16 - 30 septembre 1808


Saint-Cloud, 16 septembre 1808

Au général Lacuée, directeur des revues et de la conscripütion militaire

Je vous envoie votre état de répartition. Je l'approuve, mais avec les changements suivants.

Donnez les départements des Hautes et BasseS-Pyrénées, des Landes, du Gers, de la Gironde et autres départements aussi voisins aux 43e, 47e, 5le, 55e, 86e et 15e. La raison en est que ces régiments ont le cadre de leur 1er bataillon à Bayonne. Ces conscrits arriveront très-promptement et il n'y aura alors aucun embarras. Les régiments de nouvelle création, qui sont en Espagne, dont les bataillons sont autour de Bayonne, doivent également se recruter dans ces départements.

Les 500 hommes destinés pour les fusiliers de la Garde , vous les dirigerez sur Bayonne ; vous en préviendrez le commandant de la Garde à Paris, pour qu'il envoie les effets d'habillement nécessaires.

Les détachements de cavalerie doivent être dirigés sur les dépôts. Vous ne donnez rien au 6e bataillon du train bis, lequel est actuellement en Espagne. Les dépôts des transports militaires doivent être également dirigés sur Bayonne.

Il y a trois régiments, les 66e, 82e et 26e, qui sont à Bordeaux, Napoléon et la Rochelle. Ces trois régiments ont besoin chacun de 1,000 hommes. Il serait bien important de diriger 1,000 hommes sur chacun de ces régiments, puisqu'ils sont rendus sur les lieux. La distribution de ces 3,000 hommes dérangera, en quelque chose, les états primitifs que je vous ai envoyés.


Saint-Cloud, 17 septembre 1808

A M. Cretet, ministre de l'intérieur, à Paris

Monsieur Cretet, les troupes ont été traitées à Metz, à Nancy, à Reims. Je désire qu'elles le soient à Paris, à Melun, à Sens, à Saumur, à Tours, à Bourges et à Bordeaux ; ce qui fera trois fois pour les mêmes troupes. Vous me remettrez une note de ce que cela coûtera par homme, selon l'autorisation que vous avez donnée. Faites faire à Paris des chansons que vous enverrez dans ces différentes villes; ces chansons parleront de la gloire que l'armée a acquise, de celle qu'elle va acquérir encore, et de la liberté des mers , qui sera le résultat de ses victoires. Ces chansons seront chantées aux diners qui seront donnés. Vous ferez faire trois sortes de chansons, afin que le soldat n'entende pas chanter les mêmes deux fois.


Saint-Cloud, 17 septembre 1808

A M. Bigot de Préameneu, ministre des cultes, à Paris

Qu'est-ce que c'est que des croix et autres signes distinctifs que 19 curés de Lyon distribuent aux citoyens de la ville, pour porter dans l'église et dans les cérémonies ?


Saint-Cloud, 17 septembre 1808

A M. de Champagny, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur de Champagny, je vous renvoie votre porte-feuille. Vous pouvez employer une somme de 50.000 francs à donner des secours à la députation portugaise.

(Brotonne)


Saint-Cloud, 17 septembre 1808

NOTE POUR LE MAJOR GÉNÉRAL, A PARIS.

Il faut bien se garder de châtrer les chevaux espagnols ; on les gâterait. Mais, dans ce cas, on réunira tous les chevaux entiers dans une même compagnie, et alors cela n'aura plus d'inconvénient. Écrire au général Bourcier de faire connaître de quelle arme sont ces chevaux, et on enverra autant d'hommes des dépôts que l'on pourra. Mander au général Bourcier qu'il a eu tort de contremander la levée qu'il doit la continuer, l'intention de l'Empereur étant d'avoir sa cavalerie dans le meilleur état.


Saint-Cloud, 17 septembre 1808

A Alexandre, prince de Neuchâtel, major-général de la Grande Armée, à Paris

Mon Cousin, donnez ordre que la 5e division de dragons, qui doit être arrivée à Baireuth, se dirige en droite ligne sur Strasbourg.


Saint-Cloud, 17 septembre 1808

A M. Melzi, duc de lodi, président du collège des Possidenti, à Milan

Monsieur le Duc de Lodi, Président du Collége des Possidenti, j'ai reçu avec une singulière satisfaction l'expression de fidélité et d'amour que le Collége m'a exprirnés. Le Vice-Roi ne m'a pas laissé ignorer l'esprit patriotique qui anime ses membres et les choix distingués qu'ils ont faits pour occuper les places les plus importantes de l'État. Faites-leur, je vous prie, connaître tout mon contentement, et assurez-les de nouveau de tous les sentiments que je leur porte.


Saint-Cloud, 17 septembre 1808

A Joseph Napoléon, roi d'Espagne, à Miranda

Mon Frère, je ne réponds pas à votre lettre, où vous paraissiez avoir de l'humeur : c'est un principe que je suis avec vous depuis longtemps. Vous avez trop d'esprit pour ne pas concevoir que c'est la seule chose que je puisse faire, lorsque vous m'écrivez ainsi. Je ne disserterai jamais non plus sur le passé, à moins que vous ne me le demandiez pour vous seul et pour vous servir de règle pour l'avenir. Mais, lorsque vous êtes convaincu qu'on ne pouvait faire mieux que ce que l'on a fait, je dois vous laisser dans votre croyance et ne pas vous affliger, puisque le passé est toujours sans remède.

J'ai accordé toutes les récompenses que le général Merlin a demandées pour l'affaire de Bilbao, d'autant plus quelles m'ont paru raisonnables.


Saint-Cloud, 18 septembre 1808.

A M. Gaudin, ministre des finances, à Paris

Un des changements qu'il paraîtrait utile de faire dans l'imposition serait de la mettre, pour le bois, sur la coupe et non sur l'arpent. Cela est depuis longtemps réclamé.


Saint-Cloud, 18 septembre 1808

A Alexandre, prince de Neuchâtel, major-général de la Grande Armée, à Paris

Mon Cousin, vous trouverez ci-joint le discours que j'ai adressé aux soldats, à la parade de dimanche dernier. Vous l'enverrez par les trois routes aux colonels et commandants des corps. Il sera lu à l'ordre au milieu des principales villes , à haute voix , et il sera mis à l'ordre du jour. Vous chargerez les colonels de vous faire connaître les sentiments qui auront animé les soldats dans cette circonstance.

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P. S. Il est bon que trois officiers de confiance portent cette proclamation et vous instruisent , au retour, de la situation des corps et de l'esprit qui les anime.

PROCLAMATION

Soldats, après avoir triomphé sur les bords du Danube et de la Vistule, vous avez traversé l'Allemagne à marches forcées. Je vous fais aujourd'hui traverser la France sans vous donner un moment de repos.

Soldats, j'ai besoin de vous. La présence hideuse du Léopard souille les continents d'Espagne et de Portugal ; qu'à votre aspect il fuie épouvanté. Portons nos aigles triomphantes jusqu'aux colonne d'Hercule : là aussi nous avons des outrages à venger.

Soldats, vous avez surpassé la renommée des armées modernes mais avez-vous égalé la gloire des armées de Rome, qui, dans un même campagne , triomphaient sur le Rhin et sur l'Euphrate , en Illyrie et sur le Tage ?

Une longue paix, une prospérité durable seront le prix de vos travaux. Un vrai Français ne peut, ne doit prendre du repos que les mers ne soient ouvertes et affranchies.

Soldats, tout ce que vous avez fait, tout ce que vous ferez encore pour le bonheur du peuple français, pour ma gloire, sera éternellement dans mon coeur.


Saint-Cloud, 18 septembre, 1808

A Joachim Napoléon, roi des Deux-Siciles, à Naples

Je reçois votre lettre. J'ai appris avec plaisir votre entrée à Naples et que vous êtes content de l'esprit de vos peuples.

Il faut marcher doucement sur l'armement des citoyens, ou du moins n'armer que les propriétaires.

La prise de Capri serait d'un bon résultat ; elle signalerait d'autant mieux votre arrivée qu'elle ferait craindre aux Anglais pour la Sicile ce qui serait fort utile.

Je ne demande pas mieux que de faire l'expédition de Sicile cet hiver; mais il faudrait savoir ce que les Anglais y ont, et combien de troupes il vous faudrait.

Distinguez-vous et faites-vous aimer, et sachez que cela ne peut avoir lieu qu'en mettant le plus grand ordre dans les finances.


Saint-Cloud, 20 septembre 1808

A M. Fouché, ministre de la police générale, à Paris

Faîtes arrêter un nommé Navailles, élève en chirurgie, qui tient toutes sortes de propos. Interrogez-le sur les propos qu'il dit tenir du sieur Pelletan. C'est un mauvais sujet qu'il ne faut laisser à Paris.

(Brotonne)


Saint-Cloud, 21 septembre 1808

A M. Cretet, minstre de l'intérieur, à Paris

L'école de Châlons-sur-Marne est destinée à recevoir des élèves, fils de soldats, de gendarmes, etc. C'est à cet effet qu'on a accordé une pension dont le maximum a été fixé à 400 francs, et l'école a été fondée sur le principe que l'enfant sortant doit savoir un métier.

Sa Majesté voudrait un autre genre d'école qu'on pourrait établir à Beaupreau, attendu que Châlons paraît suffire à sa destination.

Les élèves de cette école ne devraient pas coûter plus de 200 francs, et moins, si cela était possible. On n'a pas l'intention d'y placer des enfants d'hommes ayant bien mérité, mais des enfants trouvés de l'âge de treize ans. On leur apprendra des métiers. On les fera ensuite sortir pour le service de l'armée, de la marine et même des colonies, qui ont essentiellement besoin d'ouvriers.

Faire un rapport et établir ce que cela coûtera.


Saint-Cloud, 21 septembre 1808

Au général Clarke, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Général Clarke, le 6e corps a montré peu de discipline en Allemagne, et a fait crier tout le pays; témoignez-en mon mécontentement à ce corps. Faites-vous donner le compte des voitures et autres réquisitions qu'ils ont exigées à Dresde. On se plaint qu'il y a des lieux où ils ont payé et d'autres où ils n'ont pas payé. Ordonnez aux généraux de prendre des mesures pour réprimer les vexations et établir une meilleure discipline. Donnez ordre que la sentence du soldat du 76e qui a tué un homme en Saxe soit publiée et affichée.


Saint-Cloud, 21 septembre 1808

A Alexandre, prince de Neuchâtel, major-général de la Grande Armée, à Paris

Mon Cousin, je vous renvoie les lettres du général Duhesme témoignez-lui ma satisfaction. Rernettez-moi la liste des officiers qu'il cite, et proposez-moi des récompenses. Envoyez copie de ces dépêches au général Saint-Cyr, dans le cas qu'il ne les ait pas reçues Donnez au ministre de la marine vos lettres pour le général Duhesme en triplicata; il les fera partir par trois bâtiments. Vous y mettrez des Moniteur d'un mois, et surtout un grand nombre de ceux où il est question des affaires politiques et militaires d'Espagne. Vous ferez connaître au général Duhesme qu'à la fin de septembre le général Saint-Cyr aura 30,000 hommes de vieilles troupes réunies à Perpignan ; que les divisions Souham et Pino doivent, à l'heure qu'il est, être déjà arrivées; que près de 200,000 hommes de la Grande Armé ont déjà dépassé Paris et Orléans et marchent par trois routes sur Bayonne; que l'Espagne sera soumise avant la fin de l'année et les Anglais rejetés dans l'Océan; qu'il est cependant nécessaire qu'il se tienne prêt à tout événement, même à soutenir un siège; que, par sa lettre et au moyen de mesures qu'il prendra, vous le suppose z approvisionné jusqu'au 1er janvier, quoique l'Empereur doive être entré à Barcelone avant ce terme; que je compte entièrement sur son zèle pour la garde du poste important qu'il occupe. Recommandez au général Saint-Cyr de faire partir de petites barques aussi souvent qu'il pourra pour porter au général Duhesme des Moniteur et des nouvelles, et de lui écrire dans le même sens.

Il faut répondre au maréchal Bessières que, des sous-ofuciers pour les légions de réserve, il peut en fournir du 47e ou des fusiliers de la Garde; que, des officiers, il en a été nommé; que j'apprends avec plaisir ce qu'il dit du général Bouet.


Saint-Cloud, 21 septembre 1808

A M. Fouché, ministre de la police générale, à Paris

Donnez ordre que la dame de Dave sur laquelle on a trouvé des piéces coupables à Namur soit enfermée dans une maison de force, du côté du Dauphiné. Envoyez l'ordre au préfet des Hautes-Pyrénées, s'il en est encore temps, d'arrêter le duc d'Ossuna.


Saint-Cloud, 21 septembre 1808

Au prince Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie

Aldini me paraît être fort besogneux. Je désire que vous lu fassiez prêter, soit sur les fonds de la couronne, soit sur tout autre fonds, sauf à régulariser, 300,000 francs, en prenant toutes le sûretés pour que cet argent ne soit pas perdu. Je verrai à mon retour à régulariser ce prêt.

(Lecestre)


Saint-Cloud, 21 septembre 1808

Au prince Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie

Mon Fils, je pars à cinq heures du matin pour Erfurth, où je resterai une quinzaine de jours avec l'empereur de Russie, si vous avez quelque chose de pressé, vous pourrez me l'adresser par un courier extraordinaire qui passerait par Augsbourg

(prince Eugène)


Châlons-sur-Marne, 22 septembre 1808

NOTE POUR LE ROI D'ESPAGNE

(Le roi Joseph avait adressé à l'Empereur, le 16 septembre, un mémoire dont la lettre suivante fait connaître les points principaux.

Sire, je reçois la lettre de Votre Majesté du 7. Je vais me rapprocher du maréchal Moncey; je lui ai donné l'ordre de tenir Tudela, je vais réunir de ce côté une grande partie de l'armée. Il paraît que c'est de ce côté que l'ennemi prépare tous ses moyens et tentera tout ce qu'il pourra.

Je suis convaincu que, si je quittais la ligne de l'Èbre en laissant seulement garnison à Pampelune, Saint-Sébastien, Pancorbo et Burgos, et réunissant tout mon monde, c'est-à-dire 50,000 hommes organisés aujourd'hui, reposés et en bon état, je dissiperais l'ennemi , et que j'arriverais à Madrid, où le gouvernement que l'on tente de former se dissiperait aussi. Je me porterais toujours en masse partout où il y aurait un corps à combattre et des moyens de vivre; je porterais tout avec moi; je me rapprocherais de Burgos lors de l'arrivée de la Grande Armée. Jusque-là je serais en Espagne comme vous étiez en Égypte; et, semblable à un 74, j'évirerais les atterrages, et serais sûr de n'avoir rien à craindre dans le plat pays, et d'y être toujours maître. Les défilés, les montagnes de la Biscaye, les communications avec la France seraient interrompus jusqu'à ce que les premières troupes de la Grande Armée, se réunissant à Bayonne, arriveraient en Espaqne par masses de 20 à 25,000 hommes. Je suis convaincu qu'un projet semblable, qui paraît audacieux, réussirait mieux que la défensive tâtonneuse à laquelle je suis condamné sur une ligne de plus de soixante lieues. Il est possible qu'un parti semblable empêche la grande réunion des corps militaires ennemis, qu'il disperse les éléments qui vont se réunir à Madrid, et que toutes ces formations, surprises avant d'être achevées, rendent plus facile la soumission totale du pays lors de l'arrivée des grandes forces que Votre Majesté dirige sur ce pays : Sire, c'est là mon opinion. Si Votre Majesté veut y réfléchir et me donner ses ordres, je les exécuterai avec confiance d'un plein succès; je laisserai derrière moi Saragosse et les insurrections partielles; je battrai les masses, et je jetterai l'épouvante dans l'âme des projetistes de Madrid. Les armes tomberont de la main des uns, et la plume de la main des autres, dès qu'ils sauront que 50,000 Français marchent sur eux. Mais, jusqu'à l'arrivée de la Grande Armée, vous n'aurez pas de nouvelles de nous, je n'en aurai pas de vous. Si cela vous convient, Sire, donnez-moi votre approbation, et je crois pouvoir répondre de l'exécution. J'ai beaucoup réfléchi à ma position, et c'est ce qu'il y a de mieux à faire. Je suis sûr que, dès que j'aurai expliqué tout cela aux maréchaux Jourdan, Ney, Bessières, ils seront de mon avis.")

 

le Observation. - On propose de marcher avec 50,000 hommes sur Madrid en se trouvant réunis et abandonnant les communications avec la France.

L'art militaire est un art qui a des principes qu'il n'est jamais permis de violer. Changer sa ligne d'opération est une opération de génie ; la perdre est une opération tellement grave, qu'elle rend criminel le général qui s'en rend coupable. Ainsi, garder sa ligne d'opération est nécessaire pour arriver à un point de dépôt où l'on puisse évacuer les prisonniers que l'on fait, les blessés et les malades qu'on a, trouver des vivres et s'y rallier.

Si, étant à Madrid, on eût réuni ses forces sur la ville, qu'on eût considéré le Retiro comme un point de réunion des hôpitaux, des prisonniers, et comme moyen de contenir une grande ville et de se conserver les ressources qu'elle offre, cela eût été perdre ses communications avec la France, mais assurer sa ligne d'opération, si, surtout, on profitait du temps pour réunir une grande quantité de vivres et de munitions, et qu'on eût organisé à une ou deux marches sur les principaux débouchés, comme la citadelle de Ségovie, etc., des points faits pour servir de points d'appui et de vedettes aux divisions.

Mais aujourd'hui, qu'on s'enferme dans l'intérieur de l'Espagne sans avoir aucun centre organisé, aucun magasin de formé, étant dans le cas d'avoir des armées ennemies sur les flancs et les derrières, ce serait une folie si grande, qu'elle serait sans exemple dans l'histoire du monde.

Si, avant de prendre Madrid, d'y organiser l'armée, des magasins de huit à dix jours, d'avoir des munitions en suffisance , on venait à être battu, que deviendrait cette armée ? Où se rallierait-elle ? Où évacuerait-elle ses blessés ? D'où tirerait-elle bien ses munitions de guerre, puisqu'on n'a qu'un simple approvisionnement ? Nous n'en dirons pas davantage. Ceux qui osent conseiller une telle mesure seraient les premiers à perdre la tête aussitôt que l'événement aurait mis au clair la folie de leur opération.

Quand on est dans une place assiégée, on a perdu sa ligne de communication, mais non sa ligne d'opération, parce que la ligne d'opération est du glacis au centre de la place où sont les hôpitaux , les magasins et les moyens de subsistance. Est-on battu au dehors ? On se rallie sur les glacis, et on a trois ou quatre jours pour réparer les troupes et réorganiser leur moral.

Avec une armée composée toute d'hommes comme ceux de la Garde, et commandés par le général le plus habile, Alexandre ou César, s'ils pouvaient faire de telles sottises, on ne pourrait répondre de rien, à plus forte raison dans les circonstances où est l'armée d'Espagne.

Il faut renoncer à ce parti que réprouvent les lois de la guerre. Le général qui entreprendrait une telle opération militaire serait criminel.

2e Obserralion. Que faut-il donc faire ? On ne peut que répéter ce qu'on a dit : avoir sa gauche concentrée à Tudela, sans cordon, à cheval sur l'Ébre, et prête à repasser l'Èbre si cela est nécessaire, et conservant sa communication sur Pampelune ; la droite sur Burgos, interceptant la route de Madrid à Reinosa; la réserve en seconde ligne et prête à se porter sur l'un ou l'autre point.

Dans cette situation des choses, on peut réunir la réserve, le corps du maréchal Ney, celui du maréchal Bessières, et tomber sur l'ennemi qui s'approcherait par la route de Madrid et celle de Palencia. On peut très bien, avec ces 30 ou 40,000 hommes, faire trois ou quatre marches dans une direction ou dans une autre.

Il serait possible sans doute que l'ennemi, voyant de telles forces s'approcher, ne tînt pas, et, pendant qu'il s'éloignerait de cinq ou six marches, on en profiterait pour enlever Reinosa et Santander, opération très-importante à faire. Ce qui encourage l'ennemi à tenir à Reinosa, c'est qu'on n'occupe Burgos que par de la cavalerie, et qu'on manifeste l'intention de se retirer. Tout est opinion à la guerre, opinion sur l'ennemi, opinion sur ses propres soldats. Après toute bataille perdue, la différence du vaincu au vainqueur est peu de chose, c'est (minute : cependant incommensurable par l'opinion) puisque deux ou trois escadrons suffisent alors pour produire un grand effet. On n'a rien fait pour donner de la confiance aux Francais; il n'y a pas de soldat qui ne voie que tout respire la timidité, et il se forme en conséquence l'opinion de l'ennemi. Il n'a pas d'autre élément, pour savoir ce qui lui est opposé, que ce qu'on lui dit et la contenance qu'on lui fait prendre.

3e Observation. - Il n'y a pas de doute qu'avec le nombre de troupes qui sont à l'armée d'Espagne l'on peut et l'on devrait aller à Madrid, mais après avoir détruit tous les corps de l'ennemi par des mouvements combinés sur Palencia et Saragosse, si l'ennemi fait la faute de s'approcher et de se mettre en ligne. Mais, pour cela, il faut prendre un parti sur le moment, avoir son armée à la main et la connaissance de son art.

On ne peut donc que répéter ce qu'on a dit et redit : attaquer l'ennemi s'il approche de deux marches. Si l'on obtient une victoire décisive contre toutes ses forces réunies ou plusieurs victoires contre ses corps isolés, ces victoires doivent conseiller le parti qu'il faut prendre. Mais tous ces combats doivent être livrés suivant les règles de la guerre, c'est-à-dire ayant sa ligne de communication assurée.


Metz, 23 septembre 1808

A Joseph Napoléon, roi d'Espagne, à Vitoria

Mon Frère, je continue mon voyage sur Erfurt, où les conférences auront lieu le 27. La Grande Armée marche par trois routes, et la queue a déjà dépassé Paris.


Metz, 23 septembre 1808

A M. Fouché, ministre de la police générale, à Paris

Le Publiciste du 22 septembre agite des questions théologiques; cela n'est que d'un mauvais effet. Ne peut-on pas laisser les questions théologiques aux prédicateurs ? J'avais déjà fait connaître mon intention que les journaux cessassent de s'en occuper. Qu'est-ce que cela fait que les prêtres soient mariés ou non ? Il faut éviter de troubler l'Etat pour ces bêtises.

(Brotonne)


Kaiserslautern, 24 septembre 1808

A M. Fouché, ministre de la police générale, à Paris

Dîtes à MM. de San-Carlos et d'Esquiquiz que je n'ai pas pu les voir à paris, à cause de la grande quantité de mes affaires, mais que je serai fort aise de les voir à mon retour, qui aura lieu avant vingt jours; que, d'ici à ce temps, ils sont maîtres de prendre ou non possession de la terre de Navarre; que, dans le cas où ils désireraient en prendre possession, ils peuvent s'adresser au ministre des finances auquel j'ai écrit. De votre côté, il est bon que ces messieurs restent à Paris; je le préfèrent á ce qu'ils retournent à Valençay. Continuez à les faire surveiller.

(Lecestre)


Kaiseralautern, 24 septembre 1808

Au prince Cambacérès, Archichancelier de l'Empire, à Paris

Mon Cousin, je suis arrivé à Kaiserslautern. Donnez de mes nouvelles à l'impératrice. Je me porte fort bien. Le temps a été superbe. J'ai des nouvelles que toute la cour de Russie était déjà arrivée à Koenigsberg.


Kaiserslautern, 24 septembre 1808

A M. Cretet, ministre de l'intérieur, à Paris

Monsieur Cretet, je ne suis pas plus content ici que dans les autres départements des ponts et chaussées. J'ai trouvé que dans la Sarre et la Moselle on avait travaillé pour avancer la route. Dans le département du Mont-Tonnerre on n'a rien fait. Ici, comme ailleurs, on a commencé la campagne au mois d'août; les beaux mois de l'été on été perdus en procès-verbaux, en chicanes et en inutiles paperasseries. L'ingénieur se plaint qu'on ne lui envoie point d'argent, de sorte qu'il est endetté. Cette route, la plus importante de la France, n'est point du tout avancée. Je sais qu'il en est de même en Piémont, où l'on a laissé passer la belle saison. Cette manière de faire est par trop ridicule. Faites-rnoi connaître quel parti il y a à prendre pour arriver à un résultat. J'ai accordé deux millions pour cette route; on ne fait point ce que je veux ; cet argent aura été employé à d'autres travaux ; les fonds cependant avaient été mis dès l'année passée. Cette route si importante ne sera jamais finie, si l'on marche comme cela. Soit la faute du comité, soit la faute de l'administration, on perd trois ou quatre mois avant de résoudre les difficultés qui se présentent dans les travaux.


Erfurt, 27 septembre 1808

Au prince Cambacérès, Archichancelier de l'Empire, à Paris

Mon Cousin, je suis arrivé ce matin à Erfurt à neuf heures. L'empereur de Russie était arrivé depuis le 25 à Weimar. L'entretien doit avoir lieu, ici, dans une heure. Le roi de Saxe est ici depuis hier, et un grand nombre de princes vont arriver aussi.


Erfurt, 27 septembre 1808

A Maximilien-Joseph, roi de Bavière, à Munich

Je recois la lettre de Votre Majesté, par laquelle elle me fait connaître son désir de se rendre à Erfurt. Je n'y vois aucun inconvénient, et, là comme ailleurs, je serai fort aise de lui renouveler les assurances des sentiments d'estime et d'amitié qu'elle me connaît.


Erfurt, 27 septembre 1808

A Frédéric, roi de Wurtemberg, à Stuttgart

Monsieur mon Frère, je reçois la lettre de Votre Majesté. J'ignore le nombre de jours que je resterai à Erfurt. Aussitôt que je serai fixé sur le moment de mon départ , je conviendrai avec elle d'un point où je puisse la rencontrer sur la route. Toutefois, Votre Majesté doit être persuadée du plaisir que j'aurai à la voir en quelque lieu que ce soit, soit à Erfurt, soit sur un point de la route.


Erfurt, 28 septembre 1808

A Catherine, reine de Westphalie, à Cassel

Je reçois la lettre de Votre Majesté du 23 septembre. Je verrai Votre Majesté avec plaisir et serai fort aise de lui donner des preuves de l'estime et de la parfaite amitié que je lui porte.


Kaiserslautern, 24 septembre 1808

A Joseph Napoléon, roi d'Espagne, à Vitoria

Mon Frère, vous aurez reçu des notes sur le mémoire joint à votre lettre du 16. A la guerre, il faut des idées saines et précises. Ce que l'on vous propose n'est pas faisable. Il faut adopter pour principe général de ne pas souffrir que l'ennemi s'établisse à trois ou quatre marches de Burgos. Palencia n'est qu'à deux marches; l'ennemi ne serait probablement pas venu, si l'on avait occupé Burgos d'une manière offensive; et, l'ennemi battu et chassé au delà de Palencia, Santander tombe ou est emporté en peu de temps, ce qui est une chose importante. Quant à la gauche, le corps de Tudela doit toujours avoir sa retraite sur Pampelune, et, si 12 ou 15,000 hommes étaient poussés sur Pampelune, ils n'y seraient pas en danger dans la ville ou le camp retranché. Cela dépend de ce que fait l'ennemi. A la guerre, on prend son parti devant l'ennemi. On a toujours la nuit pour soi pour se préparer. L'ennemi ne se place pas sans qu'on le reconnaisse; mais il ne faut pas calculer théoriquement ce que l'on veut faire, puisque cela est subordonné à ce que fait et fera l'ennemi. Selon les lois de la guerre, tout général qui perd sa ligne de communication mérite la mort. J'entends par ligne de communication celle où sont les hôpitaux, les secours pour les malades, les munitions de guerre, les vivres, où l'armée peut se réorganiser, se refaire et reprendre, en deux jours de repos, son moral perdu quelquefois par un accident imprévu. On n'entend pas perdre sa ligne de communication, quand elle est inquiétée par des barbets, des miquelets, des paysans insurgés et, en général, par ce qu'on nomme à la guerre des partisans. Cela arrête des courtiers, quelques hommes isolés qui percent toujours, quelque parti que l'on prenne, mais n'est pas dans le cas de faire front à une avant-garde ou à une arrière-garde; alors cela n'est rien. La ligne de communication est organisée sur le principe que tout se reploierait sur Madvid. Pour cela, on devait tout réunir au Retiro, munitions de guerre, vivres, etc., et l'on aurait pu y réunir un plus grand nombre de troupes en peu de jours, dans un cas de nécessité. C'est bien différent d'opérer avec un système arrêté sur un centre organisé, ou d'aller au hasard perdre ses communications sans avoir un centre d'opération organisé.


Erfurt, 28 septembre 1808

Au général Clarke, ministre de la guerre, à paris

Monsieur le général Clarke, il faut placer les Espagnols dans une bonne forteresse, dans l'intérieur de la France, sous les ordres d'un commandant sûr et d'une bonne garnison, afin qu'ils ne puissent s'échapper. D'ailleurs, ils ne méritent aucun ménagement, ce sont des traîtres.

(Brotonne)


Erfurt, 29 septembre 1808

A Alexandre, prince de Neuchâtel, major-général de la grande Armée, à Paris

Mon Cousin, donnez l'ordre au parc du génie qui est à Fulde de faire partir les trois quarts de ses voitures, bien attelées et chargées d'outils, pour se rendre d'abord à Mayence et de là à Bayonne ; il fera marcher, avec, trois officiers du génie. Le commandant du parc vous enverra l'état de ce qui partira et de ce qui restera, soit en personnel, soit en matériel.


Erfurt, 30 septembre 1808

Au général Clarke, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Général Clarke, je suppose que le général Valence est à Sedan pour passer en revue et mettre en bon état les régiments polonais. Après qu'ils se seront reposés trois ou quatre jours à Sedan, ils continueront leur route sur Bayonne. Il n'y a pas besoin de lui donner de nouvelle artillerie; il me semble que l'armée en a assez; on organisera facilement quelques pièces.

Un régiment de chevau-légers du roi de Westphalie est parti de Wesel; vous lui ferez continuer sa route sur Paris pour joindre cette division polonaise, qui fait partie du corps du duc de Danzig.


1 - 15 septembre 1808