26 - 31 Janvier 1809


Paris, 26 janvier 1809

Au comte Mollien, ministre du trésor public, à Paris

Monsieur Mollien, présentez-moi dimanche prochain un travail qui me fasse connaître la situation des finances au ler janvier 1809, avec des états à l'appui, en y comprenant tout ce qui est relatif à la caisse d'amortissement et à la Grande Armée. Je désire voir dans ce mémoire tout ce qui reste à solder et à recouvrer sur les années antérieures. Ainsi vous me présenterez le budget de 1807 tel qu'il a été définitivement arrêté par la loi, en indiquant ce qui en était rentré au 1er janvier 1809, et les payements et recouvrements qui restent à faire, sur ce même budget, ainsi que tout ce qui est relatif aux bons de la caisse d'amortissement. Vous suivrez la même marche pour le budget de 1808. Celui de 1809, vous le mettrez sous mes yeux tel que je l'ai arrêté en recettes et eu dépenses. Vous y joindrez, dans un même cadre, tous les budgets des différents ministères, tels que vous les avez au trésor. La quatrième partie aura pour objet la caisse d'amortissement et la Grande Armée. Vous indiquerez ce qui est rentré à la caisse des fonds provenant de la troisième coalition, ce qui en est sorti , ce qui lui reste à recouvrer. Vous suivrez le même système de travail pour la quatrième coalition. Dans ces derniers états , vous comprendrez ce qui est entré non-seulement dans la caisse, mais aussi dans les comptes des receveurs. Il sera nécessaire de me faire connaître en même temps la situation des recettes et ce qui resterait encore de dépenses à faire au 1er janvier 1809, ainsi que le budget de la Grande Armée dans les années 1806 , 1807, 1808 et 1809 , et de l'armée du Rhin pendant l'aannée 1808, en distinguant ce qui doit être soldé par la Grande Armée et ce qui doit l'être par le trésor. Vous parviendrez plus facilement à franchir les difficultés de ce travail en vous concertant avec M. Daru et M. la Bouillerie. Je désire un tableau exact de ma position au ler janvier 1809 et de l'état où la caisse se trouve placée, afin de juger d'un coup d'oeil quelles sont mes ressources et leurs éléments. Vous joindrez à ce mémoire les différents arrêtés et décisions que j'ai donnés, et qui ont servi à régler les comptes des années 1806 , 1807 et 1808. Vous y comprendrez aussi l'état des sommes que j'ai avancées, soit pour les canaux, soit à différentes villes, pour que je puisse voir ce qui me reste de disponible pour d'autres opérations.

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P. S. Si cela n'était pas possible pour dimanche, que ce soit pour huit jours après.


Paris, 26 janvier 1809

Au maréchal Victor, duc de Bellune, en marche sur Tolède

Je reçois votre lettre du 13 janvier d'Alcazar. J'ai vu avec plaisir le beau et heureux résultat de votre manoeuvre contre l'ennemi. J'attends avec impatience d'apprendre quel parti vous avez fait au reste du corps de l'Infantado.


Paris, 26 janvier 1809

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie, à Milan

Mon Fils, vous avez dû recevoir une lettre que je vous ai écrite de Valladolid et qui vous a été envoyée de Bayonne par un courrier. Comme l'Autriche ne fait pas de mouvements, il ne faut pas en faire, du moins d'ostensibles. Écrivez au général Marmont que je suis arrivé à Paris; que l'Autriche ne fait pas de mouvements, comme on l'avait cru; qu'il faut cependant se tenir alerte, mais ne rien faire de prématuré. De nombreux détachements passent les Alpes pour vous rejoindre; de plus nombreux encore partiront en février pour renforcer vos dépôts, afin que les cadres, comme je vous l'ai plusieurs fois fait connaître, soient complets, et qu'au mois de mai ou de juin les régiments puissent entrer en campagne au grand complet. Il me tarde bien d'apprendre que les cadres des 4e bataillons des régiments de l'armée de Dalmatie et de Corfou soient arrivés en Italie.


Paris, 27 janvier 1809

Au comte de Champagny, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur de Champagny, vous ferez connaître au ministre du roi de Naples que le Roi a mal fait d'envoyer des consuls dans les États d'Autriche, son ministre n'ayant pas été reçu et la cour de Vienne n'ayant pas envoyé de ministre à Naples; cette démarche est d'autant plus inconsidérée que l'Autriche ne l'a pas encore reconnu ; qu'il doit se conduire avec plus de prudence et ne pas s'exposer à essuyer des affronts gratuits.

Je crois vous avoir déjà mandé que je ne voulais gêner en rien le roi de Saxe pour le remboursement des bons, et que je désirais faire ce qui est agréable à ce prince. Parlez-en à M. de Senft.


Paris, 27 janvier 1809

Au comte Gaudin, ministre des finances, à Paris

Je vous prie de me faire relier en un seul volume vos comptes des finances, depuis le 18 brumaire. Vous aurez soin, à la une de chaque compte, de faire joindre les lois de finances pour ledit service. Vous savez qu'il n'y avait pas une loi unique et quelle n'était pas portée dans vos comptes. Vous ferez mettre un onglet à chaque année. Faites prendre une espèce de reliure telle que le volume puisse être d'une grosseur indéterminée.


Paris, 27 janvier 1809. 

Au général Clarke, comte d'Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

J'ai lu avec intérêt les deux beaux et grands états que vous m'avez envoyés. Je désire que vous me fassiez connaître quelle marque de ma satisfaction je puis donner à cet employé. Il y a là dedans une grande exactitude. Je n'en ai pu faire qu'une lecture, mais je n'y ai trouvé aucune faute.


Paris, 27 janvier 1809

Au général Clarke, comte d'Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Je suis fâché qu'on ait irnprimé le décret relatif à l'organisation de l'armée. Je ne vois pas la nécessité d'instruire l'Europe que mes régiments sont à 140 hommes par compagnie et de 3,000 hommes présents. Il était évident que ce décret n'était pas fait pour être imprimé, mais pour vous servir de base. C'est une gaucherie qui a été faite.

Je lis également dans un journal que 5 hommes par département sont fournis pour les vélites de ma Garde. Faites voir si , dans l'original, on ne se serait pas trompé ; c'est fusiliers que j'ai voulu dire.


Paris, 27 janvier 1809

Au général Clarke, comte d'Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Vous trouverez ci-joint un ordre que vous ferez exécuter. Vous me proposerez un nouveau commandant pour le fort de Bouillon. Donnez des ordres pour qu'il n'y ait aucun espagnol à proximité de ce fort.

ORDRE

L'Empereur ordonne que le commandant du château de Bouillon soit suspendu de ses fonctions, arrêté et conduit à Paris pour rendre compte de sa conduite par devant le ministre de la guerre et des raisons qui l'ont porté à permettre aux prisonniers de l'État de sortir du château, malgré les ordres réitérés qu'il a reçus et à les laisser aisni entretenir des correspondances qu'il importait qu'ils n'eussent pas.

(Brotonne)


Paris, 27 janvier 1809

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

Je reçois votre lettre du 19. J'y vois que rien n'est prêt pour expédier ce qu'il y a bien du temps que je vous ai demandé de me tenir prêt, une expédition à Toulon. Quand je cesse d'avoir les yeux sur une chose, rien ne marche. Comment ces transports et écuries que j'avais demandés ne sont-ils pas prêts ? Je pense que Willaumez peut mener avec lui deux frégates.

Je vous avais chargé d'envoyer quelqu'un à Alger. Je sais que cela a été fait. Faites-moi connaître ce que cet agent est devenu et le mémoire qu'il a remis.

Je préfère que la frégate le Niemen se rende à l'île de France.


Paris, 27 janvier 1809

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

Monsieur le vice-Amiral Decrès, je vous renvoie les pièces relatives à l'escadre russe. Rendez-vous chez M. de Champagny avec l'état des bâtiments russes qui sont à Trieste, à Corfou, à Venise. Vous ferez demander par M. de Champagny une conférence à de Romanzof et Kourakine, et vous leur communiquerez l'état des bâtiments russes, le rapport des visites qu'on en a faites, et la réponse des officiers. L'empereur de Russie a mis ses escadres sous mes ordres et m'a laissé maître de les employer de la manière la plus avantageuse pour lui. Le ministre de la marine russe m'a même fait dire par Caulaoncourt qu'il était convenable qu'ils fussent désarmés. Là-dessus, vous analyserez vaisseau par vaisseau , observant qu'ils sont tout à fait inutiles dans l'Adriatique; vous proposerez d'acheter sur estimation les petits bâtiments bons pour ma marine italienne. Pour les autres, si l'amiral russe veut les conduire à Pola ou à Ancône, vous proposerez de les acheter également. Si enfin l'amiral ne veut les conduire ni à Pola ni à Ancône , vous proposerez de laisser, sur chacun de ces bâtiments et sur ceux qui seraient trop grands pour pouvoir entrer à Venise, une vingtaine d'hommes pour en garder la carcasse. Les munitions et rechanges qui seraient de quelque utilité seraient chargés sur les petits bâtiments et transportés à Venise. Quant aux équipages, on ferait l'inventaire du nombre des marins, et on les enverra à Venise, où l'on attendra de connaître les intentions de l'empereur sur leur destination. Veut-il les avoir en Russie pour les employer sur la Baltique ? On les lui enverra. Veut-il qu'ils soient envoyés à Toulon pour s'exercer sur mon escadre ? Je les emploierai comme il voudra. Par ce moyen , une source considérable de dépenses inutiles pour la Russie, puisque les bâtiments empirent chaque année, sera tarie, et les équipages qui sont inutiles, seront employés. Il en serait de même pour ceux qui sont à Corfou. Je les prendrai sur estimation, et on enverra les équipages à Venise pour en faire ce que voudra l'empereur. Si l'on convient de cela, on en dressera procès-verbal signé de vous et de MM. de Romanzof et Kourakine, et j'enverrai des ordres. M. de Romanzof écrira de son côté pour qu'on s'y conforme et pour faire sentir à l'amiral l'avantage réel qui résultera de cet arrangement pour son maître. Si ces bâtiments gagnent un port italien , je désirerais que ce fût Ancône. Il est bien temps de finir ces trois affaires. Quant aux vaisseaux russes qui sont à Toulon à dater de janvier, ils seront nourris, soldés et entretenus par moi sauf à porter ces dépenses au compte double que nous avons.


Paris, 27 janvier 1809

A Jérôme Napoléon, roi de Westphalie, à Cassel

Mon Frère, je vous remercie de ce que vous me dites à l'occasion de la nouvelle année. Ne doutez pas des voeux que je fais pour votre bonheur; ils me sont inspirés par les sentiments que je vous porte et qui me seront toujours chers.


Paris, 27 janvier 1809

A Catherine, reine de Westphalie, à Cassel

Ma Soeur, je reçois avec plaisir les voeux que vous faites pour moi au commencement de cette année. L'intérêt que je rends à votre bonheur n'est pas moins sincère.; l'affectionque je vous porte doit vous en convaincre, et il m'est doux de saisir cette occasion de vous en renouveller l'assurance.


Paris, 27 janvier 1809

Au prince Borghèse, gouverneur général des départements au delà des Alpes, à Turin

Je reçois votre lettre du ..... Je suis fort aise que le quina que je vous ai fait envoyer vous ait été utile. Je suppose que les détachements de conscrits ne partiront pas de votre gouvernement sans mon ordre. Ayez soin que les recrues qui passent soient bien traitées au mont Cenis, et aient du vin. Vous les passerez en revue à leur arrivée à Turin, et laissez-les, s'il le faut, se reposer un, deux et trois jours, lorsqu'ils seront fatigués. C'est avec ces soins que l'on conserve la santé du soldat; deux ou trois jours de repos à un homme fatigué lui évitent une maladie.


Paris, 27 janvier 1809

A Joseph Napoléon, roi d'Espagne, à Madrid

Mori Frère, je reçois votre lettre du 15 à onze heures du soir, et celle que me porte un aide de camp du maréchal Victor. J'attends d'apprendre les suites du combat d'Alcazar, et qu'il a atteint et dispersé le reste de l'armée de I'Infantado.

L'empereur de Russie vous a écrit une lettre que vous envoie M. de Romanzof. M. de Strogonof a reçu ses lettres de créance; il est arrivé à Vienne, il va se rendre à Paris, d'où il retournera à Madrid. Vous pouvez le faire annoncer dans vos journaux.

J'ai ordonné la formation d'un régiment espagnol, dont j'ai donné le commandement au général Kindelan. Je le fais réunir et former à Nancy.

Laissez venir les prisonniers en France; ne gardez que ceux auxquels vous croyez pouvoir vous fier. Il vaut mieux en former en France des régiments, qui pourront ensuite vous être envoyés ; ce qui ne doit pas empêcher la formation des régiments que je vous ai recommandée.

Ma prompte arrivée à Paris a déjà fait changer le ton de l'Autriche, et la peur a succédé à l'arrogance et à l'extrème confiance. La conscription se lève avec activité. De nombreux détachements sont en marche pour l'Italie et le Rhin.

Faites connaître au maréchal Victor que j'ai accordé les grâces qu'il a demandées pour le général Villatte , pour le colonel Meunier, pour le chef de bataillon Regeau, pour les colonels Mouton et Jamin, et Rouzès, du génie, pour l'adjudant commandant Aymé, et pour les chefs d'escadrons Chateau, Auguste et François Leroy-Duverger, etc.

Dans les 12,000 boulets qui se trouvent parmi les objets d'artillerie trouvés à Zamora et dont l'état est ci-joint, il peut se trouver des boulets de 24 nécessaires pour les pièces qui sont à Madrid. Les quatre mortiers sont bien nécessaires aussi pour armer les fortifications de Madrid.


Paris, 27 janvier 1809

Au comte Bigot de Préameneu, ministre des cultes, à Paris

Monsieur Bigot Préameneu, fai^tes donner au cardinal-archevêque de Naples, à compter du 1er décembre 1808, 3.000 francs par mois et écrivez à Naples pour que ces fonds vous soient remboursés sur les revenus de l'archevêché; du moment où cet archevêque aura prêté serment, il jouira de tout son revenu et il se trouvera fort à son aise en France.

(Brotonne)


Paris, 27 janvier 1809

Au comte Mollien, ministre du trésor public, à Paris

Donnez ordre au payeur qui est à Madrid de faire fondre et convertir en piastres, ou en toute autre monnaie d'Espagne à l'effigie du roi Joseph, toute l'argenterie qu'il a. Concertez-vous avec le ministre des finances pour savoir s'il ne vaudrait pas mieux, et si cela ne serait pas plus tôt fait, de faire venir un coin et de fabriquer cette monnaie ici. Il faudra s'écarter le moins possible du type actuel des monnaies d'Espagne.

Burgos manque d'argent; je ne sais pourquoi le payeur ne tient pas celte caisse au courant. Pour le moment, entendez-vons avec le sieur Estève, pour que l'argent existant dans mon trésor à Valladolid soit versé dans la caisse du payeur de Burgos, et vous en tiendrez compte ici au sieur Estève. Vous donnerez ordre pour qu'une somme de 200,000 francs soit employée à payer le transport des laines à Bayonne, acompte sur les 500,000 francs. Accompagnez votre dépêche d'une lettre d'Estève pour son préposé à Valladolid

(Lecestre)


Paris, 27 janvier 1809

Au comte Fouché, ministre de la police générale, à Paris

Vous ne faites point la police de Paris, et vous laissez à la malveillance le champ libre pour faire courir toute espèce de bruits. Faites surveiller les propos qui se tiennent chez le nommé Citerni, traiteur, place du Palais de justice, et au café de Foy. Occupez. vous de la police, et non d'affaires étrangères à votre ministère. Un ministre de la police doit être responsable des bruits qu'on fait courir pour égarer la population. Si vous vous occupiez un peu plus de cette partie de l'administration publique, vous trouveriez les fils des intrigues des agents qui excitent à Paris ce système de malveillance. Faites-moi connaître dans un rapport les parties de la ville où se tiennent les plus sots propos, et prenez des mesures pour les réprimer . Vous devriez me tenir au courant de tout ce qui se dit et se fait à Paris, et je n'apprends cela que par les autres.

P.S. - Les environs de l'Hôtel de ville sont pleins de gens qui sèment de sots bruits. Pourquoi n'avez-vous pas là des hommes qui les démentent et en fassent sentir l'absurdité ? Ce moyen doit marcher de pair avec l'arrestation des propagateurs.

(Lecestre)


Paris, 28 janvier 1809

Au général Clarke, comte d'Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Genéral Clarke, beaucoup de conscrits passent dans le Mont-Blance, pour se rendre en Italie ; faites régler la route d'étapes, j'ai dans l'idée que la route actuelle est mal distribuée, de sorte qu'il y a de trop fortes journées. Mon intention est qu'il y ait un séjour à Saint-Jean-de-Maurienne, et que le passage du mont Cenis se fasse en deux jours, pour coucher à l'hospice. Il ne faut pas qu'il passe plus de 700 à 800 hommes à la fois, qui doivent pouvoir se loger là. Veillez à ce que chaque homme ait une bouteille de vin et la soupe. Donnez ordre au gouverneur général d'en passer la revue lui-même à Turin et de leur donner deux ou trois jours de repos, si cela est nécessaire. Je suppose qu'ils ont un séjour à Chambéry. Autant il est nécessaire de faire de grandes marches dans d'autres circonstances, autant il est nécessaire de n'en faire aujourd'hui que de petites.

Écrivez au commandant de la 7e division militaire de prendre des mesures et de se concerter avec le maire de Lans-le-Bourg pour que le passage du mont Cenis se fasse avec la prudence convenable, et que je ne perde personne.


Paris, 28 janvier 1809

Au comte de Champagny, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur de Champagny, je suis surpris que les landammans d'Affry et Ruttiman ne m'aient pas écrit, selon l'usage, au sortir de leur magistrature; je ne puis concevoir pourquoi ils ne l'ont pas fait. J'ai lu les lettres du 20 et du 21 de Berne. Les renseignements que donne le sieur Talleyrand  (il s'agit d'Auguste de Talleyrand, envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire près la Confédération Helvélique) sont pas suffisants; j'en voudrais de plus précis. Faites venir le ministre de Suisse et parlez-lui de cela. Je désire avoir les pièces originales et un rapport qui m'en aide l'explication. Mon intention n'est pas d'intervenir dans les affaires intérieures de la Suisse, mais celles-ci sont assez graves pour que je désire m'en mêler. Rien n'est moins clair que la lettre du sieur Talleyrand du 21. Cette affaire est donc à examiner. Je suis fàché que mon ministre ait pris couleur dans une affaire comme celle-là. Il me semblait que M. Ruttiman était un homme du parti démocrate , et même M. Mousson. Comment se trouve-t-il arrêté par le parti démocrate de Lucerne ? Je regrette beaucoup d'être aussi mal éclairé. Les dépêches du sieur Talleyrand sont on ne peut plus insignifiantes. Faites-lui connaître que, sur des affaires de cette importance, ce n'est pas son opinion qui peut me décider, mais la mienne ; et je ne forme mon opinion que sur une connaissance approfondie des faits , appuyée des pièces originales.


Paris, 28 janvier 1809

Au général Clarke, comte d'Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Général Clarke, vous avez dû recevoir le décret par lequel j'ai ordonné la formation de deux régiments de tirailleurs de ma Garde, forts de 1,600 hommes chacun. Mon intention est que, pour la formation de ces régiments, vous donniez l'ordre que les grenadiers et chasseurs choisissent, sur les 4,500 hommes qu'ils vont avoir avec la levée des départements de la Loire-inférieure et des Deux-Sèvres, 100 hommes par compagnie, c'est-à-dire 1,600 hommes, en prenant les meilleurs et les mieux disposés. Il restera donc à peu près 3,000 hommes, que mon intention est de distribuer : d'abord 1,200 hommes pour compléter les compagnies de grenadiers et de voltigeurs de la division Oudinot à 140 hommes par compagnie, présents, en comprenant cependant les hommes détachés, mais non ceux aux hôpitaux; les 1,800 autres seront employés selon les circonstances. Je désire donc que vous fassiez dresser l'état des compagnies du corps d'Oudinot qui ont besoin de renforts , et que vous fassiez choisir des hommes de petite taille pour les voltigeurs et les hommes de la plus grande taille pour les grenadiers; que les hommes destinés à l'infanterie légère soient habillés ici, avec l'uniforme de cette arme et des boutons des régiments auxquels ils seront affectés, des shakos et les autres petites distinctions qu'a le corps d'Oudinot; et qu'ainsi organisés, ces hommes puissent partir vers le 15 février pour joindre ce corps. Les habits qu'auraient déjà ces conscrits pourraient servir pour les conscrits qui vont arriver.

Mon intention est d'appeler cette année 10,000 conscrits à ma Garde, pour les répartir ensuite sur les différents points. Donnez ordre que les trois quarts soient habillées avec l'uniforme d'infanterie de ligne ordinaire, et l'autre quart avec l'uniforme d'infanterie légère. Quant aux boutons, on leur donnera ceux des tirailleurs et des fusiliers de la Garde, sauf, quand ces hommes seront envoyés à des régiments, à ôter leurs boutons et à les remplacer par des boutons de leur régiment. Il faut, pour cela, que la Garde ait des boutons de tous les numéros.


Paris, 28 janvier 1809

A Joseph Napoléon, roi d'Espagne, à Madrid

Mon Frère, j'ai reçu vos lettres du 15 et du 16. Je vous prie de numéroter désormais vos lettres; ainsi, la première que vous m'écrirez après avoir reçu celle-ci portera le numéro 3. J'ordonne qu'on n fasse autant de mes lettres. Par c moyen, on sera certain qu'il ne s'en perdra point. La suppression de votre apanage est une mesure générale. On en a fait la remarque, et je n'ai as voulu qu'ils parussent dans les comptes. Vous ne devez avoir aucune inquiétude pour cela.

(du Casse)


Paris, 28 janvier 1809

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie, à Milan

Mon Fils, je reçois vos lettres relatives au paysan Pesserini. Il faut le faire réclamer par mon consul à Trieste, et, si l'on fait des difficultés, faire arrêter un homme important de Goritzia. Vous ferez demander des explications par le général de division le plus près au générl Zach, pour savoir si les officiers peuvent aller librement à Trieste et que vous envoyez exprès des officiers pour vous en rendr compte. Vous ajouterez qu'étant en paix mes officiers peuvent aller partout, que, s'il en était autrement, j'ordonnerai des représailles pour toute l'Italie et la France

(prince Eugène)


Paris, 29 janvier 1809

DÉCISION

Le général Clarke, ministre de la guerre, fait un rapport à l'Empereur concernant le général Beker, récemment mis à la retraite sur sa demande et réclamant de nouveau du service. Le ministre propose de lui confier le commandement de la 25e division militaire. Il faut me représenter la lettre qu'a écrite cet officier général. S'il est vrai qu'il ait demandé un congé et, si on ne lui accorde pas, sa retraite, c'est un acte d'insubordination que je ne puis souffrir. La carrière militaire est trop glorieuse, et je récompense trop bien ceux qui m'y ont servi, pour qu'il soir permis de s'y conduire de la sorte. J'estime cet officier sous plusieurs rapports, et je n'aurais point pris cette décision sans des motifs graves; je ne m'en souviens pas en ce moment. Je n'entends pas accoutumer les officiers à demander leur retraite dans un moment d'humeur, et à redemander du service quand cette humeur est passée. Ces caprices sont indignes d'un honnête homme, et la discipline militaire de les comporte pas.

 Paris, 29 janvier 1809

Au comte de Champagny, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur de Champagny, je vous envoie deux lettres du prince Eugène; vous pourrez les communiquer en original à M. de Metternich. Vous lui demanderez ce qu'il faut conclure de là, si mes officiers n'ont pas le droit d'aller à Trieste, et s'il est défendu à mes sujets d'aller en Autriche. Vous lui ferez connaître que j'attendrai des explications avant d'user de représailles, et que, en cas de refus, les Autrichiens qui pourraient me tomber sous la main me répondront de la vie de ce malheureux paysan.


Paris, 29 janvier 1809

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

Monsieur Decrès, mon intention est que vous donniez ordre sur toutes les côtes où il y a des croisières anglaises, et particulièrement sur celles de Boulogne, de tirer trente coups de canon en réjouissance de la victoire qui a été remportée sur les Anglais et de leur expulsion d'Espagne. Vous ordonnerez aussi de faire les démonstrations de pavillons d'usage entre les marins. Vous donnerez les mêmes ordres sur les côtes de la Méditerranée à toutes mes escadres. Vous annoncerez en peu de mots qu'une armée de 36 à 40,000 Anglais , commandée par les généraux Moore et Baird, et à laquelle s'était réunie une armée espagnole, a été poussée l'épée dans les reins pendant cent cinquante lieues ; que nous lui tavons tué 2,000 hommes , que nous lui en avons pris 7,000, ses hôpitaux et ses bagages, qu'elle a coupé les jarrets à plus de 6,000 chevaux , et qu'elle a été contrainte d'abandonner les Espagnols que commandait la Romana, qui ont été entièrement détruits.


Paris, 29 janvier 1809

Au comte Fouché, ministre de la police géne´rale, à Paris

Je ne sais pas pourquoi on parle toujours de l'histoire de la Vendée. La Gazette de France ne sait pas ce qu'elle dit. Est-ce pour encourager une nouvelle Vendée qu'on ne cesse de parler de l'ouvrage de M. de Beauchamp ? Faîtes témoigner mon mécontentement sau rédacteur de la Gazette de France.

(Brotonne)


Paris, 29 janvier 1809

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie

Mon fils, mes armées d’Espagne ayant remportédes avantages considérablcs sur l’armée anglaise, qu'elles ont poursuivie l'épée dans les reins pendant l’espace de cent cinquante lieues, lui ayant fait 6,500 prisonniers, pris un grand nombre de canons, tous ses magasins et ses bagages, l’ayant forcé à couper elle-même les jarrets àr sa cavalerie forte de 6,000 chevaux, l’ayant, enfin obligée d’abandonner l’Espagne et La Corogne, et de se réfugier en Angleterre, ayant entièrement détruit l'armée commandée par La Romana qui s'était réunie à elle ; mon intention est que vous ordonniez qu’il soit tiré soixante coups de canon, dans tous mes ports et forteresses frontières, en réjouissance de cet événement. Pour faire comprendre l'objet de cette réjouissance, vous ferez faire par votre ministre de la guerre et de la marine une circulaire annonçant ces avantages remportés sur l’armée anglaise, la destruction des débris dc l'armée de La Romana et la soumission du royaume de Léon, de la Galice et des cinq sixièmes de l'Espagne.

(prince Eugène)


Paris, 31 janvier 1809

A Louis Napoléon, roi de Hollande, à La Haye

J'ai reçu à Paris votre lettre du 20 janvier. Il me semble que la marine hollandaise déchoit tous les jours; bientôt vous n'aurez plus rien. On m'assure que vous licenciez vos matelots; cela est un malheur.

Vous aurez vu, par les journaux venus de Paris, les derniers bulletins. De 40,000 hommes qui composaient l'expédition anglaise, plus de la moitié ont été pris, tués ou perdus.Ils ont abandonné ou détruit leurs bagages, chevaux, artillerie. Au combat du 16, le général en chef, John Moore, a eu le bras emporté par un boulet, au défaut de l'épaule; il est mort deux heures après. Sir Baird a eu deux coups de fusil dans le bras ; on lui a fait l'amputation. Il paraît que le général Hope a été trouvé sur le champ de bataille avec cinq ou six colonels et les cadavres d'une centaine d'officiers. La nuit, ils se sont embarqués avec la plus grande confusion.

Je serais bien envieux de savoir ce que les Anglais diront de tout cela. S'il vous arrive des journaux, envoyez-les-moi.


Paris, 31 janvier 1808

DÉCISION.

Le vice-amiral Decrès, ministre de la marine, rend compte à l'Empereur des observations de l'amiral Ganteaume sur la difficulté de protéger les côtes des 6e et 7e arrondissements (Toulon et la Spezia).

Cet amiral pense qu'on pourrait hasarder la sortie d'une division; mais il voudrait qu'elle ne fut pas composée de monis de deux vaisseaux et de deux frégates. Il ajoute qu'il ne croit pas devoir exécuter cette sortie sans une autorisation spéciale.

L'amiral Ganteaume doit avoir l'ordre de faire sortir les bâtiments qu'il veut, et quand il veut. Il n'a pas besoin d'un ordre particulier pour cela. Il est extrêmement ridicule qu'avec une escadre aussi considérable que celle qu'il a à Toulon, mes côtes soient bloquées par des frégates ou des croisières isolées. J'ai donné le droit à l'amiral Ganteaume de faire sortir de petitesdivisions; s'il l'avait fait, il aurait pris plusieurs vaisseaux, et l'ennemi se serait dégoûté de serrer de si près nos côtes. Dans une mer où tous les ports sont à nous, et quand le port de Toulon n'est pas hermétiquement fermé, on devrait prendre tous les jours des bâtiments anglais, et obliger l'ennemi à changer de système, c'est-à-dire à se tenir loin des côtes.