15 - 31 Janvier 1809


Valladolid, 15 janvier 1809

Au comte Fouché, ministre de la police générale, à Paris

Le sieur Saint-Simon a été condamné à mort. Son affaire est devant un conseil privé. En attendant, il a dû être réécroué dans les prisons de Bayonne. Faites-le transférer dans le château de Lourdes ou de Joux, puisqu'il est probable que son affaire traînera en longueur et que mon intention est de commuer sa peine en une prison.


Valladolid, 15 janvier 1809

Au comte Lacépède, Grand-Chancelier de la Légion d'Honneur, à Paris

Je vous renvoie votre rapport sur la décoration que le roi de Naples a conférée à plusieurs de mes généraux et officiers. Vous ferez connaître au Roi que mon intention est qu'il ne la donne désormais à aucun Français, et qu'aucun Français ne la porte, hormis ceux qui l'ont reçue jusqu'à présent. Si mes soldats se distinguent, je les récompenserai avec l'Ordre français. Toute autre manière me déplairait beaucoup. Quant à vous, je désire que vous ne me proposiez aucune confirmation de ces collations d'ordre : le Roi chamarrerait tous les Français de son Ordre, ce qui ne doit pas être. Dans la lettre que vous écrirez au Roi, faites-1ui sentir, dans le style convenable, quelle est mon intention là-dessus.


Valladolid, 15 janvier 1809

A M. Otto, envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire, à Munich

Monsieur Otto, vous trouverez ci-jointe une lettre pour le roi de Bavière (voir ci-dessous), que vous cachetterez après l'avoir lue, et que mon officier d'ordonnance remettra. Lorsque vous lirez cette lettre, je serai de retour à Paris. Ma Garde est déjà en marche pour Bayonne.

Vous trouverez ci-joint un ordre pour envoyer le corps du général Oudinot à Augsburg, si cela convient au Roi. Vous insisterez auprès de lui pour obtenir son consentement, en lui faisant sentir l'importance de ce mouvement pour couper court à des murmures et inquiétudes qui font autant de mal que la guerre. Les quatre basses compagnies des régiments de ce corps , qui n'a que les deux premières compagnies de grenadiers et de voltigeurs , vont les joindre ; ce qui le triplera. Ce corps sera censé être à Augsburg pour passer en Italie. Il sera nourri à mes frais. L'arrivée de ce corps à Augsburg, coïncidant avec mon retour à Paris, fera sentir à l'Autriche que ce n'est pas une plaisanterie. Je désire savoir combien il faut de temps au Roi pour mettre ses troupes sur pied, remonter sa cavalerie. Quand l'Autriche fait des efforts, il ne faut pas s'endormir.

Donnez l'assurance au Roi que, quand il le faudra, je serai à Munich avec 150,000 hommes, dont 25,000 de cavalerie, la plus belle du monde ; que je ferai entrer le vice-roi en Carinthie avec une pareille force, et que j'aurai en réserve une armée de 60, 000 hommes tirés de mon armée d'Espagne. Si je joins à ces forces 100,000 hommes des groupes de la Confédération, il me semble que l'Autriche ne doit pas hausser le ton. Vous ajouterez que je suis au mieux avec la Russie, et que cette cour ne comprend rien, aussi bien que moi, à ce vertigo de la cour de Vienne.


Valladolid, 15 janvier 1809

Au maréchal Davout, duc d'Auerstaedt, commandant l'armée du Rhin, à Erfurt

Mon Cousin, mon intention est qu'à la réception du présent ordre vous fassiez partir le corps du général Oudinot , composé de son infanterie et de ses trois régiments de cavalerie et de 18 pièces de canon , pour se rendre à Augsburg. Il agira comme s'il devait se rendre en Italie. A Augsburg, il attendra de nouveaux ordres. Vous ferez partir avec ce corps la division de cuirassiers du général Espagne. Par ce moyen, le général Oudinot aura sept régiments de cavalerie, et, dans le courant de mars, il réunira ses trente-six bataillons d'infanterie.


Valladolid, 15 janvier 1809

INSTRUCTIONS POUR LE MAJOR GÉNÉRAL.

Après le départ de l'Empereur, le Roi commandera l'armée.

Le major général restera à Valladolid jusqu'à ce qu'il apprenne que les Anglais sont embarqués. Si, dans huit jours, ils ne l'étaient pas et qu'il n'y eût rien de nouveau, il se rendra à Paris, s'il ne juge pas sa présence nécessaire. Pendant le temps qu'il restera à Valladolid, il continuera à donner des ordres au nom de l'Empereur.

Si le maréchal duc de Dalmatie éprouvait un échec, ce qui n'est pas à présumer, et que cet échec ne pût être réparé par le corps du duc d'Elchingen, le major général pourrait faire marcher la division Lapisse; il tâchera de correspondre avec Santander, en y envoyant 100 hommes d'infanterie, afin de donner des nouvelles au général Bonet, qui depuis longtemps en est privé.

Le major général renouvellera les ordres à Santander et à Burgos, pour faire évacuer sur Bayonne les laines ainsi que les marchandises anglaises.

Le départ de l'Empereur ne sera pas mis à l'ordre ; on le fera connaître directement et particulièrement aux ducs de Dalmatie, d'Elchingen et de Montebello. Le Roi sera prévenu qu'il doit laisser ignorer, autant que possible, le départ de l'Empereur à Madrid, en disant que Sa Majesté a été à Saragosse.

Le général Lecamus restera à Valladolid, comme section détachée de l'état-major général; il correspondra directement avec le Roi et avec le major général à Paris.

L'Empereur laisse le commandement de sa Garde au duc d'Istrie , qui aura son quartier général à Valladolid. La Garde ne fait pas partie de l'armée. Ce ne sera que quand l'Empereur fera venir sa Garde et ses équipages que l'on mettra à l'ordre que Sa Majesté a quitté le commandement de ses armées en Espagne.

Si des circonstances forcées rendaient indispensable de faire marcher la Garde, le major général est autorisé à le faire.

Comme le corps du duc de Dalmatie, tel qu'il est en Galice, et appuyé de deux divisions du duc d'Elchingen , est assez fort pour chasser les Anglais , l'Empereur désire que la division Heudelet ne dépasse pas Villafranca jusqu'à ce que le duc de Dalmatie se soit mis en chemin pour Oporto, et alors il faudrait qu'un régiment du duc d'Elchingen vînt à Astorga pour garder les communications.

Le major général, tant qu'il sera à Valladolid, y fera la parade comme à l'ordinaire, verra les hommes isolés. Il donnera l'ordre de faire partir, le 15, les caissons de la 3e compagnie du 6e bataillon des équipages militaires, chargés des effets des régiments du corps du maréchal duc de Dalmatie; il leur donnera une bonne escorte ; on retardera le départ d'un jour , si on n'avait pas une escorte suffisante.

Pendant le temps que le major général restera à Valladolid, il enverra tous les jours un courrier au Roi.

Immédiatement après le départ de l'Empereur , l'estafette sera établie de la manière suivante. Il y aura à Madrid et à Valladolid un directeur de la poste. Le directeur de Madrid ne fera pas partir l'estafette sans que l'ambassadeur de France lui ait fait remettre directement ses dépêches, lesquelles ne devront être mises dans la valise que par le directeur lui-même, sans être vues de personne ; il recevra aussi le paquet du maître des requêtes Fréville, celui de l'intendant général de l'armée; quant au paquet du Roi, c'est le principal et le premier. A Valladolid, le directeur ne laissera pas partir l'estafette sans avoir pris les paquets du duc d'Istrie; il ordonnera de prendre à Burgos ceux du général Darmagnac et à Vitoria ceux du général Thiébault. Le major général remettra à cet égard une note au directeur de l'estafette et au général Nansouty.

Le major général chargera le général Thiébault de correspondre avec lui à Paris et avec le maréchal duc d'Istrie à Valladolid ; et de même au général Darmagnac à Burgos et au général Bisson, qui commande la Navarre. Le duc de Montebello , qui commande devant Saragosse, recevra aussi le même ordre.

Pendant le temps que le major général restera à Valladolid , il enverra tous les jours un de ses aides de camp au duc de Dalmatie, afin qu'il les lui réexpédie ensuite toutes les fois qu'il y aura quelque chose d'important. Mais, au moins tous les deux jours, ces aides de camp porteront les dépêches du duc de Dalmatie au duc d'Istrie et même au Roi , en passant par Madrid , s'il y avait quelque chose de pressé.

Pendant que le major général sera à Valladolid , il expédiera à Paris successivement ses aides de camp revenus de Galice ; et, après son départ, ils continueront leur route sur Paris, ayant auparavant remis les dépêches adressées au duc d'Istrie.

Le major général expédiera , tous les jours à peu près et lorsque les événements l'exigeront , l'un des aides de camp des généraux attachés à l'Empereur, pour Saragosse, afin que le due de Montebello en expédie un pour Paris au moins tous les trois jours, ou lorsque les circonstances l'exigeront.

Pendant le temps que le major général restera à Valladolid, il expédiera tous les jours à Sa Majesté un de ses officiers d'ordonnance avec les différents rapports.

Le major général partira huit ou dix jours après l'Empereur, en profitant des différents relais de Sa Majesté. Après le passage du major général, tous les relais de l'Ernpereur seront réunis à Vitoria, sous la garde des chasseurs et de la moitié de la gendarmerie d'élite , qui s'y rendra à cet effet.

Le grand maréchal remettra au major général l'état des officiers d'ordonnance et des aides de camp. Le major général pourra dès demain en expédier sur Saragosse.

Le major général recornmandera en partant au duc d'Istrie de faire tous les jours une parade comme le fait Sa Majesté, de visiter les hommes qui passent, de leur donner du repos et de leur faire joindre en règle leurs différents corps.


Valladolid, 15 janvier 1809

Au maréchal Bessières, duc d'Istrie, commandant la réserve de cavalerie, à Valladolid

Mon Cousin, ma Garde reste ici sous vos ordres. Mon intention est que les chevau-légers polonais soient réunis à Tolosa, et mes chasseurs à cheval à Vitoria, hormis les détachements qui seraient de Vitoria à Tolosa, qui resteront à Tolosa avec les Polonais. Mon intention est que tous les détachements qui seraient à Madrid ou à Astorga, ou ici, aussitôt qu'ils seront rétablis, soient dirigés sur ces corps , à Bayonne. Donnez ordre qu'il y ait à Vitoria, avec les chasseurs, douze pièces d'artillerie légère bien attelées et approvisionnées. Le reste doit se tenir prêt à partir au premier ordre. Vous recevrez directement des ordres de moi. Tenez ma Garde sur un bon pied; dirigez les malades plutôt sur Burgos qu'en avant. Il faut que les postes les plus avancés de ma Garde soient à Valladolid. Vous sentez bien que cela doit céder à des circonstances majeures et imprévues dont je vous laisse le maître de juger. Indépendamment des rapports que vous ferez au major général sur le gouvernement des provinces qui sont sous votre autorité, vous m'en ferez sur la Garde, afin que je connaisse bien sa situation et le lieu où elle se trouve. Les chevau-légers polonais et les chasseurs auront avec eux leurs caissons. 150 de mes gendarmes d'élite se rendront également à Vitoria ; le reste demeurera ici pour la police de la ville et de la route ; il n'y en aura plus, huit jours après mon départ de Valladolid, à Ségovie, et de Ségovie à Madrid, ni dans d'autres directions. Tous leurs postes seront repliés de manière que leurs postes avancés soient à Valladolid.


Valladolid, 15 janvier 1809

ORDRE POUR LE CAPITAINE CHLAPOWSKI, OFFICIER D'ORDONNANCE DE L'EMPEREUR

Chlapowski se rendra à Mayence. Il remettra une lettre au prince Primat. Si Son Altesse n'était pas à Fraucfort, il la remettrait au gouverneur de Francfort, pour la lui faire passer.

De là, il se rendra à Cassel ; il remettra une lettre au roi de IVestphalie.

Il en remettra une au grand-duc de Hesse-Darmstadt.

De là, il se rendra à Varsovie; il remettra au roi de Saxe une lettre. Si le Roi n'était pas à Varsovie, il passerait par Dresde, où il la lui remettrait, et irait à Varsovie.

Chlapowski restera huit jours à Varsovie ; il verra tout ce qui s'y fait, quel est l'esprit du duché, ce qu'on fait et dit en Gallicie, et reviendra me trouver dans le lieu où je serai.


Valladolid, 15 janvier 1809

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie, à Milan.

Mon Fils, les nouvelles que je reçois de tout côté me disent que l'Autriche remue. La Russie est aussi indignée que moi de toutes ces fanfaronnades. Disposez les choses de manière que, dix jours après le premier ordre, vous puissiez réunir 60,000 hommes dans le Frioul. Si les Autrichiens ont fait des mouvements, armez Palmanova; je suppose que vous y avez réuni les approvisionnements nécessaires. Si des troupes ennemies approchaient de la frontière, placez la division Broussier dans le Frioul, ainsi que la cavalerie légère, de manière à réunir là, d'abord, 18,000 hommes d'infanterie, 3,000 hommes de cavalerie et trente pièces de canon, dont six d'artillerie légère. Placez en seconde ligne la division Barbou, que vous compléterez promptement à 8,000 hommes; vous pourrez la réunir toute à Trévise. Réunissez également la division Severoli, qui doit être aussi forte de 8,000 hommes, et vous pourrez la placer à la hauteur de Vicence et de Bassano. Réunissez les six régiments de dragons, et faites revenir celui qui est à Rome ; cela doit faire un corps de 5,000 hommes. Enfin réunissez à Padoue la division Grenier, que vous composerez de la manière suivante : le 1er, le 52e et le 102e de ligne. Vous aurez par ce moyen 24,000 hommes d'infanterie et 6,000 hommes de cavalerie, c'est-à-dire 30,000 hommes en seconde ligne. La division Lemarois, étant à Ancône et en Toscane, se trouvera composée des 29e, 13e, et 112e régiments; vous la laisserez là, et ne la ferez venir qu'autant que les événements seraient plus pressés. Je désignerai plus tard le général qui devra prendre le commandement de cette division.

Ne faites cependant aucun mouvement inutile, et, dans le cas où ces premiers rapports ne seraient pas confirmés, contentez-vous d'appeler le régiment qui est à Rome et de mettre la division Grenier sur la rive gauche du Pô, afin qu'en dix jours, comme je vous l'ai dit plus haut, vous puissiez être en mesure de réunir 60,000 hommes et cent pièces de canon attelées dans le Frioul.

Quant à ces cent pièces de canon, le matériel, vous l'avez ; le personnel et le nombre nécessaire de canonniers ne vous manquent pas non plus. Je vois que l'artillerie italienne a 400 hommes du train; portez donc le nombre de vos chevaux à 600; ce qui vous mettra à même d'atteler plus de cent voitures, c'est-à-dire vingt-quatre pièces. Je vois aussi que vous avez 400 sapeurs. Vous avez le 6e bataillon principal du train français, le 7e et le 7e bis; je vois que le 6e a près de 500 chevaux, le 7e près de 200, et le 7e bis en a 300. Prenez les mesures nécessaires pour compléter ces bataillons à 800 chevaux chacun; ce qui, avec les 600 chevaux du train italien, vous donnera 3,000 chevaux, indépendamment de ce que pourra vous offrir le Piémont. Enfin quatre-vingts pièces de canon peuvent, surtout dans un commencement de campagne, se servir à la rigueur avec 400 voitures, c'est-à-dire avec 1,600 chevaux. Ne laissez à Rome que six pièces de canon et seulement deux attelées; faites revenir les autres attelages.


Valladolid, 15 janvier 1809, au matin

A Joseph Napoléon, roi d'Espagne, au Pardo

Mon Frère, je n'ai pas de nouvelles de vous depuis le 11. Les circonstances de l'Europe m'obligent à aller passer vingt jours à Paris. Si rien ne s'y oppose, je serai de retour vers la fin de février. Le major général restera encore dix à douze jours, afin d'être bien assuré que vous ayez connaissance de toutes les affaires. J'ai ordonné la réunion de ma Garde à Valladolid. J'en laisse le commandement au maréchal Bessières, qui recevra des ordres directement de moi pour ma Garde. Je lui ai fait connaître que je désirais qu'elle restât en repos, pour être en situation de se porter sur une autre frontière, si les circonstances le rendaient nécessaire. Je vous prie de m'écrire tous les jours en grand détail et de m'envoyer même les rapports des généraux sur les différentes affaires, afin que je connaisse bien la situation des choses.

Le major général vous fera connaître mon projet d'entrer en Portugal à la fois par Oporto et la Galice; ce qui vous mettra à même de réunir ce que vous avez pour l'attaque de l'Andalousie, en donnant les premiers coups sur Séville et Mérida, en ayant la frontière du Portugal.

Il ne faut songer à Valence que lorsqu'on aura Saragosse; ce qui certainement doit être fait dans le courant de février. Quand Saragosse sera pris , il n'en faut rien retirer que je n'en sois instruit, car beaucoup de choses vont dépendre des circonstances.

J'ai laissé le commandement des provinces de Léon, de la Vieille-Castille, de la Biscaye et de Santander au maréchal Bessières, qui restera à Valladolid. Il a, pour contenir ces provinces , la division Lapisse qui marche sur Salamanque, les garnisons qui sont dans ces différents points , et de plus une division de dragons.

Je pense vous avoir écrit de faire votre entrée, le 14, à Madrid. Denon voudrait prendre quelques tableaux. Je préférerais que vous prissiez tous ceux qui se trouvent dans les maisons confisquées et dans les couvents supprimés, et que vous me fissiez présent d'une cinquantaine de chefs-d'oeuvre qui manquent au Muséum de Paris. En temps et lieu, je vous en donnerai d'autres. Faîtes venir Denon et parlez-lui dans ce sens. Il peut vous faire les propositions. Vous sentez qu'il ne faut que de bonnes choses, et l'opinion est que vous êtes immensément riches en ce genre.

Je crois qu'immédiatement après votre entrée et votre installation à Madrid vous devez vous occuper de créer deux ou quatre régiments, dont un dans le nord, en ayant soin de n'en pas laisser approcher un de dix lieues de Madrid. Si vous pouvez former des cadres avec quelques officiers , je crois que vous trouverez beaucoup de monde; ce qui est indispensable pour donner refuge à des gens qui deviendraient des brigands. En même temps , ce sera des corps qui seront bons pour la police.

Je crois que j'ai un chiffre pour correspondre avec vous lorsqu'il y aura quelque chose de très-important à me faire savoir. Vous avez dans tous les cas celui de Laforest.

Je compte être à Paris le 21 janvier. J'irai en grande partie à franc étrier.

Si vous le jugez convenable, vous pouvez garder quinze jours mon absence secrète, en disant que je me suis porté sur Saragosse. Vous ferez, au reste, là-dessus, ce qui vous paraîtra le plus à propos.

Je n'ai pas de nouvelles de Galice depuis les dernières reçues. Le duc d'Elchingen avait déjà passé les montagnes et se réunissait au duc de Dalmatie, qui était à huit lieues de la Corogne.


Valladolid, 15 janvier 1809, à midi

A Joseph Napoléon, roi d'Espagne, au Pardo

Mon Frère, je vous ai expédié ce matin Montesquiou, avec une lettre où je vous faisais connaître que je partais demain pour Paris. Le major général vous enverra demain, par un aide de camp, des instructions sur mon armée d'Espagne. Le major général restera ici dix ou douze jours après moi. Je vous écris cette lettre par l'estafette porteur de vos paquets de Paris, que je laisse continuer. Portez votre attention sur vos journaux, et faites faire des articles qui fassent bien comprendre que le peuple espagnol est soumis et se soumet. Le chargé d'affaires espagnol qui était à Vienne a eu la bêtise de partir pour Trieste, sur une lettre de la junte. La cour de Vienne se comporte très-mal ; elle pourrait s'en repentir. N'ayez aucune inquiétude. J'ai assez de forces, même sans toucher à mon armée d'Espagne, pour aller à Vienne dans un mois.

J'ai peu de généraux de cavalerie. Je désire que le général Montbrun, qui est avec Lasalle, soit appelé par vous à Madrid , et que , huit jours après, vous me l'expédiiez avec des lettres à Paris. C'est un général dont j'estime la bravoure et qui me sera utile. Il ne faut point qu'il sache pourquoi je le fais venir. Si j'ai besoin d'autres, je le manderai de même, et vous me les expédierez de même avec vos dépêches. Il faut dire partout et bien accréditer dans l'armée l'idée que je reviendrai dans vingt à vingt-cinq jours. D'ailleurs ma seule présence à Paris fera rentrer dans le néant l'Autriche, et alors, avant la fin d'octobre, je serai de retour. Je serai à Paris en cinq jours. J'irai à franc étrier jusqu'à Bordeaux, jour et nuit. Pendant ce temps, tout ira se calmant en Espagne.

Je laisse ici, sous les ordres du maréchal Bessières, la division de dragons Kellermann, dont j'ai passé la revue aujourd'hui, pour contenir le nord , depuis Burgos jusqu'à la Galice. Elle va prendre position à Tudela de Duero, ce qui assurera les communications avec Valladolid.

Je pense que, du moment que Saragosse sera rendu, vous pourrez faire venir la Reine avec vos enfants.

J'ai écrit au roi de Naples d'envoyer un ambassadeur à Paris, et je lui ai désigné celui que je voulais qu'il envoyât.

Je vous prie de m'écrire longuement et naïvement; vous le devez, et c'est la seule chose qui puisse me donner confiance en vous, et ma correspondance vous sera utile.

Je crois utile, pour les affaires générales d'Europe, que la Reine, après le carnaval, se rende à Marracq. Elle pourrait y être le 25 février. Les préparatifs de son départ peuvent produire un très-bon effet. Écrivez-lui de partir quand je le lui dirai. Saragosse sera pris quand elle partira. Il n'y a aucun inconvénient à ce que la Reine se repose quinze à vingt jours à Marracq. Je pense donc que votre famille peut se rendre à Madrid vers la fin de février.

Les nouvelles de Russie sont bonnes. Pardo se comporte bien à Saint-Pétersbourg. Ne le laissez pas manquer de nouvelles. Écrivez- lui souvent en envoyant vos lettres à Champagny.

Vous trouverez ci-joint des lettres interceptées par le général Lapisse entre Zamora et Salamanque. Vous y verrez que le 20 décembre la junte était à Séville. Vous sentez l'importance d'occuper Talavera de la Reina et le pont d'Almaraz.


Valladolid , 15 janvier 1809

A Jérôme Napoléon, roi de Westphalie, à Cassel

Mon Frère, quand vous lirez cette lettre, je serai arrivé à Paris. Les armées espagnoles sont détruites, l'armée anglaise battue. Les mouvements.de l'Autriche sont inexplicables. Faites-moi connaître la quantité de troupes dont vous pouvez disposer. Votre contingent doit être de 25,000 hommes; il est fort important de le compléter. Vous sentez que, si la guerre se portait sur votre territoire, ou qu'on épronvât un échec, les conséquences en seraient funestes pour votre royaume. Je vous ai demandé deux régiments pour mon armée d'Espagne, ce qui m'en rendrait deux Français disponibles.

Mille choses aimables à la Reine.


Valladolid, 15 janvier 1809

A Louis X, Grand-Duc de Hesse, à Darmstadt

Mon Frère, je reçois la lettre de Votre Altesse Royale du 30 décembre 1808. J'ai vu avec peine que vos troupes, qui s'étaient acquis tant de louanges dans la campagne de Pologne, n'aient pas soutenu leur réputation dans celle-ci; la faute en est aux généraux qui les commandent. Le Hessois est brave et bon soldat. Que Votre Altesse leur donne des chefs de mérite, de ceux qui les commandaient dans la campagne passée, et elles reprendront la réputation qu'elles ont méritée depuis plusieurs siècles.

La conduite de l'Autriche fait craindre que cette puissance se porte à des folies qui entraîneraient sa ruine. Il est nécessaire que les troupes de Votre Altesse soient prêtes et que son contingent soit au complet, en comptant, comme de raison , ce qu'elle a à l'armée d'Espagne. Je verrai avec plaisir que Votre Altesse me fasse connatître combien de jours il lui faut pour réunir ses troupes, et sur combien d'hommes je puis compter.


Valladolid, 15 janvier 1809

A Maximilien-Joeph, roi de Bavière, à Munich

J'expédie à Votre Majesté un de mes officiers d'ordonnance pour lui faire connaître que je suis instruit que l'Autriche fait des mouvements; ses démarches paraissent dirigées par l'esprit de vertige et de folie, avant-coureur de la perte des États. Ayant détruit les armées espagnoles et battu l'armée anglaise, j'ai jugé convenable de me porter à Paris et de mettre en mouvement rétrograde une partie de mes troupes. Dans cette situation de choses, j'écris directement à Votre Majesté, parce que je désire bien connaître le nombre de jours qu'il lui faudrait pour mettre ses troupes sur pied, infanterie, cavalerie, artillerie, caissons, le nombre d'hommes et de chevaux qu'elle pourrait fournir. La guerre ayant pour but de défendre ses frontières, il serait bien à désirer que Votre Majesté pût mettre 40,000 hommes sous les armes. Quand l'Autriche fait des efforts, il faut en faire pour garantir la Bavière du malheur d'être envahie par ses éternels ennemis. Je prie VotreMajesté de faire armer les forteresses de Passau, de Burghausen et de Kufstein, d'y faire tenir une bonne garnison , de les faire approvisionner pour trois mois de vivres, de munitions de guerre, poudre, etc. J'ai autorisé le duc d'Auerstaedt à marcher sur le Danube avec 80,000 hommes, parmi lesquels mes belles divisions de cuirassiers, et deux cents pièces de canon, si Votre Majesté le demande et si les circonstances devenaient urgentes. Je n'en désire pas moins que le corps du général Oudinot se porte dès à présent à Augsburg, où il sera à mes frais. Des compagnies que j'envoie de France vont porter ce corps à 30,000 hommes. Il peut attendre là que les neiges soient fondues et que le passage soit ouvert pour se rendre en Italie. Ce corps, qui n'est aujourd'hui que de 19,000 hommes, mais qui sera de 30,000 , serait utile à Augsburg pour donner de la confiance à vos sujets, à votre armée, et en imposer un peu à l'Autriche. Si telle est l'o


Valladolid, 15 janvier 1809

A Frédéric-Auguste, roi de Saxe, à Dresde

J'envoie un de mes officiers d'ordonnance à Votre Majesté, pour lui annoncer mes succès coutre les armées espagnoles et anglaises. Ces succès, joints aux mouvements que fait l'Autriche, me ramènent à Paris et me décident à faire rétrograder une partie de mes armées d'Espagne.

Je prie Votre Majesté de me dire ce qu'elle pense de cette folie de la cour de Vienne. La Russie est indignée de cette conduite et ne peut la concevoir. Est-ce que les eaux du Danube auraient acquis la propriété de celles du Léthé ? Toutefois je suis prêt à recevoir le gant, si l'Autriche le jette, et à couvrir la Confédération avec 300,000 hommes, indépendamnient de l'armée de réserve tirée de mes armées d'Espagne. Partie de ces troupes agirait sur la frontière d'Italie. Je prie Votre Majesté de me faire connaître, dans tous les cas, quel est l'état précis de ses troupes, pour savoir sur quoi je puis compter; car, si l'Autriche continue à vouloir la guerre, il vaut mieux qu'elle s'établisse sur son territoire que sur le nôtre.


Valladolid, 15 janvier 1809

A Frédéric, roi de Wurtemberg, à Stuttgart

Monsieur mon Frère, on m'a annoncé de Paris qu'un aide de camp de Votre Majesté devait venir me trouver avec une lettre d'elle; je ne l'ai point encore vu. Les affaires ont marché ici comme je pouvais le désirer. Les armées espagnoles ont été détruites ; l'armée anglaise a été poursuivie l'épée dans les reins, l'espace de cent cinquante lieues. Je l'ai poursuivie moi-même jusqu'aux montagnes de la Galice. Elle a déjà perdu le tiers de son monde, tous ses bagages, et abattu elle-même la plus grande partie de ses chevaux, indépendamment de 10,000 Espagnols, reste des armées du nord de l'Espagne, qui ont été pris ou dispersés, et qui l'avaient suivie. Je verrai avec plaisir que Votre Majesté donne des ordres pour que ses journaux démentent les faux bruits publiés par les gazettes de Presbourg et de Vienne dans l'intention malicieuse d'entraîner l'Allemagne dans une lutte qui doit occasionner la ruine de cet État. La Russie est indignée, comme moi, de cette conduite extravagante de l'Autriche. Nous ne pouvons rien concevoir à cet esprit de vertige qui s'est emparé de la cour de Vienne. Lorsque Votre Majesté lira cette lettre, je serai à Paris. Une partie de mon armée d'Espagne est en mouvement rétrograde pour former une armée de réserve. Mais , indépendamment de cela, je puis envoyer en Allemagne, sans toucher à un seul homme de mon armée d'Espagne, et me porter, à la fin de février, avec 150,000 hommes sur l'Inn , indépendamment des troupes de la Confédération. Je suppose que les troupes de Votre Majesté sont prêtes à marcher au moindre mouvement. Elle sent toute l'importance, s'il faut absolument faire la guerre, de la porter sur le territoire de nos ennemis, plutôt que de la laisser s'établir sur le territoire de. la Confédération. Je prie Votre Majesté de m'écrire à Paris ce qu'elle pense de tout cela. Est-ce que les eaux du Danube auraient acquis la propriété du fleuve Léthé ?


Valladolid, 15 janvier 1809

A Charles-Frédéric, Grand-Duc de Bade, à Carlsruhe

Mon Frère, ayant battu et détruit les armées espagnoles, et battu l'armée anglaise, et apprenant que l'Autriche continue ses armements et fait même des mouvements, j'ai jugé à propos de me rendre à Paris.

Je prie Voire Altesse Royale de me faire connaître sans délai la situation de ses troupes. J'ai été satisfait de celles qu'elle m'a envoyées en Espagne. J'espère que Votre Altesse Royale complétera son contingent à 6,000 hommes, car il vaut mieux porter la guerre chez nos ennemis que de la recevoir.


Valladolid, 15 janvier 1809

A Charles-Louis, Grand-Duc Héréditaire de Bade, à Manheim

Mon Fils, je me rends à Paris. Prenez des mesures pour que vos troupes soient sur le meilleur pied. Le régiment qui est en Espagne s'est bien comporté et s'est fait honneur.

Si vous voulez venir passer le reste du carnaval à Paris avec la princesse, je le verrai avec plaisir.

Dites bien des choses de ma part à Stéphanie.


Valladolid, 15 janvier 1809

A Charles, prince Primat de la Confédération, à Francfort

Les armées d'Espagne ont été détruites; celle d'Angleterre a été jetée à la mer après avoir perdu la moitié de son monde, ses chevaux, qu'elle a abattus elle-même, ses bagages, ses munitions et une partie de son trésor. Ces succès, joints aux mouvements de l'Autriche, me portent à retourner à Paris. Je désire que Votre Altesse me fasse connaître ce qu'elle sait des intentions de l'Autriche; elle a un ministre à Vienne qui doit l'instruire. De quelles eaux boit le cabinet de Vienne ? Est-ce de celles du Danube ou du fleuve Léthé ? Toutefois je désire que Votre Altesse demande aux princes de la Confédération de tenir leur contingent prêt à marcher. La Confédération ne doit avoir aucune inquiétude: je couvrirai ses frontières avec 300,000 hommes. Que chacun tienne son monde prêt. J'entrerai moi,mênie en Autriche avec 400,000 Français, si elle persiste dans le système de folie qu'elle a adopté. Je pense que Votre Altesse doit s'exprimer là-dessus avec ménagement, car il est probable que l'Autriche reviendra à des sentiments plus raisonnables; mais il est indispensable que les princes fournissent leur contingent à la rigueur. J'ai écrit moi-même aux différents rois.


Valladolid, 15 janvier 1809

Au comte de Laforest, ambassadeur de l'Empereur près de S. M. C., à Madrid

Monsieur Laforest, j'ai donné ordre au directeur de l'estafette de prendre vos paquets, et de les mettre dans le portemanteau des dépêches, pour qu'ils passent dans d'autres mains. Il faut écrire au ministre des relations extérieures et lui envoyer les gazettes et autres écrits qui s'impriment en Espagne. Ne manquez pas d'instruire de tout. Le sieur Fréville doit envoyer aussi des rapports non seulement sur les affaires, mais encore des rapports journaliers et tous les renseignements qu'il recueille, Je pars demain matin pour me rendre en six jours à Paris. Après la défaite des Anglai et eu égard `la mauvaise saison, l'armée a besoin de qulques jours de epos. Mon départ doit être tenu secret. Vous n'en parlerez que quand le roi le dira. Votre langage constant doit être que je ne resterai que quinze ou vingt jours à Paris. Montez votre maison à Madrid, recevez du monde et écrivez beaucoup; lorsqu'il y aura qulque chose d'important, vous vous servirez de chiffres, bien entendu, mais il faut que toutes les estafettes portent quelquechose de vous.

(Brotonne)


Valladolid, 15 janvier 1809

Au comte de Champagny, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur de Champagny, répondez au sieur Durant qu'il y a un moyen plus simple de finir toute dette discussion de cérémonial, c'est de ne pas dîner à la cour. Ou l'on suit l'étiquette royale et dans ce cas les ministres n'y dînent jamais, ou l'on suit l'étiquette électorale et le ministre dîne avec le prince. C'est dans ce sens qu'il faut s'en expliquer, car en ne dînant pas à la cour, cette difficulté d'étoquette est levée.

(Brotonne)


Valladolid, 16 janvier 1809.

Au comte Gaudin, ministre des finances, à Paris

Je n'appronve pas ce que vous me proposez relativement aux 84 millions de la Grande Armée; n'allez pas toucher à ce qni est la ressource de l'État.

Vous trouverez ci-joint un projet de budget pour la Légion d'honneur. Causez-en avec le grand chancelier et le grand trésorier. Mon intention est que les frais de bureau de la grande chancellerie n'exèdent pas 200,000 francs. La maison d'Écouen ne doit pas coûter plus de 200,000 francs; chaque élève ne doit pas coûter plus de 700 francs, entretien, nourriture, directrices, tout compris. Or cette somme de 200,000 francs, à 700 francs par élève, permettra d'en entretenir près de trois cents. Deux cent cinquante élèves seraient même suffisantes.

Les gratifications à la disposition du grand chancelier ne doivent pas excéder 200,000 francs.

Quant au quart de réserve, mon intention est que la moitié soit affectée à 1809, et l'autre moitié à l'arriéré. Il n'y aura plus que 1,500,000 francs d'arriéré.

Mon intention est que vous fassiez liquider entre le trésor et la Légion le produit des mines de l'île d'Elbe. Quant aux années arriérées, vous me ferez connaître les états des recettes et des dépenses de chaque année, et me ferez établir un projet de budget comme celui ci-joint. Il me semble que le revenu de 1,500,000 francs de biens doit se réduire à bien peu de chose, puisqqie je le vois chargé des dépenses ci-après :

Pour entretien et réparation des palais et domaines de la Légion . . . . . . . . . . . . . 200,000
Frais de visites des domaines. . . . . . . . . . . 50,000
Garde-bois, concierges, etc ... . . . . . . . . . 25,000
Frais divers .. . . . . . . . . . . . . . . . . . 30,000
Remises à MM. les chanceliers et trésoriers des cohortes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 150,000

Voilà donc 4 à 500, 000 francs de dépense à prélever sur à peu près 1,500,000 de revenu. Le fait est qu'il n'y a aucun ordre dans les finances de la Légion, parce qu'il n'a été encore établi aucun budget.

Il faudrait aussi affecter une somme fixe pour l'entretien de l'hôtel de Salm. On pourrait allouer pour cette dépense 8,000 francs par an.

Travaillez, je vous prie, à mettre en ordre cet objet important.


Valladolid, 16 janvier 1809

Au général Clarke, comte d'Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Général Clarke, donnez ordre au 46e régiment que le grenadier qui porte l'urne contenant les cendres de la Tour d'Auvergne se rende à votre ministère, et que l'on cesse un usage qui distingue ce régiment sans raison. Quel est le régiment à la tente duquel un général, un colonel, un brave enfin n'ait été tué ? J'ai toléré suffisamment de temps cette singularité : la Tour dauvergne était un brave homme. Vous prendrez mes ordres sur le lieu où il faudrait déposer son urne.


Valladolid, 16 janvier 1809, au soir

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie, à Milan

Mon Fils, je reçois votre lettre du 5 janvier. Vous devez comprendre ce qui me fait désirer d'ôter mon portrait de la plaque de l'ordre de la Couronne de fer. Le projet que vous m'envoyez ne me plait pas; il ressemble trop à l'Ordre de France. Voici ce que je voudrais : que le cordon vert, qui est sur votre projet, fût ciselé comme la couronne de fer qui est à Monza, c'est-à-dire qu'il fit la projection de cette couronne, et qu'il n'y eût pas autour cette espèce de fort étoilé à six côtés. Cette simple couronne en rond, au milieu de laquelle il faudrait mettre l'aigle, aurait quelque chose d'original. Je ne m'oppose pas à l'étoile qui est au-dessus de l'aigle. Les mots Italiani, Italiani, Italiani, je voudrais qu'ils fussent sur une petite couronne, telle que celle placée au milieu de l'aigle. Faites-moi faire ce modèle comme je vous le dis là. Je ne changerai rien à la petite décoration. La couronne de Monza s'y trouve, elle y est projetée; elle est d'autant plus propre à cela que c'est un bandeau; il faut seulement décider les pierres précieuses dont elle sera enrichie. Alors l'Ordre aura quelque chose de particulier qui empêchera de le confondre avec l'Ordre de France et avec les autres. Quand j'ai parlé de second ordre, j'ai entendu parler seulement pour les étrangers, qui ne comptent jamais dans le nombre fixé.


Valladolid, 16 janvier 1809, trois heures après midi

A Joseph Napoléon, roi d'Espagne, au Pardo

Mon Frère, j'ai reçu votre lettre du 13. Je n'ai pas reçu la lettre dans laquelle vous me demandez de renvoyer à Madrid trois prisonniers.

Vous pouvez faire ce que vous voudrez du prince Masserano , pourvu que vous ne l'envoyiez pas à Paris ni auprès des puissances étrangères. Il faut à Paris un homme sûr, et chez les puissances étrangères il faut n'avoir personne ou avoir un homme sur lequel on puisse compter.

J'ai envoyé au major général les pièces relatives au commandant de Vitoria.

Il ne faudrait pas que les douaniers arrêtassent ce qui est pour l'armée.

Je n'ai encore vu arriver aucun membre de la députation. Je suppose qu'elle arrivera dans la journée. Je les recevrai aussitôt.

J'ai ordonné que toutes les villes ayant plus de 2,000 âmes de population vous envoient à Madrid une députation pour vous présenter le procès-verbal des prestations de serment. Les villes plus considérables vous enverront une députation plus nombreuse en proportion. Les évêques feront partie de ces députations; les chapitres et tous les corps religieux vous enverront également des députés.


Valladolid, 16 janvier 1809, au soir.

A Joseph Napoléon, roi d'Espagne, au Pardo

Mon Frère, Carignan arrive à l'heure même avec vos lettres du 11 et du 13; de sorte que j'ai reçu aujourd'hui, d'abord votre lettre du 14, ensuite votre lettre du 13, et enfin votre lettre du 11. Il paraît que Carignan est tombé en route. Je donne l'ordre pour que les officiers que vous demandez vous soient rendus. Il y a dans la province d'Avila un Pignatelli qui nous fait bien du mal.

Des conscrits sont partis de France pour entrer dans votre garde.

J'ai donné ordre au major-général que tous les hussards et chasseurs qui font partie des régiments provisoires en Aragon se rendant à Madrid, et ceux dont les corps ne sont pas en Espagne, puissent également être incorporés dans votre garde, s'ils y consentent. Il y en a, par exemple, du ler et du 2e chasseurs; il y en a du 9e, du 7e, du 8e de hussards. Tous ces détachements, vous les pouvez prendre; le général Belliard doit en avoir l'état.

Je vais donner ordre que des différents dépôts de France on prenne 5 conscrits montés et qu'on les dirige sur l'Espagne; ce qui fera 3 à 400 hommes.

En quelque nombre que soient les Espagnols, il faut marcher droit à eux et d'une résolution ferme. Ils sont incapables de tenir. Il ne faut ni les biaiser, ni les manoeuvrer, mais courir dessus.

Faites incontinent imprimer les discours, que tiendront ces Messieurs, ainsi que le procès-verbal des votes, et, immédiatement après, faites votre entrée dans Madrid.

Je crois vous avoir mandé de me conserver la petite campagne de Chamartin et la maison d'habitation telle que je l'ai laissée, afin que je sache où descendre si un beau matin je reviens à Madrid.

Je crois que la meilleure manière de gouverner l'Espagne, c'est de faire des juntes par province, que l'on appellera juntes royales, et de mettre un gouverneur à leur tête. Des capitaines généraux, je ne crois pas possible d'y penser; ils n'auraient ni crédit ni autorité. Dans ce que je dis là, je n'entends parler que des trois premiers mois. Je vous prie de m'écrire souvent et longuement. Tout ce que l'on imprimera, rapports, états de situation, tout ce que vous m'enverrez me sera agréable.

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P. S. Dans ce moment, le major général me met sous les yeux des lettres du maréchal Jourdan. Il ne faut pas souffrir que l'ennemi s'établisse à Madridejos. Mais le maréchal Victor pourra faire un à-droite, car il est probable que l'ennemi se retirera sur Valence. D'ailleurs, la division du général Valence serait suffisante. Il paraît que Saragosse avance. Le bataillon polonais qui était à Ségovie doit être arrivé à Madrid; envoyez-le à sa division, à Tolède. Le général Valence doit avoir l'instruction de pousser de forts partis au delà de Madridejos et de balayer tout le pays.


Valladolid, 16 janvier 1809, à neuf heures du matin

A Joseph Napoléon, roi d'Espagne

Je reçois votre lettre du. l4. Je suppose que la députation arrive aujourd'hui; je la recevrai aussitôt.

Votre correspondance est sèche et ne dit jamais rien. Il me semble que vous auriez dû m'écrire aussitôt que la députation est partie et m'envoyer le nom de ceux qui la composent. Je vous envoie des officiers d'ordonnance, et vous m'en renvoyez trois à la fois. Il était plus naturel de ne me les renvoyer que l'un après l'autre, à  vingt-quatre heures de distance. Par ce moyen, je n'aurais pas été soixante heures sans nouvelles, ce qui m'a fait craindre un moment que la communication n'ait été interrompue par quelques brigands.

Il ne faut pas m'écrire que vous avez reçu ma lettre et que tout ce qu'elle prescrit est exécuté. Il faut me répéter le détail de tout ce que vous avez exécuté. Par ce :moyen, je me trouverai avoir présent sous les yeux les ordres donnés, les mesures prises pour les exécuter, et je pourrai juger si 'ils ont été bien entendus.

Montesquiou a dû vous arriver. Vous recevrez incessamment l'instruction qu'a faite le major général. Les nouvelles de Galice sont que le duc de Dalmatie va tous les jours en avant et ramasse tous les jours des débris anglais.

Il n'y a pas de nouvelles de Saragosse; cependant on ne peut tarder à en recevoir. La place a été investie le 22; ainsi voilà bientôt un mois qu'ils auront eu pour préparer les mines. Un système de mines est une chose fort longue. L'état-major d'artillerie et du génie est parti hier; il y a des mineurs, des sapeurs et des outils.

Le régiment d'Arenberg, qui est le 27e chasseurs, restera à Rio­seco pour s'y reposer quelques jours, et sera ensuite dirigé sur Madrid; ce régiment est fort de 1,000 chevaux et de 1,000 hommes ; il est presque en entier composé de Belges.

La cour des alcades de Madrid a acquitté ou seulement condamné à la prison les 30 coquins que le général Belliard avait fait arrêter. Il faut les faire juger de nouveau par une commission militaire, et faire fusiller les coupables. Donnez ordre sur-le-champ que les membres de l'Inquisition et ceux du conseil de Castille, qui sont détenus au Retiro, soient transférés à Burgos, ainsi que les 100 coquins que Belliard a fait arrêter.

JLes cinq sixièmes de Madrid sont bons; mais les honnêtes gens on besoin d'être encouragés, et ils ne peuvent l'être qu'en maintenant la canaille. Ici ils ont fait l'impossible pour obtenir la grâce des coquins qu'on a condamnés. J'ai refusé, j'ai fait pendre, et j'ai su depuis que, dans le fond du coeur, on a été bien aise de n'avoir pas été écouté. Je crois nécessaire que, surtout dans les premiers moments, votre gouvernement montre un peu de vigueur contre la canaille. La canaille n'aime et n'estime que ceux qu'elle craint, et la crainte de la canaille peut seule vous faire aimer et estimer de toute la nation.

Je vous envoie le duplicata de mes lettres d'hier et différentes lettres interceptées. Recommandez bien qu'aussitôt qu'on entrera à Salamanque, on vous fasse passer les paquets de lettres qu'on y interceptera. Beaucoup de nouvelles disent que Florida-Blanca est mort, et c'est à cela que l'on attibue que les lettres ne soient signées que d'un secrétaire de la prétendue junte.

Aussitôt que je serai parti et que vous aurez reçu les lettres du major général, je crois que vous ferez bien d'envoyer un de vos officiers en Galice auprès du duc de Dalmatie, pour voir ce qui s'y passe. Je ne pense pas que le rnaréchal Victor doive trop s'éloigner du Tage; vous savez que le chemin pour aller à Valence est par Almanza, en faisant un tour sur la droite.

Ordonnez qu'on s'occuppe sur-le-champ des travaux qui doivent fortifier les hauteurs sur la droite du château. C'est une garantie pour le palais, pour les casernes des gardes du corps et pour les autres casernes. Le bon sens et l'expérience du passé prouvent que la populace de Madrid ne sera jamais sage que lorsqu'elle sera bien tenue. Sur les hauteurs du Retiro, des pièces de 24 et des mortiers rendront la ville souple et douce, et cela sera d'un resultat incalculable pour chacun. Il faut au Retiro 12 mortiers de 12 pouces, et autant sur les hauteurs du palais.

Surtout ne vous laissez pas manquer d'argent, et, s'il le faut, exigez des emprunts des villes, des corporations, des provinces. Il y a beaucoup d'argent en Espagne; ils en trouvaient bien pour leur révolte ! Si ma présence devenait nécessaire ici, je suis porté à penser que je pourrais être de retour pour le 20 février, et que je pourrais encore passer ici les mois de mars et d'avril. Vous savez que je n'aime pas habiter dans les villes; donnez ordre qu'on me garde Chamartin pour moi, tant la maison que j'habitais que l'autre qui est en face. Qu'on y mette des gardes et des concierges, afin que je puisse y descendre à mon retour.

(Lecestre)


Valladolid, 16 janvier 1809

A Jérôme Napoléon, roi de Westphalie, à Cassel

Mon Frère, je reçois votre lettre du 4 janvier et l'extrait du pamphlet qui y était joint. C'est un des mille et un libelles que l'Angleterre paye pour troubler le continent. Il y a quinze ans qu'elle emploie de pareils moyens, qui ne font plus aucun effet. L'auteur de ce libelle est un inconnu. Toutefois vous ferez bien d'arrêter la circulation de l'ouvrage dans vos États.

Les affaires d'Espagne sont finies. L'Italie non-seulement ne veut pas remuer, mais nous fournit 80,000 hommes, et l'empereur d'Autriche, s'il fait le moindre mouvement hostile, aura bientôt cessé de régner. Voilà ce qui est très-clair. Quant à la Russie, jamais nous n'avons été mieux ensemble.


Valladolid, 16 janvier 1809

A Alexandre, prince de neuchâtel, major-général, à Valladolid

Mon Cousin, donnez ordre que l'on confisque en Galice toutes les marchandises prohiees et spécialement celles venues d'Angleterre pendant l'insurrection.

(Brotonne)


Valladolid, 17 janvier 1809, au soir.

A Joseph Napoléon, roi d'Espagne, au Pardo

Mon Frère, la guerre avec l'Autriche paraît imminente et déjà les troupes de cette puissance sont campés sur les frontières. Mes troupes et celles de la Confédération sont aussi en mouvements. Je vous ai demandé le générl Merlin ou le général Lassalle. Renvoyz-moi ausso Bordesoulle. Si absolument vous n'avez pas besoin de Belliard, renvoyez-le à Paris et donnez le commandement de Madrid et donnez le commandement de Madrid à un des deux généraux Putaud ou Pacthod. Cependant, je pense que le général Belliard, ayant une grande habitude de Madrid, c'est une sottise de s'en priver encore. Il n'est pas assez précieux à l'armée pour que je ne puisse pas m#en séparer.

Renvoyez-moi les casres des 3e escadrons des 24 régiements de dragons qui sont en Espagne, en prenant tous les hommes disponibles pour remplacer les deux premiers escadrons. Je désire que vous me renvoyez les généraux de brigade de cavalerie Bron, Lagrange et Davenay et les généraux d'infanterie Gautier, Pouget et Roger; le général de divison Grandjean, qui est devant Saragosse, et les généraux de brigade Brun et Razout. Ces trois derniers étant devant Saragosse, je leur ai donné directement l'ordre de revenir. J'ai également donné l'ordre au duc d'Istrie de revenir. Il sera remplacé par le général de division Kellermann.

(du Casse)


(dans la lettre datée du 18 - et qui ne figure pas dans la Correspondance - Napoléon prévient son frère qu'il va monter à chevl pour quitter l'Espagne, et revient sur un procès et les acquittements prononcés)

J'ai tancé les alcades de ce qu'ils n'ont pas condamné à mort les garnements qu'on avait arrêtés. Ils se sont justifiés en me disant qu'il leur fallait je ne sais quelle permission du roi. Il faut dire ce qui est nécessaire pour faire réussir le procès et faire de grands exemples. Du côté de Las Rosas, on commet de grands brigandages. Si près de Madrid, vous ne pouvez le souffrir. Il faut mettre à la poursuite des coupables deux ou trois colonnes de 50 hommes chacune et un détachement de cavalerie. Les villes de Toro et de Zamora ayant été prises les armes à la main, j'ai mis sur ces deux provinces sune contribution de 500,000 francs, sur l'une, et d'1 million, sur l'autre. Cela servira à solder l'armée de Galicie. On a confisqué les marchandises coloniales et toutes celles preovenant dea manufactures anglaises. C'est une mesure générale qu'on a prise à Leipzig, à Hambourg et partout. J'ai ici pour 1 million d'argenterie dans la caisse de ma maison, et pour 1,500,000 dans le couvent de Saint-Dominique que j'ai supprimé. Cet argent servira à payer la solde, et j'ai ordonné qu'il fût converti en espèces; mais il serait convenable qi'il fût frappé de votre coin. Donnez l'ordre que le coin soit fait, et que, sur-le-champ, à la Monnaie e Madrid on batte 1 million à votre compte, etc. Si, par la suite, votre monnaie est aisni mise en circulation, je préférerais envoyer en Espagne des lingots pour solder la solde. Ce sera autant de battu à votre coin, ce qui est toujours d'un bon effet politique.

(du Casse)


Valladolid, 18 janvier 1809

A Joseph Napoléon, roi d'Espagne

J'ai reçu hier soir à  neuf heures la députation. Faites mettre dans les journaux les discours qu'ils m'ont tenus, et faites votre entrée à  Madrid. J'ai chargé les députés de vous faire le rapport de ce que je leur ai dit. Le brouillard hier soir était si épais et si humide, que j'ai preféré remettre mon départ à  ce matin. Il est près de six heures, et je vais monter à  cheval. Je laisse ici ma garde, mes équipages et ma maison. Les nouvelles de Galice sont toujours que mes troupes poussent en avant, et ramassent toujours les débris de l'armée anglaise. Parlout où l'ennemi peut se présenter à  six ou sept journées de Madrid, ne le souffrez pas; foncez dessus. J'ai tancé les alcades de ce qu'ils n'ont pas condamné à  mort les garnements qu'on avait arrêtés. Ils se sont justifiés en me disant qu'il leur fallait je ne sais quelle permission du Roi. .II faut faire ce qui est nécessaire pour faire réussir ce procès, et faire de grands exemples. Du côté de Las Rosas, on commet de grands brigandages. Si près de Madricl, vous ne pouvez pas le souffrir. Il faut mettre à la poursuite des coupables deux ou trois colonnes de 50 hommes chacune, et un détachement de cavalerie. Les villes de Toro et de Zamora ayant été prises les armes à la main, j'ai mis sur ces deux provinces sune contribution de 500,000 francs, sur l'une, et d'1 million, sur l'autre. Cela servira à solder l'armée de Galicie. On a confisqué les marchandises coloniales et toutes celles preovenant dea manufactures anglaises. C'est une mesure générale qu'on a prise à Leipzig, à Hambourg et partout. J'ai ici pour 1 million d'argenterie dans la caisse de ma maison, et pour 1,500,000 dans le couvent de Saint-Dominique que j'ai supprimé. Cet argent servira à payer la solde, et j'ai ordonné qu'il fût converti en espèces; mais il serait convenable qi'il fût frappé de votre coin. Donnez l'ordre que le coin soit fait, et que, sur-le-champ, à la Monnaie e Madrid on batte 1 million à votre compte, etc. Si, par la suite, votre monnaie est aisni mise en circulation, je préférerais envoyer en Espagne des lingots pour solder la solde. Ce sera autant de battu à votre coin, ce qui est toujours d'un bon effet politique.

(Lecestre)


Tartas, 19 janvier 1809. (du 18 au 24 janvier 1809, Napoléon est sur la route, se dirigeant vers Paris)

A Alexandre, prince de Neuchâtel, major.général.

Mon Cousin, j'ai ordonné au 10e bataillon de marche composé de conscrits que j'ai rencontré à Yrun de se rendre à St-Sébastien pour y rester jusqu'à nouvel ordre. J'ai ordonné au bataillon du 28e, 58e et 32e, fort de 3000 hommes de se rendre à Madrid par Arranda. Vous donnerez l'ordre qu'arrivés à Madrid on égalise les bataillons et que l'on mette dans ce 4e quelques anciens soldats. Les compagnies sont parties exprès fortes de 180 hommes pour verser sur les autres. J'ai ordonné qu'un détachement de 400 hommes du 38e et de pareille force du 12e se rendent à Madrid pour être incorporés dans les 4e bataillons de ces régiments. Si les cadres du 5e bataillon y sont, il faut les renvoyer. Un détachement de même force des 2e et 4e d'infanterie légère iront joindre le duc de Dalmatie. Faites-les séjourner huit jours à Valladolid d'où on les dirigera par la route la plus courte sur le lieu où est le maréchal.

Voici les chagements à faire à la route : arranger les choses de manière que l'on mette un jour de plus de Bordeaux à Bayonne, que l'on mette deux jours pour aller de Bayonne à Yrun, séjour à Tolosa, Vitoria et Burgos, que toutes les fois qu'un détachement sera destiné pour Madrid, il s'y rende directement en passant par Aranda et l'y faisant séjourner. Mais il faut que ces détachements soient au moins de 400 hommes et qu'ils mettent 3 jours pour aller de Burgos à Aranda. Il est indispensable d'éviter aux détachements qui se rendent à Madrid le grand détour qu'ils font en passant par Vallodolid. Il faut pour cela organiser un bureau d'état-major à Burgos où il sera mieux qu'à Valladolid. La route de Vitoria à Yrun m'a paru bien organisée. Il n'en est pas de même de celle de Burgos à Vitoria. J'ai remarqué que dans toutes les villes il est resté un grand nombre d'hommes d'infanterie et de cavalerie.Il serait bon d'envoyer un adhudant-commandant pour faire rejoindre chacun à son corps.

Faîtes connaître au général Thouvenot que je lui ai envoyé un batailon de plus et qu'il doit occuper en force le port de Passage, mais que je désire que les conscrits soient ecercés deux fois par jour. Moyennant ce bataillon et celui qu'il avait, il diot envoyer à leur corps tous les hommes isolés, mais en veillant surtoit qu'il ne lui manque rien en habollement et armement. Il s'adressera au mar´chal Kellermann pour avoir ce qui lui manquerait. Vous donnerez l'ordre au maréchal Kellermann de lui forunit ce ui lui sera nécessaire.

(Brotonne)


Paris, 24 janvier 1809

Au comte de Champagny, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur de Champagny, voici les instructions que vous donnerez à M. de Saint-Marsan. Vous lui donnerez connaissance des articles secrets du traité avec la Prusse, et vous lui recommanderez de veiller à ce que le militaire de la Prusse n'augmente pas. Cet objet doit constamment occuper sa sollicitude, et il en serait responsable, car mon intention serait plutôt de recommencer la guerre que de tolérer une infraction de cet article important du traité.

Je ne conçois pas la demande que fait M. Clérambault de permettre aux habitants de Koenigsberg de venir acheter du vin à Bordeaux : tous les habitants des pays en paix avec nous le peuvent.

Vous répondrez au gouvernement russe que j'accorde toutes les facilités qu'on pourra désirer pour avoir des médecins et des chirurgiens.

Vous devez faire connaître à M. de Saint-Marsan et à tous mes agents en Allemagne que le voyage du roi de Prusse à Pétersbourg ne me déplaît point et ne peut donner lieu ni à un mauvais effet ni à aucune conjecture politique.

Je n'entends rien aux plaintes du roi de Saxe relativement à ce quil dit me devoir.


Paris, 24 janvier 1809

Au comte de Champagny, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur de Cham,pagny, je reçois votre lettre du 22. Je ne vois pas de difficulté à ce que M. de Strogonoff vienne à Paris et de là retourne à Madrid. En général, on n'a pas eu à se plaindre de lui.

(Brotonne)


Paris, 24 janvier 1809

Au comte de Champagny, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur de Champagny, écrivez à mes ministres à Naples, en Hollande et en Westphalie, qu'ils doivent porter la plus grande attention à ce qu'aucun Français ne sorte de mes troupes ou de mon service et n'entre au service étranger sans mon ordre. Ils ne peuvent aussi porter aucunes décorations étrangères sans ma permission; mon ministre leur ordonnera de les quitter.

Le commissaire de police Mogella, employé dans le royaume ditalie, recevra l'ordre de revenir sur-le-champ.

Vous écrirez à M. de Gallo pour lui faire connaître que je suis extrêmement mécontent de ce que le Roi a attiré à son service des Français sans mon ordre. Ils doivent revenir à leur poste sans délai. Le roi de Naples envoie des décorations de l'Ordre des Deux-Siciles à tout le monde sans ma permission : non-seulement cela est souverainement ridicule, mais cela me déplaît infiniment.

Il faut que les rois, et notarniuent celui de Naples, prennent des mesures pour que les biens appartenant aux Espagnols déclarés traîtres, et que j'ai ordonné de confisquer, soient conservés et tenus à ma disposition, afin qu'on ait à m'en rendre compte.


Paris, 24 janvier 1809

Au comte Mollien, ministre du trésor public, à Paris

Monsieur Mollien , donnez des ordres pour que les achats de la caisse d'amortissement cessent, et laissez le cours des effets publics à lui-même. Aujourd'hui que les affaires d'Espagne sont à peu près terininées et que je suis arrivé à Paris, je n'attache plus aucune importance au cours des effets. Faites dire aux agents de change que les bruits qu'on fait courir sont faux, que je ne pense point à quitter Paris, et qu'il n'y a aucune présomption de guerre. Faites-moi connaître combien la caisse d'amortissement, la banque de France et la caisse de service ont employé depuis mon départ, et sur quels fonds la caisse d'amortissement pourra effectuer cette dépense. J'avais ordonné : l'achat de sept millions en 5 pour 100 pour donner à différents généraux; que la caisse d'amortissemaent n'achetât rien et avançât ce qu'elle avait. Je suppose qu'elle donnera les 5 pour 100 qu'elle a là-dessus.


Paris, 24 janvier 1809

Au général Clarke, comte d'Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Ministre de la guerre, j'approuve la création d'un régiment d'infanterie espagnol. J'approuve que le général Kindelan en soit colonel. Réunissez ce régiment à Nancy; formez-le de la même manière qu'un régiment français; donnez-lui le nom de Royal-Napoléon, afin que les individus qui y entrent sentent davantage l'engagement qu'ils contractent.

J'ai autorisé également les Portugais à recruter parmi les prisonniers de guerre prussiens et espagnols.


Paris, 24 janvier 1809

Au général Clarke, comte d'Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Ministre de la guerre, je n'approuve point que les 4 sous-officiers et les 100 soldats du 55e régiment se soient dirigés de Dunkerque sur Bayonne, ainsi que vous m'en rendez compte par votre lettre du 10 janvier; cela ne devait point se faire sans mon ordre, et ces hommes organisés en marche, devaient attendre, ou, mieux même, se rendre à leur dépôt dans la 16e division militaire. Mon intention est que les hommes soient toujours groupés sur les lieux de passage et dirigés par mon ordre; car il serait ridicule, par exemple, qu'une compagnie de marche arrivât en Espagne, tandis que le corps serait en Italie.

J'ai vu avec peine qu'un bataillon de marche de 500 hommes, composé de malades appartenant au 5e corps, fût envoyé en Espagne. Le théâtre de la guerre est devenu trop vaste pour que les opérations puissent être dirigées par un autre que par celui qui embrasse tout l'ensemble. Il serait ridicule que 2 ou 3,000 malades de la Grande Armée allassent en Espagne. Réitérez les ordres pour qu'aucun homme de la Grande Armée n'aille à Bayonne, que tous soient envoyés à la division Oudinot et mis en subsistance dans les compagnies de grenadiers ou de voltigeurs de leurs régiments, afin de pouvoir être, de là, dirigés à Bayonne. Tous les hommes des régiments qui n'auraient point de compagnies de grenadiers ou voltigeurs dans la division Oudinot devraient être envoyés à Mayence ou sur leurs dépôts. Je vous prie de vous occuper sérieusement de cette partie, car il est dans l'ordre des choses possibles que des régiments qui sont en Espagne soient appelés ailleurs. Règle générale, tout homme partant de l'hôpital doit retourner à son corps, si son corps est sur la frontière prochaine; il doit retourner à son dépôt , si son dépôt est dans la division ou sur la frontière; il doit se réunir au chef-lieu désigné par le ministre et attendre ses ordres, lorsque les convalescents ont à faire une longue route.

Pour le mouvement de la Grande Armée sur l'Espagne , je crois avoir donné tous les ordres de détail, et je suis sûr qu'aucun homme isolé n'a dû être dirigé sur Perpignan.

Toutes les fois que je vous ordonne un mouvement, vous devez prévoir qu'il y aura deux mois après des hommes isolés à diriger, et ne demander des ordres; en attendant, former un dépôt.


Paris, 24 janvier 1809

Au général Clarke, comte d'Hunebourg, minsitre de la guerre, à Paris

Je reçois la copie de la lettre de M. Herman (consul général de France à Lisbonne, puis secrétaire général attaché au commandant de l'armée de Portugal). Je ne sais ce que veulent dire ces mystères. Par conséquent, au lieu de dire dans des conversations ce qu'il n'est pas nécessaire que tout le monde sache, il devrait venir en faire le rapport. Demandez-le lui. Il faut distinguer ce dont il a la preuve et ce qui de sa part n'est que conjecture.

(Brotonne)


Paris, 24 janvier 1809.

Au général comte Dejean, ministre directeur de l'admiistration de la guerre, à Paris

Monsieur le Ministre, je reçois votre lettre du 10. Je ne crois pas que 68,000 capotes soient arrivées à Bayonne avant le 15 janvier, ni 10,000 à Perpignan. Dans les 6,200 distribuées à différents corps, j'en vois 200 pour le 46e régiment, qui n'a jamais été à Paris; je ne conçois pas bien d'où peut venir cette distribution.

Le commissaire Barbier n'a pas pu dire que 36,000 capotes ont pu être distribuées à Bayonne ; il n'a pas osé me le dire à moi, et ce, par une bonne raison, c'est que le garde-magasin n'avait point de registres. Cet ordonnateur, qui paraît avoir du zèle, s'occupait à y rétablir l'ordre, mais ne savait rien.

Je vois que vous avez 48,000 capotes en confection; elles ne seront pas arrivées à l'armée avant le mois d'août, et je n'en aurai plus besoin. Il ne faut pas moins les faire. Mais, en supposant même que les 134,000 qui sont en route ou en confection arrivent, cela n'aurait point rempli mes intentions, car j'entendais les avoir en novembre et non en avril.

Tous les états que vous m'avez envoyés m'ont paru faux. Jamais les envois de Paris n'arriveront qu'autant qu'ils partiront en convois sous la direction d'un gendarme; alors les ordonnateurs pourront lever les obstacles. Rien ne marche seul; c'est là une des erreurs de l'administration. Les transports militaires ont mal fait leur devoir; j'aurai 20,000 malades de plus, et je n'en dépenserai pas moins d'argent.


Paris, 24 janvier 1809. 

Au général comte Dejean, ministre directeur de l'admiistration de la guerre, à Paris

Monsieur le Ministre, je vois, par votre lettre du 11 janvier, que 40,000 livres de quinquina sont arrivées à Bayonne, de Santander. Mais vous ne me faites point connaître la quantité d'un autre envoi qui a dû être fait il y a six mois. Faites-moi connaître ce qu'il est devenu. Il faut en remettre au ministre de l'intérieur la quantité qui lui revient, puisque les Hôpitaux civils font le service militaire; faites venir le surplus à Paris. Il sera important d'en avoir en réserve pour l'ile de Cadzand, Flessingue et la Belgique.


Paris, 24 janvier 1809

Au général comte Dejean, ministre directeur de l'administration de la guerre, à Paris

Monsieur le Ministre de l'administration de laguerre, je désire que les capotes ne partent pas sans mon ordre, car envoyer des capotes en Espagne, passé les premiers jours de mars, c'est vouloir les perdre. Je préfère avoir mes magasins de Bayonne et de Paris bien garnis, de manière à pouvoir, si cela était nécessaire, en donner au commencement de septembre.

(Brotonne)


Paris, 24 janvier 1809

A Joseph Napoléon, roi d'Italie, à Paris

Mon Frère, je vous envoie une lettre de M. Champagny, où vous verrez des détails relatifs aux affaires d'Espagne. Je suis arrivé ici bien portant, le 23, à 8 heures du matin. Tout va ici fort bien.

(du Casse)


Paris, 25 janvier 1809

Au comte de Champagny, ministre des relations extérieures

Je vous renvoie votre portefeuille. Écrivez à mon ministre en Westpahlie qu'il entre dans de grands détails sur l'administration du pays; que ses lettre ne seront point vues. Que ses dépêches parlent de la conduite du roi, de celle des ministres, enfin des opérations du gouvernement, tant pour instruire l'Empereur que pour le mettre à même d'éclairer la marche de ce gouvernement, qui ignorera d'où viennent les renseignements. Indépendamment des rapports signés et en règle qu'il vous adresse, demandez-lui d'y joindre une feuille non signée contenant les bruits vrais ou faux de la ville et une espèce de chronique du pays. Il faut également prescrire à mes ministres dans les différentes jours de suivre cet usage. C'est ainsi que fait M. de Caulaincourt, qui envoie par tons les courriers un petit bulletin des nouvelles de société et des bruits qui tendent à faire connaître l'esprit du moment.

P.S. - J'ai lu avec plaisir le bulletin n° 9 du sieur Reinhard, du 15 janvier. Je n'approuve point sa délicatesse de ne pas vouloir écrire en chiffres. Recommandez-lui, au contraire, de ne pas négliger d'écrire toujours en chiffres, et d'expédier des courriers pour faire connaître les actes du gouvernement. En se servant tous les jours de chiffres, cela paraîtra tout simple. D'ailleurs, j'ai un ambassadenr à Cassel, c'est pour savoir ce qui se passe en Westphalie .

(Lecestre)