1 - 15 Octobre 1805


Strasbourg, ler octobre 1805

Au prince Joseph

Mon Frère, je pars à l'instant pour porter mon quartier général à Ludwigsburg sur le Neckar. Toute l'armée est déjà avancée de plusieurs marches en Allemagne. Tout le monde est bien disposé. L'armée n'a rien perdu, ni par les désertions, ni par les maladies Le temps est superbe. L'empereur d'Autriche, qui était venu à son armée, est retourné à Vienne, et l'épouvante est déjà dans les rang ennemis. Les renseignements que j'ai portent que l'ennemi retire des troupes d'Italie pour les faire marcher sur la Bavière. Voyez le ministre de la police, le ministre Dejean et le secrétaire général de la guerre, et sachez si l'on a expédié tout ce qui est relatif à l'appel de la conscription de la réserve. Si ces ministres et les préfets mettent un peu de zèle, les conscrits doivent être rendus aux corps dans le courant de vendémiaire (23 septembre-23 octobre). J'entends bien que la conscription de l'au XIV (1805) devrait me joindre en brumaire (23 octobre-23 novembre). Suivez cette affaire autant qu'il vous sera possible.


Strasbourg, 1er octobre 1805

A M. Lebrun

Toute mon armée est sur le Neckar; je pars en poste pour joindre. Demain je me mets en marche de guerre. L'empereur d'Autriche, qui était venu à son armée, n'y est resté que vingt-quatre heures et s'en est retourné à Vienne lorsqu'il a su que nous étions si bien disposés à le recevoir. Les électeurs de Bavière, de Bade, de Wurtemberg et Hesse-Darmstadt sont avec moi et m'ont déjà fourni des corps assez considérables. Une colonne de 30,000 hommes est entrée en Gallicie; une autre est arrêtée par les armements de la Prusse, qui a pris enfin couleur et ne paraît point disposée à se laisser marcher sur le pied par la Russie. Les Russes disent qu'ils veulent débarquer dans la Poméranie suédoise. Ils frètent, en effet, beaucoup de bâtiments ; mais la Prusse a pris des mesures pour les rejeter dans la mer.

Le sénatus-consulte qui réunit Gênes à l'Empire a dû être présenté hier au Sénat. Dites hardiment que Gênes est pour toujours à la France ; que les efforts de la coalition échoueront, et que l'empereur d'Autriche payera cher l'or qu'il a reçu de l'Angleterre.

Organisez une force qui puisse maintenir la tranquillité dans la Rivière de Gênes. Enfin, donnez une couleur aux gazettes de Gènes; qu'elles tournent en ridicule les menaces de l'Autriche et de la Russie ; qu'elles peignent notre situation sous tous les points de vue ; qu'elles disent seulement au peuple ligurien que le même homme qui, avec 30,000 hommes au milieu d'eux, a confondu le roi de Sardaigne, l'Autriche et toute la coalition, se trouve aujourd'hui avec 300,000 hommes au centre de l'Allemagne.

Ne perdez point de vue l'approvisionnement de Gènes : je voudrais avoir là 300,000 quintaux de blé. Mes projets de guerre sont vastes. J'attirerai tout pour faire la guerre offensive. Dans aucun cas, même dans le cas de siége, vous ne devez point quitter Gènes. Prenez des mesures pour que, dans aucun événement, vous ne manquiez de blé.


Strasbourg, 1er octobre 1805

Au maréchal Moncey

Faites un ordre du jour à la gendarmerie; apprenez-lui que je suis au milieu de mon armée ; que je me repose sur l'activité de la gendarmerie pour maintenir la tranquillité intérieurement et faire marcher la conscription. Rendez-moi compte tous les jours si les conscrits de la réserve rejoignent, et où en est la conscription de l'an XIV. Je désire vous voir à l'armée, mais restez encore un mois à Paris pour la conscription de l'an XIV. Ne perdez pas une heure, un jour , et remuez la gendarmerie autant que possible.


Strasbourg, 1er octobre 1805

Au prince Eugène

Mon Cousin, je vois avec plaisir que vous prenez des mesures pour faire venir la légion corse. Il est ridicule, en effet, qu'on me laisse là 2,000 hommes pour des raisons futiles. Activez leur arrivée, et, quand vous les aurez habillés et équipés , quoiqu'il faille du temps pour en faire de bons manœuvriers, ce seront de bons soldats qui feront bien leur service et qui tiendront bien leurs fusils.

Je pars à l'instant pour me rendre sur le Neckar. Nos grands mouvements sont déjà commencés. Nous avons un très-beau temps, une belle armée, et, avant huit jours, il se passera du nouveau. Toutes les troupes du Tyrol marchent en Bavière; cela vous dégagera, d'autant.

Faites-moi connaître, par la première estafette, si les quatre bataillons du 20e de ligne sont arrivés à l'armée. Un devait débarque de l'île d'Elbe à Piombino ; les trois autres devaient débarquer à Gênes. Prenez des informations de détail sur cet objet.

Strasbourg, 1er octobre 1805

Au major Berthier, major général

Mon Cousin, mon intention est que le régiment de dragons qui est au quartier général rejoigne sa division de dragons le 10; à cette époque, le détachement que vous avez appelé des différents corps d'armée pour former la gendarmerie du quartier général sera arrivé.

Le régiment de dragons qui est à Offenbach rejoindra sa division, vu que l'artillerie qui est á Landau et qui doit marcher avec le parc aura rejoint. Donnez ordre dans les 3e et 4e divisions militaires que tous les régiments qui sont désignés pour l'armée soient dirigés sur Spire et non sur Strasbourg.

(Picard)


Quartier impérial, Ettlingen, 2 octobre 1805

Au prince Joseph

Mon Frère, l'armée est en grande marche. Le 1er et le 2e corps sont réunis aux Bavarois et sont partis de Würzburg; les 3e, 4e et 6e sont au delà du Neckar.

L'ennemi fait des marches et contre-marches et parait fort embarrassé.

Avant peu de jours nous en serons aux mains. L'armée n'a perdu personne, ni par la désertion, ni par les maladies.

Je serai ce soir à Stuttgart.

Les armées de Bade et de Wurtemberg se joignent à la mienne.

Comme les mouvements vont être très-rapides , ne soyez pas étonné si vous êtes quelques jours sans recevoir de mes nouvelles Il suffit que vous fassiez mettre dans le Moniteur que l'Empereur est à Stuttgart ; que l'armée a passé le Neckar et a déjà remporté deux grandes victoires : la première, parce qu'elle n'a ni malades, ni déserteurs ; qu'au contraire beaucoup de conscrits l'ont rejointe; la seconde victoire , c'est que les armées bavaroise, badoise et wurtembergeoise se sont réunies à l'armée française, et que tout le peuple d'Allemagne est bien disposé pour nous.


Quartier impérial, Ettlingen, 2 octobre 1805, 10 heures du matin.

A l'impératrice Joséphine

Je suis encore ici, en bonne santé. Je pars pour Stuttgart, où je serai ce soir. Les grandes manœuvres commencent. L'armée de Wurtemberg et de Bade se réunit à la mienne. Je suis en bonne position, et je t'aime.


Quartier impérial, Ettlingen, 2 octobre 1805

A M. Talleyrand

Monsieur Talleyrand, je vous envoie la lettre de M. Helflinger. J'ai reçu un aide de camp du landgrave de Hesse-Darmstadt; je lui ai fait connaître qu'il me fallait 3,000 hommes; je lui en ai démontré la nécessité pour le landgrave même; je crois l'avoir persuadé, et j'espère qu'à son tour il persuadera à son maître de ne pas trahir les intérêts de sa Maison et démentir tout d'un coup une amitié de plus de deux cents ans. Son pays ne peut être garanti par la Prusse, qui n'a pu garantir la Bavière.

Mon intention est de comprendre Darmstadt dans ma fédération germanique, composée de la Bavière, de Darmstadt, de Wurtemberg et de Bade. En un mot, il me faut 3,000 hommes de Darmstadt, ou le landgrave renoncera pour toujours à ma protection et rompra brusquement ce qu'il a droit d'attendre de deux cents ans de liaisons. C'est dans ce sens que vous devez écrire à mon ministre à Darmstadt.


Ettlingen, 2 octobre 1805

Au landgrave de Hesse-Darmstadt

J'ai reçu la lettre de Votre Altesse du ler octobre. J'ai causé fort longuement avec votre aide de camp, M. de Moranville; je lui ai fait connaître tout ce que je pensais sur les circonstances actuelles. Lorsque les armées de Bavière, de Wurtemberg et de Bade se réunissent à mon armée, je ne saurais penser que l'armée de Darmstadt s'en éloignât. Votre Altesse ne veut pas mettre un terme à une amitié de deux siècles dans des circonstances où elle est plus nécessaire que jamais au bien et à la gloire de sa Maison. Si des circonstances de révolution ont mis un instant de l'interruption dans l'ancien système, tout, étant revenu aux mêmes principes, doit se replacer de même, et je me flatte que Votre Altesse et sa Maison auront pour moi les mêmes sentiments qu'elles ont eus pour la troisième dynastie. Une fois que nos liens seront reformés, Votre Altesse peut être persuadée qu'elle me trouvera prêt à protéger ses droits et à lui donner des preuves constantes de mon amitié.


Ettlingen, 2 octobre 1805

A l'Électeur de Wurtemberg

J'ai vu, par la lettre de Votre Altesse du 30 septembre, qu'elle était toujours dans l'intention de se réunir aux électeurs de Bavière et de Bade pour faire cause commune avec moi ; mais, désirant séjourner très-peu sur les États de Votre Altesse et me rendre promptement en Bavière pour y rétablir l'Électeur, je désire que les 8,000 hommes qu'elle veut joindre à mes troupes soient prêts à se mettre en marche le 12. Je désire connaître le général auquel Votre Altesse veut confier le commandement de ses troupes. Je me flatte qu'elles contribueront au rétablissement de la paix, à la conservation du Corps germanique. Votre Altesse ne peut plus se le dissimuler aujourd'hui, la Maison d'Autriche ne déguise pas son intention de s'emparer du Corps germanique et de détruire toutes les maisons souveraines. Je placerai ce soir mon quartier général à Münchingen.


Quartier impérial, Ettingen, 2 octobre 1805

A M. Didelot, ministre plénipotentiaire de France près l'Électeur de Wurtemberg

Monsieur Didelot, j'ai reçu votre lettre. Vous avez eu dort de faire vis-à-vis du maréchal Ney la démarche que vous avez faite. Vous avez compromis votre caractère et vous vous êtes exposé à ce qui vous est arrivé. Vous vous êtes mêlé des affaires de guerre, qui ne sont pas de votre compétence, et, en vous traitant mal, le maréchal Ney vous a rendu service. Ce qu'il vous a dit est juste, car mes officiers pour la guerre et mes officiers pour la paix ont des fonctions distinctes et n'ont rien de commun entre eux ; ils ne parlent même pas la même langue. Il y a plusieurs jours que j'ai passé le Rhin. Je n'ai pas entendu parler d'un traité d'alliance offensive et défensive entre l'électeur de Wurtemberg et moi. Aucun traité n'est signé, ou, du moins, je n'en ai pas de nouvelles. Au surplus, un traité n'est rien sans ma ratification. Non-seulement l'Électeur ne m'a rien fait dire, mais il a laissé envahir son pays par l'ennemi, et le maréchal Ney est arrivé à Stuttgart en marche de guerre. Cependant 7 ou 800 hussards ne devaient pas en imposer à l'Électeur, et si son territoire eût été maintenu intact, je n'eusse pas permis que nos troupes y arrivassent avant les notifications d'usage, dont j'ai été dispensé par la présence des ennemis. L'esprit de la guerre ne comporte aucune modification , et je ne ratifierai aucun traité dans lequel mon allié m'interdirait le séjour d'un point quelconque de ses États, à moins qu'il n'y ait la clause : Autant que les circonstances ne s'y opposeraient pas. En effet, en cas de bataille devant Stuttgart , si la position était importante, on ne la laisserait pas occuper par l'ennemi. Le métier d'un ministre est un métier de circonspection , surtout dans les circonstances compliquées du moment actuel. L'Électeur m'a écrit. Le maréchal Berthier, comme major général, a répondu dans le sens de la présente lettre. Présentez une note au ministre de l'Électeur, dans laquelle vous lui direz que son territoire ayant été violé par les Autrichiens, mes troupes y sont entrées ayant devant elles les patrouilles ennemies, et qu'aucun traité n'existait. M. de Talleyrand vous a envoyé un projet de traité ; n'en sortez pas, car vous seriez désavoué. Voyez l'Électeur, faites-lui sentir qu'il a tort et que, s'il eût montré contre l'Autriche autant de fermeté qu'il en a montré contre le maréchal Ney, de misérables patrouilles n'auraient pas parcouru son territoire; et il eût eu raison de crier si j'eusse passé sans m'entendre avec lui. Expliquez-vous-en dans ce sens avec tout le corps diplomatique, et, par votre contenance, ne me faites pas avoir tort quand j'ai raison. Blâmez-vous vous-même hautement, en disant que vous saviez que le maréchal Ney ne ferait rien de ce que vous lui demandiez, mais que vous avez poussé jusqu'à l'excès l'esprit de conciliation qui vous caractérise.


Ettlingen, 2 octobre 1805

A M. Thiard

Faites connaître à l'électeur de Bade qu'il est indispensable qu'il renvoie les ministres d'Autriche et de Russie. Le ministre autrichien qui était à Paris vient d'en partir. Vous trouverez ci-joints les passe-ports que l'état-major donne aux deux ministres qui sont près de l'électeur de Bade. Ils auront une escorte et devront diriger leur marche par Darmstadt sur Francfort, parce que, les armées étant en présence, il n'est pas convenable qu'ils traversent la mienne. Vous porterez ces passe-ports chez le ministre de l'électeur de Bade, qui, je crois, de son côté, sera fort aise d'être débarrassé d'eux.


Ettlingen, 2 octobre 1805

Au maréchal Bernadotte

Mon Cousin, je reçois votre lettre du 6 vendémiaire. J'ai vu avec plaisir votre arrivée à Wurzburg, et votre jonction avec le général Marmont. Le croquis du mouvement de l'armée que vous envoie le major général vous fera connaître mes projets. L'ennemi a une armée assez considérable dans le Tyrol; il en fortifie tous les débouchés. Une autre armée se fortifie sur l'Iller. Mon projet, s'il hésite, et s'il s'amuse, est d'arriver derrière le Lech avant lui, de lui couper la retraite et de le pousser sur le Rhin ou dans le Tyrol. Nous allons voir quel parti va prendre l'ennemi. Expédiez-moi tous les jours quelqu'un. Je suis la route de Stuttgart, Schorndorf, Gmünd, Aalen, afin de diriger moi-même les mouvements de la droite, si l'ennemi passe le Danube et nous attend à Heidenheim. Les 3,000 hommes du contingent de Bade marchent aujourd'hui ; les 7,000 hommes de Wurtemberg marchent également. Donnez ces nouvelles à l'Électeur, elles lui feront plaisir.

Je ne suis point étonné que vous ayez trouvé beaucoup d'agitation : l'Électrice a été de tout temps notre ennemie, et l'Électeur lui-même se trouve dans une position si extraordinaire qu'il n'est pas étonnant qu'il s'en trouve ébranlé. Rassurez-le; causez avec lui, en général, des mouvements de l'armée, et faites-lui naître l'espoir d'être rétabli promptement dans sa position naturelle. Mais je ne pense pas que, quand vous lirez cette lettre, vous serez déjà à deux marches de Würzburg. Maintenez toujours intacte la communication du général Marmont avec le maréchal Davout ; vous verrez sur le croquis que ce général sera le 15 sur la Woernitz; si l'ennemi débouchait de Donauwoerth pour l'attaquer, faites marcher le général Marmont à son secours.

Moquez-vous de tout ce que peuvent faire les ennemis, soit à Hanovre, soit ailleurs. Ils ne sont pas encore en mesure. Quand nous nous serons défaits de ces 100,000 Autrichiens que nous avons devant nous, nous pourrons nous porter ailleurs. Il y a en France un bon mouvement ; la réserve arrive sur le Rhin. J'ai grande envie de vous voir, et je le ferai du moment que je me serai assuré de ce que l'ennemi peut faire. Mes dernières nouvelles sont qu'il était encore sur l'Iller, où il fortifiait Memmingen.

Quant à l'électeur de Hesse, il fera toujours, et dans tous les cas, ce que je voudrai. Vous l'avez un peu gâté, s'il est vrai , comme on me l'assure, que vous avez payé argent comptant. Si je l'avais prévu, je vous aurais fait dire de le payer avec des bons : je m'en expliquerai là-dessus avec lui. Il sait très-bien que sans la France il ne serait qu'un sujet de la Prusse ; il sait aussi que seul j'ai pu le faire Électeur, et que je puis seul lui faire beaucoup de bien ou beaucoup de mal.

Il n'y a plus à parlementer avec les Autrichiens qu'à coups de canon.


Ettlingen, 2 octobre 1805

Au prince Murat

Mon Cousin, je reçois votre lettre. Je porte ce soir mon quartier général dans la petite ville de Münchingen; je désire vous y voir pour vous dire tout ce que j'attends de vous, dans la mission que vous allez remplir. N'épargnez rien pour bien nourrir vos chevaux; ralentissez plutôt votre marche de six heures que de les fatiguer. Votre bataillon de dragons à pied a couché ce soir à Rastadt ; il ne s'est pas arrêté à Strasbourg ; enfin, il est en marche pour vous rejoindre. Le général Bourcier a couché à Rastadt et va également vous rejoindre avec ses quatre divisions de dragons. Vous allez flanquer toute ma marche, qui est délicate, en ce que c'est une marche oblique sur le Danube. Il faut donc, si l'ennemi voulait prendre l'offensive, que je sois averti à temps pour prendre un parti et ne pas être obligé de prendre celui qui conviendrait à l'ennemi. La division d'Hautpoul ne doit pas suivre votre mouvement; ce serait encombrer votre manœuvre. Mon intention est qu'elle suive ma marche, et elle arrivera rapidement à Aalen, en même temps que votre avant-garde arrivera à Heidenheim. Les dragons à pied doivent être bien fatigués; je ne les ferai pas passer avant le maréchal Ney ; ce serait exposer un corps que je veux ménager. Le maréchal Ney ne partira que le 12 (4 octobre) de Stuttgart; il vous suivra donc samedi. Les dragons à pied viendront après le maréchal Ney, formant votre réserve. Ainsi , par ce débouché , vous vous trouverez avoir 6,000 dragons à cheval, le corps du maréchal Ney de 20,000 hommes et les dragons à pied : ce qui vous formera un corps d'armée de 30 à 35,000 hommes. Je serai, de ma personne, avec le corps du maréchal Lannes, qui passera par Gmünd; ma Garde et la division d'Hautpoul feront la réserve de ce corps d'armée, qui  sera de 26,000 hommes. Vous voyez donc que, si l'ennemi débouche d'Ulm pour m'attaquer sur mon flanc, ces demi corps, que je pourrais lui opposer, seraient facilement renforcés par une partie du corps de Soult, que j'ai disposé en conséquence. Je vous expliquerai tout ceci dans la journée, avec plus de détails ; ainsi, attendez-moi à Münchingen.


Ludwigsburg, 2 octobre 1805

A l'Électeur de Bavière

Mon Frère, je reçois votre lettre du 1er octobre. Le roi de Prusse n'a jamais attaché aucune importance à ce qu'on ne passât point par Bayreuth et Anspach. Notre usage constant, dans la dernière guerre a été de passer par ce territoire aussi souvent qu'on l'a voulu. Mais je partage votre sentiment : les circonstances actuelles sont d'une nature différente. Il me suffit d'apprendre par vous qu'il pourrait être agréable à la Prusse que l'on ne passât pas sur ce territoire, pour que j'envoie sur-le-champ au maréchal Bernadotte l'ordre, non de n'y pas passer, puisque cela n'est plus possible, mais d'éviter d'y séjourner. Si la Prusse tenait un corps de 12 ou 15,000 hommes à Anspach et déclarait aux puissances belligérantes qu'elle entend maintenir la neutralité, nous ne perdrions rien à être arrêté sur ce point. Mais aujourd'hui, dégarnies comme le sont ces principautés, et lorsque l'usage contraire a prévalu, la Prusse ne serait pas raisonnable de nous faire cette querelle; d'ailleurs, je crois que des troupes autrichiennes, qui viennent de déboucher par la Bohême, ont passé par quelques villages de la domination prussienne. J'écris au reste par ce courrier une lettre au roi de Prusse, que je charge M. Otto de lui envoyer par courrier extraordinaire.

J'arrive à l'instant même à Stuttgart, où toute ma droite sera réunie demain. Dans la lettre que je vous ai écrite il y a un mois, je vous ai promis qu'au 15 vendémiaire je serai au centre de l'Allemagne ; j'espère pouvoir, avec l'aide de Dieu, vous rétablir bientôt à Munich. Ce jour-là me sera très-agréable sans doute ; mais je ne me donnerai point de repos et j'emploierai les grands moyens dont je dispose pour asseoir la puissance de votre Maison sur une base telle que vous n'ayez plus à craindre de quitter votre capitale ; et, dans la nouvelle position où je désire que la paix générale vous retrouve, j'espère que vous serez en état de résister aux premiers efforts de la Maison d'Autriche et d'attendre les secours des armées alliées.

Je vous prie de m'expédier fréquemment des courriers pour me prévenir des mouvements que pourraient faire les Autrichiens sur la gauche du Danube. Les électeurs, de Wurtemberg et de Bade ont réuni leurs troupes aux nôtres.


Ludwigsburg, 2 octobre 1805

A M. Otto

Je vous envoie une lettre pour MM. Duroc et Laforest. Il me devient instant d'être instruit des mouvements sur la gauche du Danube. Envoyez-moi donc un ou deux courriers par jour. Vous donnerez pour direction à vos courriers les avant-postes français. Je suis en pleine marche ; je marche sur Stuttgart. J'imagine que Bernadotte, Marmont et les Bavarois y sont déjà. J'espère vous remettre bientôt à Munich.


Ludwigsburg, 2 octobre 1805

Au général Duroc

Monsieur le Général Duroc, M. Otto vous fera passer cette lettre. L'électeur de Bavière croit que la Prusse me fera une querelle de ce que je fais passer le corps d'armée du maréchal Bernadotte par Anspach. J'ai ordonné qu'il y passe le moins possible, et surtout qu'il n'y séjourne pas. Quand j'ai reçu la lettre de l'Électeur, il n'était plus temps; une colonne avait déjà passé. Vous savez que, dans la dernière guerre, la Prusse n'a jamais compris Anspach ni Bayreuth dans la ligne de neutralité ; mais, quand elle déclarera aux puissances belligérantes qu'elle ne souffrira point que leurs troupes passent sur ce territoire, et qu'elle y mettra un bon corps de troupes, de mon côté j'en serai charmé.

Je n'ose pas trop vous dire quels sont mes projets et ma position. Je suis à Ludwigsburg, dans le palais de l'électeur de Wurtemberg, qui joint ses troupes aux miennes, ainsi que l'électeur de Bade. Mon armée est dans la meilleure position. Tous les mouvements sont commencés; nous sommes en grande manœuvre de guerre.

Les Autrichiens, qui s'étaient emparés de tous les débouchés de la forêt Noire, et qui s'étaient fortifiés à Ulm et à Memmingen , paraissent fort décontenancés. Il est probable qu'avant huit jours des évènements décisifs auront eu lieu. L'opinion est que les Autrichiens perdent un peu la carte. On suppose qu'ils ne nous attendaient que dans un mois. Faites-moi parvenir toutes les nouvelles que auriez. Adressez vos courriers à M. Otto, qui est toujours en mesure de me les faire passer.


Quartier impérial, Ludwigsburg, 3 octobre 1805

Au prince Joseph

Mon cher Frère, je suis entré hier à Ludwigsburg; je suis logé chez l'Électeur, qui s'est définitivement mis avec nous. Il n'y encore eu de sang répandu de part et d'autre; cependant, quelques patrouilles de cavalerie ennemie ont été coupées et l'on m'a amené une trentaine de prisonniers à cheval. Nous sommes tous en marche et en grandes manœuvres militaires.


Ludwigsburg, 3 octobre 1805

A M. Didelot

Mon ministre se rendra immédiatement à Stuttgart et se présentera chez les ministres d'Autriche et de Russie; il leur déclarera que c'est contre mes intentions qu'ils ont été mis aux arrêts; mais que mes généraux, dans la persuasion qu'ils rendent journellement compte à leurs gouvernements respectifs du mouvement de mes armées (et en cela ils font leur devoir), ont cru, quoique sans ordre de ma part, pouvoir prendre cette mesure de précaution. Il demandera et recevra d'eux la parole de s'abstenir, pendant huit jours, de toute communication directe ou indirecte avec leurs gouvernements, et leur annoncera qu'il est porteur de l'ordre de faire lever immédiatement leurs arrêts, et qu'ils peuvent continuer en toute sûreté à habiter Stuttgart, bien, ajoutera-t-il, que les événements de la guerre entraînent quelquefois après eux des mesures de rigueur et de violence même, qu'il est impossible à l'autorité souveraine de prévoir et de prévenir.


Quartier impérial, Ludwigsburg, 3 octobre 1805

A M. Otto

Monsieur Otto, répondez au maréchal Bernadotte qu'en vertu des conventions qui existaient dans la dernière guerre, relativement à la neutralité de la Prusse, la principauté d'Anspach , et, en général, les possessions prussiennes en Franconie n'étaient pas considérées comme étant comprises dans la ligne de neutralité qui avait été tracée, et ont pu être traversées par nos troupes, ainsi que le comté de la Marck, et que j'ai dû calculer que , pendant la guerre actuelle, les choses resteraient sur le même pied que celui de la dernière guerre, pour cet objet. C'est pourquoi les divisions de mon armée ont traversé quelques portions du territoire prussien en Franconie, comme l'ont fait aussi les troupes de l'électeur de Bavière pendant leur retraite, et comme l'a fait pareillement le corps d'Autrichiens qui vient de se présenter sur la Rednitz et qui a passé sur le territoire prussien en plusieurs endroits. Le maréchal Bernadotte devra traverser ce même territoire et éviter d'y séjourner, comme le ministre de la guerre le lui a dit hier. Il faut beaucoup de protestations en faveur de la Prusse, et témoigner beaucoup d'attachement pour elle et le plus d'égards qu'on pourra; puis, traverser ses possessions avec rapidité, en alléguant l'impossibilité de faire autrement , parce que cette impossibilité est réelle.


Quartier impérial, Ludwigsburg, 3 octobre 1806

SAUVEGARDE POUR L'UNIVERSITÉ DE HEIDELBERG

L'Empereur des Français, Roi d'Italie, dans l'intention de donner aux savants une nouvelle preuve de la protection spéciale qu'il accorde aux sciences et à ceux qui les cultivent, et d'après le vœu qui lui en a été exprimé par S. A. S. l'électeur de Bade, prend sous sa sauvegarde l'université de Heidelberg, ainsi que ses propriétés; ordonne à tous les corps de la Grande Armée de les respecter et charge les chefs qui les commandent de garantir cette institution, et ce qui en dépend, du trouble et des maux inséparables de la guerre.

Le maréchal Berthier, par ordre de l'Empereur.


Quartier impérial, Ludwigsburg, 3 octobre 1805

Au maréchal Lannes, sur la route de Schorndorf

Mon Cousin, poussez des partis le plus loin que vous pourrez sur Gmünd, sur Heidenheim, sur Aalen, et tâchez de me faire savoir demain si l'ennemi est à Nördlingen ou à Heidenheim, ou s'il est vrai qu'après avoir occupé Nördlingen, il l'ait évacué depuis deux jours. Il est probable que vos hussards trouveront quelques partis ennemis. Un bon moyen d'avoir des renseignements serait d'enlever quelques prisonniers. Vous les feriez interroger avec soin et vous me feriez parvenir leur interrogatoire.

Le maréchal Soult aura demain la division de Saint-Hilaire à Gaildorf. Elle a ordre d'envoyer des patrouilles de cavalerie sur vous. Faites-en marcher à sa rencontre et convenez d'un position intermédiaire avec cette division, soit pour demain , soit pour après-demain, où cette division doit être à Abtsgmünd, afin que, si j'avais quelque ordre pressé à lui transmettre, je puisse le faire sans perdre de temps et par votre moyen.


Quartier impérial, Ludwigsburg, 3 octobre 1805

Au maréchal Davout

Mon Cousin, le ministre de la guerre vous répond par ce courrier pour ce qui est relatif au territoire prussien. Prodiguez tous témoignages de considération et de bonne amitié pour le roi de Prusse.

Il serait possible que l'ennemi fit quelques manœuvres; il pourrait marcher au-devant de quelqu'un des corps d'armée, soit du côté de Heidenheim , dans ce cas , vous êtes trop loin et vous n'y pouvez rien ; soit en occupant Nördlingen, et c'est dans cette intention que j'ai attaché une brigade de grosse cavalerie à votre corps d'armée. Arrivez le plus bonne heure qu'il vous sera possible à Oettingen. Si l'ennemi a passé le Danube et occupé Nördlingen prenez position et communiquez avec le maréchal Soult, qui couche le 13 (5 octobre) à Ellwangen et doit être rendu le 14 (6 octobre) à Nördlingen; par ce moyen , vos corps d'armée donneront ensemble, et votre grosse cavalerie vous sera très-utile dans la belle plaine de Nördlingen. Si, au contraire, l'ennemi n'avait point passé le Danube depuis Ulm jusqu'à Donauwoerth, et prenait position sur l'Altmühl en débouchant par Neuburg ou Ingolstadt, et attaquait les généraux Marmont et 
et Bernadotte, passez la Wörnitz et portez-vous par le plus court chemin au secours de ces corps d'armée, en prévenant le maréchal Soult, qui a ordre de suivre le même mouvement. Envoyez des courriers au général Marmont. Je suppose qu'il devra avoir passé demain Rothenburg. Faites-lui connaître les ordres que vous avez.


Quartier impérial, Ludwigsburg, 3 octobre 1805

Au maréchal Soult

Mon Cousin, je vous ai fait donner l'ordre de faire filer votre 4e division en laissant seulement un détachement pour suivre le mouvement du parc. Comme le 13 (5 octobre) je serai à Gmünd, je verrai si j'aurai besoin de la division qui passe à Gaildorf; elle sera, toutefois, à portée, dans la position où elle sera le 14 (6 octobre) à Abtsgmünd, de marcher sur Nördlingen et de se joindre à vos autres divisions qui partiront le 13 (5 octobre) d'Ellwangen. Le maréchal Davout arrive le 13 (5 octobre) à OEttingen. Il a avec lui six régiments de grosse cavalerie formant la division du général Nansouty. Il doit se porter à Harburg le 14 (6 octobre); mais je lui fais connaître que, si l'ennemi se trouvait en force à Nördlingen, il se dirigerait sur ce point, de manière à se lier à votre gauche et à tomber ensemble sur l'ennemi. Si, au contraire, l'ennemi se portait sur Neuburg pour marcher sur Bernadotte, le maréchal Davout marcherait à grands pas au secours de Marmont et de Bernadotte, et vous-même, de Nördlingen , vous vous porteriez rapidement sur la Woernitz pour garder le débouché de Donauwoerth et servir de réserve à ces trois premiers corps d'armée, assez près cependant de l'ennemi, qui serait par là menacé de perdre sa communication avec Neuburg. Mon intention est, quand nous nous rencontrerons avec l'ennemi, de l'environner de tous côtés. Je désire que vous communiquiez souvent avec moi, pour me faire connaître soit ce que vous apprendrez de Davout, soit ce que vous saurez du côté de Nördlingen.


Quartier impérial, Ludwigsburg, 3 octobre 1805

Au général Songis

Monsieur le Général Songis, la route de l'armée est par Spire. Il est nécessaire que vous ayez une quantité de cartouches d'infanterie et de canons et obusiers de tous les calibres, pour pouvoir, immédiatement après la première affaire, renvoyer tous les caissons et voitures de munitions , afin qu'elles en ramènent deux ou trois cents voitures chargées de biscuit, qui bientôt seront disponibles. Si vous avez des munitions toutes prêtes à Spire , elles y seront envoyées. Je trouve de l'inconvénient à les faire aller à Strasbourg, car elles pourraient déserter en longeant la rive gauche du Rhin. Réunissez sans délai un grand approvisionnement à Spire , que nous pousserons ensuite à Heilbronn. L'électeur de Wurtemberg se chargera de me tenir plusieurs centaines de voitures qui iront d'Heilbronn à Spire, et de Spire à Heilbronn. Cela est préférable , en ce que nos propres voitures n'iraient qu'à Heilbronn pour s'approvisionner. Cet
objet est important.

Quand aurez-vous à Spire assez d'objets d'approvisionnement pour quatre à cinq cents voitures , indépendamment des voitures et attelages que vous vous procurez et qui peuvent toujours joindre ?


Quartier impérial, Ludwigsburg, 3 octobre 1805

Au maréchal Brune, commandant en chef l'armée de Boulogne

Je reçois votre lettre du 5 vendémiaire. Je vois avec plaisir qu'à l'heure qu'il est les fortifications de Boulogne sont achevées. Occupez-vous de leur donner une nouvelle force. Des lunettes intermédiaires aux grands ouvrages, bien fraisées et bien palissadées, un ouvrage sur le promontoire de Meurt, un sur la Crèche, peuvent être d'un bon effet. J'imagine que vos ouvrages sont bien palissadés. Continuez à y faire tous les travaux qui peuvent les rendre redoutables.

Je suis à Ludwigsburg ; une partie de l'armée est à Stuttgart, nous sommes en grandes manœuvres pour tourner l'ennemi. J'espère, sous peu de jours, des événements assez notables. Il n'y pas encore eu de sang versé. Deux patrouilles de cavalerie ont été coupées, ce qui nous a procuré une trentaine de prisonniers.


Quartier impérial, Ludwigsburg, 3 octobre 1805

A M. Talleyrand

Monsieur Talleyrand, je suis à Ludwigsburg. Il y a eu quelques difficultés pour l'entrée des troupes à Stuttgart; cela s'est heureusement terminé. J'ai été reçu ici grandement ; je suis logé dans le palais de l'Électeur; toutes ses troupes étaient sous les armes ; les clefs de la ville m'ont été présentées. J'ai vu l'Électeur aujourd'hui ; j'ai été fort content de son esprit ; c'est un homme qui en a beaucoup. Nous avons eu aussi quelques difficultés, de la part de la Prusse, pour le passage d'un des corps d'armée par Anspach ; cependant j'espère que la marche de ma colonne n'en sera pas arrêtée. Écrivez-en néanmoins au général Duroc et à M. Laforest : qu'ils fassent comprendre que j'ai dû partir de ce qui a été pratiqué dans la dernière guerre. Il y a des conventions par lesquelles le passage des troupes est permis par le territoire d'Anspach; si la Prusse persiste à établir un autre système, il faut qu'il soit connu. La Prusse dit qu'il a été connu de M. Mack; il fallait donc aussi qu'il nous fût communiqué.


Quartier impérial, Ludwigsburg, 3 octobre 1805

Au prince Eugène

Mon Cousin, je ne puis entrer dans les distributions intérieures des dépenses départementales; les circonstances sont trop urgentes; je m'en rapporte à ce que vous ferez. Faites ce qui est convenable pour les vélites et pour les gardes d'honneur; je l'approuverai. Nommez dans la ligne tous les officiers que vous jugerez devoir nommer; j'approuve ce que vous ferez. J'approuve que vous ayez fait établir de petits ponts de bois provisoires sur le Simplon.

Je suis à Ludwigsburg. Mes corps d'armée sont en grands mouvements militaires. L'ennemi parait un peu décontenancé. Les grands coups vont bientôt se porter. L'électeur de Wurtemberg a réuni ses troupes aux miennes. Je suis logé dans son palais.

J'attends avec impatience des nouvelles de ce qui se fait chez vous. On m'assure que les troupes autrichiennes du Tyrol italien filent sur l'Allemagne, ce qui vous dégagera d'autant.

Des patrouilles de cavalerie se sont rencontrées ; nous avons eu de petits avantages; nous avons déjà eu huit prisonniers. On m'annonce à présent un officier et vingt prisonniers à cheval. Le prince Murat, avec ses quatre divisions de dragons, bat les plaines d'Ulm; il est probable qu'il m'amènera quelque chose.


Ludwigsburg, 3 octobre 1805

ORDRE

Le maréchal d'Empire Alexandre Berthier, ministre de la guerre, grand-veneur de la Couronne, grand officier de la Légion d'honneur, commandant la 1e cohorte, grand-croix de l'Aigle Noir et de l'Aigle Rouge de Prusse, major général de la Grande Armée, déclare que l'Empereur des Francais, roi d'Italie, dans l'intention de donner aux savants une nouvelle preuve de la protection spéciale qu'il accorde aux sciences et à ceux qui les cultivent, et d'après le voeu qui lui en a été exprimé par S. A. S. l'Electeur de Bade, prend sous sa sauvegarde l'Université d'Heidelberg ainsi que ses propriétés, ordonne à tous les corps de la Grande Arméc et à ceux de ses alliés qui en font partie, de les respecter, et charge les chefs qui les commandent de garantir cet établissement et ce qui en dépend du trouble et des maux inséparables de la guerre.

 Cette disposition sera mise à l'ordre de l'armée.

(Picard)


Ludwigsburg, 4 octobre 1805, midi

A l'impératrice Joséphine

Je suis à Ludwigsburg. Je pars cette nuit. Il n'y a encore rien nouveau. Toute mon armée marche. Le temps est superbe. Ma réunion avec les Bavarois est faite. Je me porte bien. J'espère avoir dans peu de jours, quelque chose d'intéressant à mander.

Porte-toi bien, et crois à tous mes sentiments. Il y a ici une très belle Cour, une nouvelle mariée.


Quartier impérial, Ludwigsburg, 4 octobre 1805

Au prince Joseph

Mon Frère, je pars cette nuit. Les événements vont devenir tous les jours plus intéressants. Il suffit que vous fassiez mettre dans le Moniteur que l'Empereur se porte bien; qu'il était encore, vendredi 12 vendémiaire (4 octobre), à Ludwigsbourg; que la jonction de l'armée avec les Bavarois est faite. J'ai entendu hier, au théâtre de cette Cour l'opéra allemand de Don Juan; j'imagine que la musique de cet opéra est la même que celle de l'opéra qu'on donne à Paris; elle m'a paru fort bonne.


Quartier impérial, Ludwigsburg, 4 octobre 1805

A M. Cambacérès

Rien de nouveau. Je suis fort content de l'électeur de Wurtemberg, et, en général, de l'esprit de l'Allemagne. On est en général fort irrité contre les Anglais, et l'on prend en pitié la conduite de la 
Maison d'Autriche. Ma jonction est faite avec l'armée bavaroise. J'ai aussi avec moi des troupes de Wurtemberg et de Bade. Le temps est superbe; toutes mes colonnes sont en grande marche, et le mois de vendémiaire ne se passera pas sans de très-grands événements.


Quartier impérial, Ludwigsburg, 4 octobre 1805

A M. Champagny

Monsieur Champagny, je suis ici à la cour de Wurtemberg, et, tout en faisant la guerre , j'y ai entendu hier de très-bonne musique. Le chant allemand m'a paru cependant un peu baroque. La réserve marche-t-elle ? Où en est la conscription de l'an XIV ?


Quartier impérial, Ludwigsburg, 4 octobre 1805

A M. Barbé-Marbois

Nous vous maintenons ici la plus grande discipline. Personne ne s'aperçoit ici de la marche de nos troupes. Le prêt se fait et est assuré jusqu'au 20; mais nous y voilà arrivés, au 20. Dans ce pays, je vis avec des bons; je n'ai donc pas besoin d'argent spécialement. Assurez-moi la solde de brumaire. Je n'ai pas besoin de vous dire de vous concerter avec M. Dejean pour que les capotes, souliers et chevaux de remonte soient payés ; on se plaint qu'ils ne le sont pas. Le service ne s'est pas fait très-bien à Strasbourg ; je ne voulais pas vous écrire, pour ne pas vous dire que cela n'allait pas très-bien. Toutefois, tout peut encore se réparer. Portez une attention particulière pour que tout ce qui est imputé sur les fonds extraordinaires soit payé.

Tout va ici au mieux jusqu'à cette heure. Je suis vraiment servi par le temps d'une manière extraordinaire; depuis que j'ai passé le Rhin, le temps a été magnifique.


Quartier impérial, Ludwigsburg, 4 octobre 1805

A M. Fouché

Monsieur Fouché, il me semble que les journaux n'animent point assez l'esprit public. Nos journaux sont lus partout, surtout en Hongrie. Faites faire des articles qui fassent connaître aux Allemands et aux Hongrois combien ils sont dupes des intrigues anglaises; que l'empereur d'Allemagne vend le sang de ses peuples pour de l'or. L'Allemagne est montée à un point extraordinaire contre les Anglais. Il n'y a pas une ville où l'on ne dise que , tant que M. Pitt sera ministre, on s'égorgera pour l'ambition des Anglais.


Quartier impérial, Ludwigsburg, 4 octobre 1805

A M. Otto

Je reçois votre lettre du 8 vendémiaire; les nouvelles que vous donnez des Russes ne sont pas assez précises. Je vous avais mandé d'envoyer quelqu'un à Teschen, à Olmütz, afin de savoir positivement quand ils arrivent et avoir le rapport de quelqu'un qui les ait vus, rapport que je n'ai pas encore eu. Je recevrai avec plaisir le baron de Gravenreuth, et je lui accorderai ma confiance après le bien que vous m'en dites. Tout le monde est en marche.

J'espère fortement qu'avant le 25 vendémiaire (17 octobre) je pourrai remettre l'Électeur à Munich; faites-moi connaître si son intention est d'y venir ou à qui il veut donner la régence.

L'affaire d'Anspach ne peut être un sujet de querelle avec la Prusse : d'abord, parce que je n'en ai pu être prévenu , et qu'il ne suffit pas de prévenir mon général; ensuite, parce que j'ai dû suivre les errements de la dernière guerre, dans laquelle l'on passait à Anspach comme l'on voulait. C'est dans ce sens que vous devez en parler avec le ministre de Prusse et avec l'Électeur.

Deux patrouilles ennemies ont été coupées, ce qui nous a valu un détachement d'une quarantaine d'hommes à cheval prisonniers. Assurez bien l'Électeur que je ne poserai pas les armes que je ne l'aie mis en état d'entretenir une armée de 50,000 hommes et de n'avoir aucune espèce de lien ni de dépendance avec la Maison d'Autriche.

Les princes de Wurtemberg trouvent ici que l'Électeur a eu tort de ne point porter des plaintes à Ratisbonne et même des plaintes énergiques.

Vous recevrez ce courrier de vendredi à samedi; je désire que vous me le renvoyiez, pour que je le reçoive avant le 14 (6 octobre) et que je sache tout ce qu'il y a de nouveau de vos côtés.

Il serait aussi assez convenable que l'Électeur fit une proclamation à son peuple, où il fit sentir toutes les vexations qu'a commises envers lui la Maison d'Autriche.


Quartier impérial, Ludwigsburg, 4 octobre 1805

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, vous donnerez l'ordre au maréchal Augereau de faire continuer la marche de ses colonnes jusqu'à Huningue, de passer sur-le-champ le Rhin, et de réunir tout son corps d'armée dans le pays de Fribourg.


Quartier impérial, Ludwigsburg, 4 octobre 1805

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, le quartier général se rendra demain à Schorndorf. La cavalerie de la Garde, avec sa division d'artillerie, partira demain à la petite pointe du jour et se rendra à mi-chemin de Schorndorf à Gmünd. La cavalerie du général d'Hautpoul partira demain à dix heures du matin et ira coucher à une lieue en arrière de Schorndorf. La garde à pied, avec les bagages et avec l'artillerie, partira à six heures du matin et ira s'établir en avant de Schorndorf. Vous ferez connaître au général d'Hautpoul qu'il fait l'arrière-garde; qu'il doit laisser un régiment pour pousser devant lui les traînards, les convois et les détachements. Ce régiment pourra coucher demain , 13 (5 octobre), à deux lieues en arrière de Schorndorf. Donnez l'ordre au général Bourcier de partir demain, à dix heures du matin, de Stuttgart, pour coucher à Esslingen. Vous lui direz qu'il fait l'arrière-garde et qu'il faut pousser les traînards, les convois et les détachements quelconques devant lui , afin que rien ne reste en arrière. Le 14 (6 octobre), le général Bourcier se rendra à Geislingen, pour éclairer tous les débouchés d'Ulm et couvrir tous les mouvements. Le prince Murat réunira les autres divisions à Heidenheim. La cavalerie légère du maréchal Ney tiendra des postes à Giengen pour éclairer les débouchés de Gundelfingen pendant le temps qu'il sera à Heidenheim. En donnant ces ordres au prince Murat et au maréchal Ney, vous leur direz, je pense, que l'ennemi est encore derrière le Danube et ne fait encore aucun mouvement offensif, comme tout porte à le penser.


Luisbourg, 4 octobre 1805

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, donnez ordre au payeur de faire partir le 15 de Strasbourg pour Heilbronn 2.000.000 destinés pour la solde de l'armée. Écrivez au prince Louis de Bade que le 15 ce convoi doit partir de Strasbourg, que je désire qu'il se charge de le faire escorter par les troupes de Bade et donne des ordres en conséquence au général qui les commande. Il sera bon que l'officier supérieur qui doit commander l'escorte se rende à Strasbourg. Le convoi passera le pont de Spire où il sera le 17. Là le prince Louis le fera escorter par le nombre de troupes qu'il croira nécessaire suivant les circonstances et il le dirigera sur Heilbronn où il devra être arrivé le 20. En cas que l'ennemi fit quelque pointe, ce que je ne suppose pas, il donnera les ordres convenables pour que le convoi ne puisse jamais tomber en leur pouvoir. Abouchez-vous aujourd'hui avec le général qui doit commander les troupes de Wurtemberg pour qu'il fasse des dispositions pour l'escorte du convoi en question afin de le garantir, à partir du moment où il arrivera sur le territoire de Wurtemberg et pour que dans tous les événements imprévus,  il le mette à l'abri de toute atteinte. Le Wurtemberg doit me fournir quelques troupes de chasseurs ou d'infanterie légère pour me suivre. Arrangez tout avec le général wurtembergeois pour qu'elles partent demain pour Schorndorff. Ayez toujours un officier de Wurtemberg à votre quartier général pour faciliter les événements et, donner des renseignements sur le pays et sur ce qui s'y passe. Vous disposerez tout ce qu'il faut avec le général wurtembergeois pour qu'on puisse mobiliser les troupes et pour garantir les pays de l'Electeur des patrouilles ennemies. Vous me présenterez aujourd'hui ce général pour que je cause avec lui.

(De Brotonne)


4 octobre 1805

NOTE DICTÉE PAR L'EMPEREUR AU MINISTRE DES RELATIONS EXTÉRIEURES

La rapidité de la marche de l'Empereur n'a pas permis d'écrire, ces deux jours passés.

Le 12, dans l'après-midi, l'Empereur est allé à Stuttgart avec le prince Paul, second fils de l'Électeur de Wurtemberg, dans les voitures de la cour. Il a assisté, au retour, à l'opéra allemand de Don Juan; après le spectacle, il a soupé en présence de toute la cour, avec l'Électeur et sa famille.

La cour de Wurtemberg paraît être noble et grande. L'Électrice (Charlotte-Auguste-Mathilde, fille de Georges III, roi de la Grande-Bretagne, seconde femme de Frédéric ler, née le 29 septembre 1766, morte le 6 octobre 1828.) est aimable et n'est pas bien traitée, à ce que l'on assure, par l'Électeur auquel elle paraît cependant fort attachée. Les deux plus belles princesses sont la fille du prince Eugène de Wurtemberg ( Frédérique Sophie-Dorothée-Marie- Louise de Wurtemberg, 4 juin 1789 - 26 juin 1831). Elle épousa le 28 septembre 1811 Frédéric - Auguste- Charles, prince de Hohenlohe-OEhringen.), frère de l'Electeur et l'épouse du prince Paul (Catherine-Charlotte -Georges-Frédérique-Sophie-Louise-Thérèse, princesse de Saxe-Altenbourg, non de Saxe-Hildburghausen, 17 juin 1787 - 12 décembre 1847.), née princesse de Saxe-Hildburghausen et nièce de la reine de Prusse, mariée depuis trois jours.

Le 13, au matin, l'Empereur est allé voir la forteresse d'Asperg, à une lieue de Luidsburg, accompagné du prince Paul; au retour il a conféré pendant deux heures avec l'Electeur; il est ensuite remonté en voiture pour se rendre à  Gmünden où il a couché. L'Électeur et toute sa suite l'ont reconduit jusqu'à la porte.

Le 14, il est parti de Gmunden, à 6 heures du matin, s'est rendu à Alen où il a déjeuné; il a donné là quelques ordres et est parti pour Nordlingen, à cheval, y a couché et en est reparti, le 15, pour Donauwerth, à 8 heures du matin, accompagné seulement du ministre de la guerre et de deux on trois de ses officiers; il doit revenir à Nordlingen.

L'armée est en pleine marche sur le Danube, et, depuis Alen, nous soupons et couchons dans les maisons où l'ennemi était la veille. Il n'y a pas encore eu un coup de canon de tiré. L'Empereur se porte très bien et paraît fort content de son armée et de l'ennemi.

(De Brotonne)


Quartier impérial, 4 octobre 1805

Au maréchal Bernadotte

Mon Cousin, le maréchal Berthier vous envoie la position de l'armée aujourd'hui. Tout marche bien; une quarantaine d'hommes du régiment à cheval de Latour ont été enlevés par notre cavalerie. Le prince Murat, avec ses divisions de dragons, balaye aujourd'hui la plaine d'Ulm; cela nous donnera probablement des nouvelles. Il parait que l'ennemi a déjà fait filer quelque chose sur Donauwoerth et Ingolstadt; cependant son mouvement est faible, et je ne le crois pas entier. Il occupe toujours Stockach, Memmingen et le Tyrol. Voyez à préparer les moyens de jeter un pont sur le Danube, et concertez-vous avec les généraux bavarois; je voudrais le jeter entre Neubourg et Ingolstadt, au point le plus favorable au passage. Le quartier général sera le 16 (8 octobre) à Nördlingen. Si je puis me procurer d'une manière ou d'autre des moyens pour passer le Danube, je voudrais le passer à la fois sur trois points. Faites-moi connaître ce que disent les officiers bavarois, et les renseignements du pays, et répondez-moi à ces deux questions :

1° Entre Neuburg et Ingolstadt quel est le point le plus favorable pour passer le Danube ?
2° Quels moyens pourrez-vous avoir ? Pourrez-vous vous saisir de quelques bateaux sur le Danube ou en amener quelques-un des petites rivières voisines ?

Le 7e corps d'armée commandé par le maréchal Augereau sera dans huit jours sur le Rhin. Tous les rapports que j'ai portent que l'ennemi est fort déconcerté de ces mouvements. Je regrette bien que vous n'ayez pu amener quelques bateaux avec vous.


Quartier impérial, Ludwigsburg, 4 octobre 1805

Au général Marmont

Monsieur le Général Marmont, vous sentez de quelle importance il doit être pour votre corps d'armée d'avoir avec lui des moyens de passer les rivières et le Danube. Vous ferez bien, en conséquence, de rassembler tous les bateaux et toutes les nacelles qui pourraient se trouver dans votre arrondissement et de les tenir disposés à être transportés partout où besoin sera.


Quartier impérial, Ludwigsburg , 4 octobre 1805

Au prince Murat

La division de dragons du général Bourcier doit flanquer la marche de l'armée, du côté de Geislingen. Avec vos trois divisions, portez-vous rapidement sur Heidenheim, afin d'éclairer la plaine de Nördlingen. Je suppose que l'ennemi n'a fait aucun mouvement offensif, car, en ce cas, vous vous conduiriez suivant les circonstances, en attendant de nouveaux ordres.

Le maréchal Soult me fait savoir que l'ennemi a plusieurs escadrons entre Nördlingen et Ellwangen; pendant qu'ils feront le coup de sabre avec les hussards du 3e corps d'armée, il vous serait facile de les couper en leur barrant le chemin de Donauwoerth. Je suppose que l'ennemi n'a pas de forces considérables à Nördlingen , et qu'il n'a qu'une tête de colonne pour éclairer la plaine; en un mot, que son projet continue à être de rester derrière le Danube. Si cela était ainsi, et que l'ennemi n'eût qu'un ou deux régiments d'infanterie et autant de cavalerie, voyez si , avec vos 8,000 dragons, vous ne pourriez pas les couper conjointement avec la cavalerie légère des maréchaux Lannes et Ney; en en prévenant le maréchal Soult, toute sa cavalerie légère viendrait se trouver aussi à l'affaire. Mais mon intention est qu'on ne tente cette opération qu'autant que l'ennemi aurait là moins de 6,000 hommes d'infanterie. Ce qui m'importe, c'est d'avoir des nouvelles. Envoyez donc des agents et des espions, et surtout faites des prisonniers.


Quartier impérial, Ludwigsburg, 4 octobre 1805

Au maréchal Soult

Mon Cousin, le maréchal Berthier vous fait connaître aujourd'hui quelle est la situation de l'armée. Il vous donnera l'ordre de faire arriver mon équipage de pont à Nördlingen, pour le 14 on le 15 (6/7 octobre). N'allez pas me dire que cela est impossible. Requérez tout ce qu'il vous faut de chevaux pour cet objet. Mettez les pontonniers sur les voitures; faites marcher l'équipage jour et nuit, et faites en sorte moins que j'aie, le 14 ou le 15 (6/7 octobre), cinq ou six bateaux à Nördlingen, si je n'y puis avoir la totalité de mon équipage de pont. Il y a, sur la Woernitz , des bois, des bateaux en construction, des nacelles. Tâchez de faire surprendre tout cela, afin de m'en faire d'autres moyens de passage qui me mettront à même, s'il est possible, de surprendre également quelque pont de bois, dont l'ennemi aurait rompu deux ou trois arches, et de les réparer en peu d'heures. Prenez tous les renseignements nécessaires et méditez attentivement sur cette opération. Je n'ai pas besoin de vous dire que je préfère passer le Danube entre le Lech et Ingolstadt. Cependant il me serait fort utile d'avoir quelques moyens de passage du côté de Donauwoerth, tant pour occuper l'ennemi que pour y faire passer ma droite.


Quartier impérial, Ludwigsburg, 4 octobre 1805

Au maréchal Davout

Mon Cousin, on m'assure qu'il serait possible de trouver à Oettingen quelques nacelles et bateaux, et peut-être s'en trouve-t-il sur l'Altmühl. Si l'ennemi se tient sur la défensive derrière le Danube, voyez à vous procurer des nacelles et des bateaux, soit sur la Woernitz, soit sur l'Altmühl.


Quartier général impérial et royal, Ludwigsburg, 4 octobre 1805

Au maréchal Berthier, major-général

Mon Cousin, donnez l'ordre à un capitaine, un lieutenant et à l'-@10 lombrics des 2", 126 et 281 d'infanterie légère, de partir de Paris et de Cherbourg, où ils se trouvent, du 20 vendémiaire au 1er brumaire, et de se diriger sur Spire pour compléter leurs bataillons d'élite. Donnez l'ordre aux dix troisièmes bataillons qui sont à Boulogne et aux deux troisièmes bataillons qui sont à Anvers de faire partir chacun 120 hommes sous les ordres d'un capitaine, d'un lieutenant et de deux sergents, pour se rendre à Spire et y rejoindre les bataillons de guerre. Donnez le même ordre à tous les troisièmes bataillons de l'armée, et tous ces détachements seront dirigés de manière à arriver tous à Spire au ler frimaire. Vous chargerez un adjudant commandant de conduire cette colonne qui sera de plus de 12.000 hommes, et il suivra la route qui lui sera indiquée pour joindre l'armée. Vous ordonnerez qu'ils aient des capotes, deux paires de souliers dans leurs sacs et qu'ils soient parfaitement armés. Il faudra que la moitié soit à l'école de bataillon, et l'autre moitié pourra n'être qu'à l'école de peloton. Ordonnez au général commandant l'artillerie de faire venir des détachements des compagnies qui sont à l'armée afin de maintenir ces compagnies au complet et que le déficit que feront les batailles et les maladies soit rempli.

(Picard)


Quartier impérial, Ludwigsburg, 5 octobre 1805

Au roi de Prusse

J'apprends qu'il y a quelques difficultés pour le passage sur le marquisat d'Anspach. Je suis parti de la convention de Bâle et de l'usage de la guerre passée. Cependant je suis bien loin de vouloir refuser à Votre Majesté le droit de se comporter comme elle le veut dans ses États ; mais elle est trop juste pour ne pas convenir qu' faut que j'en sois instruit lorsque cela déroge à l'usage des guerres passées. Je désire apprendre, Monsieur mon Frère, que Votre Majesté n'a contre moi aucune mauvaise volonté pour ce qui s'est passé; elle peut rester persuadée de mon désir de lui être agréable.

Le prince Eugène de Wurtemberg donnera à Votre Majesté des nouvelles du Danube; si je pouvais penser que cela pût lui être agréable, je m'empresserais de lui en donner quelquefois directement, lorsqu'il y aurait des événements qui en mériteraient la peine.


Quartier impérial, Ludwigsburg, 5 octobre 1805

A M. Otto

L'aide de camp de l'Électeur m'a apporté votre dépêche. Il parait qu'il est resté plus de 6,000 Bavarois à Würzburg ; cela est trop. Je pars à l'instant même de Ludwigsburg. Je serai à Nördlingen, sur le territoire de Bavière, demain 14 (6 octobre). Mes corps d'armée sont en très-grande marche; les corps bavarois et ceux des généraux Bernadotte et Marmont aussi, appuyés par les généraux Ney et Soult. Le 15 et le 16 (7/8 octobre), nous serons tous depuis Donauwoerth jusqu'à Ingolstadt. Jamais une si grande quantité de troupes n'aura manœuvré dans un si petit espace. Pourquoi l'Électeur ne viendrait-il pas assister au passage du Danube et à notre entrée chez lui ? Je n'attache au reste aucune importance à ce que je vous dis là.


Quartier impérial , Ludwigsburg, 5 octobre 1805

A M. Talleyrand

Monsieur Talleyrand, je monte en voiture pour me rendre à Nördlingen et me trouver au centre de mon armée. L'ennemi parait excessivement déconcerté. Cependant il paraît que 22,000 Russes sont arrivés à Vienne. Je viens d'approuver le traité conclu avec l'électeur de Wurtemberg. Faites-le ratifier en règle et expédiez-le pour les échanges. M. Didelot vous aura écrit en détail tout ce qui s'est passé ici ; vous pourrez en tirer quelques articles pour les journaux.


Quartier impérial, Gmünd, 5 octobre 1805, 10 heures et demie du soir.

Au prince Murat

Je serai demain à Aalen à huit ou neuf heures du matin. Faites-moi parvenir des nouvelles de ce qui se sera passé. Le maréchal Soult me mande qu'il pense qu'il y a 5,000 ou 6,000 hommes à Nördlingen; au reste, il y sera demain à la pointe du jour avec son corps d'armée. J'ai rencontré à mon passage à Cannstad un dépôt de la division du général Klein avec des chevaux à la main qui suivaient la route de Göppingen : en suivant cette route, ces chevaux s'exposeraient à être pris. J'ai changé les routes, mais les généraux de dragons devraient rendre compte des ordres qu'ils donnent et des dépôts qu'ils forment, afin que l'état-major général puisse les diriger dans les lieux convenables et selon la direction générale de l'armée.

Du moment que l'ennemi aurait évacué Nördlingen et qu'on serait sûr qu'il s'est dirigé sur Donauwoerth, je pense que tout ce qui est dépôt de dragons et de cavalerie doit se diriger sur Noerdingen.

Le général Bourcier, avec sa division de dragons, peut être difficilement forcé par la cavalerie et ne doit se retirer que quand il voit de l'infanterie en force. L'ennemi ne peut être en mesure de prendre position du côté d'Ulm. Le général Bourcier doit prendre les positions du général Walther, non-seulement pour demain 14, mais après-demain 15. Donnez-lui donc l'ordre de cerner Ulm par des postes à trois lieues de distance et sur tous les débouchés, soit sur ceux de Heidenheim, soit de Geislingen. Il est assez important de masquer nos mouvements à l'ennemi. Faites-moi connaître d'avance les routes que vous comptez prendre pour vous rendre de Heidenheim à Donauwoerth. Ménagez les chevaux, qui sont déjà un peu faibles, en faisant vos reconnaissances par des piquets de chevaux forts et en bon état.


Ludwigsburg, 5 octobre 1805

Je pars à l'instant pour continuer ma marche. Tu seras, mon amie, cinq on six jours sans avoir de mes nouvelles; ne t'en inquiète pas; cela tient aux opérations qui vont avoir lieu. Tout va bien, et comme je le pouvais espérer.

J'ai assisté à une noce du fils de l'Électeur avec une nièce du roi de Prusse. Je désire donner une corbeille de 36 à 40,000 francs à la jeune princesse. Fais-la faire, et envoie-la par un de mes chambellans à la nouvelle, mariée, lorsque ces chambellans viendront me rejoindre. Il faut que ce soit fait sur-le-champ.

Adieu, mon amie ; je t'aime et t'embrasse.


Quartier impérial, Aalen, 6 octobre 1805

Au maréchal Davout

Mon Cousin, je reçois votre lettre à mon arrivée à Aalen. Le prince Murat est en grande marche avec toutes les divisions de dragons pour se rendre de Neresheim à Donauwoerth; il y sera ce soir ou demain matin à la pointe du jour. Du moment que mes pontons seront arrivés, dirigez-les sur Donauwoerth au pont de Harburg, à deux lieues de Donauwoerth, et faites reconnaître la route qui devrait les conduire au delà de l'embouchure du Lech, du côté de  Bertolzheim. Mon intention est de jeter mes ponts de bateaux au delà de l'embouchure du Lech, afin de tourner cette position; mais si je puis surprendre le pont de Donauwoerth, cela ne m'empêchera pas d'en profiter sur-le-champ. Le maréchal Davout va sans doute à chercher à s'emparer du pont de Neuburg. Faites reconnaître la meilleure position, entre l'embouchure du Lech et Neuburg, où on pourrait tenter le passage. Je pars dans une heure pour Nördlingen, où je serai à trois ou quatre heures après midi ; ne manquez pas de m'y envoyer des nouvelles.


Quartier impérial, Nördlingen, 7 octobre 1805

ORDRE DU JOUR

Soldats bavarois, je me suis mis à la tête de mon armée pour délivrer votre patrie d'injustes agresseurs.

La Maison d'Autriche veut détruire votre indépendance et vous incorporer dans ses vastes Etats. Vous serez fidèles à la mémoire de vos ancêtres qui, quelquefois opprimés, ne furent jamais abattus, et conservèrent toujours leur indépendance, leur existence politique, premiers biens des nations, comme la fidélité à la Maison Palatine est le premier de vos devoirs.

En bon allié de votre souverain, j'ai été touché des marques d'amour que vous lui avez données dans cette circonstance importante. Je connais votre bravoure; je me flatte qu'après la première bataille je pourrai dire à votre prince et à mon peuple que vous êtes dignes de combattre dans les rangs de la Grande Armée.


Nördlingen , 7 octobre 1805

1er BULLETIN DE LA GRANDE ARMÉE

L'Empereur est parti de Paris le 2 (24 septembre) vendémiaire et est arrivé le 4 (26 septembre) à Strasbourg.

Le maréchal Bernadotte qui, au moment où l'armée était partie de Boulogne, s'était porté de Hanovre sur Göttingen, s'est mis en marche par Francfort pour se rendre à Würzburg, où il est arrivé le ler vendémiaire (23 septembre).

Le général Marmont, qui était arrivé à Mayence, a passé le Rhin sur le pont de Cassel et s'est dirigé sur Würzburg, où il a fait sa jonction avec l'armée bavaroise et le corps du maréchal Bernadotte.

Le corps du maréchal Davout a passé le Rhin le 4 (26 septembre), à Mannheim, et s'est porté, par Heidelberg et Neckarelz, sur le Neckar.

Le corps du maréchal Soult a passé le Rhin le même jour, sur pont qui a été jeté à Spire, et s'est porté sur Heilbronn.

Le corps du maréchal Ney a passé le Rhin le même jour sur le pont qui a été jeté vis-à-vis de Durlach, et s'est porté à Stuttgart.

Le corps du maréchal Lannes a passé le Rhin à Kehl 1e 3 (25 septembre) et s'est rendu à Ludwigsburg.

Le prince Murat , avec la réserve de cavalerie, a passé le Rhin à Kehl le 3, et est resté en position pendant plusieurs jours devant les débouchés de la forêt Noire ; ses patrouilles, qui se montraient fréquemment aux patrouilles ennemies , leur ont fait croire que nous voulions pénétrer par ces débouchés.

Le grand parc de l'armée a passé le Rhin à Kehl le 8 et s'est rendu à Heilbronn.

L'Empereur a passé le Rhin à Kehl le 9, a couché à Ettlingen le même jour, y a reçu l'électeur et les princes de Bade, et s'est rendu à Ludwigsburg chez l'électeur de Wurtemberg, dans le palais duquel il a logé.

Le 10, les corps da maréchal Bernadotte et du général Marmont et les Bavarois, qui étaient à Würzburg, se sont réunis et se sont mis en marche pour se rendre sur le Danube.

Le corps du maréchal Davout s'est mis en marche de Neckarelz et a suivi la route de Moeckmühl, Ingelfingen, Crailsheim, Dinkelsbühl, Fremdingen, OEttingen, Harburg et Donauwoerth.

Le corps du maréchal Soult s'est mis en marche de Heilbronn et a suivi la route d'Oeringen, Hall, Gaildorf, Abtsgmünd, Aalen et Nördlingen.

Le corps du maréchal Ney s'est mis en marche sur Stuttgart et a suivi la route d'Esslingen, Göppingen , Weissenstein, Heidenheim, Neresheim et Nördlingen.

Le corps du maréchal Lannes s'est mis en marche de Ludwigsburg et a suivi la route de Beutelsbach, P1üderhausen, Gmünd, Aalen et Nördlingen.

Voici la position de f armée au 14 : (6 octobre)

Le corps du maréchal Bernadotte et les Bavarois étaient à Weissenburg.

Le corps du général Marmont, à Wassertründingen..

Le corps du maréchal Davout, à OEttingen, à cheval sur la Woernitz.

Le corps du maréchal Soult, à Donauwoerth, maître du pont de Münster, et faisant rétablir celui de Donauwoerth.

Le corps du maréchal Ney, à Geislingen.

Le corps du maréchal Lannes, à Neresheim.

Le prince Murat, avec ses dragons, bordant le Danube.

L'armée est pleine de santé et brûlant du désir d'en venir aux mains.

L'ennemi s'était avancé jusqu'aux débouchés de la forêt Noire, où il paraît qu'il voulait se maintenir et nous empêcher de pénétrer. Il avait fait fortifier l'Iller. Memmingen et Ulm se fortifiaient en grande hâte.

Les patrouilles qui battent la campagne assurent qu'il a contre-mandé ses projets et qu'il parait fort déconcerté par nos mouvements, aussi nouveaux qu'inattendus.

Les patrouilles françaises et ennemies se sont souvent rencontrées. Dans ces rencontres, nous avons fait 40 prisonniers du régiment à cheval de Latour.

Ce grand et vaste mouvement nous a portés en peu de jours en Bavière, nous a fait éviter les montagnes Noires, la ligne des rivières parallèles qui se jettent dans la vallée du Danube, l'inconvénient attaché à un système d'opérations qui auraient toujours en flanc les débouchés du Tyrol, et, enfin, nous a placés à plusieurs marches derrière l'ennemi, qui n'a pas de temps à perdre pour éviter sa perte entière.


Quartier impérial, Donauwoerth, 8 octobre 1805

A M. Otto

Les événements se succèdent avec rapidité. J'ai passé hier le Danube et le Lech. J'ai fait attaquer Augsbourg et Aichach, où l'on doit être à l'heure qu'il est. Il serait possible qu'on eût enveloppé là 10,000 hommes qui, du Danube, ont fait leur retraite sur cette position. Douze bataillons de grenadiers viennent d'être enveloppés à Wertingen entre le Lech et le Danube ; artillerie, drapeaux et la plus grande partie du corps ont été pris. Le maréchal Bernadotte et les Bavarois doivent être demain à Ingolstadt. Je me porte sur les derrières d'Ulm. Tous les jours deviennent intéressants, et si l'ennemi fait quelques fautes, elles peuvent avoir des résultats funestes pour lui. Faites connaître cela à Duroc, à Berlin, et à l'Électeur, auquel j'écrirai quand je pourrai lui annoncer que son pays est reconquis, après une grande bataille, qui aura lieu un de ces jours.


Quartier impérial, Donauwoerth , 8 octobre 1805

ORDRE POUR LA GARDE

SERVICE GÉNÉRAL

Un général de brigade sera tous les jours de service.

Il recevra toutes les deux heures le rapport de tous les postes et les fera passer sur-le-champ à l'Empereur.

Le chef d'état-major, comme les généraux de brigade de la Garde, fera son service.

SERVICE DE LA CAVALERIE

Il y aura tous les jours un chef d'escadron de service qui se tiendra constamment au pont de Donauwoerth, hormis le moment où il fera la ronde de ses postes.

Il y aura trois bivouacs ; deux commandés par des capitaines et toujours de 60 hommes chacun, et un par un lieutenant et composé de 25 hommes.

Le premier bivouac, commandé par un capitaine et composé de 60 hommes, sera placé à cent toises en avant du pont de Donauwoerth, à la jonction des chemins d'Augsbourg et de Rain. Il aura, cent toises en avant, des vedettes sur chacun de ces deux chemins, et deux autres le long du Danube, sur les chemins de traverse.

Le second bivouac se tiendra sur les hauteurs, entre Erlingshofen et Donauwoerth , interceptant le chemin d'Ulm à Donauwoerth. Il aura un poste d'un brigadier et de 4 hommes, au village d 'Erlingshofen , qui sera relevé toutes les six heures, et une vedette sur le pont de Münster.

Le troisième bivouac, commandé par un lieutenant et composé de 25 hommes, se tiendra sur le chemin de Donauwoerth à Neuburg, sur la route du village de Zürgesheim. Il aura des gardes sur la route qui longe le Danube et sur celle d'en haut.

SERVICE DE L'INFANTERIE

L'infanterie aura un chef de bataillon, tous les jours de service, qui se tiendra sur la grande place, hormis le temps où il fera ses rondes.

L'infanterie aura trois bivouacs : un derrière le pont de Donauwoerth, pour sa défense, composé d'une compagnie entière de chasseurs; une autre compagnie sur les hauteurs de droite, et une sur la hauteur de gauche de Donauwoerth. Les capitaines rendront compte toutes les deux heures des mouvements de la droite et de gauche, soit des troupes qui partiraient, soit de celles qui arriveraient.

Les cinq portes de Donauwoerth auront chacune un officier et un corps de garde de 15 hommes.

Il y aura, sur la place, une réserve d'une compagnie prête à seporter partout où il sera nécessaire.

SERVICE DE LA GENDARMERIE D'ÉLITE

Une brigade de la gendarmerie d'élite sera en avant du pont de Donauwoerth. Toutes les voitures, les courriers, malles qui arriveraient, seront conduits au quartier général. Ils ne communiqueront avec personne avant que l'Empereur ait donné des ordres et les ait fait interroger.

Personne ne sortira de Donauwoerth, si le maréchal des logis n'a constaté que ce sont des Français et des individus de l'armée.

Deux autres brigades seront de service sur la place pour se porter partout où le service l'exigera, soit pour l'arrivée des prisonniers, soit pour tout autre événement, et deux brigades rouleront dans les villages voisins pour empêcher les soldats de piller et maintenir l'ordre, ce qui fera en tout cinq brigades par jour.

SERVICE DE L'ARTILLERIE

Quatre pièces de canon seront mises en batterie pour défendre le pont de Donauwoerth : deux en avant du pont et deux sur la chaussée à droite, dans la prairie ; les canonniers seront toujours là, la mèche prête à être allumée, les pièces en batterie.


Quartier impérial, Donauwoerth, 8 octobre 1805

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, le maréchal Lannes partira dans la journée avec son corps d'armée et occupera Wertingen. Il poussera son avant-garde aussi loin qu'il le pourra sur la route de Burgau ; il communiquera par des patrouilles de cavalerie avec le maréchal Ney par le pont de Dillingen. Il aura soin de tenir bien éclairé tout le pays entre le Danube et la Zusam. Vous donnerez l'ordre au maréchal Soult de diriger les divisions de Saint-Hilaire, de Legrand et de Vandamme, avec son quartier général, à Augsbourg, toutefois, après s'être assuré que l'ennemi n'est pas en force à Aichach et que le maréchal Davout est maître de Neuburg et de son pont. Donnez ordre au général Marmont de s'emparer d'Ingolstadt aujourd'hui, s'il peut le faire plus promptement que le maréchal Bernadotte, qui a ordre de l'occuper demain.


Quartier impérial, Donauwoerth, 8 octobre 1805

Au maréchal Lannes

Mon Cousin, le général Kienmayer, qui a voulu hier défendre le Lech, s'est retiré sur Augsbourg. Soult, avec deux divisions, est à sa poursuite sur la droite du Lech, et deux autres divisions sur la rive gauche. J'espère que ce corps sera entamé. Il me tarde d'apprendre que vous êtes maître du pont de Günzburg. Je ne puis plus penser que l'ennemi puisse avoir d'autre projet que de se retirer Augsbourg, ou sur Landsberg, ou même sur Füssen. Toutefois, il pourrait hésiter, et, dans ce cas, c'est à nous à faire en sorte que pas un n'échappe. Je ne doute pas qu'il ne puisse revenir quelques-unes de ses forces du Tyrol. Votre position à Günzburg est favorable pour vous porter partout où il faut.


Quartier impérial, Donauwoerth, 8 octobre 1805

Au maréchal Soult

Mon Cousin, j'ai prévenu le prince Murat que l'ennemi s'est retiré sur Augsbourg. J'ai prévenu Saint-Hilaire, que j'ai renforcé du 18e de ligne qui était resté à Donauwoerth. Votre parc de réserve, où il y a plus de 150 caissons, vient d'être dirigé sur Augsbourg et se tiendra à mi-chemin. Le prince Murat, avec 10,000 hommes de cavalerie, se porte sur Zusmarshausen pour couper la route d'Ulm à Augsbourg. Il va se porter, avec la plus grande partie de ses forces sur Augsbourg, pour donner bonne chasse à la cavalerie qui était hier à Rain. Le maréchal Ney occupera ce soir Günzburg, où je suppose que l'ennemi pourrait venir, s'il se croyait encore à temps pour se retirer sur Augsbourg. Les grenadiers de Lannes ne se donneront pas de repos avant d'être à Zusmarshausen, et je dirigerai ce soir la division Suchet suivant les nouvelles que j'aurai d'ici deux heures. Ne vous donnez aucun repos, et songez que, soit de jour ou de nuit, il faut que vous m'enleviez ce corps. Le moins que vous puissiez m'envoyer, c'est 3 ou 4,000 prisonniers.


Quartier impérial, Donauwoerth, 8 Octobre 1805, vers 1 heure après midi

Au maréchal Davout

Mon Cousin, ce matin, à huit heures, il n'y avait personne à Neuburg et vous ne l'occupiez pas encore. Il me tarde bien de savoir enfin votre armée arrivée. J'ai besoin qu'elle soit réunie demain, dans la journée, à Aichach. Il paraît que le général Kienmayer, qui commande le seul corps qui est entre ceci et Ratisbonne, s'est retiré sur Augsbourg. Il est poursuivi de telle sorte qu'il ne peut échapper.

Ne perdez pas une heure et que j'apprenne sans retard que vous occupez Aichach ; votre cavalerie et votre avant-garde peuvent y être ce soir.


Quartier impérial, Donauwoerth , 8 octobre 1805, 1 heure après midi.

Au général Dumas

Monsieur le Général Dumas, vous vous rendrez en toute diligence à Neuburg, et vous m'écrirez de Neuburg par un de vos aides de camp. Vous me manderez quels sont les corps arrivés à Neuburg et tous les détails concernant les ennemis, régiment par régiment, dans ces cantons : si on croit qu'Ingolstadt est occupé en force. Si le général Marmont y était arrivé, vous vous y rendrez pour lui dire qu'il est nécessaire qu'il passe le Danube sur-le-champ ; que l'ennemi est coupé ; que, dans peu de jours, il n'aura plus d'autre parti à prendre que d'essayer de nous passer sur le corps, et, comme il pourra réunir jusqu'à 80,000 hommes, il n'y a pas un moment à perdre pour rassembler nos forces. Enfin , si le général Marmont n'était pas encore à Ingolstadt, vous irez le trouver où il sera, et vous lui ferez connaître notre système de guerre, qui veut qu'il passe le Danube sans délai. Vous irez, de là, trouver le maréchal Bernadotte; il doit être parti aujourd'hui d'Eichstaedt pour Ingolstadt. Du moment que vous aurez vu le premier de ces corps, ou que vous saurez positivement où il est, vous m'en instruirez. Vous prendrez des renseignements précis sur les corps ennemis qui se trouveraient soit sur la Rednitz, ou vers la Bohème, et vous connaîtrez les noms des corps et les généraux qui les commandent ; et, après cela, vous me viendrez rejoindre, s'il se peut, dans la journée de demain.


Donauwörth, 8 octobre 1805

Au maréchal Berthier, major général

Mon Cousin. donnez ordre sur-le-champ au général Songis de diriger sur Mayence, dans le plus court délai, quatre compagnies d'artillerie.

(Picard)


Quartier impérial, Donauwoerth, 9 octobre 1805

Au prince Murat

Mon Cousin, je suis extrêmement satisfait du compte que vous me rendez de la bonne conduite de ma cavalerie et spécialement des dragons dans la journée d'hier. Ils ont eu affaire avec douze bataillons de grenadiers, et c'est ce qu'il y avait de mieux dans l'armée autrichienne. Faites-le connaître à l'ordre. La division Suchet se rend pour appuyer le corps du maréchal Lannes. J'ai dirigé d'Hautpoul sur Memmingen, grande chaussée de Donauwoerth à Augsbourg. Moi-même, avec toute ma Garde, je vais militairement suivre la même chaussée, et j'irai coucher à Augsbourg, où je compte que le maréchal Soult est arrivé à l'heure qu'il est. Interceptez la grande route Augsbourg à Ulm, et poussez le général Walther entre Augsbourg et Landsberg, et placez le maréchal Lannes de manière que, si demain à la pointe du jour Augsbourg était attaqué , les trois divisions de ce maréchal pussent s'y porter. Je ne partirai pas avant dix heures. J'attends les rapports du maréchal Ney , qui me sont nécessaires avant de me fixer au parti que je viens de vous faire connaître. Il est fâcheux que le maréchal Ney n'ait pas jeté hier quatre ou cinq bataillons par Dillingen ; il eût été à temps encore cette nuit. Par ce moyen, peu des ennemis auraient échappé. J'attends les huit drapeaux et les prisonniers que vous avez faits ; 2,000, c'est bien peu ; j'avais espéré, d'après le premier rapport, que la cavalerie serait arrivée à temps pour empêcher que l'ennemi ne se réfugiât dans les bois. J'ai fait officier de la Légion d'honneur votre aide camp (il s'agit d'Excelmans, chef d'escadron), qui m'a apporté deux drapeaux. J'attends le rapport pour récompenser ceux qui se sont distingués au combat de Wertingen.


Quartier impérial, Donauwoerth, 9 octobre 1805

Au maréchal Lannes

Mon Cousin, j'ai vu avec plaisir dans votre rapport la bonne conduite des grenadiers d'élite. Il est fâcheux que vous n'ayez pas eu deux heures de jour de plus ; il n'eût pas échappé un seul homme de ce corps. Vous vous trouvez toujours dans les bonnes circonstances; il est vrai aussi que vous vous en tirez fort bien. Vous devez avoir sous vos ordres les divisions Saint-Hilaire et Suchet ; ce qui vous forme un corps de 25,000 hommes, indépendamment de la cavalerie. Moi-même, je partirai à dix ou onze heures, avec toute ma Garde, pour me porter le long du Lech, sur le chemin d'Augsbourg. J'espère arriver de bonne heure à Mertingen ; j'irai probablement coucher à Augsbourg. J'écris au prince Murat de donner pour direction à votre corps, si de nouvelles circonstances n'y changent rien, de vous placer assez près d'Augsbourg, pour pouvoir vous y porter demain de bonne heure et être à portée de concourir aux opérations que les circonstances pourront faire juger nécessaires.

Mettez à l'ordre des grenadiers que je suis content de la manière dont ils se sont conduits au combat de Wertingen. Sur ce, je prie Dieu qu'il vous ait en sa sainte et digne garde. Je vous embrasse de cœur (sic).


Donauwoerth, 9 octobre 1805

2e BULLETIN DE LA GRANDE ARMÉE

Les événements se pressent avec la plus grande rapidité. Le 14 (6 octobre), la seconde division du corps d'armée du maréchal Soult, que commande le général Vandamme a forcé de marche, ne s'est arrêtée à Nördlingen que deux heures, est arrivée à huit heures du soir à Donauwoerth, et s'est emparée du pont, que défendait le régiment de Colloredo. Il y a eu quelques hommes tués et des prisonniers.

Le 15 (7 octobre), à la pointe du jour, le prince Murat est arrivé avec ses dragons; le pont a été à l'heure même raccommodé, et le prince Murat, avec la division de dragons que commande le général Walther, s'est porté sur le Lech, a fait passer le colonel Watier, à la tête de 200 dragons du 4e régiment, qui, après une charge très-brillante, s'est emparé du pont du Lech et a culbuté l'ennemi, qui était du double de sa force. Le même jour, le prince Murat a couché à Rain.

Le 16 (8 octobre), le maréchal Soult est parti avec les deux divisions Vandamme et Legrand, pour se porter sur Augsbourg, dans le même temps que le général Saint-Hilaire, avec sa division, s'y portait par la rive gauche.

Le 16 (8 octobre), à la pointe du jour, le prince Murat, à la tête des divisions de dragons des généraux Beaumont et Klein, et de la division de carabiniers et de cuirassiers, commandée par le général Nansouty, s'est mis en marche pour couper la route d'Ulm à Augsbourg. Arrivé à Wertingen, il aperçut une division considérable d'infanterie ennemie, appuyée par quatre escadrons de cuirassiers d'Albert. Il enveloppe aussitôt tout ce corps. Le maréchal Lannes, qui marchait derrière ces divisions de cavalerie, arrive avec la division Oudinot et, après un engagement de deux heures, drapeaux, canons, bagages, officiers et soldats, toute la division ennemie est prise et dispersée. Il y avait douze bataillons de grenadiers qui venaient grande hâte du Tyrol au secours de l'armée de Bavière. Ce ne sera que dans la journée de demain qu'on connaîtra tous les détails de cette action vraiment brillante.

Le maréchal Soult, avec ses divisions, a manœuvré toute journée du 15 et du 16 (7 et 8 octobre)sur la rive gauche du Danube pour intercepter les débouchés d'Ulm et observer le corps d'armée qui paraît encore réuni dans cette place.

Le corps du maréchal Davout est arrivé seulement le 16 (8 octobre) à Neuburg.  Le corps du général Marmont y est également arrivé.

Le corps du général Bernadotte et les Bavarois sont arrivés le 10 (3 octobre) à  Eichstaedt.

Par les renseignements qui ont été pris, il paraît que douze régiments autrichiens ont quitté l'Italie pour renforcer l'armée de Bavière.

La relation officielle de ces marches et de ces événements intéressera le public et fera le plus grand honneur à l'armée.


Quartier impérial, Zusmarshausen, 10 octobre 1805

Au prince Joseph

Mon Frère, vous aurez une idée des mouvements qui ont eu ici par les trois bulletins qui ont été envoyés à Paris. Remettez la lettre ci-jointe an préfet de Paris. Le temps s'est gâté depuis deux jours; il fait beaucoup de pluie.

Nous serons ce soir, ou demain au plus tard, à Munich. Les Russes commencent à arriver. L'ennemi s'affaiblit beaucoup en Italie pour envoyer des troupes ici. Ces trois ou quatre jours seront probablement très-animés et pourront donner lieu à des faits d'armes assez notables.

Le combat de Wertingen fait beaucoup d'honneur aux dragons et à la cavalerie. C'est un petit succès fort agréable pour Murat, qui commandait.

Le bon esprit de l'armée, son désir d'en venir à des affaires sérieuses, et sa patience à supporter les fatigues, sont de très-bons présages.

Mon quartier général est aujourd'hui à Zusmarshausen. Je n'ai ici ni voiture, ni bureau, ni rien ; mais je me rendrai ce soir au quartier général d'Augsbourg.

Je tiens l'armée ennemie cernée dans Ulm ; elle a été défaite hier soir par le corps de Ney ; à demain les détails.


Au village de Zusmarshausen, 10 octobre 1805

Au prince Eugène

Les Autrichiens s'affaiblissent considérablement en Italie. Au combat de Wertingen douze bataillons de grenadiers ont été défaits : six venaient d'Italie. Je pense que les hostilités ne seront pas encore commencées chez vous, ce qui ne me fait pas de peine. Je ne crains pas d'avoir ici sur le corps 15,000 à 20,000 hommes de plus. On n'a jamais vu une armée marcher avec une meilleure volonté, ayant plus d'ardeur et de confiance.

Vous sentez que je ne puis vous écrire souvent ni longuement; mais j'ordonne que, de Strasbourg, on vous expédie copie des bulletins qui disent en gros ce qui peut vous mettre au fait des choses. Faites mettre les bulletins dans tous vos journaux ; écrivez à Rome, Gênes, Lucques, en Piémont, au maréchal Masséna.

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Je reviens à l'instant même, mon cher Eugène. L'ennemi, que je tiens acculé et cerné dans Ulm , a été battu, défait, dans la journée d'hier au soir, sur la rive gauche du Danube, par l'armée de Ney. Tout porte à penser que la partie est perdue.


Zusmarshausen, 10 octobre 1805

3e BULLETIN DE LA GRANDE ARMÉE

Le maréchal Soult a poursuivi la division autrichienne qui s'était réfugiée à Aichach, l'a chassée, et est entré, le 17(9 octobre) à midi, à Augsbourg avec les divisions Vandamme, Saint-Hilaire et Legrand.

Le 17 (9 octobre) au soir, le maréchal Davout, qui a passé le Danube à Neuburg, est arrivé à Aichach avec ses trois divisions.

Le général Marmont, avec les divisions Boudet, Grouchy et la division batave du général Dumonceau, a passé le Danube et pris position entre Aichach et Augsbourg.

Enfin le corps d'armée du maréchal Bernadotte, avec l'armée bavaroise, commandée par les généraux Deroy et Wrede, a
pris position à Ingolstadt. La garde impériale, commandée par le maréchal Bessières, s'est rendue à Augsbourg, ainsi que la division de cuirassiers aux ordres du général d'Hautpoul.

Le prince Murat, avec les divisions de dragons de Klein et de Beaumont et la division de carabiniers et de cuirassiers du général Nansouty, s'est porté en toute diligence au village de Zusmarshausen, pour intercepter la route d'Ulm à Augsbourg.

Le maréchal Lannes, avec la division de grenadiers d'Oudinot et avec la division Suchet, a pris poste le même jour au village de Zusmarshausen.

L'Empereur a passé en revue les dragons, au village de Zusmarshausen ; il s'est fait présenter le nommé Marente, dragon du 4e régiment, un des plus braves soldats de l'armée, qui, au passage du Lech, avait sauvé son capitaine qui, peu de jours auparavant l'avait cassé de son grade de sous-officier. Sa Majesté lui a donné l'aigle de la Légion d'honneur. Ce brave soldat a répondu : Je n'ai fait que mon devoir; mon capitaine m'avait cassé pour faute de discipline; mais il sait que j'ai toujours été un bon soldat. 

L'Empereur a ensuite témoigné aux dragons sa satisfaction de la conduite qu'ils ont tenue au combat de Wertingen. Il s'est fait présenter, par régiment, un dragon, auquel il a également donné l'aigle de la Légion d'honneur.

Sa Majesté a témoigné sa satisfaction aux grenadiers de la division Oudinot. Il est impossible de voir une troupe plus belle, plus animée du désir de se mesurer avec l'ennemi, plus remplie d'honneur et de cet enthousiasme militaire qui est le présage des plus grands succès.

Jusqu'à ce que l'on puisse donner une relation détaillée du combat de Wertingen, il est convenable d'en dire quelques mots dans ce bulletin.

Le colonel Arrighi a chargé avec son régiment de dragons, le régiment de cuirassiers du duc Albert. La mêlée a été très-chaude; le colonel Arrighi a eu son cheval tué sous lui : son régiment a redoublé d'audace pour le sauver. Le colonel Beaumont, du 10e de hussards, animé de cet esprit vraiment français, a saisi, au milieu des rangs ennemis, un capitaine de cuirassiers, qu'il a pris lui-même après avoir sabré un cavalier.

Le colonel Maupetit, à la tête du 9e de dragons, a chargé dans le village de Wertingen; blessé mortellement, son dernier mot a été : « Que l'Empereur soit instruit que le 9e de dragons a été digne de sa réputation, et qu'il a chargé et vaincu aux cris de Vive 1'Empereur! »

Cette colonne de grenadiers, l'élite de l'armée ennemie, s'étant formée en carré de quatre bataillons, a été enfoncée et sabrée. Le 2e régiment de dragons a chargé dans le bois.

La division Oudinot frémissait de l'éloignement qui l'empêchait encore de se mesurer avec l'ennemi; mais, à sa vue seule, les Autrichiens accélérèrent leur retraite; une seule brigade a pu donner.

Tous les canons, tous les drapeaux, presque tous les officiers du corps ennemi qui a combattu à Wertingen ont été pris; un grand nombre a été tué : 2 lieutenants-colonels, 6 majors, 60 officiers et 11,000 soldats sont restés en notre pouvoir; le reste a été éparpillé, et ce qui a pu échapper a dû son salut à un marais qui a arrêté une colonne qui tournait l'ennemi.

Le chef d'escadron Exelmans, aide de camp de S. A. S. le prince Murat, a eu deux chevaux tués. C'est lui qui a apporté les drapeaux à l'Empereur, qui lui a dit : "Je sais qu'on ne peut être plus brave que vous; je vous fais officier de la Légion d'honneur. 

Le maréchal Ney, de son côté, avec les divisions Malher, Dupont et Loison, la division de dragons à pied du général Baraguey d'Hilliers et la division Gazan, a remonté le Danube, et attaqué l'ennemi sur sa position de Günzburg. Il est cinq heures, le canon se fait entendre.

Il pleut beaucoup, mais cela ne ralentit pas les marches forcées de la grande armée. L'Empereur donne l'exemple; à cheval jour et nuit, il est toujours au milieu des troupes et partout où sa présence est nécessaire. Il a fait hier quatorze lieues à cheval; il a couché dans un petit village, sans domestique et sans aucune espèce de bagage. Cependant l'évêque d'Augsbourg avait fait illuminer le palais et attendu Sa Majesté une partie de la nuit.

(Moniteur du 16 octobre 1805)


Quartier impérial, Augsbourg, 10 octobre 1805

AUX PRÉFET ET MAIRES DE LA VILLE DE PARIS

Messieurs les Préfet et Maires de notre bonne ville de Paris, nos troupes ayant, au combat de Wertingen, défait douze bataillons de grenadiers, l'élite de l'armée autrichienne, toute son artillerie est restée en notre pouvoir, ainsi qu'un grand nombre de prisonniers et huit drapeaux, nous avons résolu de faire présent des drapeaux à notre bonne ville de Paris, et de deux pièces de canon, pour rester à l'Hôtel de ville. Nous désirons que notre bonne ville de Paris voie dans ce ressouvenir  (sic)et dans ce cadeau, qui lui sera d'autant plus précieux que c'est son gouverneur qui commandait nos troupes au combat de Wertingen, l'amour que nous lui portons.

Cette lettre n'étant à autre fin, nous prions Dieu qu'il vous tienne en sa sainte et digne garde.


Augsbourg, l0 octobre 1805

A Joséphine

J'ai couché aujourd'hui chez l'ancien Électeur de Trèves, qui est fort bien logé. Depuis huit jours je cours. Des succès assez notables ont commencé la campagne. Je me porte fort bien, quoiqu'il pleuve presque tous les jours. Les évènements se suivent avec rapidité. J'ai envoyé en France 4,000 prisonniers, 8 drapeaux, et j'ai 14 pièces de canon à l'ennemi.

Adieu, mon amie, je t'embrasse.


Quartier impérial, Augsbourg, 11 octobre 1805, 8 heures de matin

Au maréchal Bernadotte

Mon Cousin, j'espère que, si l'ennemi n'est point en force, vous arriverez à Munich aujourd'hui; s'il vous en disputait l'entrée, ce qu'il pourra faire au plus avec 18 ou 20,000 hommes, j'espère que vous en aurez bon compte. Dans ce cas, il vaut mieux arriver un jour plus tard et bien prendre ses dispositions pour le bien battre. Il nous est nécessaire d'avoir Munich, comme centre de nouvelles, de renseignements et de l'organisation du pays.

Il y a eu deux combats dans lesquels nous avons eu du succès : à Wertingen, le nombre des prisonniers, compté un à un, a été de 3,800, dont 80 officiers; à Günzburg, le nombre de prisonniers a été de 1,100.

Le maréchal Davout sera ce soir, avec son corps, à Dachau; le maréchal Soult sera ce soir à Landsberg. Vous vous trouverez donc couvert de ces deux côtés. Envoyez un de vos officiers du génie à Ingolstadt, pour voir s'il serait possible de mettre promptement ce poste à l'abri d'un coup de main.

Les Bavarois doivent procurer beaucoup de renseignements comme ils sont du pays, vous pouvez en faire facilement des détachements en forme de patrouilles, pour éclairer. Faites aussi éclairer le cours de l'Isar jusqu'au point où il se jette dans le Danube, car je ne veux point d'ennemis entre le Lech et l'Isar. Ne vous laissez point tourner par votre flanc gauche ; et, si l'ennemi prétendait passer entre vous et le Danube, mettez-vous sur-le-champ à sa poursuite et gagnez-le avant qu'il soit au Lech.


Quartier impérial, Augsbourg, 11 octobre 1805, 8 heures du matin.

Au prince Murat

Mon Cousin, j'ai fait donner cette nuit au maréchal Lannes l'ordre de passer par Burgau. Je ne tiens pas encore les affaires finies de votre côté. L'ennemi, cerné comme il est, se battra. Il reçoit des renforts du Tyrol et de l'Italie; il pourra donc vous opposer, sous peu de jours, plus de 40,000 hommes. Il faut donc que votre réserve et les corps de Ney et de Lannes qui font de 50 à 60,000 hommes, marchent le plus près possible, de manière à pouvoir être réunis en six heures et écraser l'ennemi. Les Russes viennent en hâte; marchez donc sur l'ennemi partout où il se trouve, mais avec précaution et ensemble; s'il vous échappe, il sera arrêté sur le Lech. D'ailleurs, dans une bonne bataille, avec l'esprit qui anime les troupes, il vous en resterait la moitié.


Quartier impérial, Augsbourg, 11 octobre 1805

A M. Otto

Je vous ai fait instruire des résultats des combats de Wertingen et Günzburg. L'armée du prince Ferdinand est entièrement tournée, et le prince Murat, avec les dragons et les corps des maréchaux Lannes et Ney, est à sa suite. Tous les débouchés, le long du Lech, sont occupés par le maréchal Soult. Le maréchal Bernadotte a dû entrer aujourd'hui à Munich. J'ai fait la galanterie à l'Électeur d'y faire entrer le premier son corps de Bavarois. Du moment que j'aurai la nouvelle de l'entrée de mes troupes dans Munich: j'écrirai à l'Électeur pour l'engager de venir. Il peut toujours faire ses équipages; j'en serai d'autant plus aise que les 7,000 ou 8,000 hommes qu'il a à Würzburg fileront avec lui; ce qui fera un accroissement pour l'armée.

Envoyez un courrier extraordinaire à Berlin , au général Duroc, et à Laforest, en cas que Duroc n'y soit plus, pour l'instruire de ces nouvelles. Écrivez une longue dépêche au général de division Barbou, qui commande en Hanovre, pour lui communiquer tous ces renseignements.

Vingt mille hommes de l'armée autrichienne d'Italie filent sur l'Allemagne. Mon armée d'Italie doit attaquer demain. Après l'affaiblissement qu'a éprouvé l'armée autrichienne, je suis fonder à espérer du succès.

J'attends d'avoir des nouvelles plus positives des Russes pour marcher à eux et m'en débarrasser le plus tôt possible.

J'ai grand besoin de chevaux ; dites que tous les chevaux qu'on pourra me fournir, on les envoie à Augsbourg, où je les payerai. Faites-les donc conduire à Augsbourg; j'en prendrai autant qu'on m'en fournira de bons.

Je ne sais point si le fort de Pforzheim est approvisionné, et si l'Électeur y a mis une petite garnison. Pour Dieu, voyez que toutes les mesures soient prises pour que cette place ne tombe pas au pouvoir de l'ennemi. Ne tint-elle que huit ou dix jours de blocus, je saurais bien aller à son secours, et ce poste pris me serait très-désavantageux.


Quartier impérial, Augsbourg, 11 octobre 1805, 3 heures après midi

Au maréchal Bernadotte

Mon Cousin, je vous ai expédié (voir plus haut) à huit heures du matin un aide de camp du maréchal Mortier. Pour être plus sûr qu'il vous arrivât, je l'ai fait passer par vos derrières. Ayant tout lieu de penser que vous êtes en ce moment à Munich, je m'empresse de vous écrire pour vous faire connaître que le maréchal Davout sera ce soir , avec son corps d'armée, à Dachau; le maréchal Soult à Landsberg, et qu'ainsi vous serez couvert de ces deux côtés. L'armée du prince Ferdinand, dont plusieurs divisions ont été battues à Wertingen et à Günzburg, ne peut plus retourner en Bavière, étant coupée; et le prince Murat, avec les dragons et les corps des maréchaux Lannes et Ney, est à sa poursuite. Mon intention est que vous me débarrassiez de toute espèce d'ennemis entre l'Isar et le Lech. Étendez- vous par des patrouilles composées de Bavarois, c'est-à-dire de gens du pays, le long de l'Isar, et appuyez même votre gauche par un corps à Freising, si vous le jugez nécessaire. Ce corps vous servirait d'avant-garde si vous deviez marcher par votre gauche. Je vous laisse maître de tous vos mouvements; mais mon intention est que vous ne vous laissiez pas tourner par votre gauche, et que, si cela arrivait, vous vous arrangiez de manière à être arrivé sur le Danube avant l'ennemi, pour protéger votre corps d'Ingolstadt, et, si l'ennemi avait trop pris d'avance sur vous, pour être au moins sur le Lech avant lui, afin de protéger mon pont de Rain. Je vous adresserai demain des ordres suivant les circonstances de ce grand théâtre de guerre qui varie à tout moment. Préparez-vous, après avoir pris haleine un moment, à jeter l'ennemi au delà de l'Inn, dont je veux surprendre le passage avant qu'il puisse être défendu en règle. Je n'ai pas besoin de vous dire que tout votre corps d'armée doit constamment être réuni autour de vous, et que les Bavarois doivent fournir tous les détachements. Faites-leur comprendre que c'est un honneur que vous leur faites et un égard que vous leur témoignez , comme étant chez eux. On m'assure qu'il n'y a personne à Passau. Si les bourgeois pouvaient s'emparer de la forteresse, on s'arrangerait pour les secourir en vingt-quatre heures. Par là le passage de l'Inn serait ouvert. Que les Bavarois envoient aux magistrats du pays un homme intelligent, pour cet effet. Quant à votre conduite à Munich, faites faire du pain en assez grande quantité, car tout le monde en a besoin. Le général Deroy a sans doute des instructions de l'Électeur. Nommez à Munich un commandant attaché à la cause. Organisez seulement le militaire. Je vous adresserai, aussitôt que je saurai votre entrée à Munich, des ordres pour l'organisation du civil comme il doit être. Munich est un centre de renseignements. Prenez à la poste les lettres destinées pour les officiers autrichiens et russes et envoyez-moi l'extrait de ce qui peut m'instruire du mouvement des ennemis. Prenez aussi toutes les informations possibles sur la force du corps autrichien qui est en Souabe, régiment par régiment. La régence de Munich doit tout savoir puisqu'elle les a tous nourris. Ne dormez pas que vous ne m'ayez envoyé tous ces détails. Attachez-vous aussi à me faire connaître la force du corps de Kienmayer entre l'Isar et l'Inn. Parlez-moi aussi, positivement, de ces célèbres Russes. J'attendrai cela pour prendre un partie. J'irai à eux avec 90,000 hommes, et j'espère, avec l'aide de Dieu, leur faire continuer leur route pour France. Envoyez-moi l'état des généraux et régiments bavarois que vous avez laissés à Ingolstadt et l'état de ceux que vous avez avec vous. Vous ne me dites pas si vous avez laissé de la cavalerie et de l'artillerie au corps du général Rivaud. Un régiment de cavalerie et sept à huit pièces d'artillerie lui sont absolument nécessaires.


Quartier impérial, Augsbourg, 11 octobre, 3 heures après midi. 

Au maréchal Davout

Mon Cousin, j'ai reçu votre lettre. Je vois avec plaisir que ce n'est pas pour priver la division Nansouty de son artillerie que vous avez ordonné qu'elle vint à votre quartier général. Cette division vient aujourd'hui à Augsbourg, où il faut diriger cette artillerie. Le maréchal Bernadotte a dû être aujourd'hui, à midi, à Munich; le maréchal Soult, à Landsberg. Veillez à ce que les chevaux restent aux postes. Mettez-y même un petit piquet de cavalerie, pour que les communications avec Munich soient très-rapides. Je suis inquiet du peu d'artillerie et du peu de cartouches que vous avez. Envoyez-moi ce soir l'état de situation des ennemis et le nom de leurs régiments qui ont été plusieurs jours entre Aichach et Dachau. Ayez des postes de cavalerie au village de Bruck, sur Landsberg, et sur l'autre chemin d'Augsbourg à Munich. Faites faire du pain partout pour vos troupes, auxquelles je voudrais bien laisser un jour de repos, mais les moments sont pressants. Il faut prendre les bonnes positions. L'armée du prince Ferdinand est entièrement tournée. Le prince Murat le poursuit avec les divisions des maréchaux Lannes et Ney.


Quartier impérial, Augsbourg, 11 octobre 1805

Au maréchal Augereau

Mon Cousin, je vous écris d'Augsbourg. Nos mouvements continuent avec la plus grande rapidité. L'armée du prince Ferdinand est coupée et entièrement séparée des Russes et de l'armée que les Autrichiens avaient sur l'Inn. Le prince Murat la poursuit avec les corps des maréchaux Lannes et Ney.

Réunissez de suite votre corps à Fribourg. Il serait possible que le corps d'armée du prince Ferdinand n'eût d'autre refuge que de se jeter du côté de la Suisse ou sur vous. Si, au 2 ou 3 brumaire (24/25 octobre), vous pouvez vous mettre en marche sur Fribourg, nul doute que vous ne trouviez encore de la besogne; et, avec vos 12,000 hommes, vous seriez d'un grand secours et feriez bien du mal à l'ennemi. Vous écririez au prince Murat, qui vous ferait connaître la situation des choses, ce que vous pouvez faire et ce que vous devez craindre. Expédiez, par la grande route de l'armée, c'est-à-dire par Heilbronn, un de vos aides de camp sur Augsbourg et Munich. Activez la marche de vos troupes. Pour cela, vous pouvez former des détachements de quelques centaines d'hommes éclopés, qui suivraient l'armée à quelques jours de distance. Portez-vous le plus tôt possible, au moins de votre personne, à Huningue et Neuf-Brisach, et pressez la réparation des têtes de pont de ces deux points.


Quartier impérial, Augsbourg, 11 octobre 1805

Au maréchal Masséna

Mon Cousin, je reçois votre lettre du 11 vendémiaire (3 octobre), de Villafranca. Je vois avec plaisir les bonnes dispositions que vous avez faites. L'ennemi s'affaiblit et s'affaiblira encore devant vous. Pendant les premiers quinze jours de vos opérations, ne vous conduisez que d'après les intérêts de mon armée d'Italie; après ces quinze jours, c'est-à-dire du 5 au 6 brumaire (27/28 octobre), j'espère que vos opérations pourront se combiner avec celles de l'armée où je suis. Si vous avez des succès, vous pourrez vous trouver sur le Tagliamento. Dans tous les cas, j'espère pouvoir me trouver en mesure, à cette époque, de tomber sur les derrières de l'armée autrichienne; j'aurais déjà commencé, si je ne me trouvais ici occupé de nouveau par 50,000 Russes qui viennent d'arriver. De petits bulletins rédigés à la hâte et en courant vous feront connaître notre position. Je me fie bien sur votre zèle et sur votre attachement à la patrie; suivez vos anciennes maximes. Au combat de Wertingen, le régiment de Spork et plusieurs autres venaient d'Italie; ils sont venus à temps pour se faire envelopper.


Augsbourg, 11 octobre 1805

4e BULLETIN DE LA GRANDE ARMÉE

Le combat de Wertingen a été suivi, à vingt-quatre heures de distance, du combat de Günzburg. Le maréchal Ney a fait marcher son corps d'armée : la division Loison sur Langenau, et la division Malher sur Günzburg. L'ennemi, qui a voulu s'opposer à cette marche, a été culbuté partout. C'est en vain que le prince Ferdinand est accouru en personne pour défendre Günzburg. Le général Malher l'a fait attaquer par le 59e régiment. Le combat est devenu opiniâtre, corps à corps. Le colonel Lacuée a été tué à la tête de son régiment, qui, malgré la plus vigoureuse résistance, a emporté le pont de vive force; les pièces de canon qui le défendaient ont été enlevées, et la belle position de Günzburg est restée en notre pouvoir. Les trois attaques de l'ennemi sont devenues inutiles; il s'est retiré avec précipitation; la réserve du prince Murat arrivait à Burgau et coupait l'ennemi dans la nuit.

Les détails circonstanciés du combat, qui ne peuvent être donnés que sous quelques jours, feront connaître les officiers qui se sont distingués.

L'Empereur a passé toute la nuit du 17 au 18 (9/10 octobre), et une partie de la journée du 18 (10 octobre), entre les corps des maréchaux Ney et Lannes.

L'activité de l'armée française, l'étendue et la complication des combinaisons, qui ont entièrement échappé à l'ennemi, le déconcertent au dernier point.

Les conscrits montrent autant de bravoure et de bonne volonté que les vieux soldats. Quand ils ont une fois été au feu, ils perdent le nom de conscrits; aussi tous aspirent-ils à l'honneur du tire de soldat.

Le temps continue à être très-mauvais depuis plusieurs jours. Il pleut encore beaucoup; l'armée cependant est pleine de santé.

L'ennemi a perdu plus de 2,500 hommes au combat de Günzburg. Nous avons fait 1,200 prisonniers et pris six pièces de canon.  Nous avons eu 400 hommes tués ou blessés. Le général d'Aspre est au nombre des prisonniers.

L'Empereur est arrivé à Augsbourg le 18 (10 octobre), à neuf heures La ville est occupée depuis deux jours.

La communication de l'armée ennemie est coupée à Augsbourg et Landsberg et va l'être à Füssen. Le prince Murat, avec les corps des maréchaux Ney et Lannes, se met à sa poursuite. Dix régiments ont été retirés de l'armée autrichienne d'Italie et viennent en poste depuis le Tyrol. Plusieurs ont été déjà pris. Quelques corps russes, qui voyagent aussi en poste, s'avancent vers l'Inn. Mais les avantages de notre position sont tels que nous pouvons faire face à tout.

L'Empereur est logé à Augsbourg chez l'ancien électeur de Trèves, qui a traité avec magnificence la suite de Sa Majesté pendant le temps que ses équipages ont mis à arriver.

Moniteur du 25 vendémiaire an XIV.


Quartier impérial, Augsbourg, 12 octobre 1805

Au maréchal Kellermann, commandant le 3e corps de réserve, à Strasbourg

Mon Cousin, j'ai reçu votre lettre du 15 vendémiaire (7 octobre). Je compte effectivement sur votre zèle pour presser l'organisation, l'équipement et l'instruction des 3e bataillons. Je connais votre attachement à ma personne, et je ne doute point que vous ne fassiez tout ce qui dépend de vous. Mettez-vous en correspondance avec les préfets qui doivent vous fournir des conscrits, soit de la conscription de l'an XIV, soit des réserves des années X, XI, XII et XIII. Écrivez au ministre Dejean, écrivez également aux quartiers-maîtres, aux majors ou chefs des 3e bataillons, pour vous assurer qu'ils ont les tricots et les moyens nécessaires pour habiller les conscrits, sinon avec des habits, au moins avec des vestes. Quant aux hommes laissés sur la route par les régiments, je vois avec plaisir que vous ayez chargé du soin de les faire rejoindre Marulaz, sur l'activité duquel je compte beaucoup; qu'il voie tout par lui-même et ne s'en fie pas toujours aux rapports des officiers détachés. Je désire qu'on ne m'envoie pas les troupes par petits paquets, mais qu'on en forme tous les huit jours un fort détachement de 3 à 400 hommes qui, sous le commandement d'un officier, et par un ordre de vous, viendront me joindre en bon ordre. Il me reste à vous recommander de veiller à ce que les capotes que les corps ont fait faire en France partent par gros convois, toujours sous l'escorte et le commandement d'officiers et de sous-officiers qui rejoignent l'armée. Accélérez l'arrivée des conscrits; veillez à leur instruction, à leur équipement, et à ce que les magasins des 3e bataillons expédient à l'armée tout ce qui leur est commandé. A ces occupations si importantes, puisque leur moindre résultat est de maintenir l'armée à son complet actuel, joignez vos soins pour l'organisation de la garde nationale, et j'espère que vous aurez un bon compte à me rendre du zèle des habitants de ma bonne ville de Strasbourg et de mes brave Alsaciens. Veillez au perfectionnement des travaux de Kehl; que rien ne soit épargné pour mettre ce point en bon état de défense.


Quartier impérial, Augsbourg, 12 octobre 1805, 9 heures du matin

Au prince Murat

Mon Cousin, le maréchal Soult s'est porté à Landsberg, où il est arrivé hier à midi. Il a fait la bonne rencontre du régiment de cuirassiers de Ferdinand. Il l'a fait sur-le-champ charger, lui a fait 120 prisonniers, dont un lieutenant et trois capitaines, et lui a pris deux pièces de canon. Vingt pièces de canon et trente pontonniers sont passés de Landsberg sur Memmingen, quinze heures avant. Les dragons et les chasseurs se sont mis à leurs trousses, j'espère qu'ils les auront atteints hier, ou qu'ils les atteindront aujourd'hui. D'un autre côté, aujourd'hui même le maréchal Soult marche sur Memmingen, où il ne pourra arriver que demain au soir fort. Mon intention est que, si l'ennemi continue à rester dans ses positions et se prépare à recevoir la bataille, elle n'ait pas lieu demain, mais après-demain, afin que le maréchal Soult et ses 30,000 hommes en soient, qu'il déborde la droite de l'ennemi , l'attaque en la tournant, manœuvre qui nous assure un succès certain et décisif. En attendant, faites jeter un pont sur le Danube, le plus près possible de votre ligne, vis-à-vis d'Albeck, de manière que le corps qui est à Albeck se trouve en communication et lié avec le reste de l'armée, et que, si l'ennemi agissait trop vivement, ou se trouvait obligé de se réfugier sur la rive gauche, je puisse, dans le jour même tomber dessus. Ordonnez aux généraux de faire l'inspection des armes et des cartouches, de réunir tout leur monde, tout ce qui serait détaché aux bagages; de renvoyer les bagages et les voitures au-delà de Burgau parquer dans les prairies, de sorte qu'il n'y ait rien dans les grands chemins. Désignez l'emplacement où doivent se mettre les réserves d'artillerie des corps d'armée des maréchaux Lannes et Ney, et de la réserve de cavalerie. Assurez-vous que les réserves des trois armées contiennent assez de cartouches et qu'elles n'ont pas été gâtées par la pluie. Voyez également de désigner le lieu des grandes ambulances pour chacun des corps d'armée. Que le premier chirurgien de chaque corps d'armée, un médecin, un commissaire des guerres et des gendarmes y soient établis. Prenez des mesures pour qu'il y ait du pain , du vin et même des lits pour les blessés de la journée. Je ne parle pas des ambulances, qui doivent suivre la ligne à quatre cents toises en arrière, tout au plus. Ceci n'est pas une échauffourée, ce n'est pas même l'attaque d'une colonne pendant qu'elle marche : c'est celle d'une armée qui peut être plus nombreuse que vous ne croyez, et du succès de laquelle dépendent les plus grands résultats. J'y serai de ma personne. Faites arranger mon quartier général où vous le croirez le plus convenable. Je partirai dès que j'aurai donné mes ordres pour ma droite. Je serai demain matin au quartier général que vous m'aurez marqué.

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Dans votre lettre, vous ne mettez ni l'endroit d'où vous écrivez, ni la date, ni l'heure; c'est un oubli très capital.


Quartier impérial, Augsbourg, 12 octobre 1805, 10 heures et demie du matin

Au maréchal Soult

Mon Cousin, je verrai avec plaisir vos 120 gros cuirassiers pris par les petits chasseurs. Cependant j'aurais voulu avoir tout le régiment, et, puisqu'ils avaient des pièces à leur suite, il me semble que vous auriez dû les avoir tous ou au moins leurs sept pièces. J'espère que vous m'apprendrez cette nuit que vous avez pris leurs pontons. Le moment décisif est arrivé. Faites poster aujourd'hui vos dragons et de l'artillerie légère devant Memmingen. Poussez votre division de tête, aujourd'hui, aussi près que vous pourrez de cette ville. Qu'on se mette en marche deux heures avant le jour, après avoir mangé la soupe. Arrivez à Memmingen avec votre première division, avant neuf heures du matin; attaquez sur-le-champ cette place, et mettez-vous à cheval sur l'Iller dans la journée de demain. Envoyez un parti à Pless, qui enverra du monde sur la route d'Ober-Roth. Le prince Murat en enverra de son côté à Weissenhorn, afin de communiquer avec vous. Tâchez de vous emparer du pont de Kellmünz aussitôt que vous pourrez; c'est à trois lieues de Memmingen. Vous ne serez plus qu'à quatre lieues de Weissenhorn; pour couper la route qui suit la rive gauche de l'Iller. Il faut l'intercepter en force du côté de Kellmünz, où elle n'est éloignée du pont que d'une petite demi-lieue. Poussez vos avant-postes et grand-gardes sur la route d'Ulm et de Weissenhorn. Si cependant là, demain à après-demain , l'ennemi essayait de vous marcher sur le corps, nous lui tomberions dessus de tous les côtés. Je serai probablement personnellement à Weissenhorn. L'ennemi nous offre une  occasion dont nous saurons profiter. Mettez à l'ordre de l'armée que, s'ils veulent se battre, il faut que la première division soit à Memmingen avant neuf heures du matin , sans quoi ils ne seront pas à la bataille. Je recevrai encore ce soir votre rapport ici. Le maréchal Davout a eu une charge de uhlans, et le 2e de chasseurs a pris 50 hommes et un officier sans perdre personne. Le moral de l'ennemi est frappé au dernier point. Tâchez, dès cette nuit, de vous mettre en correspondance avec le prince Murat, par Weissenhorn. Deux ou trois piquets de 5 ou 6 hommes, placés de votre lieu de coucher à Weissenhorn, assureront votre correspondance. J'envoie le général Marmont avec son corps d'armée à Krumbach, où j'espère qu'il aura ce soir de la cavalerie.

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Demain, le général Marmont sera sur l'Iller, sur les hauteurs d'Illeraichheim. Je vous envoie une bonne carte et qui vous sera utile.


Quartier impérial, Augsbourg, 12 octobre 1805, 10 heures et demie du matin

Au maréchal Soult

Je suppose que ces fortifications de Memmingen dont on m'a tant parlé ne sont rien. Cependant, s'ils avaient, depuis quinze jours, travaillé avec activité, et que le poste fût le moindrement favorable, il est facile de prévoir que je perdrais beaucoup de monde pour l'enlever. En ce cas, demain, tournez-le et bloquez Memmingen. Ils ne se laisseront pas couper leurs communications avec Ulm, ou ce serait autant de pris; et alors, comme il est évident que l'ennemi se dirigera sur vous pour secourir la droite, j'aurai le temps de faire attaquer demain, dans l'après-midi , et de jeter Marmont sur vous. Il faut aussi que je vous instruise que j'ai laissé la division batave de Marmont avec douze pièces de canon dans Augsbourg; que Davout reste en position à Dachau ; que la division batave pourrait se porter sur vous, si vous étiez menacé d'être débordé par toute l'armée ennemie. Ce soir même, si les nouvelles de Munich me le permettent, je ferait jeter une division de Davout sur Landsberg, où elle sera à votre disposition. Je vous recommande de faire crever vos chevaux à vos aides de camp et à vos adjoints. Placez-les en relais sur la route de Weissenhorn, pour que j'aie de vos nouvelles rapidement. Il ne s'agit pas de battre l'ennemi, il faut qu'il n'en échappe pas un. Assemblez vos généraux et chefs de corps, quand vous serez à Memmingen, et si l'ennemi n'a rien fait pour échapper au coup de massue qui va l'assommer, faites-leur connaître que je compte que, dans cette circonstance importante, on n'épargne rien de ce qui peut rendre notre succès complet et absolu; que cette journée doit être dix fois plus célèbre que celle de Marengo; que, dans les siècles les plus reculés, la postérité connaîtra en détail ce que chacun aura fait; que, si je n'avais voulu que battre l'ennemi , je n'aurais pas eu besoin de tant de marches et de fatigues, mais que je veux le prendre et qu'il faut que, de cette armée qui, la première, a rompu la paix et nous a fait manquer notre plan de guerre maritime, il ne reste pas un seul homme pour en porter la nouvelle à Vienne, et que la Cour perfide qu'a corrompue l'or de l'Angleterre ne doit l'apprendre que lorsque nous serons sous ses murailles.


Quartier impérial, Augsbourg, 12 octobre 1805,  midi

Au maréchal Berthier

Le général Ordener, avec quatre escadrons, six pièces d'artillerie légère et une ambulance, ira coucher ce soir à Burgau, où je veux me rendre dans la nuit.

Le maréchal Bessières, avec tout le reste de la garde, artillerie, infanterie, cavalerie, ambulances, ira prendre position en avant de Zusmarshausen, plaçant son avant-garde à mi-chemin de ce poste à Burgau. La Garde sera prévenue que l'ennemi est tourné, qu'il y aura après-demain une grande bataille, que chaque soldat doit avoir 40 cartouches, que chacun doit être en état et à son poste.


Quartier impérial, Augsbourg, 12 octobre 1805, midi

Au maréchal Berthier

Mon Cousin, donnez l'ordre au général Dumonceau, commandant la division batave, de se rendre à Augsbourg avec son infanterie et douze pièces de canon. Il placera la moitié de sa division pour défendre le pont du Lech, avec une forte grand'garde à mi-chemin du pont, à Friedberg, et l'autre moitié de sa division pour défende le pont de la Wertach. Deux bataillons entreront dans la ville d'Augsbourg pour faire le service de la place. Il placera deux de ses pièces de canon au pont de la Wertach, et quatre autres pièces au pont du Lech. Les six autres pièces de canon seront tenues disponibles et prêtes à se porter partout où besoin serait. Toutes les portes de la ville seront gardées en force et, tous les jours, une heure avant la pointe du jour, de fortes reconnaissances se porteront à deux lieues en avant sur les quatre grandes directions, pour pouvoir y avoir des nouvelles de tout ce qui se passe aux environs du grand quartier général. Quels que soient les événements qui pourraient survenir, le général Dumonceau défendra la place et avertira de sa position le maréchal Bernadotte qui est à Munich, le maréchal Davout qui est à Dachau, le maréchal Soult qui est du côté de Landsberg et sur la route de Landsberg à Memmingen; enfin, il avertira Sa Majesté l'Empereur, qui sera du côté de Burgau, et le général Rivau qui est à Ingolstadt, de tout ce qu'il y aura de nouveau et d'extraordinaire.

Donnez l'ordre au général Rivaud, si, demain à la pointe du jour, il ne se passe rien de nouveau sur la gauche du Danube, d'expédier 150 hommes de cavalerie, deux pièces d'artillerie et le 54e régiment de ligne au pont du Lech, à Rain, pour le défendre, de n'importe quel côté que l'ennemi vienne.

Le commandant de ce corps de troupes correspondra avec le général commandant à Donauwoerth, pour lui faire connaître et savoir tout ce qu'il y aura de nouveau; il correspondra, pour le même objet, avec le général Dumonceau, commandant à Augsbourg afin que, suivant les circonstances, il puisse faire ses dispositions pour défendre le passage du Lech. Comme on ne pense pas qu'il puisse être attaqué, et que tout ceci n'est qu'une mesure de précaution, les dispositions auront lieu contre les partis ennemis qui pourraient peut-être vouloir échapper à notre poursuite, en se portant vers ces différents points, et afin d'assurer une surveillance utile sur les routes. Après-demain 22 (14 octobre), il y aura probablement bataille du coté d'Ulm, où l'armée ennemie est cernée, et l'Empereur prévoit des circonstances où le corps qui sera à Rain peut être très-utile.


Augsbourg, 12 octobre 1805

Au maréchal Berthier

Mon cousin, la division batave se rendra à Augsbourg, elle remplacera sur-le-champ ma garde dans le service de tous les postes.

(De Brotonne)


Quartier impérial, Augsbourg, 12 octobre 1805, midi et demi

Au prince Murat

Je vous envoie une carte qui vous sera utile; c'est le croquis d'une carte militaire de la Souabe.

Veuillez désormais, quand vous m'écrirez, avoir soin de mettre le lieu d'où vous écrivez, le jour et l'heure.

Je vous ai expédié, par mon aide de camp Gardanne, des ordres. Le major général vous en avait envoyé par un autre officier.

Après-demain l'armée autrichienne aura existé, et ce terrible coup aura mis un terme à toute la guerre. Le général Marmont part d'Augsbourg à l'instant avec sa cavalerie. Il suit la route d'Augsbourg, Ziemetshausen, Thannhausen, Krumbach, où il sera ce soir avec sa cavalerie. Il se rendra demain, avec tout son corps d'armée, pour prendre position sur les hauteurs d'Illeraichheim. Faites-lui passer des nouvelles ce soir à Krumbach, s'il était survenu quelque chose d'extraordinaire. Le maréchal Soult sera à Memmingen ce soir. Ma Garde elle-même se met toute en marche; la cavalerie sera ce soir à Burgau, l'infanterie en avant de Zusmarshausen. Les cuirassiers de Nansouty partent aussi et coucheront à Zusmarshausen; demain ils seront en position.

Après-demain, à la pointe du jour, grande bataille.

Le maréchal Soult enverra des partis de cavalerie par Memmingen et Pless, sur la route d'Ober-Roth; envoyez-en aussi pour vous rencontrer et vous donner réciproquement des nouvelles.

Faites-vous informer si l'ennemi occupe Dietenheim.

Je vous recommande toujours le pont que je vous ai ordonné, afin qu'aujourd'hui que nous avons tant de troupes nous puissions renforcer la droite.


Augsbourg, 12 octobre 1805

A M. Otto

Je vous réponds, par votre courrier, deux mots, car je pars dans une heure pour Burgau. La lenteur de la marche des Bavarois et le temps affreux qu'il fait ont retardé le maréchal Bernadotte. Son avant-garde était hier à deux lieues de Munich; il a dû y entrer aujourd'hui; je n'en ai pas de nouvelles. Vous trouverez un bulletin qui lui fera connaître la situation des choses. La bataille aura lieu après-demain 22 (14 octobre). L'armée autrichienne sera détruite et prisonnière ; 1'armée russe ne fardera pas à avoir le même sort, toutefois avec l'aide de Dieu, qui est le Dieu des armées. Je désire que l'Électeur attende ma lettre pour venir. Je sais qu'il veut venir avec sa famille. Je suis trop galant pour vouloir exposer ses dames. Je lui écrirai, le soir, du champ de bataille, ce que je désire qu'il fasse. Faites passer ces nouvelles à Berlin, au général qui commande à Hanovre. Le découragement de l'armée autrichienne n'a pas d'exemple; nos plus mauvais régiments de chasseurs chargent les gros régiments de cuirassiers et les mettent en déroute. L'infanterie ne tient nulle part.

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Annoncez à l'Électeur que l'armée bavaroise et française est entrée à Munich aujourd'hui à six heures du matin. Le maréchal Bernadotte a fait 800 prisonniers; il me mande qu'il était à cheval, suivant un parc de cent pièces de canon, qui n'était pas éloigné. Le prince Ferdinand se trouvait à Munich; il avait donc quitté son armée de l'Iller. La confusion des Autrichiens paraît extrême. Il y aura bien des nouvelles d'ici à huit ou dix jours.


Augsbourg, 12 octobre 180 10 heures et demie du soir

Au maréchal Soult

Mon Cousin, je monte en voiture. Je serai avant le jour à Weissenhorn. Le maréchal Bernadotte est entré à Munich aujourd'hui à six heures du matin. Il a fait 800 prisonniers, et courait après un parc de cent pièces de canon, qui se rendait à Ulm. Le prince Ferdinand était à Munich hier au soir. A-t-il quitté son armée de l'Iller, ou bien son armée de l'Iller a-t-elle déniché ? Vous devez, à l'heure qu'il est, savoir à quoi vous en tenir. Je ne veux pas attaquer demain; cependant si j'avais des renseignements que l'ennemi eût commencé à évacuer, j'attaquerais; je vous en ferais prévenir. En attendant, si vous entendez le canon, ne perdez pas votre temps. Si Memmingen n'est que faiblement occupé, j'espère que vous l'aurez avant midi; s'il est défendu, il est tout simple que vous fassiez faire halte à vos troupes et que vous l'attaquiez en règle. Écrivez-moi sur Weissenhorn. Je ne pense pas que le général Marmont soit avant la pointe
du jour, avec sa cavalerie, à sa position. Cependant la cavalerie légère va vite, et je ne désespère pas qu'il ait 200 bons chevaux de bonne heure sur la ligne. Si l'ennemi avait commencé à s'en aller, nous en aurions notre part. Quand le diable y serait, il ne nous échapperait pas tout entier. Il ne pourrait s'en aller que par Kempten, Biberach, Stockach : dans ce cas, nous serions à Vienne quinze jours avant lui. 

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Je reçois à l'instant une lettre du prince Murat. L'ennemi est à Ulm, et y a 40,000 hommes. Il y a eu une sortie où la division Dupont a, seule, contenu l'ennemi, et lui a fait 4,000 prisonniers. Si l'ennemi n'est pas à Memmingen, descendez comme l'éclair jusqu'à notre hauteur. C'est vous qui ramasserez tout, je le prévois; il ne doit pas nous en échapper un.


Augsbourg, 12 octobre 1805

5e BULLETIN DE LA GRANDE ARMÉE

Le maréchal Soult s'est porté avec son corps d'armée à Landsberg, et par là a coupé une des grandes communications à l'ennemi; il y est arrivé le 19 (11 octobre), à quatre heures après midi, et y a rencontré le régiment de cuirassiers du prince Ferdinand qui, avec six pièces de canon, se rendait à marches forcées à Ulm. Le maréchal Soult l'a fait charger par le 26e régiment  de chasseurs; il s'est trouvé déconcerté à un tel point, et le 26e de chasseurs était animé d'une telle ardeur, que les cuirassiers ont pris la fuite dans la charge, et ont laissé 120 soldats prisonniers, un lieutenant-colonel, deux capitaines et deux pièces de canon. Le maréchal Soult, qui avait pensé qu'ils continueraient leur route sur Memmingen, avait envoyé plusieurs régiments pour les couper; mais ils s'étaient retirés dans les bois, où ils se sont ralliés pour se réfugier dans le Tyrol.

Vingt pièces de canon et les équipages de pontons de l'ennemi étaient passés, dans la journée du 18 (10 octobre), par Landsberg. Le maréchal Soult a mis à leur poursuite le général Sebastiani avec une brigade de dragons; on espère qu'il sera parvenu à les atteindre.

Le 20 (12 octobre), le maréchal Soult s'est dirigé sur Memmingen, où il arrivera le 21 (13 octobre), à la pointe du jour.

Le maréchal Bernadotte a marché toute la journée du 19 (11 octobre) et a porté son avant-garde jusqu'à deux lieues de Munich. Les bagages de plusieurs généraux autrichiens sont tombés au pouvoir de ses troupes légères. Il a fait une centaine de prisonniers de différents régiments.

Le maréchal Davout s'est porté à Dachau; son avant-garde est  arrivée à Maisach; les hussards de Blankenstein ont été mis en désordre par ses chasseurs, et, dans différents engagements, il a fait une soixantaine d'hommes à cheval prisonniers.

Le prince Murat, avec la réserve de cavalerie et les corps des maréchaux Ney et Lannes, s'est placé vis-à-vis de l'armée ennemie, dont la gauche occupe Ulm, et la droite Memmingen.

Le maréchal Ney est à cheval sur le Danube, vis-à-vis d'Ulm.

Le maréchal Lannes est à Weissenhorn.

Le général Marmont se met en marche forcée, pour prendre position sur la hauteur d'Illertissen, et le maréchal Soult déborde de Memmingen la droite de l'ennemi.

La garde impériale est partie d'Augsbourg pour se rendre à Burgau, où l'Empereur sera probablement cette nuit.

Une affaire décisive va avoir lieu. L'armée autrichienne a toutes ses communications coupées. Elle se trouve à peu prés dans la même position que l'armée de Melas à Marengo.

L'Empereur était sur le pont du Lech, lorsque le corps du général Marmont a défilé. Il a fait former en cercle chaque rément, leur a parlé de la situation de l'ennemi, de l'imminence d'une grande bataille, et de la confiance qu'il avait en eux. Cette harangue avait lieu pendant un temps affreux. Il tombait une neige abondante et la troupe avait de la boue jusqu'aux genoux et éprouvait un froid assez vif; mais les paroles de l'Empereur étaient de flamme; et l'écoutant, le soldat oubliait ses fatigues et ses privations, et était impatient de voir arriver l'heure du combat.

Le maréchal Bernadotte est arrivé à Munich le 20 (12 octobre), à six du matin; il a fait 800 prisonniers, et s'est mis à la poursuite de l'ennemi. Le prince Ferdinand se trouvait à Munich. Il parait que ce prince avait abandonné son armée de l'Iller.

Jamais plus d'événements ne se décideront en moins de temps. Avant quinze jours, les destins de la campagne et des armée autrichiennes et russes seront fixés.


Augsbourg, 12 octobre 1805

A Joséphine

Mon armée est entrée à Munich. L'ennemi est au delà de l'Inn d'un coté; l'autre armée de 60,000 hommes, je la tiens bloquée sur l'Iller, entre Ulm et Memmingen. L'ennemi est battu, a perdu la tête, et tout m'annonce la plus heureuse campagne, la plus courte et la plus brillante qui ait été faite. Je pars dans une heure pour Burgau-sur-l'Iller. Je me porte bien; le temps est cependant affreux. Je change d'habit deux fois par jour, tant il pleut.

Je t'aime et t'embrasse.


Augsburg, 12 octobre 1805

DÉCISION

Rapport du ministre de la guerre à l'Empereur.

Votre Majesté m'a permis de lui mettre sous les yeux la position des officiers de l'état-major général de la Grande Armée; ces offiers arrivés en poste sans avoir eu le temps de faire leur équipage, l'activité de cette campagne, l'éloignement des différents corps occasionnent des dépenses extraordinaires ; ils ont été obligés de vendre les chevaux qu'ils avaient dans l'intérieur pour en acheter d'autres à l'armée.

Je sollicite des bontés de Sa Majesté une gratification de 1.500 francs pour chacun de ces officiers dont les noms sont ci-après :

Employés près le major général

Blein, chef de bataillon.
Parigot, id.
Lejeune, id.
Mergès, chef d'escadron.
Bailly de Montiiion, id.
Lostanges, capitaine de frégate.
Lejeune, capitaine.
Levaillant, id.
Montholon, id.
De Piré, id.
Simonin, id.
Saraire, lieutenant.
Malachowski, Polonais, chef de bataillon.
Junge, id.
Turski, id.
Skolski, id.

Employés par le général Andréossy

Bouchard, chef de bataillon
Thomière, id.
Huguet-Chataux, id.
Sallé, id.
Marteville, id.
Dieny, id.
Danloup-Verdun, id.
Catheli, id.
Castillon, id.
Bolesta, id.
Stanowski, id.

Employés par le général Dumas

Lebrun, adjoint
Vauquelin, id.
Thomas, id.
Si Votre Majesté accordre à ces trente officiers la somme de quarant-cinq mille francs, je la prie de m'autoriser à ordonnancer cette somme sur le chapitre 7 des dépenses imprévues de mon département.

Approuvé à condition que tous les officiers d'état-major auront au iiioins 4 chevaux.

(Picard)


Augsburg, 12 octobre 1805

DÉCISION

L'intention de l'Empereur est-elle que le munitionnaire général des vivres soit chargé de l'approvisionnement extraordinaire de 100.000 quintaux de grains à Gênes ? Il a déjà été statué sur cet objet.
Le ministre demande un fonds de 135.000 francs pour l'achat des redingotes et souliers du détachement de 120 hommes que chacun des 35 régiments d'infanterie de ligne et des 10 régiments d'infanterie légère doivent envoyer aux bataillons de guerre Compte rendu. A porter dans les demandes de fonds.

(Picard)


Augsburg, 12 octobre 1805

ORDRE

Donnez ordre à la division de Nansouty de partir une heure après midi et de passer la nuit entre Augsburg et Zusmarshausen, de partir demain à la petite pointe du jour et d'arriver le soir en passnt par Burgau à 2 lieues en-deça d'Ulm dans la position qui lui sera indiquée par le prince Murat auquel il demandera des ordres.

(Picard)


Pfaffeuhofen, 13 octobre 1803

PROCLAMATION A L'ARMÉE.
                  
Soldats, il y a un mois que nous étions campés sur l'Océan, en face de l'Angleterre; mais une ligue impie nous a ordonné de voler sur le Rhin.

Il n'y a pas quinze jours que nous l'avons passé, et les Alpes wurtembergeoises, le Neckar, le Danube et le Lech, barrières si célèbres de l'Allemagne, n'ont pas retardé notre marche d'un jour, d'une heure, d'un instant. L'indignation contre un prince que nous avons deux fois réassis sur son trône, quand il ne tenait qu'à nous de l'en précipiter, nous a donné des ailes. L'armée ennemie, trompée par nos manœuvres, par la rapidité de nos mouvements, est entièrement tournée. Elle ne se bat que pour son salut; elle voudrait bien échapper et retourner chez elle; il n'est plus temps. Les fortifications qu'elle a élevées à grands frais le long de l'Iller, nous attendant par les débouchés de la forêt Noire, lui deviennent inutiles, puisque nous arrivons par les plaines de la Bavière.

Sans cette armée que vous avez devant vous, nous serions aujourd'hui à Londres; nous eussions vengé six siècles d'outrages et rendu la liberté aux mers.

Mais souvenez-vous demain que vous vous battez contre les alliés de l'Angleterre; que vous avez à vous venger des affronts d'un prince parjure dont les propres lettres respiraient la paix, quand il faisait marcher ses armées contre notre allié; qui nous a supposés assez lâches pour croire que nous verrions, sans rien dire, son passage de l'Inn, son entrée à Munich et son agression contre l'électeur de Bavière. Il nous croyait occupés ailleurs. Qu'il apprenne pour la troisième et dernière fois que nous savons être partout où la patrie a des ennemis à combattre.

Soldats, la journée de demain sera cent fois plus célèbre que celle de Marengo; j'ai placé l'ennemi dans la même position.

Souvenez-vous que la postérité la plus reculée tiendra note de ce que chacun de vous fera dans cette mémorable journée.

Vos neveux mêmes, d'ici à cinq cents ans, viendront se ranger sous ces aigles qui vous rallient, sauront en détail tout ce que votre corps aura fait demain, et de quelle manière votre courage les aura à jamais illustrés. Ce sera l'objet perpétuel de leurs entretiens, et vous serez cités d'âge en âge à l'admiration des générations futures.

Soldats, si je n'avais voulu que vaincre l'ennemi, je n'aurais pas cru devoir faire un appel à votre courage et à votre amour pour la patrie et pour moi; mais le vaincre, ce n'est rien faire de digne de vous ni de votre Empereur. Il faut que pas un homme de l'armée ennemie échappe. Que ce Gouvernement qui a trahi tous ses devoirs n'apprenne sa catastrophe que par votre propre arrivée sous les murs de Vienne ; et, à cette funeste nouvelle, s'il écoute le cri de sa conscience, elle lui dira qu'il a trahi et les serments de la paix et ses premiers serments, devoirs que lui avaient légués ses ancêtres avec le pouvoir d'être le boulevard de l'Europe contre les irruptions des barbares.

Soldats qui avez donné aux combats de Wertingen et de Günzburg, j'ai été content de votre conduite; tous les corps feront comme vous. Et je pourrai dire à mon peuple : Votre Empereur et votre armée ont fait leur devoir; faites le vôtre; et les 200,000 conscrits que j'ai appelés accourront à marches forcées pour renforcer notre seconde ligne.


Au quartier-général impérial à Augsburg, 13 octobre 1805

ORDRE DU JOUR

L'Empereur témoigne sa satisfaction aux divisions de dragons, au 10e régiment de hussards et autres troupes, qui ont donné au combat de Wertingen. 3,000 prisonniers, 8 drapeaux, 7 pièces de canon et plus de 800 officiers de tous grade sont autant de trophées de gloire.

L'Empereur témoigne sa satisfaction aux troupes qui ont donné au combat de Günzburg et spécialement au 59e régiment de ligne.

La prise du pont et du poste important de Günzburg, que défendait l#armée autrichienne, celle d'un général major et de 1.000 prisonniers avec six piéces de canon, attestent la bravoure des troupes de la division Mahler.

Le maréchal Soult témoignera la satisfaction de l'Empereur au 26e régiement de chasseurs pour la belle charge qu'il a faite sous les ordres du général Margaron, où 120 cuirassiers d'Albert, dont un lieutenant-colonel, 2 capitaines et 2 pièces de canon, sont restés en notre pouvoir; le reste n'ayant dû son salut qu'à sa fuite dans le bois.

Le 2e régiment de chasseurs de l'avant-garde du maréchal Davout a fait une charge sur les uhlans de Merveldt et leur a fait 22 prisonniers près de Dachau.

L'avant-garde du maréchal Bernadotte a enlevé les bagages de plusieurs généraux ennemis et a fait prisonniers une vingtaine de hussards de Barco, dont un officier, près des portes de Munich.

L'armée ennemie, qui était sur l'Iller, est cernée et tournée de tous les côtés par les différents corps de la Grande Armée; elle se trouve dans la même position que l'armée de M. de Melas, à Marengo.

(Picard)


Ober-Fahlheim, 14 octobre 1805, 9 heures du soir

ORDRE GÉNÉRAL

M. le maréchal Lannes fera passer le Danube demain, une heure avant le jour, aux trois divisions des généraux Oudinot, Suchet et Gazan, ainsi qu'à toute la cavalerie légère, sur le pont d'Elchingen et sur celui de Thalfingen; à cet effet, le général Gazan fera rétablir, cette nuit, le pont de Thalfingen; en conséquence, ses troupes prendront les mêmes positions qu'occupent celles du maréchal Ney à Elchingen et à Albeck.

M. le maréchal Ney ploiera la division qui est à Elchingen et à Albeck, et, du moment que les troupes de M. le maréchal Lannes auront successivement remplacé les siennes à Elchingen et à Albeck, M. le maréchal Ney se disposera pour que son corps d'armée se mette en mouvement vers huit heures du matin, pour quitter sa position d'Albeck et en prendre une de bataille, ayant son artillerie en position, afin d'être prêt, vers midi, à attaquer la position que l'ennemi occupe sur le Michelsberg.

L'Empereur sera rendu de sa personne à l'abbaye d'Elchingen, d'où il donnera lui-même l'ordre d'attaquer, tant à M. le Maréchal Ney qu'aux autres troupes.

Une heure avant le jour, la division du général Klein suivra les troupes de M. le maréchal Lannes.

La division de grosse cavalerie du général Nansouty et la garde impériale prendront les armes une heure avant le jour, pour se rendre à l'abbaye d'Elchingen, de manière que demain, à huit heures du matin, il y aura au delà du Danube, sur la rive gauche, les corps des maréchaux Lannes et Ney, la division Klein, la division Nansouty et la réserve de la garde impériale.

Les dragons de la division du général Beaumont prendront position et seront employés à contenir l'ennemi dans Ulm, à la rive droite du Danube.

M. le général Marmont, avec son corps d'armée, se réunira demain, à la pointe du jour, à son avant-garde, vis-à-vis l'abbaye de Wiblingen, et, de là, se mettra en marche à travers champs pour aller occuper la hauteur de Pfühl, où il trouvera la division Beaumont, et, dans cette position , il contiendra l'ennemi dans Ulm, et, si cela était nécessaire, il défendrait les deux ponts que nous avons sur le Danube.

La division de dragons à pied du général Baraguey d'Hilliers restera où elle est bivouaquée cette nuit.

Si l'un des généraux s'apercevait que l'ennemi évacue Ulm cette nuit, il en ferait prévenir l'Empereur.

MM. les généraux en chef voudront bien donner des ordres, en ce qui les concerne, pour les présentes dispositions.

Le maréchal Berthier, par ordre de l'Empereur.


Abbaye d'Elchingen, 15 octobre 1805

Au maréchal Berthier

Les deux corps d'armée vont se former en bataille.

Le corps du maréchal Ney tiendra la droite appuyée au bois de Moehringen, son centre vis-à-vis Lehr, la gauche en avant de Jungingen. 

Le corps du maréchal Lannes

La division Suchet à droite;

La division Gazan à gauche;

Les grenadiers Oudinot la gauche;

La droite touchera à la gauche du maréchal Ney et la gauche coupera la route d'Albeck.

La cavalerie légère des deux corps d'armée éclairera devant et sur toutes les routes, à deux lieues aux environs, même en arrière.

La division de la garde impériale se mettra en bataille à Haslach, la gauche appuyée à Thalfingen.

La division Nansouty en seconde ligne.

La division Bourcier à Lehr et Moehringen.


Elchingen, 15 octobre 1805

5e BULLETIN (BIS) - DE LA GRANDE ARMÉE (Par suite de difficultés apportées à la marche des courriers, ce bulletin n'est parvenu à Paris qu'après le bulletin imprimé sous le no 6.)

Aux combats de Wertingen et de Günzburg ont succédé des faits d'une aussi haute importance : les combats d'Albeck, d'Elchingen, les prises d'Ulm et de Memmingen.

Le maréchal Soult arriva le 21 (13 octobre) devant Memmingen, cerna sur-le-champ la place, et, après différents pourparlers, le commandant capitula.

Neuf bataillons, dont deux de grenadiers, faits prisonniers, un général major, trois colonels, plusieurs officiers supérieurs, dix pièces de canon, beaucoup de bagages et beaucoup de munitions de toute espèce ont été le résultat de cette affaire. Tous les prisonniers ont été au moment même dirigés sur le quartier général.

Au même instant le maréchal Soult s'est mis en marche sur Ochsenhausen, pour arriver sur Biberach et être en mesure de couper la seule retraite qui restait à l'archiduc Ferdinand.

D'un autre côté, le 19 (11 octobre), l'ennemi fit une sortie du côté d'Ulm et attaqua la division Dupont, qui occupait la position d'Albeeck. Le combat fut des plus opiniâtres. Cernés par 25,000 hommes, ces 6,000 braves firent face à tout, et firent 1,500 prisonniers. Ces corps ne devaient s'étonner de rien; c'étaient les 9e léger, 32e et 76e de ligne.

Le 21 (13 octobre), l'Empereur se porta de sa personne au camp devant  Ulm, et ordonna l'investissement de l'armée ennemie. La première opération a été de s'emparer du pont et de la position d'Elchingen.

Le 22 (14 octobre), à la pointe du jour, le maréchal Ney passa ce pont à la tête de la division Loison. L'ennemi lui disputait la possession d'Elchingen avec 16,000 hommes; il fut culbuté partout, 3,000 hommes faits prisonniers, un général major, et fut poursuivi jusque dans ses retranchements.

Le maréchal Lannes occupa les petites hauteurs qui dominent la plaine au-dessus du village de Pfuhl. Les tirailleurs enlevèrent la tête de pont d'Ulm : le désordre fut extrême dans toute la place. Dans ce moment le prince Murat faisait manœuvrer les divisions Klein et Beaumont, qui partout mettaient en déroute la cavalerie ennemie.

Le 22 (14 octobre), le général Marmont occupait les ponts d'Unter-Kirchberg, d'Ober-Kirchberg, à l'embouchure de l'Iller dans le Danube, et toutes les communications de l'ennemi sur l'Iller.

Le 23 (15 octobre), à la pointe du jour, l'Empereur se porta lui-même devant Ulm. Le corps du prince Murat, et ceux des maréchaux Lannes et Ney, se placèrent en bataille pour donner l'assaut et forcer les retranchements de l'ennemi.

Le général Marmont, avec la division de dragons à pied du général Baraguey d'Hilliers, bloquait, la ville sur la rive droite du Danube.

La journée est affreuse. Le soldat est dans la boue jusqu'aux genoux. Il y a huit jours que l'Empereur ne s'est débotté.

Le prince Ferdinand avait filé la nuit sur Biberach, en laissant douze bataillons dans la ville et sur les hauteurs d'Ulm, lesquels ont été tous pris avec une assez grande quantité de canons. Le maréchal Soult a occupé Biberach le 23 (15 octobre) au matin.

Le prince Murat se met à la poursuite de l'armée ennemie, qui est dans un délabrement effroyable.

D'une armée de 80,000 hommes, il n'en reste que 25,000, et on a lieu d'espérer que ces 25,000 ne nous échapperont pas.
Immédiatement après son entrée à Munich, le maréchal Bernadotte a poursuivi le corps du général Kienmayer, lui a pris des équipages et fait des prisonniers.

Le général Kienmayer a évacué le pays et repassé l'Inn. Ainsi la promesse de l'Empereur se trouve réalisée, et l'ennemi est chassé de toute la Bavière.

Depuis le commencement de la campagne, nous avons fait plus de 20,000 prisonniers, enlevé à l'ennemi trente pièces de canon et vingt drapeaux. Nous avons de notre côté éprouvé peu de pertes. Si l'on joint à cela les désertions et les morts, on peut calculer que l'armée autrichienne est déjà réduite de moitié.

Tant de dévouement de la part du soldat, tant de preuves touchantes d'amour qu'il donne à l'Empereur, et tant de si hauts faits mériteront des détails plus circonstanciés; ils seront donnés du moment que ces premières opérations de la campagne seront terminées, et que l'on saura définitivement comment les débris de l'armée autrichienne se tireront de Biberach et de la position qu'ils prendront.

Au combat d'Elchingen, qui est un des plus beaux faits militaires qu'où puisse citer, se sont distingués le 18e régiment de dragons et son colonel Lefebvre, le colonel du 10e de chasseurs Colbert, qui a eu un cheval tué sous lui, le colonel Lajonquière du 76e et un grand nombre d'autres officiers.

L'Empereur a aujourd'hui son quartier général dans 1'abbaye d'Elchingen.


Elchingen, 15 octobre 1805

ORDRE DU JOUR

Le maréchal Soult a investi Memmingen, où il a pris 9 bataillons autrichiens, dont 2 de grenadiers, 14 pièces d'rtillerie, des magasins considérables, un général major, un grand nombre de colonels et d'officiers.

M. le maréchal Soult, instruit par l'Empereur que les Autrichiens se retirent sur Biberach, a dû y être rendu ce soir. Il est probable que tout ce qui a échappé au combat de Wertingen, à celui de Günzburg, d'Albeck, d'Elchingen, du blocus de Memmigen, enfin de la journée d'aujourd'hui à Ulm, sera pris demain ou après à Biberach.

Tant de succés sont dus à la patience de l'armée, à sa constance à supporter les fatigues et les privations : qualité première et la plus précieuse du soldat, parce que c'est elle qui permet de faire de grandes choses, en épargnant le sang.

(Picard)


16 - 31 octobre 1805