1 - 15 Octobre 1807


Fontainebleau, 1er octobre 1807

A M. Gaudin, ministre des finances

Vous trouverez ci-joint un rapport de M. Thibaudeau, duquel il résulte que le directeur des octrois ne répond pas et laisse flotter à l'aventure cette branche importante de l'administration publique. Comme elle est sous vos ordres, je ne puis que vous en témoigner mon mécontentement. Je désire que vous me fassiez mercredi un rapport qui me fasse connaître le nombre de lettres des maires et conseils généraux écrites avant le 15 septembre et qui sont sans réponse ; et vous me proposerez des mesures pour obvier à ce grand inconvénient. Depuis quand les ministres et leurs bureaux ne doivent- ils pas répondre dans le mois à toutes les affaires contentieuses ?


Fontainebleau, 1er octobre 1807

Au prince de Neuchâtel, major-général de la Grande Armée

Mon Cousin, donnez ordre par un courrier extraordinaire à ma Garde de se rendre à Paris. L'artillerie restera jusqu'à nouvel ordre à Hanovre, savoir : le personnel, le matériel et le grain. Les ambulances et les caissons, ainsi que les chevaux de trait et tout ce qui est équipage militaire. Le général Walther m'enverra l'état de ces équipages, afin que je désigne le moment où ils devront rentrer.

Écrivez au prince d'Aremberg, colonel du régiment de ce nom, de se rendre à Paris. Il laissera le commandement du régiment au major.


Fontainebleau , ler octobre 1807

A M. Lacépède, grand chancelier de la Légion d'honneur

Je reçois votre lettre du 26. Les établissements ne peuvent aller que peu à peu. Au lieu de faire entrer les jeunes demoiselles, dans des pensions à Paris, il n'y a qu'à les faire entrer sur-le-champ à Ecouen. Quand la maison ne contiendrait cette année qu'une centaine de demoiselles, ce serait suffisant. Vous m'avez dit que les bâtiments étaient prêts et en état de recevoir cent demoiselles. L'achat du mobi lier et des lits n'est pas une chose qui ne puisse se faire promptement à Paris. La directrice peut d'ailleurs, sous votre autorisation, établir un petit règlement provisoire pour placer ces jeunes demoiselles. D'ailleurs, avant qu'elles y soient installées, le règlement définitif sera établi.

Quant à Chambord, c'est une chose qui demande à être méditée; le trésor de la Légion d'honneur est trop dégarni dans ce moment pour pouvoir y penser.

Les 400 francs qu'on donne pour Écouen ne sont que pour la certitude que la demoiselle aura une dotation. Il n'y a donc pas de chef de bataillon qui ne fasse cette dépense, puisque c'est pour sa fille et qu'elle lui coûte au moins cela chez lui. D'ailleurs, je ne suis point maître de faire cette espèce de grâce. Il faut partir du principe qu'on est riche ou pauvre, selon que sa fortune est en rapport avec son éducation. Les parents doivent sentir cela. Plusieurs peuvent avoir pensé que ces 400 francs sont perdus pour leur famille; ce n'est pas mon intention. Mais allez de l'avant; pourvu que vous mettiez le mot ,provisoire, cela va bien. C'est une des choses sur lesquelles je ne puis asseoir mes idées qu'avec le temps. Mais je ne vois pas que d'ici à huit jours vous ne puissiez avoir à Écouen cinquante ou soixante demoiselles, de celles qui payent les 400 francs.

Quant à la nomination des dames, vous ne m'avez pas laissé les états; envoyez-les-moi; j'en nommerai quatre ou cinq, qui me paraissent suffisantes pour les cent premières.


Fontainebleau, 1er octobre 1807

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie

Mon Fils, l'Impératrice a fait présent à la vice-reine d'Italie d'une guirlande d'hortensias. Je désire que, sans que la princesse en sache rien, vous la fissiez estimer par de bons bijoutiers et que vous me fassiez connaître cette estimation, pour que je voie de combien ces messieurs ont l'habitude de me voler.


Fontainebleau, 1er octobre 1807

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie

Mon fils, je reçois votre lettre du 22, par laquelle vous me faites connaître que la division Clausel est de plus de 5,500 hommes. Je vois avec peine que vous n'avez pas exécuté l'ordre que je vous ai donné de réduire le nombre de compagnies de manière que les 752 hommes du 8e léger ne formassent que trois compagnies de 225 hommes chacune; idem, pour les 610 hommes du 18e, pour le 5e de ligne, vous ferez partir quatre compagnies; pour le 11e, trois; pour le 23e, quatre; pour le 60e, trois; pour le 79e, trois; et deux pour le 81e; de manière que chaque compagnie sera de 200 à 450 hommes. Mon intention est que ces compagnies, arrivées à Zara, soient incorporées dans les deux premiers bataillons, et que les cadres reviennent à l’armée. Le général de division, les deux généraux de brigade, marcheront avec cette division, pour inspecter son passage; mais, quand elle sera arrivée en Dalmatie et incorporée, tout cela rentrera en Italie. Cette division doit être considérée comme une division de renfort.

(Prince Eugène)


Fontainebleu , 1er octobre 1807

A Joseph Napoléon, roi de Naples

Mon Frère, j'ai reçu votre lettre du 20. Je vous ai déjà renvoyé les cadres d'un de vos régiments napolitains. Que voulez-vous que je fasse venir en France des régiments composés de compagnies de 40 hommes ? Il faut que les compagnies soient de 120 ou 140 hommes. Ainsi donc il y aura à peu près de quoi former deux bataillons passables des deux régiments napolitains. Les cadres du second régiment, qui retournent à Naples, pourront revenir quand il aura fait 3,000 recrues.

Vous me demandez de faire venir à Gaète, Otrante et Naples, les 3e bataillons des régiments de l'armée. Si je faisais cela, ces régiments seraient bientôt perdus, car comment envoyer à Naples des conscrits nus et sans repos, des extrémités de la France ? Vous ne réfléchissez pas assez sur l'organisation militaire et vous n'en prenez pas assez de soin. Je n'ai de grandes et de fortes armées que parce que je porte la plus grande attention à tous ces détails. Si le royaume de Naples fournissait son contingent en finances, vous ne manqueriez pas de troupes, je vous en enverrais ; mais vous ne payez rien. Vos finances sont déplorablement administrées; elles sont tout en métaphysique; l'argent est cependant une chose très-physique.

Tâchez donc de m'envoyer des détails de Corfou. Envoyez-y des officiers. Je n'ai encore entendu parler de rien. Envoyez-y trois fois par semaine.


Fontainebleau, 2 octobre 1807

A M. Cretet, ministre de l'intérieur

Je vous prie de témoigner mon mécontentement au préfet de Troyes, pour avoir autorisé, sans votre permission, une espèce de fête qu'on veut faire en l'honneur de Thibaut, comte de Champagne. Il est ridicule d'aller réveiller, après plusieurs siècles, la mémoire d'hommes qui n'ont point eu un mérite éclatant.

Demandez au préfet de Tours ce que c'est que ce monument qu'on veut élever à Agnès Sorel; cela me paraît inconvenant. Si j'ai bonne mémoire, Agnès Sorel était la maîtresse d'un roi. Elle est plus recommandable par le poème de la Pucelle, qu'à d'autres titres. Écrivez au préfet que mon intention est qu'il ne soit élevé aucun monument.

Qu'est-ce que c'est que le directeur du lycée de Tours ? Quelle espèce de discussions a-t-il eues avec le préfet ? De quelle espèce d'individus est composée l'administration de ce lycée ?


Fontainebleau, 2 octobre 1807

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie

Mon Fils, j'ai reçu votre lettre relative à l'escadre russe. Je vous ai mandé, par ma lettre d'avant-hier, qu'il y avait des mesures à garder et qu'il ne fallait pas trop de prévenances. Je vous avais dit de bien traiter les officiers généraux qui viendraient à Milan , mais je ne vous avais pas dit d'envoyer des invitations à des commandants d'escadre pour venir vous voir.


Fontainebleau, 3 octobre 1807

A M. Gaudin, ministre des finances

Il y a dans cette lettre de M. Gohier une chose qui me frappe : c'est la facilité qu'il y a de communiquer, par les canaux, de Hollande en France, et de Hollande en Allemagne et en Suisse, par le Rhin. Je croyais que des mesures avaient été prises pour étendre au Rhin et aux canaux les dispositions relatives au blocus de l'Angleterre. Il faut donc me faire un rapport là-dessus.


Fontainebleau, 3 octobre 1807

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie

Mon Fils, je vous envoie le général Lemarois. Vous lui donnerez le commandement du duché d'Urbin, de la Marche d'Ancône et des provinces de Macerata et Fermo. Vous lui donnerez pour instructions de prendre le commandement de toutes les troupes, soit du Pape, soit des miennes, qui se trouvent dans ces provinces; de placer son quartier général à Ancône, et de réunir ses troupes, afin qu'au premier ordre que je lui en donnerai il puisse prendre possession de ces provinces, en séquestrer le revenu et y établir une administration provisoire.


Fontainebleau, 4 octobre 1807

NOTE POUR M. CRETET, MINISTRE DE L'INTÉRIEUR

Le Cher sera rendu navigable de tel point à tel point  : un quart par le département, un quart par le trésor et la moitié par les forêts du Domaine et des particuliers. Le quart des départements, au moyen de centimes pour arriver aux 103,000 francs proposés par an, pendant dix ans. Le trésor fournira la même somme. Le ministre des finances verra M. Bergon pour savoir combien les forêts peuvent fournir.

Un jury pour les particuliers.

Cette navigation serait établie en trois ans.


Fontainebleau, 4 octobre 1807

NOTE POUR LE GÉNÉRAL DUROC, GRAND MARÉCHAL DU PALAIS

Je désire habiter le palais de Fontainebleau en laissant chaque chose à sa destination ancienne.

Il faut rétablir les cuisines, comme elles l'étaient, à la cour des cuisines. Il paraît que cette restauration coûterait 400,000 francs. Mon intention est de la faire en deux ans, de sorte que, l'année prochaine, la moitié soit terminée, et qu'on puisse y établir les valets de pied et cuisiniers, qui sont encombrés dans le palais. Les cuisines des princes ne doivent être que des réchauffoirs (sic).

Je pense que les dépendances de mes officiers sont trop resserrées dans la situation actuelle. On peut loger là des maîtres d'hôtel et chefs cuisiniers, ce qui débarrassera d'autant l'intérieur du palais.

Il est difficile de penser que 1'école militaire puisse longtemps rester si près du palais; mon intention est qu'elle reste à Fontainebleau, mais les jeunes gens ont trop de dissipations étant si près de la Cour; il faut donc les en séparer. La reprise de cette aile me donnera tous les logements dont je puis avoir besoin.

L'aile opposée qu'occupe le général Bellavène ne doit pas être réparée, parce qu'il paraît que, pour compléter le palais, il faut rétablir cette aile suivant la même architecture que l'Ecole militaire. C'est un travail que je ne suis pas pressé de faire. Les deux ailes devraient être réunies par une belle grille qui donnât entrée au château. Je voudrais avoir le devis de ce que coûterait cette grille, savoir les bâtiments qu'il faudra abattre à cet effet, et faire une place carrée devant la grille, afin que le palais se trouvât annoncé.

Jardins. Il faut arrêter l'entretien des jardins, il parait qu'on n'a encore rien arrêté pour cet objet, et faire le fonds des travaux, à prendre sur le budget de 1807, vu que c'est le temps d'y travailler. Ce supplément de budget sera accordé sur le fonds des dépenses diverses du service de l'intendant général. Il faut y faire planter le plus possible, soit des vignes, soit des arbres, et rendre le jardin aussi beau qu'il doit l'être.

Écuries. A l'emplacement de l'ancien chenil, il faut y établir des écuries, ce qui continuera les anciennes écuries, et y construire un grand nombre de remises. Les fondements, qui sont bons, et les matériaux aideront à cette construction.

Il faut défendre à l'Ecole militaire de couper aucun des arbres des allées. On en a coupé pour le manége, et cela est un mal.


Fontainebleau, 4 octobre 1807.

DÉCISION

M. Cretet, ministre de l'intérieur, propose à 1'Empereur de convoquer les collèges électoraux des départements dont la députation an Corps législatif doit être renouvelée.

Pour la nomination du président du collège de l'Escaut, consulter les membres du Sénat et de la députation.

Pour Maine-et-Loire, savoir si M. de Brissac, présenté, est  le même que le sénateur.

Pour le Morbihan, présenter un bas Breton, appartenant au pays par sa famille depuis trois cents ans, et parlant l'idiome.

 DECISION

Le général Clarke, ministre de la guerre, propose à l'Empereur de lever le pont de bateaux établi entre le Vieux et le Neuf-Brisach, attendu l'approche de la mauvaise saison et le peu d'utilité actuelle de ce polit.

Un pont de bateaux à Neuf-Brisach ne peut être que très-utile. Il faudrait l'y laisser constamment et proposer un péage tel , qu'il compensât l'intérêt de la dépense du pont, la surveillance, la manoeuvre et l'entretien. Il faudrait faire de même à Wesel. Faire sur ces deux ponts le péage et la dépense, lundi prochain. On ne doit lever ces ponts qu'aux mêmes époques que ceux de Mayence et de Strasbourg.


Fontainebleau, 6 octobre 1807

A M. de Champagny, ministre des relations extérieures

Monsieur de Champagny, témoignez mon mécontentement à M. Didelot de l'extrême imprudence qu'il a eue de montrer la dépêche que vous lui avez écrite. Cette conduite est insensée. N'y aurait-il eu qu'un bonjour dans votre lettre, sous quelque prétexte que ce soit, elle ne devait pas être montrée, pas même lue devant un étranger. Je blâme donc sa démarche, d'autant plus que rien ne l'y autorisait.

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Refusez à M. Mériage la permission de revenir à Vienne. Il faut qu'il reste encore où il est.


Fontainebleau, 6 octobre 1807

A M. de Champagny, ministre des relations extérieures

Monsieur de Champagny, mon intention est d'ôter l'exequatur au sieur .... consul américain à Gênes. Il porte une croix de Malte que les Anglais lui ont donnée, ce qui est contraire à la constitution américaine; et c'est d'ailleurs un mauvais sujet. Vous préviendrez de cette disposition le ministre des États-Unis. Je donne ordre au ministre de la police d'éloigner le sieur .... de Gênes.


Fontainebleau, 6 octobre 1807

A M. Gaudin, ministre des finances

Écrivez à M. Bourrienne que les seize millions provenant de Hambourg doivent être dirigés sans délai sur Paris.

Je n'approuve point le traité que M. Bourrienne a fait à Lubeck, vu le terme de trois ans qu'il a donné pour le payement; il faut que ce soit payé dans l'année.

Écrivez au ministre du trésor public pour qu'il dirige le transfert de cet argent à Paris, de manière que cela rentre promptement et nous revienne au meilleur marché possible.


Fontainebleau, 6 octobre 1807

A M. Mollien, ministre du trésor public

Monsieur Mollien, par les états que vous m'avez remis, il parait que sur le revenu de sept cent vingt millions, auquel se monte le budget de 1808, il y a à peu près cent vingt millions qui n'échoient pas dans l'année. Jusqu'à ce qu'on ait pu prendre un parti pour fixer définitivement cet objet, il me semble que vous pouvez négocier quarante millions à quatre pour cent à la Banque, quarante millions à six pour cent aux receveurs, et enfin quarante millions à la Grande Armée. Faites votre négociation avec la Banque. Vous avez déjà les quarante millions des receveurs. Faites-moi connaître comment doivent se composer les fonds de la Grande Armée ; il me semble que cela pourrait être de la manière suivante : 1° tout ce que la Grande Armée a payé pour solde au compte du trésor, pour 1806 et 1807. 2° la somme qui vous sera nécessaire pour arriver aux quarante millions. Mais je ne sais pas si la somme de cent vingt millions sera suffisante, car, par exemple, l'enregistrement, les douanes, les droits réunis, n'effectuent une partie de leurs rentrées qu'en janvier, février et mars de l'année suivante.

Indépendamment de ce, comme le service de 1806 est un exercice courant, il faudra voir aussi ce qui ne sera pas recouvré sur cet exercice au 1er janvier 1808, afin que ce qui restera à recouvrer soit réalisé de quelque manière à la caisse publique, et qu'on puisse solder cet exercice.

Fai!es-moi un état là-dessus.


Fontainebleau , 6 octobre 1807

Au général Dejean, ministre directeur de l'administration de la guerre

Monsieur Dejean, je ne puis que vous témoigner mon extrême mécontentement du passeport ci-joint que vous avez délivré à un Anglais, pour se rendre en Angleterre par Amsterdam. De quel droit ouvrez-vous la porte d'Amsterdam aux Anglais ? Les Hollandais prennent cela pour un ordre et demandent ensuite pourquoi on se plaint de ce qu'ils ont des communications avec l'Angleterre.


Fontainebleau, 6 octobre 1807

Au général Clarke, ministre de la guerre

Monsieur le Général Clarke, il faut donner des ordres, soit en France, soit en Italie, pour qu'on tienne des comptes exacts de tout ce qu'on fournit aux Russes, soit en argent et habillement, soit en denrées. Il faut, avec le même soin, faire des inventaires et expertises pour les magasins qu'ils ont laissés à Cattaro et à Corfou, afin d'établir les compensations.


Fontainebleau, 6 octobre 1807

Au vice-amiral Decrès, ministre de la marine

Je vois avec surprise que je n'ai ni à Gènes ni à Toulon aucune frégate en construction. Mon intention est que sur-le-champ vous en  fassiez mettre en construction deux à Toulon et deux à Gènes. Vous donnerez l'ordre de mettre deux bricks et une frégate en construction à Corfou. Prenez des mesures telles que les deux frégates de Toulon et de Gênes soient finies le plus tôt possible. J'ai besoin de frégates dans la Méditerranée, et il me convient plutôt d'en faire construire que d'en faire passer de l'Océan.

Donnez pour instruction à quatre bricks de partir des ports de Toulon pour se rendre à Corfou, d'où ils établiront leurs croisières dans l'Adriatique. Il faut que ce soient de bons marcheurs. Si le Cyclope, qui est à l'île d'Elbe, marche bien, il pourrait être un de ces bricks.

Il faudrait aussi à Corfou quelques petits bâtiments qui puissent rôder le long des côtes de la Grèce; mon intention est que vous en envoyiez six des meilleurs qui sont à Toulon.

Donnez aussi ordre à Toulon de mettre en armement l'Uranie et l'lncorruptible, afin d'avoir toujours là deux frégates.

Il est convenable d'envoyer à Corfou un ingénieur de la marine qui pourra mettre en construction deux beaux bricks et même une frégate. Il pourra aussi donner tous les soins nécessaires aux frégates et autres de mes bâtiments qui relâcheraient à Corfou. Il faut envoyer également à Corfou un officier d'artillerie de la marine qui entende l'installation des batteries, aussi quelques chefs ouvriers avec une escouade d'une douzaine d'ouvriers, également un capitaine de vaisseau ou de frégate pour commander la marine à Corfou sous les ordres du gouverneur, faisant fonctions de capitaine de port et de chef d'administration ; enfin vous y enverrez aussi un commis, si vous le trouvez convenable. Tout cela est nécessaire à Corfou pour y former quelques armements, mettre en état quelques frégates ou autres de mes bâtiments qui pourraient s'y rendre, et être en mesure de confectionner les vivres pour une escadre. Vous pouvez envoyer tous ces officiers par terre à Otrante, où ils s'embarqueront. Quelques enseignes et officiers de vaisseaux y seraient utiles, car déjà le gouverneur a pris une belle corvette anglaise et l'a mise en armement.

Il faudrait aussi faire armer quelques corsaires à Venise, à Naples, à Ancône, pour se rendre à Corfou.


Fontainebleau, 6 octobre 1807

Au prince de Neuchâtel, major-général de la Grande Armée

Mon Cousin, j'avais donné des ordres pour qu'au 15 septembre on démolît Küstrin et Glogau. Faites-moi connaître si on y a envoyé des mineurs et où en est la démolition de ces places. Demandez au maréchal Victor un rapport sur les commandants, sur les magasins de vivres, les canons et les munitions de guerre de ces places. Qu'attend-on pour les faire sauter ? Je suppose qu'on n'attend que mes ordres.


Fontainebleau, 6 octobre 1807

A Joseph Napoléon, roi de Naples

Mon Frère, je reçois votre lettre du 26 septembre avec différentes lettres de Corfou. Je n'ai pas chargé le général César Berthier de déclarer que Corfou faisait partie de l'Empire, et, puisque je m'étais tu, il devait bien aussi se taire. Témoignez-lui mon mécontentement. Il devait déclarer que la Constitution était conservée sur le pied où elle se trouve. Ordonnez-lui d'agir avec plus de circonspection et de prudence. Je ne conçois pas comment les magasins à poudre ne sont pas encore à sa disposition. Je conçois encore moins comment il peut proposer de rendre Parga à Ali-Pacha; il y a dans cette proposition, de la folie. Écrivez-lui fréquemment pour lui refroidir la tête et le faire marcher plus lentement. Faites-lui comprendre qu'il ne sait pas, que personne ne sait ce qu'il fera demain, et qu'ainsi il doit constamment se maintenir dans un grand système de prudence envers tout le monde. Le général César Berthier a eu très-grand tort d'arborer le drapeau français. Il oublie dans ses lettres les choses les plus importantes, telles que le nombre des troupes russes qui se trouvent à Corfou. Vous y avez sans doute envoyé, comme je l'ai ordonné, du grain, de la poudre, et surtout le 14e d'infanterie légère. Vous sentez que j'ai là trop peu de troupes. Si vous n'avez pas encore fait partir le 14e, faites-le partir sans délai; c'est ma volonté. Il n'y aura pas de difficultés pour les vivres et les munitions qui sont à Corfou et qui appartiennent aux Russes; tout cela me sera cédé; j'attends l'ambassadeur de Russie, et ce sera la première chose qu'il fera. J'espère que vous avez envoyé à Corfou un de vos officiers, diligent et qui s'empressera de vous faire son rapport. Je n'ai pas encore d'idée nette sur ce pays, et comment en aurais-je, quand je ne sais pas encore le nombre de troupes russes qui s'y trouvent et les positions qu'elles occupent ?

Donnez l'ordre positif au général César Berthier de n'employer à Xante et à Céphalonie que quelques officiers français, avec des troupes du pays et les Albanais qu'il a pris à sa solde, mais pas un seul soldat français de ligne, ni un italien. Mon intention est que toutes mes troupes soient concentrées à Corfou, Parga et Sainte-Maure; que la position de Parga soit fortifiée et mise en bon état, qu'on y fasse travailler sans cesse, de manière à la mettre à l'abri des efforts des Turcs; qu'on fasse la même chose à Sainte-Maure. On doit, du reste, très-bien traiter Ali-Pacha et les Turcs.

Autorisez le général César Berthier à mettre en construction sur le chantier de Corfou deux bricks, qui seront montés par des matelots du pays. On y mettra une garnison française et quelques officiers de marine qu'on enverra. Ces deux bricks serviront à défendre l'île contre les corsaires.

Tenez au courant la solde des troupes qui sont dans les Sept Iles, et laissez toujours une somme de 50,000 francs à la disposition du gouverneur pour dépenses extraordinaires; autant à la disposition du commandant de l'artillerie; autant à celle du commandant du génie, sauf à remplacer tous les mois ce qu'ils auront employé.

Voici de quelle manière je désire que mes troupes soient placées. Le général César Berthier, gouverneur général, à Corfou, avec un bataillon du 14e d'infanterie légère, les deux bataillons du 6e, le 5e régiment italien et les troupes du pays. Il aura sous ses ordres le général Cardenau, pour commander en second en cas qu'il lui arrive un événement; un adjudant général, six adjoints d'état-major, un colonel pour faire fonctions de commandant d'armes de Corfou, indépendamment des colonels des 6e et 14e régiments (le colonel du 6e étant prisonnier, le major ira le remplacer); un colonel du génie ; un colonel d'artillerie ; un chef de bataillon d'artillerie faisant fonctions de directeur du parc; un chef de bataillon et quatre autres officiers du génie. (en tout six officiers du génie pour Corfou) ; et quatre capitaines en second d'artillerie, également six officiers d'artillerie en tout pour l'état-major de Corfou.

La garnison de Corfou fournira à la position de Parga un détachement de 600 hommes, qui sera relevé toutes les fois qu'on le jugera convenable. Ce détachement sera composé, savoir : de 3 compagnies du 6e, qui, au moment du départ, seront toujours complétées à plus de 100 hommes présents sous les armes par compagnie, ce qui fera 300 hommes; 6 pièces d'artillerie de campagne avec une demi-compagnie d'artillerie; 100 Grecs et 2 compagnies du 5e régiment italien, qui également seront toujours complétées à 100 hommes présents. Ces forces seront sous les ordres d'un général de brigade français, d'un chef de bataillon et d'un capitaine hors de ligne, faisant fonctions de commandant d'armes à Parga, d'un officier du génie et d'un officier d'artillerie en résidence. Indépendamment des pièces de campagne, on enverra à Parga 18 ou 20 pièces de fer, et l'on travaillera sans délai à faire là un point d'appui qui soit à l'abri des efforts des Turcs et de qui que ce soit; on y élèvera des batteries battant la mer, pour empêcher les Anglais d'en approcher.

Le général Donzelot commandera à Sainte-Maure. Il aura sous ses ordres le second bataillon du 14e d'infanterie légère, 900 Albanais, 6 pièces de campagne et une compagnie d'artillerie. On lui enverra aussi assez de pièces de fer pour élever des batteries de côtes. Il fera travailler avec la plus grande activité aux ouvrages nécessaires qui mettront l'île à l'abri des Anglais. Il aura de plus sous ses ordres deux officiers du génie et un officier d'artillerie commandant.

Il y aura à Céphalonie un chef de bataillon français commandant, deux capitaines, un lieutenant d'artillerie et une escouade de 16 canonniers, 600 Albanais et 600 Grecs levés dans le pays. De même à Zante. Ainsi, si une expédition anglaise considérable se portait sur la Céphalonie et Zante, et que ces îles ne pussent être secourues par Sainte-Maure ou par les Turcs du continent, je ne serais exposé à perdre que quelques officiers et pas de soldats français.

Si vous voulez envoyer six compagnies, ayant 120 hommes par compagnie, de vos troupes napolitaines à Corfou, elles pourraient
prendre du service et y être utilement employées.

Il vous reste donc à expédier le nombre d'officiers d'artillerie et du génie nécessaire, à envoyer un autre général de brigade pour commander à Parga, et un certain nombre d'officiers pour commander à Zante et à Céphalonie.

Le commandant de Sainte-Maure devra avoir une correspondance suivie avec le gouverneur général de Corfou; mais il correspondra aussi directement avec vous, pour vous donner fréquemment des nouvelles de ce qui se passe. Vous donnerez pour instruction à ces commandants de vivre en bonne amitié avec les Turcs, de les cajoler, mais de se tenir constamment sur leurs gardes et en bon état de défense.


Fontainebleau, 6 octobre 1807

A Joseph Napoléon, roi de Naples

Mon Frère, dans l'état de situation que vous m'avez envoyé le 8 septembre, je vois qu'il n'y a à Corfou qu'un colonel d'artillerie et trois capitaines adjoints: il est donc nécessaire d'y envoyer encore un chef de bataillon et un capitaine, pour Sainte-Maure.

Je vois qu'il n'y a qu'un chef de bataillon du génie : il est donc nécessaire d'y envoyer un colonel; qu'il n'y a que deux compagnies d'artillerie à pied, faisant ensemble 130 hommes; il est donc nécessaire d'en envoyer deux autres.

Je n'y vois pas d'ouvriers ; il est nécessaire d'en envoyer une escouade avec un bon officier, pour faire toutes les réparations convenables aux affûts.

Je ne vois pas si l'on a envoyé de l'artillerie de campagne; il en faut au moins 18 pièces. Il ne s'agit pas de se laisser renfermer dans la place de Corfou : c'est l'île de Corfou, l'île de Sainte-Maure et le poste de Parga, qu'il faut défendre. Je vous ai fait connaître mes intentions dans la lettre que je vous ai écrite hier ; prenez des  mesures pour vous y conformer.

J'ai fait partir, il y a huit jours, de l'or pour être envoyé à Corfou, où il faut qu'on ne manque de rien. Pourquoi n'y envoyez-vous pas des corsaires qui empêcheraient les corsaires ennemis d'infester l'Adriatique et vos mers ? Qui vous empêche, dans cette saison, d'envoyer des bâtiments chargés d'huile et de blé à Marseille ?

Je désire beaucoup qu'aussitôt que les froids seront arrivés vous ne souffriez pas que les Anglais mettent le pied sur le continent.

Faites-moi connaître pourquoi on n'occupe pas Butrinto ni les autres points du continent qui appartiennent aux Sept Iles ?

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Faites ce que je vous dis pour les forts; faites ce que je vous dis scrupuleusement, puisque vous ne savez pas mes projets.


Fontainebleau, 6 octobre 1807

Au général Savary, en mission à Saint-Pétersbourg

Monsieur le Général Savary, les frégates et les vaisseaux de transport russes ont paru devant Venise. 4,500 hommes de troupes de cette nation ont été débarqués et sont cantonnés dans les environs de Padoue. L'amiral doit être retourné dans les ports de l'Istrie. On leur a fourni tout ce dont ils avaient besoin, comme vous le verrez par la lettre ci-jointe écrite au vice-roi.

Les Anglais ont pris un brick et six bâtiments de transport russes dans l'Archipel. Je ne sais pas si c'est une déclaration de guerre ou une conséquence de toutes les vexations qu'ils ont l'habitude d'exercer en mer.

Vous avez eu tort de trouver mauvaise la conduite du général Rapp. Les officiers prussiens portent quelquefois leur insolence à un degré qu'un homme d'honneur ne saurait tolérer. Vous savez que le roi de Prusse est faible, et qu'il manque de l'énergie qui serait pourtant bien nécessaire pour imposer silence à ses officiers. Enfin toutes les lettres des officiers de l'armée me prouvent que le général Rapp n'a pas pu faire autrement. Les Russes, par suite de l'armistice, avaient évacué Bucarest ; immédiatement après, un courrier de Saint-Pétersbourg étant arrivé le 12 septembre à leur quartier général, ils sont rentrés dans la ville et ont réoccupé tout le pays. Vous sentez que cela inquiète beaucoup les Turcs. J'attends l'ambassadeur de Russie pour m'entendre avec lui sur toutes ces questions. Lorsque les circonstances veulent que vous parliez des Prussiens, faites comprendre leur mauvaise conduite. D'ailleurs vous savez que, dans le traité de paix, j'ai stipulé la restitution de la Prusse comme la Russie a stipulé l'évacuation de la Valachie et de la Moldavie. Il est donc nécessaire que nous nous entendions sur tout cela, et, avec le désir que l'empereur Alexandre et moi avons de tout concilier, nous lèverons les difficultés sur tous les points.


Fontainebleau, 6 octobre 1807

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie

Mon Fils, faîtes partir tous les hommes qui sont destinés pour la garde impériale, venant des régiments de l’armée d'Italie et de celle de Naples; dirigez-les sur Paris. Je suppose que ce sont de vieux soldats, des hommes d'un bon service.

(Prince Eugène)


Fontainebleau, 7 octobre 1807

A M. de Champagny. ministre des relatons extérieures

Monsieur de Champagny, faites connaître à M. de Beauharnais que je vois avec peine sa dépêche relative à ses correspondances avec les agents du prince royal; que cela m'a paru misérable; que ces intrigues sont indignes de mes ambassadeurs; que cela n'est que propre à le jeter dans un ordre d'affaires qui le compromettra, et qu'il doit se garder de tous les piéges qui lui seront tendus et où il tombera infailliblement.


Fontainebleau, 7 octobre 1807

A M. Fouché, ministre de la police générale

Je vous envoie une correspondance interceptée du comte de Lille. Elle m'a paru intéressante. Je vous prie de me faire un rapport sur tout ce que vous pourrez y comprendre. Il me semble que la correspondance de Fauche-Borel y joue un rôle.


Fontainebleau, 8 octobre 1807

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie

Mon fils, je reçois votre lettre du 1er octobre, avec la copie de la lettre du contre-amiral Baratinsky. Si cet amiral appartient à l'escadre de (main propre) la Baltique, pas de doute qu'il ne doive se joindre à l'escadre de l'amiral Sininvin. S’il est de l'escadre de la mer Noire, il doit encore se rendre à Corfou, pour de là passer les Dardanelles (main propre); j’ai obtenu la permission de la Porte. Du reste, il ne faut plus se mêler de cela.

(Prince Eugène)


Fontainebleau, 8 octobre 1807

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie

Mon Fils, je reçois votre lettre du 3 octobre avec la lettre du cardinal Bayane qui y était jointe. Vous avez eu tort de faire revenir le cardinal de Turin ; vous sentez que cela va faire de l'éclat, et que ce n'était pas là mon but. L'esprit de votre instruction était tel, que vous deviez envoyer au cardinal Bayane une personne de confiance pour lui dire de ne pas quitter Turin jusqu'à nouvel ordre, ce qui se colore par le prétexte d'une maladie ou autrement, s'il n'avait pas eu les pleins pouvoirs nécessaires pour terminer toutes nos discussions avec le Pape. Vous avez agi là avec beaucoup de légèreté. Dans les affaires diplomatiques, c'est manquer de sagesse que de mettre le public dans sa confidence: or c'est ce que vous faites lorsque, pour une affaire hypothétique et provisoire, vous faites revenir le cardinal à Milan.


Fontainebleau, 8 octobre 1807

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie

Mon fils, je reçois votre lettre du 5 octobre. Dans les 8,850 sequins que vous faîtes donner, par mois à la division russe de Cattaro, la solde se trouve-t-elle comprise ? Comme vous avez les états de situation de cette division; vous pouvez comparer ce traitement avec celui des troupes françaises; vous avez bien fait d'accorder les 8,850 sequins; quant aux 15,000 sequins, cela ne presse pas. Faites tenir note de tout ce que vous faites donner aux Russes, afin qu'on puisse établir une compensation avec les magasins de Cattaro et de Corfou; faites-moi connaître la quantité de vivres que les Russes ont laissés à Cattaro, et ce que cela vaut.

(Prince Eugène)


Fontainebleau, 8 octobre 1807

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie

Mon fils, mon ministre a quitté Lisbonne; faites mettre l'embargo sur les bâtiments portugais à Civita-Vecchia, Ancône, Venise, Livourne, et dans tous les ports qui sont en notre pouvoir. J’apprends qu'on a tiré des traites de Corfou sur vous pour payer les notes des régiments qui transportent les troupes russes, serait une chose absurde.

(Prince Eugène)


Fontainebleau, 8 octobre 1807   

Au général Savary, envoyé en mission à Saint-Pétersbourg

Vous trouverez ci-joint l'état des troupes russes de Cattaro. Vivres, argent, solde, j'ai ordonné qu'on fournît à ces troupes tout en abondance. Vous trouverez ci-joint une lettre de l'amiral Baratinski. Il parait qu'il a reçu des ordres de l'amiral Siniavine pour se rendre à Corfou. Par mes ordres, il a été approvisionné pour un mois. A Cadix, à Toulon, en Hollande, j'ai ordonné que les escadres russes qui s'y présenteraient fussent fournies de tout. Je n'ai pas encore d'avis que l'amiral Siniavine soit arrivé à Cadix.


Fontainebleau, 9 octobre 1807

A M. de Champagny, ministre des relations extérieures

Monsieur de Champagny, écrivez à mes consuls en Hollande que j'apprends avec peine qu'ils donnent des certificats d'origine hollandaise à des marchandises provenant de l'industrie et du commerce anglais, destinées pour la France et 1'Italie. Faites-leur bien connaître qu'ils aient à être plus circonspects et à ne pas favoriser ainsi le commerce de l'Angleterre.


Fontainebleau, 9 octobre 1807

NOTE POUR M. CRETET

Sa Majesté prend fort à coeur la destruction de la mendicité et la formation des cent dépôts dont elle a ordonné l'établissement. Elle a déjà accordé des fonds assez considérables dans la Côte-d'Or, pris sur les produits du quart de réserve des bois des communes.

Le ministre de l'intérieur a à lui proposer, pour d'autres départements, une pareille disposition de fonds, provenant de la même source et existant actuellement à la caisse d'amortissement. Sa Majesté désire que le ministre lui remette bientôt ce travail et qu'il porte la disposition des fonds des communes aussi loin qu'elle peut aller. Mais ces moyens ne sont pas suffisants. Sa Majesté est dans l'intention de disposer, pour le même objet, d'une portion du revenu des villes sur leurs recettes de 1808. En arrêtant les budgets de Meaux, Évreux, Carignan et Rive-de-Gier, Sa Majesté a ordonné qu'une somme de 70,000 francs resterait à la disposition du ministre de l'intérieur pour être employée, à concourir à l'établissement des dépôts de mendicité. Elle prévoit qu'avec ce double moyen de recette on pourvoira à cette dépense. Sa Majesté invite le ministre de l'intérieur à être désormais très-sévère sur les dépenses inutiles des communes, et à réserver, à mesure qu'il arrêtera des budgets, ce qui pourra se trouver disponible. Sa Majesté désire aussi que le ministre lui envoie, le plus tôt possible, l'état des revenus des communes dont il arrête le budget pour l'aimée 1807, en les classant par départements.

Il est encore une dépense qui pourrait être convenablement faite par les communes : elle consisterait dans l'établissement de bourses et demi-bourses dans les séminaires diocésains. Le nombre de ces bourses et demi-bourses serait relatif à la situation des finances de la commune. C'est le corps municipal qui nommerait. Cette disposition concourrait, avec les deux mille quatre cents bourses et demi-bourses aux frais du trésor public, à recruter les prêtres dont les églises ont besoin. Lorsque le ministre aura remis à Sa Majesté le tableau des revenus des communes pour 1807, elle pourra fixer ses idées à cet égard.

Il est d'autant plus nécessaire de trouver des objets de dépenses utiles pour les communes que, si l'on ne dispose pas de leurs moyens, ils ne manqueront pas d'être employés à des choses inutiles. Plusieurs communes ont été chargées, pour l'établissement des lycées et des écoles secondaires, de dépenses considérables, qui doivent être en général terminées. Les dépôts de mendicité coûteront beaucoup moins, et quand ce nouvel établissement sera fait, il sera indispensable de trouver d'autres dépenses générales à faire faire aux communes. On pourrait, par exemple, mettre l'entretien des prisons à leurs frais ; cela serait fort avantageux au service des prisons, puisque l'ordonnateur se trouverait ainsi près de la dépense. Cette mesure serait aussi fort avantageuse au ministère, puisqu'elle le déchargerait de dépenses qui ne laissent pas que d'aller fort haut.

En renvoyant à Sa Majesté l'état qu'elle demande, le ministre est invité à y joindre le relevé du revenu des communes en immeubles , afin qu'elle connaisse le montant du dixième qui doit être prélevé pour le clergé selon la loi du budget.


Fontainebleau, 9 octobre 1807

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie

Mon Fils, je vous ai déjà mandé d'envoyer du biscuit et du blé de Venise à Corfou ; faites-en aussi passer d'Ancône. Le 5e de ligne italien, qui est à Corfou, est mal habillé : faites-lui envoyer les objets qui lui manquent pour qu'il soit en bon état. Je vous ai déjà donné l'ordre de faire partir des conscrits pour compléter les compagnies du 6e de ligne et du 5e italien à 140 hommes. Faites partir vingt-cinq milliers de poudre d'Ancône et cent vingt-cinq milliers de Venise pour Corfou , une grande quantité de poudre étant nécessaire pour cette île. Faites partir un million de cartouches de Venise pour Corfou. Rendez-moi compte du départ de tous ces objets. Envoyez quatre petits bâtiments de ma marine italienne pour rester en station à Corfou pour servir à main tenir libre la communication entre l'Albanie et le royaume de Naples et en éloigner les corsaire.


Fontainebleau, 9 octobre 1807

A Joseph Napoléon, roi de Naples

Mon Frère, je reçois des lettres du 20 septembre du général César Berthier. Sa correspondance n'est pas satisfaisante. Il ne me parle de l'escadre russe qu'à l'occasion de plaintes que lui donne lieu de faire la conduite de l'amiral Siniavine; mais il ne parle pas du nombre des vaisseaux et frégates, de la force des troupes, ni de l'époque où l'amiral doit partir. Je suis encore à connaître la quantité de troupes que les Russes ont à Corfou. Je ne connais pas davantage la force des croisières anglaises dans ces parages.

Donnez ordre au général Berthier de tenir un journal exact de tout ce qui entre, de ce qui sort, de sa correspondance avec Ali-Pacha et les Grecs, et avec les autres pachas turcs. Il doit vous envoyer ce journal régulièrement.

Je vois avec peine que, le 20 septembre, le général Donzelot et le 14e léger n'étaient pas à Corfou. Cela est de la plus grande importance. Je fais passer à Corfou du biscuit et du blé, de Venise et d'Ancône. Je compte sur les 10,000 quintaux que vous devez faire partir d'Otrante. Mon intention est que Corfou soit approvisionnée pour un an.

J'ai envoyé de l'or et j'ai donné ordre qu'on fit passer exactement tous les mois 250,000 francs en or à Corfou. Il m'est  très-important que la garnison de Corfou soit parfaitement bien payée et ait sa solde toujours au courant.

Je vois avec peine que la solde des troupes soit arriérée; cela ne peut se concevoir autrement que par le défaut total d'ordre dans l'administration. Du reste, ce qui n'est qu'un mal ordinaire pour Naples en serait un très-grand pour Corfou.


Fontainebleau, 9 octobre 1807

A Louis Napoléon, roi de Hollande

On m'assure que le commerce anglais se fait au bord du Weser et de l'Ems. On désigne assez particulièrement Emden. Envoyez quelqu'un faire saisir les marchandises anglaises qui se trouvent là, et prenez des mesures pour arrêter cette contrebande.


Fontainebleau, 12 octobre 1807

A M. de Champagny, ministre des relations extérieures

Monsieur de Champagny, expédiez à M. de Rayneval l'ordre de revenir en France; il paraît que ce jeune chargé d'affaires a déployé peu d'énergie et de talents diplomatiques. Avec plus d'énergie de sa part les choses auraient autrement tourné.

Écrivez à M. de Beauharnais que je me regarde comme en guerre avec le Portugal ; que je compte que, le ler novembre, mes troupes seront à Burgos; que, si l'Espagne veut d'autres troupes, elle n'a qu'à en faire la demande, que je lui en enverrai ; que, quant aux arrangements à faire pour le Portugal, il doit s'entendre avec le prince de la Paix; que, dans le climat d'Espagne, l'hiver est la vraie saison pour agir; que le corps du général Junot doit être de près de 20,000 hommes.

Comme il serait possible que les Anglais envoyassent des troupes à Lisbonne, je désire savoir combien l'Espagne envoie de troupes. Mais dites bien qu'il ne s'agit pas de faire comme dans la dernière guerre; qu'il faut marcher droit à Lisbonne.


Fontainebleau , 12 octobre 1807

A M. Cretet, ministre de l'intérieur

Monsieur Cretet, je désire que vous me fassiez un rapport sur le Temple, sur Vincennes, sur le palais actuel de justice y compris la Conciergerie, la préfecture de police et l'hôtel actuel de la Comptabilité. Le but de ce rapport est de me faire connaître s'il convient d'établir la prison d'État à Vincennes, afin de ne pas l'avoir au milieu de Paris, ou s'il convient d'établir au Temple des prisons criminelles, le tribunal criminel et même la cour des Comptes. Alors la préfecture de police serait convenablement établie pour le but où je veux arriver. La Conciergerie et les prisons actuelles du tribunal criminel seraient établies ailleurs. On dit qu'il y a au Temple un beau palais qui ne sert à rien.


Fontainebleau, 12 octobre 1807, 8 heures du matin

Au général Clarke, ministre de la guerre

Monsieur le Général Clarke, envoyez un courrier extraordinaire au général Junot, à Bayonne. Témoignez-lui mon mécontentement de ce qu'il ne correspond pas tous les jours avec vous, et qu'il ne vous fait pas connaître la situation de son armée et de ses administrations.

Donnez-lui l'ordre de partir vingt-quatre heures après la réception de votre lettre pour entrer en Espagne avec son armée, en se dirigeant sur les frontières du Portugal. L'Espagne doit avoir donné des ordres pour la nourriture de ses troupes.

Vous ferez connaître au général Junot que mon ambassadeur est parti de Lisbonne ; qu'ainsi il n'y a pas un moment à perdre afin de prévenir les Anglais.

Avez-vous reçu un état de situation de son armée depuis que les troupes sont arrivées à Bayonne ? Celui que j'ai, en date du 15 septembre, est évidemment faux et ne présente pas ce qui existe, mais l'exécution des ordres que j'ai donnés, car tout est au grand complet.


Fontainebleau , 12 octobre 1807

Au général Clarke, ministre de la guerre

J'apprends avec étonnement qu'après avoir armé les Russes à Metz, on les a désarmés. D'où viennent ces ordres et contre-ordres, et qui est coupable d'une inadvertance aussi grave ? Sans doute qu'il ne fallait pas armer les Russes en France, mais aux frontières; mais, si on les avait armés, il était absurde de les désarmer. Si cela s'est fait avant que vous ne preniez le portefeuille, il faut envoyer ma lettre au ministre Dejean ; si ce sont des subalternes, il faut les punir. Des choses de cette nature peuvent être de la plus grande importance, en faisant naître des soupçons et de fausses interprétations.

Avant que je n'allasse commander mon armée, le ministre de la guerre était dans l'usage de me remettre, tous les jours, des extraits de la correspondance des généraux et commandants des divisions utilitaires; ces bulletins m'étaient très-utiles pour savoir ce qui se passe et voir ce qu'il y a d'essentiel dans la correspondance militaire.


Fontainebleau, 12 octobre 1807

Au général Clarke, ministre de la guerre

Monsieur le Général Clarke, présentez-moi un projet de décret

1° Pour nommer un gouverneur général des îles Ioniennes, qui sera investi directement de toute l'autorité militaire et supérieurement
de l'autorité civile et diplomatique;
2° Pour nommer le sieur Bessières, consul général à Venise, mon commissaire près le sénat des Sept Iles, et l'investir de l'autorité qu'ont les préfets coloniaux, mais sous l'autorité du gouverneur général; enfin pour le charger, également sous l'autorité du gouverneur, de toute la correspondance avec mes consuls et agents de la Morée, de la Bosnie et de l'Archipel;
3° Pour nommer un payeur qui sera chargé de tenir des comptes directs avec le trésor public, pour l'argent qui sera envoyé dans les Sept Iles pour l'entretien et la solde des troupes qui s'y trouvent ; ce payeur sera chargé en outre de la recette des sommes qui seront perçues pour mon compte dans ces îles ;
4° Pour nommer un commandant de la marine qui sera sous l'autorité du gouverneur général, et qui tiendra un journal exact de tous les bâtiments qui entreront et sortiront, de ceux qui seront signalés, etc.

Le gouverneur général correspondra exactement avec le ministre de la guerre. Mon commissaire correspondra avec mes ministres pour toutes les affaires civiles, de finances, de législation , etc. Le payeur comptera avec le trésor public et y enverra ses bordereaux plusieurs fois par semaine.

Vous mettrez dans le décret que le gouvernement des Sept Iles sera tout entier dans les mains de la guerre, comme les colonies sont dans celles du ministre de la marine. Du reste, mon intention est qu'il ne soit rien innové à l'administration intérieure du pays, et qu'elle soit maintenue dans sa plus grande franchise, jusqu'à ce que j'aie donné de nouveaux ordres. Mûrissez bien ce projet, et conférez-en en détail avec le ministre de la marine.


Fontainebleau, 12 octobre 1807

Au général Clarke, ministre de la guerre

Monsieur le Général Clarke, demandez au général César Berthier si 2 ou 300 hommes de cavalerie pourraient lui être utiles ; je lui enverrais 2 ou 300 chasseurs. Pourrait-il les monter, soit à Corfou, soit à Parga ? Aurait-il du fourrage pour les nourrir ? Ecrivez au général César Berthier qu'il doit beaucoup ménager Ali-Pacha ; qu'il est absurde de mettre en doute si je dois lui céder ou non Parga ; que ce n'est pas à mes généraux à rien céder; que je lui ai déjà écrit que j'attendais qu'il fit occuper Parga en force et qu'il mit ce point à l'abri de toute insulte ; que toutes les fois qu'Ali-Pacha lui parle, il doit dire qu'il va envoyer près de moi ; que du reste il doit bien vivre avec tous les pachas et les Grecs. Son dilemme doit être que, la paix étant faite, tout le passé doit être oublié, et que tout le inonde doit vivre en bonne amitié. Recommandez-lui de ne pas être dupe de la finesse d'Ali-Pacha et de ne se permettre aucune négociation diplomatique, ni parlage inutile; recommandez-lui aussi de marcher lentement. Où a-t-il trouvé que c'était moi qui devais payer les bâtiments que nolisent les Russes pour transporter leurs troupes à Venise ? Il paraît qu'il a fait des marchés et qu'il paye; il y a dans cette conduite de la folie.


Fontainebleau, 12 octobre 1807

Au prince de Neuchâtel, major-général de la grande Armée

Je vous renvoie la correspondance de votre frère. Recommandez-lui prudence et sagesse, de bien vivre avec Ali-Pacha, de faire occuper en force Parga, d'être bien avec la Porte, les Russes et les Grecs, de se débarrasser de toutes les demandes qui le gênent en disant qu'il les envoie à Paris, de faire armer Parga, de marcher posément.

Où a-t-il trouvé que c'était moi qui devais payer le nolis des bâtiments qui transportent des troupes à Venise ? Je ne lui ai jamais dit cela; que les Russes ont plus de bâtiments que moi dans l'Adriatique ? Il a eu grand tort de donner des bons ; il y a de la légèreté dans sa conduite.

Engagez-le à vous écrire souvent, et répondez-lui par l'estafette, qui arrive très-promptement à Naples.


Fontainebleau, 12 octobre 1807

A M. Fouché, ministre de la police générale

La fraude redouble dans le département de l'Escaut. Faites-moi un rapport et remettez-moi la note de trente ou quarante individus, principaux agents de cette fraude, soit qu'ils demeurent sur le territoire français, soit hollandais. On désigne spécialement Gand, Saint- Nicolas, Anvers.


Fontainebleau, 12 octobre 1807

A Charles IV, roi d'Espagne

Monsieur mon Frère, dans le temps que la Hollande, les différents princes de la Confédération du Rhin, Votre Majesté, l'empereur
de Russie et moi, sommes réunis pour chasser les Anglais du continent et tirer vengeance, autant que possible, du nouvel attentat qu'ils viennent de commettre contre le Danemark, le Portugal offre depuis seize ans la scandaleuse conduite d'une puissance vendue à l'Angleterre. Le port de Lisbonne a été pour eux une mine de trésors inépuisable; ils y ont constamment trouvé toute espèce de secours dans leurs relâches et dans leurs expéditions maritimes : il est temps de leur fermer et Porto et Lisbonne. Je compte qu'avant le 1er novembre l'armée que commande le général Junot sera à Burgos, réunie à l'armée de Votre Majesté, et que nous serons en mesure d'occuper en force Lisbonne et le Portugal. Je m'entendrai avec Votre .Majesté pour faire de ce pays ce qui lui conviendra, et, dans tous les cas, la suzeraineté lui en appartiendra, comme elle a paru le désirer. Nous ne pouvons arriver à la paix qu'en isolant l'Angleterre du continent et en fermant tous les ports à son commerce. Je compte sur l'énergie de Votre Majesté dans cette circonstance, car il est indispensable de forcer l'Angleterre à la paix pour donner la tranquillité au monde.


Fontainebleau, 13 octobre 1807

Au cardinal Fesch, Grand Aumônier

Mon Cousin, je vous envoie le mémoire de la ville d'Ajaccio. Voici, ce me semble, ce qui pourrait être fait. Le couvent des Jésuites est suffisant pour l'instruction publique et la préfecture. On pourrait rendre le séminaire à sa première destination et y établir le séminaire, ou bien on pourrait mettre le séminaire au couvent de Saint-François, et laisser les bâtiments du séminaire pour y établir toutes les administrations. Par là l'église de Saint-François serait rendue au culte. On pourrait mettre l'hôpital militaire à la Piazza d'Olmo. Faites-moi un petit rapport sur tout cela.


Fontainebleau, 13 octobre 1807

A M. Cretet, ministre de l'intérieur

Monsieur Cretet, je désire que vous me fassiez un rapport sur les travaux dans les deux départements de la Corse. On en fait quelques-uns qui sont inutiles. Il ne faut en Corse que deux seuls grands chemins, l'un d'Ajaccio à Bastia et l'autre de Bastia à Saint-Florent; tous les autres chemins doivent être considérés comme vicinaux. On sent qu'une île a moins besoin de grands chemins qu'une province du continent, vu que la mer est un grand moyen de communication.

Faites-moi connaître ce que coûteraient un pont sur le Liamone et un sur le Gravone.

Remettez-moi les plans et un rapport sur ce que coûtent les quais du port d'Ajaccio, et le projet adopté pour donner de bonnes eaux à la ville d'Ajaccio. Où en sont les travaux et à quoi sont-ils évalués ?


Fontainebleau, 13 octobre 1807

A M. Gaudin, ministre des finances

Les Anglais viennent de lever le blocus de l'Elbe et du Weser. Ils ont été portés à cette démarche parce qu'ils ont eu une si grande facilité à charger les bâtiments neutres de leurs marchandises et à les faire écouler dans le continent, parce que, du moment que les neutres peuvent naviguer librement, leur commerce peut trouver un débouché. Faites-moi connaître quelle est la législation actuelle pour les bâtiments de l'Elbe et du Weser, et proposez-moi de donner l'ordre que tous les bâtiments qui arriveraient ayant touché en Angleterre soient saisis et lent, cargaison confisquée, et que les bâtiments neutres qui n'auraient pas été en Angleterre, mais qui se seraient chargés dans d'autres pays de marchandises anglaises ou de denrées coloniales, soient mis en entrepôt jusqu'à ce qu'il soit bien prouvé, par une enquête et par une décision, que ces marchandises ne viennent pas des colonies anglaises. Voyez avec M. Collin s'il y aurait d'autres mesures à prendre pour empêcher dans l'Elbe cette contrebande, qui est si avantageuse aux Anglais. Apportez-moi, mercredi, un projet de décret sur les mesures à prendre, ainsi que toutes les pièces relatives au blocus de l'Angleterre.


Fontainebleau, 13 octobre 1807

Au vice-amiral Decrès, ministre de la marine

Monsieur Decrès, mon ministre a quitté le Portugal; on doit donc considérer la guerre comme déclarée à cette puissance. Envoyez donc des courriers dans tous mes ports, à Hambourg et en Hollande, et écrivez par l'estafette à Naples, en Italie, à Livourne et à Gènes, pour que l'embargo soit mis sur tous les bâtiments portugais.


Fontainebleau, 13 octobre 1807

Au général Duroc, grand maréchal du palais

Écrivez à M. Denon que j'ai arrêté que le quadrige de Berlin serait placé sur le temple de la Victoire, à la Madeleine.

Ses médailles peuvent être approuvées; mais il faudrait qu'une constatât la prise de Magdeburg, une la prise de Stettin, l'autre la conquête de la Silésie avec toutes ses places, une la prise du Hanovre, une autre l'occupation de Hambourg.


Fontainebleau, 14 octobre 1807

Au maréchal Davout, chargé du 1er commandement de la grande Armée

Mon Cousin,j'ai reçu vos lettres du 25 septembre. La légion polacco-italienne et le régiment de lanciers ne doivent pas rester au service de Pologne; ils passent au service du roi de Westphalie. Je leur ai déjà donné l'ordre de se rendre à Magdebourg. I faut que le gouvernement polonais leur fasse comprendre qu'il ne peut les prendre à son service, parce qu'il ne peut pas les payer; qu'il ne peut pas même payer la légion du Nord, tandis que j'aurais pu la prendre à ma solde.

J'ai accordé à Mme Sulkowska une pension de 6,000 francs. J'ai ordonné à M. Estève de lui en envoyer le brevet et de la lui faire toucher exactement.

Les bruits de guerre avec l'Autriche sont absurdes. Vous devez tenir constamment le langage le plus pacifique ; le mot de guerre ne doit jamais sortir de vôtre bouche. Vous devez bien accueillir les officiers autrichiens.

Vos approvisionnements d'infanterie me paraissent suffisants. Il n'y a idée de guerre avec personne. Quant aux réparations pour l'artillerie, j'ai ordonné qu'il vous fût accordé des fonds. Je dois avoir de grands magasins de vivres et d'autres objets ; il faut veiller à ce qu'ils ne soient point gaspillés, et que, si l'armée évacue avant qu'ils soient consommés, vous vous en fassiez rendre compte.

J'ai donné ordre que la solde vous fût payée exactement et qu'une gratification fût accordée à vos officiers.


Fontainebleau , 14 octobre 1807

A M. Portalis, chargé des affaires des cultes.

Témoignez mon mécontentement à l'évêque d'Ajaccio de ce qu'il établit le séminaire dans un village au lieu de l'établir dans la métropole; que mon intention est qu'il passe au moins dix mois de l'année dans le chef-lieu de son diocèse.


Fontainebleau, 13 octobre 1807

Au général Songis, commandant l'artillerie de la grande Armée

J'ai reçu votre lettre de Berlin, du 30 septembre. J'approuve fort la conduite que vous avez tenue relativement à la démolition des places de Prusse. Le maréchal Victor a parfaitement rempli mes intentions. Il est nécessaire que ces places ne restent pas sans défense; il est bon même d'y mettre un certain nombre de pièces de canon.


Fontainebleau, 14 octobre 1807

A Louis Napoléon, roi de Hollande

Mon Frère, vos lettres m'assurent que la Hollande est revenue à l'exécution du traité d'alliance, et qu'en conséquence tout commerce est interdit avec l'Angleterre. Prenez de nouvelles mesures pour que même une lettre ne parvienne.

Après avoir organisé votre armée, ne la désorganisez pas. J'apprends que vous voulez défaire votre Garde. La Hollande ne peut pas avoir moins de 40,000 hommes à l'effectif, ce qui fait 25,000 hommes sous les armes. Si elle n'a pas ces troupes, qui la défendra ? La paix n'est pas sûre. Voulez-vous vous exposer à voir votre flotte prise et Amsterdam brûlé ? Croyez-vous que je consentirai à vous envoyer de mes troupes dont j'ai besoin ailleurs ? Et puis pensez-vous que, si je vous envoie de mes troupes, je serais assez bon pour les payer ? Dans tous les cas , il vous faudrait donc de l'argent. Tenez votre armée sur un bon pied et n'allez pas économiser des miettes. Quatre ou cinq millions de plus ou de moins ne peuvent pas changer la face de la Hollande, tandis que 15 ou 20,000 hommes de plus ou de moins peuvent la sauver ou la perdre. Des finances, des troupes et de la sévérité à faire exécuter les lois, voilà les devoirs des rois. Laissez crier les marchands; pensez-vous que ceux de Bordeaux ne crient pas ?


Fontainebleau, 14 octobre 1807

Au général Savary, Saint-Pétersbourg

Monsieur le Général Savary, je reçois votre lettre du 23 septembre. L'officier d'ordonnance Deponthon, et l'aide de camp du prince de Neuchâtel, Périgord, vous seront successivement arrivés depuis Montesquiou. Vous aurez également reçu une partie des choses que vous avez demandées. Je vous envoie aujourd'hui des lettres pour l'impératrice régnante.

J'ai vu avec peine que vos lettres à M. de Champagny n'étaient pas dans le style convenable. Un ministre est toujours un ministre. D'ailleurs un homme sage et prudent n'accroît jamais le nombre de ses ennemis. Quelle nécessité y avait-il de répondre à une phrase banale par laquelle le ministre vous recommandait l'économie ? Vous donnant un crédit illimité, il était de son devoir, en qualité de ministre qui a un budget dont il rend compte, de vous dire d'économiser. Mais vous avez, messieurs, la tête près du bonnet, vous vous formalisez trop. Vous avez eu d'autant plus tort que je n'ai pas d'homme plus honnête et plus attaché que Champagny.

Guilleminot, en Valachie, s'est mêlé de beaucoup plus de choses qu'il ne devait. Ses instructions ne lui disaient pas de signer l'armistice, ni de stipuler des conditions absurdes, telles que la remise des vaisseaux de guerre et la reprise des hostilités au ler mars si l'on ne s'arrangeait pas. La lettre que vous lui avez écrite n'a donc aucun inconvénient. Si cet officier est encore à Bucharest, ce que je ne crois point, et que, pour soutenir sa pointe, il vous répondit qu'il a agi d'après ses instructions, vous ne devez pas le croire. J'ai écrit à Sebastiani pour faire revenir la Porte sur ces deux articles. Mais le principal n'est pas ces deux articles : c'est la remise des places fortes qui a dû indisposer l'empereur Alexandre. M. de Champagny vous écrit longuement et vous envoie diverses pièces que vous ne connaissez pas, telles que les articles secrets du traité avec la Russie, et le traité d'alliance, afin que vous soyez au fait de toutes les affaires.

Un courrier russe est parti, il y a trois jours; il vous porte des lettres qui seront probablement vues. Le fait est que l'amiral Siniavine était encore le 20 septembre à Corfou. L'équipage dont se plaint surtout le gouverneur de Corfou est celui du vaisseau l'Asie, qui est commandé par un Anglais; mais ce sont là de petites affaires. Au reste, j'ai fait donner à l'amiral l'avis de se méfier des Anglais; je pense que cela aura produit l'effet convenable.

Après ce que vous m'écrivez, je puis penser que du 15 au 17 l'ambassadeur Tolstoï sera ici. Il eût été très-nécessaire qu'il arrivât plus tôt, afin de pouvoir envoyer des ordres et des instructions aux vaisseaux russes.

Les prisonniers russes sont arrivés à Cologne et à Coblentz ; on en a formé sept bataillons. On leur avait donné de mauvaises armes à Metz; j'ai ordonné qu'on les leur retirât et qu'on leur en donnât de meilleures.

L'Angleterre n'a fait ici, ni directement ni indirectement, aucune proposition. Tout porte à penser qu'elle est dans le système de continuer la guerre. Notre première opération doit être, aussitôt que lord Gower sera chassé de Saint-Pétersbourg, de faire chasser le ministre anglais de Vienne. A l'heure qu'il est, celui qui est à Lisbonne doit avoir quitté cette ville.

J'ai vu avec plaisir que l'empereur faisait venir son armée en Finlande. Il faut aussi obliger la Suède à fermer ses ports et à déclarer la guerre à l'Angleterre.

Quant aux affaires de Turquie, c'est une chose qui demande bien des combinaisons, sur laquelle il faut marcher bien doucement; elle est trop compliquée pour que vous puissiez connaître mes intentions. J'attends pour tout cela M. de Tolstoï. Au reste, il paraît que cet empire tombe tous les jours.

L'ambassadeur de la Porte, qui était d'abord allé à Vienne et de Vienne s'était rendu à Paris, y était à peine arrivé qu'il a reçu un courrier qui le rappelait à Constantinople.


Fontainebleau, 15 octobre 1807

Je reçois la lettre de Votre Altesse, du 26 septembre. Je suis vraiment fâché que les circonstances soient telles que je n'aie pas pu faire ce qu'elle désirait pour le duc de Brunswick. J'ai chargé mon ministre des relations extérieures de lui faire connaître la pension dont ce prince doit jouir en vertu du traité de Tilsit. J'espère trouver d'autres occasions où je serai plus heureux et où je pourrai la convaincre du désir que j'ai de lui être agréable.


15 - 30 octobre 1807