1er – 15 août - 1809


Schönbrunn, 1er août 1809

Au général Clarke, comte d’Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Tout officier d'artillerie qui donne des cartouches qui ne sont pas de calibre, qui donne des pièces folles ou hors de service, ou des affûts hors d'état de faire la campagne, mérite la mort. Je ne puis qu'être extrêmement mécontent des principes que contient votre lettre du 25 juillet; quand on n'a pas d'artillerie en état de servir, on n'en donne pas, car il vaut mieux n'avoir pas d'artillerie que d'en avoir de mauvaise, qui compromet la vie des hommes et l'honneur des armes.

Mettez ces principes à l'ordre, pour qu'ils soient connus de toute l'armée, et faites arrêter le directeur de Mayence, qui a donné au corps de réserve commandé par le duc d'Abrantès des affûts hors d'état de servir.

Je ne puis pas entrer dans tous les détails; les fonds de l'artillerie ne peuvent pas être augmentés; mais c'est à vous à varier les dépenses, à faire faire des affûts de campagne au lieu d'affûts de côtes, à avoir des canons de fer coulé si vous n'en pouvez pas avoir de cuivre, enfin à employer les sommes disponibles à ce que le service a de plus urgent. Si j'avais à former un équipage d'artillerie de trente pièces de campagne dans la seule 26e division militaire, je ne serais pas embarrassé. Nous avons une infinité de petites places où on peut trouver des pièces; mais l'artillerie, qui ne sait pas les trouver, a préféré donner de l'artillerie prussienne au corps de réserve. Dans la seule ville de Mayence, il est impossible qu'il n'y ait pas trente à quarante pièces de campagne. Il est vrai que ces bouches à feu peuvent être portées dans les états comme destinées à la défense de la place, mais il valait bien mieux les donner que de mettre le duc d'Abrantès dans le cas de se trouver sans artillerie au moment d'une bataille. De tous les pays de l'Europe, la France est celui où il y a le plus de canons, de caissons, de voitures d'artillerie et de tout. Je ne reviens plus sur ce que je vous ai demandé d'artillerie; je vous ai écrit que j'avais mille voitures d'artillerie de plus qu'il ne me fallait; que ce dont j'avais besoin, c'étaient des pièces.

Les principes de votre bureau d'artillerie ne sont pas assez clairs; il suppose qu'en campagne toutes les munitions doivent être sur des chariots; ce qui n'est pas exact. Un approvisionnement et demi ou deux approvisionnements sont suffisants sur des chariots; mais le surplus des munitions1mnilions de réserve doit être mis dans des caisses pour être transporté par eau ou traîné sur des voitures du pays. Depuis que je suis à Vienne, j'ai tiré plus de 200,000 coups, mais pour cela je n'ai pas eu assez des caissons. Il est donc clair qu'il suffit d'avoir dans des caisses les munitions qui doivent remplacer. Dans ce moment j'ai à Vienne 150,000 coups à balles et à boulet; cet approvisionnement sera bientôt porté à 200,000 coups, et cependant j'estime que j'ai des caissons beaucoup plus qu'il ne m'en faut. L'inconvénient d'un trop grand nombre de caissons, c'est de ruiner la France, d'exposer à des événements, d'être très coûteux et excessivement embarrassant.

Enfin mille voitures ne doivent pas coûter plus de 6 ou 700,000 francs, ce qui, après tout, n'est pas une dépense énorme. Je dépense beaucoup d'argent et j'entends toujours des plaintes de l'artillerie: c'est que, je crois, tout cela est mal compris et que notre matériel d'artillerie manque de principes.

Il me semble que ce qui est relatif à l'équipage de campagne doit passer avant tout, et en général le matériel de l'artillerie de l'armée n'est pas assez bien tenu.


NOTE POUR LE PRINCE CAMBACÉRÈS, ARCHICHANCELIER DE L’EMPIRE, A PARIS

Sa Majesté s'est réservé des biens en Espagne. Elle s'est réservée en Allemagne un grand nombre de domaines et des créances considérables, notamment celles de l'ancien électeur de Hesse. Elle s'est aussi réservée dans le royaume d'Italie et dans celui de Naples des droits qui ont une valeur assez importante.

Elle a senti la nécessité d'établir à côté de la caisse d'amortissement une caisse de l'extraordinaire, à la tête de laquelle elle a placé M. la Bouillerie pour suivre ses différents intérêts. Mais M. la Bouillerie est plutôt administrateur chargé des opérations de la caisse, des conversions et de la perception des intérêts, qu'il ne peut véritablement l'être de suivre la correspondance avec l'Espagne, l'Allemagne et l'Italie sur des intérêts si variés et susceptibles de tant de contestations, d'explications et d'arrangements. Le ministre des finances ne peut suivre ces affaires et ne les suit pas, parce qu'elles l'entraînent dans des rapports trop éloignés et qui n'ont aucune relation avec les nombreux détails de son ministère.

Il paraît donc nécessaire de créer auprès de la caisse de l'extraordinaire plusieurs administrateurs qui seraient chargés de suivre ses intérêts, de les débattre, de les faire valoir, et à la tête desquels serait un conseiller d'État, ou tout autre homme important, qui pourrait travailler avec l'Empereur sur cet objet, devenu tellement considérable qu'il est désormais difficile qu'un caissier ou un administrateur purement financier suffise à tout ce qu'il exige.

Les contributions de la troisième coalition donnent lieu à beaucoup d'affaires contentieuses; avant que celles de la quatrième soient acquittées, il y aura eu aussi beaucoup d'affaires de cette nature à discuter et à régler. On ne croira pas qu'un seul administrateur d'une caisse puisse statuer sur tous ces objets, et, sous tous les rapports, l'établissement d'une administration spéciale paraît indispensable.

Renfermer dans un simple établissement d'ordre intérieur et de comptabilité des affaires aussi étendues, c'est paraître vouloir cacher quelque chose au public, et toutes les choses masquées sont de mauvaise administration.

Sa Majesté désire donc que Son Altesse établisse sur cela une théorie, fasse un rapport et propose un projet de décret.

Dans un projet de sénatus-consulte que Son Altesse a fait lire à l'Empereur, on disait que le domaine de l'Empereur se compose de contributions levées sur l'ennemi. Ce principe était fort clairement établi et assez d'accord avec les principes de la monarchie.

Mais cette affectation si positive d'une chose appartenant à l'Empereur et non à la nation était un peu trop tranchante, car l'Empereur ne fait la guerre qu'avec les moyens et l'argent de la nation. Il faudrait donc établir que le domaine de l'Empereur consiste dans la liste civile, dans les acquisitions qu'il fait, etc. Dire ensuite que l'Empereur a l'administration des pays non réunis, et ajouter, sans se jeter dans la question de la propriété, qu'il est le seul administrateur des contributions et autres droits qu'il s'est réservés sur les pays étrangers par les traités et par quelque acte que ce soit. Cette rédaction devrait être faite avec soin et conçue de manière qu'en statuant qu'aucun ambassadeur, qu'aucun général ne peut prétendre aux droits réservés sur les pays conquis, elle établisse en même temps que la cour des comptes ni aucune autre autorité ne peuvent intervenir dans ces affaires. Ce principe, étant posé par un sénatus-consulte, pourrait servir de base à une théorie d'après laquelle on organiserait, sous l'autorité supérieure de l'intendant de la Couronne ou de tout autre, et à côté du trésor de la Couronne, une administration de l'extraordinaire.

Sa Majesté désire que Son Altesse médite ces idées, les coordonne dans un projet qui satisfasse à tout.

Il est indispensable de mettre de la légalité et de l'ordre dans cette masse de biens que Sa Majesté s'est réservés, qu'elle a donnés ou qu'elle veut donner encore à ceux de ses serviteurs qui se sont distingués, et où, par l'absence d'une bonne théorie, tout est difficile, parce que rien n'est soumis à une administration réglée et que rien ne se fait d'une manière régulière et publique.

Toutes les fois que dans une loi ou sénatus-consulte on voudra donner à l'Empereur des propriétés autres que sa liste civile et ses acquisitions, on trouvera des embarras et des contrariétés. Mais toutes les fois qu'on le chargera d'administrer ou de réglementer telle partie, on sera d'accord.

Le Sénat ni le Corps législatif ne cherchent point à se mêler ni des choses militaires ni de l'administration des pays conquis. L'Empereur ne peut donner un seul arpent du domaine national, ni même du domaine de sa liste civile. Établir le contraire ce serait aller contre tous les principes. Mais dire qu'il réglemente et régit par les agents ou les ministres qu'il choisit les contributions des pays conquis; qu'il en dispose à sa volonté pour encourager et récompenser, ou qu'il en fait verser le montant soit au trésor, soit à différentes administrations, ou qu'il l'emploie à des travaux pour l'embellissement ou l'amélioration du territoire, ce n'est pas faire autre chose que mettre en principe ce qui existe aujourd'hui, et établir, d'après des faits que personne ne désapprouve, une théorie qui n'est contestée par personne.


Schönbrunn, 2 août 1809

Au chef d’escadron de Turenne, à Vienne

M. le chef d'escadron Turenne se rendra en Italie. Il m'écrira de Klagenfurt pour me faire connaître la situation de cette place, sous le rapport de l'armement, de l'approvisionnement et de la garnison. De là il ira à Villach, d'où il me fera connaître si mes troupes ont occupé Sachsenburg et tout ce qui est relatif à ce fort. Il se rendra ensuite à Osoppo, d'où il m'enverra l'état des troupes de toutes armes qui y ont passé depuis la bataille pour rejoindre l'armée, et l'état de situation du fort de Malborghetto, armement, approvisionnement et garnison. Il continuera sa route sur Udine, Palmanova, Goritz et Gradisca. Il m'écrira de ces villes. Il me rendra compte de la situation de Palmanova, des motifs qui retiennent dans cette place le coq)~ venant des 27e et 28e divisions militaires et l'empêchent de filer sur l'armée.

Il se rendra à Vérone et tâchera d'avoir connaissance d'une colonne de 800 hommes de cavalerie aux ordres du chef d'escadron Canino, qui doit y arriver le 4 août.

Il se mettra à la tête de 800 hommes de la 16e demi-brigade provisoire, de 1,400 hommes de la 17e idem; de 320 hommes de la 3e compagnie de pionniers, de 180 hommes de la 3e compagnie du régiment de pionniers, de 400 hommes du bataillon de marche de la 27e division militaire, de 400 hommes du bataillon de marche de la 28e division et de 120 hommes du 9e bataillon d'équipages militaires, indépendamment de ce que les dépôts de cavalerie du Piémont pourront encore fournir. Cette colonne de 4,000 hommes doit être réunie, du 23 au 25 août, à Osoppo.

M. le chef d'escadron Turenne ira à Turin et à Alexandrie pour accélérer le départ de ces troupes et s'assurer qu'elles partent en bon état. Il joindra à cette colonne tout ce que le général Caffarelli pourra faire partir pour cette époque des dépôts d'Italie, infanterie, cavalerie et artillerie.

Avec cette colonne il entrera en Allemagne par Villach, Klagenfurt. Il tiendra la main à ce qu'elle marche en ordre, couche toute dans le même endroit et soit toujours en mesure contre les événements imprévus. Il profitera de toutes les occasions pour donner de ses nouvelles, afin qu'il puisse recevoir des ordres et que sa marche puisse être dirigée selon les circonstances.

Il m'écrira d'Italie tous les soirs sur ce qu'il verra et apprendra.


Schönbrunn, 3 août 1809

Au général Clarke, comte d'Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Je reçois votre lettre du 27. Je vois avec plaisir que vous avez fait partir huit bouches à feu; mais, depuis, l'occupation de Graz a mis dix-huit pièces à ma disposition; j'en ai trouvé à Passau, de sorte que je puis me passer d'une quarantaine des pièces que vous envoyez.

Si elles ne sont pas encore parties de Strasbourg, il faut les y laisser; si elles sont parties, il faut les arrêter à Augsburg, pour y être en dépôt pour tout événement.

Nous avons à l'armée 92,000 coups à tirer, 45,000 confectionnés, 60,000 projectiles, indépendamment des 65,000 que vous envoyez.

J'en ai fait venir d'Italie, j'en ai trouvé à Graz. Quant aux cartouches d'infanterie, j'en ai plus qu'il ne m'en faut.

Je vois, par votre lettre du 29, que les compagnies à pied d'artillerie continuent leur marche pour l'Allemagne, savoir: les 10e, 13e et 16e du 8e d'artillerie à pied; les 5e, 16e et 18e du 6e régiment; la 4e du 4e régiment; les 6e, 11e et 13e du 3e régiment. Dans ces dix compagnies ne sont pas comprises les quatre du 4e régiment qui arrivent dans deux ou trois jours à Vienne. Moyennant cette augmentation, le personnel de mon artillerie sera sur le pied le plus respectable et au delà de mes besoins. J'ai aussi reçu de nombreux convois de conscrits canonniers qui ont réparé mes pertes. J'attends que vous envoyiez des bataillons du train 1,500 ou 2,000 hommes; que vous envoyiez encore des dépôts de canonniers de quoi compléter les compagnies que vous envoyez, et enfin des dépôts des six régiments à cheval de quoi compléter ce que nous avons. Du reste, l'artillerie n'a jamais été plus respectable. J'ai de quoi donner trois grandes batailles et mettre en batterie cinq cents pièces de canon de campagne et trois cents dans mes places. L'artillerie a de quoi faire face à tout.


Schönbrunn, 3 août 1809

A Alexandre, prince de Neuchâtel, major général de l'armée d'Allemagne, à Schönbrunn

Mon Cousin, je suis surpris que, par votre lettre du 1er août, vous m'adressiez un rapport de l'intendant de l'armée d'Italie. Ignorez-vous qu'il n'y a plus d'armée d'Italie ? C'est l'intendant général seul qui doit correspondre avec vous, et vous ne devez point recevoir de rapport de l'ordonnateur de l'armée d'Italie. Cela met du retard dans les affaires et me donne un embarras inutile.


Schönbrunn, 3 août 1809

Au maréchal Oudinot, commandant le 2e corps de l'armée d'Allemagne, à Leopolstadt

Mon Cousin, l'armée autrichienne a abandonné la Bohême. Il paraît qu'elle a porté sa gauche à Komorn et sa droite à Olmutz.

Cette nouvelle situation des choses rend nécessaire la surveillance sur toute la ligne de la March. Faites rentrer les cuirassiers dans l'intérieur de la ligne, et faites border la March, depuis les frontières de la Moravie et le lieu où finissent les postes du duc d'Auerstaedt jusqu'au Danube, par votre cavalerie légère. Placez les quartiers des trois colonels de votre brigade de cavalerie légère à égale distance, et que chaque colonel ait l'instruction de surveiller rigoureusement et de faire tous les jours un rapport sur ce qui se passe sur la frontière. Nos postes sont sur la rive droite de la March; cela n'empêche pas les patrouilles d'aller jusqu'à l'extrémité de la ligne de démarcation. Il doit y avoir de fréquentes communications d'une rive à l'autre.

S'il arrive de la Hongrie des particuliers intelligents, faites-les interroger aux postes de votre cavalerie légère, et, s'il est nécessaire, faites-les venir à votre quartier général. Vous devez me donner tous les jours des nouvelles de ce qui se passe en Hongrie. Comme cette cavalerie légère est sous vos ordres, veillez à ce qu'elle soit bien postée, et ayez l'œil sans affectation à ce qu'elle fasse bien son devoir.

Faites visiter les postes par des officiers d'état-major, car, s'il se formait des rassemblements vers les monts Karpathes, il faut m'en prévenir. Mettez-vous en correspondance avec le général Reynier, qui a des postes jusqu'à Sankt-Johann.


Schönbrunn, 3 août 1809

Au maréchal Davout, duc d'Auerstaedt, commandant le 3e corps de l'armée d'Allemagne, à Brünn

Mon Cousin, vous ne me donnez point de nouvelles de ce que fait l'ennemi. Le corps du duc de Rivoli est le seul de qui j'en reçoive.

Cela est contre votre ordinaire. Ne négligez pas de m'envoyer tons les renseignements que vous pouvez vous procurer. 

L'ennemi fait, dit-on, un camp retranché devant Olmutz; il a évacué la Bohême et se porte en Hongrie. Faites-moi connaître fout ce que vous apprenez.

Il ne faut pas que les régiments aient plus de deux pièces; renvoyez au général la Riboisière les pièces que vous auriez en sus, pour qu'il les donne aux régiments qui en manquent. Gardez de préférence des pièces de 3, qui sont les vraies pièces de régiment.

Le major général vous écrit pour faire raser les ouvrages de Göding.

Faites travailler à mettre le château de Brünn en état de défense; j'enverrai de l'artillerie plus tard.


Schönbrunn, 3 août 1809

Au général comte Bertrand, commandant le génie de l'armée d'Allemagne, à Vienne

Monsieur le Général Bertrand, je juge convenable de vous faire connaître mes intentions sur les ponts du Danube, pour que vous puissiez vous régler en conséquence. Il serait possible que le 1er septembre les hostilités recommençassent. Il est nécessaire que, pour cette époque, 1° la tête de pont de Spitz (Jedlersdorf am Spitz) soit armée avec ses redoutes; 2° que le pont de pilotis de Vienne soit entièrement terminé, car, une fois qu'il sera fait, mon intention est de détruire les ponts de l'île Lobau, préférant le pont de Vienne à tout autre pont, vu que, du moment que les hostilités recommenceraient, j'ordonnerais l'armement de Vienne; ce qui, avec la tête de pont, me formerait une position sur la droite et sur la gauche du Danube. Il faut que vous visitiez les ouvrages que les Autrichiens avaient faits pour enfermer le faubourg de Leopolstadt, afin de voir ce qu'il y a à faire pour avoir un ouvrage avec réduit ou tête de pont, pour que, en supposant que l'ennemi passât dans le Pirater à l'endroit où nous avons passé et qu'il s'empare du faubourg de Leopolstadt, ce qui le mettrait dans le cas de bloquer la ville, il ne pût s'emparer de notre pont, et qu'il y eût pour ce cas une tête de pont sur la rive droite du premier bras. Une tête de pont de deux cents toises de développement me paraît là suffisante. Il suffit aujourd'hui qu'elle soit tracée, et, lorsqu'il y aura de fortes probabilités que les hostilités doivent recommencer, on travaillera à construire cette tête de pont, qui sera faite en quatre on cinq jours. Outre les dépôts de cavalerie, les blessés et convalescents, mais en état de se battre, je serai toujours obligé de laisser 10,000 hommes dans Vienne et à la tête de pont de Spitz, qui, avec les ouvriers de marine et 4 ou 500 marins, seront plus que suffisants pour défendre la ville et les différents ouvrages. Comme il paraît que les gens de Vienne ont peu de moyens, il faut laisser subsister leur atelier, mais en faire commencer vous-même un autre sur' le grand bras, afin d'être certain d'avoir ce pont au ler septembre.


Schönbrunn, 3 août 1809

ORDRE POUR LES FORTIFICATIONS DE BRUNN.

Je donne ordre que quatre pièces de 18, quatre pièces de 12, douze pièces de 6, deux obusiers et quatre mortiers avec deux cents fusils de rempart, arment sans délai la citadelle de Brünn.

La citadelle a été mise dans le meilleur état par les ingénieurs.

Il paraît que rien ne pourra empêcher que le bastion n° 3 ne soit mis en brèche; le revêtement étant de brique, la brèche sera d'autant plus difficile à faire, et d'ailleurs la batterie de brèche devra être placée à trois cents toises. On doit donc espérer qu'elle sera faite très imparfaitement; d'ailleurs, une fois la brèche faite, il ne sera pas facile d'y monter, il y a une demi-lune qu'il faudra prendre avant; enfin ce sont des obstacles qu'i1 faut multiplier pour rendre difficile l'assaut. Ces obstacles sont, ce me semble, de diverses natures :

1 ° Mettre au pied du glacis, à la demi-hauteur, un bon fossé avec un rang de palissades; donner une bonne direction à ce fossé, il est évident que l'ennemi qui se présentera sur la pente du glacis sera arrêté court par ce fossé.

2° Construire une place d'armes au saillant du bastion qui doit être mis en brèche, et établir un bon blockhaus qui ne puisse être vu d'aucun côté, et qui n'ait d'autre but que défendre la place d'armes aussitôt que l'ennemi se présentera pour arriver à la brèche.

3° Creuser un bon fossé, ou du moins une bonne cuvette, entre le rempart et le chemin couvert, de manière que cela donne de la place aux débris du revêtement.

4° Établir sur la casemate actuelle un bon épaulement en terre avec saucissons, et quatre pièces de canon pour contre-battre les batteries de brèche de l'ennemi.

5° Faire, non un retranchement, le bastion étant très-petit n'en est pas susceptible, mais le fermer à la gorge, d'un angle de l'épaule à l'autre angle de l'épaule, de sorte que l'ennemi ne puisse pas se loger dans le bastion, et avoir là une batterie qui empêche le logement dans le bastion, ce qui serait aidé par la batterie des casemates.


Schönbrunn, 3 août 1809

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie, à Vienne

Mon Fils, faites-moi connaître le lieu où sont vos troupes, et envoyez-m'en l'état de situation au 1er août.

Je désire avoir de vous quatre rapports par jour, un de votre cavalerie légère de Raab, un de ce qui se passe à Komorn, un de Graz, un de Laybach, qui me fassent connaître les mouvements de l'ennemi et ce qu'il fait.


Schönbrunn, 5 août 1809

A Alexandre, prince de Neuchâtel, major général de l'armée d'Allemagne, à Schönbrunn

Mon Cousin, j'ai vu avec peine hier que le général Montrichard tient les troupes dans l'île Napoléon comme si l'ennemi était en présence, et dans des endroits malsains. Donnez-lui l'ordre de faire baraquer ses quatre bataillons dans l'endroit le plus sain qu'il pourra choisir, soit dans l'île Napoléon, soit sur la rive gauche, entre Enzersdorf et Aspern, en choisissant l'endroit le plus sain.

Il fournira un service de 50 hommes au petit pont et un service de 100 hommes au grand pont de pilotis.


Schönbrunn, 5 août 1809

Au général comte Bertrand, commandant le génie de l'armée d'Allemagne, à Vienne

Monsieur le Général Bertrand, on a arrêté un type général de tête de pont en plaine, avec un réduit de 300 ou 400 toises, avec trois ou quatre redoutes, de manière que les deux redoutes en aval et en amont se trouvent au moins à 600 toises du pont et à 800 pour les grands ponts. Il est donc évident que ces deux redoutes se trouveront ainsi éloignées de 1,600 toises, formant une demi-circonférence au moins de 2,000 à 2,400 toises. Il faut donc six ou sept de ces redoutes, qui, jointes à la garnison du réduit, exigeraient 2,000 hommes pour garder la tête de pont; encore ne pourrait-elle faire qu'une faible résistance; encore est-il évident que ces redoutes, éloignées de 300 ou 400 toises, ne pourraient présenter aucune résistance raisonnable; que, une prise, elles le seraient toutes successivement; qu'elles ne pourraient être défendues par l'artillerie du réduit, tout comme elles ne défendraient pas le réduit. Ces redoutes, en effet, ne sont pas placées là pour donner une nouvelle force au réduit, mais elles sont établies pour donner protection à un corps d'armée et à tous les embarras d'une armée qui serait en retraite. c'est une espèce de camp retranché. Les têtes de pont de Passau, de Linz et de Spitz, devant servir au débouché de toute une armée, doivent être construites sur ce principe, mais il est des têtes de pont qui ont un autre but et qui, si elles étaient construites sur ce principe, induiraient en erreur, par exemple, la tête de pont d'Anger sur la March. En faisant établir une tête de pont sur la rive gauche de la March, mon but n'est point qu'elle puisse protéger la retraite d'une armée ou, autrement parlant, qu'elle serve de camp retranché: mon vrai but est d'occuper un point sur la rive gauche de la March, afin que l'ennemi ne puisse se servir de cette rivière comme d'un rideau; que, en conservant la tête de pont, je puisse déboucher, si je le désire. On sent que ce débouchement est très hypothétique. Si, après avoir fait une tête de pont, on faisait des redoutes à 400 et 500 toises les unes des autres, on irait contre l'objet. Ces redoutes, une fois prises, uniraient au lieu de servir. Il faut donc construire seulement une enceinte, établir des lunettes en amont et en aval, assez pour qu'on ne puisse pas découvrir le pont, et si ensuite on veut établir d'autres lunettes, il faut qu'elles soient très près de la place, qu'elles soient protégées par le feu du réduit et qu'elles le protègent.

Comme la March est une très-petite rivière, il serait convenable, pour remplir l'objet qu'on se propose, de couvrir le pont des deux côtés, à peu près comme cela est tracé ici.


Schönbrunn, 5 août 1809

OBSERVATIONS SUR LE PLAN DES ENVIRONS DE PRESBOURG.

1e Observation. Il paraît que l'on a placé le pont vis-à-vis la rue du Couronnement, qui sans contredit a l'avantage d'offrir un débouché plus facile. Pour qu'on soit maître de ce pont, il est indispensable de faire sans délai, à 1,200 toises, une tête de pont dans l'île Ober Ufer, et d'y occuper la ligne désignée à partir des ouvrages ayant des fossés pleins d'eau, et sur le petit bras trois petits ponts. Cet ouvrage est le premier qu'il faille faire, puisque, indépendamment des projets qu'on a sur Presbourg, la possession du pont ne peut être assurée qu'autant qu'on occupera l'extrémité de l'île Ober Ufer, sans quoi l'ennemi viendrait établir des batteries à 400 toises du pont. Le général Bertrand doit donc donner des ordres pour que, sans délai, cette position soit assurée et les ouvrages commencés. Comme elle a, je crois, 400 toises, il paraîtrait naturel de l'occuper par une espèce de bonnet-de-prêtre. On propose ensuite de jeter un second pont en B; il est hors de doute que ce pont doit être jeté pour avoir un second débouché au moment où Presbourg deviendra le centre des opérations. On occupera alors l'île de Pœtschen comme tête de pont.

Ce pont serait situé à 1,200 toises de l'autre pont, et il deviendrait convenable, dans cette hypothèse, de bien étudier les positions y et y', qui doivent joindre le chemin avec les hauteurs de Neudorf et servir en même temps à protéger le passage du nouveau pont et du pont de Theben. Le général Rogniat doit faire faire cette reconnaissance en grand détail. Le plan qu'on a sous les yeux est petit et sans échelle, on ignore les distances qu'il y a de Z à Y, d'y à y' et d'y à g. Ce plan suppose qu'avec des redoutes on occuperait les hauteurs dominantes, et qu'on tracerait ensuite à chaque tête de pont son ouvrage particulier.

2° Observation. Le pont établi comme il l'est, l'île Ober Ufer occupée, il faut d'abord imaginer une tête de pont qui nécessairement doit contenir toute la ville de Presbourg et ses faubourgs. Sur le plan, il paraîtrait que depuis le plan 5 (ou le Calvaire) jusqu'au point 7 il n'y aurait que 500 toises. Cette étendue de 1,500 toises pourrait se défendre, 1° par un ouvrage G , qui devrait être le plus considérable, étant la tête de la position dans tout le système; 2° par quatre redoutes de 30 toises de côté, palissadées, placées et dessinées de manière à croiser leurs feux et à se défendre entre  elles. Comme ces redoutes devraient n'être qu'à 250 ou 300 toises l'une de l'autre, on pourrait en mettre une de plus, s'il était nécessaire, et elles se soutiendraient réciproquement. On pourrait ensuite, à 2 ou 300 toises derrière, tracer des lignes qui auraient à peu près 1,200 toises, qu'il faudrait prolonger jusqu'au château; ce qui ferait 500 toises d'augmentation. Ce serait donc une étendue de lignes de 1,800 toises. Ces lignes ne pourraient être qu'un bon fossé bien palissadé, avec des échantillons plus forts aux angles saillants, et l'on placerait les angles saillants entre les redoutes, de manière qu'ils tombassent au milieu des redoutes, afin de leur donner une nouvelle force. Comme c'est l'échantillon qui constitue spécialement la force des ouvrages, et qu'ici l'échantillon serait très-faible, toute la force serait placée dans les redoutes qui seraient en avant de la ligne et dans les cinq redoutes intermédiaires formées par les saillants de cette ligne. On aurait une position convenable.

Ces quatre redoutes doivent employer chacune 200 hommes pendant dix jours: total : 800 travailleurs pendant dix jours.

La tête de pont de l'île Ober Ufer doit employer 400 travailleurs pendant quinze jours.

La position dominante G doit encore employer 400 hommes pendant quinze jours.

Ces ouvrages emploieront donc 1,600 hommes pendant dix à quinze jours. Les lignes de l'enceinte doivent être l'objet d'un millier d'hommes pendant quinze jours, et, comme on suppose 6,000 travailleurs, on aurait donc encore 3,000 hommes pour divers ouvrages.

En prenant le pont comme point de centre, tous les ouvrages qu'on vient de tracer ne doivent présenter qu'un cercle de l'étendue de 1,200 toises. Voilà sans doute déjà une tête de pont convenable, pouvant servir de retraite et de point d'appui à une armée, et il est probable qu'avec une division de 12 à 15,000 hommes et une soixantaine de pièces d'artillerie, ces ouvrages, une fois finis, pourraient soutenir l'attaque d'une armée de 80,000 hommes.

Sans doute qu'il serait à souhaiter que l'enceinte fût plus petite, mais il est impossible de songer à démolir la ville, et cependant il serait possible que dans le tracé, et moyennant quelques démolitions, on pût mieux appuyer la droite.

3e Observation. La tête de pont de Presbourg ainsi faite, il faut la lier avec les ponts de Theben et de Neudorf. La hauteur Z est déjà occupée, il faut donc occuper les hauteurs y, y' et g, ce qui fera quatre redoutes. Comme nous l'avons dit plus haut, cette partie est à étudier. Le but serait de conserver le chemin de Presbourg à Theben le long du Danube, pour qu'on puisse se retirer par la rive droite du Danube ou même par la rive gauche en se reployant sur Theben.

4e Observation. Le quatrième objet à remplir, c'est de favoriser un champ de bataille pour une armée. La droite n'offre aucune difficulté; deux ou trois redoutes dans la plaine, à 5 ou 600 toises des autres, favoriseraient suffisamment le champ de bataille et donneraient des feux sur 1,200 toises de plaine, parfaitement appuyées à la rivière et qui seraient inattaquables. Les ouvrages i, l, n, o donneraient la jouissance de la grande route de Vienne par Schloss Hof. Il resterait donc à reconnaître quel est le point dominant entre Neudorf, Ballenstein et le Danube, il est probable que les positions P et T ne sont pas les plus dominantes, et que les montagnes continuent à s'élever; je ne sais ce que c'est qu'un château qu'on voit à une lieue de Stampfen. Cette reconnaissance fera voir la position qu'il faudrait prendre, si l'ennemi marchait sur Stampfen, pour pouvoir alors toujours appuyer la gauche sur la March.

Sans doute que les fortifications établies devant Presbourg donneront toujours l'avantage de pouvoir se retirer sur Presbourg et d'avoir ses ponts gardés par une petite partie de ses forces tenant en échec une plus grande partie des forces de l'ennemi; mais cependant il est nécessaire de reconnaître le pays et de proposer quelques ouvrages en forme de vedette et d'observatoire, qui auraient pour objet de mettre en mesure d'éclairer la marche de l'ennemi et d'arriver à Neudorf avant lui.

On connaît bien la situation de la hauteur entre Theben et Neudorf. Il faudrait bien connaître également la situation des hauteurs qui dominent Ballenstein, afin de se ménager quelques avantages pour arriver à ces positions avant l'ennemi, soit par des communications, soit par quelques ouvrages.

De Saint-Georges à Marchegg il y a une route qui traverse les Karpathes; de Bœsing à Anger il y a une autre route qui traverse également les Karpathes; on désirerait donc, s'il est possible, quelques redoutes sur ces hauteurs, pour protéger constamment la route de Presbourg et pouvoir arriver sur la March avant l'ennemi, s'il s'avançait sur cette rivière par l'une ou l'autre des routes ci-dessus désignées.

En résumé : 1° l'ouvrage de l'île Ober Ufer doit être commencé sans délai, et le général Bertrand doit y mettre des travailleurs sans attendre de nouveaux ordres, puisque sans cet ouvrage le pont de Presbourg n'est pas sûr; 2° La tête de pont de Presbourg doit consister en une ligne de redoutes qui s'appuie à la petite rivière qui coupe la vallée de Theben, et dont le centre soit la hauteur du Calvaire, qui devra être parfaitement fortifiée, et enfin en une enceinte ayant des points saillants en forme de redoutes, qui s'appuie au château; 3° On doit étudier la manière de protéger par une série d'ouvrages la route de Presbourg à Schloss Hof et tous les ponts sur le Danube entre Theben et Presbourg, c'est-à-dire assurer, pour seconde précaution, la route qui de Presbourg va à Theben, et enfin appuyer la droite de la ligne par des redoutes qui arrivent au Danube.


Camp impérial de Schönbrunn, 5 août 1809

ORDRE DU JOUR.

Sa Majesté témoigne son mécontentement au maréchal prince de Ponte-Corvo pour son ordre du jour daté de Leopoldau le 7 juillet, qui a été inséré à une même époque dans presque tous les journaux, dans les termes suivants:

"Saxons ! Dans la journée du 5 juillet, 7 à 8,000 d'entre vous ont percé le centre de l'armée ennemie et se sont portés à Deutsch-Wagram, malgré les efforts de 40,000 hommes soutenus par 50 bouches à feu. Vous avez combattu jusqu'à minuit et bivouaqué au milieu des lignes autrichiennes. Le 6, dès la pointe du jour, vous avez recommencé le combat avec la même persévérance, et, au milieu des ravages de l'artillerie ennemie, vos colonnes vivantes sont restées immobiles comme l'airain. Le grand Napoléon a vu votre dévouement; il vous compte parmi ses braves.

Saxons ! La fortune d'un soldat consiste à remplir ses devoirs;  vous avez dignement fait le vôtre !

Au bivouac de Leopoldau, le 7 juillet 1809.

Le maréchal d'Empire, commandant 9e corps, BERNADOTTE "

Indépendamment de ce que Sa Majesté commande son armée en personne, c'est à elle seule qu'il appartient de distribuer le degré de gloire que chacun mérite.

Sa Majesté doit le succès de ses armes aux troupes françaises et non à aucun étranger. L'ordre du jour du prince de Ponte-Corvo, tendant à donner de fausses prétentions à des troupes au moins médiocres, est contraire à la vérité, à la politique et à l'honneur national. Le succès de la journée du 5 est dû aux corps des maréchaux duc de Rivoli et Oudinot, qui ont percé le centre de l'ennemi en même temps que le corps du duc d'Auerstaedt le tournait par sa gauche. Le village de Deutsch-Wagram n'a pas été en notre pouvoir dans la journée du 5. Ce village a été pris, mais il ne l'a été que le 6, à midi, par le corps du maréchal Oudinot.

Le corps du prince de Ponte-Corvo n'est pas resté "immobile comme l'airain " : il a battu le premier en retraite. Sa Majesté a été obligée de le faire couvrir par le corps du vice-roi, par les divisions Broussier et Lamarque, commandées par le maréchal Macdonald, par la division de grosse cavalerie aux ordres du général Nansouty, et par une partie de la cavalerie de la Garde. C'est à ce maréchal et à ses troupes qu'est dû l'éloge que le prince de Ponte-Corvo s'attribue.

Sa Majesté désire que ce témoignage de son mécontentement serve d'exemple, pour qu'aucun maréchal ne s'attribue la gloire qui appartient aux autres.

Sa Majesté, cependant, ordonne que le présent ordre du jour, qui pourrait affliger l'armée saxonne, quoique les soldats sachent bien qu'ils ne méritent pas les éloges qu'on leur donne, restera secret et sera seulement envoyé aux maréchaux commandant les corps d'armée.


Schönbrunn, 6 août 1809.

Au comte Fouché, ministre de la police générale, à Paris

Monsieur Fouché, j'aurais désiré qu'on n'eût arrêté à Rome que le cardinal Pacca et qu'on y eût laissé le Pape. J'aurais désiré, puisqu'on n'a pas laissé le Pape à Gênes, qu'on l'eût mené à Savone; mais, puisqu'il est à Grenoble, je serais fâché que vous l'eussiez fait partir pour le conduire à Savone; il vaudrait mieux le garder à Grenoble, puisqu'il y est; cela aurait l'air de se jouer de ce vieillard. Je n'ai pas autorisé le cardinal Fesch à envoyer personne auprès de Sa Sainteté; j'ai seulement fait connaître au ministre des cultes que je désirerais que le cardinal Maury et d'autres prélats écrivissent au Pape pour savoir ce qu'il veut, et lui fîssent comprendre que, s'il renonce au Concordat, je le regarderai de mon côté comme non avenu. Quant au cardinal Pacca, je suppose que vous l'aurez envoyé à Fenestrelle, et que vous avez défendu qu'il communiquât avec personne. Je fais une grande différence entre le Pape et lui, d'abord à cause de sa qualité, et pour ses vertus morales. Le Pape est un homme bon, mais ignorant et fanatisé. Le cardinal Pacca est un homme instruit et un coquin, ennemi de la France, qui ne mérite aucun ménagement. Aussitôt que je saurai où se trouve le Pape, je verrai à prendre des mesures définitives; bien entendu que, si déjà vous l'aviez fait partir pour Savone, il ne faut point le faire revenir.


Schönbrunn, 6 août 1809, trois heures du matin

Au maréchal Davout, duc d'Auerstaedt, commandant le 3e corps de l'armée d'Allemagne, à Brunn

Mon Cousin, vous devez avoir reçu les ordres de l'état-major pour détruire les ouvrages de Gœding. Il me paraît que l'ennemi se jette derrière la March. Il n'y a plus personne dans le cercle d'Iglau. Il me paraît donc nécessaire que vous ayez vos principales troupes d'infanterie légère aux débouchés des routes de Swillau, d'Olmütz, de Hradisch et de Gœding. Tout cc que vous avez du côté du cercle d'Iglau peut en être ôté, ou du moins diminué. On dit que le quartier général de l'armée autrichienne doit être à Kremsir; vous ne m'avez pas instruit de ce que vous pouvez savoir à cet égard. Les postes que vous avez en avant de Wischau, du côté de Hradisch, devraient vous donner des nouvelles fréquentes.

Faites-moi connaître tous les cantonnements de votre corps d'armée.

Le général Pacthod m'a écrit pour avoir une destination. Le général Gudin, que je vois à la parade, me paraît bien faible; je ne pense pas qu'il puisse servir avant un mois. Choisissez une position pour l'armée sur Brünn. Allez vous-même bien reconnaître une position à Nikolsburg, en supposant que l'ennemi fût du côté de Gœding.

Je suppose qu'il y a à Brünn des manutentions et que vous formez un magasin. Il faut que vous ayez 50,000 rations et que vous ayez en magasin un million de farine, dans le cas où l'armée se porterait sur Brünn.

J'ai donné l'ordre an général Bertrand de faire travailler à la citadelle; surveillez-en les travaux. Je tarderai encore quelques jours avant d'envoyer les dix-huit pièces nécessaires à son armement.

Vous avez des ingénieurs-géographes; faites bien faire la reconnaissance du champ de bataille d'Austerlitz avec Gœding et Nikolsburg, c'est-à-dire bien reconnaître la rivière et la vallée de la Schwarza jusqu'à son embouchure dans la Taya.


Schönbrunn, 6 août 1809.

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

Monsieur le Vice-amiral Decrès, aussitôt que la paix aura lieu ici, mon intention est de reprendre Cayenne. Je suppose que vous avez tous les plans, mémoires et renseignements nécessaires des hommes qui reviennent de ce pays. Faites-vous donner par Victor Hugues un mémoire sur les moyens de reprendre cette colonie, sur la force de l'expédition et le lieu d'où elle doit partir. La division du contre-amiral Gourdon, qui peut être augmentée de manière à porter 2,000 hommes, serait-elle suffisante ? Il faudrait pour cette expédition un assortiment de petits bâtiments. Arrangez-vous pour avoir sous la main tous les officiers de marine et les officiers d'artillerie et du génie qui viennent de cette colonie, et faites-moi connaître quelle est l'époque favorable pour cette expédition.

Dans quelle situation se trouve la Guadeloupe ?


Schönbrunn, 6 août 1809

Au général Clarke, comte d'Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Donnez ordre que l'officier du 5e de hussards qui a fait l'achat des chevaux soit arrêté. On me dépense beaucoup d'argent sans utilité; des chevaux de quatre ans ne servent de rien; des chevaux borgnes et aveugles ne servent de rien. Prenez des mesures pour qu'à Strasbourg on donne des sommes aux détachements de cavalerie pour le ferrage pendant la route. Désormais ne laissez plus partir de détachements de Strasbourg qu'ils n'aient un capitaine ou un lieutenant pour les commander.


Schönbrunn, 6 août 1809, sept heures du soir.

Au général Clarke, comte d'Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Je reçois votre lettre du 31 juillet, par laquelle vous m'instruisez que deux cents voiles de toutes grandeurs sont signalées du côté de l'île de Walcheren. L'île de Walcheren doit avoir, en troupes françaises et hollandaises, 6,000 hommes; envoyez-y de jeunes officiers d'artillerie et du génie, hommes de zèle et attachés. Je suppose que les magasins de Flessingue sont approvisionnés et que vous avez un chiffre avec le général Monnet. Je lui ai donné l'ordre, que vous lui réitérerez, de couper les digues si cela était nécessaire. Je suppose également que le général Chambarlhac se sera porté sur l'île de Cadzand avec le corps qui est à Louvain, la demi-brigade provisoire qui est à Gand et tout ce qu'il aura pu tirer des 16e et 24e divisions militaires, et que le général Rampon l'aura suivi avec son corps de gardes nationales, ce qui formera là 9 ou 10,000 hommes; qu'il aura fait atteler douze pièces de canon à Gand, à Douai, à Saint-Omer, pour ne pas manquer d'artillerie de campagne; qu'il aura fait venir de Maëstricht ce qui s'y trouvait, et que le général Sainte-Suzanne aura formé une colonne avec du canon pour se porter partout.

Envoyez à Anvers des officiers d'artillerie et du génie et un commandant supérieur. La marine a à Anvers 12 ou 1,500 hommes qui peuvent servir. On peut former à Anvers quelques bataillons de gardes nationales pour faire la police de la ville et concourir à la défense.

Si le débarquement s'est effectué, vous aurez mis en état de siège Anvers, Ostende, Lille; vous aurez fixé l'attention du roi de Hollande sur les places de Breda et de Berg-op-Zoom, et, s'il y a lieu, vous aurez ordonné l'armement de la première ligne de mes places fortes de Flandre.

Vous pouvez réunir quelques détachements de cavalerie et en former quelques escadrons provisoires.

Vous n'aurez pas manqué d'envoyer le maréchal Moncey porter son quartier général à Lille, en le chargeant de requérir tout ce qu'il pourra de gendarmerie pour réunir un millier d'hommes de cette bonne cavalerie.

Vous aurez retenu les détachements en marche, même ceux destinés pour l'armée, tels que 3,000 hommes venant de la 12e division militaire, et vous les aurez dirigés soit sur Paris, soit sur les points où ils peuvent être utiles.

Enfin, s'il y a lieu, demandez la réunion d'un conseil chez l'archichancelier pour requérir 30,000 hommes de gardes nationales dans les 1e, 2e, 14e, 15e, 16° divisions militaires, et quelques bataillons dans les 24e et 25e, et pour que chaque ministre fasse les circulaires convenables pour exciter la nation et surtout les départements où il est nécessaire de lever des gardes nationales.

Après les avantages que nous avons ici, je suppose que les Français ne se laisseront pas insulter par 15 ou 20,000 Anglais. Je ne vois pas ce que les Anglais peuvent faire; ils ne prendront pas Flessingue, puisque les digues peuvent être coupées; ils ne prendront pas l'escadre, puisqu'elle peut remonter jusqu'à Anvers et que cette place et son port sont à l'abri de toute attaque. J'imagine que le ministre Dejean se sera empressé d'approvisionner ses magasins. Si la descente était sérieuse, prenez des mesures pour avoir dans le Nord le plus grand nombre possible de pièces de canon attelées, soit par voie de réquisition, soit autrement. Je vous autorise même, dans un cas urgent, à retenir une partie des dix compagnies d'artillerie que vous m'envoyez.

Donnez ordre au duc de Valmy de se rendre à Wesel, où il sera mieux placé pour assurer cette place importante.


Schönbrunn, 7 août 1809, trois heures du matin.

Au général Clarke, comte d'Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Je reçois votre lettre du 1er août. Il me paraît que l'ennemi en veut à l'île de Walcheren. J'ai fait donner l'ordre au général Monnet, s'il était pressé, plutôt que rendre la place, de couper les digues.

Réitérez-lui cet ordre par des officiers.

Je vois avec plaisir que vous avez envoyé dans le Nord les gardes nationales et les 3e et 4e demi-brigades qui étaient à Paris. J'aurais désiré que vous y eussiez envoyé le maréchal Moncey pour réunir un corps de gendarmerie d'un ou deux milliers de chevaux. Il avait été fait dans le temps un travail pour qu'en cas d'évènement la gendarmerie fût prête à se porter sur Boulogne ou sur Flessingue, selon les circonstances.

J'ai envoyé à M. l'archichancelier un décret pour lever 30,000 gardes nationales, si cette mesure est nécessaire, dans les 1e, 2e, 3e, 4e, 14e, 15e, 16e, 24e et 25e divisions militaires. Il faudrait, dans ce cas, les diviser en quatre ou cinq corps, que commanderaient des sénateurs comme les généraux Latour-Maubourg, Soulès, d'Aboville, Beurnonville, etc., en mettant sous leurs ordres de bons généraux de brigade et de bons adjudants commandants.

Si l'expédition anglaise est sérieuse et que le prince de Ponte-Corvo soit sous votre main, mettez les 24e et 25e divisions militaires sous ses ordres et envoyez-le diriger ce mouvement, ou envoyez le maréchal Moncey. Il faut que vous preniez sur vous. Il me semble que je n'ai rien à redouter de cette opération. Flessingue ne peut être pris, puisque, si le général Monnet est serré un peu de près, en trois marées il peut inonder l'île et mettre tout dans l'eau. L'ennemi ne peut prendre mon escadre, puisque, au pis aller, elle peut remonter jusqu'à Anvers. Vous aurez envoyé un général de division pour y commander. Le ministre Dejean, comme inspecteur général du génie, pourrait s'y porter pour presser l'armement et le parfait approvisionnement de cette place. Cette tournée, sous le rapport de sa double fonction de directeur de l'administration de la guerre et d'inspecteur général du génie, peut être très utile. Il inspectera mes places d'Anvers, d'Ostende, de Juliers, et les fera approvisionner et armer. Le général Chambarlhac a bien fait de retenir le bataillon du 65e.

Par l'ordre que j'ai donné au duc de Valmy de retenir les détachements des troupes qui passent à Strasbourg pour venir rejoindre l'armée, vous verrez que je suis d'opinion que vous gardiez tous les moyens qui vous sont utiles en France pour faire face à cette attaque. Il est important que les 6,000 hommes de gardes nationales du général Rampon soient remplacés à Saint-Omer, pour que Boulogne soit en sûreté, le général Sainte-Suzanne pourrait commander ces gardes nationales et être remplacé à Boulogne par un général de la ligne.

La gendarmerie seule peut vous former une cavalerie passable.

Je vais vous renvoyer le général Colaud.

Vous avez dans la main une classe d'hommes intelligents et très utiles que vous pouvez employer, c'est celle des majors; il y en a beaucoup dans la 16e division militaire, employez-les. Les majors d'infanterie et de cavalerie sont en général très bons.

Envoyez dans le Nord un général d'artillerie et faites atteler beaucoup d'artillerie de campagne.

Si les Anglais prennent l'île de Walcheren et continuent la campagne, soit en France, soit en Hollande, vous avez un mois pour vous préparer. Je ne puis penser qu'ils aient entrepris cette expédition pour se rembarquer aussitôt et retourner chez eux. Mais il faut partir du principe que cela n'influera en rien sur mes opérations ici; tout au plus m'y porterai-je de ma personne, mais je n'y mènerai pas un homme. Il faut tout organiser et diriger dans ce sens. Vous pouvez retenir les trois compagnies d'artillerie de la Garde et les vingt-quatre pièces de canon qui sont à Strasbourg. En général, tout ce que je vous ai demandé m'est utile, mais non indispensable; c'est à vous à distinguer ce que vous devez envoyer de ce que vous pouvez garder, si l'expédition devient sérieuse. .le ne crois pas qu'elle reçoive de renforts; où les Anglais prendraient-ils tant de troupes ? Il paraît que lord Wellesley est entré avec 25,000 hommes à Talavera. Si cela est vrai, les Anglais, qui ont besoin de troupes pour soutenir cette expédition d'Espagne, ne peuvent avoir le monde nécessaire pour prendre Walcheren et faire une puissante diversion.

Je suppose que le roi de Hollande se sera mis en mouvement et aura créé ses gardes nationales. Il doit avoir 6 à 7,000 hommes dans la main.


Schönbrunn, 7 août 1809.

Au général Clarke, comte d'Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Général Clarke, vous ne m'envoyez point de nouvelles d'Espagne.

Une lettre du Roi, en date du 25 juillet, me mande que le général Wellesley est arrivé avec 25,000 Anglais à Talavera de la Reina et s'est réuni à Cuesta.

Il est bien malheureux que le maréchal Soult ait si mal manœuvré, que de ne s'être pas réuni au Roi. J'espère que le Roi, avec la garnison de Madrid, les 1er et 4e corps, formant 55,000 hommes, aura pris position pour empêcher l'ennemi d'entreprendre sur Madrid, et se sera fait joindre par le maréchal Soult; il aurait alors plus de 100,000 hommes. Ce serait une belle occasion de donner une leçon aux Anglais et de finir la guerre.


Schönbrunn, 7 août 1809

A Alexandre, prince de Neuchâtel, major général de l'armée d'Allemagne, à Schönbrunn

Écrivez au général Baraguey d'Hilliers qu'il est possible que les hostilités recommencent. Dans ce cas il doit se tenir prêt à pouvoir centraliser promptement ses troupes sur Laybach, pour, de là, se réunir au maréchal Macdonald sur Graz. Les forts de Prewald n'ont pas encore été défaits.


Schönbrunn, 7 août 1809

A Alexandre, prince de Neuchâtel, major général de l'armée d'Allemagne, à Schönbrunn

Mon Cousin, expédiez un officier au général Baraguey d'Hilliers, qui sera porteur d'un ordre au maréchal Macdonald pour approvisionner, armer et mettre en bon état la forteresse de Graz, et pour presser la rentrée des contributions. Écrivez au général Schilt, à Trieste, que vous l'autoriserez à traiter avec les canonniers autrichiens et à leur conserver leur grade, s'ils veulent se rendre. De Trieste, votre officier se rendra en Dalmatie pour savoir ce qui se passe, et sera porteur d'un ordre au général qui commande à Zara. pour qu'il envoie par mer les hommes sortant des hôpitaux, appartenant au corps du duc de Raguse.


Schönbrunn, 7 août 1809

Au maréchal Kellermann, duc de Valmy, commandant l'armée de réserve du Rhin, à Strasbourg

Mon Cousin, j'apprends que les Anglais menacent de débarquer sur les côtes de Hollande et dans l'île de Walcheren. Cela étant, je désire que vous vous rendiez à Wesel et que vous preniez des mesures pour la sûreté de cette place importante. Arrêtez les détachements de cavalerie et d'infanterie qui passent par Strasbourg pour se rendre à l'armée, afin d'en former un corps, et, si cela devient nécessaire, le diriger sur Wesel pour la sûreté du pays, et pour être à même de se porter où il serait nécessaire dans le Nord. Mandez par l'estafette au ministre de la guerre cet ordre que je vous donne, afin qu'il vous tienne instruit.


Schönbrunn, 8 août 1809, six heures du matin.

Au prince Cambacérès, archichancelier de l'empire, à Paris

Mon Cousin, vous aurez reçu mon décret sur la levée de 30,000 gardes nationales. Je suis fâché que dans le conseil du 1er vous n'ayez pas pris sur vous d'appeler les gardes nationales; c'est se méfier à tort d'elles. Je suppose qu'en recevant mon décret vous vous serez occupé de les former en quatre ou cinq divisions, et de désigner des généraux du Sénat pour les commander; que vous aurez fait votre communication au Sénat, qui servira de publication. Le Sénat répondra par une adresse où il m'adressera la parole, et qui sera une espèce de proclamation. Tout cela s'imprimera de suite. De leur côté, les ministres donneront l'impulsion. Il faut avoir sur-le-champ, en première et en seconde ligne, 80,000 hommes, et imprimer un mouvement à la nation pour qu'elle se montre, d'abord pour dégoûter les Anglais de ces expedition et leur faire voir la nation toujours prête à prendre les armes; ensuite pour reprendre l'île de Walcheren, si elle venait à être prise, et aider la Hollande à les chasser de chez elle, s'ils l'envahissaient; enfin pour favoriser les négociations entamées ici; et certes cela leur nuira, si l'on me croit embarrassé par le débarquement des Anglais. Ainsi donc tous les moyens d'influencer l'opinion publique doivent être pris; les gardes nationales de chaque département doivent être désignées et réunies, et les anciens soldats qui voudraient faire cette campagne pour battre les Anglais doivent être invités à se réunir à Lille pour former une légion.


Schönbrunn, 8 août 1809, six heures du matin

NOTE POUR LE MINISTRE DE LA GUERRE

Si les Anglais investissent et assiégent Flessingue, je ne vois pas de moyen de les chasser par la force. Flessingue doit trouver son salut en coupant ses digues et en inondant l'île. Cette opération faite, l'ennemi sera obligé de se rembarquer, et son expédition aura échoué. Je vois avec plaisir que l'escadre avait commencé à remonter le 31; elle sentira qu'elle ne sera à l'abri qu'à Anvers, et s'y retirera.

L'ennemi ne peut bloquer et assiéger Anvers qu'avec des forces beaucoup plus grandes. Il serait attaqué par la Hollande et la France et n'aurait pas le temps de prendre la place.

Que peuvent faire les Anglais ? S'ils passent en Belgique, ce sera une guerre détestable pour eux; ou ils entreront en Hollande pour ravager.

Gand me paraît une fort bonne position pour réunir l'armée. Saint-Omer, Lille, Bruxelles, Anvers, me paraissent bons pour réunir les cinq divisions de gardes nationales de seconde ligne.


Schönbrunn, 8 août 1809, six heures du matin

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

Je reçois votre lettre et l'instruction donnée à l'amiral Missiéssy. Je ne comprends pas que mon escadre puisse faire autre chose dans cette rivière que se faire brûler, au lieu qu'à Anvers elle est à l'abri de tout événement. Le but des Anglais est de prendre l'escadre; à Anvers, elle n'a rien à craindre. Une frégate, les chaloupes canonnières de l'Escaut, et un ou deux vaisseaux s'il est nécessaire, pourraient rester pour défendre la rivière. Dans cette mer étroite, dix vaisseaux ne font pas plus qu'un, et les canonnières vaudront mieux: que cela. D'ailleurs, je ne vois pas le but des Anglais, si ce n'est de prendre mon escadre; elle est en sûreté à Anvers, car là elle est à l'abri d'un coup de main, avec le renfort des 6,000 hommes des vaisseaux. C'est le parti qu'avait proposé, je crois, le roi de Hollande, et qu'il fallait prendre quand on a vu le commencement du débarquement et qu'on a pu juger les projets des Anglais.

P. S. Envoyez un officier de marine avec la mission d'entrer à Flessingue et de porter au gouverneur l'ordre que je lui ai donné plusieurs fois de couper les digues de l'île.


Schönbrunn, 8 août 1809

Au comte Mollien, ministre du trésor public, à Paris

Monsieur Mollien, je viens de rendre un décret que vous recevrez incessamment et qui contient les dispositions suivantes. L'armée d'Italie et l'armée de Dalmatie, depuis le 1er janvier jusqu'au 1er avril, sont au compte du trésor public de France. Depuis le 1er avril jusqu'au 1er octobre, elles seront payées par la caisse des contributions de la cinquième coalition, pour les troupes qui sont en Allemagne; mais, pour les troupes ainsi que pour les dépôts qui seront en Italie, en Dalmatie ou en France, elles continueront à être payées par le trésor public. La caisse de la cinquième coalition vous rendra tout ce que vous vous trouverez avoir avancé depuis le 1er avril. Il est donc nécessaire que vous fassiez dresser des états, 1° de tout ce que vous avez fourni à l'armée d'Italie et à l'armée de Dalmatie depuis le 1er janvier jusqu'au 1er avril, et qui doit rester au compte du trésor public; 2° de tout ce que vous aurez avancé depuis le 1er avril jusqu'au 1er octobre, ce qui doit vous être rendu par la caisse de la cinquième coalition. Il est également nécessaire que vous fassiez faire l'état le plus rigoureusement exact de ce que doit vous coûter le petit nombre de troupes qui restent en Italie et en Dalmatie, et que vous fassiez connaître quelles seront les modifications qui en résulteront dans les budgets de la guerre et de l'administration de la guerre, pour les six mois pendant lesquels l'armée d'Italie et celle de Dalmatie seront au compte de la caisse de la cinquième coalition. On ne stipule rien pour une époque au delà de ces six mois, parce que l'on ne peut rien statuer d'avance pour un temps aussi éloigné. Le budget de l'armée du Rhin, en recettes et en dépenses, arrêté par décret du 19 février, n'aura de valeur que jusqu'au 1er avril; à dater de cette époque il sera annulé. En conséquence, tout ce que le trésor public et la caisse de l'extraordinaire se trouveront avoir fourni à l'armée d'Allemagne depuis cette époque leur sera rendu par la caisse de la cinquième coalition. Il faut donc que vous en fassiez dresser les états. Nous entendons par les fonds de la cinquième coalition les revenus de tous les pays qui étaient en réserve en Allemagne avant le 1er avril, et les revenus et le produit des contributions des pays acquis depuis les nouvelles conquêtes. Au moment de la guerre et depuis le 1er avril, j'ai accordé des fonds au génie, à l'artillerie, au major général, à l'intendant général. Mon intention est que ces fonds soient remboursés au trésor ou à la caisse de l'extraordinaire, selon qu'ils auront été fournis par l'un ou par l'autre. Cela fera un soulagement considérable pour le trésor. J'ai pour but que tout ce qui se dépense en Allemagne soit au compte de la caisse des contributions, ne laissant au compte du trésor que les dépenses qui se font en France, soit pour les remontes, soit pour l'habillement, etc. Je désire que, quand les états seront dressés, vous ayez une conférence avec le ministre de la guerre et l'administration de la guerre pour savoir quelle économie il résultera de ces dispositions, tant pour le trésor que pour la caisse de l'extraordinaire. Le ministre de l'administration de la guerre était dans l'usage d'envoyer 500,000 francs par mois en Dalmatie; 100,000 francs doivent suffire maintenant; ainsi ce sera pour six mois une économie de 2,400,000 francs. La solde, les vivres, les fourrages, les gratifications de campagne, etc., coûtaient pour l'armée d'Italie environ 3 millions par mois. Cette dépense doit aujourd'hui être réduite à bien peu de chose, et probablement à une somme qui n'excède pas 300,000 francs. Cela fera donc pour six mois 15 ou 16 millions d'économie. Au commencement d'avril, j'ai mis des fonds à la disposition du major général, de l'intendant général, du génie et de l'artillerie. Ces fonds doivent rentrer aux crédits sur lesquels ils ont été imputés. Enfin la caisse de l'extraordinaire devait fournir 3 millions par mois; elle gagnera donc pour six mois 18 millions. Je suppose que, pour les deux ministères, les dispositions de mon décret produiront d'économie 30 millions au trésor et 18 millions à la caisse de l'extraordinaire. Je ne dis cela que de mémoire et pour vous faire connaître comment je conçois les choses en attendant les renseignements précis que vous m'enverrez.


Schönbrunn, 8 août 1809

Au général Clarke, comte d'Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

En lisant avec attention l'état que vous m'avez envoyé en date du 1er août, je vois que j'ai 4,000 hommes en garnison à Flessingue, plus ce qu'il peut y avoir de la marine.

Dans l'île de Cadzand, une brigade commandée par le général Rousseau est composée de 1,000 hommes; elle fait partie de la division du général Chambarlhac, et je vois que le général Chambarlhac a, de plus, à Gand la 8e demi-brigade de réserve. Je suppose un colonel en second pour la commander. Il faut y envoyer des majors pour commander chacun un ou deux bataillons.

Je vois le 48e, le 108e, le 13e léger et le 65e, quatre bataillons formant 3,000 hommes. Envoyez deux majors : l'un commandera le 48e et le 108e; l'autre le 13e et le 65e. Envoyez également trois généraux de brigade dans la division Chambarlhac, savoir, le général Rousseau, un pour la 8e demi-brigade provisoire et un pour les quatre bataillons. Tout ce que l'on pourra retirer des dépôts, faites en former un bataillon provisoire commandé par un major. La division Chambarlhac sera ainsi composée de trois brigades et de plus de 6,000 hommes. Tous les détachements de cavalerie que vous pourriez vous procurer, il faut en former plusieurs régiments de marche commandés chacun par un major.

Les gardes nationales du Nord, qu'il faut compléter à 6,000 hommes, envoyez le général Soulès pour les commander, avec deux généraux de brigade et quatre majors.

Les gardes nationales d'élite auront deux généraux de brigade et le général Rampon pour les commander. Envoyez un général pour commander la cavalerie légère et envoyez un général pour commander la gendarmerie.

Une autre division, que le général Olivier pourra commander, sera composée de la 3e et de la 4e demi-brigade de réserve et des 6e et 7e; ce qui ferait 7 à 8,000 hommes. Il faudrait également beaucoup de majors et deux généraux de brigade.

Alors on aurait une armée active composée de la manière suivante :

INFANTERIE. - Division Chambarlhac : 1ee brigade, Rousseau (pour mémoire, chargée de la défense de Cadzand) , 1,000 hommes. - 2e brigade: 8e demi-brigade de réserve, 1,200 hommes, et bataillons provisoires de la 16e division militaire, 1,500 hommes; total, 2,700 hommes. - 3e brigade: bataillons des 48e, 108e, 13e et  65e, 3,000 hommes. - Division Olivier: le brigade: 3e et 1e demi-brigade provisoires, 4,000 hommes. - 2e brigade: 6e et 7e demi-brigade provisoires, 4,000 hommes.

GARDES NATIONALES. - Gardes nationales du Nord (sénateur Soulès), 6,000 hommes. - Gardes nationales d'élite (sénateur Rampon), 6,000 hommes.

CAVALERIE LÉGÈRE. - Plusieurs régiments provisoires; on suppose qu'on pourrait en former deux, chacun de 500 hommes; 1,000 hommes.

GENDARMERIE. - Quatre régiments, 2,000 hommes.

ARTILLERIE. - Soixante pièces attelées avec leur approvisionnement. Total général, 29,700 hommes.

Il est clair que cette armée a besoin d'un général en chef. Vous y mettrez Moncey, un général d'artillerie, un général du génie, un commissaire ordonnateur.

Il faut appeler ce corps: Armée du Nord.

Si l'on a envoyé le maréchal de Ponte-Corvo, j'approuve cette nomination; mais alors il faut mettre en deuxième ligne le maréchal Moncey ou le maréchal Serrurier.

2° Ligne. - Gardes nationales. Sur les 30,000 hommes levés en conséquence de mon décret, 6,000 hommes se réuniront à Bruxelles; 6,000 hommes se réuniront à Lille; 6,000 à Saint-Omer; 6,000 à Ostende; 6,000 à Anvers.

Chaque sénateur commandant aura quelques majors et organisera promptement ces 30,000 gardes nationales. Elles seront appelées Divisions de Gardes nationales de réserve.

Le duc de Valmy réunira à Wesel tout ce qu'il pourra d'infanterie et organisera en bataillons provisoires tout ce qu'il tirera des 5e et 2e divisions militaires. Il formera deux divisions et quatre brigades. Il formera un ou deux régiments provisoires de cavalerie. On suppose qu'il peut réunir promptement 10,000 hommes.

Le tout ferait près de 70,000 hommes, suffisants pour garder le Nord, garnir nos places el garantir la Hollande.

Il y a dans la 16e division militaire, ainsi que dans les 2e et 4e, une bien grande quantité de militaires et soldats qui ont servi. Les préfets peuvent les appeler, et vous en formeriez un bataillon par département appelé Bataillon volontaire, lesquels pourraient prendre l'engagement de rester sous les armes jusqu'à ce que les Anglais soient chassés du continent. Je suppose qu'on en trouverait beaucoup. Une circulaire de vous aux préfets serait suffisante pour cela.


Schönbrunn, 9 août 1809

Au général Clarke, comte d'Hunebourg, ministre de la guerre à Paris

Je reçois votre lettre du 3. Je vous ai fait connaître hier mes intentions. J'ai peu de choses à y ajouter aujourd'hui, seulement que vous devez exécuter toutes les dispositions que j'ai ordonnées, quand même les Anglais n'auraient fait aucun progrès et resteraient stationnaires dans l'île de Walcheren. Il est nécessaire, pour les négociations entamées ici, pour l'exemple de l'avenir et pour mes vues ultérieures, d'avoir une armée dans le Nord. Il est trop heureux que les Anglais nous donnent le prétexte de la former. A moins que les Anglais ne se soient embarqués et ne soient retournés chez eux, il faut lever les 30,000 hommes de gardes nationales, comme je l'ai ordonné par mon décret. Le seul inconvénient que cela aura, ce sera de me coûter quelques millions.

A vous parler confidentiellement, il est possible que, lorsque ceci sera terminé, je fasse occuper les côtes de Hollande pour fermer les ports de Hollande aux Anglais. Ils sentiront le résultat d'une clôture en règle des débouchés de l'Ost-Frise, de l'Elbe et de la Zélande. Jusqu'à cette heure, ils vont et viennent en Hollande comme ils veulent.

Je ne vois pas dans vos lettres que vous ayez réitéré au général  Monnet l'ordre de couper les digues, si la place était serrée de près. Je le lui ai dit de vive voix plusieurs fois; réitérez-le-lui de ma part, je n'admets aucune excuse. Je n'ai pas besoin de vous dire que le ministre Dejean et vous devez prendre des mesures pour faire passer des vivres à Flessingue; entendez-vous avec le ministre de la marine. Envoyez également à Flessingue 8 ou 10 officiers d'artillerie de tout grade, un officier du génie et un détachement de sapeurs. Ce que le général Rampon a de mieux à faire, c'est de tenir ses troupes réunies, jusqu'à ce que l'on voie ce que veut faire l'ennemi. Avec des troupes médiocres et en si petit nombre, le général Rampon ne peut chasser les Anglais de l'île de Walcheren; il se fera battre. La fièvre et l'inondation doivent seules faire raison des Anglais. Le roi de Hollande, qui peut disposer de 10 ou 12,000 hommes, les aura portés sur Berg-op-Zoom et aura approvisionné et mis en état ses places du Nord.

Quant à mon escadre, elle ne court aucun danger, puisqu'elle peut se réunir à Anvers et que ses 6,000 hommes augmenteront la garnison de cette place.

Je ne vois rien dans vos lettres qui soit relatif à mes places d'Ostende, de Lille, et à mes places fortes de première ligne. Ne perdez pas un moment pour les armer et approvisionner, si vous ne l'avez déjà fait, et pour lever des gardes nationales, qui en feront le service en règle. Comme je vous l'ai mandé il y a trois jours, à moins que l'ennemi n'ait évacué l'île de Walcheren et ne se soit rembarqué, ne partez de rien pour ne pas exécuter tous mes ordres. Faites mettre dans le Moniteur des bulletins de Flessingue. Il n'y a pas d'inconvénient que la nation soit instruite. Je vois avec peine que vous n'ayez pas mis Anvers en état de siège et que vous n'ayez envoyé personne pour y commander. Que voulez-vous que fasse ce pauvre général Rampon de tout ce que vous lui avez écrit, qui n'est propre qu'à lui faire tourner la tête ? S'il garnit toutes les batteries françaises et hollandaises de l'Escaut, il ne lui restera personne sous les armes. Comment voulez-vous qu'avec 14 à 15,000 gardes nationales il passe à Flessingue ? Et si, pendant qu'il exécute cette instruction, l'ennemi débarque dans l'île de Cadzand, les batteries seront prises et l'île perdue. Les débarquements de l'ennemi hors de l'île de Walcheren ne résultent pas des pièces que vous m'avez envoyées. Le ministre de la marine a confondu cela. Les nouvelles du 30 ont été détruites par celles du 31. Qu'appelez-vous une défensive dangereuse, et comment provoquez-vous un homme qui a de si mauvaises troupes à prendre l'offensive ? Les Anglais ne sont pas entrés dans le Sud-Beveland, pays de marais, où ils ne pourraient se maintenir. Ce qu'il y a de mieux à faire pour mon escadre, c'est d'entrer à Anvers, où elle n'a rien à craindre. Si le général Rampon passe sur la rive droite de l'Escaut, tout est perdu. Vous lui parlez comme s'il avait 20,000 grenadiers de ma Garde. Tout ce qu'il a à faire, c'est de rester à Gand, de garder l'île de Cadzand par des détachements, de s'organiser et d'exercer ses troupes. Tant que les Anglais seront dans l'île de Walcheren, il n'y a rien à craindre. Ils perdront deux mois devant Flessingue; la fièvre et l'inondation feront le reste. Le général Rampon ne doit envoyer personne à Flessingue; il y a tout autant de monde qu'il en faut. L'instruction que vous lui avez donnée est mauvaise; il vaut mieux ne pas écrire que d'écrire à un général quelque chose qu'il n'entende pas. S'il exécute votre ordre, il se fera battre et prendre par les Anglais, et ses 6,000 hommes de gardes nationales iront à Londres. Sa seule destination doit être, comme je vous l'ai dit, d'occuper l'île de Cadzand, c'est-à-dire les communications avec Flessingue, par des détachements, pouvant l'appuyer par tout son corps, de défendre la rive gauche, d'être toujours à même d'arriver à Anvers avant l'ennemi, et d'organiser son artillerie de campagne. Faites connaître au général Monnet qu'il n'a pas besoin d'un seul homme de secours. Je veux chasser les Anglais de l'île de Walcheren, qui doit être défendue par les fièvres et l'inondation. Mettez Ostende et Anvers en état de siège et envoyez-y de bons commandants. Que mon escadre rentre à Anvers; elle est là à l'abri de tout. Les Anglais ne sont pas assez insensés pour se disséminer dans un tas de petites îles; ils savent que des forces peuvent promptement se réunir contre eux de France et de Hollande. Il est constant, par le rapport du général Monnet du 31 et par les dépêches télégraphiques, qu'il y a 18,000 Anglais dans l'île de Walcheren, et que toute leur expédition est là. Si les Anglais étaient entrés dans le Sud-Beveland, le commandant d'Anvers n'aurait pas envoyé 800 hommes le 31 sur Gand. L'amiral Missiéssy m'a dit pour justifier sa retraite sur Anvers, que j'approuve beaucoup, puisque la présence de son escadre à Flessingue était inutile (hormis un vaisseau, une frégate et des chaloupes canonnières), et qu'il n'y avait de salut pour elle qu'à Anvers. Tant que les Anglais n'auront pas un avantage sur mes troupes, il n'y a rien de fait; mais les choses iraient mal, s'ils battaient le général Rampon et se portaient sur Gand. Ce que les Anglais désirent, c'est de le voir passer l'Escaut. Ils périront par l'inaction et les maladies, suites d'une expédition mal combinée; ils perdent tous les jours, et sentent que la France et la Hollande, revenues de la première surprise, se lèvent contre eux; au lieu que, si le général Rampon se fait battre, leur expédition a eu un résultat. Je considère le corps du général Rampon comme un corps d'observation, qui ne doit rien hasarder, qui doit surveiller Ostende, Anvers, empêcher l'ennemi de débarquer sur la rive gauche de l'Escaut, et, à tout événement, couvrir mes places de Flandre. Organisez et complétez ce corps. Que voulez-vous que fasse le général Rampon avec 12,000 gardes nationales sans officiers ? Envoyez-lui des généraux de brigade, des majors, des officiers d'artillerie; organisez son artillerie de campagne. Pendant ce temps, le duc de Valmy réunira son corps à Wesel et le roi de Hollande ses moyens à Berg-op-Zoom. Il n'y aurait qu'une seule circonstance où le général Rampon pourrait hasarder une bataille, ce serait pour sauver Anvers. Alors seulement une bataille serait légitime, puisque, si l'ennemi prenait Anvers, il brûlerait mes chantiers et prendrait ou détruirait mon escadre, et par là aurait rempli son but. Hors cela, il n'y a rien à faire. Laissez les Anglais se battre les flancs dans les marais et poursuivre l'ombre d'une proie, car en effet ils ne savent pas ce qu'ils veulent. Les Anglais ne resteront pas plus de quinze ou vingt jours dans l'île de Walcheren, et pendant ce temps vous devez réunir 80,000 hommes et quatre-vingts pièces de canon en Belgique, et encore faut-il que cette masse de troupes agisse prudemment; car, si ces 80,000 hommes agissent dans le sens des instructions du général Rampon, ils éprouveront des échecs, se décourageront, et cela fera le plus grand mal. Le général Rampon n'a pas un bataillon sur lequel il puisse compter.

Il me tarde que cette lettre vous arrive pour prévenir l'effet de vos ordres. Ce n'est pas au général Rampon qu'il faut recommander d'attaquer; il ne sait point autre chose. Il est bien important que le général Sainte-Suzanne ou le maréchal Moncey aillent prendre ce commandement. Le général Rampon est incapable d'un système de prudence et de combinaison de cette espèce. Je vous ai déjà mandé cela. Il faut avoir, pour observer Gand, Anvers, Ostende, l'île de Cadzand et mes places de Flandre, les divisions Olivier et Chambarlhac et les divisions de gardes nationales des généraux Rampon et Soulès, sous les ordres d'un maréchal. Je compte que vous avez envoyé une vingtaine de majors, huit ou dix généraux de brigade, et que vous aurez pris toutes les mesures pour atteler soixante pièces d'artillerie pour le service de ce corps, et que vous avez envoyé le général Klein pour former trois régiments provisoires de cavalerie. Je compte également que les 30,000 gardes nationales s'organisent en seconde ligne, et que vous prenez des mesures pour leur donner douze pièces de canon par division; ce qui, avec le corps du duc de Valmy, me formera trois corps pour la défense du Nord; et, pendant qu'ils s'augmenteront tous les jours, les Anglais diminueront tous les jours par les maladies et parce qu'ils ont avec eux tout ce dont ils peuvent disposer. Une fois que les 30,000 hommes de gardes nationales seront sur pied, ne les licenciez pas sans mon ordre, et même si les Anglais se retiraient, ne prononcez rien sur elles que je n'aie statué.

Les mesures que vous avez prises pour la gendarmerie sont mesquines. C'est de tous les points du nord de la France qu'il faut la diriger, de manière à en former quatre régiments.

J'ai dit dans ma lettre qu'il ne fallait envoyer aucun secours au général Monnet; mais je n'ai point entendu dire qu'il ne fallait pas lui envoyer quelques compagnies d'artillerie, quelques officiers de cette arme, des détachements de sapeurs et surtout des vivres. Cela est toujours nécessaire dans une place.


Schönbrunn, 9 août 1809

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie, à Vienne

Mon Fils, écrivez au général Caffarelli, par la première occasion que vous aurez d'écrire en Italie, pour qu'il ait à réunir tous les détachements de cavalerie appartenant aux différents régiments de l'armée et à mettre tout cela en marche pour Vienne; que tous les jours je vous demande quand cette cavalerie arrive, et que je suis surtout mécontent qu'il ait retenu mes cuirassiers.


Camp impérial de Schönbrunn, 9 août 1809.

ORDRES.

1. Le corps des ingénieurs-géographes ne recevra d'ordres que de l'adjudant commandant Bacler d'Albe. Les ingénieurs correspondront avec lui et lui remettront leurs travaux. Ils recevront mes ordres par son canal.

2. Tous les ingénieurs-géographes attachés aux maréchaux rejoindront sur-le-champ le quartier général.

3. Chaque soir il me sera fait un rapport sur le travail de chaque ingénieur.

4. Je suis peu satisfait des travaux que les ingénieurs ont faits pendant la campagne. On ne m'a pas remis la reconnaissance entre Passau et Krems. La position d'Enns, quoique bien coloriée, est mal faite sous les rapports militaires; il n'y a point de place pour y tracer une tête de pont, et le point essentiel de Mauthausen ne s'y trouve point; il n'y a point de mémoire à l'appui. Il faut recommencer cet ouvrage et y joindre un mémoire descriptif. Le champ de bataille d'Ebelsberg est sans mémoire; il ne sert pas à mes combinaisons. La reconnaissance sur la droite du Danube, devant Vienne, n'est pas complète; elle devait commencer à Nussdorf et aller jusqu'à l'île Napoléon. Je n'ai point la reconnaissance de Passau; je n'ai pas eu celle de la rivière de Raab. La reconnaissance des communications entre les deux routes de Vienne à Znaym et de Vienne à Nikolsburg est mal faite et peu utile. Par exemple, de Laa on arrive au moulin de Ruehof, et on traverse ensuite un marais pour aller à Znaym ; au lieu de détailler les ponts et les bras de la rivière, on a fait une chaussée embrouillée. Cette carte pourrait tout au plus convenir à un particulier voyageur; elle ne peut militairement être utile. Le chemin de Znaym à Nikolsburg est mal tracé; il y a près de Znaym un ruisseau, des marais, un pont, qui ne sont point marqués. L'ingénieur n'a point placé tous les villages; il n'y a point de population écrite. Quand je demande une reconnaissance, je ne veux pas qu'on me donne un plan de campagne. Le mot l'ennemi ne doit pas être prononcé par l'ingénieur. Il doit reconnaître les chemins, leur nature, les pentes, les hauteurs, les gorges, les obstacles, vérifier si les voitures peuvent y passer, et s'abstenir absolument de projets de campagne.

5. On me présentera un projet de répartition de travail entre les ingénieurs qui sont ici.

1° J'ai besoin de connaître le Danube d'ici à Raab, la Raab jusqu'à sa source, avec les principales rivières qui y tombent (rive gauche) et celles qui communiquent avec le lac de Neusiedl, de manière qu'on puisse voir facilement tous les débouchés qui communiquent d'OEdenburg et du lac avec le Danube et la Raab, ensuite du lac avec les montagnes de Styrie, pour de là se porter au Semring-Berg et à Vienne.

2° J'ai besoin de connaître le cours de la Taya, et le cours de la March, avec ses ponts et ses débouchés sur les monts Karpathes, de manière qu'en prenant pour base la route de Vienne à Brünn on fasse connaître comment on peut arriver des Karpathes sur Vienne et sur la route de Brünn. Cela suppose une connaissance parfaite de la March, des monts Karpathes et du pays entre les Karpathes et Vienne.

3° Je désire connaître le pays compris entre la route de Vienne à Znaym et le Danube, en le remontant jusqu'à Melk; il est essentiel d'avoir les communications de Krems vers la route de Znaym, de Krems et de Melk vers la Bohême.

4° On reconnaîtra tout le pays d'ici à Saint-Pölten et de là au Danube, afin de bien connaître toutes les communications de Saint-Pölten au Danube et à Vienne. Une bonne étude de ces montagnes, qui sont presque partout praticables, serait un ouvrage important à avoir toujours au bureau, puisque ces montagnes couvrent Vienne.

5° On complétera ce travail en prenant pour base la route de Vienne à Saint-Pölten, et gagnant de là le Semring pour revenir à Vienne. On étudiera bien l'intérieur de ce dernier triangle et les différentes communications qui le traversent.

Ces reconnaissances embrasseront un terrain de près de 20 lieues de rayon autour de Vienne et en donneront une connaissance parfaite.

Deux on trois ingénieurs seront chargés de chacune de ces reconnaissances; ils étudieront bien le pays. On aura par ce moyen à l'état-major des officiers instruits qui seront plus utiles que les guides. C'est ainsi que travaillaient autrefois les ingénieurs-géographes des armées; c'est en suivant leur exemple que les ingénieurs-géographes acquerront l'estime et la considération.

6. Quand l'armée marchera, les ingénieurs-géographes qui auront reconnu le pays seront toujours à l'état-major, afin de donner tous les renseignements nécessaires. Leurs mémoires de reconnaissance seront toujours du style le plus simple et purement descriptifs. Ils ne s'écarteront jamais de leur sujet pour présenter des idées étrangères.

Une méthode précise est la seule qui convienne à l'Empereur. On annoncera la longueur des chemins et leur largeur, leurs qualités; on dessinera exactement les détours des chemins, qui souvent ne peuvent s'expliquer que par la bizarrerie du terrain. Les rivières doivent être aussi tracées et mesurées avec soin, les ponts et les gués marqués.

Le nombre des maisons et des habitants des villes et des villages sera indiqué. Autant que possible, on cotera les hauteurs des collines et montagnes, afin qu'on puisse facilement juger les points dominants; ces cotes ne doivent être que relatives entre elles. On ne peut sur ce point, et sur beaucoup d'autres, entrer dans des détails trop minutieux; mais il faut exprimer toujours de la manière la plus simple comment la chose se peint à l'œil et à l'observateur.

7. Il y aura une échelle constante pour tous les dessins.


Schönbrunn, 10 août 1809

Au prince Cambacérès, archichancelier de l'empire, à Paris

Je suis fâché que vous ayez fait si peu d'usage des pouvoirs que je vous ai donnés, dans ces circonstances extraordinaires. Réunissez fréquemment le conseil des ministres. Ne laissez pas les Anglais venir vous prendre dans votre lit. Au premier bruit d'une descente vous auriez dû lever 30,000, 40,000, 60,000 gardes nationales, autoriser le ministre de la guerre à envoyer le prince de Ponte-Corvo et le maréchal Moncey pour réunir et commander toutes les troupes. L'attitude qui a été prise dans cette occasion est humiliante et honteuse, et excitera les Anglais à renouveler de pareilles expéditions. Il fallait que des bataillons de gardes nationales se levassent en un instant en tel nombre, que les Anglais vissent ce qu'ils avaient à craindre.


Schönbrunn, 10 août 1809

Au général comte Miollis, gouverneur, président de la Consulte, à Rome

Je reçois votre lettre du 30 juillet. Le roi de Naples a eu tort de vouloir imposer de nouvelles charges aux États romains, d'autant plus que c'est à son profit. Ses troupes doivent être soldées par le royaume de Naples.

Je suis fâché que l'on ait fait sortir le Pape de Rome. J'avais ordonné qu'on arrêtât le cardinal Pacca et non le Pape. Une opération de cette importance n'aurait pas dû se faire sans que j'en aie été prévenu et que j'aie désigné le lieu où il serait conduit. J'avais ordonné qu'on violât la maison du Pape, s'il en faisait un foyer de rébellion. Mais ce qui est fait est sans remède. Je ne suis pas moins satisfait de votre zèle.

Le Pape ne rentrera plus jamais à Rome.


Schönbrunn, 10 août 1809

Au général Clarke, comte d'Hunebourg, ministre de la marine, à Paris

Je reçois votre lettre du 3 à minuit, relative aux dépêches de M. Fouché. Il s'est mis en mesure de faire ce que vous ne faisiez pas vous-même. Sans doute c'était au département de la guerre à provoquer ces mesures et à les régulariser; mais il est tout simple que le ministre de la police, convaincu que l'expédition anglaise étant de 25,000 hommes, on doit lui opposer 60 à 80,000 hommes de troupes, ait ordonné des préparatifs dans ce sens. J'ignore ce que vous avez fait, mais il eût été bien à désirer que vous eussiez donné le commandement d'Anvers au prince de Ponte-Corvo. Je suis étonné que vous n'ayez pas même fait partir le maréchal Moncey, pour mettre en mouvement la gendarmerie. Lorsque vous recevrez cette lettre, il est probable que l'expédition anglaise sera à peu près manquée, ou aura réussi. Il n'y a aucun doute qu'ils veuillent brûler Anvers. Si mon escadre est entrée à Anvers et que le général Rampon s'y soit jeté, je ne conçois pas qu'ils puissent prendre cette place, qui est il l'abri de toute attaque.


Schönbrunn, 10 août 1809

Au général Clarke, comte d'Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Je reçois votre lettre du 4. Je ne conçois pas ce que vous faites à Paris. Vous attendez sans doute que les Anglais viennent vous prendre dans votre lit. Quand 25,000 Anglais attaquent nos chantiers et menacent nos provinces, le ministère reste dans l'inaction ! Quel inconvénient y a-t-il à lever 60,000 gardes nationales ? Quel inconvénient y a-t-il à envoyer le prince de Ponte-Corvo prendre le commandement sur le point où il n'y a personne ? Quel inconvénient y a-t-il à mettre en état de siége mes places d'Anvers, d'Ostende et de Lille ?

Cela ne se conçoit pas. Je ne vois que M. Fouché qui ait fait ce qu'il a pu et qui ait senti l'inconvénient de rester dans une inaction dangereuse et déshonorante: dangereuse, parce que les Anglais, voyant que la France n'est pas en mouvement et qu'aucune direction n'est donnée à l'opinion publique, n'auront rien à craindre et ne se presseront pas d'évacuer notre territoire; déshonorante, parce qu'elle montre la peur de l'opinion et qu'elle laisse 25,000 Anglais brûler nos chantiers sans les défendre. La couleur donnée à la France dans ces circonstances est un déshonneur perpétuel. Les événements changent à chaque instant; il est impossible que je donne des ordres qui n'arriveront que quinze jours après. Les ministres ont le même pouvoir que moi, puisqu'ils peuvent tenir des conseils et prendre des décisions. Employez le prince de Ponte-Corvo, employez le maréchal Moncey. J'envoie de plus le maréchal Bessières pour être à Paris en réserve. J'ai ordonné la levée de 30,000 hommes de gardes nationales. Si les Anglais font des progrès, levez-en 30,000 autres dans les mêmes ou dans d'autres départements. Il est bien évident que les Anglais en veulent à mon escadre et à Anvers.

Je suppose que dès le 4 vous aurez fait partir tout ce qui était à Boulogne pour Anvers. J'espère que le général Rampon se sera également approché d'Anvers. Il est évident que l'ennemi, sentant la difficulté de prendre Flessingue, veut marcher droit sur Anvers et tenter un coup de main sur l'escadre.


Schönbrunn, 10 août 1809

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

Je reçois votre lettre du 4 août. Vous ne me dites pas où est mon escadre. Si elle est à Anvers, je n'ai rien à craindre; si elle n'y est pas, j'ai les plus grandes alarmes pour elle. Votre correspondance n'est pas claire. Vous ne me faites point connaître pourquoi mon escadre, étant remontée, n'est point entrée à Anvers. Le plan de l'ennemi est très bien développé. Il marche sur Anvers par la rive droite, parce que la ville est sur cette rive; mais les marais de Berg-opZoom... ?


Camp impérial de Schönbrunn, 10 août 1809

ORDRES

Il sera mis en construction à Passau trente bateaux capables de porter 2 à 300 hommes. Dix seront faits par économie et par les ouvriers de la marine qui sont à Passau; vingt seront achetés, ce qui fournira un transport de 6 à 9,000 hommes; l'ingénieur de la marine déterminera un gabarit uniforme pour tous les bateaux destinés au transport des troupes et tel qu'ils puissent naviguer par les plus basses eaux.

Un ingénieur de la marine sera spécialement chargé de veiller à leur bonne construction.

Ces bateaux seront payés par l'artillerie.

L'embargo qui avait été mis sur les bateaux d'Ulm et de Ratisbonne sera levé.

Tous les bateaux passant à Passau s'arrêteront à un poste déterminé, et on pourra mettre sur chaque bateau un cerlain nombre de militaires, sans rien changer au nolis de ces bateaux. On payera au commerce 3 francs par homme, de Passau à Vienne. Les militaires arrivant à Passau pourront y être retenus pendant trois ou quatre jours, pour attendre une occasion pour les faire arriver par eau à Vienne.

Il sera fait à Vienne un recensement de tous les bateaux qui appartiennent à l'armée; ils seront remis à la marine; un ingénieur de la marine sera chargé de les faire mettre en état. On leur affectera une place sûre et convenable pour la facilité des travaux.

Les bateaux qui appartiennent au commerce auront un emplacement spécial. Les négociants qui voudront faire remonter leurs bateaux en seront libres. L'intendant général fera un rapport sur le halage et les moyens à employer pour organiser le retour des bateaux en remontant jusqu'à Linz et Passau. En rassemblant les bateaux arrivant à Vienne, la marine aura des moyens pour transporter 20,000 hommes sur le Danube.

Le colonel Baste fera mettre sur chaque bateau qui descendra à Raab trois marins, qui apprendront la navigation du Danube; ils reviendront à Vienne en poste et recommenceront le voyage, de sorte qu'on puisse aller à Raab sans le secours des gens du pays. La navigation de Passau à Vienne se fera par le bataillon des marins, qui étudieront le cours du fleuve de manière à pouvoir se diriger seuls; lorsqu'il sera nécessaire d'en faire retourner à Passau prendre d'autres bateaux, ils seront envoyés en poste.

Le colonel Baste présentera un projet pour l'organisation de deux compagnies de pilotes; l'une fera le service de Passau à Vienne, et l'autre de Vienne à Raab. Il placera des officiers de marine à Ulm, à Donauwörth, à Ingolstadt, à Ratisbonne, à Passau, à Linz, à Melk, à Vienne et à Raab. Ces officiers auront avec eux un bateau armé pour faire la police de la rivière et visiter tout ce qui passera.

Les lieux d'embarquement où devront s'arrêter les bateaux passant à Passau, Linz, Melk et Vienne seront fixés, et il y sera placé le poste de marins.

Le colonel Baste fera un rapport sur la navigation du Danube.

L'intendant général, le général commandant en chef  l'artillerie et le général Bourcier sont chargés de l'exécution dn présent ordre.


Schönbrunn, 10 août 1809

Au général comte Caffarelli, ministre de la guerre du royaume d'Italie, à Milan

Monsieur le Général Caffarelli, je donne ordre au roi de Naples de faire partir pour Bologne deux bataillons du 14e léger, deux du 6e de ligne, deux du 101e et un bataillon du régiment de la Tour d'Auvergne ou de celui d'Isembourg, avec un escadron napolitain; ce qui formera une colonne de 4,000 hommes, qui sera sous vos ordres.

Par ce moyen, rien ne s'opposera plus à ce que vous dirigiez sur l'armée tous les détachements d'infanterie et de cavalerie qui sont en Italie. Je ne sais pourquoi on a retenu mes cuirassiers et réduit à rien la colonne du général Roize. Les corps de l'armée du vice-roi sont extrêmement faibles. Il ne faut point écouter de peur chimérique; il n'y a rien à craindre en Italie tant que nous serons victorieux en Allemagne. Je vous réitère donc l'ordre formel de faire partir tous les détachements, quels qu'ils soient, qui sont disséminés et achèvent de se perdre en Italie. Dirigez tout cela sur Klagenfurt.


Schönbrunn, 10 août 1809

A Joachim Napoléon, roi des Deux-Siciles, à Naples

Je reçois votre lettre du 29 juillet. J'ai vu avec plaisir que l'expédition des Anglais est retournée en Sicile.

Il est fâcheux qu'on ait détruit le fort de Scilla. Comment un général a-t-il pu se permettre de faire une pareille opération sans ordre ? Aucune expédition en Sicile n'est faisable sans ce fort. Envoyez à Bologne une colonne de 4,000 hommes, composée de deux bataillons du 101e léger, de deux bataillons du 6e de ligne, de deux bataillons du 101e , d'un bataillon de la Tour d'Auvergne ou d'Isembourg et d'un escadron de cavalerie napolitaine. Cette colonne sera sous les ordres du général Caffarelli et formera un corps central de réserve pour la protection de l'Italie.

Ce que vous avez demandé à la Consulte de Rome ne peut point se faire.


Schönbrunn, 11 août 1809

Au prince Cambacérès, archichancelier de l'empire, à Paris

Mon Cousin, je reçois votre lettre du 5. Il est déplorable qu'il y ait déjà six grands jours de perdus sans que vous ni les ministres ayez rien fait. Il devrait déjà y avoir 20,000 gardes nationales en mouvement pour défendre Anvers; ce genre de troupes est fait surtout pour les places. Cette inactivité de votre part et de celle du conseil des ministres est affligeante. On ne dit rien au public. Comment laisse-t-on errer l'opinion sur un événement qui intéresse éminemment la nation ? Il fallait imprimer tous les jours un bulletin officiel, car l'imagination va toujours au delà de la réalité. Des objets de cette espèce, on n'a pas le droit de les cacher au public; cela le touche de trop près.


Schönbrunn, 11 août 1809, six heures du soir

Au général Clarke, comte d'Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Général Clarke, je reçois vos lettres du 5 août. Voilà donc six grandes journées de perdues ! Il devrait y avoir 20,000 gardes nationales en marche sur Anvers, cinq ou six compagnies d'artillerie, une douzaine d'officiers d'artillerie et du génie, une trentaine de majors et quatre ou cinq généraux. Que diable attendez-vous donc ? Et quel inconvénient peut présenter à l'esprit la levée de gardes nationales dans de pareilles circonstances ? En en réunissant à Saint-Omer, cela rendrait disponibles les troupes qui allaient à Boulogne. Le duc d'Istrie est parti hier pour Paris.

Je suppose que, quand vous recevrez cette lettre, les six divisions de gardes nationales seront en mouvement et se réuniront à Anvers, Saint-Omer; Lille et Bruxelles.


Schönbrunn, 11 août 1809

Au général Clarke, comte d'Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Le général sénateur Colaud est parti d'ici pour se rendre à Anvers et prendre le commandement de la ville comme gouverneur. Toutes les troupes de terre et de mer y seront sous ses ordres. Vous trouverez ci-joint le décret qui met cette place en état de siége.

Le duc d'Istrie doit être arrivé à Paris; envoyez-le prendre le commandement des 30,000 gardes nationales que je viens de lever.

Il en pressera la formation. Il aura son quartier général à Lille ou à Bruxelles. Vous sentez qu'indépendamment des raisons militaires, j'en ai de politiques pour que toutes mes forces nationales du Nord ne soient pas sous la même main. Je suppose que vous aurez employé le prince dc Ponte-Corvo et le maréchal Moncey. Comme la ligne de cette réserve s'étend d'Anvers à l'île de Cadzand, il faut donner à l'un le commandement de la partie d'Anvers et à l'autre celui de la partie de l'île de Cadzand. Si vous y avez envoyé le maréchal Moncey et que vous n'y ayez pas envoyé le prince de Ponte-Corvo, il faut partager ces troupes entre le maréchal Moncey et le duc d'Istrie. Si vous y avez envoyé le prince de Ponte-Corvo, Moncey peut commander une partie.

Si vous n'avez pas donné l'ordre à une partie du camp de Pontivy et de la 12e division militaire de s'approcher de Paris, donnez-le.

Je ne vois pas dans votre lettre du 5 que vous ayez réitéré l'ordre au général Monnet de couper les digues et d'inonder l'île. Vous savez que c'est mon intention. Ce qui m'alarme davantage, c'est de voir que dans ses lettres il ne parle pas d'user de cette ressource. Je lui ai donné plusieurs fois cet ordre de vive voix; réitérez-le-lui par toutes les occasions. Que sous sa responsabilité, aussitôt que la place serait serrée de près, il coupe les digues.


Camp impérial de Schönbrunn, 11 août 1809

ORDRES.

1° Il sera formé un 8e corps, qui sera commandé par le duc d'Abrantès.

2° Le 8e corps sera composé des divisions Rivaud et Lagrange, de la division de cavalerie du général Fouler et de la division Carra Saint-Cyr.

3° Les divisions Rivaud et Lagrange et la division de cavalerie conserveront leur composition actuelle. La division Rivaud aura de plus une brigade bavaroise de 4,000 hommes et de six pièces de canon.

La division Lagrange aura de plus une brigade wurtembergeoise avec six pièces de canon et une brigade hessoise avec quatre pièces de canon.

La division Carra Saint-Cyr sera composée des quatre bataillons du 22e régiment de ligne, de 4,000 Saxons et de vingt-quatre pièces d'artillerie saxonnes. Cette division se réunira sans délai à Dresde.

4° Tous les pays entre le Rhin, le Danube et la Westphalie, y compris la Saxe, font partie du territoire du 8e corps.

5° Le 10e corps, que commande le roi de Westphalie, sera composé des troupes westphaliennes et de toutes les garnisons de Magdebourg, de la Poméranie suédoise, de Küstrin, de Stettin, de Glogau el de Danzig.

6° Le territoire compris entre la Westphalie, la Saxe et la Baltique, le grand-duché de Berg excepté, fait partie du territoire du 10e corps.

7° Le roi de Westphalie aura le commandement de ce corps.

8e Le major général donnera tous les ordres et prendra toutes les mesures nécessaires pour l'exécution du présent.


Schönbrunn, 11 août 1809

A Alexandre, prince de Neuchâtel, major général de l'armée d'Allemagne, à Schönbrunn

Mon Cousin, répondez au roi de Westphalie que je vois avec peine que les dispositions de son état-major sont mal calculées; qu'en faisant venir isolément les bataillons des 22e de ligne, les détachements de chasseurs polonais, c'est les exposer à des accidents; qu'il fallait les réunir dans une place et les faire marcher en corps; que, avant de retirer le 22e des places de l'Oder, il fallait le remplacer par les troupes que j'ai ordonné d'y envoyer, et ne pas laisser ces places, surtout celle de Küstrin, la plus importante de toutes, sans garnison; que le colonel Chabert doit se rendre sans délai à Küstrin pour se mettre à la tête de sa troupe; que je trouve mauvais qu'un colonel quitte son corps; que le régiment de Berg n'a pas plus vu le feu que le 5e régiment de Westphalie, mais que sa composition en officiers est différente; que je ne puis qu'être mécontent qu'on ait laissé le duc d'OEls entrer à Brunswick; que cela n'eût point eu lieu s'il s'était comporté conformément à mes instructions.


Schönbrunn, 11 août 1809

A Alexandre, prince de Neuchâtel, major général de l'armée d'Allemagne, à Schönbrunn

Mon Cousin, écrivez au général Éblé que la place de Küstrin sera commandée par le colonel en second Chabert, et que les troupes que commande cet officier, se montant à 800 hommes, seront réunies dans cette place, qui est la seule vraiment importante de cette ligne; que le général Liébert peut disposer du contingent de Mecklenburg Schwerin et de celui d'Oldenburg pour Stettin; ce qui renforcera considérablement la garnison de Stettin. Je vois dans l'état du dépôt de Passau qu'il y a un détachement de 40 hommes du 21e de chasseurs. Comme ce régiment est en Espagne, ordonnez que les chevaux, selles et brides de ces 40 hommes soient remis au dépôt, et que les officiers, sous-officiers et soldats retournent en France. Le général Bourcier se servira de ces chevaux pour monter autant d'hommes du dépôt.

Écrivez au duc d'Abrantès qu'il est maître de choisir du général Maison ou du général Boyer pour chef d'état-major, et qu'il peut toujours garder l'autre dans le corps.

Donnez ordre au 22e de ligne de se rendre à Dresde, où il sera sous les ordres du général Carra Saint-Cyr jusqu'à nouvel ordre, pour la défense de la ville. Instruisez de cela le roi de Saxe.

P. S. L'ordre au 22e sera envoyé directement à Magdeburg. Vous donnerez l'ordre que vingt-quatre heures après votre ordre il parte pour Dresde, où il sera aux ordres du général Carra Saint-Cyr. Ce beau régiment est de 4,000 hommes, qui, avec les 6,000 Saxons, formeront un corps de 10,000 hommes de ce côté.


Schönbrunn, 11 août 1809

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie, à Vienne

Mon Fils, donnez ordre que le fort de Malborghetto soit rasé, et que les canons, magasins qui s'y trouvent soient portés à Klagenfurt, pour en armer et approvisionner cette place.


Schönbrunn, 12 août 1809

A Louis Napoléon, roi de Hollande, à Rozendaal

Mon Frère, je suppose que vous vous serez rendu à Berg-op-Zoom, et que vous y aurez réuni 10 à 12,000 hommes de vos troupes avec 15 à 20,000 gardes nationales. L'économie d'un roi n'est pas celle d'un prieur de couvent. Si vous aviez aujourd'hui les 2,000 Français de votre garde que par économie vous avez licenciés, si vous aviez l'armée que par économie vous avez réduite, votre pays ne serait pas envahi. Par nos conventions, la Hollande doit avoir 10,000 hommes sur pied. Elle n'a de moyen de se recruter ni pour la terre ni pour la mer. Les Anglais vous feront plus de mal dans un mois que ne vous aurait coûté votre armée. Le roi de Wurtemberg a un million de population: il a 25,000 hommes sur pied.

Je suppose que vous aurez fait arrêter ce traître de Bruce, qui a si lâchement rendu le fort de Bath  et que vous l'aurez fait passer par les armes. Abandonner un fort comme Bath sans tirer un coup de canon, c'est le comble de la lâcheté ou de la trahison. Comment ne coupait-il pas plutôt les digues ?


Schönbrunn, 13 août 1809

Au comte Bigot de Préameneu, ministre des cultes, à Paris

Monsieur Bigot Préameneu, je reçois votre lettre du 4. A quelque prix que ce soit, je ne veux pas qu'on paye rien à Rome pour expédition de bulles, dispenses, etc. C'est une profanation des choses sacrées. Je vous ai chargé de me proposer un projet de décret là dessus. Je pense que vous avez préparé votre travail.


Schönbrunn, 13 août 1809

Au général Clarke, comte d'Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Général Clarke, voici les mesures qui auraient dû être prises avant le débarquement des Anglais, et que, selon les circonstances, il faut compléter. Il y a trois points.

1° Flessingue. Les 6,000 hommes de garnison qui s'y trouvent sont suffisants jusqu'à ce que l'on prenne l'offensive; il ne s'agit que d'y faire passer des munitions, des vivres, des officiers pour remplacer ceux qui se trouvent hors de combat, et surtout des officiers d'artillerie. Le général Monnel paraît assez propre pour défendre cette place. Avec la ressource de couper les digues, il peut se défendre six mois.

2° L'île de Cadzand. Le général Rampon s'y trouve et doit y avoir sous ses ordres deux divisions de gardes nationales de 6,000 hommes chacune, vingt-quatre pièces de canon attelées et 4,000 hommes de  troupes diverses, y compris l'artillerie et les détachements de cavalerie. Le général sénateur Soulès doit commander une de ces divisions de gardes nationales. Il doit y avoir dans chacune de ces divisions deux généraux de brigade, beaucoup de majors et d'officiers d'état-major. Avec 15 à 16,000 hommes, on est en situation de défendre ce point important qui couvre toute la Flandre.

3° Anvers. Cette place a besoin d'un gouverneur, d'un général commandant d'armes, de cinq ou six majors, chefs de bataillon, hommes d'élite, pour commander les différents postes, d'un officier supérieur du génie, de huit ou dix ingénieurs, de deux compagnies de sapeurs, d'une escouade de mineurs, d'un général d'artillerie, d'une vingtaine d'officiers d'artillerie, depuis le grade de chef de bataillon jusqu'à celui de lieutenant, de cinq ou six compagnies d'artillerie de ligne, de 2,000 hommes de troupes diverses tirées des dépôts, telles que bataillons polonais et autres bataillons provisoires, d'une division de gardes nationales commandée par un sénateur de 1,500 ouvriers de la marine et de 3 à 400 hommes de cavalerie des dépôts; ce qui portera la garnison d'Anvers à 10,000 hommes.

Un général doit être chargé de défendre les trois forts de la gauche, de couper les digues el de former l'inondation en cas d'événement.

Un général doit être chargé de défendre la citadelle. Ainsi organisée, avec le secours des ouvriers, des canonniers de la marine et de l'escadre, la place d'Anvers est imprenable; il suffit d'y envoyer beaucoup de vivres, de la farine, du biscuit, du blé, des bœufs, etc.

Le roi de Hollande doit réunir à Berg-op-Zoom 10,000 hommes de troupes de ligne et 10,000 gardes nationales; ce qui fera 20,000 hommes. Il restera donc 24,000 hommes des 80,000 gardes nationales dont j'ai ordonné la levée; sur ces 21,000, on en mettra 6,000 à Boulogne; resteront 18,000. Les divisions Chambarlhac et Olivier, composées des trois demi-brigades provisoires du Nord et des deux qui étaient à Paris, que l'on complétera par tous les détachements qu'on pourra réunir (on aura autant de majors qu'il y aura de bataillons); les quatre bataillons qui étaient à Louvain, quatre ou cinq bataillons provisoires de différents détachements qu'on pourra former, 2,000 gendarmes à cheval et 1,000 ou 1,500 hommes de cavalerie qu'on pourra réunir de différents détachements: tout cela formera donc une armée de trois divisions de gardes nationales de 6,000 hommes chacune, et de deux divisions de troupes de ligne, faisant 30 à 35,000 hommes. Quand cette armée sera formée, soit qu'on en réunisse une partie sur la ligne entre Berg-op-Zoom et l'Escaut, soit à Gand et sur d'autres points, ce ne sera que quand elle sera un peu organisée que l'on pourra reprendre l'offensive, soit qu'on reprenne l'offensive dans l'île de Walcheren, soit qu'on la reprenne par Berg-op-Zoom. Il est possible qu'ainsi je puisse m'y trouver moi-même; mais reprendre l'offensive avant d'être en mesure, c'est vouloir se faire battre et tout compromettre. Les généraux ont des moyens de défendre l'Escaut, l'île de Cadzand, Anvers, de rétablir le fort Saint-Martin, comme vous l'avez très sagement ordonné; mais ils n'ont le moyen de reprendre l'offensive sur aucun point.

Quant au commandement, les maréchaux Moncey, Bessières, le prince de Ponte-Corvo, si vous l'avez envoyé, vous fournissent suffisamment des chefs pour tous ces différents besoins.

Dans vos différentes lettres, je vois que, hormis la levée des gardes nationales, vous avez pris des mesures pour réunir des troupes, mais que vous n'en prenez pas pour les organiser; que vous n'envoyez pas de majors, d'officiers d'artillerie, de généraux : cependant les soldats ne sont rien sans les officiers.


Schönbrunn, 13 août 1809.

A Alexandre , prince de Neuchâtel, major général de l'armée d'Allemagne, à Schönbrunn

Mon Cousin, écrivez au général de Wrede que ses rapports du ..... août sur la Bohème sont faux; que plus de la moitié de l'armée autrichienne a passé la March et se jette en Hongrie; qu'il fasse en sorte d'avoir des renseignements plus précis et plus vrais; que je suppose qu'il a des troupes sur toute la frontière.


Scbönbrunn, 13 août 1809

A Alexandre, prince de Neuchâtel, major général de l'armée d'Allemagne, à Schönbrunn

Mon Cousin, je vous envoie un ordre pour former le 8e corps.

Vous verrez que le duc d'Abrantès est chargé de surveiller le Danube et la Saxe. Le général Carra Saint-Cyr se rend à Dresde; il y réunira le corps du général Thielmann et le 22e de ligne; ce qui fera 8,000 hommes d'infanterie, 2,000 de cavalerie et vingt-quatre pièces de canon. Il faut que le duc d'Abrantès veille à ce que le 22e, qui est à Magdeburg, se rende sans délai et Dresde. Il faut donner ordre au régiment polonais qui doit arriver à Magdeburg de se rendre à Dresde pour faire partie de la division du général Carra Saint-Cyr.

La division Rivaud sera composée de deux brigades, chacune de quatre bataillons, et d'une brigade bavaroise de 4,000 hommes; elle aura douze pièces de canon françaises et huit pièces bavaroises. Il n'y a plus moyen, à présent que les Anglais ont débarqué à Walcheren, de compter sur la brigade qui est à Louvain; mais les brigades qui composent la division Carra Saint-Cyr feront toujours 9,000 hommes. La division Lagrange sera composée du 65e, d'un bataillon du 46e, d'une brigade wurtembergeoise et d'une brigade hessoise; ce qui fera également 8 à 9,000 hommes. La cavalerie sera composée des quatre régiments qui y sont actuellement et des 2,000 Saxons; ce qui portera la cavalerie à plus de 5,000 hommes.

Cela formera donc un corps de 30,000 hommes d'infanterie, de 5,000 chevaux et de soixante-dix pièces de canon. Il faut arrêter la compagnie de sapeurs et les détachements de pontonniers et d'ouvriers qui viennent de Magdeburg ou de Danzig. La position actuelle du 8e corps est : la division Rivaud à Bayreuth, la division Saint-Cyr à Dresde, la division Lagrange dans le Vorarlberg. Après les affaires du Vorarlberg, la division Lagrange rejoindra et mènera avec elle les Wurtembergeois. D'ailleurs, au moment des hostilités, ce qui ne peut avoir lieu avant le 10 septembre, il est probable que j'y joindrai les Hollandais. Des détachements du 14e et du 34e doivent arriver sur Mézières; au lieu de les diriger sur Vienne, donnez ordre à Strasbourg de les diriger sur Bayreuth pour rejoindre leurs bataillons.

Il est nécessaire que le duc d'Abrantès se rende d'abord auprès du roi de Saxe et qu'il aille ensuite à Dresde; qu'il fasse armer la place sans rien démolir et sans inquiéter les habitants, auxquels il dira, au contraire, qu'il a assez de monde pour les couvrir et qu'il doit partir de là pour entrer en Bohême. Il faut qu'il fasse des reconnaissances sur la frontière jusqu'à Passau. Il y a beaucoup de pièces dans le Palatinat; il faut que le duc d'Abrantès les échange contre son mauvais matériel prussien, et rétablisse ainsi son artillerie. Vous aurez soin d'écrire au ministre de la guerre du roi de Saxe pour lui faire part de ces dispositions. Ecrivez aussi en Westphalie que, moyennant ces dispositions, le Roi n'aura que la garde de ses États et des pays qui l'environnent. Le général de brigade Lamotte, qui doit être sous les ordres du général Beaumont, sc rendra au 8e corps pour commander une brigade de dragons. Par ce moyen, le 8e corps aura deux généraux de brigade de cavalerie, et il sera possible que j'y envoie un général de division. Le général Boyer restera chef d'état-major; le général Maison sera employé dans le 8e corps, soit dans la division Carra Saint-Cyr, soit dans la division Rivaud. Il est nécessaire de donner au 8e corps un général d'artillerie, un ordonnateur et un payeur.


Schönbrunn, 13 août 1809

A Alexandre, prince de Neuchâtel, major général de l'armée d'Allemagne, à Schönbrunn

Faire venir le corps du général Vandamme et le camper près les hauteurs et le plus près possible de Nussdorf.


Schönbrunn, 13 août 1809

A Joachim Napoléon, roi des Deux-Siciles, à Naples

J'ai reçu votre lettre du 2, de Portici. J'ai vu avec plaisir que les deux bataillons du 14e léger étaient partis. Joignez-y votre régiment de chasseurs à cheval et un de vos deux régiments d'infanterie; ce qui, avec les bataillons des 6e et 101e de ligne, portera la colonne que vous envoyez à Bologne à 5 ou 6,000 hommes.

Je vous fais mon compliment sur le départ des Anglais. Tâchez de faire construire un bon fort dans ces îles, dont la position est si importante. Mais il ne faut pas penser à faire dans ce moment l'expédition de Sicile; il faut attendre que la paix avec l'Autriche soit entièrement faite. Vous avez besoin d'au moins 25,000 hommes de bonnes troupes pour cette expédition.


Schönbrunn, 14 août 1809

Au général Clarke, comte d'Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Je vois avec plaisir que les gardes nationales du Pas-de-Calais sont parties. Je suppose que celles qui étaient restées à Saint-Omer sont également parties, et que les cinq divisions de gardes nationales, de 6,000 hommes chacune, sont déjà en vigueur. Envoyez en poste les 40 officiers d'artillerie employés dans les manufactures, et des officiers du génie.

Je vois avec peine dans la lettre du général Monnet du 4 qu'il ne parle pas de l'inondation. Il doit avoir du bois en quantité suffisante pour blinder les magasins.

Il est inconcevable que l'amiral Missiéssy ait emmené toutes les chaloupes canonnières et n'en ait pas laissé une pour la défense de Flessingue.

Je vois qu'entre les Hollandais et les Français il y a déjà 20,000 hommes sur la ligne d'Anvers à Berg-op-Zoom; mais je ne vois pas assez de majors, de chefs de bataillon, etc. Vous avez en France 200 majors d'infanterie et de cavalerie, qui sont excellents; je vous l'ai répété dans toutes mes lettres.

Je ne vois pas pourquoi vous n'auriez pas réuni à Anvers 3,000 vétérans. Il y a des officiers et de vieux soldats dont on peut tirer parti lorsqu'il est question de défendre le territoire; je crois qu'il est convenable d'en diriger plusieurs bataillons sur l'Escaut.

Il me semble qu'il y a aujourd'hui deux points bien marqués, et qu'il faut un maréchal pour commander d'Anvers à Berg-op-Zoom, et un autre pour protéger l'île de Cadzand et la Belgique. Le duc de Valmy commandera un 3e corps à Wesel. Enfin un quatrième maréchal pourra être chargé de commander la réserve des gardes nationales que vous réunissez.

J'ai envoyé le général Colaud à Anvers pour commander la place, que j'ai mise en état de siège. Il est fâcheux que vous ayez laissé une place si importante dans ces circonstances entre les mains d'un commandant d'armes. Le général Fauconnet, d'ailleurs, est un vieillard. La première mesure à prendre était d'envoyer quelqu'un là.


Schönbrunn, 14 août 1809

Au vice-amiral Decrès, ministre de la marine, à Paris

Il est fâcheux que l'amiral Missiéssy n'ait pas laissé vingt-cinq ou trente chaloupes canonnières à Flessingue; cela aurait contribué à défendre la place.

Je suppose que vous avez réitéré les ordres pour que mon escadre entre à Anvers. Elle pourra alors fournir toutes les garnisons pour joindre à nos troupes, pour battre la campagne et aider à servir les batteries de rempart. On peut même augmenter les batteries avec la quantité de monde pour les servir. Il me semble que, s'il faut laisser quelque bâtiment pour l'inondation d'Anvers, une frégate ou au plus un vaisseau est suffisant.


Schönbrunn, 14 août 1809.

A Louis Napoléon, roi de Hollande, à Rozendaal

Je reçois votre lettre du 5 août. Je suppose que vous avez armé et approvisionné Berg-op-Zoom et fait autant de vos autres places, et que vous organisez des gardes nationales dans votre royaume. Si les gardes nationales de l'Île de Zélande avaient été levées, cela aurait fait 5 ou 6,000 hommes de plus, qui auraient empêché la descente.

Je suppose que vous avez armé vos canonnières, et que vous les faites servir, selon le besoin, soit dans le canal de Berg-op-Zoom, soit dans d'autres points. Je vous en avais demandé un bon nombre à Flessingue, qui auraient été bien nécessaires dans cette circonstance.


Schönbrunn, 15 août 1809

Au prince Cambacérès, archichancelier de l'empire, à Paris

Vous recevrez trois lettres patentes (délivrées le 3 octobre 1809) qui érigent les principautés de Wagram, d'Eckmühl et d'Essling en faveur du prince de Neuchâtel et des ducs de Rivoli et d'Auerstaedt, des décrets qui nomment huit ducs (duc de Cadore - Champagny; de Feltre - Clarke; de Bassano - Maret; de Massa Carara - Regnier; de Gaète - Gaudin; de Reggio - Oudinot; de Tarente - Macdonald; d'Otrante - Fouché: Les lettres patentes furent délivrées le 14 octobre 1809) et beaucoup de comtes et de barons. Au reçu de ces actes, rendez-vous au Sénat pour les y porter et faire entériner les lettres de princes et de ducs.

Vous remarquerez que les ministres nommés sont de la fondation du gouvernement. J'en excepte le général Clarke, que j'ai considéré comme étant dans un cas particulier, comme gouverneur de Vienne et de Berlin, et longtemps attaché à mes travaux. Les sieurs Mollien, Cretet, Dejean, Decrès et Bigot ne sont pas nommés; il ne vous échappera pas qu'ils sont les moins anciens. Voilà dix ans que les autres me servent. Mon intention est que cela soit dit dans la conversation, pour que personne n'interprète mes motifs et ne conçoive de la jalousie contre ceux auxquels j'ai accordé cette distinction.


Camp impérial de Schönbrunn, 15 août 1809

MESSAGE AU SÉNAT.

Sénateurs, nous avons jugé utile de reconnaître par des récompenses éclatantes les services qui nous ont été spécialement rendus dans cette dernière campagne par nos cousins le prince de Neuchâtel et les maréchaux ducs d'Auerstaedt et de Rivoli. Nous avons pensé, d'ailleurs, qu'il convenait de consacrer le souvenir, honorable pour nos peuples, de ces grandes circonstances où nos armées nous ont donné des preuves signalées de leur bravoure et de leur dévouement, et que tout ce qui tendait à en perpétuer la mémoire dans la postérité était conforme à la gloire et aux intérêts de notre couronne. Nous avons en conséquence érigé en principauté, sous le titre de principauté de Wagram, le château de Chambord, que nous avons acquis de la Légion d'honneur, avec les parc et forêt qui en dépendent, pour être possédée par notre cousin le prince de Neuchâtel et ses descendants, aux clauses et conditions portées aux lettres patentes que nous avons ordonné à notre cousin le prince archichancelier de l'Empire de faire expédier par le conseil du sceau des titres.

Nous avons érigé en principauté, sous le titre de principauté d'Eckmühl, le château de Brühl, que nous avons acquis de la Légion d'honneur, avec les domaines qui en dépendent, pour être possédée par notre cousin le maréchal duc d'Auerstaedt et ses descendants, aux clauses et conditions portées aux lettres patentes qui lui seront également délivrées.

Nous avons en même temps érigé en principauté, sous le titre de principauté d'Essling, le château de Thouars, que nous avons également acquis de la Légion d'honneur, avec ses dépendances actuelles, pour être possédée par notre cousin le maréchal duc de Rivoli et ses descendants, aux clauses et conditions parlées aux lettres patentes qui lui seront délivrées.

Nous avons pris des mesures pour que les domaines desdites principauté soient augmentés de manière que les titulaires et leurs descendants puissent soutenir dignement le nouveau titre que nous leur avons conféré, et ce, au moyen des dispositions qui nous sont  compétentes.

Notre intention est, ainsi qu'il est spécifié dans nos lettres patentes, que les principautés que nous avons érigées en faveur desdits titulaires ne donnent à eux et à leurs descendants d'autres rangs et prérogatives que ceux dont jouissent les ducs, parmi lesquels ils prendront rang selon la date de l'érection des titres.

Donné en notre camp impérial de Schönbrunn, le 15 août 1809.

NAPOLÉON


Schönbrunn, 15 août 1809

Au comte Daru, intendant général de l'armée d'Allemagne

Monsieur Daru, j'ai pris aujourd'hui un décret pour accorder une dotation de 500 francs à mes enfants adoptifs d'Austerlitz, garçons et filles, et de 2,000 francs aux enfants d'officiers. Prenez les mesures nécessaires pour faire toucher cette rente en leur nom; et, comme ils doivent être entretenus à mes frais jusqu'à leur majorité, vous en ferez verser le montant à la caisse d'amortissement, et on le placera sur le grand-livre pour former avec le temps un bien-être à ces enfants.


Schönbrunn, 15 août 1809

Au général Clarke, comte d'Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Je reçois votre lettre du 8. Je ne comprends pas bien l'affaire d'Espagne et ce qui s'est passé, où est restée l'armée française le 29 et le 30, où a été pendant ces deux jours l'armée anglaise. Le Roi dit qu'il manœuvre depuis un mois avec 40,000 hommes contre 100,000.

Écrivez-lui que c'est sa faute, et que c'est de cela que je me plains.

Le plan de faire venir le maréchal Soult sur Plasencia est fautif et contre toutes les règles; il a tous les inconvénients et aucun avantage :  1° l'armée anglaise peut passer le Tage, appuyer ses derrières à Badajoz, et dès ce moment ne craint plus le maréchal Soult; 2° elle peut battre les deux armées en détail. Si, au contraire, Soult et Mortier étaient venus sur Madrid, ils y auraient été le 30, et l'armée réunie le 15 août, forte de 80,000 hommes, aurait pu donner bataille et conquérir l'Espagne et le Portugal. J'avais recommandé que l'on ne livrât pas bataille si les cinq corps ou au moins quatre n'étaient réunis. On n'entend rien aux grands mouvements de la guerre à Madrid.


Camp impérial de Schönbrunn, 15 août 1809

DÉCRET.

Voulant constater par un monument durable la satisfaction que nous avons éprouvée de la conduite de notre Grande Armée et de nos peuples pendant les campagnes d'Iéna et de la Vistule, Nous avons décrété et décrétons ce qui suit :

ARTICLE 1er - Il sera élevé sur le terre-plein du pont Neuf un obélisque en granit de Cherbourg, de 180 pieds d'élévation, avec cette inscription : L'Empereur Napoléon au Peuple Français.

ART. 2. - Sur les différents côtés de cet obélisque, seront représentés tous les faits qui ont honoré la France pendant ces deux campagnes.

ART. 3. - Notre directeur général des musées sera chargé de l'exécution de ce monument, et notre ministre de l'intérieur nous en présentera les projets et devis avant le 1er janvier 1810, et les travaux devront en être terminés en 1811 pour tout délai.

ART. 4. - Les frais de ce monument seront affectés sur des fonds spéciaux et particuliers.

ART. 5. - Nos ministres sont chargés de l'exécution du présent décret.

(L'Aiguille du Pont-Neuf, adjugée à l'architecte Chalgrin - membre de l'Institut, qui commença la construction de l'Arc de Triomphe de Paris -, ne fut jamais érigée)


Camp impérial de Schönbrunn, 15 août 1809.

DÉCRET.

ARTICLE 1er. - Tous généraux, officiers et soldats, de quelque arme qu'ils soient, qui, aux batailles de Thann, d'Abensberg, d'Eckmühl, de Ratisbonne, d'Essling et de Wagram, auraient perdu un membre et seraient vivants aujourd'hui 15 août, seront compris de la manière suivante dans les classes des dotations que nous accordons pour récompense des services qui nous ont été rendus, savoir : les lieutenants, sous-lieutenants, sergents et soldats, dans la 6e classe; les capitaines et chefs de bataillon ou d'escadron, dans la 5e classe; les généraux, colonels et majors, dans la 4e classe.

ART. 2. - Les enfants que nous avons adoptés en conséquence de notre décret du 15 frimaire an XIV seront portés, savoir : ceux dont 
les pères morts étaient soldats, dans la 6e classe, et ceux dont les pères morts étaient officiers, dans la 5e.

ART. 3. - Il est créé à cet effet 1,500 places dans la 6e classe, 500 dans la 5e classe et 500 dans la 4e classe, savoir : 1,000 places de 6e classe, représentant un total de 500,000 francs de rente, pris sur les fonds réserves du Monte-Napoleone; 500 de la même classe, représentant un total de 250,000 francs, pris sur les actions du canal du Midi, que la caisse d'amortissement se procurera; 500 places de 5e classe, représentant un million de rente, pris, savoir, 250 sur les biens réservés à Bayreuth, 125 sur les biens réservés à Fulde, et 125 sur les biens réservés à Erfurt; enfin 500 places de 4,000 francs, représentant un total de deux millions de revenu, pris sur les biens réservés en Hanovre.

ART. 4. - Voulant traiter favorablement les familles des généraux, officiers et soldats morts sur le champ de bataille dans la présente guerre, nous autorisons notre conseil du sceau des titres à nous proposer, pour ceux qui n'auraient pas laissé d'enfants mâles, la transmission des titres et dotations qui leur auraient été accordés par nous de leur vivant au premier mâle né de leur fille aînée, et, s'ils n'avaient pas laissé de fille, au premier fils né de leur frère actuellement existant.

ART. 5. - Le major général et nos ministres sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret.


16 – 31 août