le corps du prince de Hohenlohe était composé de 24 bataillons prussiens et de 25 bataillons saxons, de 45 escadrons prussiens et de 36 escadrons saxons, de 2 bataillons d'artillerie, de 8 batteries prussiennes et de 8 batteries saxonnes.

L'armée commandée par le Roi en personne était composée d'une avant-garde de 10 bataillons et de 15 escadrons, commandée par le duc de Weimar, et de trois divisions. La première, commandée par le prince d'Orange, était composée de 11 bataillons et de 20 escadrons. La seconde division, commandée par le général Wartensleben, était composée de 11 bataillons et 15 escadrons. La troisième division, commandée par le général Schmettau, était composée de 10 bataillons et de 15 escadrons. Le corps de réserve de cette armée, que commandait le général Kalkreuth, était composé de deux divisions, chacune de 10 bataillons des régiments de la Garde ou d'élite, et de 20 escadrons.

La réserve, que commandait le prince Eugène de Wurtemberg, était composée de 18 bataillons et de 20 escadrons.

Ainsi le total général de l'armée prussienne était de 160 bataillons et de 236 escadrons, servis par 50 batteries; ce qui faisait, présents sous les armes, 115,000 hommes d'infanterie, 30,000 de cavalerie, et 800 pièces de canon, y compris les canons de bataillon.

Toute cette armée se trouvait à la bataille du 14, hormis le corps du duc de Weimar, qui était encore sur Eisenach, et la réserve du prince de Wurtemberg; ce qui porte les forces prussiennes qui se trouvaient à la bataille à 126,000 hommes.

De ces 126,000 hommes, pas un n'a échappé. Du corps du duc de Weimar, pas un homme n'a échappé. Du corps de réserve du duc de Wurtemberg, qui a été battu à Halle, pas un homme n'est échappé.

Ainsi ces 115,000 hommes ont tous été pris, blessés ou tués. Tous les drapeaux et étendards, tous les canons, tous les bagages, tous les généraux ont été pris, et rien n'a passé l'Oder. Le Roi, la Reine, le général Kalkreuth et à peine 10 ou 12 officiers, voilà tout ce qui s'est sauvé. Il reste aujourd'hui au roi de Prusse un régiment dans la place de Gross-Glogau, qui est assiégée, un à Breslau, un à Brieg, deux à Varsovie, et quelques régiments à Königsberg; en tout, à peu près 15,000 hommes d'infanterie et 3 ou 4,000 hommes de cavalerie. Une partie de ces troupes est enfermée dans des places fortes. Le Roi ne peut pas réunir à Königsberg, où il s'est réfugié dans ce moment, plus de 8,000 hommes.

Le souverain de Saxe a fait présent de son portrait au général Lemarois, gouverneur de Wurtemberg, qui, se trouvant à Torgau, a remis l'ordre, dans une maison de correction, parmi 600 brigands qui s'étaient armés et menaçaient de piller la ville.

Le lieutenant Lebrun a présenté hier à l'Empereur quatre étendards de quatre escadrons prussiens que commandait le général Pélet, et que le général Drouet a fait capituler du côté de Lauenbourg. Ils s'étaient échappés du corps du général Blücher.

La major Ameil, à la tête d'un escadron du 16e de chasseurs, envoyé par le maréchal Soult le long de l'Elbe pour ramasser ce qui pourrait s'échapper du corps du général Blücher, a fait un millier de prisonniers, dont 500 hussards, et a pris une grande quantité de bagages.

Voici la position de l'armée française : la division de cuirassiers du général d'Hautpoul, les divisions de dragons des généraux Grouchy et Sahuc, la cavalerie légère du général Lasalle, faisant partie de la réserve de cavalerie que le grand-duc de Berg avait à Lubeck, arrivent à Berlin.

La tête du corps du maréchal Ney, qui a fait capituler la place de Magdeburg, est entrée aujourd'hui à Berlin.

Les corps du prince de Ponte-Corvo et du maréchal Soult en route pour venir à Berlin. Le corps du maréchal Soult y arrivera le 20, celui du prince de Ponte-Corvo, quelques jours après.

Le maréchal Mortier est arrivé avec le 8e corps à Hambourg, pour fermer l'Elbe et le Weser.

Le général Savary a été chargé du blocus de Hameln, avec la division hollandaise.

Le corps du maréchal Lannes est à Thorn.

Le corps du maréchal Augereau est à Bromberg, et vis-à-vis Graudenz.

Le corps du maréchal Davout est en marche de Posen sur Varsovie, où se rend le grand-duc de Berg avec l'autre partie de la réserve de cavalerie, composée des divisions de dragons des généraux Beaumont, Klein et Beker, de la division de cuirassiers du général Nansouty, et de la cavalerie légère du général Milhaud.

Le prince Jérôme, avec le corps des alliés, assiégé Gross-Glogau. Son équipage de siège a été formé à Küstrin. Une de ses divisions a investit Breslau. Il prend possession de la Silésie.

Nos troupes occupent le fort de Lenczyca, à mi-chemin de Posen à Varsovie. On y a trouvé des magasins et de l'artillerie. Les Polonais montrent la meilleure volonté. Mais, jusqu'à la Vistule, ce pays est difficile; il y a beaucoup de sables. Pour la première fois, la Vistule voit l'aigle gauloise.

L'Empereur a désiré que le roi de Hollande retournât dans son royaume, pour veiller lui-même à sa défense.

Le roi de Hollande a fait prendre possession du Hanovre par le corps du maréchal Mortier. Les aigles prussiennes et les armes électorales en ont été ôtées ensemble.


Berlin, 16 novembre 1806

Au roi de Naples

Je donne ordre à M. Mollien de vous envoyer 500,000 francs en or, car votre aide de camp m'a dit que vous étiez pauvre.

Je ne réponds pas encore à la question que vous me faites, si Julie doit venir vous rejoindre; je me déciderai dans quelques jours.

Je vais essayer de former ici quelques régiments de Prussiens et d'Allemands pour votre service.

Toutes les nouvelles actuelles ont porté la consternation à Londres. L'occupation de Hambourg, que je viens d'effectuer, et la déclaration du blocus des îles britanniques accroîtront ce mal-être. Il paraît que les dernières élections sont dans le sens opposé au gouvernement.  Je ne vois pas pourquoi vous avez laissé revenir Assareto; j'ai ordonné qu'il fût éloigné de sa commune. Mes ordres ne sont pas exécutés. Il n'y a aucune espèce de suite dans la police; on agit sans règles ni principes fixes. Quand j'ai ordonné qu'il fût envoyé à trente lieues de Savone, il ne fallait pas l'y rappeler, surtout dans de nouveaux départements. C'est toujours à recommencer.


Berlin, 17 novembre 1806

A M. Fouché

Je ne sais quelle direction vous donnez à la police, mais tout cela est bien faible. Comment l'abbé Lefranc, soupçonné comme un ennemi prononcé du Gouvernement, dont vous avez ordonné l'arrestation, reste-t-il libre, parce qu'il est à la tête d'une maison d'éducation ? N'est-ce pas tolérer un empoisonneur, parce qu'il est dans une hôtellerie ?

Si vous aviez fait arrêter, après quelques jours d'observation, l'agent de Moreau à Paris, vous auriez su bien des choses. Il est singulier qu'ayant des moyens d'être instruit dans ce parti, ils aillent et tiennent à Paris sans difficulté.


Berlin, 17 novembre 1806

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, envoyez un courrier aux gouverneurs de Brunswick, de Minden, de Münster et de Bayreuth, pour qu'ils vous fassent connaître où en est la rentrée des contributions que j'ai frappées; tout le pays est désarmé, et les armes et l'artillerie envoyées France; si les anciennes armoiries ont été ôtées; si la justice rend en mon nom; enfin si la possession entière du pays a eu lieu. Il est indispensable qu'ils vous rendent ces comptes tous les jours. Recommandez-leur de veiller à ce qu'il n'y ait aucune dilapidation, que je n'en veux aucune, et que tout se fasse en règle.


Berlin, 17 novembre 1806

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, j'ai dans l'armée soixante-huit régiments d'infanterie et soixante-deux de cavalerie, ce qui fait cent trente régiments. Mon intention est que vous attachiez à chacun de ces régiments un élite de l'école militaire de Fontainebleau, ce qui en emploiera cent trente. Ces cent trente jeunes gens employés, vous prendrez mes ordres pour le reste.

Ceux qui seront attachés aux régiments de cavalerie resteront un mois au dépôt de Potsdam, où ils seront très-utiles au général Bourcier, parce que ce sont tous des jeunes gens intelligents.

Quatre de ces jeunes gens, que vous choisirez parmi les pensionnaires, seront attachés à chacun des maréchaux, comme sous-lieutenants d'ordonnance, ce qui en emploiera encore quarante-deux.

Vous pourrez en placer vingt à l'état-major général pour suppléer aux cent vingt capitaines adjoints à l'état-major qui doivent exister et qui n'existent pas.

Il y a un grand nombre d'officiers d'état-major qui vous sont arrivés de l'intérieur, qui sont absolument incapables de faire ce service, soit par leur âge et leurs infirmités, soit par leur ignorance. Il faut leur donner des commandements de places et les remplacer par des jeunes gens qui, par leur âge, leur éducation et leur intelligence, sont plus en état de faire un rapport. Ainsi, vous voyez que, si le ministre Dejean avait encore deux cents élèves, on trouverait à les employer; car je serais bien aise d'en attacher un à chacun de mes dépôts en France, et, comme j'en ai cent soixante et dix-huit, cela m'en emploiera encore deux cents. En attachant les jeunes gens à l'état-major et aux maréchaux, j'entends bien qu'ils ne pourront pas rester là plus d'une année, et qu'ils seront, après, envoyés dans les corps à mesure qu'il y aura des vacances. Cette disposition, d'ailleurs, sera momentanée et pour la campagne.


Berlin, 17 novembre 1806

Au général Dejean

Monsieur Dejean, j'ai donné des ordres pour que les deux cents jeunes gens de l'école militaire de Fontainebleau que vous avez envoyés reçoivent, à leur arrivée, une destination dans les corps d'infanterie et de cavalerie de l'armée. Faites-moi connaître si l'on pourrait en tirer deux cents autres, mais qui fussent capables d'instruire une recrue et qui sussent parfaitement l'école de bataillon.

Lorsque je suis passé à Metz, j'ai ordonné un changement pour l'école d'artillerie. On élève les officiers d'artillerie comme des officiers du génie; le savoir ne doit pas être le même. Donnez des ordres précis pour que dès les premiers jours on montre aux élèves destinés à l'artillerie l'exercice du fusil , l'école de peloton, l'exercice du canon, les manœuvres de force, les artifices, etc. , afin qu'ils soient, en six mois, capables d'entrer dans des compagnies et d'y rendre des services. Ce n'est pas que je ne pense que les élèves doivent rester deux ans à l'école; mais il est des circonstances où l'on peut avoir besoin deux, et il est alors nécessaire qu'ils sachent tout d'abord le nécessaire et l'indispensable du métier.


Berlin, 17 novembre 1806

A M. Cambacérès

Mon Cousin, vous verrez, dans le bulletin d'aujourd'hui, une suspension d'armes; ce n'est autre chose que pour asseoir mes quartiers d'hiver. Le prince de Bénévent vous enverra demain une communication à faire au Sénat, non sur cet objet, mais sur la politique générale du moment. J'imagine que vous ne recevrez cela que demain. Lorsque vous verrez les ministres, vous leur ferez connaître que ceci doit être pour eux une nouvelle raison d'activer la marche de la conscription et les autres moyens militaires. Vous voyez que notre position n'est pas mauvaise.


Berlin, 17 novembre 1806

33e BULLETIN DE LA GRANDE ARMÉE

La suspension d'armes ci-jointe a été signée hier à Charlottenburg. La saison se trouvant avancée, cette suspension d'armes assoit les quartiers de l'armée. Partie de la Pologne prussienne se trouve ainsi occupée par l'armée française et partie est neutre.

« S. M. l'Empereur des Français et Roi d'Italie, et S. M. le 1 de Prusse, en conséquence des négociations ouvertes depuis le 23 octobre dernier pour le rétablissement de la paix si malheureusement altérée entre elles, ont jugé nécessaire de convenir d'une suspension d'armes; et, à cet effet, elles ont nommé pour leurs plénipotentiaires, savoir : S. M. l'Empereur des Français, Roi d'Italie, le général de division Michel Duroc, grand cordon de la Légion d'Honneur, chevalier des ordres de l'Aigle-Noir et de l'Aigle-Rouge de Prusse et de la Fidélité de Bade, et grand maréchal du palais impérial; S. M. le Roi de Prusse, le marquis de Lucchesini, son ministre d'État, chambellan et chevalier des ordres de l'Aigle-Noir et l'Aigle-Rouge de Prusse, et le général Frédéric-Guillaume de Zastro, chef d'un régiment et inspecteur général d'infanterie, et chevalier des ordres de l'Aigle-Rouge et pour le Mérite; lesquels, après avoir échangé leurs pleins pouvoirs, sont convenus des articles suivants :

ARTICLE ler. - Les troupes de S. M. le Roi de Prusse qui trouvent aujourd'hui sur la rive droite de la Vistule se réuniront sur Königsberg et dans la Prusse royale depuis la rive droite de la Vistule.

ART. 2. - Les troupes de S. M. l'Empereur des Français, Roi d'Italie, occuperont la partie de la Prusse méridionale qui se trouve sur la rive droite de la Vistule jusqu'à l'embouchure du Bug, Thorn, la forteresse et la ville de Graudenz, la ville et citadelle de Danzig, les places de Kolberg et de Lanczyca, qui leur seront remises pour sûreté; et en Silésie, les places de Glogau et de Breslau, avec la portion de cette province qui se trouve sur la rive droite de l'Oder, et la partie de celle située sur la rive gauche de la même rivière, qui aura pour limite une ligne appuyée à cette rivière, à cinq lieues au-dessus de Breslau, passant à Ohlau, Zobien, à trois lieues derrière Schweidnitz et sans le comprendre, et de là à Freyburg, Landshut et joignant la Bohème à Liebau.

ART. 3. - Les autres parties de la Prusse orientale ou nouvelle Prusse orientale ne seront occupées par aucune des armées, soit françaises, soit prussiennes ou russes, et, si des troupes russes s'y trouvaient, S. M. le Roi de Prusse s'engage à les faire rétrograder jusque sur leur territoire, comme aussi de ne pas recevoir des troupes de cette puissance dans ses États pendant tout le temps que durera la présente suspension d'armes.

ART. 4. - Les places de Hameln et Nienburg, ainsi que celles désignées dans l'article 2, seront remises aux troupes francaises avec leurs armements et munitions, dont il sera dressé un inventaire, dans les huit jours qui suivront l'échange des ratifications de la présente suspension d'armes. Les garnisons de ces places ne seront point prisonnières de guerre; elles seront dirigées sur Koenigsberg, et on leur donnera à cet effet toutes les facilités nécessaires.

ART. 5. - Les négociations seront continuées à Charlottenburg, et si la paix ne devait pas s'ensuivre, les deux hautes parties contractantes s'engagent à ne reprendre les hostilités qu'après s'en être réciproquement prévenues dix jours d'avance.

ART. 6. - La présente suspension d'armes sera ratifiée par les deux hautes puissances contractantes, et l'échange des ratifications aura lieu à Graudenz, au plus lard le 21 du présent mois.

En foi de quoi, les plénipotentiaires soussignés ont signé le présent, et y ont apposé leurs sceaux respectifs.

Fait à Charlottenburg, le 16 novembre 1806.

Duroc, Lucchesini, Zastrow


Berlin, 18 novembre 1806

A l'électeur de Saxe

Je reçois la lettre de Votre Altesse Électorale, du 16 novembre. Je me fie entièrement à sa promesse. Je regarde comme non avenues ces malheureuses dépêches du ministre anglais (Dépêches en date du 23 octobre 1806, dans lesquelles le ministre anglais à Dresde représente l'électeur de Saxe comme acceptant à regret l'alliance Napoléon. ). Je suis fâché qu'elles lui aient occasionné autant de peine. J'espère que je trouverai dans Votre Altesse la même loyauté qu'elle a portée jusque dans les engagements qu'elle a contractés, et elle trouvera dans moi les mêmes sentiments.


Berlin, 19 novembre 1806

RÉPONSE DE L'EMPEREUR AUX DÉPUTÉS DU PALATINAT DE POSEN

L'Empereur a répondu, entre autres choses :

Que la France n'avait jamais reconnu le partage de la Pologne; que, les événements de la guerre l'ayant amené dans ce pays, il trouvait conforme à ses principes d'y recevoir les représentants de cet antique royaume; que l'illustre nation polonaise avait rendu les plus grands services à l'Europe entière; que ses malheurs avaient été le résultat de ses divisions intestines; qu'il ne pouvait point leur promettre le rétablissement de leur indépendance, puisqu'il ne devait dépendre que d'eux; que, lorsqu'une grande nation, lorsque plusieurs millions d'hommes veulent être indépendants, ils réussissent toujours dans leur entreprise; que, comme Empereur des Français, il verra toujours avec un vif intérêt le trône de Pologne se relever et l'indépendance de cette grande nation assurer celle de ses voisins, menacée par l'ambition démesurée de la Russie; que cela dépend plus d'eux que de lui; que, si les prêtres, les nobles, les bourgeois veulent faire cause commune, et prennent la ferme résolution de triompher ou de mourir, il leur présage qu'ils triompheront; mais que des discours et des vœux stériles ne suffisent pas; que ce qui a été renversé par la force ne peut être rétabli que par la force; que ce qui a été détruit par le défaut d'union ne peut être rétabli que par l'union, et que, le principe politique qui a porté la Franc à désavouer le partage de la Pologne lui faisant désirer son rétablissement, les Polonais pouvaient toujours compter sur sa toute-puissante protection.


Berlin, 19 novembre 1806

Au général Lemarois

Monsieur le Général Lemarois, j'ai reçu votre lettre du 17. J'ai lu avec intérêt le rapport que vous m'avez envoyé. Je donne ordre que le corps des troupes de Bade qui était à Küstrin se rende à Stettin, ce qui portera votre garnison à 2,500 hommes. Faites exercer l'infanterie au tir du canon. Il doit y avoir une compagnie d'artillerie dans ces corps. Les mineurs doivent aussi savoir tirer le canon. Les détachements des corps du prince de Ponte-Corvo et du maréchal Lannes, vous pouvez les garder jusqu'à nouvel ordre; cela vous fera un petit renfort. Tenez la main à ce qu'il ne parte aucun homme sans ordre, car le déplacement fréquent des corps fatigue beaucoup les troupes; au lieu que, lorsque les corps seront réunis, j'ordonnerai à tous les détachements de rejoindre. Je désire que des enquêtes soient faites pour découvrir si l'on a vendu du drap; je veux punir cet abus.

Il faut que le commerce de Stettin paye; ce sont nos plus grands ennemis, ce sont eux qui ont voulu la guerre; ils peuvent très-bien payer dix millions; qu'ils commencent toujours par payer les cinq premiers.


Berlin, 19 novembre 1806

Sénateurs, nous voulons, dans les circonstances où se trouvent les affaires générales de l'Europe, faire connaître à vous et à la nation les principes que nous avons adoptés comme règle de notre politique.

Notre extrême modération, après chacune des trois premières guerres, a été la cause de celle qui leur a succédé. C'est ainsi que nous avons eu à lutter contre une quatrième coalition, neuf mois après que la troisième avait été dissoute, neuf mois après ces victoires éclatantes que nous avait accordées la Providence, et qui devaient assurer un long repos au continent.

Mais un grand nombre des cabinets de l'Europe est plus tôt ou plus tard influencé par l'Angleterre; et sans une solide paix avec cette puissance, notre peuple ne saurait jouir des bienfaits qui sont le premier but de nos travaux, l'unique objet de notre vie. Aussi, malgré notre situation triomphante, nous n'avons été arrêté, dans nos dernières négociations avec l'Angleterre, ni par l'arrogance de son langage, ni par les sacrifices qu'elle a voulu nous imposer. L'île de Malte, à laquelle s'attachait pour ainsi dire l'honneur de cette guerre, et qui, retenue par l'Angleterre au mépris des traités, en était la première cause, nous l'avions cédée. Nous avions consenti ce qu'à la possession de Ceylan et de l'empire du Mysore l'Angleterre joignît celle du cap de Bonne-Espérance.

Mais tous nos efforts ont dû échouer lorsque les conseils de nos ennemis ont cessé d'être animés de la noble ambition de concilier le bien du monde avec la prospérité présente de leur patrie, et la prospérité présente de leur patrie avec une prospérité durable; et aucune prospérité ne peut être durable pour l'Angleterre, lorsqu'elle est fondée sur une politique exagérée et injuste qui dépouillerait soixante millions d'habitants, leurs voisins, riches et braves, de tout commerce et de toute navigation.

Immédiatement après la mort du principal ministre de l'Angleterre, il nous fut facile de nous apercevoir que la continuation des négociations n'avait plus d'autre objet que de couvrir les trames de cette quatrième coalition, étouffée dès sa naissance.

Dans cette nouvelle position, nous avons pris pour principes invariables de notre conduite de ne point évacuer ni Berlin, ni Varsovie, ni les provinces que la force des armes a fait tomber en nos mains, avant que la paix générale ne soit conclue, que les colonies espagnoles, hollandaises et françaises ne soient rendues, que les fondements de la puissance ottomane ne soient raffermis, et l'indépendance absolue de ce vaste empire, premier intérêt de notre peuple, irrévocablement consacrée.

Nous avons mis les îles britanniques en état de blocus, et nous avons ordonné contre elles des dispositions qui répugnaient à notre cœur. Il nous en a coûté de faire dépendre les intérêts des particuliers de la querelle des rois, et de revenir, après tant d'années de civilisation, aux principes qui caractérisent la barbarie des premiers âges des nations; mais nous avons été contraint, pour le bien de nos peuples et de nos alliés, à opposer à l'ennemi commun les mêmes armes dont il se servait contre nous. Ces déterminations, commandées par un juste sentiment de réciprocité, n'ont été inspirées ni par la passion ni par la haine. Ce que nous avons offert, après avoir dissipé les trois coalitions qui avaient tant contribué à la gloire de nos peuples, nous l'offrons encore aujourd'hui que nos armes ont obtenu de nouveaux triomphes. Nous sommes prêt à faire la paix avec l'Angleterre; nous sommes prêt à la faire avec la Russie, avec la Prusse; mais elle ne peut être conclue que sur des bases telles qu'elle ne permette à qui que ce soit de s'arroger aucun droit de suprématie à notre égard, qu'elle rende les colonies à leur métropole, et qu'elle garantisse à notre commerce et à notre industrie la prospérité à laquelle ils doivent atteindre.

Et si l'ensemble de ces dispositions éloigne de quelque temps encore le rétablissement de la paix générale, quelque court que soit ce retard, il paraîtra long à notre cœur. Mais nous sommes certain que nos peuples apprécieront la sagesse de nos motifs politiques, qu'ils jugeront avec nous qu'une paix partielle n'est qu'une trêve qui nous fait perdre tous nos avantages acquis pour donner lieu à une nouvelle guerre, et qu'enfin ce n'est que dans une paix générale que la France peut trouver le bonheur.

Nous sommes dans un de ces instants importants pour la destinée des nations; et le peuple francais se montrera digne de celle qui l'attend. Le sénatus-consulte que nous avons ordonné de vous proposer, et qui mettra à notre disposition, dans les premiers jours de l'année, la conscription de 1807, qui, dans les circonstances ordinaires, ne devait être levée qu'au mois de septembre, sera exécuté avec empressement par les pères comme par les enfants. Et dans quel plus beau moment pourrions-nous appeler aux armes les jeunes Français ? Ils auront à traverser, pour se rendre à leurs drapeaux, les capitales de nos ennemis et les champs de bataille illustrés par les victoires de leurs aînés.


Berlin, 21 novembre 1806

A M. de Talleyrand

Monsieur le Prince de Bénévent, voici le décret relatif au blocus de l'Angleterre. Envoyez-le par un courrier extraordinaire à mes ministres à Hambourg, en Hollande, à Madrid, en Toscane et à Naples, et insistez pour que dans chacun de ces pays les mêmes mesures soient prises. Vous ferez à ce sujet des notes qui pourront être imprimées.  Donnez ordre à mon chargé d'affaires en Danemark de faire connaître que je n'entends pas violer les traités, mais que j'espère que le cabinet de Copenhague ne tolérera ni l'établissement d'aucun courrier réglé ni aucun bureau de poste anglaise en Danemark. Il est convenable que mon chargé d'affaires ne se tienne pas à Copenhague, mais auprès du prince royal, auquel il faut insinuer qu'il n'a pas besoin de tant de troupes, et qu'il doit les diminuer; que, si elles sont contre moi, ce serait fort peu de chose; mais que, n'ayant plus rien à craindre de la Prusse ou de la Russie, c'est
beaucoup trop; que je ne m'oppose pas à un cordon pour contenir les maraudeurs, mais que 4 ou 5,000 hommes sont suffisants; qu'il doit trouver sa garantie dans sa bonne conduite et dans l'amitié de la France.

(lire le décret de Berlin)

 


Berlin, 21 novembre 1806

ORDRE

L'officier d'ordonnance Scherb se rendra à Hambourg; il remettra la lettre ci-jointe au maréchal Mortier. Il restera quarante-huit heures dans cette ville, et y verra M. Bourrienne et mon consul s'informera de la quantité de marchandises anglaises qui ont été confisquées, s'assurera si les rivières de l'Elbe et du Weser sont bien bloquées, et viendra me rendre compte de ce qu'il aura vu.


Berlin, 21 novembre 1806

Au maréchal Mortier

Mon Cousin, vous trouveriez ci-joint deux paquets pour M. Bourrienne, l'un relatif à l'état de blocus où je mets l'Angleterre, l'autre relatif au Mecklenburg. Du moment que vos troupes occuperont Hambourg, Brême et Lubeck, et que vous serez maître des embouchures de l'Elbe, du Weser et de la Trave, vous remettrez le premier paquet à M. Bourrienne, qui le présentera au sénat. Le rapport ne sera pas remis au sénat, mais il sera publié dans les gazettes, M. Bourrienne pourra même faire faire sur ce sujet une petite brochure et quelques écrits qui fassent sentir toute l'atrocité du système des Anglais, qui arrêtent les passagers et les marchands sur mer, tandis que l'ordre social établit que, sur terre, les boutiques, les propriétés particulières n'appartiennent point au conquérant. Je pense qu'une de vos divisions doit suffire pour occuper les villes hanséatiques. Vous enverrez une autre de vos divisions occuper Schwerin. Quelque temps avant, M. Bourrienne aura remis la note relative au Mecklenburg, et vous prendrez possession de tout ce pays; vous en désarmerez les troupes et ferez passer les armes en Hollande. Vous ferez confisquer à Rostock toutes les marchandises anglaises. Vous vous emparerez de tout ce qui pourrait se trouver dans les caisses, et vous ferez administrer et gouverner le pays en mon nom. Je n'ai pas besoin de vous dire que cette division doit être forte et bien composée. J'estime qu'il faut qu'elle soit au moins de la force de trois régiments francais, et qu'elle ait douze ou quinze pièces d'artillerie, afin de tenir en échec les Suédois.

Vous devez avoir actuellement trois régiments francais qu'avait le roi de Hollande et trois de votre corps d'armée. Ainsi vous pouvez donc envoyer trois bons régiments francais avec la moitié de votre cavalerie prendre possession de Rostock. Si cela est nécessaire, vous les ferez soutenir par les autres corps.

Votre corps d'armée est ou sera composé, avant le commencement de décembre, de quatre divisions : deux francaises, une italienne et une hollandaise.

La division hollandaise est aujourd'hui employée au blocus des places, mais elle sera disponible avant la fin du mois. Un régiment italien est à Cassel, mais il vous aura rejoint dans les premiers jours de décembre; le troisième régiment italien est à Mayence et vous aura également rejoint dans le même temps.

Les divisions d'artillerie française doivent exister actuellement, ou existeront avant le ler décembre.

Les 15e et 58e, qui partent le 24 de Wesel, rendront vos deux divisions françaises très-belles.

Vos divisions doivent avoir chacune douze pièces de canon. Ainsi donc il faut que vous ayez quarante-huit pièces de canon, douze hollandaises et trente-six françaises, vu que les Italiens n'ont pas de canonniers.

C'est à vous organiser un bon parc mobile que doivent tendre tous vos efforts.

Faites donner des capotes, surtout aux Italiens, sans quoi ils tomberont malades.

La division hollandaise sera commandée par des généraux hollandais; la division italienne, par des généraux italiens : le général Teulié, qui est à Berlin, en part pour en prendre le commandement.

Vos deux divisions francaises sont commandées par deux généraux de division et quatre ou six généraux de brigade. Je vous ai fait connaître ce que vous avez à faire actuellement. Immédiatement après que ces opérations seront faites, mon intention est, si le roi de Suède continue à rester en guerre avec moi, que vous vous empariez de la Poméranie suédoise.

Vous devez, avec votre corps d'armée, défendre le blocus des villes hanséatiques, empêcher tout débarquement en Poméranie et entre l'Elbe et l'Oder, par ce moyen garantir Berlin et maintenir toutes les communications avec le fort de mon armée qui se réunit sur la Vistule. Selon les circonstances, je pourrai vous appeler avec votre corps, ou seulement avec une partie, sur l'Oder ou même sur la Vistule. Dans cette saison, les Anglais ne peuvent rien entreprendre de sérieux.

Les Suédois ne sont pas en état de défendre la Poméranie; ainsi donc vous avez tout le temps de bien organiser votre corps, afin qu'il puisse faire la réserve de ma Grande Armée, et se porter partout où il serait nécessaire. Votre infanterie sera, d'ailleurs, augmentée ou diminuée selon les circonstances.

Je désire qu'avant le 25 le blocus de l'Angleterre soit publié; qu'avant le 8 décembre ce que j'ai prescrit pour le Mecklenburg soit mis à exécution, et que le 10 un de mes corps soit en position à Rostock, ayant des postes sur Anklam et cernant ainsi toute la Poméranie suédoise.


Berlin, 21 novembre 1806

ORDRE

M. le général Bertrand se rendra sur-le-champ à Graudenz, où il entrera avec les premières troupes. Il fera la reconnaissance de cette place et me fera connaître quelle garnison il y faudrait pour soutenir un siége, quelle garnison il y faudrait pour la garder et la mettre à l'abri d'un coup de main, et l'artillerie et les magasins que l'ennemi y laissera. Il m'enverra de là un rapport très-détaillé, après quoi il se rendra à Danzig, d'où il me fera un même rapport.


Berlin, 21 novembre 1806

A M. Cambacérès

Mon Cousin, je reçois votre lettre du 13 novembre. Vous n'aurez pas tardé à recevoir le bulletin qui vous aura annoncé l'affaire de Lubeck.

Je suis fâché que vous ayez envoyé au Conseil d'État la question de l'amirauté. Ce n'est pas dans ce moment qu'il faut agiter ces questions, qui peuvent froisser beaucoup d'intérêts sur nos côtes.

Je vous laisse le maître de disposer des forçats comme vous l'entendrez; mais, si l'on en envoie en Corse, on les emploiera aux chemins et aux autres travaux : c'est un pays qui, en général, manque de bras.

Le général Junot n'avait point d'ordre à donner à ma Garde, surtout pour son départ; je suis surpris qu'il se soit mêlé de cela. Je vois avec peine que vous ne montrez pas assez de fermeté. Il faut tenir davantage aux attributions particulières que je vous ai accordées. Personne ne doit donner des ordres à ma Garde que vous. Ainsi donc, si vous ne vouliez pas que les 200 hommes partissent, ils ne devaient point partir.

Si l'armée tâche d'honorer la nation autant qu'elle le peut, il faut avouer que les gens de lettres font tout pour la déshonorer. J'ai lu hier les mauvais vers qui ont été chantés à l'Opéra. En vérité, c'est tout à fait une dérision. Comment souffrez-vous qu'on chante des impromptus à l'Opéra ? Cela n'est bon qu'au Vaudeville. Témoignez-en mon mécontentement à M. de Luçay. M. de Luçay et le ministre de l'intérieur pouvaient bien s'occuper de faire faire quelque chose de passable ; mais pour cela il ne faut vouloir le jouer que trois mois après qu'on l'a demandé. On se plaint que nous n'avons pas de littérature; c'est la faute du ministre de l'intérieur. Il est ridicule de commander une églogue à un poète comme on commande une robe de mousseline. Le ministre aurait dû s'occuper de faire préparer des chants pour le 2 décembre. S'il ne l'a pas fait pour cette année, chargez-le de s'en occuper, dès à présent, pour l'année prochaine.


Berlin, 21 novembre 1806

A M. de Champagny

Monsieur Champagny, j'ai lu de bien mauvais vers chantés à l'Opéra. Prend-on donc à tâche, en France, de dégrader les lettres et depuis quand fait-on à l'Opéra ce qu'on fait au Vaudeville, c'est-à-dire des impromptus ? S'il fallait deux ou trois mois pour composer ces chants, il fallait les y employer. Témoignez mon mécontentement à M. de Luçay, et défendez qu'il soit rien chanté à l'Opéra qui ne soit digne de ce grand spectacle. Quant aux impromptus, il faut les laisser faire au Vaudeville. Il y avait une circonstance bien naturelle, c'était de faire faire quelques beaux chants pour le 2 décembre. La littérature étant dans votre département, je pense qu'il faudrait vous en occuper, car, en vérité, ce qui a été chanté à l'Opéra est par trop déshonorant.


Berlin, 22 novembre 1806

A M. Cambacérès

Mon Cousin, M. Maret vous envoie aujourd'hui un sénatus-consulte avec un projet de Conseil privé. Vous verrez, par ce sénatus-consulte, que je demande 80,000 hommes de la conscription de 1807. Vous recevrez aussi des communications fort importantes dont vous ferez part au Sénat le 2 décembre. J'ai tout lieu d'espérer que cette mesure frappera au cœur de l'Angleterre. Il sera convenable, après que cela aura paru dans les journaux, que vous vous occupiez d'y faire mettre des articles qui fassent sentir la nécessité de garder nos conquêtes jusqu'à ce que l'Angleterre et la Russie rendent les leurs. J'appelle 80,000 conscrits, parce qu'il n'y a que de l'avantage à setrouver prêt au commencement de l'année; que d'ailleurs cet appel ne laisse pas de faire de l'impression sur nos ennemis. Le résultat de tout ceci doit être la tranquillité générale et une paix solide avec l'Angleterre. Parlez dans ce sens au Sénat et au Conseil d'État, afin que ces idées se propagent dans l'Empire.


Berlin, 22 novembre 1806

A M. Gaudin

J'ai vu avec plaisir que la Banque ait réduit son escompte; les manufactures devraient se ressentir de cette abondance de l'argent.


Berlin, 22 novembre 1806

Au général Dejean

Vous verrez, par mon sénatus-consulte, que j'appelle 80,000 conscrits de 1807. Il faut les habiller. Ceux de 1806 ne le sont pas encore; c'est ce qu'on m'écrit de Mayence, de Strasbourg et de Paris. Il faut prendre des mesures adaptées aux circonstances. Des vestes, des culottes sont de première nécessité. J'ai prescrit, avant de partir de Paris, des dispositions pour fournir de l'argent aux corps de cavalerie pour se remonter. Mon intention est que cette disposition soit exécutée pour les corps qui ont passé des marchés; que rien ne soit contremandé, et qu'il soit accordé en conséquence un nombre d'hommes suffisant aux régiments de cavalerie; les régiments de cavalerie ne sauraient être trop nombreux. Présentez-moi, dans un rapport, les dispositions qui ont été arrêtées, les fonds qui ont été remis à chaque régiment; les corps qui ont passé des marchés et l'époque où les chevaux arriveront. Je vous ai demandé la plus grande partie des hommes de cavalerie à pied qui étaient en France; ils seront remplacés par les conscrits de 1807. Ainsi il y aura toujours de quoi monter les hommes que l'on recevra. Les chevaux que j'aurai en Allemagne me serviront à tenir ma cavalerie au complet et à monter les hommes que j'ai à pied. Les ressources que j'ai préparées avant de partir doivent servir à tirer des chevaux de France et à augmenter mes cadres. Ainsi donc, habillement pour les conscrits, chevaux pour les régiments de cavalerie, et selles, en exécution des mesures que j'ai prises, voilà ce qui doit occuper tous vos instants. Quand les cadres des escadrons seraient de 200 chevaux, on n'aurait jamais trop de cavalerie et les régiments ne seront jamais assez forts.

Songez qu'avant le mois de mai les Anglais peuvent tenter des débarquements en Bretagne, en Normandie ou à Boulogne, il faut donc que les régiments que j'ai à Paris, à Boulogne et en Bretagne soient en état de les repousser. Vous jugerez de nos besoins par l'exposé de ma politique que je fais au Sénat. Je recommande à votre zèle de suivre sans interruption toutes ces dispositions.


Berlin, 22 novembre 1806

Au général Lacuée, directeur général de la conscription militaire

Vous verrez, par le sénatus-consulte qui sera présenté au Sénat, que j'appelle la conscription de 1807. Vous verrez, par les communications qui y sont faites, que je ne veux pas poser les armes que je n'aie la paix avec l'Angleterre et avec la Russie. Il faut donc soutenir ce principe, conforme aux intérêts de la nation, qui, dans le courant de 1807, nous donnera une paix solide.

Je vois, par les états, que, le 15 décembre, toute la conscription de 1806 aura marché, et l'hiver n'est pas une mauvaise saison pour faire marcher notre conscription. Vous n'aurez pas besoin d'attendre mon ordre pour la répartition; ce serait trop long. Je compte l'appeler tout entière à l'armée active. Cependant, si l'on pense au Conseil d'État qu'il soit plus convenable d'en désigner 60,000 pou l'armée active et 20,000 pour la réserve, je n'y vois pas d'inconvénients; on appellera les 20,000 après. Je vous ai déjà fait connaître que je désirais que les régiments qui sont à la Grande Armée fussent portés au complet de 140 hommes par compagnie. Il faut surtout soigner les régiments à quatre bataillons, parce que je voudrais faire venir promptement à la Grande Armée le 3e bataillon. Par ce moyen le camp de Boulogne sera assez fort pour faire face à l'ennemi dans la saison où il pourrait tenter quelque chose. Je dois avoir dans la Bretagne treize bataillons d'infanterie; il faut qu'ils fassent plus de 15,000 hommes, indépendamment de la gendarmerie, des deux régiments de canonniers de la marine et des compagnies départementales.

Je dois avoir à Paris cinq à six 3e bataillons; il faut qu'ils puissent m'offrir au moins 6,000 hommes présents sous les armes, indépendamment de ce que ces régiments ont à l'armée, pour pouvoir se porter partout où il serait nécessaire, en Bretagne ou sur les côtes. J'ai appelé presque tous les hommes à pied des régiments de cavalerie à la Grande Armée, pour monter les chevaux qui ont été pris à l'ennemi. Mon intention est que tous les chevaux dont j'ai ordonné l'achat avant de partir soient achetés ; il faudra donc des hommes pour monter ces chevaux. Je pense alors qu'il sera convenable que vous fournissiez à chaque régiment de dragons, de hussards et de chasseurs, assez de monde pour que, indépendamment de ce qu'ils m'ont envoyé, il leur reste encore 150 hommes au dépôt. Cette cavalerie viendra me joindre au printemps, où j'en formerai des corps pour ma réserve de l'intérieur, ou pour garder mes derrières. J'imagine que les 5e escadrons de ma grosse cavalerie sont formés ; presque tous mes régiments de cavalerie sont ou vont être à plus de 600 chevaux, ce qui fait un effectif de plus de 700 hommes. Quand ils auraient tous un effectif de 1,000 hommes, ce ne serait pas trop. L'artillerie n'est même pas à son complet de guerre de 100 hommes par compagnie; il est donc important de le compléter et même de l'augmenter de 10 ou 20 hommes par compagnie.

Si, toutefois, toutes ces dispositions ne peuvent s'exécuter avec les 80,000 hommes, exécutez-les le plus possible, en faisant tomber également sur chaque corps la diminution, de manière que l'ensemble des idées se trouve réalisé.

Le régiment de vélites à pied de ma Garde ne me remplit pas son but. Mon intention est d'en faire un régiment de fusiliers. Entendez-vous avec les commandants actuels, et présentez-moi un projet. J'espère que mon régiment de fusiliers pourra venir à l'armée dans l'hiver et m'offrir 15 ou 1600 hommes sous les armes. En formant le régiment de vélites en régiment de fusiliers, vous le compléterez, et ce sera encore une ressource pour Paris et une réserve pour l'intérieur.

Je n'ai point perdu de monde; mais le projet que j'ai embrassé est plus vaste qu'aucun que j'aie jamais eu, et, dès lors, il faut que je me trouve en position de répondre à tous les événements. J'ai favorisé beaucoup l'Italie dans la répartition de la conscription de 1806; il faut donner spécialement aux régiments de quatre bataillons. Je crois que 8 ou 10,000 hommes sont suffisants pour la conscription de 1807.


Berlin, 22 novembre 1806, 10 heures du soir

A l'Impératrice

Je reçois ta lettre. Je suis fâché de te voir triste ; tu n’as cependant que des raisons d’être gaie. Tu as tort de montrer tant de bonté à des gens qui s’en montrent indignes. Mme L. . . est une sotte, si bête que tu devrais la connaître et ne lui prêter aucune attention. Sois contente, heureuse de mon amitié de tout ce que tu m’inspires. Je me déciderai dans quelques jours à t’appeler ici ou à t’envoyer à Paris.

Adieu, mon amie ; tu peux actuellement aller, si tu veux, à Darmstadt, à Francfort; cela te dissipera.

Mille choses à Hortense.

(Tendresses impériales - Albert Gri)


Berlin, 22 novembre 1806

Au maréchal Mortier

Mon Cousin, je vous envoie des notes que vous lirez et que vous remettrez à M. Bourrienne, qui les présentera; celle relative au blocus de l'Angleterre sera publiée et imprimée partout; celle relative au Mecklenburg ne sera remise que quand vos troupes auront pris possession de ce pays, conformément aux instructions que je vous ai envoyées hier par un officier d'ordonnance. (lettre ci-dessus du 21 novembre)

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Vous avez ordonné aux détachements de cavalerie qui étaient à Cassel de venir vous joindre : c'est une mauvaise mesure; quel part peut-on tirer d'hommes isolés, qui manquent d'officiers et de sous-officiers ? Envoyez à leur rencontre et dirigez-les sur Potsdam. Vous avez la cavalerie hollandaise, vous aurez bientôt le 26e, cela vous suffira ; et, si les circonstances me faisaient penser qu'il soit nécessaire que vous ayez plus de cavalerie, je ne manquerais pas de vous envoyer une division de dragons. Pourvu que mes corps ne soient point morcelés, tout est bon.


Berlin, 23 novembre 1806

Au maréchal Berthier

Le major général me fera faire un relevé des troupes qui forment les garnisons d'Erfurt, de Magdeburg, de Wittenberg, de Stettin, de Spandau et de Küstrin.

Il me fera faire un état divisé en colonnes verticales; chaque colonne fera une époque d'une semaine ; cet état me fera connaître ce qui est parti de France pour la Grande Armée, depuis la première semaine d'octobre jusqu'à la dernière semaine de décembre. Les dernières colonnes seront en blanc, mais on les remplira à mesure des départs.

Je désire avoir un second état divisé en autant de colonnes qu'il y a de semaines depuis le ler octobre jusqu'au 30 décembre, et qui présente tous les dépôts de cavalerie qui sont au delà du Rhin, en faisant connaître le nombre de chevaux partis chaque semaine. Les chiffres rouges indiqueront les chevaux, et les chiffres noirs les hommes.

On fera un troisième état jusqu'au ler février, qui indiquera successivement tout ce qui arrivera.

Il faut écrire fréquemment au chef d'état-major du corps du maréchal Mortier, pour avoir sa situation. 

Il faut donner l'ordre au général Teulié de se rendre à Hambourg, pour prendre le commandement de la division italienne ; également au général Bonfanti de se rendre à la division italienne.


Berlin, 23 novembre 1806

34e BULLETIN DE LA GRANDE ARMÉE

On n'a point encore de nouvelles que la suspension d'armes, signée le 17, ait été ratifiée par le roi de Prusse, et que l'échange des ratifications ait eu lieu. En attendant, les hostilités continuent toujours, ne devant cesser qu'au moment de l'échange.

Le général Savary, auquel l'Empereur avait confié le commandement du siège de Hameln, est arrivé le 19 à Oldendorf, devant Hameln, a eu une conférence, le 20, avec le général Lecoq et les généraux prussiens enfermés dans cette place, et leur a fait signer la capitulation ci-jointe; 9,000 prisonniers, parmi lesquels 6 généraux, des magasins pour nourrir 10,000 hommes pendant six mois, des munitions de toute espèce, une compagnie d'artillerie à cheval , 300 hommes à cheval, sont en notre pouvoir.

Les seules troupes qu'avait le général Savary étaient un régiment français d'infanterie légère et deux régiments hollandais, que commandait le général hollandais Dumanceau.

Le général Savary est parti sur-le-champ pour Nienburg, pour faire capituler cette place, dans laquelle on croit qu'il y a 2 ou 3,000 hommes de garnison.

Un bataillon prussien de 800 hommes, tenant garnison à Czenstochawa, à l'extrémité de la Pologne prussienne, a capitulé le 18 devant 150 chasseurs du 2e régiment, réunis à 300 Polonais confédérés, qui se sont présentés devant cette place. La garnison est prisonnière de guerre; il y a des magasins considérables.

L'Empereur a employé toute la journée à passer en revue l'infanterie du 4e corps, commandé par le maréchal Soult. Il a fait des promotions et distribué des récompenses dans chaque corps.


Berlin, 24 novembre  1806

A M. Gaudin

Je reçois le budget de 1806, que vous portez en recette à sept cents millions. Mon intention est que l'enregistrement soit porté à cent quarante-cinq millions au lieu de cent quarante-trois; les douanes à cinquante millions au lieu de quarante-sept; les sels et les tabacs au delà des Alpes à cinq millions au lieu de quatre. Je ne saurais adhérer à ces réductions.

Établissez dix millions de ventes de domaines nationaux et de rentes; ce qui fera la somme que je veux donner à la caisse d'amortissement.

Les recettes diverses ne sont point assez portées à trois millions, vu qu'il y a les impositions de Parme et Plaisance; ainsi il faut les porter à six millions.

Ajoutez aussi quatre millions au sel et quatre aux droits réunis, pour porter mon budget à sept cent vingt millions. Vous ferez sentir qu'un budget de sept cent vingt millions pour 1807 est le même qu'un budget de sept cents millions pour 1806, attendu qu'il y avait, en 1806, vingt millions des routes non compris dans le budget, et que nous portons, pour 1807, ces routes tant en recettes qu'en dépenses, afin d'établir plus d'ordre.

La mesure de distinguer ainsi la France et la France ultramontaine est bonne pour moi et pour mon ministre du trésor; mais elle ne doit point paraître dans le public, puisque la politique est de confondre et non de séparer.

Vous trouverez ci-joint le décret qui fixe les crédits de chaque ministère. Les détails des budgets seront établis en conséquence de ces bases dans l'approuvé que je mettrai au bas de chacun.

Vous n'avez pas mis dans les budgets l'article important des fonds des exercices arriérés, qui doivent appartenir à l'exercice où s'en est fait le recouvrement. Ces fonds doivent monter à trois ou quatre millions.


Berlin, 24 novembre 1806

A M. Gaudin

Je ne vois pas d'inconvénient à ce que la caisse d'amortissement avance les 250,000 francs, pour les différents travaux, qui doivent être fournis par la police et par l'octroi de Paris. Je vois cependant avec peine que ces caisses retirent les fonds dont j'ai marqué la destination. Cependant le principal est que les travaux ne soient pas dérangés.


Berlin, 24 novembre 1806

A M. Mollien

Monsieur Mollien, j'ai lu avec intérêt votre rapport sans date, mais coté no 2, sur la situation du trésor et de la place de Paris depuis le ler octobre. Je vois avec plaisir que vous avez réalisé une partie de mes espérances par la direction que vous avez donnée à votre service, et en faisant servir les obligations elles-mêmes comme effets.


Berlin, 21 novembre 1806

A M. Mollien

Monsieur Mollien, je désire que l'an prochain vous suiviez absolument le budget.

Je vous réitère d'avoir en caisse, et comme en dépôt, la solde de la Grande Armée jusqu'au 1er octobre, de manière qu'indépendamment de tout événement et de chances quelconques cette solde puisse être payée sans déranger rien ni aux finances ni au crédit. Il faut donc qu'elle existe à Strasbourg, Mayence et Paris en bons écus.

L'affaire des piastres est bien désagréable; nous perdons là l'intérêt de notre argent. Poussez vivement l'Espagne pour qu'elle paye ses traites. Garnissez-vous d'argent pendant qu'il est à bon marché; vous ne seriez pas pardonnable si vous n'aviez pas vingt millions en caisse pour parer aux besoins imprévus. C'est ce dont il faut vous occuper tous les jours. Par résultat de la paix générale ou d'un échec quelconque, l'argent peut devenir rare et les bourses se resserrer. Ayez donc vingt millions en caisse indépendamment de la solde de l'armée, qui ne vous appartient pas et qui n'est qu'un dépôt entre vos plains.

Je n'ai fait que parcourir vos états sur les ressources de 1807, parce qu'ils ne sont pas dressés dans la direction de mon esprit. Je ne perds jamais de vue le système des exercices et du budget, et, du moment où vous me présentez un aperçu, je recours au budget de l'année, et, quand je ne trouve pas à y faire promptement des comparaisons, vos chiffres ne me satisfont pas. 

Ainsi, par la dernière loi, il n'y a plus d'exercice jusqu'à l'an XIII, mais l'an XIII, l'an XIV et l'an 1806 existent encore. Peut-être sera-t-il possible, avec les bons, de donner ce qu'il faut à l'an XIII ; mais l'an 1806 doit rester en pied.

Il faut donc, pour que je comprenne facilement la situation du trésor, que vous mettiez dans une première colonne le budget de 1806 tel que l'a établi le ministre des finances; dans une seconde colonne, ce qui sera recouvré au ler janvier; la dernière colonne contiendra les observations qui feront connaître si le budget sera rempli. Cet état est plutôt du ressort du ministre des finances; cependant, pour connaître la situation des finances, il faut qu'il me soit envoyé avec le second état, qui est de votre ministère.

Ce second état présentera : première colonne, ce que la loi accorde à chaque ministre; seconde colonne, ce que j'ai accordé sur le fonds de réserve; troisième colonne, les crédits que j'ai accordé à chaque ministère par les distributions de mois, en y comprenant décembre, ce qui complète les quinze mois de l'exercice an XIV et 1806; enfin la quatrième colonne présentera le crédit restant à chaque ministre.

Cet état devrait être accompagné d'une note de chaque ministre faisant connaître ses besoins pour compléter le service de l'année 1806; alors seulement je verrai ce que je dois pour l'exercice 1806.

Je conviens aussi que cet état peut être plus du ressort du ministère des finances que du vôtre.

Après cet état viennent ceux que vous m'avez envoyés et qui sont alors intelligibles, c'est-à-dire votre situation des effets que vous réaliserez en 1808. J'imagine que vous ne comprenez dans aucun état les fonds spéciaux et les dépenses spéciales.

Ainsi j'ai évalué, pour quinze mois, ma dépense à huit cent quatre-vingt-quatorze millions. Combien ai-je dépensé ? Combien le trésor doit-il aux ministres ? Enfin ce dû sera-t-il nécessaire; car nous ne pourrons pas avoir toujours recours à des bons de la caisse d'amortissement. Il faudra donc payer sur le service courant.

Ainsi, pour savoir si les sept cent vingt millions que vous réaliserez dans l'année seront suffisants, il faut savoir : 1° si vous prétendez faire face aux dépenses spéciales, et pour quelle quotité; 2° si vous prétendez faire face à ce que je dois sur 1806, et quelle est la quotité de ce dû.

De quarante-six à cinquante millions par mois seront probablement suffisants dans le cours de l'année pour le service de l'exercice 1807, sans comprendre ce qu'il faudra payer chaque mois pour l'exercice 1806 ni aucune dépense spéciale.

Mais je vois toujours avec une grande peine soixante et douze millions dont vous ne pouvez pas venir à bout de vous rembourser. Pour que je comprenne donc bien la situation des finances, il faut que vous vous concertiez avec M. Gaudin et que vous me fassiez ensemble un rapport là-dessus.


Berlin, 24 novembre 1806

Au général Dejean

Monsieur Dejean, pressez le recrutement des premiers bataillons des régiments suisses; faites écrire par M. de Maillardoz, et écrivez à M. Vial que, si les Suisses ne recrutent pas promptement ces bataillons, je le tiendrai à mauvaise volonté.

Faites en sorte que les chevau-légers d'Aremberg puissent entrer en campagne au commencement de fèvrier.


Berlin, 24 novembre 1806

Au grand-duc de Berg

Je reçois votre lettre du 22; j'approuve le parti que vous avez pris de vous rendre aux avant-postes. J'attends des nouvelles de Duroc avant de me rendre en Pologne.

Vous avez avec vous les divisions 
de dragons Beaumont et Klein 

4,800

Les brigades Beker

l,200

Les brigades Nansouty 

2,400

Les brigades Milhaud

800

Total de la réserve

9,200

Infanterie

Cavalerie

Davout

22,000

1,200

Lannes

16,000

1,200

Augereau

16,000

800

Jérôme

12,000

2,000

66,000

5,200

Cavalerie de la réserve

9,200

14,400

Cavalerie légère 

5,200

Infanterie

66,000

Total général

80,400

Je ne pense pas que les Russes puissent avoir plus de 30 à 40,000 hommes à Varsovie. Ney sera le 24 à Posen; Soult le 25 à Francfort; Sahuc, le 27 à Posen; Grouchy, le 29; Lasalle, le 28.

Ainsi il y aura une belle armée sur vos derrières.

J'ai fait commander tous mes chevaux sur la route, afin de pouvoir arriver promptement aux avant-postes.  


Berlin, 24 novembre 1806

A M. Mollien

Monsieur Mollien, vous me dites que la Garde impériale a dépassé son budget : je ne le crois pas. Tout ce que vous avez donné à la Garde, vous l'avez imputé comme masse, quoique vous en ayez aussi payé la solde. Il faut réparer cette erreur dans les écritures; cela augmentera de quelques millions la solde et diminuera d'autant le matériel du ministre.


Berlin, 24 novembre 1806   

A M. Fouché

Je reçois votre lettre du 17. Je ne sais où vous avez été déchiffrer à Paris que l'Espagne était contre la France. C'est une imagination des Anglais pour vous inquiéter.


Berlin, 24 novembre 1806

Au vice-amiral Decrès

J'ai vu avec plaisir les travaux qu'a faits votre ingénieur hydrographe sur les ports de Venise et de Dalmatie. Faites-le continuer à Ancône, Tarente, Castellamare et Naples, afin que nous ayons sur tout cela des idées claires et positives.


Berlin, 24 novembre 1806

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, vous ferez remettre à la princesse Auguste de Prusse une somme de 24,000 francs, et vous lui ferez payer à l'avenir 18,000 francs par mois et d'avance. Ce payement devra avoir lieu à compter du 111 novembre.


Berlin, 24 novembre 1806

Au prince Eugène

Mon Fils, vous recevrez un décret pour faire au port de Venise un travail de 92,000 francs, qui est nécessaire pour que les vaisseaux puissent passer. Cette dépense sera prise sur les fonds du ministère de la guerre de mon royaume d'Italie. Rendez-moi compte si l'on a commencé à mettre des vaisseaux en construction.


Küstrin, 25 novembre 1806

Au grand-duc de Berg

J'arrive à Küstrin. Je n'ai point de nouvelles depuis le 22, que vous partiez de Posen. Duroc m'écrit le 21 de Graudenz qu'il n'y a là aucune nouvelle des Russes. Il n'avait point trouvé le Roi, qu'on supposait à Königsberg, et il suivait son chemin pour le joindre. J'espère recevoir des nouvelles des avant-postes dans le jour. Tout me porte à penser que les Russes ont moins de 40,000 hommes. D'ailleurs, je serai probablement demain au soir 26 à Posen.


Küstrin, 25 novembre 1806, 2 heures après midi  

Au maréchal Mortier

Mon Cousin, j'ai reçu votre lettre du 22. Je ne vois pas d'inconvénient à différer de mettre le scellé sur la banque de Hambourg, pourvu qu'on n'en laisse point sortir de lingots; servez-vous de M. Bourrienne pour savoir ce qu'il y a. Vous avez dû mettre à exécution, à l'heure qu'il est, le décret sur le blocus de l'Angleterre. Ne tardez pas à mettre à l'exécution celui sur le Mecklenburg, et portez, comme vous l'écrit le major général, une bonne partie de vos forces entre l'Elbe et l'Oder.

Donnez-moi fréquemment de vos nouvelles, et mettez-vous en correspondance avec le commandant de Stettin et le général Clark gouverneur de Berlin, pour savoir ce qui se passe et pouvoir agir selon les circonstances.

J'imagine que le 15e d'infanterie légère et le 58e ne doivent pas tarder à vous arriver, car ils ont dû partir le 20 de Wesel.


Küstrin, 26 novembre 1806

A l'Impératrice

Je suis à Küstrin pour faire un tour et quelques reconnaissance; je verrai, dans deux jours, si tu dois venir. Tu peux te tenir prête. Je serai fort aise que la reine de Hollande soit du voyage. Il faut que la grande-duchesse de Bade en écrive à son mari.

Il est deux heures du matin; je viens de me lever; c'est l'usage de la guerre.

Mille choses aimables à toi et à tout le monde.


Meseritz, 27 novembre 1806, 2 heures du matin 

A l'Impératrice

Je vais faire un tour en Pologne; c'est ici la première ville; je serai ce soir à Posen. Après quoi je t'appellerai à Berlin, afin que tu y arrives le même jour que moi. Ma santé est bonne, le temps un peu mauvais; il pleut depuis trois jours. Mes affaires vont bien. Les Russes fuient.

Adieu, mon amie, mille choses aimables à Hortense, Stéphanie et au petit Napoléon.


Meseritz, 27 novembre 1806

A M. de Talleyrand

Le roi de Prusse a déclaré qu'il n'était plus le maître de ratifier la suspension d'armes, parce qu'il s'était jeté entièrement entre les bras des Russes. Si les plénipotentiaires n'en sont pas instruits, il est inutile de leur en parler, jusqu'à ce qu'ils l'apprennent. J'attendrai d'avoir causé avec Duroc, que je verrai ce soir, pour vous envoyer des ordres pour les plénipotentiaires. Je serai ce soir à Posen; vous pouvez vous préparer à venir m'y joindre incessamment avec M. Maret. Berlin se trouve trop loin aujourd'hui du gros de mon armée. J'ai fait appeler mon quartier général de Berlin à Posen.


Meseritz, 27 novembre 1806

Au maréchal Soult

Mon Cousin, je ne conçois que vous n'ayez pas eu de draps pour vos capotes à Berlin. M. Daru m'assure que vous ne lui en avez pas demandé et qu'il a six mille aunes de draps à vous donner. J'ai passé ici un marché avec un fabricant de Meseritz, qui vous fournira, à votre passage, cinq cents pièces de draps pour capotes. Ces cinq cents pièces font huit à dix mille aunes. Vous les distribuerez sur-le-champ entre vos corps. Vous profiterez du peu de moments que vous aurez pour les faire couper; et les soldats les feront coudre comme ils pourront. Le même fabricant me promet deux mille autres pièces de draps dans quinze jours. Nous allons nous trouver fort embarrassés pour les souliers, si les corps n'en ont pas fait venir.

Le général Legrand doit se tenir à Landsberg, qui est une petite ville où il sera fort bien.

Placez-vous de manière que vos troupes ne soient point fatiguées et ne se ressentent point trop du mauvais temps, en gagnant sur la route de Posen. J'espère que ce mauvais temps va finir; dirigez cependant vos quatre régiments de cavalerie, qui souffrent moins du mauvais temps, sur Posen.

Le roi de Prusse n'a point ratifié la suspension d'armes. Il a déclaré qu'il était au pouvoir des Russes et qu'il ne pouvait rien faire.

Le grand-duc de Berg était hier à la suite des Russes, à une journée de Varsovie.

Je désirerais fort vous avoir à Posen, mais je désire encore plus que vos troupes ne se fatiguent point trop; rien ne me porte à penser, jusqu'à cette heure, qu'il y ait une grande nécessité.

J'ai trouvé hier à Landsberg un détachement du 75e, qui m'a paru très-beau; il aura sans doute rejoint son corps.

Rendez-vous de votre personne à Meseritz, et établissez-y votre quartier général. Vous y serez plus à portée d'y recevoir les ordres.


Meseritz, 27 novembre 1806

Au général Clarke, gouverneur général de la Prusse

J'ai fait donner l'ordre aux gouverneurs de Stettin, de Küstrin, Spandau, Magdeburg et Wittenberg de correspondre avec vous tous les jours. J'ai ordonné qu'il fût placé des postes le long de l'Oder par le commandant de Stettin, jusqu'à Oderberg, et par celui de Küstrin, de Küstrin jusqu'à Oderberg; de sorte qu'il n'y aura plus aucune correspondance sur l'Oder que par Stettin, Küstrin et Francfort. Diligences, courriers, chariots de commerce, etc., devront passer la rivière sur un de ces points. M. de Thiard commande la place de Dresde; il est fort convenable que vous vous mettiez en correspondance avec lui.

Berlin peut être attaqué par la Poméranie suédoise : j'ai ordonné au maréchal Mortier de tenir à Rostock et à Anklam deux fortes divisions, qui formeront de 12 à 14,000 hommes; non-seulement elles contiendront les Suédois, mais aussi serviront de réserve pour se porter à Berlin et partout où il sera nécessaire.

Des partis ennemis peuvent partir des bords de la Vistule pour tenter un coup de main sur Stettin, le gros de mon armée opérant sur le haut de la Vistule : j'ai donné des ordres circonstanciés dans ce sens au commandant de Stettin. J'ai ordonné qu'une partie des dépôts de cavalerie fût portée sur l'Oder; dans un cas d'événement pressant, on trouvera toujours dans ces dépôts un millier de chevaux qui repousseraient les partis ennemis. Dans ce cas même j'ai ordonné
au commandant de Stettin de prévenir les généraux du corps du maréchal Mortier, qui ont ordre de venir au secours de Stettin et border l'Oder.

Une révolte à Berlin me parait difficile. Je pense que, des 1,600 hommes de garde nationale, vous devez n'en armer que 800 sous prétexte que les fusils manquent; un fusil peut servir à deux hommes; ils se le passeraient. Il y aura à Berlin assez de garnison pour pouvoir contenir la population. D'ailleurs, le dépôt de Potsdam sera toujours en mesure de fournir un millier d'hommes, ainsi que les garnisons de Stettin, de Küstrin, et enfin le corps du maréchal Mortier, si les choses devenaient graves. Le principal est de ne souffrir à Berlin ni fusils, ni canons, ni sabres; tout doit être enfermé soigneusement à Spandau et dans les places fortes. La populace sans armes ne peut rien faire. Au moindre événement, vous devez faire arrêter le prince Auguste et le mettre à Spandau, en otage. Vérifiez ce que sont devenues les armes provenant du désarmement. Si on les a laissées à Berlin , faites-les transporter sans délai, à Spandau.

Je vais vous envoyer à Berlin, pour garnison, deux bataillons de Nassau qui font bien le service.

Enfin, cependant, si l'ennemi parvenait à passer l'Oder, ou d'un autre côté menaçait Berlin, vous vous retireriez dans la citadelle de Spandau, après avoir prévenu le plus possible les commandants des différentes places et donné des ordres pour qu'on n'éprouve point des pertes.

Je vais ordonner la formation de plusieurs colonnes et camps volants, qui pourront se trouver à Berlin et parcourir les provinces. D'ailleurs pendant longtemps vous aurez des troupes de passage. En exigeant que les commandants de Wittenberg, Magdeburg et Erfurt, etc., vous écrivent fréquemment, vous saurez toujours sur quoi vous pouvez compter. Une division de cuirassiers de 2,000 hommes, que commande le général Espagne, n'arrivera guère que dans quinze jours à Berlin ; enfin des bataillons provisoires, formés de conscrits que j'organise à Mayence, arriveront à la fin de décembre et en janvier, et vous fourniront plusieurs milliers d'hommes.

Portez une grande attention à ce qu'il n'y ait ni canons ni armes à Berlin, à ce qu'il n'y en ait que dans les places fortes. Envoyez des individus inspecter les lieux où il y a eu des combats du côté de Prenzlow, pour en retirer tous les canons qui pourront s'y trouver et les envoyer dans les places fortes. Il y a un conseiller du grand-duc de Berg qui a servi à Wesel et dans la campagne passée; il parle bien allemand, c'est un homme sûr; vous pouvez vous en servir avec avantage pour la police. Sur toutes choses, écrivez tous les jours afin qu'on sache ce qui se passe.

Portez une grande surveillance à ce que l'on confectionne des souliers, et qu'on les envoie à Küstrin; le temps devient mauvais, et l'on commence à en avoir très-grand besoin.

On avait conclu ici une suspension d'armes avec le roi de Prusse, qui a déclaré qu'il ne pouvait point la ratifier, parce qu'il était entièrement au pouvoir des Russes.


Posen, 28 novembre 1806

A M. de Talleyrand

Monsieur le Prince de Bénévent, je vous ai écrit hier de Meseritz que le roi de Prusse n'avait pas voulu ratifier la suspension d'arme. J'imagine qu'à l'heure qu'il est vous aurez eu une communication de ces messieurs. Comme le maréchal Duroc ne m'a rapporté aucune communication par écrit, j'attendrai une réponse de ces messieurs pour prendre un parti. En attendant, je désire que vous partiez sur-le-champ pour vous rendre à Posen. Dites la même chose à M. Maret, qui pourra partir avec vous. Les deux plénipotentiaires prussiens se rendront également à Posen. Vous et M. Maret vous passerez à Francfort-sur-l'Oder, Meseritz et Posen; il vous faudra trente-six heures pour arriver. Les plénipotentiaires de Saxe et de Saxe-Weimar recevront une autorisation de partir vingt-quatre heures après vous,
vous direz au grand chambellan de Saxe d'être tranquille, et qu'arrivé à Posen, la paix sera signée. Les plénipotentiaires prussiens passeront par Küstrin, Landsberg, Schwerin, Birnbaum et Posen, et seront accompagnés d'un officier que leur donnera le général Clarke. Ils ne devront pas se détourner de la route que je viens de prescrire. Le général Clarke fera partir en avant un courrier pour leur préparer leurs chevaux. Vous leur direz que je ne puis avoir grande confiance en eux, puisqu'ils sont désavoués; non que j'attache une grande importance à la suspension d'armes, que je ne m'en souciais guère, mais que cette manière de traiter prouve le peu de confiance qu'on a en eux.

Je désire que les plénipotentiaires partent de Berlin le plus tôt possible, parce que Lucchesini continue son métier d'intrigant; et quoique cela n'ait pas d'inconvénients, cela ne peut pas avoir non plus d'avantages.

Le roi de Prusse a déclaré au maréchal Duroc qu'il s'était jeté entre les bras des Russes. Le roi de Prusse ne peut pas avoir pour excuse qu'il est forcé par les Russes, car le général Bennigsen a déclaré qu'il obtempérera à tout ce que ferait la Prusse.

Vous savez que le bruit qui a couru que Hameln n'était pas pris est faux, car il n'y a eu qu'une fausse alerte. La ville ne s'en est pas moins rendue, et le général Savary a fait 9,000 prisonniers. Il est probable que le prince Murat est entré hier à Varsovie. Les Russes ne paraissent pas se trouver en mesure pour livrer bataille.

Je me porte bien.

Si vous n'avez pas de nouvelles de Vienne, écrivez-y, et mandez que l'on m'écrive, par la Gallicie, à Varsovie, en expédiant un secrétaire de légation, qui verra tout ce qui se passe.


Posen, 28 novembre 1806

Au général Clarke

Faites mettre dans les journaux de Berlin que Hameln s'est rendu; le général Savary a fait 9,000 prisonniers, dont quatre généraux, parmi lesquels le général Lecoq.

Expédiez un officier avec les plénipotentiaires prussiens. Ils suivront la route dont M. de Talleyrand vous donnera la note.

Faites mettre dans les journaux, dans quatre jours d'ici, qu'une suspension d'armes avait été signée entre M.M. Lucchesini, de Zastrow et le maréchal Duroc; que le roi de Prusse a déclaré n'être pas en pouvoir de la ratifier, étant dans le pouvoir des Russes. Faites connaître cette nouvelle dans ce sens.


Posen, 28 novembre 1806

Au grand-duc de Berg

Mon Frère, je suis arrivé hier ici. J'attends vos nouvelles du 25 et du 26; je n'ai encore que vos nouvelles du 24 au soir. Le maréchal Ney a déjà une de ses divisions réunie ici. Tout est en marche. J'ai donné l'ordre à ma Garde et à mon petit quartier général de s'arrêter à Kutno, afin que cela puisse faire les escortes et me servir en route. Je suppose d'ailleurs que vous n'en avez pas besoin. Tout le reste de la cavalerie de la réserve sera réunie dans deux jours.

Le maréchal Duroc, qui a été à Osterode et qui y était le 24, n'a vu aucune trace des Russes et rien qui annonce leur passage par là; mais on lui a donné les mêmes renseignements que ceux que vous avez reçus de Varsovie, ce qui prouve qu'ils sont faux. C'est la mode des Russes. Ce qui prouve encore que cela est faux, c'est ce qu'ils mettent en seconde ligne sur le général Essen, tandis que les troupes de Bennigsen, au moins pour les deux tiers, sont des troupes qui étaient à Austerlitz. Les prisonniers et déserteurs que vous avez ne manqueront pas de vous instruire de cela. Du moment que vous serez arrivé à Varsovie, laissez cantonner le long de la Vistule, à dix lieues sur la gauche, les corps du maréchal Lannes et du maréchal Augereau. Tâchez de réunir tous les moyens de passage, et envoyer le long de la frontière autrichienne pour savoir ce qui s'y passe, les troupes qu'ils y ont et la position qu'ils y tiennent.


Posen, 28 novembre 1806

35e BULLETIN DE LA GRANDE ARMÉE

L'Empereur est parti de Berlin le 25, à deux heures du matin est arrivé à Küstrin le même jour, à dix heures. du matin. Il arrivé à Meseritz le 26, et à Posen le 27, à dix heures du soir. Le lendemain, Sa Majesté a reçu les différents ordres des Polonais. Le maréchal du palais, Duroc, a été jusqu'à Osterode, où il a vu le roi de Prusse, qui lui a déclaré qu'une partie de ses États était occupée par les Russes, et qu'il était entièrement dans leur dépendance; qu'en conséquence il ne pouvait ratifier la suspension d'armes qu'avaient conclue ses plénipotentiaires, parce qu'il ne pourrait pas exécuter les stipulations. Sa Majesté se rendait à Königsberg.

Le grand-duc de Berg, avec une partie de sa réserve de cavalerie et les corps des maréchaux Davout, Lannes et Augereau, est entré à Varsovie. Le général russe Bennigsen, qui avait occupé la ville avant l'approche des Français, l'a évacuée, apprenant que l'armée française venait à lui et voulait tenter un engagement.

Le prince Jérôme, avec le corps des Bavarois, se trouve à Kalisz.

Toute le reste de l'armée est arrivé à Posen, ou en marche par différentes directions pour s'y rendre.

Le maréchal Mortier marche sur Anklam, Rostock et la Poméraranie suédoise, après avoir pris possession des villes hanséatiques.

La reddition de Hameln a été accompagnée d'événements assez étranges. Outre la garnison destinée à la défense de cette place, quelques bataillons prussiens paraissaient s'y être réfugiés après la bataille du 14. L'anarchie régnait dans cette nombreuse garnison. Les officiers étaient insubordonnés contre les généraux et les soldats contre les officiers. A peine la capitulation était-elle signée, que le général Savary reçut la lettre ci-jointe, n° 1, du général von Schoeler; il lui répondit par la lettre n° II. Pendant ce temps la garnison était insurgée, et le premier acte de la sédition fut de courir aux magasins d'eau-de-vie, de les enfoncer et d'en boire outre mesure. Bientôt, animés par ces boissons spiritueuses, on se fusilla dans les rues, soldats contre soldats, soldats contre officiers, soldats contre bourgeois. Le désordre était extrême. Le général von Schoeler envoya courrier sur courrier au général Savary, pour le prier de venir prendre possession de la place avant le moment fixé pour sa remise. Le général Savary accourut aussitôt, entra dans la ville à travers une grêle de balles, fit filer tous les soldats de garnison par une porte et les parqua dans une prairie. Il assembla ensuite les officiers, et leur fit connaître que ce qui arrivait était un effet de la mauvaise discipline, leur fit signer leur cartel, et rétablit l'ordre dans la ville. On croit que, dans le tumulte, il y a eu plusieurs bourgeois tués.


Posen, 29 novembre 1806

A M. Cambacérès

Je reçois votre lettre du 20. Je suis dans la capitale de la grande Pologne. Une de mes armées est aux portes de Varsovie. Les Polonais sont animés de la meilleure volonté. Ils forment des compagnies à pied et à cheval avec une grande activité. Ils montrent une grande ardeur de recouvrer leur indépendance : la noblesse, le clergé, les paysans ne font qu'un,


Posen, 29 novembre 1806

A M. Cambacérès

Mon Cousin, je vous ai laissé maître de l'affaire de cette ridicule conspiration. Je crois qu'il y aurait du mal à la laisser dans l'obscurité, parce qu'elle a déjà fait trop de bruit, et que, dès lors, elle passerait dans l'opinion pour être plus importante qu'elle n'est. Il y aurait du mal à la produire devant la haute cour. Il faut renvoyer le rapport du procureur général au Conseil d'État, et décider qu'il y a bien eu tentative de renverser l'État; qu'il y a crime particulier; qu'aucun personnage important ne se trouvant compromis, cette affaire ne peut être du ressort d'un tribunal tel que la haute cour, dont le principal but est d'être instituée pour la sûreté de l'État, mais des tribunaux ordinaires, dont la destination est de réprimer les crimes particuliers ; que l'affaire dont il est question est un crime particulier, dans ce sens qu'il y avait si peu de probabilité de succès que l'État n'a couru aucun danger. Après ce raisonnement, le Conseil d'État conclura au renvoi devant le tribunal criminel de Paris, et, si le Conseil d'État voit de la difficulté à renvoyer l'affaire au tribunal de Paris, il la renverra aux tribunaux spéciaux ordinaires et on fera demander par mon commissaire près la cour de cassation qu'elle soit renvoyée au tribunal criminel de Paris. Voilà, je crois, la marche à suivre. Ensuite je vous dirai, pour vous, que, tout en croyant qu'il faut donner quelque publicité à cette affaire, je ne pense pas qu'elle doive faire répandre du sang. Mon intention est donc que, lorsque le tribunal aura condamné les coupables, l'exécution soit suspendue jusqu'à ce qu'il m'en ait été référé comme en demande de grâce. Les pièces du procès feront paraître l'affaire dans son jour, et, si elle est telle qu'elle se présente actuellement, je pense qu'il sera convenable de commuer la peine.


Posen, 29 novembre 1806

A M. de Champagny

Monsieur Champagny, j'approuve que vous rendiez exécutoire la contribution sur les Juifs des départements, pour indemniser les rabbins et membres de l'assemblée de Paris. Moyennant cette indemnité, mon intention est qu'ils restent à Paris et que le sanhédrin soit convoqué dans le plus court délai.

Quant au projet d'organisation de la nation juive, il faut que le sanhédrin soit rassemblé. Convoquez-le pour une époque telle que je puisse lui renvoyer tout ce qui doit y être réglé. Il faut ôter des lois de Moïse tout ce qui est intolérant; déclarer une portion de ces lois lois civiles et politiques, et ne laisser de religieux que ce qui est relatif à la morale et aux devoirs des citoyens français.

NOTE RELATIVE AU SANHÉDRIN

§ 1er. Pour marcher d'une manière régulière, il faudrait commencer par déclarer qu'il y a dans les lois de Moïse des dispositions religieuses et des dispositions politiques; que les dispositions religieuses sont immuables, mais qu'il n'en est pas de même des dispositions politiques, qui sont susceptibles de modification; que c'est le grand sanhédrin qui seul peut établir cette distinction ; que, pendant tout le temps que les Juifs sont restés dans la Palestine et formaient corps de nation, les circonstances politiques étant les mêmes que du temps de Moïse, les grands sanhédrins n'ont point été dans le cas de faire cette distinction; que, depuis que les Israélites ont quitté leur patrie, il n'y a plus eu de grand sanhédrin. Après la déclaration de ces principes viendra l'application.

1° La polygamie était permise; elle doit cesser de l'être aux Juifs qui sont répandus dans l'Occident, tandis qu'elle peut l'être encore à ceux de 'l'Orient, en considération de la situation particulière où ils se trouvent.

2° Selon la loi de Moïse, les Juifs ne regardaient comme leurs frères que ceux qui professaient la même religion. Cela devait être lorsque le peuple juif était environné de peuples idolâtres qui avaient juré une haine commune aux enfants d'Israël; cela peut cesser d'être quand cette situation a changé, et c'est ce que le sanhédrin établira en décidant qu'on doit considérer comme frères tous les hommes, quelque religion qu'ils professent, s'ils ne sont pas idolâtres et si les Israélites jouissent au milieu d'eux des mêmes droits qu'eux-mêmes.

3° Cette fraternité étant établie, il en doit résulter l'obligation de défendre le pays où les Israélites jouissent des mêmes droits que les autres citoyens, de même que, selon la loi de Moïse, ils doivent défendre le temple de Jérusalem : le sanhédrin doit en faire une loi positive.

4° De la doctrine qui établira que les Juifs doivent considérer les Chrétiens comme frères, il résultera non-seulement que les mariages entre Juifs et Chrétiens ne sont point anathèmes, mais la nécessité de les recommander, parce qu'ils importent au salut de la nation.

5° et 6° La répudiation et le mariage doivent être assujettis à l'observation préalable des formalités prescrites par le Code Napoléon.

7° et 8° Les explications sur le prêt à intérêt, à peu près telles qu'elles sont établies dans le projet, dérivent également de la fraternité reconnue.

9° Les professions utiles.

Ajoutez aux dispositions de la décision proposée une invitation à devenir propriétaires.

10° Enfin une obligation de la propriété.

Toutes ces décisions appartiennent au grand sanhédrin, et c'est seulement de cette partie dogmatique que le travail prescrit par le ministre fait mention.

§ II. Des dispositions d'organisation et de discipline doivent aussi être prises, et elles paraissent appartenir à l'assemblée générale. Ainsi l'assemblée générale déterminera :

1° L'organisation de sanhédrins ou de consistoires administratifs par arrondissement et par département, et celle d'un consistoire ou sanhédrin central, et les attributions de ces institutions qui doivent exercer une police sévère sur les rabbins ;

2° Le nombre des rabbins, la manière dont ils seront payés, leurs obligations et leurs attributions;

3° Les conditions nécessaires pour être autorisé à faire le commerce, et la manière dont cette autorisation sera donnée, sous l'approbation de l'autorité locale;

4° La prohibition de toute espèce de commerce, du droit de tirer des lettres de change, de l'exercice du brocantage, de la faculté d'avoir boutique à tout individu qui ne sera pas pourvu de l'autorisation ci-dessus ;

5° La prohibition pendant dix ans, à tous les Israélites qui ne prouveraient pas qu'ils possèdent en France des biens fonds, de la faculté de prêter sur hypothèque, et l'autorisation aux propriétaires de fonds, en limitant la faculté de prendre hypothèque à une somme égale à la valeur du fonds qu'ils possèdent;

6° L'obligation, dans chaque département ou arrondissement de sanhédrin ou consistoire, de n'autoriser, sur trois mariages, que deux mariages entre Juifs et Juives, et un mariage mi-parti entre Juif et Chrétien; si cette disposition paraît d'une exécution trop difficile, il faut prendre des mesures d'invitation, d'instruction, d'encouragement, de commandement qui puissent conduire à ce but;

7° L'obligation de fournir une quantité de conscrits proportionnée à la population israélite, sans qu'il puisse y avoir de remplacement d'un Israélite autrement que par un Israélite.

D'autres dispositions pourraient être prescrites; mais elles viendront ensuite.

§ III. Parmi celles établies ci-dessus, il en est plusieurs qui sont non-seulement de discipline, mais encore de législation, et pour lesquelles le concours du Conseil d'État est nécessaire. Ainsi le grand sanhédrin expliquerait les dispositions politiques de la loi de Moise, prescrirait comme dogme les objets qui se trouvent dans son ressort. L'assemblée générale des Israélites, faisant une sorte de convention avec l'administration, et en considération des avantages que la révolution a accordés aux Juifs, prescrirait les dispositions d'organisation et de discipline. Enfin le Conseil d'État ferait les règlements nécessaires pour l'exécution des dispositions et des prohibitions indiquées ci-dessus.

Il y a dans tout ceci un mélange de dogmes, de discipline, de législation, d'où résulte la nécessité d'un grand sanhédrin, d'une assemblée générale des Israélites et d'un concours mutuel de l'autorité publique.

Il faut beaucoup de réflexion et de discernement pour distinguer d'une manière précise ce qui doit appartenir dans ce plan au grand sanhédrin, à l'assemblée générale et au Conseil d'État.

Si un sénatus-consulte était nécessaire, on n'y verrait pas de difficulté; mais il ne serait pas possible de procéder au moyen d'une loi, attendu qu'il s'agit d'arriver par des dispositions civiles à des résultats politiques.

§ IV. Le principal but qu'on s'est proposé a été de protéger le peuple juif, de venir au secours des campagnes et d'arracher plusieurs départements à l'opprobre de se trouver vassaux des Juifs; car c'est un véritable vasselage que l'hypothèque d'une grande partie des terres d'un département à un peuple qui, par ses mœurs et par ses lois, formait une nation particulière dans la nation française. C'est ainsi que, dans un temps fort rapproché de nous , la mainmorte menaçant de s'emparer du territoire, on fut obligé d'opposer des obstacles à ses progrès. De même, la suzeraineté des Juifs s'étendant sans cesse au moyen de l'usure et des hypothèques, il devient indispensable d'y mettre des bornes. Le deuxième objet est d'atténuer, sinon de détruire, la tendance du peuple juif à un si grand nombre de pratiques contraires à la civilisation et au bon ordre de la société dans tous les pays du monde.

Il faut arrêter le mal en l'empêchant; il faut l'empêcher en changeant les Juifs.

L'ensemble des mesures proposées doit conduire à ces deux résultats. Lorsque sur trois mariages il y en aura un entre Juif et Français, le sang des Juifs cessera d'avoir un caractère particulier.

Lorsqu'on les empêchera de se livrer exclusivement à l'usure et au brocantage, ils s'accoutumeront à exercer des métiers, la tendance à l'usure disparaîtra.

Lorsqu'on exigera qu'une partie de la jeunesse aille dans les armées, ils cesseront d'avoir des intérêts et des sentiments juifs ; ils prendront des intérêts et des sentiments français.

Lorsqu'on les soumettra aux lois civiles, il ne leur restera plus, comme Juifs, que des dogmes, et ils sortiront de cet état où la religion est la seule loi civile, ainsi que cela existe chez les Musulmans, et que cela a toujours été dans l'enfance des nations. C'est en vain qu'on dirait qu'ils ne sont avilis que parce qu'ils sont vexés : en Pologne, où ils sont nécessaires pour remplacer la classe intermédiaire de la société, où ils sont considérés et puissants, ils n'en sont pas moins vils, malpropres et portés à toutes les pratiques de la plus basse improbité.

Les spéculateurs proposeraient sans doute de se borner à introduire des améliorations dans leur législation ; mais cela serait insuffisant. Le bien se fait lentement, et une masse de sang vicié ne s'améliore qu'avec le temps. Cependant les peuples souffrent, ils crient, et l'intention de Sa Majesté est de venir à leur secours.

Il faut user concurremment de deux moyens, dont l'un est d'arrêter l'incendie et l'autre de l'éteindre.

De là la nécessité d'employer en même temps le grand sanhédrin, l'assemblée générale des Juifs et les  dispositions réglementaires délibérées par le Conseil d'État.

Le grand sanhédrin a pour lui les vœux et l'opinion de tout ce qu'il y a d'éclairé parmi les Juifs de l'Europe. Avec cet appui il est le maître de supprimer de la législation de Moïse les lois qui sont atroces et celles qui n'appartiennent qu'à la situation des Juifs dans la Palestine.


Posen, 29 novembre 1806

A M. Cretet, gouverneur de la Banque

Je reçois votre lettre du 15 novembre. Je ne puis qu'applaudir à la mesure, que vous m'annoncez que la Banque a prise, d'autoriser les villes de commerce à tirer sur elle à vue et à lui faire des remises de trois mois.

Au premier aperçu, ceci se présente comme extrêmement avantageux pour l'universalité des villes de l'Empire, et comme très-avantageux à la ville de Paris, en tendant à centraliser les payements dans cette ville , et c'est peut-être le seul moyen de porter la Banque de Paris à un certain degré d'élévation. Je ne suis embarrassé que de savoir comment vous agirez ensuite pour ne pas admettre indistinctement les traites de toutes les villes de commerce. Vous avez donc établi dans chaque ville un comité d'escompte ? car il y aurait de grands abus à solder à vue contre des remises à trois mois qui ne seraient pas sûres, ou qui ne seraient que des papiers de circulation; il y en aurait aussi à ce qu'une maison de commerce de Bordeaux ou de Lyon, espérant profiter du privilège de la Banque, basât des opérations sur ces payements à vue, et que la Banque les refusât. Comment juger que ces remises ne présentent pas assez de sûreté ? Cette mesure ne se présente pas bien dans ma tête; mais, puisque vous l'avez réalisée, vous avez trouvé moyen d'en éloigner les inconvénients, et, en le supposant ainsi, ce ne peut être qu'une chose extrêmement avantageuse.

Quant aux réductions d'escompte, je pense que c'est très convenable, et je ne puis les voir qu'avec satisfaction. Vous savez que nous voulons rétablir l'intérêt légal à cinq pour cent.

Quant à l'emploi de l'escompte de l'argent, j'ai été frappé de ce que vous me dites, qu'il faut trouver à donner de l'emploi aux capitaux. Mais il me semble que le trésor public prend autant d'argent qu'on veut à six pour cent, soit pour les obligations, soit pour les billets de la caisse d'amortissement. Il me semble que, la rente étant à 72, il y a toujours un profit de sept pour cent; il y a même du temps avant qu'elle monte à 80, et alors même elle donne encore six pour cent. Je ne crois pas qu'en Angleterre on trouve un meilleur placement, puisqu'en Angleterre le trois pour cent, étant à 60, forme les cinq pour cent au pair, et qu'enfin il y aura constamment pour les gens sensés une grande différence d'avoir son argent dans un pays qui a du papier monnaie, ou dans un pays où il n'y en a pas; entre un pays où il n'y a pas d'impôt sur les rentes et un pays où l'on impose non-seulement les rentes nationales, mais même les rentes étrangères; et il est naturel qu'elles subissent le même sort, puisque l'établissement des rentes au profit des personnes étrangères est déjà une chose contraire au crédit, le premier principe du crédit étant que le trésor doit payer les créances sans s'embarrasser à qui elles appartiennent.


Posen, 29 novembre 1806

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, je n'approuve point le projet de cantonnement; il est mal fait. On m'en présentera un nouveau dans lequel le corps du maréchal Ney sera cantonné sur la route de Posen à Bromberg; le corps d'armée du maréchal Soult, sur la route de Posen à Varsovie; la division d'Hautpoul, sur la Warta, entre Posen et Obernik; la division Grouchy, sur le chemin de Glogau; la division Sahuc, à Pudewitz, sur le chemin de Thorn; le grand parc restera au lieu où il est. Les cantonnements seront au plus éloignés de Posen de douze petites lieues ou six meilen.


Posen, 29 novembre 1806

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, donnez ordre aux officiers de la seconde légion du Nord de se diriger sur Posen. Ils dirigeront tous leurs soldats pour être incorporés dans la première légion. Donnez ordre au maréchal Kellermann de me rendre compte de la formation de la première légion du Nord. Il me fera connaître comme elle est composée et de quelle nation sont les officiers. Le maréchal Kellermann nommera un officier pour commander cette légion, et le général Zajonchek se rendra en toute diligence à Posen.


Posen, 29 novembre 1806, 10 heures du soir

Au grand-duc de Berg, à Varsovie

Je reçois vos lettres des 26 et 27. J'ai vu avec plaisir que, le 28, vos troupes ont dû entrer à Varsovie. J'y ai envoyé un des deux hommes qui ont signé la proclamation et que vous connaissez, et je l'ai chargé de faire connaître secrètement mes intentions à ses compatriotes. Maintenez une bonne discipline, assurez les subsistances de l'armée et rendez-moi compte de tout. Le prince Jérôme doit être arrivé aujourd'hui à Kalisz. Mon intention est de lui donner l'ordre de se rendre à Breslau. La maréchal Ney se rendra à Thorn, où j'ai l'intention de passer la Vistule. Ramassez tous les bateaux, afin de pouvoir passer sur tous les points du moment que j'aurai un corps de l'autre côté.

Tout le reste de la réserve de cavalerie arrive à Posen demain. Le maréchal Soult y arrive le 2 décembre. Nommez commandant de Varsovie un général intelligent et probe. J'attends quelqu'un de Paris pour le nommer gouverneur de cette ville. Conciliez-vous les Polonais. J'ai donné ordre au général Walther de rester à mi-chemin, pour pouvoir placer des escortes. Ma Garde à pied et le reste de ma Garde à cheval sont arrivés à Posen.

Le maréchal Mortier avec 20,000 hommes arrive à Anklam.


Posen, 29 novembre 1806, 10 heures du soir

Au maréchal Mortier

Mon Cousin, le major général vous fait connaître mes intentions. Il faut qu'avec un corps de 15 à 16,000 hommes, et vingt-quatre à trente pièces de canon attelées, vous soyez prêt, de la Poméranie et de l'Oder, à vous porter sur la Vistule, si cela était nécessaire. Je ne dois pas dédaigner, dans les chances de la fortune, 16,000 braves commandés par vous. Mes troupes sont entrées à Varsovie hier 28.

Procurez-vous des souliers; la saison vient où ils sont bien nécessaires. Voyez si on ne pourrait pas en faire venir de Hambourg une vingtaine de milliers de paires sur Stettin, où nous en avons très-grand besoin. Composez bien vos divisions; ayez de bons généraux de division et quatre ou cinq bons généraux de brigade. Des généraux intelligents et intrépides assurent le succès des affaires. Prenez le général Lacombe Saint-Michel pour commander votre artillerie. Dans ces guerres-ci, l'artillerie est de première nécessité; il faut que vous en ayez trente pièces. Le roi de Hollande pourrait en envoyer quelques-unes de Hollande à ses troupes. Il est cependant nécessaire qu'il y ait des canonniers et des batteries à l'embouchure des rivières. Faites pour le mieux. Envoyez-moi en détail la composition de vos divisions, afin que je sache le degré de confiance que je dois avoir dans chacune.


Posen, 29 novembre 1806

Au prince Eugène

Mon Fils, vous trouverez ci-joint le décret pour les places d'Italie. Je ne veux dépenser que 1,300,000 francs à Palmanova; sur ces 1,300,000 francs, mon intention est que d'abord on prenne les fonds nécessaires pour achever entièrement les contrescarpes de deux lunettes, et fonder deux escarpes. Quand un ouvrage a une contrescarpe, il est à l'abri de toute attaque. Du moment que la guerre se prépare, on fraise et palissade les ouvrages, et ils sont à l'abri de toute insulte. En outre il faut faire un magasin à poudre. Ce sont là les travaux les plus importants. Il y a à Palmanova des souterrains pour contenir les objets d'artillerie. Quant à la garnison , des blindages le long du talus des remparts offrent plus de sûreté aux soldats que toutes les casernes; il sera cependant nécessaire d'en faire une belle pour hôpital; mais on peut l'ajourner à une autre année.

Je ne veux dépenser que 200,000 francs à Osoppo; je n'y veux qu'une citadelle.

Je ne veux rien dépenser à Pizzighettone, Rocca d'Anfo, Peschiera, Porto-Legnago, Mantoue.

Je veux seulement dépenser 200,000 francs à Porto, c'est-à-dire à la partie qui est sur la rive gauche. Je veux relever cet ouvrage de manière que la place défende bien l'Adige. J'accorde 200,000 francs pour Pietole de Mantoue, pour revêtir entièrement cet ouvrage.


Posen, 29 novembre 1806

Au roi de Naples

Je vois avec plaisir que les malades commencent à diminuer. Tout va aller de mieux en mieux de votre côté.

J'occupe tout le pays en deçà de la Vistule. Les Polonais de toutes les classes montrent le plus grand enthousiasme.

Je désire toujours que vous fassiez passer le plus de régiments de cavalerie que vous pourrez en Italie. Cette arme vous coûte beaucoup et est peu utile, à ce que je vois.


Posen, 30 novembre 1806

A M. Fouché

La lettre que vous m'avez envoyée de Kosciuszko à ses compatriotes est ridicule; ce n'est qu'une amplification de rhétorique.

Le sujet du retour d'Ulysse dans sa patrie ne peut prêter à aucune allusion de ce côté-ci; il pourrait seulement en prêter d'un autre côté. D'après ce que vous me dites, il parait qu'il n'y a pas d'inconvénient à le donner. Dites à M. de Luçay de le faire jouer.

Je lirai avec plaisir le manuscrit de Rulhière sur la Pologne. J'en ai entendu parler avec éloge. Cet écrivain s'est déjà montré historien du premier ordre dans sa relation de la mort de Pierre III.

Si Kosciuszko veut venir, bien; sans cela on se passera de lui. Il serait pourtant bon qu'il vînt.


Posen, 30 novembre 1806

A M. Gaudin

Je reçois votre lettre du 20 novembre. Pour que la diminution du produit des douanes, cette année, soit le résultat des prohibitions de toiles de coton de fabrique étrangère, il faudrait me faire connaître ce que vous avez perçu sur le coton brut. Je n'ai pas entendu perdre neuf millions dans cette opération, mais remplacer un impôt par un autre. Dites-moi encore un mot là-dessus, je vous prie.


Posen, 30 novembre 1806

Au général Junot

Le ministre de la guerre donne ordre au régiment de fusiliers de ma Garde de partir le 12 décembre de Paris, en poste, pour être rendu à Mayence le 19 ou le 20. Mon intention est que ce régiment soit fort de deux bataillons de quatre compagnies chacun, chaque compagnie de 180 hommes, les deux bataillons formant un total de 1,500 hommes. Vous le passerez en revue à leur départ et vous vous assurerez qu'ils ont quatre paires de souliers, une aux pieds et trois dans le sac, et leurs capotes. Passez la revue du régiment de dragons de ma Garde. Vous en avez fait partir 200 hommes, leurs chevaux les attendent à Berlin; mais il sera nécessaire qu'ils aient apporté leurs selles. Ce régiment a encore 140 hommes disponibles : faites-les partir; ils prendront à Nancy les chevaux qui doivent leur être fournis, en apportant leurs selles de Paris. Par ce moyen, je me trouverai avoir, en janvier, un régiment de dragons de trois escadrons. S'il y en avait d'autres disponibles, il faudrait les faire partir. Il serait très-avantageux d'avoir un quatrième escadron. On peut faire partir en poste les 140 dragons pour Nancy, si cela est nécessaire, c'est-à-dire si les chevaux sont livrés à Nancy avant que ce détachement puisse y arriver. Je vous recommande bien de visiter vos cinq escadrons de dragons; je vois qu'ils commencent à avoir des chevaux; et de les faire manœuvrer fréquemment devant vous, à pied et à cheval. Vous avez là un millier de chevaux prêts à se porter partout où les circonstances le rendraient nécessaire.

Voyez M. Lacuée pour qu'il soit affecté sur la réserve de Paris, de la conscription de 1807, le nombre d'hommes nécessaire pour compléter le 1er et le 2e régiment de la garde de Paris. Ils sont aujourd'hui bien faibles; et, pour que je ne perde rien à ce qui sera fourni à ces deux régiments sur la réserve de 1807, je désire qu vous fassiez partir le 1er bataillon de chacun des deux régiments complété à 600 hommes, ce qui fera 1,200 hommes. Vous choisirez un des deux colonels pour les commander, et les officiers les plus propres à faire la guerre. Vous garderez à Paris les plus sûrs,
vous ferez partir les autres; ils seront bons pour l'armée. Cela affaiblira votre garde à pied de 1,200 hommes; mais, M. Lacuée vous donnant 1 200 conscrits de la réserve de Paris et des départements environnants, vous réparerez dans un clin d'œil cette perte. Vous aurez le temps de les exercer; avant la belle saison vous aurez vos 1,600 hommes disponibles. Concertez cette mesure avec M. l'archichancelier et MM. Lacuée et Dejean. Vous ferez partir vos deux bataillons en poste, en même temps, pour qu'ils arrivent Berlin vers le 8 ou le 10 janvier. Ayez soin qu'ils aient quatre paires de souliers, une dans les pieds et trois autres dans le sac, et leurs capotes. Ce corps sera joint à la réserve et servira avec la Garde.


Posen, 30 novembre 1806

Au général Bourcier

Je reçois votre lettre de Potsdam. Il vient effectivement de Frane une grande quantité d'hommes à pied appartenant à divers régiments de cavalerie. Tout cela se dirige sur Potsdam. Quand vous auriez 4,000 chevaux à leur donner, ce ne serait pas trop. Gardez donc bien précieusement les chevaux que vous avez de reste, pour ces hommes à pied. Je mets 50,000 francs à votre disposition ; ne vous laissez point manquer d'argent. Établissez seulement une bonne comptabilité, parce que tout ce qui est compte d'argent doit être net. Chargez quelqu'un de faire les fonctions de quartier-maître de ce dépôt. Le pays où je suis est un pays d'immenses plaines; on ne saurait avoir trop de cavalerie.

Je vois, par votre état n° 1, que vous avez 2,000 chevaux et 1,600 hommes. Je désire que vous puissiez m'envoyer bientôt ces 1,600 hommes montés. Vous avez 718 cuirassiers et carabiniers et vous n'avez que 500 chevaux. Il faut choisir les chevaux les plus hauts que vous trouverez parmi ceux que vous avez, et les leur donner. Ils changeront ensuite ces chevaux lorsque les circonstances le permettront. Je vois que vos dépôts sont composés de 3, 000 hommes et de 4,000 chevaux. Ainsi donc vous avez 4,700 hommes et 6,000 chevaux. Si tous ces chevaux sont blessés, il n'y a rien à dire, mais, s'ils ne joignent pas l'armée par défaut de quelque raccommodage de selles ou autre babioles pareilles, ce serait votre faute. Faites fournir tout ce qui est nécessaire, et n'épargnez rien pour envoyer bientôt un millier de chevaux. J'envie bien ces 6,000 chevaux que vous avez, et je voudrais bien les avoir sur la Vistule. Vous ne m'annoncez que 600 hommes montés; c'est bien peu de chose.

Faites-moi un nouvel état en dix colonnes, dans chacune desquelles vous mettrez le nombre de chevaux que vous avez dans le cas de rejoindre l'armée dans une semaine, à compter du 1er décembre. Ce sera sans doute hypothétique, puisque cela dépendra de la guérison des chevaux, mais enfin ce sera tel que vous le jugerez.

Faites-moi faire un autre état qui me fera connaître combien, sur ces 6,000 chevaux, il y en a de blessés; faites des échanges. Donnez des chevaux non blessés à ceux qui ont des selles en règle. Vous pouvez, par ce moyen, m'envoyer 2 ou 3,000 chevaux. Si vous arrangez bien cela, il ne vous restera que des chevaux blessés. Tout le reste doit partir, puisque tous les hommes du petit dépôt ont leurs selles.