21 - 31 septembre 1806


Saint-Cloud, 21 septembre 1806

ORDRE POUR LES GÉNÉRAUX DUROC ET CAULAINCOURT

Mon intention est d'être le 29 à Mayence; je partirai donc mercredi ou jeudi, à six heures du matin. Je veux passer par Metz, où je m'arrêterai autant de temps que je pourrai , de manière à arriver le 29, avant midi , à Mayence. Je ne veux cependant pas rester plus de huit ou dix heures à Metz. On écrira à Metz pour que le général qui y commande, ou tout autre, ou le dépôt de cavalerie, me procurent 7 ou 8 chevaux et une voiture pour visiter tous les établissements.

J'aurai dans ma voiture l'Impératrice; le prince Jérôme ira dans une des voitures qui m'accompagnent.

Je ne veux pas avoir plus de quatre voitures avec moi, sauf à envoyer devant ou en faire marcher derrière les autres.

L'impératrice n'emmènera que Mme Turenne. MM. d'Harville et Ordener l'accompagneront; M. Rémusat se rendra devant à Mayence.

Le grand maréchal du palais pourra marcher en avant, de manière à se trouver à Mayence un jour avant moi.

MM. Caulaincourt, Mortier et Savary marcheront avec moi. Les deux écuyers généraux, qui ont leurs chevaux, pourront
se rendre directement à Mayence.

Il est inutile que je traîne à ma suite des fourgons de cartes et bagages. Comme il y a deux routes, ils peuvent partir par l'autre route ou aller devant, pour arriver la veille à Mayence.

Le maréchal Bessières et tous les officiers de la Garde doivent être partis en avant; le maréchal Bessières et le grand écuyer se rendront ensemble pour qu'ils n'encombrent point les routes.

M. Maret partira vingt-quatre heures après moi et se rendra en droite ligne à Mayence.

M. le général Clarke se rendra directement à Mayence, où il devra être arrivé le 28 au soir.


Saint-Cloud, 21 septembre 1806

NOTE POUR M. DENON

Demander à M. Denon s'il est vrai qu'on ait retardé hier l'entrée du Muséum, et qu'on ait ainsi fait attendre le public. On ne peut rien faire qui soit plus contraire à mon intention.


Saint-Cloud, 21 septembre 1806

Monsieur Champagny, on m'assure que les Maltais qui sont en Corse sont dans la plus grande misère. Je désire que vous m'apportiez mercredi un rapport qui me fasse connaître ce que je leur avais accorde, et pourquoi ils ne sont pas payes. Je désirerais que vous m'apportassiez également mercredi une note qui me fit connaître ce qu'il faudrait faire pour encourager la culture du coton en Corse, où l'on dit qu'il vient très-bien. Ce serait un moyen de donner du travail
à ces Maltais, qui ont l'usage de ces cultures.


Saint-Cloud, 21 septembre 1806

Au roi de Bavière

Monsieur mon Frère, il y a plus d'un mois que la Prusse arme, et il est connu de tout le monde qu'elle arme contre la France et la Confédération du Rhin. Nous cherchons ses motifs sans pouvoir les pénétrer. Les lettres que Sa Majesté Prussienne nous écrit sont amicales. Son ministre des affaires étrangères a notifié à notre envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire qu'elle reconnaissait la Confédération du Rhin et qu'elle n'avait rien à objecter contre les arrangements faits dans le midi de l'Allemagne. Les armements de la Prusse sont-ils le résultat d'une coalition avec la Russie, ou seulement des intrigues des différents partis qui existent à Berlin et de l'irréflexion du cabinet ? Ont-ils pour objet de forcer la Hesse, la Saxe et les villes hanséatiques à contracter des liens que ces deux dernières puissances paraissent ne pas vouloir former ? La Prusse voudrait-elle nous obliger nous-même à nous départir de la déclaration que nous avons faite que les villes hanséatiques ne pourront entrer dans aucune confédération particulière, déclaration fondée sur l'intérêt du commerce de la France et du midi de l'Allemagne, et sur ce que l'Angleterre nous a fait connaître que tout changement dans la situation présente des villes hanséatiques serait un obstacle de plus à la paix générale ? Nous avons aussi déclaré que les princes de l'empire germanique qui n'étaient point compris dans la Confédération du Rhin devaient être maîtres de ne consulter que leurs intérêts et leurs convenances; qu'ils devaient se considérer comme parfaitement libres; que nous ne ferions rien pour qu'ils entrassent dans la Confédération du Rhin, mais que nous ne souffririons point que qui que ce fût les forçât de faire ce qui serait contraire à leur volonté, à leur politique, aux intérêts de leurs peuples. Cette déclaration si juste aurait-elle blessé le cabinet de Berlin, et voudrait-il nous obliger à la rétracter ? Entre tous ces motifs, quel peut être le véritable ? Nous ne saurions le deviner, et l'avenir seul pourra révéler le secret d'une conduite aussi étrange qu'elle était inattendue. Nous avons été un mois sans y faire attention. Notre impassibilité n'a fait que tous les brouillons qui veulent précipiter la cour de Berlin dans la lutte la plus inconsidérée. Toutefois les armements de la Prusse ont amené le cas prévu par l'un des articles du traité du 12 juin, et nous croyons nécessaire que tous les souverains qui composent la Confédération du Rhin arment pour défendre ses intérêts, pour garantir son territoire et en maintenir l'inviolabilité. Au 200,000 hommes que la France est obligée de fournir, elle en fournira 300,000, et nous venons d'ordonner que les troupes nécessaires pour compléter ce nombre soient transportées en poste sur le  bas Rhin. Les troupes de Votre Majesté étant toujours restées sur le pied de guerre, nous invitons Votre Majesté à ordonner qu'elles soient mises sans délai en état de marcher avec tous leurs équipements de campagne, et de concourir à la défense de la cause commune, dont le succès, nous osons le croire, répondra à sa justice, si toutefois, contre nos désirs et même contre nos espérances, la Prusse nous met dans la nécessité de repousser la force par la force.

(Des lettres analogues furent adressées au roi de Wurtemberg, aux ducs de Berg, de Bade et de Hesse-Datmstadt, au prince Primat et au Collège des princes de la Confédération du Rhin.)


Saint-Cloud, 21 septembre 1806

Au roi de Wurtemberg

Monsieur mon Frère, M. de Vintzingerode retournant près de Votre Majesté après avoir séjourné plusieurs mois près de moi, je ne veux pas laisser échapper cette occasion de lui renouveler l'assurance de tous mes sentiments. La lettre que je lui ai écrite hier l'aura mise au fait de la politique du moment. En vérité, je n'y comprends rien; si vous y entendez un peu mieux que moi, je verrai avec plaisir ce que vous en pensez. Toutefois j'imagine que nous sommes tout près du dénouement. Je serai charmé de voir une occasion où vos troupes puissent mériter, comme elles l'ont fait dans tant de circonstances de nouveaux titres à la gloire. Je ne veux point terminer ma lettre sans me réjouir avec Votre Majesté des nouveaux liens qui vont nous unir. Dans peu de jours je vais lui envoyer faire la demande de la princesse Catherine. Je crains que les noces ne soient un peu dérangées. N'importe, d'autres moments viendront où nous referons mieux ce que l'on fait en bottes. Ne serait-il pas convenable à la grandeur et à la nouvelle position de votre Maison que des parents aussi proches que des fils et des frères ne prissent aucun service étranger ? Je parle pour l'avenir; car, pour le présent, je n'y attache pas d'autre importance.


Saint-Cloud, 21 septembre 1806

Au général Clarke

M. le général Clarke verra le duc d'Aremberg avant la nuit. Il lui fera connaître qu'il serait nécessaire qu'il formât dans ses États une compagnie de chasseurs d'une centaine d'hommes montés sur de petits chevaux, qui pourraient le suivre à l'armée et y rendre des services. Ce serait un moyen qu'il y fût utilement. Cela entrerait dans le contingent qu'il doit fournir comme prince de la Confédération.

M. Clarke verra le prince de Hohenzollern pour le même objet. Il faudrait que ces compagnies fussent levées très-promptement pour qu'elles pussent servir.


Saint-Cloud, 21 septembre 1806

Au maréchal Augereau

Mon Cousin, vous m'enverrez un état militaire de Hesse-Cassel, avec le nom et la force des régiments, ainsi que leur composition; vous y joindrez leurs cantonnements et leurs positions actuelles.

Vous m'enverrez un mémoire qui déterminera quelle serait la meilleure manière d'attaquer Hesse-Cassel, quelle résistance il pourrait opposer à l'armée qui attaquerait, quels obstacles on rencontrerait, et quel nombre de troupes l'Électeur possède.


Saint-Cloud, 21 septembre 1806

Au général Bertrand

Monsieur le Général Bertrand, vous partirez dans la journée de demain; vous irez à Worms, vous passerez là le Rhin. Vous vous assurerez que toutes les mesures sont prises pour la passage de ma Garde à Mayence. Vous irez à Cassel, et vous vous assurerez qu'on travaille à mettre cette place en état, et que tous les ordres sont arrivés pour l'approvisionner.

Vous irez, avec les précautions convenables, voir la forteresse de Hanau. Peut-on s'en emparer par un coup de main ou non ? Si cela est prudent, vous irez voir la forteresse de Marburg. Vous continuerez votre route sur Cassel (Hesse). Vous serez censé avoir des lettres pour mon chargé d'affaires; vous aurez bien soin de vous  assurer avant qu'il y est.

Il y a plusieurs petites places autour de Francfort; vous vous en informerez. Vous ne voyagerez point de nuit de Francfort à  Cassel, et vous tiendrez note de tout ce qui peut m'intéresser.

De Cassel vous prendrez la route qui mène droit sur Cologne, toujours de jour. Vous observerez le système des localités du pays entre Wesel, Mayence, Cassel et Cologne. Combien y a-t-il de routes et de grandes communications ? Vous prendrez là aussi des renseignements sur les chemins de Cassel à Gotha, de Cassel à Goettingen, de Cassel à Paderborn. Qu'est-ce que c'est que la place de Cassel ? Est-elle armée et de résistance ? Jetez un coup d'œil sur les troupes de l'Électeur, sur leur situation actuelle, sur son artillerie, ses milices, ses places fortes. De Cologne vous viendrez me rejoindre à Mayence; vous passerez sur la rive droite et vous jetterez un coup d'œil sur la nature du pays de Düsseldorf, de Wesel et de Cassel. Le 29 septembre je serai à Mayence, où j'ai besoin que vous me  rapportiez votre reconnaissance. Vous recueillerez à Cassel des renseignements de toute espèce sur tout le système du pays. Vous sentez combien il est important que vous vous le mettiez bien dans la tête, non-seulement pour le début de la campagne, mais encore pour les suites.


Saint-Cloud, 21 septembre 1806

Au maréchal Augereau

Mon Cousin, vous enverrez un officier du génie intelligent sous prétexte de porter des lettres à M. Bignon, à Hesse-Cassel, mais dans le fait pour observer tout ce qu'il sera possible. Il ira de Francfort à Hesse-Cassel et retournera de Hesse-Cassel droit sur Coblentz, Il ira à petites journées, déjeunera, dînera, couchera en route. Il observera tout avec prudence : la nature des chemins, les montagnes, les rivières, la population des villes, villages, les distances; il fera un rapport sur les places fortes que possède l'Électeur, telles que Hanau, Marburg, Giessen et autres postes fortifiés; il donnera des croquis de tout ce qu'il aura observé de remarquable.


Saint-Cloud, 21 septembre 1806

Au prince Eugène

Mon fils, je pars cette nuit pour Mayence, j’y serai rendu le 28. J’ai ordonné à M. l’archichancelier Cambacérès et au ministre Dejean de correspondre avec vous tous les jours. Je désire que vous fassiez partir pour Ulm, pour le Tyrol, tous les détachements de ma garde française qui sont en Italie.

(Mémoires du prince Eugène)


Saint-Cloud, 22 septembre 1806

A M. de Talleyrand

Monsieur le Prince de Bénévent, je vous envoie une lettre qui est un trait de lumière; j'ai en conséquence jugé convenable d'adresser la lettre ci-jointe au prince Primat. Mon intention est de la faire paraître dans le Moniteur. Vous l'apporterez ce soir à ma signature, et vous tiendrez des courriers tout prêts pour l'expédier à Aschaffenburg, en priant le prince Primat de ne la laisser connaître que le ler octobre, mais de la communiquer confidentiellement à la Saxe, à la Hesse, à la Bavière, à Wurtemberg et à Bade.

Il est convenable que vous envoyiez chercher aujourd'hui le ministre de Cassel. Vous lui parlerez avec beaucoup de douceur sur les armements actuels et sur le parti définitif que son souverain veut prendre. Il est convenable que vous lui disiez quelque chose du traité signé à Berlin, en lui marquant votre étonnement de ce que l'Électeur puisse ainsi renoncer à toute souveraineté. Vous engagerez M. de Malzburg à expédier un courrier à Cassel pour qu'on cesse les armements et qu'on déclare ce que l'on veut.


Saint-Cloud, 22septembre 1806

A M. de Talleyrand

Monsieur le Prince de Bénévent, il est nécessaire que M. de Hohenzollern forme une compagnie de 140 dragons à cheval, tous Allemands. Comme tous les efforts qu'il fera ne sont pas d'accord avec ses moyens; vous lui direz qu'en secret je lui donnerai le subside nécessaire. Vous lui ferez connaître que mon motif est de fournir à la Maison de Hohenzollern les moyens de se montrer dans cette circonstance.


Saint-Cloud, 22 septembre 1806

Au général Dejean

Monsieur Dejean, je viens d'être instruit que Wesel était approvisionné d'une grande quantité de farine que les Prussiens y ont laissée, et qu'il y en a quatre magasins pleins. Faites vérifier cela, afin qu'on ne vous le porte point comme ayant été acheté. Faites-moi connaître ce qu'il y a, et si cela fera une ressource pour les approvisionnements de siège. Pensez sérieusement aux approvisionnements de Mayence; à la vérité, il est très-probable que je n'en aurai pas besoin pour le siège, mais certainement j'en aurai besoin pour les faire venir à Würzburg, et nourrir l'armée par le Mein.


Saint-Cloud, 22 septembre 1806

Au général Dejean

Monsieur Dejean, donnez des ordres pour qu'au 1er octobre un pont de bateaux soit jeté sur le Rhin, à Wesel. Ledit pont existera jusqu'à nouvel ordre. Je désire que l'emplacement en soit vis-à-vis l'île de Büderich, et que le génie, qui doit faire les ouvrages permanents, donne à cet ouvrage la force d'une bonne tête de pont.


Saint-Cloud, 22 septembre 1806

Au général Dejean

Monsieur Dejean, j'ai pris, il y a peu de jours, un décret pour former une première légion du Nord à Juliers. Le maréchal me mande que la quantité de déserteurs est si considérable, que l'on peut espérer d'en former plusieurs. J'ai donc résolu d'en organiser une autre à Nuremberg, et d'en donner le commandement au colonel Henry. Faites donc, avant mercredi, un travail pour la nomination des officiers du 1er bataillon, et concertez-vous avec les généraux Zajonchek et Henry, pour ces nominations.

Lorsque les ler bataillons seront formés, on organisera les 2e. Mon intention est que chaque légion soit composée de quatre bataillons. Il y aura un adjudant commandant chargé de la correspondance avec les deux colonels.

Les colonels pourront faire des proclamations pour provoquer la désertion, sans jamais prononcer le nom de Pologne.
On promettra aux soldats d'être employés sur le continent, des avantages, d'être traités comme les soldats français, et aux sous-officiers de conserver leur grade, si du reste ils ont les qualités nécessaires.


Saint-Cloud, 22 septembre 1806

Au général Lacuée

Je vais appeler une réserve. Il faut que le décret soit prêt. Voici comment je veux la distribuer :

200 hommes, à raison de deux hommes d'élite par département, pour les régiments de carabiniers. 
600 hommes, à raison de six hommes d'élite par département, pour les douze régiments de cuirassiers.
600 hommes d'élite pour les huit régiments d'artillerie à pied. 
2,000 hommes d'élite pour les quatre régiments d'artillerie de la marine.
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3,400 hommes d'élite.

Il restera 26,400 hommes que je veux distribuer de la manière suivante : 6,000 hommes entre les quatorze 3e et 4e bataillons qui sont au camp de Boulogne, et depuis la Somme jusqu'à l'Escaut, y compris Anvers; 2,000 entre les quatre régiments qui sont en Bretagne; 2,000 entre les quatre régiments qui sont à l'île d'Oléron et dans la 12e division militaire; 4,000 entre les six régiments qui sont à Paris, et 12,400 entre les quarante régiments appartenant à la Grande Armée qui sont sur le Rhin. En faisant la répartition de ces hommes, vous consulterez le besoin de chaque corps. Vous considérerez moins la situation générale des régiments que celle de leurs 3e bataillons et ce qu'ils reçoivent de la conscription de 1806. Ce sont de nouvelles réserves que je forme. Peu importe la quantité d'hommes qu'ils ont à la Grande Armée; plus ils en auront et plus ils en perdront. Mais ce qui m'importe, c'est que j'aie à Boulogne, en Bretagne et à ma réserve sur le Rhin un grand nombre d'hommes.

Vous aurez soin qu'aucun corps ne reçoive au delà de 1,000 hommes, outre ce qu'il recevra de la réserve et ce qu'il a eu de la conscription de 1806. Vous n'appellerez dans les corps qui sont en Bretagne aucun Piémontais ni aucun conscrit des dix-huit régiments connus sous la dénomination de départements de l'Ouest. Vous ne mettrez dans les régiments qui sont à Paris aucun homme des dix-huit départements de l'Ouest. Vous mettrez dans les 31e et 111e des Piémontais. Du reste, vous destinerez le plus possible aux bataillons de dépôt les conscrits voisins des lieux où se trouvent aujourd'hui les dépôts qui ne doivent point changer. Il est cependant convenable de donner aux régiments la réserve de la conscription des départements qui les recrutent.


Saint-Cloud, 22 septembre 1806

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, voici mon itinéraire: je partirai de Saint-Cloud le 25 du mois. Je serai le 27 à Metz, où je resterai sept à huit heures. Je serai, le 28 au soir ou le 29 au matin, à Mayence. J'attends de vos nouvelles le 30 et le ler. Réglez-vous là-dessus pour la marche de vos courriers. 


Saint-Cloud, 22 septembre 1806

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, voici la route pour l'armée : Mayence , Francfort, de là par la rive gauche du Mein, qu'on passera à Aschaffenburg, Würzburg et Bamberg. Placez là des commandants d'armes, et tracez-y des étapes. Faites reconnaître la route de Mayence, Darmstadt et Aschaffenburg. La route de l'armée pour communiquer avec Ulm, Augsbourg et les hôpitaux qui sont de ce côté, sera de Bamberg à Nuremberg, Anspach, Ellwangen et Ulm. Il est nécessaire aussi il y ait des étapes tracées. Mon intention est que tous les malades sortant des hôpitaux établis en Bavière, en Souabe et sur la rive droite du Danube, se réunissent à Ulm, où, après un repos, on en formera des détachements de 100 hommes pour rejoindre à Bamberg. Il est une autre route à reconnaître, de Würzburg à Boxberg, Neckarelz et Mannheim. Cette route a deux avantages : d'abord plus courte pour ce que j'ai du côté de Strasbourg, et je la crois meilleure; ensuite il peut y avoir tel événement où la communication de Francfort serait inquiétée par des partisans.

Je désire que vous envoyiez un ingénieur géographe reconnaître et faire des croquis en détail de ces trois routes . 1° de Mayence, Francfort, Aschaffenburg et Würzburg; 2° de Mayence, Darmstadt et Aschaffenburg; 3° de Mannheim, Neckarelz et Würzburg.


Saint-Cloud, 22 septembre 1806

Au roi de Hollande

Mon Frère, je donne ordre au ministre Dejean de diriger sur Wesel les généraux de brigade Laroche, Ruby et Grandjean. Mon intention est que vous organisiez une avant-garde de la manière suivante :

Commandants : avant-garde, le général Michaud; artillerie, le général Drouas; génie, un de vos officiers.

Chef d'état-major : le chef d'escadron Ferrière, à moins que le général Michaud n'aime mieux prendre un des généraux de brigade que je vous envoie.

1e brigade : un des généraux de brigade que je vous envoie; le 65e régiment, 2,000 hommes; Hollandais, 2,000 hommes; huit pièces d'artillerie attelées, servies par l'artillerie hollandaise.

2e brigade : un des généraux de brigade français; le 72e régiment, 2,000 hommes; Hollandais, 2,000 hommes; huit pièces d'artillerie attelées, servies par l'artillerie hollandaise.

Vous pouvez joindre à chaque brigade un général de brigade hollandais et un adjudant commandant hollandais.

Ces 8,000 hommes seront renforcés du bataillon de 1,000 hommes du duc de Clèves. Ils se réuniront sans délai à Wesel et se concentreront dans une position militaire, à une ou deux lieues en avant de Wesel. Vous joindrez aussi à cette avant-garde 1,000 hommes de cavalerie hollandaise, ce qui fera un total de 9 à 10,000 hommes. Vous réunirez le reste de vos troupes hollandaises, que j'estime être 8 à 9,000 hommes, au camp d'Utrecht, sous les ordres du général Dumonceau. Il sera partagé en deux brigades; il pourra ou se réunir à vous, ou se porter sur le bord de la mer, suivant les différentes circonstances.

Cette avant-garde est destinée à couvrir mes frontières du Rhin et ne s'en écartera que pour inquiéter l'ennemi; mais elle manœuvrera de manière à n'être jamais coupée du Rhin.

Votre commandement s'étendra de la Moselle à Coblentz jusqu'à la mer.

Après les quinze premiers jours d'opération, du moment que la guerre aura pris une couleur, il sera possible que je fasse rentrer ce corps pour protéger mes frontières de France. Il serait possible aussi que je le fisse pousser jusqu'à Münster et Cassel, selon les évènements. Je vous donnerai une instruction plus détaillée lorsque les hostilités commenceront.

Faites que je trouve à Mayence un de vos aides de camp qui m'apporte l'état de situation de votre corps d'armée. Donnez de l'argent pour monter votre cavalerie. Vous devez avoir au moins 9,000 hommes de cavalerie. Le 8e corps de la Grande Armé sera aussi à Mayence et manœuvrera de manière à n'être jamais coupé du Rhin.

Je laisse à Paris de quoi former un corps de réserve de 8,000 hommes, et j'ai à Boulogne 15 ou 16,000 hommes dans le camp. Le général Rampon, avec 6,000 hommes de gardes nationales, est à Saint-Omer.

Je vous donne, l'autorisation nécessaire pour pouvoir, selon les circonstances, défendre les parties attaquées de la France. Il n'y a point de nécessité que vous vous rendiez le 2, le 3, le 4 à Wesel, si les affaires de votre royaume vous retiennent en Hollande; il suffit que votre avant-garde y soit; mais il sera convenable que vous y soyez le 8.

Donnez ordre au général Michaud de correspondre avec le maréchal Kellermann, avec le commandant du 8e corps et avec la Grande Armée, autant que cela sera nécessaire.


Saint-Cloud, 22 septembre 1806

Au général Dejean

Monsieur Dejean, présentez-moi demain soir un état en trente colonnes, chaque colonne indiquant le lieu où se trouveront les  troupes en marche depuis le 25 septembre jusqu'au 25 octobre, en y comprenant les détachements que j'ai fait partir et même eux de ma Garde. J'ai besoin de cet état demain mardi.


Saint-Cloud, 22 septembre 1806

Au général Dejean

Monsieur Dejean, voici un rapport sur la compagnie Breidt. J'ai pris dernièrement un décret pour que 250 caissons soient attelés et prêts le plus tôt possible à Strasbourg, où ils doivent recevoir un ordre de mouvement. Mon intention n'est pas que ces caissons aillent en Allemagne sans être équipés, mais que les hommes et chevaux soient pris à Sampigny, Bruxelles et Paris, et que de ces trois points ils soient dirigés sur Mayence, où ils attendront des ordres.

Écrivez à l'intendant général que, s'il y a 300 chevaux haut-le-pied, il les fasse atteler à des voitures que l'artillerie d'Augsbourg pourrait prêter. Je préférerais les voitures qu'on appelle prolonges. On pourrait acheter des charrettes du pays; on attellerait les 300 chevaux à 72 de ces charrettes, ce qui pourra servir à toute espèce de transports.

Quant aux marmites et bidons qui sont à Strasbourg, envoyez les quatre cinquièmes de tout à Mayence, d'où on les distribuera. Faites connaître au maréchal Berthier qu'il faut que les corps achètent les marmites chez les paysans, en payant, car ces marmites n'arriveront jamais à temps.

Écrivez à tous les majors des dépôts de faire confectionner des capotes pour leurs corps; les masses sont tellement fortes qu'elles pourront fournir à cette dépense. Sur les capotes qui sont à Augsbourg, faites-en donner 1,800 au 21e léger.

Faites-moi connaître le numéro qu'auront les 250 caissons de nouvelle levée, et le temps où les brigades pourront être rendues à Mayence.

Écrivez à tous les dépôts de faire confectionner autant de paires de souliers qu'ils ont d'hommes à la Grande Armée.

Ce qui mérite le plus ma sollicitude, ce sont les outils du génie. Faites-en diriger de tous les points sur Mayence; il est impossible qu'on n'en ait pas recueilli une trentaine de mille à la Grande Armée. Que sont devenus ceux qu'on y a envoyés et que j'ai payés sur le budget de cette année ? Je connais un endroit dans un arrondissement de corps d'armée où il y en a 5,000. Le génie ne croit pas en avoir; le génie ne sait ce qu'il a; cette partie, jusqu'à cette heure, a été bien mal organisée à la Grande Armée.


Saint-Cloud. 23 septembre 1806

A M. de Champagny

Il existe à la Bibliothèque beaucoup de pierres précieuses brutes. Il faut les distribuer aux bons graveurs de Paris pour graver divers portraits. Cela encouragera l'industrie et donnera du travail aux artistes.

Prendre des mesures pour établir à Bordeaux et à Rouen des ateliers de travail pendant la morte saison.

Donnez l'ordre au directeur général de l'octroi de la navigation du Rhin d'organiser les bureaux d'Emmerich, Clèves et Düsseldorf.


Saint-Cloud, 23 septembre 1806

A M. Fouché

Vous ferez arrêter l'individu qui a signé ce mémoire (il s'agit d'un pamphlet signé Lasalle, contre la gendarmerie et le général Savary). Mon intention est que la calomnie dont il s'est rendu coupable envers la Garde soit punie. Vous le ferez expliquer sur ce qu'il dit avoir donné à la gendarmerie d'élite. Il n'y a pas dans ma Garde d'homme assez vil pour recevoir ces honteuses rétributions de la part d'un fournisseur. Cette connivence même de sa part serait criminelle, puisqu'il serait d'accord pour faire une friponnerie. Donnez ordre qu'on arrête la publication de ces pamphlets, car il ne doit pas être souffert qu'un misérable puisse calomnier ainsi de braves gens. S'il avait des droits, que ne s'adressait-il au ministre ?


Saint-Cloud, 23 septembre 1806

Au général Dejean

Monsieur Dejean, vous devez vous adresser, pour les différentes dispositions relatives à mon armée de Naples, au roi de Naples lui-même. Vous vous êtes adressé au maréchal Masséna, ce qui a été d'un mauvais effet. C'est le roi de Naples qui commande mon armée; c'est à lui que vous devez vous adresser.


Saint-Cloud, 23 septembre 1806

Au grand-duc de Berg

Vous trouverez ci-joint l'itinéraire d'une route qu'on me dit exister de Worms à Würzburg; envoyez un officier la reconnaître. Il m'importe beaucoup d'avoir des renseignements sur cette route, qui peut m'être utile dans bien des circonstances.


Saint-Cloud, 23 septembre 1806

Instructions pour le vice-roi

ORGANISATION DE L'ARMÉE D'ITALIE

Général en chef, le vice-roi;

Chef d'état-major général, le général Charpentier; commandant en chef l'artillerie, le général Sorbier; commandant en chef le génie, le général Lery; ordonnateur en chef, le sieur Joubert.

L'armée d'Italie sera composée de cinq divisions actives.

Les deux premières divisions, commandées par les généraux Seras et Broussier, seront composées de deux bataillons du 13e régiment d'infanterie de ligne, de trois bataillons du 35e de ligne, de deux bataillons du 53e de ligne, de trois bataillons du 9e de ligne, de trois bataillons du 92e de ligne, et de deux bataillons du 84e de ligne.

Ces corps devront être complétés avec tout ce qui est disponible des 3e et 4e bataillons, et former, avant la fin d'octobre, 14,000 hommes d'infanterie présents sous les armes.

Le général de division Lacoste commandera la cavalerie légère, composée du 8e régiment de chasseurs et du 6e de hussards, formant 1,200 hommes.

L'artillerie et tous les autres objets continueront à rester sur le même pied où ils sont à présent.

Ce corps, qui continuera à porter le nom de 2e corps de la Grande Armée, donnera ainsi une force de plus de 16,000 hommes.

Pour l'administration et le commandement, ce corps doit faire en tout partie de l'armée d'Italie et sera sous les ordres du vice-roi.

La 3e division sera composée du 3e régiment d'infanterie légère, du 106e régiment de ligne et du 37e régiment de ligne.

A cet effet, le 37e, qui est à Turin, au lieu de se rendre à Alexandrie, se rendra à Plaisance, afin de se trouver plus près d'autant.

La 4e division sera composée du 2e régiment d'infanterie de ligne, du 56e de ligne et du 93e de ligne.

La 5e division sera composée du 16e régiment de ligne, du 67e de ligne et du 9e de ligne.

Il est nécessaire que les généraux de division et de brigade qui doivent commander ces divisions le sachent, et qu'il y en ait un pour cet objet à Parme et un à Alexandrie.

Le 112e régiment de ligne, en cas d'événement, recevra l'ordre de se rendre à Alexandrie, et il formerait la réserve du Piémont.

Les cinq régiments de chasseurs qui sont en Italie formeront deux divisions de cavalerie légère sous les ordres des généraux Bessières et Scalfort.

La grosse cavalerie formerait une division sous les ordres du général Pully.

Il est nécessaire de préparer à Vérone, pour le personnel et le matériel, des attelages suffisants pour pouvoir atteler quarante pièces de canon qui, avec les vingt-quatre qu'a le corps du Frioul, formeront soixante-quatre pièces d'artillerie attelées, suffisantes pour toute l'Italie. Il n'y a besoin que d'un simple approvisionnement, puisqu'on n'est destiné à se battre qu'autour de Venise, Palmanova, Osoppo.

Venise sera armée et mise dans le meilleur état de défense. Le général Miollis y commandera. Le commandant du génie y enverra quatre officiers du génie, qui ne sortiront pas de la place. Le commandant de l'artillerie y enverra deux officiers d'artillerie, dont un général et un colonel, qui y seront également consignés. L'ordonnateur y enverra un commissaire des guerres. Enfin toutes les mesures seront prises pour que cette place soit dans le meilleur état de défense et susceptible de faire la plus longue résistance. La garnison de Venise sera formée par les 3e bataillons du corps d'armée de Dalmatie; ce qui, avant la fin d'octobre, formera un corps de plus de 6,000 hommes.

Les garnisons d'Osoppo, de Porto-Legnago et de Peschiera, seront formées par les 3e bataillons du corps du Frioul, qui, avant 1er d'octobre, feront une force de plus de 3,000 hommes.

La garnison de Mantoue sera formée par les 3e et 4e bataillons et dépôts des quatorze régiments de l'armée de Naples, hormis deux bataillons, qui se rendront à Ancône avant la fin d'octobre; cela formera plus de 9,000 hommes.

Le vice-roi, avec une armée de plus de 40,000 hommes, n'ayant plus à penser à aucune garnison, sera entièrement maître d'agir selon les circonstances, pour garder l'Italie, en attendant qu'il soit joint par toute l'armée de Naples, qui, en cas d'une guerre prononcée avec l'Autriche, évacuerait le royaume de Naples ; et cette guerre ne peut commencer que trois mois après qu'elle serait déclarée, vu l'état de désordre où se trouve cette puissance.

Pendant ce mouvement, le général Marmont, à la tête de l'armée de Dalmatie, se réunirait à Zara, hormis 9,500 hommes de garnison qu'il laisserait à Raguse. Réunie ainsi à Zara au nombre de 20,000 hommes, l'armée du général Marmont menacerait la Croatie pour faire diversion. Si l'ennemi la négligeait, elle le prendrait par ses derrières; s'il était supérieur, elle établirait sa défensive autour de Zara.

Mais, ne voulant point provoquer l'Autriche, il ne faut point l'effrayer; il faut donc que tout reste dans la situation actuelle. Mon intention est que les 27e et 28e divisions militaires ne passent sous les ordres du vice-roi qu'autant que la guerre avec l'Autriche viendrait décidément à être déclarée; et c'est alors seulement que j'entends que tous les corps qui sont à Gènes, à Parme et dans les 27e et 28e divisions militaires, et le 112e, qui est à Grenoble, se rendent à la destination ci-dessus désignée. Alors seulement les 3e, 4e et 5e divisions se formeraient à Vérone, et alors seulement les réserves des 3e bataillons prendraient leur garnison dans toutes les places fortes.

D'ici à ce temps, on devra se contenter de préparer les attelages et le matériel de l'artillerie, approvisionner tout doucement et sans bruit les places, surtout de gros objets, les armer, donner aux travaux des fortifications la direction convenable pour qu'elles puissent servir de suite, se maintenir dans la meilleure harmonie avec les Autrichiens et ne leur donner aucune espèce d'inquiétude.

Cette formation ne doit exister que dans la pensée. Les généraux doivent être répartis dans le royaume d'Italie, commandant différents arrondissements, et dans les 27e et 28e divisions militaires, etc.

J'ai omis de parler de la garnison d'Alexandrie, qui serait composée du 112e régiment et des 3e et 4e bataillons des corps qui sont dans les trois dernières divisions, hormis du 67e, qui est resté à Gênes, et du 16e, qui est à Toulon. Ce serait toujours un corps de 4 à 5,000 hommes.

Ce qui m'importe aujourd'hui, c'est d'évacuer ce qui est inutile entre l'Isonzo et l'Adda, de tout renfermer dans les places fortes, de manière qu'à une agression momentanée de l'ennemi il ne trouve rien à prendre : lui laisser de l'artillerie, ce serait lui donner des armes contre nos places.

Cette instruction ne doit être connue que du ministre Dejean, copiée par son secrétaire de confiance et envoyée au vice-roi, pour qu'il donne toutes les instructions de détail à l'ordonnateur général d'artillerie; mais encore tout cela sans donner d'alarme ni en France, ni en Italie, ni en Autriche; aucun corps ne doit bouger que dans le cas où les Autrichiens feraient de grands préparatifs, ou nous déclareraient la guerre. J'ai pensé que cette instruction était utile, tant pour servir de guide au ministre Dejean dans les opérations qu'il aura à faire que pour mon ministre de la guerre en Italie et pour le vice-roi.

Les approvisionnements des places, hormis de celles d'Alexandrie et de Plaisance et de la citadelle de Turin, seront faits aux frais du royaume d'Italie. Je dois avoir encore des approvisionnements assez considérables en Italie, et le ministre Dejean serait toujours à temps de donner des ordres pour l'approvisionnement de ces places, parce qu'elles ne sont pas en première ligne.

Autant il est bon d'avoir cette instruction générale sous les yeux, afin de savoir ma pensée et de travailler insensiblement et constamment à s'organiser, autant il serait funeste qu'elle fût divulguée. La connaissance même de moyens si prompts et si considérables en Italie ne pourrait qu'être alarmante pour les Autrichiens.


Saint-Cloud, 23 septembre 1806

Au cardinal Maury, premier aumônier du prince Jérôme (Jean-Siffrein Maury, 1746-1817, archevêque de Paris.Émigré aux coté de Louis XVIII, il demanda à rentrer en France, ce qui fut accordé en 1806, date à laquelle il est nommé aumônier de Jérôme. Il sera nommé archevêque de Paris en 1810, à la place de Fesch).

Mon Cousin, j'agrée vos sentiments. Je vous vois avec plaisir dans un poste qui vous rapproche de moi, et je verrai avec plaisir les circonstances qui me mettront à même d'employer vos talents pour le bien de la religion, du trône et de la patrie.


Saint-Cloud, 23 septembre 1806

NOTE POUR M. DARU

J'autorise M. Daru à s'entendre avec le ministre des finances et M. Bérenger pour vendre à la princesse de Guastalla pour millions de biens nationaux, que possède la caisse d'amortissement, au prix que les a achetés la caisse d'amortissement. Je voudrais que ce fussent des biens en France, de beaux biens, d'une administration facile, afin que la princesse pût les conserver.

Il y avait dans le département du Mont-Tonnerre l'ancienne principauté de Nassau. Si elle n'est pas vendue, ce pourrait être un beau fonds; et, si on pouvait trouver plus près de Paris quelque belle maison, on pourrait l'accompagner d'une belle forêt. Comme ce ne serait pas aliénable, on aurait toujours droit dessus. Il y a beaucoup de biens sous le séquestre, et qui dans le fait doivent être déclarés nationaux. Il faudrait aussi me faire connaître s'il ne serait pas plus avantageux d'acheter le bien de Lucidio, à raison de trois pour cent de moins. On fera connaître combien il a coûté à la caisse d'amortissement.

Mon but est de procurer à la caisse la vente de ses biens et de faire faire à la princesse des achats avantageux.


Saint-Cloud, 24 septembre 1806

Au prince Eugène

Mon fils, donnez l'ordre que tous les officiers polonais qui sont employés aux états-majors de l’armée d’Italie, et qui ne servent pas dans des régiments, soient dirigés sur Juliers pour prendre du service dans la légion du Nord, dont le général Zayouchek est colonel.

(Mémoires du prince Eugène)


Saint-Cloud, 24 septembre 1806

ORDRE DE SERVICE PENDANT L'ABSENCE DE L'EMPEREUR

Tous les ministres correspondront avec nous pour les affaires de leur département.

Néanmoins ils se rassembleront, le mercredi de chaque semaine, dans la salle des séances du Conseil d'État, et sous la présidence de l'archichancelier. Ils y porteront les objets de détail et du contentieux de leur administration, lesquels lui seront remis pour nous être transmis dans la forme ordinaire.

Nous entendons en général que toutes les affaires qui, dans l'ordre ordinaire du gouvernement et de l'administration , ont besoin de notre signature, continuent à nous être présentées à cet effet.

Toutes les fois qu'un ministre jugera nécessaire une conférence avec d'autres ministres pour traiter une affaire de son département, il en fera la demande à l'archichancelier, qui convoquera à cet effet les ministres dont le concours sera nécessaire.

S'il survient des événements extraordinaires de police, sur lesquels nous ne puissions pas statuer à temps à raison de notre éloignement, et qui exigent le concours de différents ministres, l'archichancelier, auquel se réuniront les grands dignitaires qui se trouveront à Paris, convoquera les ministres dont la présence sera nécessaire. Si l'exécution des mesures que l'archichancelier aura approuvées excède les bornes de l'autorité ministérielle, et qu'il ne soit pas possible d'attendre notre décision, il sera tenu de cette conférence un procès-verbal dressé par le ministre du département que l'affaire concerne et signé par l'archichancelier. En conséquence dudit procès-verbal, ledit ministre se trouvera autorisé à exécuter les dispositions telles que les aura prescrites l'archichancelier après avoir entendu l'opinion des ministres.

Dans tous les cas d'événements militaires extraordinaires, l'archichancelier, auquel se réuniront les grands dignitaires qui se trouveront à Paris, sur la demande du ministre faisant les fonctions de ministre de la guerre, convoquera les ministres dont le concours est jugé nécessaire, et il sera procédé ultérieurement comme il est dit ci-dessus.

Les ministres nous écriront tout aussi souvent qu'ils auront à entretenir des affaires de leur département. Toutes les lettres seront adressées directement.


Saint-Cloud, 24 septembre 1806

A M. de Champagny

Monsieur Champagny, je désire que vous écriviez une lettre circulaire aux préfets; vous leur ferez connaître que, le roi de Prusse ayant fait des armements considérables, j'ai jugé convenable de me rendre à mon armée pour voir si définitivement la Prusse veut la guerre ou la paix; que ces circonstances sont pour eux un noble motif de hâter la marche de la conscription, et que vous vous en rapportez à leur zèle et à leur fidélité pour mon service.


Saint-Cloud, 24 septembre 1806

A M. de Champagny

Monsieur Champagny, vous trouverez ci-joint un projet de circulaire, que vous pouvez arranger comme vous voudrez. Vous la communiquerez au ministre Dejean, pour qu'i1 l'envoie au maréchal Kellermann. Je ne sais ce que cela produira. Vous sentez que je n'ai pas besoin de troupes, mais je désire rouvrir la carrière à ceux qui, éloignés de leur patrie par les circonstances de la révolution, veulent rentrer dans cette carrière naturelle à tout Francais. Si vous adoptez ces mesures, il sera nécessaire que vous écriviez sur-le-champ aux préfets de Paris et des départements environnants.

PROJET DE CIRCULAIRE DU MINISTRE DE L'INTÉRIEUR AUX PRÉFETS

Lors de la dernière campagne, il y a un an, un grand nombre de citoyens se présentèrent et s'équipèrent à leurs frais pour former des gardes d'honneur pour suivre Sa Majesté à la guerre; mais les mouvements furent si rapides, que la Grande Armée termina la guerre par le traité de Presbourg avant que cette jeunesse eût pu donner des preuves de son dévouement et de son courage.

Je n'ai pas plutôt appris que la Garde impériale était partie, ainsi que les bagages de Sa Majesté, que, sans vouloir approfondir la question si la guerre aura lieu ou non, j'ai demandé à Sa Majesté un moyen prompt pour utiliser les jeunes gens qui sont animés de l'amour de la gloire, et leur procurer une occasion de se distinguer.

Tout homme âgé de plus de dix-huit ans et de moins de quarante, ayant assez de fortune pour s'équiper, se procurer un cheval et faire la route à ses frais, se rendra à Mayence, où il s'adressera au maréchal Kellermann. Il sera admis à faire partie du corps de gendarmes d'ordonnance de l'Empereur.

Le maréchal Kellermann est investi des pouvoirs nécessaires pour les organiser en compagnies de 80 hommes, nommer les officiers parmi ceux qui auraient servi et réuniraient les qualités nécessaires.

L'uniforme sera le surtout de chasseur, tout vert, sans passe-poil ni couleur, gilet écarlate tressé en argent, pantalon à la hongroise aussi tressé; shako et boutons ronds et blattes; le sabre de chasseur; le cheval, pour la taille et son équipement, sera comme celui des chasseurs à cheval. On fournira, des magasins de Mayence, des carabines et des pistolets, du moment de l'incorporation dans les compagnies.

Mais ayant remarqué que, parmi les propositions qui m'étaient faites, un grand nombre de citoyens désiraient faire une campagne à pied, Sa Majesté a bien voulu adhérer à la demande que je lui en ai faite, et autoriser ces jeunes gens à faire partie d'un corps d'ordonnance à pied que le maréchal Kellermann est également chargé d'organiser à Mayence. Ces individus devront s'équiper et faire la route à leurs frais. Il leur sera donné un armement du moment de l'incorporation dans les compagnies. L'uniforme sera vert comme celui de la cavalerie, avec un chapeau et des guêtres. Le gilet et le pantalon seront aussi comme ceux de la cavalerie.

Les armées de Sa Majesté sont si nombreuses, qu'elle n'a adhéré à toutes mes demandes que sur mon instance, et pour ouvrir une carrière à un grand nombre de personnes accoutumées déjà au métier des armes. Mon intention est cependant que vous gardiez cette lettre secrète. Vous êtes autorisé à faire dans ce sens une proclamation aux sous-préfets et aux maires. Tous ceux qui auront les qualités ci-dessus pourront se faire inscrire, et vous leur donnerez une lettre pour les adresser au maréchal Kellermann.

Ceux qui entreront dans la cavalerie devront être assurés, par eux-mêmes ou par leurs parents, d'une pension au moins de 600 par an.

Vous aurez soin en même temps de m'envoyer le nom de ceux désignés.


Saint-Cloud, 24 septembre 1806

Au général Dejean

Monsieur Dejean, comme il est à craindre que le maréchal Kellermann ne rassemble 20 ou 30,000 hommes dans les 5e et 26e divisions militaires, ce qui mettrait en combustion les départements de ces divisions, faites-lui bien connaître que mon intention est qu'il lève seulement un corps de chasseurs de 2,000 hommes dans la 5e division et un dans la 26e division, de la même force. Faites-lui comprendre que dans aucun cas, même le plus urgent, il ne pourra solder que 6,000 hommes; mais que, dans ce moment-ci, 4,000 suffisent. Il vaut mieux qu'ils soient en petit nombre, mais choisis, et que cela ne gène point les départements.


Saint-,Cloud, 24 septembre 1806

Au général Dejean

Monsieur Dejean, laissez exécuter les ordres du prince de Neufchâtel, hormis pour les 1e, 3e, 5e, 9e, 15e et 10e régiments de dragons, qui sont à Paris. Ces six régiments n'enverront chacun qu'un détachement de 30 hommes à pied, le reste étant nécessaire pour servir les chevaux et former la réserve de l'intérieur. Je vous engage à vous occuper beaucoup de cette réserve. Je laisse l'empire dégarni de troupes. Je laisse les escadrons des sept régiments de dragons qui forment plus de 2,400 hommes, et qui, s'ils sont montés une fois, seront une ressource réelle pour comprimer tous les mouvements et aider à la défense des côtes.


Saint-Cloud, 24 septembre 1806

Au général Dejean

Il  y a une estafette qui part tous les jours de Milan. Je désire que vous correspondiez journellement avec le vice-roi et avec le roi de Naples, pour leur donner en gros des nouvelles certaines de ce qui se passe.

Vous remettrez quelquefois sous les yeux du vice-roi mon instruction générale (Organisation de l'armée d'Italie du 23 septembre - voir supra). Vous lui recommanderez de tenir approvisionnées les places de Palmanova, Osoppo et Vicence; que, tout doucement et sans donner l'alarme, il suive l'approvisionnement de Mantoue, Legnago et Peschiera; que, surtout, on déblaye tout le pays entre l'Isonzo et l'Adda de toute l'artillerie inutile. Voici la saison où l'air de Mantoue n'est plus dangereux. Il est donc convenable qu'on jette dans Mantoue tout ce qui embarrasserait à Vérone, hormis ce qu i est mobile. Suivez avec l'ordonnateur l'organisation des brigades de voitures pour les transports militaires; mais tout cela sans rien brusquer, et qu'insensiblement tout se répare et se prépare. J'ai recommandé au roi de Naples d'évacuer ses malades sur Naples et surtout sur Capoue.

Dans les lettres que vous m'écrirez tous les jours, ne manquez pas de m'instruire de l'exécution de vos ordres, tant pour l'artillerie que pour les différents services.


Saint-Cloud, 24 septembre 1806

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, je vous envoie la copie des ordres du mouvement de l'armée que je vous ai adressée le 20 du courant au matin, et je suis fâché de ne pas vous avoir envoyée douze heures après départ de mon courrier du 20 septembre, parce qu'il aurait pu intercepté. Cependant je n'ai pas lieu de le craindre. Vous aurez dû recevoir, le 24 à midi, mon premier courrier du 20. Quand la présente vous parviendra, et sans doute le 25, des ordres auront été donnés au maréchal Soult, qui sera parti dès le 26; et, comme il lui faut trois ou quatre jours de marche pour se rendre à Amberg, il pourrait y être le 30, quoiqu'il ait l'ordre de n'y être que  le 3. Vous recevrez le présent courrier le 27, afin que vous accélériez le  mouvement du maréchal Soult. Il importe qu'il arrive vite à Amberg, puisque l'ennemi est à Hof, extravagance dont je ne le croyait pas capable, pensant qu'il resterait sur la défensive le long de l'Elbe. Si, au lieu d'arriver le 3 à Amberg, le maréchal Soult peut y arriver le 1er  octobre, ordonnez-lui d'y être ce jour-là.

Le corps du maréchal Davout se sera sans doute réuni le 25, lorsqu'il a reçu vos ordres, à OEttingen. Je suppose qu'il ne lui faut que deux ou trois jours pour cela. Cependant je ne lui ai donné l'ordre d'y être que le 3 octobre. S'il peut y être le ler ou le 2, il n'y a point d'inconvénient. Il détachera sa cavalerie sur Kronach, prendra possession de cette place et s'occupera sur-le-champ de la mettre en bon état. J'imagine que le maréchal Ney partira d'Ulm le 26 septembre ; je ne pense pas qu'il puisse être à Anspach avant le 2 ou le 3 octobre. Le maréchal Lefebvre n'a ordre de se porter que le 2 ou le 3 à Koenigshofen; s'il en peut prendre possession le ler octobre, ce sera bien fait. Il commande définitivement le 5e corps de la Grande Armée. Un ancien chef de l'état-major, qui était à ce corps lorsque le maréchal Mortier le commandait, continuera à y être employé en cette qualité. Le général Ménard n'est pas assez militaire pour ce poste important. Toutes mes divisions de cavalerie de réserve doivent être rendues à leur destination le 3. Si ce mouvement peut être exécuté dès le 2, je n'y vois pas d'inconvénient. Je donne ordre duc de Clèves d'être à Bamberg le ler octobre. Je vous prie d'ordonner à tous les officiers de son état-major d'y être rendus ce jour-là, et aux généraux commandant les divisions de cavalerie d'y envoyer leurs états de situation et d'y prendre ses ordres. Je serai le 28 à Mayence c'est vous dire que je puis être le ler octobre à l'avant-garde, si les circonstances l'exigent. Le but de la présente est de vous faire connaître que je désire que vous accélériez les mouvements que j'ai ordonnés, sans fatiguer les troupes et sans donner trop d'inquiétude aux Prussiens.


Saint-C1oud, 24 septembre 1806

Au grand-duc de Berg

Mon Frère, j'ai envoyé l'ordre à toutes les divisions de cavalerie d'activer leur marche, et si, au lieu d'être rendues sur leur position de Kronach à Würzburg le 3 octobre, elles s'y trouvent dès le 1er ou le 2 sans trop se fatiguer, je le verrai avec plaisir. Il est nécessaire que le général de division Belliard et votre état-major se trouvent à Bamberg le 1er octobre au soir, ou le 2 à midi au plus tard. Envoyez vos chevaux en grande marche à Bamberg. Vous m'attendrez à Mayence pour en partir-une heure après mon arrivée, afin que vous soyez à Bamberg le ler octobre à midi.


Saint-Cloud, 24 septembre 1806

Au général Dejean

Monsieur Dejean, faites revenir les cinq officiers polonais qui sont employés à l'armée d'Italie pour leur donner des grades dans la légion du Nord.


Mayence, 28 septembre 1806 (Napoléon s'est mis en route le 25, à 4 h 30 du matin, pour rejoindre Mayence en passant par Châlons sur Marne, Verdun, Metz, Saint-Avold, Sarrebrück, Kaiserslautern)

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, je reçois vos lettres du 24. Je suis arrivé aujourd'hui au matin à Mayence. Toute ma Garde à pied est arrivée, parce qu'elle est venue en poste; mais ma Garde à cheval et mon artillerie n'arriveront que dans cinq ou six jours. Il est donc convenable que vous donniez ordre au général Songis d'avoir douze pièces de canon de la réserve du parc prêtes à Würzburg, pour les fournir provisoirement à ma Garde à pied à son passage. Faites réunir le plus de farine possible à Würzburg et à Bamberg.


Mayence, 28 septembre 1806

Au roi de Wurtemberg

Monsieur mon Frère, je suis arrivé à Mayence. Toute mon armée doit en ce moment être en mouvement. Le dernier courrier de mon ministre de Berlin m'ayant croisé, je ne sais pas positivement le dernier état de la question. Je prie Votre Majesté de m'écrire ce qu'elle en sait. Je désire qu'elle me fasse connaître quelle sera la composition de ses troupes, qui les commandera quand elles seront rendues au point de réunion, et comment elle veut que je les emploie.


Mayence, 28 septembre 1806

Au prince héréditaire de Bade

Le Grand-Duc doit avoir reçu la réquisition pour son contingent. Faites-moi connaître si vous êtes dans l'intention de le commander; faites-moi connaître aussi quelle est sa force, et quand il sera au point de réunion. Pressez autant qu'il vous sera possible vos mouvements. Je désirerais que vous me fissiez passer des renseignements sur le chemin de Mannheim par Neckarelz et Würzburg.


Mayence, 28 septembre 1806

Au duc de Nassau-Weilburg

Je prie Votre Altesse de me faire connaître la force des hommes qu'elle pourra fournir, le jour où ils pourront être rendus devant Mayence, et l'officier qui les commandera.


Mayence, 29 septembre 1806

A M. Cambacérès

Mon Cousin, le colonel Arrighi peut fournir à toutes les gardes du palais puisqu'il a les dragons. Mais il faudrait diminuer cette garde; en général, il faut accoutumer Paris à ne plus voir tant de sentinelles. C'est le seul moyen d'ôter les 6,000 hommes que j'y ai laissés et de pouvoir les envoyer aux frontières, si les circonstances l'exigent.


Mayence, 29 septembre 1806

A M. Fouché

J'ai reçu votre lettre du 27 septembre. Je vous recommande d'apporter votre attention sur la conscription. J'ai appelé la réserve. Il est assez important qu'elle parte. Toutes mes troupes sont en mouvement. Nous sommes ici en mesure. Ma Garde, qui n'est partie de Paris que le 22, a dans ce moment déjà passé Francfort. Les fatigues et les périls ne sont rien pour moi. Je regretterais la perte de mes soldats, si l'injustice de la guerre que je suis obligé de soutenir ne faisait retomber tous les maux que l'humanité va encore éprouver sur les rois faibles qui se laissent conduire par tant de brouillons vendus. 

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Il est assez convenable que M. Bourrienne prévienne le roi de Hollande et vous de ce qui peut se passer en Hanovre.


Mayence, 29 septembre 1806

Au général Dejean

Monsieur Dejean, chaque corps a 100 ou 200 hommes estropiés sortis des hôpitaux de la Grande Armée depuis la dernière inspection. J'ai pris un décret pour qu'au ler octobre les généraux Schauenburg et Muller passent partout des revues. S'il y a à inspecter d'autres points que ceux dont ils sont chargés, je vous autorise à nommer des inspecteurs ad hoc. Indépendamment de l'encombrement qu'éprouvent les corps, il résulte de l'état des choses deux autres grands inconvénients : d'abord  ces hommes, en grand nombre, qui méritent des récompenses, se trouvent mal aux dépôts et sont impatients de retourner chez eux on d'aller à l'Hôtel (des Invalides); ensuite il y a parmi eux beaucoup d'officiers et de sergents : ils comptent dans les corps et ne sont pas remplacés. Il y a tel 3e bataillon à Mayence qui a 12 officiers étant tous dans le cas de la retraite et des récompenses, de sorte qu'avec beaucoup d'officiers sur le tableau, ces corps n'en ont presque pas de disponibles.

J'ai commis le général Macon pour faire, dans la journée de demain, l'inspection des sept régiments qui sont à Mayence. Du moment où les états vous seront parvenus, expédiez tout, et regardez ma signature comme chose de forme; je signerai ensuite ce que vous aurez fait.

Quant aux emplois qui seront vacants en conséquence de ces inspections, envoyez sur-le-champ dans les corps, pour les remplir, bon nombre de jeunes gens de l'école de Fontainebleau et de l'école polytechnique. Ils y font merveille. Il faut convenir que nos officiers sont épuisés, et que sans eux notre armée en manquerait. Demandez-en une cinquantaine à Lacuée, et une nouvelle centaine à Fontainebleau, indépendamment de ceux que j'ai nommés dernièrement; et dirigez-en trois sur chacun des dépôts de l'armée. Vous m'enverrez ensuite des décrets à signer. Mais, encore une fois, ne considérez en ceci ma signature que comme une chose de forme. Tenez la main à ce que tous les jeunes gens de Fontainebleau, que j'ai nommés avant mon départ, rejoignent sans délai. Écrivez à cet effet au commandant de l'école et au gouverneur de Paris.

La plupart des 3e bataillons sont des cadavres qui ne peuvent être ranimés que par cette jeunesse; cependant ils ont de bons majors et de bons chefs de bataillon. Je vous autorise à prendre aussi à Saint-Cyr deux jeunes gens âgés de dix-sept ans, par régiment, comme caporaux-fourriers; ils auront la première place qui viendra à vaquer dans le bataillon.

Il faut à Mayence un colonel d'artillerie. Le chef du bataillon qui s'y trouve est un bon officier; mais il n'a pas la tête assez vaste pour une si grande besogne. Envoyez-y donc un colonel qui y demeure et qui puisse diriger l'immense matériel de cette place. Il serait même convenable d'y avoir un général d'artillerie.

Le général d'Hautpoul et le général Grouchy ne sont pas encore arrivés. J'ai désigné aussi un grand nombre d'adjudants commandants et d'adjoints pour se rendre à l'armée.

Je vous recommande les régiments suisses. Je vous autorise à nommer les officiers du ler bataillon de chaque régiment. Faites les fonds pour le recrutement, et qu'enfin ces régiments prennent couleur. M. Maillardoz est adjudant commandant; il a de la bonne volonté, de l'usage et la triture de ce qui regarde les Suisses. Travaillez avec lui, et prenez les mesures nécessaires pour que, dans deux mois, j'ai un régiment à Lille, à Rennes et à Avignon, pour servir selon les circonstances. Le petit bataillon valaisan, que j'ai fait réunir à Gênes, m'est aussi fort important pour garder cette ville. Levez les obstacles, nommez les officiers et faites en sorte que, dans deux mois, ces 4 ou 500 hommes puissent servir à Gênes.

Un régiment italien doit être arrivé à Paris et un autre à Orléans; faites-les partir tous deux pour Mayence.

La légion du Nord que commande Zajonchek est placée trop au nord du côté de Juliers; je préfère qu'elle soit à Landau. Je vous autorise à nommer les officiers. Mais il n'y a pas un moment à perdre, les déserteurs commencent à arriver, et ils se perdent parce qu'on ne sait où les diriger. 


Mayence, 29 septembre 1806

Au général Lacuée

J'ai envoyé hier un décret au ministre pour la réserve. J'en ai excepté dans l'ouest douze départements et non dix-huit. Si même on jugeait que c'est trop de douze, on pourrait encore restreindre l'exception. Cependant il est prudent de ne pas appeler les quatre départements de la Bretagne, la Loire-Inférieure, Maine-et-Loire, les Deux-Sèvres et la Vendée. Le reste, je crois, peut marcher. Mettez la plus grande rapidité dans l'envoi de cette réserve. Elle est nécessaire pour les corps de cette frontière auxquels j'ai envoyé peu de monde sur l'appel de 1806, parce que ces corps étaient au-dessus du pied de paix. Aujourd'hui ils attendent des conscrits avec impatience.

Les 3e bataillons sont pleins d'officiers qui ont droit à leur retraite et qui par leurs infirmités ne peuvent plus servir. Il faut rajeunir le corps des officiers. J'ai écrit à M. Dejean de faire partir une centaine d'élèves de l'école de Fontainebleau. Si l'école polytechnique peut en fournir une soixantaine, qu'on les fasse partir sur-le-champ. Appliquez-vous à former les jeunes gens de votre école aux manœuvres. Que chacun puisse être instructeur à son arrivée au régiment; cela est très-important. Il n'y a plus d'officiers, et sans cette école et celle de Fontainebleau je ne sais ce que deviendrait notre armée. Des paysans sans sans éducation ne peuvent fournir des officiers qu'après huit ou dix ans d'expérience .

Le génie et l'artillerie ne peuvent absorber tous vos jeunes gens; donnez un peu à l'école polytechnique cette direction sur l'infanterie.


Mayence, 29 septembre 1806

Au grand-duc de Würzburg

Je m'empresse de faire à Votre Altesse la communication que j'ai faite à tous les membres de la Confédération et que je n'ai dû lui faire qu'aujourd'hui, parce que je n'apprends qu'en ce moment la  signature du traité qui vient d'être conclu entre son ministre et mon ministre des relations extérieures. Sous peu de jours j'aurai le plaisir de voir Votre Altesse à Würzburg. Il est malheureux pour moi que ce soit toujours dans des circonstances de tumulte et de guerre que j'aie l'avantage de la voir. J'ai du moins la consolation, cette de voir nos camps réunis. Elle peut rester assurée que, dans toutes les vicissitudes qui peuvent avoir lieu, je serai fidèle aux engagements que j'ai contractés avec elle. J'espère que Votre Altesse ne doute pas de l'estime particulière que je lui ai vouée depuis longtemps, et du plaisir que j'éprouverai dans toutes les circonstances à lui être agréable.


Mayence, 29 septembre 1806

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, écrivez au maréchal Bernadotte qu'il se mette en marche pour Kronach, et qu'il fasse occuper les débouchés des montagnes de Saxe, en se tenant sur la frontière, et en prenant cependant une bonne position qui protège le passage en Saxe; qu'il fasse reconnaître les chemins de Leipzig et de Dresde. Je suppose que l'on arme et approvisionne Kronach et Koenigshofen. Le maréchal Lefebvre fera reconnaître les débouchés des montagnes pour descendre en Saxe, et les chemins d'Erfurt et de Leipzig. Qu'il fasse occuper une bonne position à son avant-garde, et qu'il fasse armer et approvisionner Koenigshofen. Qu'il envoie aussi des espions et des reconnaissances pour connaître les rapports des voyageurs du coté de Fulde.

Du reste, la guerre n'est pas déclarée. On doit se tenir sur le qui vive, et faire parvenir tous les jours des rapports. On ne doit point fatiguer inutilement la cavalerie. Toute la cavalerie légère du maréchal Bernadotte sera placée en avant de Kronach; celle du maréchal Lefebvre en avant de Koenigshofen. Le maréchal Bernadotte prendra son quartier général entre Lichtenfels et Kronach. La cavalerie légère du maréchal Soult prendra position sur les confins du pays de Bayreuth, vis-à-vis Kreussen; il placera une avant-garde qui occupe une bonne position. De Koenigshofen à Brückenau, il doit y avoir une route qui passe par Neustadt. Il est nécessaire que le maréchal Lefebvre fasse éclairer cette route, en supposant qu'il y ait des Prussiens à Fulde, pour que, dans sa position de Koenigshofen, il puisse tomber sur l'ennemi, s'il cherchait, de Fulde, à se porter sur Würzburg.

Il faut que le maréchal Bernadotte fasse en secret ses reconnaissances et ses dispositions, pour qu'il puisse, de Kronach, intercepter la route d'Erfurt à Hof. 

Donnez ordre au maréchal Ney de réunir tout son corps à Nuremberg.

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La guerre n'est pas déclarée; le langage doit être tout pacifique; on ne doit commettre aucune hostilité.


Mayence, 29 septembre 1806

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, mon intention a été de réunir le 1er corps de la Grande Armée à Nuremberg. Cependant j'ai vérifié sur mes minutes, et il est vrai que je vous ai écrit : à Bamberg. En conséquence donnez ordre au corps du maréchal Ney de presser sa marche pour être réuni le 3 octobre à Nuremberg, au lieu d'Anspach. Donnez ordre toutes les divisions de cavalerie, qui sont restées en arrière, de continuer leur marche pour prendre leurs positions depuis Würzburg jusqu'à Lichtenfels.


Mayence, 29 septembre 1806, 10 heures du matin

Au grand-duc de Berg

Vous vous rendrez à Würzburg. Vous écrirez sur-le-champ au maréchal Lefebvre à Koenigshofen, au maréchal Davout à Bamberg, et au prince de Ponte-Corvo, qui doit être à Kronach. Vous ferez marcher les divisions de la réserve, de manière qu'elles se portent le plus possible entre Schweinfurt et Kronach. Vous aurez soin qu'on occupe la citadelle de Würzburg, et qu'elle soit armée et approvisionnée, de manière à être à l'abri d'un coup de main. Vous enverrez des espions sur Fulde. Vous me ferez connaître la situation des divisions de cavalerie et le besoin qu'elles ont d'hommes à pied, afin que ce qui vous est inutile soit retenu à Mayence. Vous placerez des postes de cavalerie au delà de Karlstadt, à l'extrémité du territoire de Fulde, pour bien connaître les mouvements de l'ennemi. Vous communiquerez les renseignements que vous pourrez vous procurer sur les débouchés des chemins de Koenigshofen sur Erfurt,
et de Kronach sur Leipzig. Vous ferez filer la plus grande partie de vos bagages sur Bamberg, en gardant cependant à Würzburg ce qui peut vous être nécessaire. J'ai ordonné au maréchal Lefebvre de prendre une bonne position à Koenigshofen, et d'éclairer la route de Fulde, afin de tomber sur l'ennemi, s'il se rapprochait trop de Würzburg.

La guerre n'est pas déclarée. Il ne faut donc pas dépasser les confins du pays de Würzburg et de la Bavière. Mais on pourrait passer même quelques points, si cela était nécessaire pour occuper une bonne position qui favorisât les débouchés sur la Saxe. Et des officiers du génie sur Koenigshofen et sur Fulde, afin de connaître les routes; ils rédigeront des mémoires sur les positions militaires qu'elles présentent.

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Vous aurez la plus grande honnêteté pour le grand-duc de Würzburg. Vous lui direz que le traité qui le place dans la Confédération a été signé à Paris. Pour être plus libre de vos mouvements, vous n'irez pas loger au château; vous logerez hors la ville.

Vous m'enverrez deux courriers par jour.


Mayence, 29 septembre 1806, 3 heures et demie de l'après-midi.

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, je reçois votre lettre du 26 à onze heures du soir.

Le grand-duc de Berg est parti pour Würzburg, où il sera cette nuit.

Je vous ai écrit ce matin une lettre dont je vous envoie la copie au cas que le premier courrier ne vous ait pas rencontré. Vous verrez que mon intention est que le corps du maréchal Lefebvre prenne une bonne position en avant de Hoenigshofen, le corps du maréchal Bernadotte, du côté de Kronach, et le corps du maréchal Soult, le plus près possible du pays de Bayreuth; que le corps du maréchal Ney se rende à Nuremberg, et que toutes les divisions de cavalerie, auxquelles le grand-duc de Berg enverra d'ailleurs des ordres directement, se mettent en marche pour prendre leurs positions de Schweinfurt à Bamberg.

Puisque les Bavarois ne se soucient pas de faire partie du corps du maréchal Bernadotte, je les tiendrai sous mes ordres directs.

Donnez ordre au corps du général Wrede de partir d'Eichstoedt, et de se rendre le plus tôt possible à Nuremberg. Je suppose que ce corps du général Wrede est indépendant des garnisons de Forchheim, etc.

La division Dupont sera à Würzburg dans la journée du ler octobre; elle a couché hier à Francfort.

Ma Garde à pied sera le 2 octobre à Würzburg; elle est partie ce matin de Mayence.

J'ai fait partir un détachement de 800 hommes appartenant au corps du maréchal Davout, qui marche avec ma Garde, sous les ordres de l'adjudant commandant Levasseur. De Würzburg, ce détachement continuera sa route sur Bamberg, et le maréchal Davout l'incorporera dans son corps.

J'ai fait partir de Mayence, ce matin, 2,000 quintaux de farine qui arriveront le 2 octobre à Würzburg. J'ai fait partir six pièces courtes de 24 avec armement de 400 boulets par pièce, et six pièces autrichiennes de 12, pour l'armement de la citadelle de Würzburg. Ces bouches à feu ne seront arrivées que le dixième jour, c'est-à-dire le 9 octobre. Que le général Songis envoie un officier d'artillerie du côté d'Aschaffenburg pour accélérer la marche de ces canons, si cela est possible.

J'ai fait partir de Spire 1,500 quintaux de farine également pour Würzburg. J'ai pris différentes mesures pour approvisionner Mayence et Wesel, non pas d'une manière aussi gigantesque que le veut l'intendant général, mais suffisamment pour parer aux événements.

Il y aura, dans quelques jours, à Mayence, de la farine, du riz, de l'eau-de-vie, à la disposition de l'armée.

La cavalerie, les gros bagages, l'artillerie de ma Garde passent le Rhin à Mannheim, et continuent sur Würzburg. Je désire que vous organisiez cette route de Mannheim, que je désire être la route de l'armée pour tout ce qui vient de Strasbourg et pour tous les objets les plus importants. Il faut donc à Mannheim un commandant qui corresponde avec vous.

On me remet à l'instant votre lettre de Würzburg, du 28.

Je désire que le maréchal Lefebvre soit le 9 à Koenigshofen, puisqu'il peut y être. J'approuve beaucoup la mesure que vous avez de faire venir à Würzburg de l'artillerie bavaroise d'Ingolstadt; je vois qu'elle y sera le 2 ou le 3 octobre. Je vois avec peine que le corps du maréchal Ney soit encore si en arrière.

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Ce qui est bien important, c'est qu'il y ait sur-le-champ un commandant, des officiers d'artillerie et deux compagnies d'artillerie à Würzburg, et que des vivres soient promptement jetés dans la citadelle.


Mayence, 29 septembre 1806, 10 heures du soir

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, il faut nommer un général pour commander à Würzburg.

Il faut voir l'Électeur pour lui faire comprendre la nécessité de requérir une grande quantité de blé et de farine pour approvisionner abondamment Würzburg, et suffire non-seulement au service des troupes, mais encore au service de l'approvisionnement de la citadelle. J'écris au prince Primat pour qu'il envoie une quantité farine à Würzburg.

Vous ne me parlez pas des mouvements ni de l'arrivée du parc.

Le principal est d'avoir des moyens de vivre à Würzburg; on réglera ensuite les comptes.

J'imagine que vous avez des espions à Fulde. Si vous pouvez vous porter rapidement à Koenigshofen, pour voir la position défensive du maréchal Lefebvre, et les rapports de cette place, pour tomber sur l'ennemi, dans le cas où celui-ci se porterait de Fulde sur Würzburg, faites-le. Je désire bien connaître les rapport:s de Koenigshofen avec Cobourg et Kronach, et de Kronach avec Hof. Envoyez des officiers du génie, qui non-seulement reconnaîtront les débouchés de Koenigshofen sur la grande route qui conduit sur Halle, de Bamberg sur Cobourg et de Kronach sur Saalburg et Schleiz, et qui conduit à Leipzig, mais encore les rapports de Koenigshofen avec Cobourg et Kronach. Si, après avoir placé le maréchal Lefebvre en avant de Koenigshofen, il ne me convenait pas de le faire déboucher sur Hildburghausen pour ne point le commettre avec l'ennemi, et que je voulusse le faire venir sur Cobourg, en dérobant une marche à l'ennemi, sans dépasser les limites de la Saxe et la petite chaîne de montagnes que je suppose être entre la Saxe et Würzburg, quel chemin devrait prendre pour cela le corps du maréchal Lefebvre ? Combien aurait-il à rétrograder ? Car il serait possible que, ne voulant point engager une affaire avec l'ennemi qui se serait avancé jusqu'à Hildburghausen, je le fisse appuyer sur mon centre à Cobourg, et que, mon centre réuni, je le fisse replier sur Kronach. Il est donc nécessaire que je sache quel chemin le maréchal Lefebvre doit suivre pour se rendre à Cobourg, en deçà de la ligne de mes postes, et de Cobourg à Kronach également en deçà de la ligne de mes postes. Envoyez un officier d'état-major au maréchal Soult qui viendra vous rejoindre du moment que ce maréchal sera en position. C'est par là que je veux commencer, si toutefois je suis obligé de faire la guerre. Je pense qu'il est inutile que vous veniez à Mayence. Restez à Würzburg. J'attends moi-même pour vous rejoindre que je sache quelle est la dernière réponse du roi de Prusse; il m'a envoyé un chambellan, que je n'ai pas encore reçu; on l'a vu sur la route de Metz. Faites étudier tout le local, soit comme débouché, soit comme mouvement parallèle, depuis Hof jusqu'à Koenigshofen.


Mayence, 29 septembre 1806, 10 heures du soir

Au roi de Hollande

Je ne reçois qu'en ce moment votre lettre du 24 septembre, où je vois que vous serez le 1er octobre à Wesel.

Voici d'abord l'état de la question : la guerre n'est pas déclarée avec la Prusse; cependant tout porte à penser qu'elle le sera sous peu de jours.

Envoyez-moi l'état de situation exact de votre corps d'armée, et faites-le cantonner autour de la ville. Envoyez votre cavalerie légère sur les frontières observer l'ennemi, sans se commettre. Réunissez à vos troupes ler bataillon du duc de Clèves. Faites jeter un pont à Wesel; veillez à ce qu'on arme et approvisionne la place. Faites beaucoup de bruit de votre corps d'armée. Faites mettre dans les journaux de Hollande que de nouvelles divisions arrivent de France, et vont vous joindre. Répandez la croyance que votre armée sera de 80,000 hommes. Envoyez des espions du côté de Münster. Selon mes renseignements, les Prussiens ne doivent pas avoir plus de cinq bataillons; mais il ne faut pas vous commettre. Je vous ferai connaître mon plan de campagne, mais pour vous seul, par un officier que je vous expédierai demain. Il est bien important que vous ayez un pont sur Wesel, pour que vous puissiez border le Rhin; si je parvenais à jeter un gros corps d'ennemis sur le Rhin. Il y a des gazettes à Düsseldorf; faites-y mettre la nouvelle de votre arrivée, faites que les habitants croient que vous avez beaucoup de monde et que vous en attendez beaucoup d'autre.

Expédiez un courrier à M. Bignon, mon ministre à Cassel, avec une lettre telle qu'elle puisse être lue, puisqu'elle peut être interceptée. Demandez-lui dans quelles dispositions est l'électeur de Hesse-Cassel, s'il est ami ou ennemi, et les renseignements que sa position lui permet de vous donner. Vous lui direz que vous réunissez 80,000 hommes sur le bas Rhin, mais que cela ne doit  donner aucune inquiétude à l'Électeur, s'il ne se déclare pas contre la France.

J'ai adressé hier un courrier au général Loison, à Wesel, ignorant que vous vous trouviez dans le pays.

Toute mon armée est en mouvement. Je ne sais pas si votre courrier me retrouvera à Mayence; mais il y prendra les ordres du maréchal Kellermann, pour se diriger sur le point où je dois être. Il est convenable que vous envoyiez près de moi un officier intelligent que je puisse vous renvoyer avec mes instructions.

J'approuve fort votre idée de faire venir des chaloupes canonnières à Wesel. Envoyez-m'en deux, si vous pouvez, à Mayence; mais il faudrait qu'elles fussent légères. Correspondez avec le maréchal Kellermann, qui vous instruira de tout.

Le prince Murat m'a dit qu'il avait donné le commandement de son duché au général Damas, que vous avez connu en Égypte. Il enverra des espions et correspondra avec vous.


Mayence, 29 septembre 1806

Au général Dejean

Monsieur Dejean, le roi de Hollande me mande l'envoi de 200,000 rations de biscuit à Wesel. Je n'ai trouvé presque rien à Mayence; le munitionnaire n'avait que 2,000 quintaux de farine en magasin, que j'ai fait partir sur-le-champ pour Würzburg. Les mesures pour approvisionner Mayence par réquisition ne sont encore prises. Le commissaire ordonnateur n'a pas même connaissance du décret. Il est bien nécessaire pourtant que j'aie dans cette place les approvisionnements que j'ai demandés.

Il n'est encore arrivé de Strasbourg à Mayence ni bidons, ni marmites, ni souliers. Il paraît que ce dépôt n'en a pas encore reçu l'ordre.

Les régiments de cavalerie n'ont pas encore reçu l'avis des fonds que je leur ai accordés pour acheter des chevaux. Cela devient très-important; mettez plus de mouvement dans toutes ces opérations. Exigez que les corps passât des marchés. Autorisez les hussards et les chasseurs à acheter des chevaux au-dessous de quatre pieds trois pouces. Autorisez aussi la grosse cavalerie et les dragons à en acheter au-dessous de la taille prescrite; il y a de ces sortes de chevaux partout en France, et il vaut mieux acheter des paysans des chevaux de six ans que faire des remontes de trois ou quatre ans qui ne serviront pas avant deux années.


Mayence, 29 septembre 1806

Au maréchal Soult

Mon Cousin, j'espère que votre corps d'armée sera arrivé le 3 octobre à Amberg. Je vais partir demain pour porter mon quartier général à Würzburg. La guerre n'est pas encore déclarée; mais elle tient à un fil bien faible. Vos propos doivent donc continuer à être pacifiques. Cependant vous vous préparerez à exécuter le plan suivant. Mon intention serait que vous puissiez arriver le 5 à Bayreuth avec tout votre corps réuni, ayant quatre jours de pain , et en manœuvre de guerre; et que le 7 vous puissiez arriver à Hof, et en déloger l'ennemi. Mais, comme je serais à Bamberg, sur le compte que vous m'auriez rendu de la journée du 5, vous recevriez des ordres plus précis pour le 6 et le 7. Les rapports que vous m'enverriez sur la situation des ennemis à Hof me seraient nécessaires.

Ceci n'est point un ordre d'exécution, mais une instruction pour vous préparer, en attendant mes ordres pour entrer dans le pays de Bayreuth. Vous vous porteriez sur l'extrême frontière entre le pays de Bamberg et celui de Bayreuth. Par ce plan vous seriez le premier destiné à entrer dans le pays ennemi. Vous et votre corps d'armée devez voir l'estime que je vous porte. Je vois avec plaisir arriver le moment où je vais vous revoir. Envoyez-moi, par l'officier d'ordonnance que je vous expédie, un état exact de votre situation, par corps, ainsi que l'état du matériel de votre artillerie.

Prenez pour principe, dans toutes vos formations en bataille, soit que vous vous placiez sur deux ou trois lignes, qu'une même division fasse la droite des deux ou trois lignes, une autre division le centre des deux ou trois lignes, une autre division la gauche des deux ou trois lignes. Vous avez vu à Austerlitz l'avantage de cette formation, parce qu'un général de division est au centre de sa division.

En vous envoyant l'ordre d'entrer dans le pays de Bayreuth, je vous ferai connaître comment vous devez traiter ce pays. Le 3 octobre, le maréchal Ney sera avec son corps d'armée à Nuremberg; le maréchal Davout, à Bamberg; le maréchal Bernadotte, à Kronach; le maréchal Lefebvre, à Koenigshofen ; le maréchal Augereau, à Würzburg; toute la réserve de la cavalerie, entre Kronach et le Mein. J'ai pensé qu'il était nécessaire que je vous donnasse cette idée de la position générale de l'armée. Du moment que vous serez à Bayreuth, votre ligne d'opération doit être sur Nuremberg; c'est sur cette place que vous devez opérer vos évacuations. Vous pourriez diriger les prisonniers que vous feriez sur Forchheim.


Mayence, 29 septembre 1806, 10 heures du soir

Au général Rapp

Il est nécessaire que vous soyez à Würzburg le 2 octobre; rendez-vous-y directement. Les deux bataillons de dragons sont arrivés. Du dernier état que vous m'avez envoyé il résulte que l'infanterie de ligne peut faire partir 1,248 hommes; l'infanterie légère, 634, la cavalerie et les dragons, 195 hommes à cheval; et les chasseurs et hussards, 66. Je vous prie de me faire connaître si tous ces détachements sont partis. Comme Mayence est un détour, dirigez-les directement sur Würzburg; mais faites-les marcher en règle, sous les ordres d'un adjoint à l'état-major, et envoyez-moi leur ordre de marche, afin que je sache le jour où ils arriveront.

J'ai nommé le général Bisson pour prendre le commandement de la 5e division; mais, comme il peut tarder à arriver, laissez la division au général de brigade le plus habile; écrivez en même temps au général Bisson, à Besançon, qu'il est urgent qu'il soit à Strasbourg; que vous vous rendez à l'armée, et qu'il n'y a pas d'homme capable de diriger cela. En vous rendant à Würzburg, vous passerez à Carlsruhe, où vous verrez le grand-duc. Vous verrez surtout le prince héréditaire, pour savoir s'il commande son corps, quelle sera sa force, et quel jour il sera réuni. Vous verrez aussi la princesse. Je désire que vous alliez vous-même jusqu'à Mannheim, et que vous suiviez de là la route de Würzburg, pour connaître si tout est prêt pour ma Garde à cheval et pour l'artillerie, qui doivent y passer. Je vous ai autorisé à prendre des aides de camp. J'imagine que vous en avez un; dirigez-le sur Augsbourg, pour prendre la note de tout ce qui en est parti et de la situation de Français qui y restent. Il prendra les mêmes notes à Ulm, et il se rendra avec ces deux mémoires à Würzburg. Comment le payeur n'est-il pas encore ici ? S'il n'en a pas reçu l'ordre, donnez-le-lui, et qu'il parle sans délai. J'imagine que vous recevrez ce courrier le 30 au matin. Réexpédiez-le sur-le- champ avec vos réponses à ces questions. N'oubliez pas de m'envoyer aussi par lui la situation de l'artillerie du général Oudinot, matériel, personnel, attelages, que vous avez dirigée sur Mayence.


Mayence, 29 septembre 1806, minuit

Au maréchal Augereau

Mon Cousin, je vous prie de me faire connaître ce qui serait arrivé à votre connaissance du côté de Fulde et de Cassel. Comme il serait possible que vous receviez l'ordre de vous rendre à Würzburg, il serait nécessaire que vous vous procuriez des vivres pour quatre jours, et de vous préparer à replier vos postes, de manière à arriver à Würzburg le 3 octobre. Je vous enverrai des ordres demain 30 avant minuit. Ne démasquez point votre mouvement, de manière que l'on ne puisse supposer quelle route vous devez prendre. Je suppose que le 20e de chasseurs a joint votre corps d'armée.


Mayence, 29 septembre 1806, minuit

Au général Merle, gouverneur de Braunau

Monsieur le Général Merle, je vous expédie un courrier pour vous faire connaître que je suis arrivé à Würzburg et que l'armée y est réunie. Les hostilités ne sont pas commencées avec l'armée prussienne; mais ce qui m'importe, c'est d'avoir la situation de votre place et de ce qui s'y passe. J'espère qu'il n'y aura pas lieu que me donniez des preuves de votre courage, vu ma position avec l'empire d'Autriche; mais enfin, si le cas arrivait, je compte sur votre talent et la bravoure des troupes que vous commandez. Il n'y aura point d'inconvénient à ce que, sans vous mettre en avant, vous laissiez courir le bruit que tout est arrangé avec la Prusse.


Mayence, 29 septembre 1806, minuit

A M. Otto

J'expédie un courrier à Braunau. pour avoir des nouvelles du général Merle et de la situation des affaires de ce côté. Je lui donne l'ordre de retourner par Munich , et je désire que vous me fassiez passer tout ce qui viendrait à votre connaissance. Mon quartier général sera demain à Würzburg, et probablement le 5 octobre à Bamberg. Demandez au général Deroy l'emplacement, au 3 octobre, de chacun de ses régiments, et leur situation. Je désirerais qu'on les envoyât sur-le-champ à Würzburg, afin que la communication soit fréquente. Si le courrier avait besoin d'une instruction particulière pour se rendre à Braunau, vous la lui donneriez.

Écrivez par un courrier au vice-roi d'Italie pour lui donner des nouvelles sur ce qui se passe. Dissipez les faux bruits, si communs à la guerre. Écrivez au vice-roi qu'il fasse passer par estafette des nouvelles à Naples. Toutes les fois qu'il courrait des nouvelles désastreuses ou que vous apprendriez des événements importants, n'épargnez pas d'envoyer des courriers à Milan , en en chargeant des hommes secrets qui ne sachent faire autre chose que de remettre une lettre. Il est convenable que vous fassiez courir le bruit du coté de Braunau que tout est arrangé avec la Prusse, sans vous mettre trop en avant. Je n'écris point au roi de Bavière, parce que pouvez l'entretenir de tout ce que je peux lui écrire.


Mayence , 29 septembre 1806, minuit

Au général Rapp

Je reçois votre lettre du 28 septembre aujourd'hui à minuit. Je vous ai expédié un courrier il y a six heures, et je vous en expédie un nouveau pour vous faire connaître que mon intention est que les quatre bataillons que vous avez organisés débarquent à Mannheim et se dirigent en toute diligence sur Würzburg. Les trois bataillons sont-ils composés de grenadiers et de voltigeurs, ou de simples compagnies ? Faites-le-moi connaître, afin que je sache ce que je pourrai en faire.

Dirigez le bataillon du 28e léger sur Mayence, ce bataillon devant rejoindre son régiment devant cette place.

Les pontons sont inutiles à Mayence, envoyez-les sur Bamberg.

N'exécutez point l'ordre du ministre qui ordonne d'envoyer des hommes à pied des régiments de cavalerie des dépôts aux escadrons de guerre; toutefois faites-moi connaître ce qu'a demandé le ministre, et la situation de ce que vous avez déjà envoyé de ces hommes à pied, ainsi que ce qui reste à ces dépôts.

Les 25 bateaux sont bien importants; mettez-y toute votre attention; faites-les escorter par un bon détachement commandé par un officier supérieur; donnez-lui, s'il faut, de l'argent pour lever tous les obstacles qui se présenteront en route, et qu'il soit rendu à Bamberg le 5 octobre.

Ayez bien soin d'envoyer à l'armée et de diriger sur Würzburg tout ce que vous pourrez tirer des dépôts, en laissant aux 3e bataillons les officiers et sous-officiers nécessaires pour recevoir les conscrits qui vont y arriver de toutes parts.

Visitez également les bataillons du train; ordonnez-leur d'acheter des chevaux de trait; il en manque à l'armée; mettez en marche tout ce que vous pourrez de ces bataillons sur Würzburg, où je vous ai déjà fait connaître que vous deviez être rendu pour le 3 octobre au plus tard.


Mayence, 30 septembre 1806

ORDRE

M. de Tournon partira à une heure du matin avec une lettre pour le prince Primat et le maréchal Augereau. Il rapportera leur réponse. Il aura soin de compter, en allant et venant, les voitures chargées de vivres qu'il rencontrerait, et le nombre de sacs.


Mayence, 30 septembre 1806

Au prince Primat

Mon Frère, j'ai reçu votre lettre. Les mouvements des Prussiens m'obligent à accélérer les miens. Une grande quantité de troupes arrivant à chaque instant à Würzburg, je désirerais qu'il soit possible d'y envoyer 20,000 quintaux de blé ou de farine. Le prix en serait promptement payé au taux du pays. La célérité nécessaire pour faire arriver ces farines à Würzburg me fait seule prendre le parti d'en écrire à Votre Altesse. Je la prie de charger un de mes ministres de faire arriver le plus tôt possible cet approvisionnement dans cette place. Je la prie aussi de m'envoyer, par l'officier que je lui expédie, les nouvelles qu'elle pourrait avoir de Cassel, Fulde et pays environnants. Je ne puis vous donner aucune nouvelles négociations avec la Prusse. Il parait qu'il y a un courrier prussien qui s'est croisé avec moi en route. Toutefois je vous prie d'être sans  inquiétude, de ne jamais douter de ma constante et ferme volonté de protéger la Confédération, et surtout de vous être agréable.


Mayence, 30 septembre 1806, 2 heures du matin

A M. de Montesquiou

M. de Montesquiou partira à deux heures du matin pour porter la lettre ci-jointe au maréchal Soult à Amberg. Il me rapportera la situation de ses troupes, une idée générale des chemins, et vous me retrouver le plus tôt possible au quartier général. Si le maréchal Soult n'était pas encore arrivé à Amberg, il ira à sa rencontre. Il aura soin de bien faire connaître le jour où toutes les troupes du général y seront rendues. La lettre qu'il porte est de la plus grande conséquence. Il la détruirait plutôt que de la laisser prendre. A tout événement, il est bon qu'il la porte d'une manière cachée.


Mayence, 30 septembre 1806, 3 heures du matin

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, en pensant à la manière de pourvoir mon armée de munitions, j'ai senti la nécessité d'avoir deux points forts où je puisse établir mes dépôts : Würzburg et Forchheim.

Je vous ai déjà donné des ordres pour Würzburg, et je n'ai pas à y ajouter. Faites choisir des emplacements pour les magasins et pour les forges. Quant à Forchheim, nommez-y un commandant; ordonnez que la place soit armée et approvisionnée; envoyez reconnaître son état actuel; faites-y désigner des locaux pour les magasins, de cartouches d'infanterie et de cartouches à canon, pour des magasins de bois de rechange, et qu'on y établisse sans délai, ainsi qu'à Würzburg, un petit arsenal. En prescrivant des dispositions si importantes pour l'artillerie, vous sentez le besoin de les appliquer à l'état-major et à l'administration. Tous les prisonniers que l'on fera seront dirigés sur Forchheim ou Würzburg, selon les circonstances. Forchheim sera probablement le point souvent préféré.

Faites établir à Forchheim un hôpital de 500 malades et des magasins de vivres. Faites transporter à Forchheim les 35,000 rations de biscuit qui sont à Passau. Faites-y construire des fours, pour qu'il y ait une manutention, et faites-y réunir 15,000 quintaux de farine, de sorte qu'à tout événement mes corps pourraient se plier sur Forchheim ou Würzburg, et trouver là des cartouches, des vivres et un point d'appui.

Ces deux points sont également à l'abri d'un coup de main; ce sont deux places assez fortes. Il y a des Bavarois à Forchheim; on peut y envoyer une compagnie d'artillerie. J'imagine qu'il y en a deux compagnies à Würzburg, qui travaillent à armer la place. Faites donc passer des ordres à l'intendant général pour que tout soit ainsi dirigé. Je n'aime point Bamberg, parce que c'est un lieu ouvert, et qu'il est important que mes dépôts soient dans une petite
place.

Vous avez assez d'expérience de la guerre et de ma manière de diriger les opérations pour sentir l'importance des places de Forchheim et de Würzburg. Ajoutez que Forchheim a le double avantage de me servir contre la Bohême, et qu'il peut y avoir telle opération où, refusant entièrement ma gauche, je sois privé pour longtemps du point d'appui de Würzburg. Ainsi donc, faites construire dix fours à Würzburg et dix fours à Forchheim , et qu'on ne perde pas de temps à approvisionner ces places en farine, en eau-de-vie et en avoine.

Beaucoup de commandants vous deviennent inutiles dans la Bavière; nommez-en à ces places. Tracez une route pour l'artillerie d'Augsbourg à Forchheim, et d'Augsbourg à Würzburg.

Forchheim va-être dans cette nouvelle campagne ce qu'a été Braunau l'année passée.


Mayence, 30 septembre 1806, 3 heures et demie du matin

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, je n'ai reçu qu'aujourd'hui à minuit votre lettre du 25. Le général Songis a tort de s'excuser; un parc d'artillerie sans ponts est une chose trop absurde. Si ceux de Vienne ne valaient rien, il fallait en avoir de plus légers, ce que j'approuve fort. J'ai ordonné au général Rapp de diriger les vingt-cinq pontons de Strasbourg sur Bamberg; ils y seront rendus le 5 octobre, je l'espère. J'ai donné des ordres pour les bataillons du train qui sont en France et en Italie; je vous en envoie copie. J'ai donné de l'argent pour les remonter; je vous en envoie la note. L'idée du général Sonis d'acheter 1,000 chevaux n'en est pas moins excellente. Donnez ordre par un courrier extraordinaire, au directeur du parc, d'en acheter 2,000, s'il en trouve de bons. On ne saurait avoir trop de chevaux d'artillerie, et certainement j'ai aujourd'hui des charretiers à la Grande Armée pour servir 20,000 chevaux. Mais il est temps enfin de prendre un parti réel sur le parc. Je ne veux point non plus avoir 11 ou 1200 voitures à ma suite. Dites à Songis que c'est autant de pris par l'ennemi. Je ne veux pas plus de 400 voitures. Mais je n'entends pas que la moitié soit des caissons d'outils ou des effets d'artillerie des compagnies, etc. J'entends que ce soient des cartouches d'infanterie, des cartouches de canon, pour réparer les pertes, et avoir vingt ou trente pièces de canon de plus en batterie le jour d'une bataille. Sur ces 400 voitures, je n'en veux pas plus de 30 qui contiennent des objets de rechange du parc; le reste doit être cartouches et munitions. Telle est ma volonté. Alors ce parc me sera de quelque utilité, ne me gênera jamais, et, s'il retarde peu mes opérations, ce sera un retard raisonnable et selon la nature des choses. Écrivez donc au général Songis que, si j'avais 30,000 chevaux, je ne voudrais pas dans l'organisation de mon armée plus 400 voitures à mon parc.

Ainsi donc, que le général Songis fasse l'état des voitures et les dirige sur Bamberg, si elles sont encore à Augsbourg, ou à Würzburg, si elles sont sur la route; qu'il y ait au parc des munitions, des canons, des canonniers et une compagnie ou deux d'ouvriers, le conducteur général du parc et tout le personnel de l'artillerie qui n'est attaché à aucun corps d'armée. Ce parc me sera d'une immense utilité. Un atelier de réparation sera établi dans la citadelle de Würzburg, et un dans la citadelle de Forchheim. Un magasin de cartouches à canon et de cartouches d'infanterie sera formé à Würzburg, et un autre à Forchheim.

Les moyens du pays seront suffisants pour approvisionner rapidement ces deux dépôts. On peut même laisser à Augsbourg des munitions et des approvisionnements. A mesure que j'irai en avant, je choisirai un point central fortifié, et j'ordonnerai qu'on y fasse, avec les moyens du pays, des magasins; mais cela n'a rien de commun avec le parc mobile.

Ainsi donc mon parc doit être partagé en quatre : 400 voitures suivront l'armée avec une compagnie d'ouvriers, tous mes  pontonniers et tout le personnel de l'artillerie; un gros atelier de réparation sera formé dans la citadelle de Würzburg et à Forchheim; des ouvriers, des forges y seront envoyés; des magasins de cartouches, de rechanges et d'effets de toute espèce y seront réunis; mais de manière cependant qu'il reste à Augsbourg au moins le tiers de ce que j'y ai, de sorte que, soit que je me reploie sur Augsbourg, soit que je me reploie sur Forchheim, soit que je manœuvre sur Würzburg, je trouve dans ces places de quoi réapprovisionner mes caissons et réparer mon artillerie. Le parc réduit ainsi au simple nécessaire suivra l'armée.

Le général Songis me rendra compte tous les jours de ce qui s'y trouve, de ce qu'il fait, et je donnerai des ordres pour son réapprovisionnement et pour la formation de nouveaux dépôts. C'est ainsi qu'il est possible de faire la guerre; tout autre moyen est absurde.

Résumé. Indépendamment des ordres que vous transmettrez sur-le-champ au général Songis, transmettez-lui l'ordre d'acheter 2,000 chevaux. J'ai des charretiers à l'armée pour servir plus que ce nombre; mais ils ne doivent pas être employés comme domestiques, ils ne doivent pas être attachés aux caissons des officiers, des généraux. Je serai inexorable là-dessus, et je ne souffrirai pas que personne se serve des chevaux ni des caissons d'artillerie.


Mayence, 30 septembre 1806

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, je ne vois pas d'inconvénient que l'on occupe Neustadt. Ce qui m'avait fait porter une avant-garde à Koenigshofen, c'est que je pensais qu'il existait sur le territoire du pays, en avant de Koenigshofen, appartenant à la Bavière, une bonne position qui rendait maître des débouchés sur Meiningen et Hildburghausen. Mon intention n'étant pas de déboucher par Meiningen et Gotha, mais de faire ployer ma gauche sur Cobourg, il faut que les deux divisions du maréchal Lefebvre occupent une position en arrière de Neustadt, et qu'il fasse reconnaître une route telle qu'il puisse se porter, par une marche de flanc, qui sera dérobée à l'ennemi, sur le chemin de Würzburg à Cobourg, sans passer par Bamberg, pour ne pas faire confusion avec les autres corps d'armée. Il faut aussi qu'il y ait des détachements de cavalerie sur les hauteurs, entre Meiningen et Neustadt, jusqu'aux limites du territoire bavarois, afin d'empêcher, quand le moment sera arrivé, toute communication , et de pouvoir masquer le mouvement à l'ennemi , mon intention étant d'arriver à Saalfeld avant que l'ennemi s'y trouve en très-grande force. Envoyez donc un officier du génie reconnaître la frontière bavaroise jusqu'à Heldburg et même jusqu'au pendant des eaux qui est, je crois, au delà de Cobourg. Envoyez-en un autre reconnaître le pendant de eaux entre Meiningen et Melrichstadt, en avant de Neustadt. Que le maréchal Lefebvre réunisse son corps d'armée. Je n'aime point voir la division du général Gazan éparpillée dans les montagnes; c'est là l'affaire de quelques piquets ou, au plus, de quelques détachements; que sa division et son artillerie se réunissent en arrière de Neustadt; qu'il envoie des reconnaissances et des piquets de cavalerie sur la hauteur, comme je l'ai dit ci-dessus. J'attends ces deux reconnaissances, qui sont très-importantes.

Si vous avez même des outils à Würzburg, je ne serais pas éloigné d'avoir l'air de faire travailler à des redoutes sur les hauteurs, entre Meiningen et Neustadt, sur la hauteur du pendant des eaux et sur la limite du territoire wurtembergeois, également sur le pendant des eaux entre Kronach et Lobenstein. Toutefois il est nécessaire que le maréchal Bernadotte ait sur cette hauteur une avant-garde d'infanterie; il suffit qu'elle y soit placée le 4 Je suis fâché de n'avoir pas une reconnaissance de Kronach; je préférerais de beaucoup cette place, si elle est aussi bonne que Koenigshofen; faites-la armer et approvisionner sans délai.


Mayence, 30 septembre 1806

Au roi de Wurtemberg

Monsieur mon Frère, je reçois la lettre de Votre Majesté du 27, qu'un de ses officiers m'a apportée. Comme je pense qu'un courrier arrivera plus vite, je lui expédie ma réponse directement. Je serai fort aise de voir Votre Majesté. Voici mon itinéraire : je serai le 2 octobre à Würzburg et le 5 à Bamberg. J'aurai grand plaisir à m'aboucher dans les circonstances actuelles une heure avec elle. J'aurais été fort aise de pouvoir l'attendre à Mayence, si je n'étais le plus esclave de tous les hommes, obligé d'obéir à un maître qui n'a point de cœur : le calcul des événements et la nature des choses.

Je désirerais beaucoup que vos troupes pussent être rendues, du 10 au 12, du côté de Würzburg on de Bamberg. Si elle a à la main un millier d'hommes d'infanterie et quelques escadrons, elle peut les envoyer à Würzburg, où je les placerai en garnison jusqu'à ce que le corps puisse se réunir.

Si Votre Majesté se résout à faire une course aussi longue, nous pourrons convenir des arrangements relatifs au mariage que nous avons arrêté. Il me semble qu'il suffit que le cérémonial ait été réglé comme il doit se faire. Il faudra ensuite agir selon les circonstances. Quant à moi, Votre Majesté voit bien que je suis l'homme du monde qui, dans ce moment, peut faire le moins de calculs. Ce n'est pas que la guerre soit encore déclarée; je ne sache pas que M. Laforest ait encore quitté Berlin; on m'a annoncé un officier prussien, porteur d'une lettre du roi de Prusse; mais voilà trois jours qu'on m'en a parlé, et je ne le vois point venir.

Le grand-duc de Würzburg a adhéré à la Confédération.


Mayence. 30 septembre 1806

Au grand-duc héréditaire de Bade

Mon Fils, je reçois votre lettre du 27. J'approuve le désir que vous avez de faire la guerre. Je vous verrai avec plaisir près de moi. Vous pouvez vous rendre à Bamberg pour le 4 ou le 5 d'octobre et y envoyer vos chevaux. Si vous pouvez diriger sur-le-champ sur cette place votre régiment avec quelques escadrons de cavalerie et quelques pièces d'artillerie, cela sera convenable. Je laisserai, du reste, l'infanterie dans quelques places du côté de Bamberg, jusqu'à ce que
tout votre corps puisse se réunir. J'imagine que pour tous ces arrangements vous avez l'agrément du grand-duc. Pressez autant qu'il vous sera possible le départ de votre corps de troupes. Les princes de la Confédération se mettent en mouvement. Le prince Primat fournit seul 2,000 hommes. Il est donc bon de n'être pas trop en retard.


Mayence, 30 septembre 1806

Au roi de Wurtemberg

Monsieur mon Frère, je vous envoie un portrait qui, selon l'étiquette qui a été réglée, doit être remis par mon ministre le jour de l'audience que Votre Majesté lui accordera. J'ai pensé qu'elle serait bien aise de connaître un nouveau membre de sa famille qui désire bien faire sa connaissance et lui plaire. Il sers donc convenable que ce portrait soit rendu à mon ministre, pour qu'il puisse le remettre officiellement lorsqu'il sera présenté à la princesse.


Mayence, 30 septembre 1806

NOTE SUR LA DÉFENSE GÉNÉRALE DE L'EMPIRE, POUR L'ARCHICHANCELIER CAMBACÉRÈS

Le roi de Hollande est à Wesel; il a l'ordre de défendre depuis la Moselle jusqu'à la mer. Le maréchal Kellermann commande la réserve et les gardes nationales depuis la Moselle jusqu'à la Suisse.

Il y aura pour garnison à Mayence des dépôts qui auront bientôt une grande quantité de conscrits. Il y a quarante 3e bataillons ou dépôts le long du Rhin, lesquels reçoivent, soit par la conscription de 1806, soit par l'appel de la réserve, 30,000 conscrits.

Il y a à Paris deux régiments de ligne entiers, lesquels formeront en octobre, avec les troupes de Paris, un effectif de 8,000 hommes présents sous les armes. Il y a, soit à Paris, soit à Moulins, soit à Amiens, huit 4e escadrons de dragons, qui, avant le mois de novembre, auront 12,000 chevaux.

Les attaques du côté du Rhin ne peuvent être dangereuses pour l'intérieur. D'ailleurs, le roi de Hollande et le maréchal Kellermann sont munis d'instructions convenables, et de plus, étant aussi assuré que je le suis du midi de l'Allemagne, et me trouvant en situation d'être le premier averti de tout, je pourrai toujours envoyer à temps les ordres convenables.

L'ennemi peut débarquer en Hanovre. Le roi de Hollande se trouve à portée de faire face à tout si cet événement a lieu, et tous les corps qui se trouvent le long du Rhin appuieraient le mouvement du roi de Hollande.

L'ennemi peut débarquer à Boulogne; mais il y trouvera 15,000 hommes retranchés et qui sont, tant marins que fantassins, destinés à défendre ce poste important.

Le général Rampon réunit 6,000 gardes nationales à Saint-Omer. Dès l'instant où on saurait que les Anglais auraient réussi à opérer par force un débarquement, ce qu'ils ne peuvent faire qu'avec 30,000 hommes, on ferait partir promptement le maréchal Moncey, pour qu'il puisse réunir en toute hâte tout ce qu'il pourrait de gendarmerie de ces contrées, à Saint-Omer, et l'on dirigerait en poste sur la Somme les 8,000 hommes qui sont à Paris. Il faudrait que les Anglais fussent bien audacieux pour tenter cette entreprise, et le roi de Hollande en peu de jours se précipiterait sur eux.

Les Anglais peuvent débarquer à Cherbourg. Le général commandant la 14e division militaire a, dans cette partie, le 5e régiment d'infanterie légère. Ce régiment suffirait pour garnir les forts de Cherbourg. Les préfets mettraient en mouvement les gardes nationales, pendant que le maréchal Moncey serait envoyé pour rassembler sur un point toute la gendarmerie des départements voisins. D'une autre part, le général commandant à Rennes la 13e division militaire ferait marcher le camp volant de Pontivy et réuni- rait une grande partie des troupes qui sont dans sa division. Les 8,000 hommes qui sont à Paris se dirigeraient en poste vers Cherbourg. Ainsi l'ennemi ne réussirait pas à s'emparer des forts. S'il brûlait la ville et une frégate qui s'y trouve sur chantier, son entreprise n'en aurait pas moins été sans but, et dès lors insensée.

L'ennemi pourrait attaquer Brest. Le général commandant la 13e division militaire s'y jetterait avec les garnisons de cette division; tous les canonniers garde-côtes, ceux des régiments de la marine, se ploieraient dans la ville, où il se trouve plus de 10,000 marins et une grande quantité d'ouvriers qu'on armerait, et l'ennemi ne retirerait que de la honte d'une telle tentative. Il faut un siège en règle pour prendre Brest. Les troupes de Paris auraient le temps de se rendre en poste à Rennes. Le 31e régiment, qui est à Nantes, et ce que j'ai de troupes à Bordeaux se porteraient vers Brest. Une telle entreprise doit donc paraître extravagante.

Dans la saison actuelle, l'ennemi ne peut rien tenter contre Bordeaux, ni contre Belle-Île.

Au surplus, le remède à tout, c'est le prompt rassemblement de la gendarmerie, les compagnies de réserve départementales, la formation des gardes nationales, et l'envoi soudain du corps central qui est à Paris.

Une entreprise contre Toulon de la part des ennemis serait également folle. Indépendamment du régiment de la marine, des canonniers garde-côtes, des ouvriers, des marins, de la gendarmerie, des douanes, il y a le régiment d'Isembourg, fort de 3,000 hommes, et un bataillon du 32e régiment d'infanterie légère; tout cela dans Toulon mettrait cette place à l'abri de toute entreprise. Il faudrait 40,000 hommes aux ennemis pour l'attaquer, et il n'est pas probable qu'ils les y voulussent employer avec aussi peu de chance de réussir.

Ce qu'il y a de plus probable, c'est que l'ennemi débarquera en Hanovre. La saison n'est pas favorable pour un débarquement en Hollande, ni pour débarquer à Boulogne, et cette place est à l'abri de tout événement funeste, tant parce qu'elle est fortifiée qu'à cause du corps nombreux qui la défend. A mon avis, cependant, de tout ce que l'ennemi peut entreprendre, c'est ce qu'il y a le plus à craindre, car il ne faut qu'un succès d'un moment pour que l'ennemi détruise la flottille et le port, et puisse ensuite se retirer.

On doit croire que, dans la saison où nous entrons, l'ennemi n'essayera rien de sérieux, parce qu'il n'aurait plus la probabilité de pouvoir se rembarquer.

M. l'archichancelier Cambacérès doit écrire tous les jours au roi de Hollande, quelquefois au maréchal Brune.

J'imagine que le ministre de la marine a toujours assez de vivres à Toulon, à Brest et à Cherbourg, pour que ces places ne puissent se plaindre d'en manquer en peu de temps, en cas d'événements.

Si l'ennemi débarque soit à Boulogne, soit sur tout autre point important de la France, on devra exécuter ce qui est prescrit dans la présente instruction, et M. l'archichancelier Cambacérès en préviendrait sur-le-champ le roi de Hollande afin que, laissant au général Michaud le commandement des troupes qui lui obéissent en ce moment, il se rendît en poste vers le lieu du débarquement pont s'opposer aux progrès de mes ennemis.


Mayence. 30 septembre 1806

Au général Junot

Monsieur le Général Junot, les 15e et 58e régiments d'infanterie légère doivent être entièrement réunis à Paris. Mon intention est qu'ils fassent peu de service, et que ce peu de service soit fait par régiment et par semaine, c'est-à-dire que pendant huit jours un régiment n'en fasse pas du tout. Vous ferez tirer à la cible les sous-officiers et les soldats. Vous porterez une grande attention à l'instruction des conscrits et à la bonne organisation de ces deux corps, afin qu'au moindre événement je puisse les avoir disponibles. Ils vont recevoir des conscrits; j'espère que ces deux régiments feront 6,000 hommes à eux deux; les colonels et officiers sont bons; ce doit faire, d'ici à un mois, deux très-beaux corps. Soignez aussi la garde de Paris, car je pense envoyer ces régiments à Boulogne, à Cherbourg, en Bretagne; et, si l'armée de Hollande, qui est à Wesel, avait besoin d'être renforcée, mon intention est que ces deux régiments, le 15e et le 58e, partent en poste pour les points menacés. Ce serait un renfort de 8,000 hommes qui ne serait pas indifférent.  Il est même possible qu'il y ait des événements qui me mettent dans le cas de vous faire marcher avec ces troupes. Vous voyez qu'il est important d'y donner tous vos soins.

Vos dépôts de dragons auront bientôt 2,000 hommes. J'y comprends celui du 4e qui est à Moulins, et celui du 10e, qui est à Amiens. Dans le cas où mes troupes seraient obligées de marcher, on rassemblerait des gendarmes qui feraient le service à Paris,. D'ailleurs les 3e bataillons que vous avez vont bientôt avoir assez de conscrits pour suffire à la police de Paris. Portez un grand soin à tous ces dépôts.


Mayence, 30 septembre 1806

INSTRUCTION POUR LE MARÉCHAL KELLERMANN, COMMANDANT L'ARMÉE DE RÉSERVE SUR LE RHIN, A MAYENCE

Il faut que M. le maréchal Kellermann ait 4 à 6,000 gardes nationales soldées à Mayence. Il en cantonnera 12 à 1500 à Cassel, avec une compagnie entière d'artillerie, un officier supérieur pour y commander, un adjoint à l'état-major, un officier du génie et un officier d'artillerie. Tous ces militaires auront l'ordre le plus positif de ne point découcher et de ne point sortir de Cassel. Il faudra exercer ces gardes nationales à la manœuvre du canon, afin qu'elles puissent aider l'artillerie. On placera 100 hommes à l'île de Saint-Pierre, 50 hommes dans le réduit qui défend l'inondation, une compagnie dans chaque fort détaché, et ils pourront être relevés toutes les semaines, ou même plus souvent si cela est nécessaire. La garnison de Cassel fournira 200 hommes aux redoutes de l'embouchure du Mein. Ils seront relevés comme les précédents. Un officier commandera dans l'île de Saint-Pierre et un autre à l'embouchure du Mein. On ne devra pas considérer les troupes qui sont à Mayence comme devant y rester, et la défense de cette place est spécialement affectée aux gardes nationales et à quatre compagnies d'artillerie et, en cas d'événements, aux six bataillons de réserve, qui, au moyen des conscrits qu'ils vont recevoir, auront un effectif de 4,000 hommes.

Le 8e corps de la Grande Armée, composé des divisions Dupas et Lagrange, sera réuni à Mayence dans la première quinzaine d'octobre, et destiné à prendre position à Francfort. Il agira suivant des circonstances étrangères à ce qui concerne la garnison de Mayence.

Le maréchal Kellermann correspondra avec le roi de Hollande, qui est à Wesel. Il doit ne laisser passer le pont de. Mayence à aucun soldat isolé qui voudrait joindre la Grande Armée; mais il fera réunir tous les soldats voyageant seuls, soit qu'ils sortent des hôpitaux, soit qu'ils aient quelque autre raison valable pour voyager ainsi, et, lorsqu'ils seront au nombre de 100, il les fera partir sous la conduite d'un ou plusieurs officiers, et aura soin, en les dirigeant sur l'armée, qu'ils soient munis du nécessaire. La route de l'armée continuera à être de Mayence à Würzburg; mais il se pourrait qu'on ordonnât que qui que ce soit ne passât davantage sur le pont Mayence, et que la route de l'armée fût de Mannheim à Würzburg. Il est donc convenable d'avoir vis-à-vis de Mannheim un adjoint qui recevra des ordres du maréchal Kellermann et l'instruira de tout ce qui viendra à sa connaissance. Il sera utile que cet adjoint ait avec lui une compagnie de gardes nationales; et une brigade de gendarmerie pourra aussi lui être nécessaire, afin de l'aider à réprimander toute espèce de désordre et pour lui prêter main-forte, etc.

Il y aura en outre à Mannheim même un commandant d'arme dépendant de la Grande Armée et qui correspondra avec le major-général. Il faut que le maréchal Kellermann active, autant que faire se pourra, l'habillement et surtout l'instruction des conscrits; lorsqu'ils seront à l'école de peloton, on les fera tirer à la cible; en temps dg guerre, c'est ce qu'il y a de plus pressé. Il faut s'attacher avec un soin très-scrupuleux à leur bien apprendre à nettoyer leurs fusils et à bien placer les pierres de leurs fusils.

Quant à ce qui concerne la cavalerie, l'ordre est donné pour qu'on n'achète pas de chevaux au-dessous de l'âge de cinq ans. Je préfère des chevaux de 4 pieds 3 pouces, ayant cinq ou six ou sept ans, et il y a en France un grand nombre de chevaux de cette espèce.


Mayence, 30 septembre 1806

Au maréchal Kellermann

Mon Cousin, les chasseurs et les grenadiers des gardes nationales destinés à la garde de la place de Mayence seront habillés sur leur solde et comme ils l'entendront. Mon intention est que le trésor ni la ville ne fassent aucuns frais pour cet objet. Les gardes nationales ne sont pas des troupes de ligne; il y en a beaucoup qui sont déjà habillées, et la rigidité de l'uniforme n'est pas ici de saison.


Mayence, 30 septembre 1806

NOTE POUR M. DE TURENNE

M. de Turenne partira dans la journée pour porter une lettre au roi de Hollande; il suivra la rive gauche du Rhin. Cette dépêche est de la plus grande importance. Il la lui remettra en main propre et rapportera sa réponse. Quand il aura remis sa lettre, il passera à Düsseldorf; il verra l'officier qui y commande pour le grand-duc de Berg, pour savoir s'il a des renseignements à donner. Quand il saura ce qui s'y fait et ce qui s'y dit, il reviendra à Mayence pour savoir quelle est la route qu'il doit prendre pour rejoindre le quartier général.


Mayence, 30 septembre 1806

Au roi de Hollande

Je vous expédie M. de Turenne, qui est officier d'ordonnance près de ma personne; il vous remettra en main propre la présente, qui a pour objet de vous faire connaître le plan d'opérations que je me propose de suivre. Il est probable que les hostilités commenceront le 6 du mois d'octobre.

PREMIÈRE NOTE

Mon intention est de concentrer toutes mes forces sur l'extrémité de ma droite, en laissant tout l'espace entre le Rhin et Bamberg entièrement dégarni, de manière à avoir près de 200,000 hommes réunis sur un même champ de bataille. Si l'ennemi pousse des partis entre Mayence et Bamberg, je m'en inquiéterai peu, parce que ma ligne de communication sera établie sur Forchheim, qui est une petite place forte, et de là sur Würzburg. Il deviendra donc nécessaire que vous fassiez passer les courriers les plus importants que vous aurez à m'expédier par Mannheim, et de là ils prendront langue à Forchheim, et m'arriveront de la manière la plus sûre. La nature des événements qui peuvent avoir lieu est incalculable, parce que l'ennemi, qui me suppose la gauche au Rhin et la droite en Bohème et qui croit ma ligne d'opération parallèle à mon front de bataille, peut avoir un grand intérêt à déborder ma gauche, et qu'en ce cas je puis le jeter sur le Rhin. Occupez-vous de mettre Wesel dans le meilleur état possible, afin que vous puissiez, si les circonstances le demandent, faire repasser toute votre armée sur le pont de Wesel et longer le Rhin, afin de contenir les partis, et qu'ils ne puissent aller au delà de cette barrière. Le 10 ou le 12 octobre il y aura à Mayence le 8e corps de la Grande Armée, fort de 18 à 20,000 hommes. Son instruction sera de ne pas se laisser couper du Rhin, de faire des incursions jusqu'à la hauteur de Francfort; mais, en cas de nécessité, de se retirer derrière le Rhin et d'appuyer sa gauche à vos troupes. 

DEUXIÈME NOTE

Les observations de ma première note, qui est ci-dessus, sont toute de prévoyance. Mes premières marches menacent le cœur de la monarchie prussienne, et le déploiement de mes forces sera si imposant et si rapide, qu'il est probable que toute l'armée prussienne de Westphalie se ploiera sur Magdeburg, et que tout se mettra en marche à grandes journées pour défendre la capitale. C'est alors, mais alors seulement, qu'il faudra lancer une avant-garde pour prendre possession du comté de la Marck, de Münster, et d'Ost-Frise, au moyen de colonnes mobiles qui se ploieraient au besoin sur un point central. Il en résulterait que l'ennemi ne tirerait ni recrues ni ressources du pays, et que vous pourriez en tirer, au contraire, quelques avantages. Vous devez sentir que la masse vos forces ne doit point s'éloigner de Wesel, afin que de là vous pussiez défendre votre royaume et les côtes de Boulogne, si les circonstances l'exigeaient. Pour la première époque de la guerre, vous n'êtes qu'un corps d'observation, c'est-à-dire que, tant que l'ennemi n'a pas été jeté au delà de l'Elbe, je ne compte sur votre corps que comme sur un moyen de diversion et pour amuser l'ennemi jusqu'au 12 octobre, qui est l'époque où mes opérations seront démasquées; et aussi pour qu'un corps ennemi, qui se trouverait coupé et qui ne verrait d'autre ressource que de se jeter en Hollande ou en France, n'y pût pénétrer; ou enfin pour qu'en cas d'un événement majeur et funeste, tel que pourrait l'être une grande bataille perdue, vous puissiez, pendant que j'opérerais ma retraite sur le Danube, défendre Wesel et Mayence avec votre armée et le 8e corps de la Grande Armée, qui ne s'éloignera jamais de Mayence, et empêcher en même temps l'ennemi de passer le Rhin et de piller mes États.

TROISIÈME NOTE

Il est nécessaire que vous correspondiez fréquemment avec le maréchal Brune ainsi qu'avec le Texel, pour pouvoir être sur les côtes, si les Anglais y débarquent, ce que je ne crois guère probable. Il est plus vraisemblable qu'ils enteront de débarquer en Hanovre, et qu'en se réunissant aux Suédois ils y auraient bientôt 25,000 hommes. N'ayant plus de craintes alors pour la Bretagne, pour Cherbourg, ni pour Boulogne, j'ordonnerais au corps de 8,000 hommes que j'ai à Paris de venir en poste vous renforcer, ce qui serait une affaire de dix jours. Débarrassé vous-même de toute appréhension, vous pourriez vous faire renforcer par les troupes du camp de Zeist, et, en cas de nécessité absolue, la totalité ou partie du 8e corps d'armée quitterait Mayence pour se rendre, à marches forcées, par la route du Rhin, auprès de vous. Ces moyens réunis vous donneraient une quarantaine de mille hommes, qui occuperaient assez les Suédois et les Anglais pour que mon armée n'en fût point attaquée. En tout ceci, je vais aussi loin que la prévoyance humaine le puisse permettre. D'ailleurs, malgré l'éloignement où nous pourrions nous trouver l'un de l'autre, assuré comme je le suis du midi de l'Allemagne, je pourrai toujours vous envoyer, en peu de jours, des instructions analogues aux circonstances.

QUATRIÈME NOTE

Une fois le premier acte de la guerre fini, il sera possible que je vous charge de conquérir Cassel, d'en chasser l'Électeur et de désarmer ses troupes. Le 8e corps de la Grande Armée, une portion de la vôtre, et peut-être même un détachement de mon armée, auquel je donnerais cette destination, vous mettraient à même d'effectuer cette opération. L'Électeur veut être neutre; mais cette neutralité ne me trompe pas, quoiqu'elle me convienne. Vous devez l'entretenir dans les sentiments qu'il manifeste à ce sujet, sans compromettre cependant votre caractère. Des paroles d'estime pour sa personne dites à propos, la manifestation fréquente de l'intention où vous êtes de vous conformer aux ordres que vous avez de bien vivre avec lui, de bons procédés de tout genre, le maintiendront encore quelque temps dans cette neutralité à laquelle il a recours. Quant à moi, j'aime fort à voir à mon ennemi 10 à 12,000 hommes de moins sur un champ de bataille où ils pourraient être. Mais, je répète, le premier résultat d'une grande victoire doit être de balayer de mes derrières cet ennemi secret et dangereux. Je ne vous dis ceci qu'afin que vous étudiiez le pays, et vous voyez le cas que je fais de vous par la confiance que je vous montre.

A tout événement la garnison de Wesel doit être composée du 22e de ligne que j'y ai laissé, des quatre compagnies d'artillerie qui y sont, du bataillon du grand-duc de Berg, et, s'il est nécessaire, d'un millier d'hommes à retirer des dépôts de la 26e division militaire, en organisant 150 hommes par dépôt et en ayant bien soin ne placer avec ce nombre d'hommes que deux officiers, deux sergents et quatre corporaux par dépôt; afin que, si la place devait être prise,  je n'eusse pas à regretter un grand nombre d'officiers et surtout le déficit que cela produirait dans mes corps à cause de la non-formation des conscrits. Je laisse le général Marescot premier inspecteur de l'arme du génie en deçà du Rhin, avec l'ordre d'être soit à Mayence, soit à Wesel, à Venloo, à Anvers, à Juliers et à Maëstricht, pour fortifier ces différents points et prendre les mesures provisoires que les circonstances commanderont. Vous le verrez sous peu à Wesel.

Il me serait impossible de vous donner des instructions plus détaillées. Ayez de vos officiers d'état-major au quartier général du maréchal Brune à Boulogne, et qu'il s'en trouve au vôtre de l'état-major du maréchal Brune. Tenez-vous au courant de toutes les nouvelles que le maréchal Kellermann pourra rassembler à Mayence. Écrivez fréquemment à M. l'archichancelier Cambacérès et au ministre Dejean, afin d'en recevoir des nouvelles. Écrivez même quelquefois pour le même objet au général Junot, qui commande mes troupes à Paris. N'exposez jamais votre corps d'armée et ne hasardez pas votre personne, puisque vous n'avez qu'un corps d'observation. Le moindre échec que vous éprouveriez me donnerait de l'inquiétude; mes mesures en pourraient être déconcertées, et cet événement mettrait sans direction tout le nord de mon empire. Quels que soient, au contraire, les événements qui m'arriveront, si je vous sais derrière le Rhin, j'agirai plus librement; et même, s'il m'arrivait quelque grand malheur, je battrais mes ennemis quand il ne me resterait que 50,000 hommes, parce que, libre de manœuvrer, indépendant de toute ligne d'opération et tranquille sur les points les plus importants de mes États, j'aurais toujours des ressources et des moyens.

Il est possible que les événements actuels ne soient que le commencement d'une grande coalition contre nous et dont les circonstances feront éclore tout l'ensemble; c'est pourquoi il est bon que vous songiez à augmenter votre artillerie. Les troupes ne manqueront pas; elles vous viendront de tous côtés; mais elles n'amèneront pas avec elles les attelages qu'elles auront besoin d'avoir. Vous avez aujourd'hui trente pièces d'artillerie attelées : c'est plus qu'il ne vous en faut à la rigueur, mais ce n'est pas assez en cas d'événements. Attachez-vous à vous procurer insensiblement des attelages en bon ordre, de telle sorte que vous puissiez en réunir soixante vers le mois de novembre. Comme il nous faut un chiffre, je charge le général Clarke, secrétaire de mon cabinet, de vous en envoyer un. Mais ne chiffrez que ce qui est important.


Mayence, 30 septembre 1806, minuit

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, j'approuve la nomination du général que vous avez nommé pour commander Würzburg. Je n'ai point la reconnaissance de Kronach. Cette position, avec celles de Würzburg et de Forchheim, assurerait bien mes derrières. Kronach fortifié serait l'appui de mon avant-garde; et, ma droite appuyée à Forchheim, ma gauche à Würzburg, je serais environné de places fortes. Faites donc armer ces trois places.


Mayence, 30 septembre 1806

Au général Marescot

Monsieur le Général Marescot, j'approuve beaucoup votre projet relatif aux caissons. Présentez-moi, ce soir même, un projet de décret au moyen duquel les caissons que vous proposez seront attachés aux bataillons de sapeurs, et qui réglera le mode de leur achat, de leur entretien, etc. Il est temps de prendre un parti relativement à ces caissons, dont le service est indispensable. Il faut que le génie ait avec lui tout ce dont il a besoin. Il sera bon de mettre dans les caissons ce qui convient relativement aux outils de mineurs. On me dit qu'il est parti de Strasbourg pour Würzburg beaucoup d'outils. Si cela est vrai, il suffira peut-être d'envoyer à Würzburg environ 15,000 outils qu'on pourra charger sur douze à quinze prolonges d'artillerie qu'on attellera avec des chevaux de réquisition, et ces prolonges seront alors attachées, pendant cette campagne, au service du corps du génie. Ainsi les déplacements et les versements d'outils d'une place sur l'autre ne deviendront plus funestes au service. On saura où chaque chose aura été placée; et, sans un ordre bien établi pour tous ces objets de détail, tout se perdrait, les dépenses pour l'État seraient énormes, et je finirais cependant par ne rien avoir.