1 - 6 Avril 1807


Osterode, 1er avril 1807

A l'Impératrice

Je reçoit ta lettre du 20, mon amie; je vois avec peine que tu sois malade. Je t'ai écrit de rester à Paris tout le mois d'avril, et d'aller à Saint-Cloud le 1er mai. A la Malmaison, tu peux aller passer les dimanches et un jour ou deux. A Saint-Cloud, tu peux avoir tes cercles à l'ordinaire.

Ma santé est bonne. Il fait encore assez froid ici. Tout est tranquille. J'ai nommé la petite princesse, Joséphine. Eugène doit être bien content.

Tout à toi.


 Osterode, 1er avril 1807

A M. Cambacérès

Mon Cousin, je reçois votre lettre du 21 mars. Je vous remercie de ce que vous me dîtes relativement à l'accouchement de la vice-reine d'Italie. Il faut que vous demandiez l'acte de naissance de l'enfant, pour le faire inscrire sur les registres de ma famille; s'il est nécessaire pour cela d'une lettre close, vous m'écrirez.

Je désire que vous réunissiez un conseil qui sera composé des ministres des finances, du trésor public et de l'administration de la guerre, et de MM. Defermon, Lacuée, Bérenger et Cretet, si ce dernier est à Paris. Vous leur communiquerez la note ci-jointe, et vous me ferez connaître le résultat des opinions de ce conseil.


Osterode, 1er avril 1807

NOTE

Le désir de ne pas avoir à escompter quatre-vingts millions d'obligations a été souvent exprimé. Le moment d'opérer ce grand bien parait être arrivé.

Ne serait-il pas possible de donner à l'exercice 1809 toutes les obligations de 1808 dont le payement échoit en 1809 ? Cela formerait pour 1808 une diminution de ressources de quatre-vingts millions, et cela ne produirait pour 1809 aucune augmentation, puisque les obligations de 1809 qui échoient en 1810 seraient affectées à l'année 1810. Par ce moyen, les obligations écherraient toutes dans les douze mois le trésor gagnerait cinq à six millions de frais de négociation nos manufactures et notre commerce feraient un gain immense, puisqu'il y aurait quatre-vingts millions de capitaux vacants qui, ne pouvant trouver d'emploi au trésor, seraient placés dans le commerce.

Ce pas paraît être le premier de tous. Comment y arriver ? Voilà la question.

Il y a deux manières d'y arriver. La première en diminuant les dépenses de 1808 de quatre-vingts millions. Il sera possible de payer la solde de la Grande Armée avec les revenus des pays conquis, mais ce ne peut être qu'une économie de quarante millions. C'est au ministre de la guerre à voir à combien se monteront les dépenses de la guerre cette année. En supposant que la Grande Armée reste en Allemagne toute l'année, et que la France n'ait à payer que la solde, si le ministre, avec cette donnée, procure des économies, on pourra diminuer le budget.

Si, au contraire, la création de cinq nouvelles légions, les dépenses de toute espèce qu'il faut faire, soit pour la levée des conscrits, soit pour l'achat des chevaux, etc., ne lui font pas espérer d'économie, alors il sera convenable de voir s'il ne conviendrait pas de faire un emprunt à cinq pour cent.

La réussite de cet emprunt ne peut être douteuse, car il sera couvert par la caisse d'amortissement, qui a déjà une cinquantaine de millions appartenant à la Grande Armée. Cinquante autres seront le résultat de cette guerre, surtout si l'on ne fait aucune diminution dans le budget. On subviendrait au service par soixante ou quatre-vingts millions d'emprunt, et on laisserait soixante ou quatre-vingts millions de l'exercice 1808 à l'exercice 1809.


Osterode, 1er avril 1807

A M. Mollien

Monsieur Mollien, j'ai fait payer la solde à l'armée, pour les mois d'octobre, novembre, décembre et janvier, sur les fonds provenant des pays conquis. Je ferai également payer les mois de février, mars, avril, mai et juin. Mais beaucoup d'officiers se font payer en bons sur le caissier général; d'où il résulte qu'une partie de la solde se trouve payée par le trésor public. Cela n'est propice qu'à faire beaucoup d'embarras. Mon intention est que la solde soit tout entière passe sur les revenus des pays conquis; que vous soldiez cependant, comme de raison, les mandats du payeur général, et que vous lui envoyiez beaucoup de ces billets, mais que vous ayez avec lui une correspondance suivie pour qu'il vous rembourse en bonnes lettres de change les bons du caissier général, de sorte que la solde ne paraisse en rien sur les comptes du trésor public, du moins jusqu'à ce que j'aie pris une mesure définitive.

Présentez-moi donc un projet de décret par lequel j'ordonnerai 

1° Que, jusqu'à ce que j'y aie statué définitivement, la solde d'octobre, novembre, décembre, janvier, février, mars, avril, mai et juin sera payée sur les fonds provenant des pays conquis;

2° Que tous les fonds que j'ai mis à la disposition du ministre de la guerre pour le service de la Grande Armée, par mes décrets des ..... qui ne sont pas faits par le trésor public, seront payés également sur les fonds provenant des pays conquis;

3° Que les mandats du caissier général qui ont été envoyés au payeur général pour son service, montant à la somme de ............. seront remboursés par le payeur général à la trésorerie;

4° Que le million de lettres de change créées par mon décret du ..... de Varsovie, sera également remboursé par le payeur général à la trésorerie;

5° Enfin que tous les mandats qui seront envoyés au payeur général, du moment qu'il les aura donnés en payement, seront remboursés par lui à la trésorerie, qui devra être sa caisse de service.

Vous ajouterez que je me réserve, au premier conseil d'administration que je tiendrai à Paris, de statuer définitivement, et que j'entends que la solde de l'armée continue à être faite par le Trésor public et à être mise en réserve dans ses caisses en France, comme si rien n'avait été payé.


Osterode, 1er avril 1807

A M. Portalis

Je reçois votre lettre du 20. Je vois avec une vive peine la mort de l'évêque de Vannes.


Osterode, 1er avril 1807

Au vice-amiral Decrès

Le roi de Hollande désirerait que , dans les circonstances actuelles, vous ne missiez aucun vaisseau d'Anvers à l'eau. Si cela peut offrir un point vulnérable de plus aux attaques des Anglais, il est certain qu'il ne faut pas s'y exposer. Cependant, si le trajet d'Anvers à Flessingue, où je les considère comme en sûreté, devait être court, je ne vois pas ce qu'il y aurait d'exposé.

Mon arsenal de Venise va mal. Je vous prie de m'envoyer :

1° Un projet de décret pour organiser la marine de mon royaume d'Italie d'une manière économique et telle qu'il serait à désirer que cela fût en France; 

2° de me proposer un honnête homme que je puisse faire préfet et chef de l'administration de terre, de mer et civile; tout cela comme roi d'Italie. 

Il me parait que Berlin va trés-mal et gaspille.


Osterode, 1er avril 1807

Au général Marescot

QUESTIONS SUR LES MOYENS DE DÉFENSE D'ALEXANDRIE.

1° En supposant que cette place put être attaquée au mois de juin, quels sont les moyens à employer pour la mettre en état de défense, pour armer les couronnes qui entourent la place et les rendre susceptibles de se défendre, et pour mettre aussi la vieille enceinte dans le meilleur état possible et l'armer également ?

2° Peut-on , dés à présent, remplir d'eau les fossés ? Combien de temps cette opération exigerait-elle, et combien en faudrait-il pour les mettre à sec ?

3° Résulterait-il quelques inconvénients pour la salubrité de la ville en laissant quelque temps les eaux dans les fossés de la place ?

4° Enfin, à quelle époque pourra-t-on se servir du pont éclusé et quand sera-t-il terminé ? Quand les bois nécessaires à l'éclusement (sic) seront-ils prêts ?


Osterode, 1er avril 1807

Au maréchal Berthier

Mettez toute l'île de Nogat sous les ordres du général Vedel.

Donnez ordre qu'à dater du 5 avril, Marienburg et l'île de Nogat ne fourniront rien individuellement aux corps d'armée, ni même au 10e corps. Vous ferez comprendre au maréchal Lefebvre que, l'armée étant réunie là, il faut qu'il se nourrisse par la gauche. Vous ordonnerez que toutes les réquisitions soient faites par le général Vedel. Tout ce qu'en tirait le 4e corps, il le tirera d'Elbing.

Vous ordonnerez au général Lasalle de mettre un escadron à disposition du général Vedel pour la police de l'île de Nogat. Le général Vedel aura soin de mettre de l'ordre et de correspondre avec vous.

Vous ferez mettre à l'ordre : "Sa Majesté l'Empereur a déjà ordonné que le payeur général verssât dans la caisse des payeurs des corps d'armée, pour être remis par ceux-ci aux quartiers-maîtres des régiments, les fonds nécessaires pour payer la solde des mois d'octobre, novembre, décembre et janvier. Elle réitère ledit ordre.

Sa Majesté ordonne que le payeur général fasse sur-le-champ les fonds aux payeurs généraux des corps d'armée, et ceux-ci aux quartiers-maîtres, pour payer la solde de février, ainsi que l'indemnité accordée aux officiers en Pologne.


Osterode, 1er avril 1807

Au maréchal Lefebvre, à Praust

Le jeune Polonais Chlapowski a été fait prisonnier dans la dernière sortie de la garnison de Danzig. Comme je m'intéresse particulièrement à ce jeune homme, je désire que vous le réclamiez et que vous demandiez à M. Kalkreuth son échange. Vous lui direz que c'est mon un intérêt particulier que je porte à ce jeune homme que je connais; il est capitaine dans un des régiments de lanciers de la division Dombrowski.


Osterode , 1er avril 1807

Au général Bertrand

Quand vous aurez parcouru tout le bas de la Vistule pour connaître de quelle manière la Nogat coule dans le Frische-Haff, et qu'enfin vous croirez avoir une idée précise de tout le pays, vous pourrez me venir joindre.

Ne pourrait-on pas placer sur nos bateaux une pièce de 12, afin d'être à peu près de même force que les chaloupes anglaises ?


Osterode, 1er avril 1807

Au général Clarke

Voici les renseignements que j'ai reçus sur le partisan Schill.

Le 27 mars, le général Henry (Wolodkowicz, général de brigade polonais), à la tête des Polonais, s'est mis à la poursuite de ce partisan, l'a chassé de Lauenburg, de Stolpe et de Schlawe. Schill, avec la moitié de son monde, est rentré dans Kolberg par des chemins détournés. L'autre moitié s'est portée sur la gauche de la place et a été coupée par le général Loison. Soixante et dix hommes sont poursuivis du côté de Rügenwalde par le général Henry.


Osterode, 1er avril 1807

Au général Clarke

Il ne faut pas laisser le contingent de Saxe-Weimar à Stettin; je ne m'y fie pas assez pour cela; il doit être sous les ordres du général Belair, pour protéger les communications entre l'Oder et la Vistule.

J'ai vu avec plaisir que vous avez dirigé le 24e de chasseurs sur Thorn. Je désire que vous dirigiez le 3e sur Thorn; une fois à Kolberg, je ne pourrais plus les retirer. Il doit avoir déjà 400 chevaux. Envoyez donc ordre au détachement que vous aviez dirigé sur Kolberg de revenir sur Thorn,

Le général Loison doit avoir de la cavalerie hollandaise que lui a envoyée le maréchal Mortier.

J'ai ordonné que le général Tauenzien, Prussien, ne sortît point de France.


Osterode, 1er avril 1807

Au général Caulaincourt, Grand Écuyer

M. Labiffe, officier d'ordonnance, partira ce soir à six heures pour m'apporter à Finkenstein les dépêches qui seraient arrivées pour moi ou pour le major général; il m'apportera aussi l'état des convois arrivés dans la journée, la situation des subsistances et de la fabrication d'Osterode, ainsi que l'état des effets d'habillement, souliers et fusils arrivés. Si, à six heures, aucune dépêche n'était arrivée pour moi, ni pour le major général, il pourra attendre jusqu'à neuf heures. Il s'arrangera de manière à avoir un cheval en relais et à arriver promptement.

M. Bongars partira demain à six heures du matin, pour m'apporter les dépêches et les états indiqués ci-dessus pour M. Labiffe; il verra avant de partir si les fours cuisent. Si, à six heures, il n'y avait pas de dépêches, il attendrait jusqu'à neuf heures du matin.

M. Tascher partira demain à trois heures après midi, et, s'il n'y avait pas de dépêches, il pourrait attendre jusqu'à sept heures soir. Il m'apportera les états indiqués ci-dessus pour M. Labiffe.

M. Maulnoir se rendra de suite à Mohrüngen, où il fera connaître au général Legrand que je suis à Finkenstein, afin qu'il dirige en conséquence les courriers du maréchal Soult. Il se rendra de là chez le maréchal Soult pour la même chose. Il ira ensuite aux avant-postes, et demain, à neuf heures du matin, quand les reconnaissances du matin seront rentrées, il prendra les ordres du maréchal Soult, et me rejoindra à Finkenstein, où il tâchera d'arriver de bonne heure. Il s'informera aussi de quelle manière vivent les troupes et de la situation des magasins de Liebstadt et de Mohrüngen.


Finkenstein, ler avril 1807

(Le château de Finkenstein, construit pour le comte du même nom, gouverneur de Frédéric II, appartient alors au comte Dohna, grand-maître de la Maison du roi de Prusse. "On peut considérer le temps de séjour de l'Empereur dans ce palais comme celui où son génie se développa le plus. Il y déploya une énergie miraculeuse. Il s'occupait personnellement de tout, il gouvernait la France...." - C. Hendelsman, Napoléon et la Pologne.)

Au général Songis

Envoyez de l'argent au commandant de l'artillerie devant Danzig. Les pièces venues de Graudenz ne sont approvisionnées qu'à 150 coups; vous savez que c'est comme s'il n'y avait rien.


Finkenstein, 2 avril 1807

Mon Amie, je t'écris un mot. Je viens de porter mon quartier général dans un très-beau château, dans le genre de celui de Bessières, où j'ai beaucoup de cheminées, ce qui m'est fort agréable; me levant souvent la nuit, j'aime à voir le feu.

Ma santé est parfaite. Le temps est beau, mais encore froid. Le thermomètre est de quatre à cinq degrés.

Adieu, mon amie; tout à toi.


Finkenstein, 2 avril 1807

A M. Cambacérès

Mon Cousin, je reçois votre lettre du 22 mars. Il n'y a rien ici de nouveau. Je suis venu porter mon quartier général à Finkenstein, qui est une très-belle maison de campagne appartenant à M. le comte de Dohna, grand maître de la Maison du roi de Prusse. Vous pouvez faire mettre dans le Moniteur la note suivante.

"D'Elbing. - On nous annonce l'Empereur. Nous l'attendons d'un moment à l'autre ici. Il y a beaucoup de cavalerie cantonnée dans les environs de notre ville, et tous nos ateliers sont occupés à travailler pour cette cavalerie. On estime à 4,000 le nombre des chevaux que les Francais ont tirés de l'ile de Nogat, qui est sans contredit un des plus beaux pays de la Prusse. Des trains considérables d'artillerie sont arrivés de Varsovie par la Vistule devant Danzig."


Finkenstein, 2 avril 1807

DÉCISION

Le ministre de l'intérieur propose à l'Empereur d'établir au Collège de France quatre nouvelles chaires d'Histoire de France, d'Éloquence française, de Poésie française, d'Histoire littéraire et critique.

Histoire militaire de France;
Histoire de la législation en France;
Chaire d'éloquence, poésie;
Histoire littéraire critique.


Finkenstein, 2 avril 1807

A M. de Talleyrand

Monsieur le Prince de Bénévent, je reçois votre lettre du 30 à neuf heures du soir, où je vois que les affaires avec la cour de Vienne traînassent toujours.

J'ai porté mon quartier général ici; c'est un pays où le fourrage est abondant et où ma cavalerie peut vivre. Je suis dans un très-beau château, plus beau que celui de Grignon, qui a des cheminées dans toutes les chambres, ce qui est une chose fort agréable. Vous y aurez un fort bel appartement, si vous venez m'y joindre.

Voyez M. Aldini. S'il a un travail à me présenter, il peut venir; sinon , il n'y a pas d'inconvénient qu'il reste à Varsovie, où il est mieux.


Finkenstein, 2 avril 1807

A M. de Talleyrand

Monsieur le Prince de Bénévent, écrivez à Florence pour témoigner mon mécontentement du mauvais esprit que le ministre de la police donne aux affaires. Écrivez à Paris dans le même sens à M. de Masserano. Demandez l'arrestation des nommés Decimi, Benino et Cavini, qui ont donné de grands repas pour célébrer les prétendus avantages des Russes; ils sont de Sienne.


Finkenstein, 2 avril 1807

A M. Daru

Monsieur Daru, j'ai déjà fait la distribution des 30,000 paires de souliers que vous avez dirigées sur Marienwerder, ainsi que des 20,000 que vous avez dirigées sur Osterode. Sur ces 20,000, il n'en est arrivé que 11,000. Il faut d'abord compléter l'expédition des 20,000 paires sur Osterode , et, outre l'expédition de ces 50,000 paires, il faut en faire une autre aussi de 50,000 paires, savoir : 35,000 paires par eau sur Marienwerder et 15,000 sur Osterode. Faites de tous côtés venir des souliers; les chemins sont mauvais et boueux, et la consommation des souliers sera énorme.

Ce qu'il faut surtout envoyer à Osterode, c'est de la farine. Il n'est encore rien arrivé à Marienwerder de ce que j'ai demandé. Ordonnez aux commissaires des guerres de Culm et de Neuenburg, Mewe et Marienwerder de correspondre avec l'ordonnateur du quartier général qui est à Riesenburg. Il faut établir à Marienwerder un grand hôpital. Il faut en établir un à Mewe et à Neuenburg. Comme je vous ai déjà fait connaître mes intentions là-dessus, je suppose que vous aurez envoyé des médecins et des employés d'hôpitaux dans ces trois places.


Finkenstein, 2 avril 1807

A M. Daru

J'ai donné l'ordre au major général de faire établir 9 fours à Riesenburg, 3 à Finkenstein, 9 à Marienwerder, et, comme cela a déjà été annoncé, 6 à Mewe et 6 à Neuenburg.

J'avais ordonné que tous les convois de biscuit qui arriveraient à Osterode, lorsque ce qui est en magasin passerait 150,000 rations, fussent envoyés ici. Il y en a dans ce moment 180,000 rations; mais, comme il me faut faire mon mouvement, envoyez l'ordre que tout ce qui y arrivera désormais en biscuit et en eau-de-vie soit dirigé ici. Je veux avoir à Finkenstein 150,000 rations de biscuit, 100,000 de pain biscuité, 200,000 rations d'eau-de-vie, et de la farine pour faire aller les trois fours pendant dix jours ;

A Riesenburg 200,000 rations de biscuit, 200,000 de pain biscuité, 400,000 d'eau-de-vie, et de la farine pour aller les neuf fours pendant dix jours;

Marienwerder, Marienburg, et Neuenburg, approvisionnés conformément aux dispositions déjà ordonnées.

Toutes les administrations resteront à Riesenburq; un commissaire des guerres de la Garde restera à Finkenstein avec des boulangers de la Garde pour servir les trois fours. En outre, les boulangers de la Garde serviront trois fours à Riesenburg. L'administration n'en aura plus que six à servir dans cette place, et elle en servira neuf à Osterode, quatre ayant été remis au 3e corps.

Il y aura un commissaire des guerres du quartier général à Osterode, Culm, Marienwerder, Mewe, Neuenburg, qui rendront compte au commissaire ordonnateur du quartier général, de manière que tous les soirs il puisse envoyer la situation de ses magasins au maréchal Duroc.

Tous les convois de farine venant de Varsovie et de Thorn continueront à être dirigés sur Osterode.


Finkenstein, 2 avril 1807

DÉCISION

Le major général soumet à l'Empereur une lettre adressée à l'intendant général par la princesse Pauline, demandant un congé pour M. Michelot, inspecteur principal des fourrages, chargé par elle de suivre à Paris quelques affaires.

Refusé. Chacun doit rester à son poste. Employez M. Michelot aux avants-postes; il est actif.


Finkenstein, 2 avril 1807

Au général Lemarois, à Varsovie

Ayez soin de ne pas trop appauvrir les magasins de Varsovie. Il faut que vous mainteniez toujours l'approvisionnement de Pultusk, Sierock, Willenberg pour dix jours, et en farines, à Varsovie, de quoi alimenter la manutention pendant dix jours et les moulins pendant vingt. Il faut faire successivement venir de Blonie , Rawa, Lenczyca, de manière qu'on ne se trouve pas embarrassé.

Je vois, par l'état de situation du 15 mars, qu'il n'y aurait que 3,000 quintaux de blé. On fait trop de pain; il y en avait 24,000 rations; ce pain se gâte. Je vois qu'il n'y a que 1,000 quintal de farine à Praga et 1,000 à Modlin; c'est trop peu. Comme il y 8,000 quintaux à Blonie, 5,000 à Lenczyca, qu'il y en a 3,000 à Lowicz, faites-en venir de ce côté, avec 4,000 quintaux de farine où de seigle.


Finkenstein, 2 avril 1807

Au général Rapp, à Thorn

Je rencontre toujours des hommes isolés, sans fusils, qui ont passé par Thorn et qui ont des feuilles de route du commissaire des guerres de Thorn, et qui sont même maladifs. Il vaut mieux les envoyer à leurs dépôts respectifs; cela me fait des malades à l'armée et voilà tout. Prenez donc des mesures pour qu'il ne sorte personne de Thorn sans avoir capote, souliers et fusil. Combien y-a-t-il de pièces de canon en batterie à Thorn ? Quelle est la situation des ouvrages avancés ? Combien y a-t-il d'ouvriers qui travaillent tous les jours ? Enfin, la place est-elle à l'abri d'un coup de main ou en état de se défendre ? Y a-t-il de l'eau dans les fossés ? A-t-on fait les batardeaux pour cela ? Il est très-pressant que j'aie des idées précises là-dessus. D'un moment à l'autre vous pouvez en avoir besoin.


Finkenstein, 2 avril 1807

A l'Impératrice

Mon amie, je t'écris un mot. Je viens de porter mon quartier général dans un très beau château, dans le genre de celui de Bessières, où j'ai beaucoup de cheminées; ce qui m'est fort agréable, me levant souvent la nuit; j'aime à voir le feu.

Ma santé est parfaite. Le temps est beau, mais encore froid. Le thermomètre est de 4 à 5 degrés.

Adieu, mon amie. 

Tout à toi.

Napoléon


 

 


Finkenstein, 3 avril 1807

A M. Cambacérès

Mon Cousin, vous recevrez demain un grand article de Constantinople, que vous ferez imprimer dans le Moniteur. Il suffit, quant à présent, de vous dire que les affaires vont au mieux de ce côté-là, que les Anglais ont échoué et ont été obligés de repasser le Bosphore. Vous pouvez faire mettre dans le Moniteur cette courte note : "Nous recevons des nouvelles officielles de Constantinople. Les affaires vont au mieux de ce côté. Les Anglais ont complètement échoué et ont été obligés de repasser le détroit des Dardanelles, et la Porte montre une énergie qui a confondu les Anglais et les Russes. A demain les détails."


Finkenstein, 3 avril 1807

A M. de Talleyrand

Monsieur le Prince de Bénévent, vous me dites que vous avez besoin d'ar8ent : il est parti hier 1,500,000 francs de Breslau pour Varsovie. Ainsi cet argent ne tardera pas à vous arriver.

En lisant avec attention les états que, l'intendant général m'a envoyés, je vois que Varsovie a fourni tout ce qu'elle devait fournir. Autorisez donc M. Pradel à passer des marchés pour l'approvisionnement en grains, foin, avoine et viande. On payera sur les 1,500,000 francs qui viennent de Breslau, et M. Pradel enverra un courrier à l'intendant général pour lui faire connaître tout ce qu'il a fait avec votre approbation.


Finkenstein, 3 avril 1807

A M. de Talleyrand

Monsieur le Prince de Bénévent, il est très convenable que vous disiez à M. de Vincent, en forme de conversation, et que vous écriviez à M. Andréossy, que 30,000 Espagnols sont déjà entrés sur mon territoire et sont en marche pour se rendre en Hanovre. Il n'y aurait pas de mal même d'en faire mettre un article dans les journaux de Varsovie, sous la rubrique de Madrid, en disant, sans parler de la division d'Étrurie, que 6,000 hommes de cavalerie espagnole, et 24,000 hommes d'infanterie, sont déjà rendus sur les Pyrénées et arrivent le 1er du mois de mai sur l'Elbe.


Finkenstein, 3 avril 1807

A M. de Talleyrand

Monsieur le Prince de Bénévent, je vous enverrai demain le récit de toute l'affaire de Constantinople, avec les pièces officielles. Vous pourrez les faire imprimer dans la Gazette de Varsovie.

Expédiez sur-le-champ un courrier à Constantinople. Dites à Sebastiani que j'ai donné des ordres pour que tout ce qu'il demanderai en Dalmatie parte sur-le-champ ; que l'entretien , la solde de mes troupes à Constantinople seront à mes frais, et qu'il suffira que la Porte leur donne des vivres; que j'ai donné ordre au vice-roi d'Italie de lui envoyer 200,000 francs pour subvenir aux premières dépenses de mes troupes à Constantinople; que je suis très-fâché que, par un motif d'économie, il ne m'ait pas expédié l'officier persan; qu'il ait à me l'envoyer sur-le-champ. Ce n'est pas le moment de regarder à l'argent.

Écrivez à l'officier que j'ai à Widdin , M. Mériage, qu'il assure l'aga de ma protection, et lui offre armes, poudre et tout ce dont je puis disposer; que je ne lui demande que d'être fidèle à la Porte et de marcher franchement contre l'ennemi commun.

Témoignez à Sebastiani ma satisfaction de sa conduite. Il remettra la lettre ci-jointe au Grand Seigneur.

Dans la traduction de la lettre de l'empereur de Perse, on a oublié la date; il m'est très-intéressant de la connaître. Je vous envoie une réponse. Le général Sebastiani la fera porter en Perse par un de ses officiers ; et, comme il va lui arriver un grand nombre d'officiers d'artillerie et du génie, je désire qu'il en charge un officier qui puisse apprécier les forces de cet empire; ce que n'a pu faire M. Jaubert, qui n'est pars militaire.

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Vous ne recevrez que par le courrier de demain mes lettres au Grand Seigneur et à l'empereur de Perse.


Finkenstein, 3 avril 1807

Au Sultan Selim

Mon ambassadeur m'apprend la bonne conduite et la bravoure des Musulmans de Constantinople contre nos ennemis communs. Tu t'es montré le digne descendant de Selim et de Soliman. Tu m'as demandé quelques officiers, je te les envoie. J'ai regretté que tu ne m'eusses pas demandé quelques milliers d'hommes; tu ne m'en as demandé que 500 ; j'ai ordonné aussitôt qu'ils partissent. J'entends qu'ils soient soldés et habillés à mes frais, et que tu sois remboursé des dépenses qu'ils pourront t'occasionner. Je donne ordre au commandant de mes troupes en Dalmatie de t'envoyer les armes, les munitions et tout ce que tu demanderais. Je donne le même ordre à Naples, et déjà des canons et des canonniers ont été mis à la disposition du pacha de Janina. Généraux, officiers, armes de toute espèce, argent même, je mets tout à ta disposition; tu n'as qu'à demander. Demande d'une manière claire, et tout ce que tu demanderas , je te renverrai sur l'heure.

Arrange-toi avec le schah de Perse , qui est aussi l'ennemi des Russes; engage-le à tenir ferme et à attaquer vivement l'ennemi commun.

J'ai battu les Russes dans une grande bataille ; je leur ai pris 75 canons, 16 drapeaux et un grand nombre de prisonniers. Je suis à quatre-vingts lieues en avant de Varsovie, et je vais profiter de quinze jours de repos que je donne à mon armée pour me rendre à Varsovie et y recevoir ton ambassadeur.

Je sens le besoin que tu as de canonniers et de troupes. Je les avais offerts à ton ambassadeur; il n'en a pas voulu, dans la crainte d'alarmer la délicatesse des Musulmans.

Confies-moi tous tes besoins. Je suis assez puissant et assez intéressé à tes succès, tant par amitié que par politique, pour n'avoir rien à te refuser.

Ici, on m'a proposé la paix; on m'accordait tous les avantages que je pouvais désirer; mais on voulait que je ratifiasse l'état de choses établi entre la Porte et la Russie par le traité de Sistova, et je m'y suis refusé. J'ai répondu qu'il fallait qu'une indépendance absolue fût assurée à la Porte, et que tous les traités qui lui avaient été arrachés pendant que la France sommeillait fussent révoqués.


Finkenstein, 3 avril 1807

Au Schah de Perse

Je reçois ta lettre qu'a apportée à Constantinople ton serviteur Iusuf-Aga. J'ai ordonné à mon ambassadeur de t'envoyer celle-ci par un de ses officiers.

Beaucoup de troupes du Don, qui étaient opposées à toi, sont venues en Pologne. J'en ai fait prisonnières un grand nombre.

Le sultan Selim désire vivre en paix avec toi, resserrez vos liens; les petites mésintelligences doivent disparaître devant les véritables ennemis. J'ai écrit à Constantinople qu'on fasse venir ici l'officier que tu as envoyé, afin que je puisse causer avec lui en détail sur toi et sur ton armée.

Arrête toutes les communications des Anglais avec les Indes;  intercepte leurs courriers; ils sont amis des Russes et nos ennemis. Apprends-moi bientôt que tu as obtenu dans cette campagne de nouveaux succès et que tu as fait du mal à l'ennemi commun.


Finkenstein, 3 avril 1807

Au prince Jérôme

Mon Frère, je vous instruis des bonnes nouvelles que je reçois de Constantinople. L'amiral Duckworth, avec huit vaisseaux de guerre anglais, a forcé le détroit des Dardanelles le 19 février, après avoir essayé quelques coups de canon. Il a rencontré, près de Gallipoli, un vaisseau de 74 et cinq frégates turcs, dont les équipages étaient à la mosquée pour la fête du Baïran , et les a brûlés. Il s'est présenté devant Constantinople; on a couru aux armes. Douze officiers d'artillerie et du génie, que j'ai envoyés de Dalmatie, sont arrivés dans la même nuit. On a mis 500 pièces de canon en batterie en cinq jours; on en a envoyés aux Dardanelles. Le Grand Seigneur a déclaré dans la mosquée qu'il ne séparerait pas sa cause de celle des Français. L'escadre anglaise a été forcée de repasser les Dardanelles, et dix vaisseaux turcs l'ont suivie. Les régences barbaresques ont reçu l'ordre de courir sur les bâtiments anglais. Les marchandises anglaises sont saisies. Les Anglais qui se trouvent en Turquie sont arrêtés. L'armée turque paraît passer le Danube et cerner Bucarest, où les Russes n'ont que peu de forces. Faites mettre ces détails dans la Gazette de Breslau. Vous pouvez faire dater ces nouvelles de Constantinople, du 3 mars.


Finkenstein, 3 avril 1807

Au prince Jérôme

Mon Frère, je vous avais mandé que je vous avais envoyé 1,400 hommes de cavalerie non montés. J'ai craint que vous ne puissiez les monter, surtout à cause des selles. Je ne vous en ai, en conséquence, envoyé que 1,100. Mais, sur la lettre que vous m'avez écrite que vous avez pris des mesures pour en monter 1,500, et qu'ils le seraient au 15 avril, je vous en enverrai davantage. Allez de l'avant, et si vous pouvez en monter un plus grand nombre, je vous les enverrai. Les hommes appartenant au 5e corps doivent être dirigés sur Varsovie. Je préfère qu'ils se reposent deux jours de plus. Faites-leur distribuer capotes, habits, souliers, chapeaux et armes. La considération sur le double emploi de l'habillement est sensée; mais c'est un objet sur lequel on ne doit pas s'arrêter à la guerre. Il y a plusieurs manières de les envoyer : si vous les envoyez isolés, ils resteront perdus dans l'armée. Il faut les organiser en bataillons provisoires de 400 hommes, avec des officiers et sous-officiers pour les commander, en réunissant les hommes appartenant à un même corps d'armée; et quand vous aurez ainsi un bataillon des 1er, 3e, 4e et 6e corps, vous les dirigerez sur Thorn. Formez en compagnie ceux du 5e corps , au complet provisoire de 100 à 120 hommes, et dirigez-les sur Varsovie, également bien équipés et armés, et sous les ordres d'officiers et sous-officiers, désignez-leur des lieux de repos sur toute la route, afin qu'ils ne fassent pas de trop de fortes marches.

Ainsi donc n'envoyez jamais moins de 400 hommes sur Thorn, moins de 100 à 120 sur Varsovie, et toujours avec des officiers et sous-officiers. Si vous manquez d'officiers, donnez-leur des officiers d'état-major. J'attendrai le retour de ce courrier pour vous envoyer un plus grand nombre d'hommes de cavalerie à pied. Ainsi je vous envoie 1,100 hommes, dont 190 cuirassiers, 500 dragons et 480 hommes de cavalerie légère. Puis-je vous en envoyer 1,000 autres, et faut-il vous envoyer des détachements de cuirassiers ou de cavalerie légère ? Si vous pouvez passer la revue de toutes les compagnies ou bataillons provisoires que vous expédierez à l'armée, si vous pouvez leur donner une chemise par homme, ce ne sera que mieux. Envoyez-moi l'itinéraire que suivent le trésor, les régiments Wurtembergeois, infanterie et cavalerie; car il faut que je sache toujours où se trouvent toutes les parties de mon armée.


Finkenstein, 3 avril 1807

Au prince Eugène

Mon Fils, je reçois votre lettre du 8 mars, relative aux tracasseries de la cour de Rome. J'imagine que les évêques que j'ai nommés touchent leurs revenus. Il faut leur écrire qu'ils se rendent dans leurs diocèses, et qu'ils en prennent au moins l'administration, si leur conscience ne leur permet pas d'y exercer leurs fonctions épiscopales.

Je vous envoie une lettre au Saint-Père que vous ferez passer à Rome. Après cela; s'il ne revient pas, il n'en faut plus parler. En temps et lieu je ferai repentir la cour de Rome de sa mauvaise conduite; mais ce n'est pas le moment.

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Toutes réflexions faites, je n'écrirai pas au Pape. Je ne veux pas me jeter dans les tracasseries avec ces nigauds. Le plus court est de s'en passer.


Finkenstein, 3 avril 1807

Au Roi de Naples

Mon Frère, je reçois votre lettre du 15 mars. Je vois avec plaisir que vos troupes se portent bien et que tout va bien chez vous. Portez attention à la bonne discipline de vos troupes; un mois de relâchement cause un mal qui ne peut être réparé que par six mois de soins. Si vous formez un camp, placez-le entre Naples et la Calabre. Il serait ridicule de rien faire qui pût faire penser que la capitale pût être évacuée. Il est probable que les 6,000 Anglais qui sont partis de la Sicile sont retournés dans l'Océan. J'attends d'ailleurs des renseignements là-dessus. Nous sommes encore ici au milieu des neiges, et probablement le soleil commence chez vous à devenir trop chaud.

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Au moment même je reçois des lettres du 3 mars, de Constantinople. Les Anglais ont échoué complètement, et cet empire montre une énergie qui m'est très-importante et confond les ennemis communs. Les Anglais ont essuyé un échec qui leur sera sensible.


Finkenstein, 4 avril 1807.

A M. Cambacérès

Mon Cousin, je reçois votre lettre du 2 mars. Portez, je vous prie, une grande attention au double approvisionnement du blé que j'ai ordonné avant de partir. L'expérience n'apprendra-t-elle donc rien, et faudra-t-il attendre que l'on soit dans le besoin ? C'est l'objet auquel M. Champagny doit porter toute son attention. Les mais et les si ne sont pas de saison, et il faut avant tout qu'il réussisse. Vous aviez déjà le manifeste de la Porte, mais je suis surpris de ne pas voir dans le Moniteur les pièces relatives à la déclaration de guerre de l'Angleterre à la Porte, que je vous ai envoyées. Si elles n'y avaient pas été mises quand vous recevrez cette lettre, prenez des mesures pour les y faire mettre.


Finkenstein, 4 avril 1807

A M. Cambacérès

Mon Cousin , vous verrez dans le Moniteur différentes lettres envoyées par mes agents sur le Danube, ainsi que les nouvelles de Constantinople. Les choses marchent bien de ce côté-là, et les Russes y paraissent singulièrement embarrassés. Il est probable qu'ils seront battus et obligés d'évacuer la Valachie. La Porte se comporte mieux qu'on n'aurait osé l'espérer.

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Je pars cette nuit à franc étrier pour Varsovie, où je serai demain. J'y resterai deux jours pour donner audience aux ambassadeurs de Perse et de Turquie, et prendre quelques arrangements d'administration intérieure de Pologne


Finkenstein, 4 avril 1807

A M. Fouché

Que cet obscur Courrier Français dise tant qu'il voudra des injures au Journal de l'Empire (Napoléon voulait que ce soit le titre donné au Journal des Débats, qui "rappelle le souvenir de la Révolution"), mais qu'ils ne m'y entremêlent pour rien. Le Courrier Français et le Journal de l'Empire suivent le même système; l'un attribue tout le malheur de la révolution à la philosophie, comme si, dans tous les temps, les hommes ne s'étaient pas divisés, déchirés et persécutés; tout cela est absurde sans doute, mais il est tout aussi absurde que le journal Le Courrier Français se constitue mon défenseur et veuille voir ma cause dans l'intérêt des encyclopédistes ou de Champfort, de Diderot, etc.

Il me semble que ce n'est pas trop exiger que de les laisser déraisonner et se battre, pourvu qu'il ne soit pas question des affaires actuelles.

Tout le monde lit le Journal de l'Empire, et, s'il tend à faire du mal à l'Etat, nous n'avons pas besoin que le Courrier nous en prévienne. Je ne veux pas rétablir le crime de lèse-majesté; je n'attache aucune importance aux débats des folliculaires; cependant je ne veux pas qu'on laisse un journal parler des Bourbons, de la dynastie, comme le fait le Courrier Français. Ne peut-il donc pas défendre sa cause sans y entremêler le Gouvernement ? Qu'on soit athée comme Lalande (Joseph Jérôme Le Français de Lalande, 1732-1807. Son athéisme lui avait attiré les foudres de Napoléon, qui avait interdit la publication de ses écrits. Curieusement, il meurt de phtisie le jour où est écrit cette lettre) ou religieux comme Portalis (Jean Etienne Marie Portalis, 1746-1807, ministre des Cultes. Il mourra le 25 août, d'une opération de la cataracte), philosophe comme Regnaud , on n'en est pas moins fidèle au Gouvernement, bon citoyen. De quel droit donc souffrir ouvertement qu'on vienne dire à ces individus qu'ils sont mauvais citoyens ? C'est du style des Frères et Amis, et, s'il osait dire sa pensée tout entière, vous verriez qu'il n'y a que sa clique qui me soit attachée. Les ecclésiastiques, vingt millions d'hommes attachés au culte, sont tous de l'ancien régime.

La première fois que ce journal parlera des Bourbons ou de mes intérêts, supprimez-le.

Quant au Journal des Débats, il est certain qu'il pousse l'esprit de parti jusqu'à la persécution. Un temps viendra où je prendrai des mesures pour confier ce journal, qui est le seul qu'on lit en France, entre des mains plus raisonnables et plus froides.

L'esprit de parti étant mort, je ne puis voir que comme une calamité dix polissons, sans talent et sans génie, clabauder sans cesse contre les hommes les plus respectables, à tort et à travers.

Mais je n'y prends d'autre intérêt que l'intérêt littéraire. Contenez-les dans les bornes, défendez-leur également de faire parler des Bourbons et de la dynastie.


Finkenstein, 4 avril 1807

Au maréchal Berthier

Le major général donnera l'ordre aux maréchaux et gouverneurs de communiquer ces bonnes nouvelles aux chefs de corps :

Des lettres de Constantinople, du 3 mars, nous apprennent que les Russes et les Anglais ont échoué dans leur expédition. Une escadre de huit vaisseaux anglais avait forcé le passage des Dardanelles; le 19 février, elle avait mouillé à deux portées de canon du Sérail, et avait exigé de la Porte :

1° Le renvoi de l'ambassadeur français;
2° La déclaration de guerre à la France;
3° La cession à la Russie de la Valachie et Moldavie avec la place d'Ismaïl;
4° Quinze vaisseaux de guerre chargés de vivres et de munitions;
5° La remise aux Anglais des châteaux des Dardanelles.

Le peuple de Constantinople a couru aux armes; dix officiers français du génie et d'artillerie sont arrivés dans la nuit du 19 au 20. On a construit quarante batteries dans l'espace de cinq jours, et mis cinq cents canons et mortiers en batterie. On en a placé trois cents sur les Dardanelles. Ce que les Anglais ayant vu, ils ont jugé à propos de repasser le détroit avant qu'ils fissent feu.

Le Grand Seigneur a déclaré dans la mosquée qu'il périrait plutôt que d'abandonner la France.

Le général Sebastiani a été toujours à son côté. Des canonniers et ingénieurs français viennent de partir de Dalmatie pour Constantinople.

Le capitan pacha, avec dix vaisseaux de guerre, est entré dans la Mer Noire, où les Russes n'ont que trois vaisseaux.

L'adjudant commandant Mériage, qui est à Widdin, mande, le 15 mars, que Moustafa-Pacha a passé le Danube, a battu l'avant-garde du général Michelson, lui a pris six pièces de canon et douze caissons, fait 800 prisonniers; Michelson, qui n'avait pas plus de 15,000 hommes, avait pris position du côté de Bucarest.

Une armée turque est entrée en Crimée.

Une armée persane est entrée en Géorgie.

Les armées russes sont faibles sur tous ces points.

Tout porte à penser qu'à l'heure qu'il est les Russes sont chassés de la Valachie, toutes les marchandises anglaises et les Anglais arrêtés dans l'empire ottoman. Tous leurs comptoirs de l'Arabie, de l'Euphrate et de toute l'Asie ont été saisis.

Les puissances barbaresques ont déclaré la guerre et courent sur le pavillon anglais.

Tous ces beaux résultats sont une suite de l'occupation de Varsovie et de la position de l'armée. Sans l'arrivée de l'armée française sur la Vistule, qui a obligé les Russes à rappeler leurs troupes, c'en était fait de l'empire ottoman, et, par suite, de notre commerce du Levant. Les ennemis auraient triplé leurs forces, et nous eussions laissé à nos enfants, pour héritage, trente années de guerre.


Finkenstein, 4 avril 1807

Au maréchal Davout

Mon Cousin, le major général vous aura fait part des bonnes nouvelles que j'ai reçues de Constantinople. Je pars demain pour me rendre à Soldau, où je serai rendu à deux heures de l'après-midi. A la pointe du jour, expédiez-moi un de vos officiers qui vienne lestement  m'y apporter de vos nouvelles. Je me rends, pour deux jours, à Varsovie. Je laisse Duroc au quartier général; vous continuerez à m'adresser vos rapports, il me les fera parvenir. Je désire que mon voyage à Varsovie soit tenu secret, et ce que je vous en dis est pour vous seul.


Finkenstein, 4 avril 1807

Au maréchal Ney, à Guttstadt

Je vous prie de me faire connaître les régiments qui doivent former votre 3e division à Thorn, et quel est le général de. division que vous désirez. Le général Vandamme vous conviendrait-il, ou y en a-t-il qui ait davantage votre confiance ?

Renvoyez-moi, par l'aide de camp Lebrun, la situation réelle de votre corps d'armée. Comment vivez-vous ? Votre corps a-t-il augmenté on diminué depuis le 1er mars ? Avez-vous reçu les fusils que je vous ai envoyés ? De combien en avez-vous encore besoin ? Avez-vous reçu des souliers ? Quelle est la situation de votre corps en souliers ?


Finkenstein, 4 avril 1807

Au maréchal Lefebvre, à Pietzkendorf

Je reçois votre lettre du 2 avril. Activez l'arrivée du 19e de ligne, et gardez-le. Il restera avec vous au siège. Je vois par votre lettre que vous avez fait 15 prisonniers russes. Vous ne me dites pas de quel régiment ils sont; ce serait pourtant bien important à savoir. Faites-moi passer l'interrogatoire de cinq ou six des plus intelligents, pour connaître leurs mouvements depuis deux mois, s'ils étaient à la bataille d'Eylau, etc., et d'où ils viennent. Si les prisonniers russes que vous avez faits sont partis, envoyez à leur suite pour les interroger, car il m'importe beaucoup d'avoir des détails.


Finkenstein, 4 avril 1807

Au général Chasseloup

Envoyez donc des outils à Danzig; il y en a 900 à Graudenz. Envoyez-y aussi la compagnie de sapeurs qui s'y trouve; envoyez également de l'argent pour les travaux du génie. Il faut que l'on ne manque pas d'argent pour les travaux, car les Saxons et les Polonais ne travailleront pas si on ne les paye pas bien.


Finkenstein, 4 avril 1807

Au général Chasseloup

Je vous envoie un mémoire sur Thorn. Je désire que vous fassiez une course jusqu'à cette ville, et que vous donniez vous-même des ordres pour qu'elle soit mise dans un meilleur état de défense. Faites donner de l'argent aux ouvriers, et vous en aurez tant que vous voudrez. J'ai fort à cœur que cette place soit en état.


Finkenstein, 4 avril 1807

A M. Daru

Monsieur l'intendant Général, il faut donner des ordres pour qu'aux quatre dépôts des corps d'armée on établisse quatre hôpitaux pour les galeux. Cela est très-important; on me rend compte que le nombre de ces malades est très-considérable.

Vous me faites un tas d'annonces de convois qui doivent partir de Thorn, et jamais ces annonces ne sont conformes aux lettres de voiture.. Cela est très-mauvais, parce que cela me donne une fausse indication. Désormais ne m'instruisez des départs que lorsque les convois seront sortis de Thorn; par ce moyen, vous m'instruirez exactement de ce qui sera parti.


Finkenstein, 4 avril 1807

Au prince Eugène

Mon Fils, envoyez au général Lauriston vingt-cinq montres, du prix de dix louis à celui de deux louis; c'est-à-dire les unes d'or, à répétition, et les autres d'argent. Ces montres sont destinées à faire des présents aux Turcs. Envoyez-en également vingt-cinq au général Marmont.


Finkenstein, 4 avril 1807

A Louis

Je reçois votre lettre du 24 mars. Vous dites que vous avez 20 000 hommes de la Grande Armée. Vous ne le croyez pas vous-même; il n'y en a pas 10 000, et quels hommes ! Ce ne sont pas des maréchaux, des chevaliers et des comtes qu'il faut faire, ce sont des soldats. Si vous continuez ainsi, vous me rendrez ridicule en Hollande. Vous gouvernez trop cette nation en capucin.

La bonté d'un roi doit toujours être majestueuse et ne doit pas être celle d'un moine.

Rien n'est plus mauvais que ce grand nombre de voyages faits à La Haye, si ce n'est cette quête faite par votre ordre dans votre royaume. Un roi ordonne et ne demande rien à personne; il est censé être la source de toute puissance et avoir des moyens pour ne pas recourir à la bourse des autres.

Toutes ces nuances, vous ne les sentez pas.

Il me revient des notions sur le rétablissement de la noblesse, dont il me tarde bien d'être éclairci. Auriez-vous perdu la tête à ce point, et oublieriez-vous jusque-là ce que vous me devez. Vous parlez toujours dans vos lettres de respect et d'obéissance: ce ne sont pas des mots, mais des faits qu'il me faut.

Le respect et l'obéissance consistent à ne pas marcher si vite, sans mon conseil, dans des matières si importantes; car l'Europe ne peut s'imaginer que vous ayez pu manquer aux égards pour faire certaines choses sans mon conseil. Je serai obligé de vous désavouer. J'ai demandé les pièces du rétablissement de la noblesse. Attendez-vous à une marque publique de mon excessif mécontentement.

Ne faites aucune expédition maritime, la saison est passée. Levez des gardes nationales pour défendre votre pays. Soldez mes troupes. Levez beaucoup de conscrits nationaux. Un prince qui, la première année de son règne, passe pour être si bon, est un prince dont on se moque à la seconde.

L'amour qu'inspirent les rois doit être un amour mâle, mêlé d'une respectueuse crainte et d'une grande opinion d'estime.

Quand on dit d'un roi que c'est un bon homme, c'est un règne manqué. Comment un bon homme, ou un bon père si vous voulez, peut-il soutenir les charges du trône, comprimer les malveillants, et faire que les passions se taisent ou marchent dans sa direction ?

La première chose que vous deviez faire et que je vous avais conseillée, c'était d'établir la conscription. Que faire sans armée ? Car peut-on appeler armée un ramassis de déserteurs ? Comment n'avez-vous pas senti que, dans la situation où est votre armée, la création des maréchaux était une chose inconvenante et ridicule ? Le roi de Naples n'en a point. Je n'en ai pas nommé dans mon royaume d'Italie. Croyez-vous que, quand quarante vaisseaux français seront réunis à cinq ou six barques hollandaises, l'amiral Ver Huell, par exemple, en sa qualité de maréchal, puisse les commander ? Il n'y a pas de maréchaux chez les petites puissances; il n'y en a pas en Bavière, en Suède. Vous comblez des hommes qui ne l'ont pas mérité. Vous marchez trop vite et sans conseils; je vous ai offert les miens; vous me répondez   par  et de beaux compliments et vous continuez à faire des sottises.

Vos querelles avec la Reine percent aussi le public. Ayez dans votre intérieur ce caractère paternel et efféminé que vous montrez dans le gouvernement, et ayez dans les affaires ce rigorisme que vous montrez dans votre ménage.

Vous traitez une jeune femme comme on mènerait un régiment.

Méfiez-vous des personnes qui vous entourent; vous n'êtes entouré que de nobles. L'opinion de ces gens-là est toujours en raison inverse de celle du public. Prenez-y garde: vous commencez à ne plus devenir populaire à Rotterdam ni à Amsterdam.

Les catholiques commencent à vous craindre. Comment n'en mettez-vous aucun dans les emplois ? Ne devez-vous pas protéger votre religion ? Tout cela montre peu de force et de caractère. Vous faites trop votre cour à une partie de votre nation; vous indisposez le reste. Qu'ont fait les chevaliers auxquels vous avez donné des décorations ? Où sont les blessures qu'ils ont reçues pour la patrie, les talents distingués qui les rendent recommandables, je ne dis pas pour tous, mais pour les trois-quarts ? Beaucoup ont été recommandables dans le parti anglais et sont la cause des malheurs de leur patrie; fallait-il les maltraiter ? non; mais tout concilier.

Moi aussi j'ai des émigrés près de moi; mais je ne les laisse point prendre le haut du pavé, et, lorsqu'ils se croient près d'emporter un point, ils en sont plus loin que lorsqu'ils étaient en pays étranger, parce que je gouverne par un système et non par faiblesse.

Vous avez la meilleure femme et la plus vertueuse, et vous la rendez malheureuse. Laissez-la danser tant qu'elle veut, c'est de son âge. J'ai une femme qui a quarante ans: du champ de bataille je lui écris d'aller au bal, et vous voulez qu'une femme de vingt ans, qui voit passer sa vie, qui en a toutes les illusions, vive dam un cloître, soit comme une nourrice toujours à laver
son enfant ?

Vous êtes trop vous dans votre intérieur, et pas assez dans votre administration.

Je ne vous dirais pas tout cela sans l'intérêt que je vous porte. Rendez heureuse la mère de vos enfants. Vous n'avez qu'un moyen, c'est de lui témoigner beaucoup d'estime et de confiance. Malheureusement vous avez une femme trop vertueuse: si vous aviez une coquette, elle vous mènerait par le bout du nez.

Mais vous avez une femme fière, que la seule idée que vous puissiez avoir mauvaise opinion d'elle révolte et afflige. Il vous aurait fallu une femme comme j'en connais à Paris. Elle vous aurait joué sous jambe et vous aurait tenu à ses genoux. Ce n'est
pas ma faute, je l'ai souvent dit à votre femme.

Quant au reste, vous pouvez faire des sottises dans votre royaume, c'est fort bien ; mais je n'entends pas que vous en
fassiez chez moi.

Vous offrez à tout le monde vos décorations; beaucoup de personnes m'en ont écrit qui n'ont aucun titre. Je suis fâché que vous ne sentiez pas que vous manquez aux égards que vous me devez. Mon intention est que personne ne porte ces décorations chez moi, étant résolu de ne les pas porter moi-même. Si vous m'en demandez la raison, je vous répondrai que vous n'avez encore rien fait pour mériter que les hommes portent votre portrait; que, d'ailleurs, vous l'avez institué sans ma permission, et qu'enfin vous le prodiguez trop. Et qu'ont fait toutes ces personnes qui vous entourent, auxquelles vous le donnez ?


Finkenstein, 4 avril 1807

69e BULLETIN DE LA GRANDE ARMÉE

Les gendarmes d'ordonnance sont arrivés à Marienwerder. Le maréchal Bessières est parti pour aller en passer la revue. Ils se sont très-bien comportés, et ont montré beaucoup de bravoure dans les différentes affaires qu'ils ont eues.

Le général Teulié, qui jusqu'à présent avait conduit le blocus de Kolberg, a fait preuve de beaucoup d'activité et de talent. Le général de division Loison vient de prendre le commandement du siège de cette place. Le 19 mars, les redoutes de Sellnow ont été attaquées et emportées par le 1er régiment d'infanterie légère italienne. La garnison a fait une sortie; la compagnie de carabiniers du 1er régiment léger et une compagnie de dragons l'ont repoussée. Les voltigeurs du 19e régiment de ligne se sont distingués à l'attaque du village d'Altstadt. L'ennemi a perdu dans ces affaires trois pièces de canon et 200 hommes faits prisonniers.

Le maréchal Lefebvre commande le siège de Danzig. Le général la Riboisière a le commandement de l'artillerie. Le corps de l'artillerie justifie, dans toutes les circonstances, la réputation de supériorité qu'il a si bien acquise. Les canonniers français méritent, à juste raison, le titre d'hommes d'élite. On est satisfait de la manière de servir des bataillons du train.

L'empereur a reçu , à Finkenstein, une députation de la Chambre de Marienwerder, composée de MM. le comte de Groeben, le conseiller baron de Schleinitz et le comte de Dohna, directeur de la Chambre. Cette députation a fait à Sa Maiesté le tableau des maux que la guerre a attirés sur les habitants. L'Empereur lui a fait connaître qu'il en était touché, et qu'il les exemptait, ainsi que la ville d'Elbing , des contributions extraordinaires. Il a dit qu'il y avait des malheurs inévitables pour le théâtre de la guerre, qu'il y prenait part, et qu'il ferait tout ce qui dépendrait de lui pour les alléger.

On croit que Sa Majesté partira aujourd'hui pour faire une tournée à Marienwerder et à Elbing.

La seconde division bavaroise est arrivée à Varsovie.

Le prince royal de Bavière est allé prendre à Pultusk le commandement de la 1e division.

Le prince héréditaire de Bade est allé se mettre à la tète de son corps de troupes, à Danzig. Le contingent de Saxe-Weimar est arrivé sur la Warta.

Il n'a pas été tiré aux avant-postes de l'armée un coup de fusil depuis quinze jours.

La chaleur du soleil commence à se faire sentir; mais elle ne parvient point à amollir la terre; tout est encore gelé. Le printemps est tardif dans ces climats.

Des courriers de Constantinople et de Perse arrivent fréquemment au quartier général.

La santé de l'Empereur ne cesse pas d'être excellente. On remarque même quelle est meilleure qu'elle n'a jamais été. Il y a des jours où Sa Majesté fait quarante lieues à cheval.

On avait cru, la semaine dernière, à Varsovie, que l'Empereur y était arrivé à dix heures du soir; la ville entière fut aussitôt et spontanément illuminée.

Les places de Praga, Sierock, Modlin, Thorn et Marienburg commencent à être en état de défense; celle de Marienwerder est tracée. Toutes ces places forment des têtes de pont sur la Vistule.

L'Empereur se loue de l'activité du maréchal Kellermann à former des régiments provisoires, dont plusieurs sont arrivés à l'armée dans une très-bonne tenue, et ont été incorporés.

Sa Majesté se loue également du général Clarke , gouverneur de Berlin, qui montre autant d'activité et de zèle que de talent dans le poste important qui lui est confié.

Le prince Jérôme, commandant des troupes en Silésie, fait preuve d'une grande activité rz montre les talents et la prudence qui ne sont d'ordinaire que les fruits d'une longue expérience.


Finkenstein, 5 avril 1807

A Cambacérès

Mon Cousin, j'ai reçu votre lettre du 25 mars. J'ai pris, il y a quinze jours, un décret pour prêter aux fabricants sur nantissement. Toutes ces prétendues délicatesses que l'on met en avant sont des bêtises et des sophismes. Un manufacturier a ou n'a pas besoin.

A quel cri d'alarme cela donnerait-il lieu, qu'un fabricant dise : « je suis riche, j'ai pour un million de marchandises, je ne puis point les vendre, et je n'ai pas un sou. Le Gouvernement me prête 100 000 écus : je lui donne pour sûreté 100 000 écus de marchandises. » Au lieu d'être un objet de discrédit, cela est au contraire un moyen de crédit.

Je ne vois pas non plus que l'objection, que l'obligation pour les neutres de réexporter des marchandises françaises anéantirait les entrepôts réels, soit bien grave.

Les affaires de finances se jugent par des considérations de finances, les délits politiques par le code politique, les affaires de commerce par des considérations de commerce. Or c'est ici la considération de commerce, dont l'influence est immense sur les manufactures de France qui doit décider la question si les neutres doivent être contraints à réexporter des marchandises de notre cru, lorsqu'ils importent leurs marchandises en France.

J'aimerais autant que le tribunal criminel de Paris appliquât à un délit criminel un article du Code civil. Je me plains qu'on n'approfondit rien au Conseil. Les discussions sont trop lestes.


Finkenstein, 5 avril 1807

A M. Cambacérès

Mon Cousin, je reçois votre lettre du 26 mars. Je vois avec peine l'esprit financier qui domine au Conseil. Les ministres du trésor public et des finances devraient cependant se souvenir qu'il m'en a coûté vingt-cinq millions an l'an X, pour me procurer quelques milliers de quintaux de blés. L'objection que ces blés ne peuvent venir à Paris est un sophisme. Tenez un conseil auquel vous appellerez MM. Réal, Defermon, Lacuée et les hommes qui savent dans quel embarras je me suis trouvé en l'an X, et faites-moi connaître le résultat de ce conseil.


Finkenstein, 5 avril 1807

A M. Fouché

Je reçois votre lettre du 26 mars. Il n'y a ici rien de nouveau. Faites faire des articles en faveur des catholiques irlandais.


 Finkenstein, 5 avril 1807

A Mme de Lauriston

Madame, je reçois votre lettre du 24 mars. Les services de votre mari me sont plus utiles à Raguse qu'ils ne pourraient me l'être ailleurs. C'est une marque de confiance que je lui ai donnée, en le plaçant dans un poste si important. Les événements se succèdent et ne me laissent pas le maître de faire ce que je désirerais. J'ai cependant voulu vous écrire la présente lettre pour vous faire connaître l'estime et la confiance que j'ai en votre mari.


Finkenstein, 5 avril 1807

A M. de Talleyrand

Monsieur le Prince de Bénévent, je reçois votre lettre du 3 avril. Le gouverneur de Varsovie a eu la bêtise d'aller chez M. de Vincent demander des explications sur la neutralité du territoire autrichien. Il est difficile de faire quelque chose de plus bête.

J'ai lu avec plaisir la lettre du 21 mars sur la Suède. Écrivez à mon agent qu'il doit écrire tous les jours, passer les journées hors de chez lui, parcourir les ports, les endroits publics, et rendre compte de tout ce qu'il aura vu et appris. Quant à la nouvelle qu'Essen passerait le Bug, c'est fort bête; il pourrait le passer, mais ne le repasserait pas.


Finkenstein, 5 avril1807

A M. de Talleyrand

Monsieur le Prince de Bénévent, il n'y a pas d'inconvénient à passer le marché avec le gouvernement polonais. Il faut qu'il fournisse, en grande quantité, blés, avoines, eaux-de-vie, en fixant les prix et en suivant le principe que tout cela sera payé exactement, mais que le pays n'en doit pas moins achever le payement de sa contribution en nature, non-seulement telle qu'elle a été réglée pour Varsovie, Kalisz, Bromberg, etc., mais encore pour Plock. Allez de l'avant, et qu'on ne manque de rien à Varsovie.

La légion polonaise du Nord devait être payée et habillée par le gouvernement polonais; elle ne l'est pas, et tous les régiments sont incomplets. Je vous ai déjà écrit pour que vous vous fassiez faire par le gouvernement une levée qui remplace tous les malades de la légion Poniatowski. Ce prince a pris pour composer ses bataillons des prisonniers russes qui ont porté la peste dans les nouveaux corps, et, d'ailleurs, beaucoup ont été tués, faits prisonniers ou ont déserté. Je crois donc une levée nécessaire pour les compléter. Après cet objet important, je désire réunir à Breslau le régiment des lanciers polonais et la légion polonaise à pied, qui viennent d'Italie. Les lanciers n'ont que 400 hommes à cheval, et je désire les porter à 1,200 hommes. La légion polonaise n'a pas 2,000 hommes; mon intention est d'en porter les compagnies à 150 hommes, d'en former 6 bataillons et de porter le complet du corps à plus de 7,000 hommes. Il faut réunir promptement tous les moyens pour arriver à ce résultat. Que le gouvernement polonais fournisse les hommes, moi je fournirai les fonds et tout ce qui pourra être nécessaire.

Vous trouverez ci-joint le décret que j'ai pris à ce sujet, et vous le communiquerez au gouvernement. Vous ne manquerez pas d'insinuer en petit comité qu'avant tout il faut lever des troupes, s'armer et battre l'ennemi; qu'après, tout s'arrangera; mais que toute déclaration qui démasquerait de trop bonne heure les projets ne saurait être d'aucun avantage.

Faites-moi répondre à ces questions : Depuis quand la légion du Nord est-elle à la solde du gouvernement polonais ? Jusqu'à quel jour est-elle soldée ? où sont les différents régiments polonais ? Depuis quel jour le 1er, le 2e, le 3e, sont-ils à la solde du gouvernement polonais, et jusqu'à quel jour chacun est-il payé ? Quels sont les régiments de cavalerie ? Où sont-ils ? Depuis quand sont-ils à la solde du gouvernement polonais, et jusqu'à quel jour sont-ils soldés ? Quel est le complet de ces différents régiments, quel en est l'effectif, quel en est le présent sous les armes, au 1er avril ou au 15 mars ? La réponse à ces questions et les états à l'appui me feront bien connaître où nous en sommes.


Finkenstein, 5 avril 1807

A M. de Talleyrand

Monsieur le Prince de Bénévent, il faut écrire à M. Sebastiani, en lui envoyant les derniers bulletins, que je ne puis m'empêcher de considérer comme un malheur que l'escadre turque se soit laissé engager après l'escadre anglaise et coure de grandes chances, quand elle pouvait n'en courir aucune. Mais une fois que 3 ou 400 pièces de canon seront dressées aux Dardanelles et qu'il n'y aura plus à craindre qu'une escadre anglaise rentre dans le canal, il sera nécessaire alors qu'une escadre turque rentre dans la mer Noire. Il faut encore l'augmenter de deux vaisseaux, de bricks et de chaloupes canonnières; il faut qu'elle cherche à ravager les côtes de la mer Noire et à empêcher entièrement le commerce russe. Ce sera là un véritable bien pour la Porte, et cela ne l'exposera à aucun danger, car l'escadre russe dans la mer Noire n'est pas dangereuse. La sottise qu'ont faite les Russes de retirer leurs forces de la mer Noire, pour les porter dans la Méditerranée, sera mise alors dans toute son évidence. La flotte turque secondera d'ailleurs les opérations de Mustafa-Pacha. Dans la Méditerranée, la flotte turque n'a que des dangers à courir sans utilité.

Ensuite, il demandera que l'armée turque passe le Pruth; il fera entendre que je pourrai me porter du côté de Kaminietz. L'armée de Michelson est très-faible; tous les efforts de l'ennemi sont de ce côté; les Turcs doivent profiter de la circonstance.

Le général Sebastiani dira aussi qu'ils doivent envoyer à leur ministre près de moi des pleins pouvoirs pour assister à un congrès et des instructions, afin que, lorsqu'il s'agira de traiter de la paix, elle n'éprouve pas de délais. Il exprimera de nouveau à cette occasion l'intention où je suis de ne pas faire la paix sans y comprendre la Porte et sans y ménager tous ses intérêts.

Écrivez à mon consul à Rustchuk qu'il ait à prévenir Moustafa-Pacha que, selon son désir, je lui envoie un officier du génie et un colonel dont il pourra se servir; que j'attends son arrivée à Jassy et au delà du Pruth, pour me porter à sa rencontre.


Finkenstein, 5 avril 1807

Au prince Jérôme

Mon Frère, je reçois votre lettre du 28 mars à quatre heures après midi. Puisque vous jugez nécessaire de garder toutes les troupes qui vous restent en Silésie, arrangez-vous pour prendre Neisse et contenir la garnison de Kosel, qui pousse des partis jusqu'en Pologne. Je vous laisse le maître de commencer le siège de Neisse quand vous le jugerez convenable. La saison est bonne; si vous pouvez prendre cette place en un mois, vous ferez une bonne et belle opération.

Payez les salaires pour les selles, et montez promptement la cavalerie. Envoyez-moi 30,000 autres pintes d'eau-de-vie, en les faisant prendre sur la contribution.


Finkenstein, 5 avril 1807

Au prince Jérôme

Mon Frère, ayez bien soin que tout ce que vous envoyez pour Danzig soit de bonne artillerie. Témoignez tout mon mécontentement au général Pernety de ce qu'il n'a envoyé jusqu'à présent que ce qu'il avait de plus mauvais. Vous pouvez compter toujours sur 1,500 hommes que vous aurez à monter. Je ne vous en ai envoyé que 1,100; mais je me propose de vous en envoyer 400 autres. Je vous recommande mes malades. Que rien ne parte que bien armé, bien équipé et qu'après avoir passé votre revue.

La mesure qu'a prise le général Verrières, de mettre les malades hors de Glogau, est ridicule. A quoi servent les places fortes, si ce n'est pour contenir les dépôts d'une armée ?


Finkenstein, 5 avril 1807

Au prince Jérôme

Mon Frère, vous trouverez ci-joint un décret qui vous parviendra par le ministre de la guerre, mais que je vous envoie d'avance. Vous y verrez qu'avant un mois vous pourrez avoir un renfort de 9,000 hommes. Le régiment des lanciers polonais et la légion à pied polonaise sont déjà à Augsbourg. Vous pourrez profiter pour leur habillement des habits prussiens que vous avez trouvés à Breslau, Glogau, etc. Vous devez avoir aussi des gibernes.

L'intendant général ordonne à l'intendant de mettre des fonds à votre disposition.

Les cadres existent, vous y trouverez un grand nombre de bons officiers ainsi je ne doute pas qu'avant le 15 mai ce ne soit pour vous un bon renfort de 8,000 hommes. Je m'en rapporte à votre activité et à votre zèle pour lever les obstacles.

Écrivez à Dresde et à Bayreuth pour savoir quand ces troupes y passeront, et être informé avec exactitude du jour de leur arrivée.


 Finkenstein, 5 avril 1807

Au général Savary, à Sangt-Albrecht

Monsieur le Général Savary, je reçois votre lettre du 3 avril. J'approuve fort que vous restiez devant Danzig. J'y vois deux avantages celui du bien du service et l'expérience que vous y acquerrez. Le maréchal Lefebvre écrit peu et rend peu compte de ce qui arrive;

Je désire que vous m'écriviez tous les jours et en grand détail. Faites-moi savoir de quels régiments sont les Russes qu'on a pris devant Danzig  de combien de bataillons se composent ces régiments , et d'où ils sont partis. Il faut faire subir à ce sujet un interrogatoire officiel aux principaux prisonniers, et me l'envoyer. Ces renseignements me sont nécessaires pour former mes idées.

J'ai ordonné que le 19e restât au corps d'armée qui est devant Danzig.


Finkenstein, 6 avril 1807

A M. Cambacérès

Mon Cousin, je reçois votre lettre du 27 mars. J'approuve fort le parti qu'a pris le ministre de la marine. Il ne faut faire aucun pas rétrograde, en rien. Je vois avec peine que votre santé soit dérangée. Heureusement j'espère que ce n'est qu'un des dérangements que vous avez tous les jours. Si vous vouliez ne pas vous droguer, vous vous porteriez beaucoup mieux; mais c'est une vieille habitude de vieux garçon. Toutefois tâchez de vous bien porter; je le désire par l'amitié que je vous porte.

Je vous donne aujourd'hui l'ordre de faire partir le 2e régiment des fusiliers de la Garde.

Est-il vrai qu'un particulier ait déposé au mont-de-piété un diamant sur lequel on lui a prêté 300,000 francs ? Rendez-moi compte si cela est vrai. Le mont-de-piété n'aurait point dû le faire sans savoir si cela me convient, car il ne paraît pas probable qu'un particulier possède un diamant d'une si grande valeur.


Finkenstein, 6 avril 1807

Au général Dejean

Monsieur Dejean, je reçois votre lettre du 26 mars, relative aux travaux d'Alexandrie. J'y porte toujours le même intérêt. Il me tarde de voir cette place en état de défense. Elle ne le sera que quand toutes les escarpes des couronnes seront terminées, et les escarpes et contrescarpes des demi-lunes parfaitement achevées.

Quant à la convention à faire avec l'Espagne pour les déserteurs, ce n'est pas la même chose que pour les conscrits. Je consens à renvoyer tous les conscrits ou hommes qui ne seraient pas encore engagés et qui tireraient à la milice. D'ailleurs, l'Espagne ne refuse pas de nous rendre nos conscrits; et je répugne à faire une convention avec l'Espagne pour les déserteurs, parce que cela répugne à nos principes généraux.


Finkenstein, 6 avril 1807 

Au général Dejean

Monsieur Dejean, je vois avec peine que vous autorisez des prisonniers anglais et russes à se rendre à Genève. Je ne veux point qu'il y ait aucun Anglais ni Russe dans aucune ville qui ne serait pas de l'ancienne France.


Finkenstein, 6 avril 1807

Au vice-amiral Decrès

Monsieur Decrès, je reçois votre lettre du 26 mars. J'approuve le parti que vous avez pris de faire mettre à l'eau le Charlemagne.

Voici ma réponse à la demande que vous me faites : tant qu'un vaisseau sera en rade d'Anvers, je ne crains rien; je ne crains point non plus quand il sera dans le port de Flessingue; mais je crains qu'il ne reste en chemin. Je pense donc qu'avant de mettre un autre vaisseau à l'eau, il faut savoir si le Charlemagne arrivera à Flessingue; s'il y arrive, je ne vois pas de difficulté d'en mettre deux autres à l'eau; car vous devez être sûr, ou qu'ils resteront devant Anvers, ou que dans quinze jours ils seront dans les fortifications de Flessingue. Il n'y a pas de doute qu'un ou deux vaisseaux dans le port de Flessingue aideraient beaucoup à la défense de la place.

Le Charlemagne étant à l'eau, faites mettre un autre vaisseau en construction.


Finkenstein, 6 avril 1807

A M. de Talleyrand

Monsieur le Prince de Bénévent, j'ai signé le décret pour la formation des chevau-légers polonais de ma Garde. J'ai fait les fonds nécessaires; j'ai nommé les majors et adjudants-majors parmi les officiers français de ma Garde; j'ai nommé le colonel et les chefs d'escadron. Le major part ce soir pour Varsovie; il se présentera chez vous; vous le présenterez au gouvernement polonais et au prince Poniatowski, et vous appuierez de tous vos moyens la formation de ce corps. Je désire avoir avant quinze jours un escadron. J'ai envoyé à Posen, avec de l'argent, un officier de ma Garde qui ramènera promptement à Varsovie des sabres, des carabines et des pistolets. Ainsi j'espère que ce régiment doit être promptement levé. En les payant comme ma Garde, vous sentez que mon intention a été de n'avoir que des hommes qui eussent de l'éducation, qui fussent habitués à l'exercice du cheval, et non des paysans à dégrossir, ce qui serait extrêmement long.

Voyez le major tous les jours, afin qu'il vous rende compte si cette formation avance.

Le 1er et le 3e régiment polonais, c'est-à-dire la 1e légion , sont réduits chacun à 800 hommes, et, si l'on n'envoie pas de recrues, ils seront bientôt réduits à rien.


Finkenstein , 6 avril 1807

A M. Daru

Monsieur Daru, je reçois votre lettre du 3 avril, de Thorn. Gardez toujours à Thorn au moins 4,000 paires de souliers, afin de pouvoir en donner aux passants. Je vois que, les 105,000 paires de souliers distribuées, il ne vous reste pas grand chose; nos besoins sont cependant plus forts que cela. Quand pourrez-vous en distribuer encore autant ? Il faut beaucoup de souliers pour l'armée.

L'armée va avoir besoin de chemises, il n'en arrive point; occupés comme ils le sont, les corps ne peuvent en faire faire. Il me semble que j'avais prescrit des mesures pour en faire confectionner 100, 000 en Silésie. Il est d'autant plus nécessaire que la Silésie fournisse ces 100,000 chemises, qu'elle ne pourra pas payer la contribution en argent. Faites-moi connaître ce qu'il en est, et quand ces 100,000 chemises seront rendues à Thorn.


Finkenstein, 6 avril 1807

A M. de Talleyrand

M. le Prince de Bénévent, écrivez à mon ministre à Dresde, pour qu'il fasse connaître que le contingent de Saxe ayant éprouvé une grande diminution par les désertions, les pertes et les événements ordinaires de la guerre, je désire qu'il soit complété sans délai par des recrues tant d'infanterie que de cavalerie. Le contingent de Saxe-Weimar a aussi éprouvé une diminution par la désertion. Saxe-Gotha n'a fourni que 400 hommes. Écrivez-en à mes différents ministres près de ces cours. Écrivez auprès du Grand-duc de Hesse-Darmstadt, du prince Primat et du duc de Nassau, pour que des recrues soient envoyées pour compléter leurs corps.


Finkenstein, 6 avril 1807

A M. Daru

M. Daru, je reçois votre lettre du 4 avril. Les 105 voitures arriveront sans doute de Breslau. Ayez soin qu'on les renvoie, sans quoi le prince Jérôme ne pourra plus rien envoyer; et faites que pour le voyage d'Osterode à Thorn les voituriers soient très-contents et largement payés.


Finkenstein, 6 avril 1807

A M. Daru

Monsieur Daru, le major général vous aura envoyé mon décret pour la formation de la légion polacco-italienne à six bataillons, et le régiment de lanciers à 1,200 chevaux. Il est probable que la légion arrivera d'Italie forte de 2,000 hommes. Le régiment de cavalerie a 400 hommes; il faut donc à ce régiment 800 chevaux, comme il faut 6,000 hommes à la légion. Les chevaux doivent être achetés en Silésie, les selles, l'habillement pour les hommes, confectionnés en Silésie.. Pour tout cela il faut de l'argent. Le conseil d'administration du régiment à cheval a envoyé des officiers, qui sont à Kalisz; j'ai ordonné qu'ils se rendissent à Breslau pour commencer l'achat des chevaux et faire confectionner les selles. Mettez des fonds à la disposition de l'ordonnateur Boerio pour cet objet. Les chevaux de lanciers sont de petits chevaux; ils peuvent bien être achetés dans le département de Kalisz. Quant à l'habillement, la légion n'a pas encore envoyé d'argent; il faut ordonner à l'ordonnateur Boerio de faire faire 2,000 habillements. L'uniforme de la légion polonaise est connu de tout le monde ; elle portera la cocarde polonaise et italienne. Ayez une correspondance en Silésie, pour savoir si l'on a assez de gibernes et de baudriers pour armer ces 6,000 hommes; s'il n'y en a pas, faites-en passer; mais il me semble que tout ce qui est provenu du désarmement et des places doit en fournir assez. Écrivez-en au prince Jérôme, auquel mon intention est de donner la haute main pour la prompte organisation de ce corps.


Finkenstein, 6 avril 1807

Au maréchal Bessières

Mon Cousin, les vélites de la Garde porteront chacun demain cinq cartouches sans balle pour faire l'exercice à feu, et trois cartouches à balle pour tirer au blanc. Vous ferez demain matin placer un blanc dans mon jardin. Ce blanc sera une planche de 6 pieds de haut et de 3 pieds de large, qu'on axera en terre, et on mesurera la distance sur 100 toises.


Finkenstein, 6 avril 1807

Au maréchal Lefebvre, à Sangt-Albrecht

Des outils sont partis d'Elbing, de Thorn et de devant Graudenz. Ne laissez pas l'ennemi rétablir l'ouvrage à cornes qu'il y avait jadis au bas de la Vistule. Il est encore temps de l'enlever, de reprendre la redoute et de s'y maintenir.

Soyez certain qu'il n'est pas entré à Danzig plus de 700 Russes. Il n'y est entré que deux bataillons, c'est-à-dire huit compagnies, chacune de 75 ou 80 hommes.

Il paraît que le général Puthod n'a pas tenu la conduite convenable. Je sais fâché que le général Gardanne ne se soit pas mieux conduit devant Danzig; il avait des torts à réparer.

Je vous recommande qu'on ait les plus grands égards pour le prince de Bade. Ce serait me manquer personnellement que de se permettre la moindre chose contre ce prince, qui donne un si bel exemple. Beaucoup qui le tournent en ridicule n'en feraient pas autant s'ils étaient dans sa position. Encouragez les Badois. Les propos de votre état-major leur sont revenus.

Que fait donc Ménard ? N'est-il qu'un soldat de plume ? Comment le général Puthod a-t-il pu évacuer la redoute une fois qu'elle a été prise ?

Que faites-vous de vos quarante pièces de campagne ?


Finkenstein , 6 avril 1807

Au général Lemarois

Monsieur le Général Lemarois, le 1er et le 3e régiment de ligne polonais sont réduits à rien; ils ne forment pas 400 hommes chacun
et ils doivent être toujours de 4,800 hommes. Je pense que la situation des deux régiments qui sont sous vos ordres n'est guère plus satisfaisante.

Veillez à ce que les boulets et poudres qu'a demandés le général Songis pour le siège de Danzig partent sans délai.

Il est ridicule que les 300 hommes que vous avez à Varsovie ne puissent vous servir, faute de sabres. Il n'est pas difficile au prince Poniatowski de faire venir des sabres de Posen par des relais placés de village en village. Ces 300 hommes vous serviraient pour éclairer les bords du Bug.

L'idée que les ennemis passeront le Bug est absurde, pas un ne s'échapperait. Le gouverneur est bien nigaud d'avoir été parler de cela à M. de Vincent; il ne sait donc pas que le maréchal Masséna est à Pultusk avec 30,000 hommes ? Masséna les prendrait par derrière tandis que vous les contiendriez.


Finkenstein, 6 avril 1807

Au général Savary, à Sangt-Albrecht

Monsieur le Général Savary, les renseignements que vous m'envoyez sur les Russes ne me satisfont pas. C'est un interrogatoire en règle qu'il faut faire subir aux prisonniers et qu'il faut m'envoyer, dans lequel soient constatés le nom des régiments russes, leur nombre et la force des compagnies : ce que chaque soldat sait très-bien.


Finkenstein, 6 avril 1807

Au maréchal Mortier, à Zernin

Mon Cousin, je reçois votre lettre du 31 mars. Je ne vois pas de difficulté à ce que vous preniez les six mortiers de 10 pouces en fer et les 10 pièces de 20. J'en ai fait expédier l'ordre à Stettin.

Le 4e de ligne italien, fort de 2,000 hommes, arrivera le 15 à Augsbourg. Le régiment de chasseurs royaux, fort de 600 hommes à cheval, arrivera également le 15 à Augsbourg. Ces corps rejoindront la division italienne, ainsi que 800 recrues qui arrivent d'Italie pour renforcer cette division. Vous aurez donc une belle division. Si vous pouvez prendre Kolberg, tout cela se réunira ensuite autour de Stralsund; l'équipage que je fais tenir de Breslau sera arrivé, la saison sera bonne, et on pourra songer alors à prendre Stralsund. Tâchez actuellement de prendre Holberg.

Envoyez à Marienwerder les 200 hommes du 3e de chasseurs qui sont sous vos ordres, afin qu'ils rejoignent leur régiment. La campagne va s'ouvrir ici, et j'ai un grand besoin de cavalerie légère.

Vous devez avoir beaucoup de pièces de 12 de campagne et des obusiers; cela peut très-bien vous servir pour le siège de Kolberg.


Finkenstein, 6 avril 1807

ORDRE

L'adjudant commandant Guilleminot s  rendra à Saalfeld et y cherchera une bonne position militaire pour une armée de 100,000 hommes, qui occupe la droite au lac de Saalfeld et la gauche du côté de Christburg. Il fera ensuite les courses et reconnaissances nécessaires pour traitera de quelle manière l'ennemi pourrait agir pour obliger à évacuer cette position. L'ennemi le peut par la gauche et par la droite : par la droite, il trouvera le lac de Saalfeld et de Deutsch-Eylau, qui l'obligera de s'enfoncer de huit lieues. Il devrait être possible de l'empêcher de passer du lac de Deutsch-Eylau au lac de Drewenz, qui communique avec Osterode. Il n'y a, je crois, qu'une petite lieue, coupée par une rivière. Il faudrait donc que l'ennemi tournât Osterode, et alors on pourrait prendre des positions derrière le Drewenz. Par la gauche, il y a la petite rivière de Sorge, qui s'étend depuis Christburg jusqu'au Draussen-See. Cette ligne s'étend ensuite depuis le Draussen-See jusqu'à Elbing, et depuis Elbing jusqu'au Frische-Haff. Il faut reconnaître toute cette position et le parti qu'on pourrait tirer des marais et des obstacles naturels; c'est dans ce cas que tout obstacle est bon, puisqu'il tend à mettre un corps moins nombreux à l'abri d'un corps plus nombreux, et oblige l'ennemi à faire des dispositions qui donnent le temps d'agir.


Finkenstein, 6 avril 1807, 3 heures après-midi.

A l'Impératrice

Mon amie, j'ai reçu ta lettre, où je vois que tu as passé la semaine sainte à la Malmaison et que ta santé est meilleure. Je désire apprendre que tu es entièrement rétablie.

Je suis dans un beau château où il y a des cheminées, ce qui est fort agréable. Il fait encore froid ici; tout est gelé.

Tu auras vu que j'ai de bonnes nouvelles de Constantinople.

Ma santé est bonne. Il n'y a rien ici de nouveau.

Tout à toi.


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