24 – 31 mai 1809

Ebersdorf, 24 mai 1809

A Louis-Charles-Ausguste, prince royal de Bavière, commandant la 1e division du 7e corps de l'armée d'Allemagne, à Salzburg.

Je reçois votre lettre Je vous remercie de ce que vous me dites. Je n'ai point de nouvelles du duc de Danzig depuis le 16.  Je vous prie de me faire connaître la situation des ennemis du côté de Rastadt et d'Innsbruck, et d'envoyer des postes de cavalerie pour contenir le pays jusqu'au delà de Lambach. Je ne sais pas si le duc de Danzig est entré à Innsbruck.

Le 22, j'avais passé le Danube et j'étais sur le point de détruire ce qui restait de forces au prince Charles: une crue du Danube a rompu mes pontsce qui a empêché le passage d'une partie de l'armée et de mes parcs. J'ai donc dû me borner à garder ma position et à réparer les ponts. L'ennemi s'en étant aperçu, il s'est engagé une assez vive canonnade, où la perte a été considérable de part et d'autre. Une perte qui m'a été surtout sensible est celle du duc de Montebello; vous savez l'amitié que je porte à ce maréchal ; cependant il est hors de danger. J'ai été bien aise de vous prévenir de tout ceci, pour que de mauvais bruits que répandrait l'ennemi ne vous fassent point concevoir d'inquiétude. Je suis encore occupé aujourd'hui à rétablir mes ponts; ce qui est une grande affaire, car cette rivière est fort large et fort difficile.


Ebersdorf, 23 mai 1809 

Au comte Fouché, ministre de la police générale, à Paris.

Je reçois votre lettre du 19. Vous avez vu par le bulletin ce qui s'est passé ici. La crue du Danube m'a privé de mes deux ponts pendant plusieurs jours. Je suis parvenu enfin  à les rétablir ce matin. Le duc de Montebello en sera quitte pour une jambe de bois. Durosnel a été enlevé par un coup de canon, portant un ordre. Vienne est toujours fort tranquille.

Je suppose qu'on aura enfin mis dans les journaux de Paris la déclaration de guerre de la Russie à l'Autriche.


Ebersdorf, 25 mai 1809

Au général Songis, commandant l'artillerie de l'armée d'Allemagne, à Ebersdorf

Je suis d'autant plus fondé à penser que les ponts de radeaux réussiront parfaitement ici, que je me rappelle que, dans les campagnes de 1740, le comte de Saxe, depuis maréchal, fit construire deux ponts de radeaux à Linz.


Ebersdorf, 25 mai 1809

Au général Songis, commandant l'artillerie de l'armée d'Allemagne, à Ebersdorf

Je vous ai adressé hier des ordres, Monsieur le Général Songis, pour mettre à la disposition de M. le maréchal duc d'Auerstaedt trente pièces de canon de 3 ou de 5, autrichiennes, avec trente caissons, pour être attachées aux régiments de son corps d'armée, à raison de deux par régiment.


L'Empereur ordonne aussi qu'il soit attaché deux pièces d'artillerie de 3 ou de 5, autrichiennes, à chaque demi-brigade du corps du général Oudinot. En conséquence, l'intention de l'Empereur est que vous fassiez remettre, dans la journée de demain, à la disposition de M. le général  Oudinot, vingt-quatre pièces de 3 ou de 5 et vingt-quatre caissons, chargés chacun de 150 à  200 coups, Le général Oudinot se procurera dans son corps les canonniers pour servir ces pièces ainsi que les attelages, et dans toutes les circonstances ces pièces défileront avec l'aigle de la demi-brigade.

Sa Majesté ordonne pareillement que vous fassiez remettre à la disposition du duc de Rivoli vingt-quatre pièces de canon de 3 ou de 5, autrichiennes, et vingt-quatre caissons chargés comme les précédents, pour être attachés aux douze régiments français de son corps d'armée, à raison de deux par régiment.

C'est donc, par conséquent, pour le corps du duc d'Auerstaedt, 30 pièces; pour celui du général Oudinot, 24; pour celui du duc de Rivoli, 24; total, 78 pièces. Faites fournir sans délai ces 78 pièces. 57 ont été prises ici; les autres doivent exister sur le nombre pris à Vienne, à Krems ou ailleurs.

Rendez-moi le plus tôt possible, Général, un compte détaillé sur l'exécution de ces dispositions, afin que je puisse le mettre sous les yeux de l'Empereur.


Ebersdorf, 25 mai 1809, trois heures après midi.

A Alexandre, prince de Neuchâtel, major général de l'armée d'Allemagne.

Mon Cousin, donnez ordre que la division Demont repasse le pont après l'artillerie. Elle rentrera au corps du duc d'Auerstaedt. Elle rendra au 2e corps toute l'artillerie qu'elle lui a empruntée, et reprendra celle qu'elle avait au 3e corps, matériel et personnel.

P. S. Le corps du général Oudinot repassera après la division Demont; il ne restera dans l'île que le corps du duc de Rivoli.


Ebersdorf, 26 mai 1809

Au général Songis, commandant l'artillerie de l'armée d'Allemagne, à Ebersdorf

Mon intention est que l'artillerie de l'armée soit distribuée de la manière suivante. Vous ferez en conséquence les changements nécessaires aux différents corps. Les raisons qui me portent à ces changements n'ont pas besoin d'être développées.

2e CORPS: quatre pièces de 12; trente de 6; quatorze obusiers de 6 pouces; total, quarante-huit pièces.

3e CORPS : sept pièces de 12; vingt-sept de 8; dix-huit de 4,; huit obusiers de 6 pouces; total, soixante.´

4e CORPS : huit pièces de 12; quarante-cinq de 6; treize obusiers de 5 pouces 4 lignes; total, soixante-six.

RÉSERVE DE CAVALERIE : dix pièces de 8; dix de 4; six obusiers de 5 pouces 4 lignes; total, vingt-six.

Total général, deux cents bouches à feu.

Successivement, les améliorations susceptibles pourront être faites en ôtant les pièces de 4 aux bataillons et en leur donnant des pièces de 6 en place. Il est assez indifférent à un bataillon d'avoir des pièces de 4 ou des pièces de 8, ou des pièces de 6.

Par ce moyen, on pourra ôter de l'artillerie de position les pièces de 4, et on les remplacera par des pièces de 8; ce qui fera une grande amélioration.

Quand il sera possible d'ôter les obusiers de six pouces pour les remplacer par des obusiers de 5 pouces 4 lignes, nous n'aurons que des pièces de 12, de 6, des obusiers de 5 pouces 4 lignes et des pièces de 8, à un seul corps; c'est le résultat auquel il faut lâcher d'arriver. Envoyez-moi actuellement l'état de l'artillerie auxiliaire, car je suppose que dans ces deux cents pièces de canon n'est pas comprise l'artillerie des étrangers.
Quelle est la situation de celle-ci ?


Ebersdorf, 26 mai 1809

Au général Songis, commandant l'artillerie de l'armée d'Allemagne, à Ebersdorf

Il y a près du pont sept à huit pontons qui ne servent pas au pont.

Je désire que vous les chargiez sur des haquets et que vous les fassiez conduire dans l'île pour servir à faire un autre pont.

Faites-moi connaître à quelle heure cela sera prêt, parce que, si l'ennemi a évacué la rive gauche, comme tout le porte à penser, mon intention est d'y faire passer un corps pour fouiller la plaine.

Envoyez des haquets à Klosterneuburg charger les pontons qui s'y trouvent.

Il sera bon de remplacer les pontons au grand pont par des bateaux, afin que l'on puisse jeter sur le dernier bras deux ponts comme celui qui y était; il avait quatorze pontons.

Il y a aussi sur ce bras plusieurs moulins dont les bateaux pourraient servir



Ebersdorf, 26 mai 1809, huit heures du matin

Au maréchal Lefebvre, duc de Danzig, commandant le 7e corps de l'armée d'Allemagne, à Salzburg

L'Empereur, Monsieur le Duc, reçoit votre lettre du 22 mai, par laquelle vous lui annoncez que vous vous portez sur Leoben, que vous êtes parti le 23 et que vous marchez, suivant les circonstances par Salzburg ou par Rastadt. Vous devez donc être aujourd'hui ou  Salzburg ou à Rastadt, et sur Leoben vers le 30 de ce mois. Il est possible, Monsieur le Duc, que l'armée d'Italie envoie des reconnaissances par Spital sur Rastadt, et sur Leoben par Klagenfurt. Si cela arrivait, il est nécessaire que vous fassiez connaître au général commandant l'armée d'Italie qu'il faut qu'il se dirige sur Leoben. Si vous êtes à  Salzburg, ou si d'autres circonstances ont dérangé votre marche, vous devez avoir pour but de vous rapprocher de Vienne par le chemin le plus court, afin de pouvoir prendre part aux évènements et à la bataille qui se prépare d'ici à sept ou huit jours. Si vous êtes sur Leoben, il faut le même jour envoyer une avant-garde sur le Semmering, qui est le pendant des eaux et la montagne qui  sépare la Styrie de l'Autriche. Dans ce moment, le général Lauriston y est avec une petite colonne.

Si la route d'Italie par Innsbruck et le Tyrol est rétablie, faite connaître au général commandant l'armée d'Italie qu'il doit se diriger sur Vienne, et en même temps vous  lui ferez part de vos mouvements.


Ebersdorf, 26 mai 1809, trois heures du soir.

Au maréchal Masséna, duc de Rivoli, commandant le le 4e corps de l'armée d'Allemagne, dans l'île Lobau.

Un officier de pontonniers a rendu compte, Monsieur le Duc, que l'ennemi travaillait à notre ancienne tête de pont, annonçant le projet d'en faire une demi-lune. L'Empereur  est impatient d'avoir des nouvelles. Si cela est, il faut commencer le feu et ne pas souffrir qu'un homme s'établisse de ce côté-là.


Ebersdorf, 27 mai 1809

A l'impératrice Joséphine, à Strasbourg

Je t'expédie un page pour t'apprendre qu'Eugène m'a rejoint avec toute son armée, qu'il a rempli parfaitement le but que je lui avais demandé, qu'il a presque entièrement détruit l'armé ennemie qui était devant lui.

 Je t'envoie ma proclamation à l'armée d'Italie, qui te fera comprendre tout cela.

Je me porte fort bien. Tout à toi.  

P. S. Tu peux faire imprimer cette proclamation à Strasbourg, et la faire traduire en français et en allemand, pour qu'on la répande dans toute l'Allemagne. Remets au page qui va à Paris une copie de la proclamation.


Ebersdorf, 27 mai 1809

Au maréchal Bernadotte, prince de Ponte-Corvo, commandant le 9e corps de l'armée d'Allemagne

Mon Cousin, je vous écris par le page que j'expédie à l'Impératrice, pour vous annoncer l'arrivée du vice-roi et de mon armée d'Italie. La division Jellachich, qui se retirait du Tyrol, est tombée tout entière dans ses mains à Saint-Michel près Leoben. Cette armée a eu des avantages tels qu'elle avait fait près de 25.000 prisonniers à l'ennemi, avant d'avoir passé la Drave; l'archiduc Jean est rentré en Hongrie avec les débris de son armée qui ne montent pas à 12.000 hommes, et j'estime à 60.000 hommes les renforts  qui m'arrivent avec l'armée d'Italie. Mon armée de Dalmatie est arrivée à Laybach.


Ebersdorf, 27 mai 1809, midi.

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie, à Bruck

Mon Fils, votre aide de camp Bataille arrive. La proclamation ci­ jointe, que vous ferez imprimer et distribuer à l'armée, vous fera connaître ma satisfaction. Réunissez toutes vos troupes à Bruck et occupez le Semmering. Dites à Lauriston de faire retourner toutes ses troupes sur Neustadt. Comme je suppose que j'aurai de vos nouvelles dans la journée et que vous m'enverrez des états de situation, je vous enverrai des ordres. J'espère que Macdonald est arrivé à Graz; organisez provisoirement les provinces de Carniole et de Carinthie comme elles l'ont été dans mes premières campagnes, en y nommant un commissaire de gouvernement pris dans les États. Envoyez à la rencontre du duc de Danzig, qui arrive avec les Bavarois, de Salzburg sur Leoben; faites-lui connaître votre arrivée. Mon intention est que, de la position où il se trouvera, il se dirige par le plus court chemin sur Vienne. J'ai un grand désir de vous voir. Je suis toujours à me battre avec le Danube, qui m'a encore enlevé mes ponts ce matin; aussitôt que je les aurai consolidés, je détruirai le prince Charles, qui est de l'autre côté du fleuve. Faites-moi connaître la situation de votre artillerie et de vos approvisionnements. Nommez des commandants pour chacune des provinces de Carniole et de Carinthie.

Vous trouverez ci-joint différentes pièces que vous ferez réimprimer et répandre partout. Je vous embrasse.


Camp impérial d'Ebersdorf, 21 mai 1809.

PROCLAMATION

Soldats de l'armée d'Italie, vous avez glorieusement atteint le but que je vous avais marqué. Le Semmering a été témoin de votre jonction avec la Grande Armée. Soyez les bienvenus. Je suis content de vous !

Surpris par un ennemi perfide avant que vos colonnes fussent réunies, vous avez dû rétrograder jusqu'à l'Adige. Mais, lorsque vous reçûtes l'ordre de marcher en avant, vous étiez sur les champs mémorables d'Arcole, et là vous jurâtes sur les mânes de nos héros de triompher. Vous avez tenu parole à la bataille de la Piave, aux combats de San-Daniele, de Tarvis, de Goritz; vous avez pris d'assaut les forts de Malborghetto, de Prediel, et fait capituler la division ennemie retranchée dans Prewald et Laybach. Vous n'aviez pas encore passé la Drave, et déjà 27.000 prisonniers, soixante pièces de bataille, dix drapeaux avaient signalé votre valeur. Depuis, la Drave, la Save, la Mur n'ont pu retarder votre marche. Là colonne autrichienne de Jellachich, qui la première entra dans Munich, qui donna le signal des massacres dans le Tyrol, environnée à  Saint-Michel, est tombée dans vos baïonnettes. Vous avez fait une prompte justice de ces débris dérobés à la colère de la Grande Armée.

Soldats, cette armée autrichienne d'Italie, qui, un moment, souilla par sa présence mes provinces, qui avait la prétention de briser ma couronne de Fer, dispersée, battue, anéantie, grâce à vous, sera un exemple de la vérité de cette devise: Dio me la diede, guai a chi la tocca !


Ebersdorf, 27 mai 1809, neuf heures du soir

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie, à Bruck

Mon Fils, un aide de camp de Lauriston m'apporte votre lettre du 26 à onze heures du soir. Reposez-vous et procurez-vous du pain. Je vous prie de m'envoyer l'état de situation de toute votre artillerie et les lieux où elle est. Si vous ne voyez pas d'inconvénient à ce que vous vous rendrez près de moi, venez; ce sera le plus court moyen de me mettre au fait de tout. Je pense que, si le prince Jean est parti de Graz, il n'y a pas d'inconvénient. Vous aurez vu, par la proclamation que je vous ai envoyée, combien je suis content de vous et  de mon armée. Le Tyrol et le Vorarlberg sont pacifiés.  Le duc de Danzig est arrivé à Innsbruck le 20. Il doit être en marche sur Leoben et Rastadt. .Je pense vous avoir écrit ce matin de lui mander de se diriger sur Vienne par le plus court chemin. Je suppose que vous aurez fait prendre les lettres à Bruck et à Graz


Ebersdorf, 28 mai 1809, dix-heures du matin.

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie, à Bruck

Mon Fils, je vous renvoie votre aide de camp.. Je désirerais avoir l'état de situation de votre corps d’armée.

Je suppose que la division Durutte est composée de deux bataillons du 22e, de quatre bataillons du 23e, et de quatre bataillons du 62e.  Je suppose que ces dix bataillons forment au moins 6,000 hommes présents sous les armes. Je suppose que la division Seras est composée d'un bataillon du 35e, de trois bataillons du 53e, de quatre bataillons du 106e et de deux bataillons du 79e; je la suppose également de 6,000 hommes. Je ne sais ce que c'est que la 3e division; je suppose que c'est une division italienne qui est avec le 112e, ct qu'elle est également de 6,000 hommes. Je suppose que la division Pacthod vous a rejoint avec la division Grouchy. La division Pacthod doit être composée de deux bataillons du 8e léger, de quatre bataillons du 52e, de quatre bataillons du 102e et de quatre bataillons du 11e de ligne, que je suppose former 6,000 hommes. Sans comprendre le corps détaché du général Macdonald, vous devriez avoir aujourd'hui à Bruck 24,000 hommes d'infanterie, 4,000 hommes de cavalerie et 2,000 hommes de la garde; ce qui ferait 80,000 hommes et soixante pièces de canon. Le général Macdonald, que je suppose sur le point d'arriver à Graz, vous renforcera de 15,000 hommes. Ainsi votre arrivée me renforce de 45,000 hommes, non compris le corps du général Marmont. Rectifiez mes idées là-dessus, et occupez-vous de l'artillerie et des munitions; cela est extrêmement important. Faites avancer vos pontonniers, vos sapeurs à l'avant-garde. Faites venir d'Italie tout le personnel d'artillerie que vous pourrez; vous en avez besoin, et l'Italie est le pays où j'en ai le plus. Faites avancer le bataillon du 93e, celui du 67e, et toute la cavalerie et l'infanterie appartenant aux divisions Molitor et Boudet, de l'ancienne colonne qui a essuyé un échec dans le Tyrol.  

Faites-les diriger à grandes marches pour compléter ces divisions. Il doit y avoir aussi un bataillon du 36e et un du 37e. Les corps doivent avoir leur artillerie complète. Donnez-leur des pièces de 8, autrichiennes. Les régiments se procureront des harnais, des charretiers et des chevaux.

Au delà du Danube, où je me suis battu pendant deux jours, l'ennemi m'a présenté près de quatre cents pièces de canon. J'aurais anéanti l'armée du prince Charles sans le Danube, qui a rompu mes ponts; ce qui m'a décidé à ne pas m'aventurer, et m'a privé de mes parcs et d'une partie de l'armée. Vous trouverez le bulletin qui vous mettra au fait de tout cela.

Voici la position de ma cavalerie légère aujourd'hui. Le général Lasalle est sur Hainburg, ayant des postes sous Presbourg; le général Montbrun est à OEdenburg, poussant des postes du côté de Graz. Je suis occupé à établir sur le Danube mes ponts, qui ont été enlevés une seconde fois, et à les consolider avec des chaînes et des pilotis.

La grande affaire dans ce moment-ci est que Macdonald arrive à Graz; que votre artillerie, vos parcs, vos traînards soient arrivés; que vous soyez bien organisé. J'avais jadis fait mettre Klagenfurt à l'abri d'un coup de main; faites refaire les mêmes ouvrages. Si l'enceinte a été conservée, ce sera toujours un dépôt de vivres et de munitions que l'ennemi ne pourra pas enlever. 


Ebersdorf, 28 mai 1809

Au prince Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie

Je sais qu'il y a des individus de Padoue qui se sont mal comportés. Rendez-m'en compte pour que j'en fasse un exemple éclatant. Je sais que le maire d'Udine a eu la lâcheté d'ôter sa décoration, tandis que l'évêque et d'autres ne l'ont pas fait, et qu'ainsi ce n'était pas obligation. J'attends votre rapport là-dessus.

Quant à Padoue, s'il y a quelque grande famille qui se soit mal comportée, je veux la détruire de fond en comble, de manière qu'elle serve d'exemple dans les annales de Padoue.

Faites exécuter avec plus de rigueur que jamais le décret contre ceux qui ont pris les armes contre nous, et faites mettre le séquestre sur leurs biens, qui doivent être confisqués et vendus.

(Lecestre)


Ebersdorf, 28 mai 1809, midi.

Au général comte Lauriston, commandant les troupes détachées du 4e corps de l'armée d'Allemagne, à Neustadt

Portez-vous sur OEdenburg, à six lieues de Neustadt, et envoyez de forts reconnaissances sur Raab et Körmönd, places situées sur la Raab et qui sont le chemin de Graz en Hongrie, afin d'être tou­jours éclairé sur les mouvements que pourrait faire le prince Jean.

Je crois que vous deveztrouver à OEdenburg le général Montbrun; toutefois vous pouvez y aller avec la brigade Colbert, laissant une partie de votre infanterie en échelons.

Je vous envoie des proclamations que vous répandrez en Hongrie, ainsi que des imprimés sur l'arrivée de l'armée d'Italie,

Le général Marulaz doit se trouver du côté de Bruck et le général Lasalle à Hainburg.


Ebersdorf, 28 mai 1809, huit heures du soir.

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie, à Bruck

Mon Fils, Tascher me porte des drapeaux et votre lettre du 27.

J'ai donné ordre à Lauriston de se porter avec une brigade de cavalerie et deux régiments d'infanterie badois, qui forment son petit corps d'observation, sur OEdenburg, d'où il poussera des partis sur les flancs du prince Jean, qui probablement se rend à Raab. Attirez à vous tout le général Baraguey d'Hilliers, tout le général Grouchy. Retirez aussi tout ce qui est inutile sur vos derrières. Ordonnez  qu'on fortifie Klagenfurt, qu'on mette de l'eau dans les fossés et qu'on y forme un grand magasin; j'y avais déjà fait ces dispositions il y a seize ans. Faites venir le plus d'artillerie possible; il faut en faire venir. non-seulement attelée, amis encore par réquisition, sur Klagenfurt. Je compte que votre armée, en en ôtant tout au plus un ou 

deux bataillons italiens, que vous laisserez à Klagenfurt, sera sur Bruck demain et après , et que le corps de Macdonald sera à Graz. Il me tarde que Marmont soit arrivé à Laybach et qu'il envoie sur Graz les détachements que Macdonald aurait laissés à Laybach. La situation des choses dans le Midi me décidera sur le parti que je prendrai pour l'armée de Dalmatie. J’attends l'état de situation de tous vos corps, avec les lieux où ils se trouvent et des détails sur votre artillerie. La division que vous avez envoyée dans la direction de Neustadt peut continuer sa route pour occuper le Semmering, et partir sur Neunkirchen et se mettre en correspondance avec Lauriston pour se lier.

Envoyez la lettre ci-jointe à Borghèse par votre premier courrier.

Je lui mande d'envoyer sur Osoppo tout ce qu'il a de disponible appartenant aux sept régiments des divisions Molitor et Boudet, aux quatre régiments de cuirassiers et aux cinq régiments de cavalerie légère. Je vous envoie cette lettre sous cachet volant, pour que vous en fassiez autant dans tout le royaume, et que vous fassiez fournir, soit par l'armée italienne, soit par l'armée française, tout ce qu'elles ont de disponible pour renforcer les cadres. Je suppose que vous aurez formé sur la Livenza ou sur le Tagliamento un dépôt de cavalerie, et que vous avez laissé quelqu'un à la tête pour vous alimenter. Ayez à Osoppo un homme marquant pour mettre à la tête de vos dépôts: c'est là qu'il faut tout diriger. Donnez ordre qu'on n'en laisse partir aucun homme isolé, mais qu'on fasse des bataillons de marche de 5 à 600 hommes d'infanterie et cavalerie.

J'ai donné ordre que les États du Pape feraient partie de l'armée de Naples, el j'ai chargé le Roi d'en prendre possession. Les États du Pape feront partie de la France, ayant pris un décret pour détruire le gouvernement temporel du Pape.

Écrivez au roi de Naples pour l'instruire de notre jonction; envoyez-lui la lettre ci-jointe. Vous trouverez aussi une lettre pour la grande-duchesse, dans laquelle je lui donne l'ordre de faire partir pour Osoppo tout ce qu'il y aura à Florence de disponible des 23e léger, 62e, 13e et 112e de ligne. Je suppose que vous avez pourvu à ce qu'il soit laissé de petites garnisons à Palmanova et à Osoppo. Si Miollis est retourné à Rome et que Lemarois n'y soit plus nécessaire, il faut le diriger sur Osoppo, où il aura le commandement du Frioul; il surveillera les dépôts, tiendra la main à ce que tout en parte en bon état, et servira d'intermédiaire entre vous et le royaume d'Italie.


Ebersdorf, 28 mai 1809

A Jérôme Napoléon, roi de Westphalie, commandant le 10e corps de l'armée d'Allemagne, à Cassel

Mon Frère, je reçois votre lettre du 20 mai, que m'apporte votre aide de camp. J'ai des nouvelles de Berlin, du 22, c'est-à-dire postérieures de quatre jours à celles que vous me donnez, et elles ne font mention de rien de ce que vous m'écrivez. Vous vous alarmez trop facilement. Il est connu de tout le monde que le duc d'Oels forme un corps pour l'Angleterre; mais ce corps est en Bohême et n'est pas de plus de l,500 hommes. Le général Blücher est à son poste et n'a pas envie de remuer. La Prusse ne demande pas mieux que de conserver sa neutralité. Les Russes ont dénoncé les hostilités contre l'Autriche et sont entrés en Galicie.

Je ne sais ce que c'est qu'un général d'Albignac, auquel vous donnez le commandement d'une troupe. Vous avez une division hollandaise qui est forte de plus de 6,000 hommes, c'est plus qu'il ne vous faut. On ne reçoit ici aucune situation ni état d'emplacement de vos troupes, et l'on ignore où elles sont. Le corps de Hanau n'est pas sous vos ordres, et le duc de Valmy ne peut en détacher un seul homme sans mon ordre. Vous avez assez de monde pour maintenir, la tranquillité chez vous. Si de grandes expéditions d'Anglais avaient lieu, vos forces ne seraient pas sans doute suffisantes; ce serait à moi à y pourvoir et à combiner le corps de Hanau avec votre corps d'armée. Le régiment du grand-duché de Berg ne vous est bon à rien; si de grandes secousses arrivaient, il vous manquerai; faîtes-lui continuer sa route pour l'armée. Le Tyrol et le Vorarlberg sont parfaitement soumis. Les grands succès obtenus par l'armée d'Italie et sa jonction, qui a eu lieu à peu de lieues de Vienne, ont achevé de soumettre la Styrie, la Carniole, la Carinthie, la haute et la basse Autriche. La crue du Danube m'empêche de pouvoir consolider mes ponts et d'entrer dans la Bohême et dans la Moravie.


Ebersdorf, 28 mai 1809

A Elisa, grande-duchesse de Toscane, à Florence.

Ma Soeur, faîtes partir pour Osoppo tout ce qu'il y aurait de disponible dans le duché, appartenant aux 23e léger, 13e, 112e et 62e de ligne et au 9e chasseurs. Cette lettre vous parviendra par le canal de l'armée d'Italie. Ma jonction avec cette armée a été faite heureusement, il y a deux jours. Les affaires vont ici fort bien, et ma santé est fort bonne.


Ebersdorf, 28 mai 1809

A Joachim Napoléon, roi des Deux-Siciles, à Naples

Je vous ai écrit de Schönbrunn, le 17, pour vous faire connaître que mon intention était que les États du Pape fussent sous vos ordres et pour vous charger d'en prendre possession pour la France. Ne craignez point de débarquement. Les Anglais sont occupés en Portugal et en Espagne. Ayez une grosse division sur Rome, et soyez prêt à vous y porter.

Faites partir pour Osoppo tout ce qui reste dans votre royaume, appartenant aux régiments qui ont quitté l'armée de Naples. Donnez l'ordre au 14e léger, au 6e de ligne, qui sont à Rome, d'en partir en toute diligence pour Padoue. Tâchez également d'envoyer un bataillon à Ancône, qui mette à même de disposer des deux bataillons du 22e léger qui y sont. Si vous pouvez disposer d'un on deux régiments napolitains, faites-les partir pour l'Allemagne, où ils se formeront. Ils iront d'abord à Padoue et de là à Osoppo.

Je pense que, dans cette circonstance, il serait convenable de vous tenir à Rome, du moins quelque temps, pour être plus près de la haute Italie.


Ebersdorf, 28 mai 1809.

TREIZIÈME BULLETIN DE L'ARMÉE D'ALLEMAGNE.

Dans la nuit du 26 au 27, nos ponts sur le Danube ont été enlevés par les eaux et par des moulins qu'on a détachés. On n'avait pas encore eu le temps d'achever les pilotis et de placer la grande chaîne de fer. Aujourd'hui, l'un des ponts est rétabli. On espère que l'autre le sera demain.

L'Empereur a passé la journée d'hier sur la rive gauche pour visiter les fortifications que l'on élève dans l'île Lobau, et pour voir plusieurs régiments du corps du duc de Rivoli, en position dans cette espèce de tête de pont.

Le 27, à midi, le capitaine Bataille, aide de camp du prince vice-roi, a apporté l'agréable nouvelle de l'arrivée de l'armée d'Italie à Bruck. Le général Lauriston avait été envoyé au-devant d'elle, et la jonction a eu lieu sur le Semmering-Berg. Un chasseur du 9e, qui était en coureur en avant d'une reconnaissance de l'armée d'Italie, rencontra un chasseur d'un peloton du 20e, envoyé par le général Lauriston. Après s'être observés pendant quelque temps, ils reconnurent qu'ils étaient Français et s'embrassèrent. Le chasseur du 20e marcha sur Bruck, pour se rendre auprès du vice-roi, et celui du 9e se dirigea vers le général Lauriston pour l'informer de l'approche de l'armée d'Italie. Il y avait plus de douze jours que les deux armées n'avaient pas de nouvelles l'une de l'autre. Le 26, au soir, le général Lauriston était à Bruck, au quartier général du vice-roi.

Le vice-roi a monté dans toute la campagne un sang-froid et un coup d'oeil qui présagent un grand capitaine.

Dans la relation des faits qui ont illustré l'armée d'Italie pendant ces vingt derniers jours, Sa Majesté a remarqué avec plaisir la destruction du corps de Jellachich. C'est ce général qui fit aux Tyroliens cette insolente proclamation qui alluma leur fureur et aiguisa leurs poignards. Poursuivi par le duc de Danzig, menacé d'être pris en flanc par la brigade du général Duppelin, que le duc d'Auerstaedt avait fait déboucher par Maria-Zell, il est venu tomber comme dans un piége en avant de l'armée d'Italie.

L'archiduc Jean, qui, il y a si peu de temps, et dans l'excès de sa présomption, se dégradait par sa lettre au duc de Raguse, a évacué Graz hier 27, ramenant à peine 20 ou 25,000 hommes de cette belle armée qui était entrée en Italie. L'arrogance, l'insulte, les provocations à la révolte, toutes ses actions, portant le caractère de la rage, ont tourné à sa honte.

Les peuples de l'Italie se sont conduits comme auraient pu le faire les peuples de l'Alsace, de la Normandie ou du Dauphiné. Dans la retraite de mes soldats, ils les accompagnaient de leurs voeux et de leurs larmes. Ils reconduisaient par des chemins détournés et jusqu'à cinq marches de l'armée les hommes égarés. Lorsque quelques prisonniers ou quelques blessés français ou italiens, ramenés par l'ennemi, traversaient les villes et les villages, les habitants leur portaient des secours. Ils cherchaient pendant la nuit les moyens de les travestir et de les faire sauver.

Les proclamations et les discours de l'archiduc Jean n'inspiraient que le mépris et le dédain, et l'on aurait peine à se peindre la joie des peuples de la Piave, du Tagliamento et du Frioul, lorsqu'ils virent l'armée de l'ennemi fuyant en désordre, et l'armée du souverain et de la patrie revenant triomphante.

Lorsqu'on a visité les papiers de l'intendant de l'armée autrichienne, qui était à la fois le chef du gouvernement et de la police et qui a été pris à Padoue avec quatre voitures, on y a découvert la preuve de l'amour des peuples d'Italie pour l'Empereur. Tout le monde avait refusé des places; personne ne voulait servir l'Autriche; et, parmi sept millions d'hommes qui composent la population du royaume, l'ennemi n'a trouvé que trois misérables qui n'aient pas repoussé la séduction.

Les régiments d'Italie, qui s'étaient distingués en Pologne et qui avaient rivalisé d'intrépidité dans la campagne de Catalogne avec les plus vieilles bandes françaises, se sont couverts de gloire dans toutes les affaires. Les peuples d'Italie marchent à grands pas vers le dernier terme d'un heureux changement. Celte belle partie du continent, où s'attachent tant de grands et d'illustres souvenirs, que la cour de Rome, que cette nuée de moines, que ses divisions avaient perdue, reparaît avec honneur sur la scène de l'Europe.

Tous les détails qui arrivent de l'armée autrichienne constatent que dans les journées du 21 et du 22 sa perte a été énorme. L'élite de l'armée a perdu selon les aimables de Vienne, les manœuvres du général Danube ont sauvé l'armée autrichienne.

Le Tyrol et le Vorarlberg sont parfaitement soumis. La Carniole, la Styrie, la Carinthie, le pays de Salzburg, la haute et la basse Autriche, sont pacifiés et désarmés.

Trieste, cette ville où les Français et les Italiens ont subi tant d'outrages, a été occupée. Les marchandises coloniales anglaises ont été confisquées. Une circonstance de la prise de Trieste a été très­ agréable à l'Empereur: c'est la délivrance de l'escadre russe. Elle avait eu ordre d'appareiller pour Ancône; mais, retenue par les vents contraires, elle était restée au pouvoir des Autrichiens.

La jonction de l'armée de Dalmatie est prochaine. Le duc de Raguse s'est mis en marche aussitôt qu'il a appris que l'armée d'Italie était sur l'Isonzo. On espère qu'il arrivera à Laybach avant le 5 juin.

Le brigand Schill, qui se donnait, et avec raison, le titre de général au service de l'Angleterre, après avoir prostitué le nom du roi de Prusse comme les satellites de l'Angleterre prostituent celui de Ferdinand à Séville, a été poursuivi et jeté dans une île de l'Elbe. Le roi de Westphalie, indépendamment de 15,000 hommes de ses troupes, avait une division hollandaise et une division française; et le duc de Valmy a déjà réuni à Hanau deux divisions du corps d'observation, commandées par les généraux Rivaud et Despeaux, et composées des brigades Lameth, Clément, Taupin et Vaufreland.

La pacification de la Souabe rend disponible le corps d'observation du général Beaumont, qui est réuni à Augsbourg et où se trouvent plus de 3,000 dragons.

La rage des princes de la Maison de Lorraine contre la ville de Vienne peut se peindre par un seul trait. La capitale est nourrie par quarante moulins établis sur la rive gauche du fleuve: ils les ont fait enlever et détruire.

(Moniteur du 4 juin 1809.)


Ebersdorf, 29 mai 1809

Au général Clarke, comte de Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Général Clarke, faites partir pour Strasbourg, des différents dépôts de cavalerie légère dont les régiments sont en Espagne, ainsi que des dépôts dont les régiments sont en Allemagne, tout ce qu'ils ont de disponible, formé en compagnies de marche. Tous les détachements dont les régiments sont à l'armée d'Allemagne rejoindront leurs régiments. Pour ceux dont les régiments sont en Espagne, sur l'avis que vous me donnerez de leur départ de Strasbourg, je prendrai des décrets pour les incorporer dans les régiments qui sont ici; de sorte que les dépôts des régiments de cavalerie légère qui sont en Espagne concourront à porter au complet les régiments de cavalerie légère qui sont ici, comme les dépôts de dragons concourent à la formation des six régiments provisoires de dragons.

Quant à la grosse cavalerie, le régiment que commande le chef d'escadron Turenne arrive et va être incorporé. J'en ai demandé un autre de 600 hommes. Donnez ordre que tout ce qui est disponible dans les dépôts se rende à Strasbourg pour former d'autres détachements.

J'ai un millier de cuirassiers à pied. Beaucoup de jeunes soldats ont jeté leurs cuirasses ; faîtes-en envoyer deux mille, en les dirigeant sur Passau. Nos cuirasses sont excellentes; elles ont à la fois l'avantage de la légèreté et le degré de résistance nécessaire.

Tous les chevaux d'artillerie que j'ai demandés doivent être envoyés à l'armée. Il y a en Espagne beaucoup de personnel de l'artillerie et du train; je vous autorise à en retirer ce que vous jugerez convenable.

Tous les jours je me convaincs du grand mal qu'on a fait à nos armées en ôtant les pièces de régiment. Je désire donc que, dans l'organisation, chaque régiment ail deux pièces de 3; mais, pendant tout le temps que nous n'aurons que des pièces et des boulets de 4, on leur donnera des pièces de 4. Les canonniers, chevaux, hommes du train, seront fournis par les régiments. Ici, je fais donner aux régiments toutes les pièces autrichiennes de 3 prises à l'ennemi.

Les marches el les batailles détruisent plus que l'on ne prend à l'ennemi et qu'on ne peut se fournir dans le pays. Envoyez à l'armée de forts détachements des différents dépôts d'artillerie et du train. J'ai donné l'ordre au prince Borghèse, et réitérez-le-lui, de faire partir quatre compagnies du 4e régiment d'artillerie et tous les sapeurs d'Alexandrie, hormis une compagnie, pour Klagenfurt, et de là sur Vienne.

Faites-moi connaître, par le retour de l'estafette, ce que les dix dépôts de hussards et les vingt-six dépôts de chasseurs feront partir pour Strasbourg.


Ebersdorf, 29 mai 1809

Au général comte Dejean, ministre directeur de l'administration de la guerre, à Paris

J'ai 1,000 cuirassiers à pied. Les marches et les batailles détruisent un très-grand nombre de chevaux; j'ai ordonné de passer des marchés ici et à Passau pour en acheter. Mais tous les moyens que nous pouvons avoir ici et ceux que vous avez ne sont pas de trop pour tenir une cavalerie an complet. Augmentez donc de 100 chevaux les commandes de remontes et de selles des quatorze régiments de grosse cavalerie; c'est-à-dire, indépendamment de ce que vous avez commandé, passez des marchés pour 1,400 chevaux et 1,400 harnachements.

Voyez le ministre de la guerre et faites partir des dépôts de grosse cavalerie tout le disponible, et, s'il y avait plus de chevaux que d'hommes, envoyez deux chevaux par homme. En passant à Passau et à Schönbrunn, ce second cheval trouvera un cavalier.


Ebersdorf, 29 mai 1809

Au général comte Dejean, ministre directeur de l'administration de la guerre, à Paris

Monsieur le Général Dejean, un tas d’aventuriers arrivent avec des passeports de l’intérieur et se font donner des vivres pour eux et leurs chevaux. Je ne puis concevoir cet abus qui est très onéreux au trésor. Il y en a qui viennent avec trois ou quatre chevaux. Réprimez cet abus.

(Brotonne)


Ebersdorf, 29 mai 1809

A Alexandre, prince de Neuchâtel, major général de l'armée d'Allemagne, à Ebersdorf

Mon Cousin, donnez ordre, 1° que le village qui forme la tête de pont de Linz soit rasé; 2° que, sur l'emplacement de ce village , on établisse un réduit à la tête de pont; 3° que le général du génie Chambarlhiac soit chargé de la direction de ces ouvrages comme à Passau; 4° qu'un chef de bataillon du génie y soit rendu demain, et que deux officiers du génie français soient mis sous ses ordres; enfin que cette position soit inexpugnable, et que 8,000 hommes puissent s'y défendre contre 80,000. Donnez ordre que les 200 hommes des 13e et 24e de chasseurs qui étaient restés en observation du côté de Maria-Zell retournent à leurs régiments.


Ebersdorf, 29 mai 1809

Au général comte Bertrand, commandant le géni de l'armée d'Allemagne, à Ebersdorf

Monsieur le Général Bertrand, les pontons que j'avais ont été abîmés par le Danube. Il faut employer une partie des ouvriers de la marine, à Vienne ou à Klosterneuburg, à construire soixante pontons, à peu près comme ceux que nous avions. Nous devons avoir une quarantaine de haquets, il restera donc à s'en procurer vingt. Ces pontons serviront indépendamment des ponts du Danube. Il sera impossible de passer le dernier bras, à moins de quatre ponts débouchant devant l'ennemi. L'un sera formé par les bateaux que le capitaine Baste a ramassés, et qui iront par eau; le second, par ces petits bateaux qui sont au bord du Danube et qu'il faut calfater; le troisième, par seize pontons qu'il faut que les ouvriers de la marine aient faits dans trois ou quatre jours; le quatrième pourrait être fait en radeaux ou en bateaux, venant du côté de l'eau. Le directeur des ponts de Vienne assure qu'il y a plus de cent cinquante bâtiments sous l'eau; il faut employer une partie des marins à les retirer et à les mettre en état. Je désirerais avoir quelques bateaux armes d'obusiers ou de pièces de 3, et un projet de batterie, qui serait remorquée par ces bateaux, de quatre pièces de 12, avec un épaulement qui mît à l'abri du feu de l'ennemi.


Ebersdorf, 30 mai 1809

A Alexandre, prince de Neuchâtel, major général de l'armée d'Allemagne, à Ebersdorf

Mon Cousin, faites prendre dans les jardins de Vienne une de ces échelles qui servent à tailler les arbres, qui forment un système avec un plateau au-dessus, et faites-la porter dans l'île. Cette échelle, étant portative et n'ayant besoin d'être appuyée à rien, pourra se placer à l'abri du feu de l'ennemi. Un officier pourra s'y tenir en observation avec une lunette et rendra compte plusieurs fois par jour de ce qu'il verra de nouveau.


Quartier impérial d'Ebersdorf, 30 mai 1809, onze heures du soir.

Au comte Daru, intendant général de l'armée d'Allemagne, à Vienne

L'Empereur, Monsieur Daru, désire avoir demain à son lever un état de tous les magasins de l'armée, notamment de ceux de Vienne, soit en pain, biscuit, vin et farine. Faites-moi connaître également les ressources en viande, c'est-à-dire bœufs, vaches ou moutons, ce qui existe en ce moment et ce qu'on peut espérer des mesures prises ou à prendre, et quelles sont ces mesures. Faites-moi connaître comment l'on pourrait donner à l'armée pour huit jours de pain, biscuit ou farine; ce qui sera indispensable pour les opérations qui vont avoir lieu relativement au passage du Danube. Enfin l'Empereur désire, indépendamment de ces états que vous m'enverrez dans la nuit, que vous veniez vous-même, à neuf heures, demain, lui rendre compte de la situation des choses.

P. S. Faites-moi connaître si vous avez donné des ordres pour faire construire les fours que Sa Majesté veut avoir dans la grande île


Ebersdorf, 31 mai 1809

A l'Impératrice Joséphine, à Strasbourg

Je reçois ta lettre du 26. Je t'ai écrit que tu pouvais aller à Plombières. Je ne me soucie pas que tu ailles à Baden; il ne faut pas sortir de France. J'ai ordonné aux deux princes de rentrer en France.

La perte du duc de Montebello, qui est mort ce matin, m'a fort affligé. Ainsi tout finit. !

Adieu, mon amie. Si tu peux contribuer à consoler la pauvre maréchale, fais-le. Tout à toi.

NAPOLÉON


Ebersdorf, 31 mai 1809

Au comte Fouché, ministre de la police générale, à Paris

Je reçois votre lettre du 24 mai. La lettre du général Kellermann que les Auglais publient comme interceptée est évidemment fausse. Le Tyrol et le Vorarlberg sont soumis. Portez la plus grande attention sur les menées de cette poignée de brigands de l'Ouest.

Le Danube grossit toujours. J'occupe toujours la rive gauche, où je fais construire des ouvrages inexpugnables, comme têtes de pont. Mais je ne suis pas assez sûr de ces ponts pour y fonder de grandes opérations et culbuter l'armée du prince Charles. Je fais piloter un pont du Danube; un grand nombre de sonnettes y travaillent; ce sont de grands et immenses travaux. Ma jonction est faite avec l'armée d'Italie, qui a eu de grands succès en route.

P. S. Le duc de Montebello est mort ce matin 31, à six heures; faites-le dire à son beau-père. Que la duchesse reste à Paris. Je suis bien peiné !


Ebersdorf, 31 mai l809

Au prince Cambacérès, archichancelier de l'Empire, à Paris

Mon Cousin, le duc de Montebello est mort ce matin. Je vous prie de faire appeler M. Gueheneuc et de le lui dire. J'écris à Munich et à Strasbourg pour que, si la duchesse était en route, on l'empêche d'aller plus avant. Faites donner des lettres patentes à son fils aîné.

Le duc de Montebello a péri moins de ses blessures que d'une fièvre pernicieuse qui s'est jointe à la maladie. Il été assisté, dans ses derniers moments, par le docteur Franck.

P. S. Vous trouverez ci-joint une lettre que vous ferez remettre à M. Gueheneuc, qui la donnera à la duchesse quand il sera temps.


Ebersdorf, 31 mai 1809.

A la maréchale Lannes, duchesse de Montebello, à Paris

Ma Cousine, le maréchal est mort ce matin des blessures qu'il a reçues sur le champ d'honneur. Ma peine égale la vôtre. Je perds le général le plus distingué de mes armées, mon compagnon d'armes depuis seize ans, celui que je considérais comme mon meilleur ami. Sa famille et ses enfants auront toujours des droits particuliers à ma protection. C'est pour vous en donner l'assurance que j'ai voulu vous écrire cette lettre, car je sens que rien ne peut alléger la juste douleur que vous éprouverez.


Ebersdorf, 31 mai 1809

Au maréchal Davout, duc d'Auerstaedt, commandant le 3e corps de l'armée d'Allemagne, à Ebersdorf

L'Empereur, Monsieur le Duc d'Auerstaedt, m'ordonne de vous faire connaître que son intention est que vous fassiez partir aujourd'hui, à une heure après midi, une de vos divisions d'infanterie, munie de son artillerie. Cette division se dirigera sur Presbourg, et prendra ce soir son bivouac de manière à arriver demain matin de bonne heure sur cette ville, pour y enlever la tête de pont que l'ennemi a commencée sur la rive droite.


Ebersdorf, 31 mai 1809, six heures du soir

Au général Vandamme, commandant les troupes détachées du 3e corps, à Mautern

Il est six heures du soir, Général, et nous recevons votre lettre de ce matin à sept heures, par laquelle vous annoncez que l'ennemi tente un passage entre Krems et Hollenburg et que vous marchez à lui. L'Empereur attend avec impatience les détails de ce qui se sera passé cette après-midi. Le général Pajol, avec un régiment de cavalerie, se porte de Klosterneuburg pour vous rejoindre, longeant la rive droite du Danube. Vous aurez sans doute prévenu le prince de Ponte-Corvo et le duc de Danzig; le premier est à Linz, le second doit être à Steyr ou à Lambach. L'ennemi ne peut pas effectuer un passage considérable sans avoir un pont, et vous devez facilement rompre son pont en détachant tous les moulins et les gros bateaux et en les lançant au cours du fleuve. Ce moyen, qui a réussi contre nous sur notre pont d'Ebersdorf, doit avoir le même résultat contre le pont que l'ennemi aurait jeté. Le corps du duc d'Auerstaedt se rassemble, et, selon les nouvelles que nous ne tarderons pas à avoir de vous, il se mettra en mouvement cette nuit. Si vous n'étiez pas parvenu à jeter aujourd'hui l'ennemi dans le fleuve, et que ses démonstrations soient sérieuses, tout ce qui est en ligne de Melk sc replierait derrière l'Enns et couvrirait le prince de Ponte-Corvo et le duc de Danzig. Tout ce qui serait à Saint-Pölten se replierait du côté de Sieghartskirchen et Vienne.

L'armée d'Italie, comme vous le savez, est arrivée à Neustadt.


Ebersdorf, 31 mai 1809, huit heures du soir.

Au maréchal Bernadotte, prince de Ponte-Corvo, commandant le 9e corps de l'armée d'Allemagne, au camp de Linz

Le général Vandamme, Prince, vous aura instruit que l'ennemi a, ce matin 31, jeté 1,200 hommes sur la rive droite du Danube. Ce général réunissait ses troupes à sept heures du matin pour marcher à l'ennemi; ce qui aura été pour vous, Prince, une nouvelle raison pour activer votre marche.

Si vous avez été remplacé par le duc de Danzig à Linz, ce maréchal peut vous appuyer par une de ses divisions et par une grande partie de son artillerie, qui peut prendre une position intermédiaire entre Linz et vous. Si l'ennemi, au lieu d'une simple incursion sur la rive droite, veut entreprendre une sérieuse occupation, vous pourrez vous réunir avec le général Vandamme et le duc de Danzig, être placé de manière à contenir l'ennemi, en prenant position à Melk et en le menaçant par son flanc droit. Dans un cas aussi important, Prince, une division bavaroise serait plus que suffisante pour défendre la tête de pont de Linz, puisque enfin, si elle était attaquée sérieusement, ce qui ne paraît pas probable, elle aurait toujours la ressource de passer le Danube et de brûler le pont; bien entendu que pareille opération ne pourrait être justifiée que par la plus impérieuse nécessité. Nul doute, Prince, que, si l'ennemi veut établir un pont à Krems, il ne fasse cette opération avec la plus grande partie du corps de Kollowrath, qui est devant vous, car nous avons toujours ici en présence l'armée ennemie;nous sommes sur la rive gauche du Danube, et par conséquent il ne peut pas se dégarnir devant nous.

Si au contraire, Prince, le duc de Danzig n'a pas reçu l'ordre que je lui ai envoyé de se porter sur Linz, il doit avoir aujourd'hui dépassé Steyr et Amstetten : alors vous appuieriez ce maréchal avec une portion de vos troupes, en ne laissant dans la tête de pont de Linz que ce qui peut être nécessaire pour sa défense. Je vous envoie la copie de la lettre que j'écris au duc de Danzig, auquel j'adresse une copie de celle-ci.


Ebersdorf, 31 mai 1809, huit heures du soir.

Au maréchal Lefebvre, duc de Danzig, commandant le 7e corps de l'armée d'Allemagne

Vous trouverez ci-joint, Monsieur le Duc, la copie de la lettre que j'écris au prince de Ponte-Corvo, parce qu'elle vous est commune. Si vous avez passé Steyr, Monsieur le Duc, el que vous soyez sur Amstetten, continuez votre route avec votre corps d'armée et rendez-vous sur Melk. Écrivez an prince de Ponte-Corvo pour qu'il vous soutienne, et tâchez d'opérer votre jonction avec le général Vandamme. Si l'ennemi a jeté un pont, le moyen de le détruire est de lancer au courant du fleuve les moulins, les radeaux et les gros bateaux.

Vous savez que la tête de l'armée d'Italie arrive ce soir à Neustadt.