1 - 15 Mars 1808


Paris, 1er mars 1808                

Au prince de Neuchâtel, major général de la Grande Armée

Mon Cousin, donnez l'ordre au prince de Ponte-Corvo d'augmenter la division Boudet du 19e régiment de ligne et des 14e et 23e régiments de chasseurs; ce qui fera 1,200 chevaux; et, avec le parc et l'artillerie, cette division sera forte de près de 10,000 Français. Il prendra avec lui les deux divisions espagnoles, qui, étant fortes de 13,000 hommes, porteront son corps d'armée à 23,000 hommes. Il laissera le général Dupas pour commander les villes hanséatiques avec le régiment belge, ses deux régiments d'infanterie et son artillerie. Je vais prendre des mesures pour compléter cette division à quatre régiments, et la mettre en état d'aller au secours du prince de Ponte-Corvo, s'il est nécessaire. Vous donnerez ordre au prince de Ponte-Corvo de renvoyer une division hollandaise en Hollande, en la dirigeant sur Utrecht, et de garder l'autre division, c'est-à-dire les quatre meilleurs régiments, le régiment de cuirassiers et l'artillerie; ce qui fera un corps de 8,000 hommes, qui, avec les quatre régiments du général Dupas, restera dans les villes hanséatiques et sera en seconde ligne. Le prince de Ponte-Corvo se dirigera vis-à-vis les îles danoises, et fera ouvrir la marche par une avant-garde composée d'un régiment de cavalerie française, d'un régiment d'infanterie légère et de huit pièces de canon. Après, marchera une division espagnole, qui sera suivie de la division Boudet, qui marchera entre les deux divisions espagnoles; l'autre division espagnole fermera la marche. Vous ferez connaître au prince de Ponte-Corvo que je l'autorise à faire passer des troupes dans les îles danoises, c'est-à-dire, un régiment de cavalerie et deux régiments d'infanterie espagnols. Aucun de mes régiments français ne doit y passer qu'il n'ait reçu de nouveaux ordres, et j'attendrai pour les lui donner que j'aie des nouvelles des facilités qu'offrira le passage et des dispositions des Danois. Mais, dans tous les cas, aucune troupe française ne doit passer la mer qu'après une division espagnole.

Mon intention n'est pas que les troupes du prince de Ponte-Corvo soient disséminées dans les îles; elles doivent toutes se réunir aux environs de Copenhague. Ces 23,000 hommes, joints à 13,000 que peut fournir le Danemark, formeront une armée de 36, 000 hommes. Avant que les troupes du prince de Ponte-Corvo soient passées, la division Dupas et les Hollandais arriveront; probablement ne seront- elles pas nécessaires, mais elles occuperont le Holstein et maintiendront les communications.

Il est nécessaire que le prince de Ponte-Corvo me fasse connaître, 1° combien il y a de marches de Hambourg à l'île de Seeland , et quel jour il y arrivera; 2° combien d'hommes peuvent passer pour se rendre à Copenhague, et quel jour toutes les troupes pourront être passées. On saura, au retour de son courrier, le résultat des opérations des Russes, qui ont dû entrer, le 10 février, en Finlande. Le prince de Ponte-Corvo n'a du reste aucune diversion à craindre de la part des Anglais. Ils se contenteront d'envoyer quelques régiments hanovriens, qui ne demandent pas mieux que de déserter. Vous enverrez porter vos ordres par un officier du génie, qui, avant de revenir, visitera le Holstein, la Fionie et le bout du continent, et demandera, la permission de voir les fortifications que les Danois y ont élevées, afin de reconnaître les difficultés qu'il y aurait à vaincre pour s'emparer du pays en cas d'événement. Le prince de Ponte-Corvo fera faire aussi toutes ces reconnaissances et vous les enverra.


Paris, 1er mars 1808

A M. Fouché, ministre de la police générale

Faites-moi un compte particulier sur l'imprimeur Huzard. Vous dites qu'il a été compromis dans les papiers de l'abbé Lanouville.  S'il en est ainsi, mon intention est de faire fermer cette imprimerie et d'ôter à cet individu le privilège de tenir imprimerie. (Charles-Jacques Lanouville, prêtre, avait été enfermé au Temple, par décision du 2 mars 1805, pour avoir fait imprimer des libelles contre le gouvernement.)

(Brotonne)


Paris, 1er mars 1808

Au maréchal Jourdan, gouverneur de Naples

J'ai reçu votre lettre du 17 février. Je vois avec plaisir l'établissement de votre fils. Ne doutez pas de l'intérêt que je porte à tout ce qui vous regarde.

(Brotonne)


Paris, 2 mars 1808

Au général Clarke, ministre de la guerre

Monsieur le Général Clarke, le dernier état de situation présentant la situation de tous les corps au 15 février comprend les régiments de cavalerie. Je remarque que plusieurs régiments de marche y sont appelés provisoires, que plusieurs sont mal numérotés. La confusion va se mettre dans cette partie importante de l'administration. Les premiers régiments provisoires de dragons sont ceux qui sont en Portugal; s'ils n'ont pas été formés en régiments provisoires, ce qui est possible, il faut me présenter un décret pour les former. Vous appelez provisoires les détachements de cuirassiers venant d'Italie qui arrivent le 8 mars à Poitiers, cela est évidemment un escadron de marche. Je suis fâché qu'il vienne à Poitiers, puisqu'il est destiné pour Barcelone. Vous le laisserez reposer à Poitiers, vous le dénommerez ce qu'il est, escadron de marche, et j'en disposerai quand il sera nécessaire. Il ne faut jamais joindre, dans les états de situation, un escadron de marche à un régiment provisoire, jusqu'à ce que l'incorporation ait eu lieu et que l'escadron ou bataillon de marche soit dissous. Vous portez les escadrons de marche de Poitiers comme provisoires : il peut se passer bien des événements avant que cela soit; il faut les porter à part et tels qu'ils sont organisés pour la marche. Faites mettre dans cet état le nombre d'officiers et soldats de chaque régiment. Je remarque, dans le même livret, que les détachements que les régiments de cavalerie ont fournis aux régiments provisoires ne sont pas portés dans l'effectif; cela est très-mal, et propre à donner de fausses idées de la situation de mes régiments. Je vous prie de me faire remettre un état de situation de ma cavalerie. La 1e colonne contiendra le nom des régiments; la 2e, le nombre d'escadrons et leur effectif, que le régiment a à la Grande Armée ou à l'armée de Naples au ler février; la 3e, le nombre d'hommes que le régiment a aux régiments provisoires; la 4e, le nombre d'hommes que le régiment a aux escadrons de marche; la 5e, le nombre d'hommes que le régiment a au dépôt; la 6e, l'effectif du régiment; la 7e, ce que le régiment doit recevoir de l'appel des quatre régiments, et la mettre en état d'aller au secours du prince de Ponte-Corvo, s'il est nécessaire. Vous donnerez ordre au prince de Ponte-Corvo de renvoyer une division hollandaise en Hollande, en la dirigeant sur Utrecht, et de garder l'autre division, c'est-à-dire les quatre meilleurs régiments, le régiment de cuirassiers et l'artillerie; ce qui fera un corps de 8,000 hommes, qui, avec les quatre régiments du général Dupas, restera dans les villes hanséatiques et sera en seconde ligne. Le prince de Ponte-Corvo se dirigera vis-à-vis les îles danoises, et fera ouvrir la marche par une avant-garde composée d'un régiment de cavalerie française, d'un régiment d'infanterie légère et de huit pièces de canon. Après, marchera une division espagnole, qui sera suivie de la division Boudet, qui marchera entre les deux divisions espagnoles; l'autre division espagnole fermera la marche. Vous ferez connaître au prince de Ponte-Corvo que je l'autorise à faire passer des troupes dans les îles danoises, c'est-à-dire, un régiment de cavalerie et deux régiments d'infanterie espagnols. Aucun de mes régiments français ne doit y passer qu'il n'ait reçu de nouveaux ordres, et j'attendrai pour les lui donner que j'aie des nouvelles des facilités qu'offrira le passage et des dispositions des Danois. Mais, dans tous les cas, aucune troupe française ne doit passer la mer qu'après une division espagnole.

Mon intention n'est pas que les troupes du prince de Ponte-Corvo soient disséminées dans les îles; elles doivent toutes se réunir aux environs de Copenhague. Ces 23,000 hommes, joints à 13,000 que peut fournir le Danemark, formeront une armée de 36, 000 hommes. Avant que les troupes du prince de Ponte-Corvo soient passées, la division Dupas et les Hollandais arriveront; probablement ne seront-elles pas nécessaires, niais elles occuperont le Holstein et maintiendront les communications.

Il est nécessaire que le prince de Ponte-Corvo nie fasse connaître, 1° combien il y a de marches de Hambourg à l'île de Seeland , et quel jour il y arrivera; 2° combien d'hommes peuvent passer pour se rendre à Copenhague, et quel jour toutes les troupes pourront être passées. On saura, au retour de son courrier, le résultat des opérations des Russes, qui ont dû entrer, le 10 février, en Finlande. Le prince de Ponte-Corvo n'a du reste aucune diversion à craindre de la part des Anglais. Ils se contenteront d'envoyer quelques régiments hanovriens, qui ne demandent pas mieux que de déserter. Vous enverrez porter vos ordres par un officier du génie, qui, avant de revenir, visitera le Holstein, la Fionie et le bout du continent, et demandera la permission de voir les fortifications que les Danois y ont élevées, afin de reconnaître les difficultés qu'il y aurait à vaincre pour s'emparer du pays en cas d'événement. Le prince de Ponte-Corvo fera faire aussi toutes ces reconnaissances et vous les enverra.


Paris, 2 mars 1808

NOTE POUR M. MARET, MINISTRE SECRÉTAIRE D'ÉTAT.

Faire une note sur l'organisation des archives, et faire connaître de quel département elles dépendent, afin de régler définitivement ce service; car il y a lacune dans la législation lorsqu'il faut que l'Empereur intervienne pour la déterminer.


Paris, 2 mars 1808

Au Grand-duc de Berg, Lieutenant de l'Empereur en Espagne

Je reçois votre lettre du 27 février. Ayez votre quartier général le 10 à Vittoria, et faites en sorte que pour ce jour-là ma Garde y soit arrivée.

Donnez ordre que du 12 au 15 mars le maréchal Moncey et le général Dupont soient prêts à partir, et qu'ils réunissent leurs corps, l'un à Valladolid, et l'autre de Burgos à Aranda, en échelons, avec 4 jours de pain et 8 ou 10 jours de biscuit. Il ne faut pas que le maréchal Moncey fasse faire aucun mouvement rétrograde aux troupes qu'il aurait au delà d'Aranda; on m'assure qu'il en a à 3 ou 4 lieues au delà. Il doit réunir, pour le 15, sa cavalerie et sa 1e division avec dix-huit pièces de canon, entre Aranda et Burgos.

Donnez l'ordre que les cinq bataillons qui sont à Bordeaux et qui doivent faire partie de la division des Pyrénées occidentales se rendent à Bayonne. Comme ils ont encore des conscrits à recevoir, ils laisseront à cet effet leur 5e compagnie à Bordeaux.

Vous prendrez des mesures pour qu'aussitôt que possible cette brigade prenne possession de Saint-Sébastien.

Le 10 mars, la division Verdier doit commencer à se réunir à Bordeaux; mais elle doit avoir besoin de se reposer, et je lui ferai donner des ordres ultérieurs. J'approuve fort que ma Garde bivouaque en entrant en Espagne pour éviter la gale.

Il est nécessaire que les corps des généraux Moncey et Dupont se procurent des marmites pour pouvoir bivouaquer par division et par brigade.

Le général Dupont doit avoir au moins 60 caissons capables de porter une centaine de rations de biscuit, ce qui assurera les vivres pour cinq jours pour son corps d'armée; il se procurera des charrettes du pays et des mulets à bât.


Paris, 3 mars 1808

Au général Jullien, préfet du Morbihan

Je reçois votre lettre du 25 février. Je suis fâché de voir que vous ayez des peines. Je vous ai dans le temps fait témoigner ma satisfaction des services que vous m'avez rendus. J'aime à oublier la circonstance de l'enlèvement de l'évêque de Vannes, et l'intérêt que vous avez montré alors pour un homme dont je faisais tant de cas ne m'a pas échappé. Ne doutez pas que, lorsque les circonstances seront arrivées, je ne vous donne des preuves particulières de l'estime que je vous porte.


Paris, 3 mars 1808

Au colonel Lacoste, aide de camp de l'Empereur, en mission

Monsieur le Colonel Lacoste, vous trouverez ci-joints les projets que présente le premier inspecteur sur l'île d'Aix, avec les plans. Je trouve, 1° que quatre millions sont une dépense bien considérable; 2° que, pour exécuter ces travaux, il faut effacer ce qui existe aujourd'hui, et laisser ainsi l'île sans défense pendant six ans, de sorte que pendant six ans j'en aurais empiré la défense. Je demande d'abord une description qui me fasse bien connaître ce qui existe aujourd'hui, et si une simple flèche entre l'anse de la Croix et l'anse des Anglais, battant ces deux anses et défendant l'isthme, serait suffisante (on pourrait, dans une campagne et avec une dépense de cent mille écus, faire cette redoute, et on profiterait alors du fort actuel), ou bien si l'on ne pourrait pas construire une redoute entre le Beau-Séjour et le Moulin-du-Roi. L'ennemi serait obligé de s'emparer de cette redoute, s'il négligeait le fort. Avec une escarpe et une bonne contrescarpe, on peut la rendre susceptible de huit jours de défense, opération qui nous maintiendrait maîtres d'une partie de l'île, rendrait l'arrivée des secours plus facile, et ferait une espèce de camp retranché de l'emplacement entre le fort actuel et le Beau-Séjour. Faites-moi un rapport sur ce sujet.


Paris, 4 mars 1808

Au général Junot, commandant l'armée du Portugal

Je reçois vos dépêches du 14 février, que me porte mon officier d'ordonnance Tascher. Tout ce que j'apprends du Portugal est que le pays n'est pas entièrement désarmé, observation qui n'a point échappé à l'Angleterre, qui suppose qu'il n'a pas été prudent de le tenter. Je ne puis m'expliquer et je ne trouve pas de raisons qui soient cause que vous ne m'ayez pas envoyé les troupes portugaises, et que le 15 février, c'est-à-dire deux mois et demi après votre entrée en Portugal, ces troupes y soient encore. Il y a là-dedans de la folie. Au milieu de cela, vous publiez avec emphase mon décret qui impose une contribution de cent millions; il fallait attendre que vous fussiez maître du pays. Croyez-vous l'être aujourd'hui ? En relisant les lettres que je vous ai écrites depuis votre entrée en Portugal, vous verrez que vous n'avez rien fait de ce que je désirais. Vous me répondez de belles paroles, mais vous ne faites pas ce que je désire. Il est fâcheux pour moi de voir ainsi contrarier mes projets. Vous êtes entré le ler décembre en Portugal; le 15 décembre les troupes portugaises devaient, formées on non , être dirigées à grandes marches sur la France, et être arrivées à Bayonne, du 15 janvier au ler février, où je les aurais fait organiser. Immédiatement après que ces troupes auraient été parties, j'aurais procédé au désarmement. Voilà ce qui s'appelle se rendre maître d'un pays. Enfin vous avez poussé l'inadvertance jusqu'à laisser des mois entiers des places fortes entre les mains des Portugais. Je ne sais pas à quelle école vous avez été élevé. En Italie, où je n'ai qu'à me louer des habitants, où je suis leur souverain légitime, où leurs troupes sont à ma solde, je ne laisse pas même aujourd'hui leurs places fortes à des commandants italiens, mon armée étant là. Vous ne projetez qu'organisation ; cela est ridicule dans les circonstances où vous vous trouvez. La première chose à faire est de diriger, sans perdre un moment, les troupes portugaises sur la France. Malheureusement il est déjà bien tard aujourd'hui. Je n'aurais pas du m'attendre à une conduite aussi extraordinaire.

Je ne comprends rien à la mauvaise disposition de vos camps; il faut tenir vos troupes réunies , occuper les places fortes d'Elvas et d'Almeida. Je ne sais pas ce que vous entendez par l'armée portugaise; lorsque les Anglais débarqueront, elle irait les joindre ; ce seraient des misérables s'ils ne le faisaient pas. Je ne vous croyais pas si dépourvu de politique et de prévoyance; vous l'êtes à un point dont je n'ai pas vu d'exemple. Je vous réitère mon ordre de retirer mes troupes de Lisbonne; je ne veux pas qu'elles restent au milieu de la population d'une ville immense , exposées à manquer de pain. Il faut les baraquer dans des situations saines et de manière à les avoir dans la main.


Paris, 5 mars 1808

ALLOCUTION A UNE DÉPUTATION DE L'INSTITUT.
                                                     .
Messieurs les président et députés de la quatrième classe de l'Institut, Athènes et Rome sont encore célèbres par leurs succès dans les arts; l'Italie, dont les peuples me sont chers à tant de titres, s'est distinguée la première parmi les nations modernes. J'ai à coeur de voir les artistes français effacer la gloire d'Athènes et de l'Italie. C'est à vous de réaliser de si belles espérances. Vous pouvez compter sur ma protection.

Extrait du Moniteur du 7 mars 1808.


Paris, 5 mars 1808

A Joseph Napoléon, roi de Naples

Mon Frère, j'ai donné l'ordre à mon ministre du trésor public de vous envoyer 500,000 francs, de Florence, et 500,000 francs, de Milan. Cet argent vous sera envoyé en poste et arrivera, j'espère, peu de jours après ma lettre.

J'ai éprouvé un grand plaisir de la prise de Scilla. J'approuve que vous établissiez une batterie au Pezzo; mais la principale batterie doit être à Scilla; la hauteur ne fait rien ; cela a l'avantage de battre fort au large. Il faut mettre là des mortiers.

L'amiral Ganteaume doit, à l'heure qu'il est, être arrivé à Corfou; il a à bord des mortiers, des boulets, 80 affûts, 100 milliers de poudre et 5,000 quintaux de farine, chargés sur des flûtes; il a dû les jeter dans Corfou. J'augure très-bien de l'expédition, et si, comme on dit, il n'y a que 6,000 Anglais en Sicile, il n'y en aura pas 4,000 sous les armes ; ils s'enfermeront probablement à Syracuse.

Une escadre espagnole de six vaisseaux est partie de Carthagène le 12 février pour Toulon, où je l'attends. L'escadre de Lorient n'a pu appareiller, et la saison devient si belle que je doute qu'elle puisse passer.

Je n'ai pas besoin de vous faire comprendre l'importance de la batterie de Scilla; le fort la défend. N'écoutez aucune observation, nommez un bon colonel pour commander à Scilla, donnez-lui 600 hommes de troupes françaises, des vivres, un officier du génie, un chef de bataillon et deux capitaines en second, un adjudant de place et un commissaire des guerres, et qu'il ne dépende de personne ; laissez-lui de l'argent. Cet officier peut se défendre vingt jours, et il n'y a aucune chance que dans quinze jours vous ne puissiez venir à son secours.

Aussitôt que vos troupes seront embarquées pour la Sicile, les troupes que j'ai à Rome se mettront en grande partie en marche sur Naples ; ce sont toutes les compagnies de grenadiers et de voltigeurs et les plus belles troupes du monde.

Il est possible qu'avant huit jours je parte pour l'Espagne. Le grand-duc de Berg est parti depuis quinze jours pour s'y rendre. J'ai 80,000 hommes à trente lieues de Madrid. Junot, avec 30,000 hommes, est maître de Lisbonne et du Portugal; et, cependant, je n'ai pas fait rentrer un seul homme de la Grande Armée. J'ai en Pologne et sur l'Oder près de 300,000 hommes. La conscription de cette année se lève, et, avant trois mois, j'aurai 80,000 hommes pour renforcer mes cadres. Jugez de l'argent que cela me coûte !

Votre régiment napolitain fait partie d'une division de 10,000 hommes que commande le général Duhesme ; il est depuis quinze jours à Barcelone, où il est très-bien. Vous sentez qu'il aura besoin de recrues. Organisez donc un bataillon provisoire d'un millier d'hommes, et mettez-le en marche pour Turin ; il servira à maintenir votre régiment au complet.


Paris, 5 mars 1808

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie

Mon fils, je donne l'ordre à mon ministre du Trésor public de faire partir 500.000 francs de Florence, et 500,000 francs de Milan, pour Naples. Si le sieur Dauchy et le payeur de Milan n'avaient pas cette somme en argent, je vous autorise à les faire fournir par mon Trésor d'Italie. Il serait convenable, de les prendre à Bologne et à Rimini, pour ne point perdre de temps, et d'écrire au sieur Dauchy, comme cet envoi est très-pressé, de les prendre à Livourne, etc., etc. de manière que cela ne souffre aucun retard. Vous ferez accompagner cet argent par des gendarmes. Il est nécessaire que le convoi aille en poste et marche jour et nuit.

(Prince Eugène)


Paris, 5 mars 1808

A Jérôme Napoléon, roi de Westphalie

Mon Frère, je reçois votre lettre du 14 février. Le comte de Winzingerode a été longtemps ministre du roi de Wurtemberg. Je pense qu'il ne peut être fait aucune objection raisonnable à ce que vous l'employiez. Je crois que les raisons qui font qu'il a quitté le service de Stuttgart n'attaquent ni la probité ni l'honneur. Vous êtes , du reste, plus à même d'avoir des renseignements secrets là-dessus. D'ailleurs, c'est un homme qui est très au fait de la marche des affaires de la Confédération, qui a montré beaucoup de zèle pour le service du roi de Wurtemberg, et dont je pense, sauf renseignements plus précis, que vous pourrez tirer bon parti.


Paris, 6 mars 1808

Au général Junot, commandant l'armée du Portugal

Je reçois votre lettre du 20, que m'apporte Bataille, qui me donne des renseignements satisfaisants sur le Portugal. Il me tardait fort d'apprendre le départ des troupes portugaises; je m'en servirai en Italie et ailleurs. J'apprends avec plaisir que vous avez deux vaisseaux de ligne armés et quelques frégates. Par votre réponse à cette lettre, apprenez-moi combien vous avez de maîtres, contremaîtres et canonniers français. Je vois avec peine que vous y mettiez des Hanovriens ; c'est un contre-sens. Sur chaque vaisseau de ligne il faut mettre au moins 150 Français.

Le grand-duc de Berg a porté son quartier général à Burgos.

Je ne suis pas encore instruit que vous soyez maître d'Elvas. Aussitôt que vous l'aurez, réunissez autour de cette place les trois quarts de votre cavalerie, c'est-à-dire au moins 1,500 hommes, six pièces d'artillerie légère, et une division d'infanterie de 6,000 hommes avec douze pièces d'artillerie. Que cette division soit à Elvas prête à se porter partout où cela sera nécessaire, selon la circonstance, afin de maintenir la communication avec nies troupes, si elles se rendent à Madrid.

Ayez une bonne division à Almeida, et, si la division de Galice faisait un mouvement sur Valladolid, soyez disposé à vous y opposer et à envoyer contre elle. Il est bien important que les Portugais ne passent pas par Madrid, et se dirigent par colonnes de beaucoup moins de 1,000 hommes sur Valladolid.

Il est possible que moi-même je me rende bientôt en Espagne. Il faut que vous ayez à Almeida et à Elvas des hommes sûrs et intelligents, qui vous instruiront de ce qui se passe, et que vous ne laissiez pas les Espagnols faire des mouvements qui auraient l'air d'être offensifs contre les troupes que j'ai en Espagne.


Palais des Tuileries, 6 mars 1808

OBSERVATIONS FAITES DANS LE CONSEIL D'ADMINISTRATION DES FINANCES.

M. Bérenger, directeur général de la caisse d'amortissement, présente le travail demandé par Sa Majesté dans le conseil du 28 février dernier. Dans son premier rapport il avait exposé la situation comptable de la caisse d'amortissement; dans celui-ci il fait connaître les besoins, les ressources et l'emploi des fonds de cette caisse.

Sa Majesté, après avoir examiné le nouveau rapport de M. Bérenger et examiné les états à l'appui, fait connaître, par des observations générales, la manière dont elle désire que tout ce travail lui soit présenté. Elle fait ensuite les observations et les demandes particulières ci-après :

1° Demandes auxquelles il serait à désirer que le directeur général de l'enregistrement put satisfaire :

Quelle est la quantité de domaines cédés  à la caisse d'amortissement depuis l'an VIII ?
Quelle est la quantité qui a été vendue chaque année, année par année ?
Combien les receveurs des domaines ont-ils versé en conséquence des ventes, année par année ?
Quelle a été la différence entre la mise à prix et le prix des ventes ? Quelle est la quantité des procès-verbaux qui restent à verser ? Combien reste-t-il de domaines à vendre ?

2° Observations et demandes auxquelles M. le directeur général de la caisse d'amortissement est invité à satisfaire.

Il convient de mettre à part et hors des états ce qui regarde la Grande Armée.

Il convient d'ôter également de la caisse l'article des fonds de retraite en cinq pour cent, l'article des consignations, celui des coupes extraordinaires de bois communaux, celui de la Légion d'honneur, celui des produits des centimes additionnels destinés à des travaux publics. Ces déplacements rendront la situation de la caisse plus simple.

Il faut placer les inscriptions pour le ministre de l'intérieur à la suite de l'article des retraites, et dire que les 109,758 francs de rente appartenant à des fonds de retraite, hospices, etc., sont portés en recettes et en dépense.

Il faut mettre les affaires de rescriptions avec les affaires contentieuses qui existent entre la caisse et le trésor.

Enfin il faut bien établir, par un mémoire, ce que la caisse peut donner en gains.

Il faut aussi donner le compte de ce qu'ont rendu les domaines comme domaines, année par année.

Le travail résultant, soit des observations, soit des demandes de Sa Majesté, sera présenté à un conseil qui se tiendra dimanche prochain.


Paris, 6 mars 1808

Au Grand-duc de Berg, Lieutenant de l'Empereur en Espagne

Je reçois votre lettre du 2 mars. Vous avez dû recevoir, le 5, la lettre que je vous ai écrite le même jour, par laquelle je vous ordonnais de porter votre quartier général à Vittoria et d'y être rendu le 10. Vous pouvez porter votre quartier général à Burgos et y être le 12. Dirigez ma Garde sur Burgos ; mais réunissez des escortes de cavalerie et de gendarmerie depuis Bayonne jusqu'à Burgos, de manière que j'aie à chaque poste pour mon escorte au moins trente hommes. Je suppose que le 14 mars ma Garde sera à Burgos; que le maréchal Moncey aura réuni son corps d'armée entre Aranda et Burgos, et que de sa personne il sera à Aranda avec sa cavalerie, sa première division et dix-huit pièces de canon ; que sa seconde division sera en une marche de la première, et sa troisième division à Burgos; que le général Dupont sera le même jour à Valladolid avec sa première division, sa cavalerie et dix-huit pièces de canon, ses deux autres divisions à une demi-marche de l'avant-garde; et que ces deux corps d'armée auront du pain et du biscuit pour une douzaine de jours. Je suppose que ma Garde aura aussi à Burgos du pain et du biscuit pour dix ou douze jours. Mes chevaux devront être également à Burgos. Un page et une brigade suivront le quartier général du maréchal Moncey; un autre page et une brigade seront auprès du général Dupont. Le reste de mes chevaux restera à Burgos. Canisy organisera chaque brigade de manière qu'il y ait deux chevaux pour moi, des porte-manteaux, etc.

S'il n'y a rien de nouveau et que le prince de la Paix vous ait écrit, vous pouvez lui répondre une lettre insignifiante, dans laquelle vous lui direz que mes ordres-vous ont conduit en Espagne pour passer la revue de mes troupes, dont vous ignorez la destination, et que vous serez fort aise si les circonstances vous mettent à même de le voir.

Vous aurez soin de laisser, pour commander tous les pays compris entre Valladolid et les Pyrénées, un des généraux de brigade qui sont venus à la suite de l'armée.

Faites envoyer de Vittoria et de Bayonne 100,000 rations de biscuit dans la citadelle de Pampelune. Que le général Merle l'approvisionne sans trop effrayer les habitants, et qu'il fasse aussi enfermer la poudre qui est hors de la ville. Il faut dans cette citadelle une demi-compagnie d'artillerie. Donnez en conséquence l'ordre à la moitié d'une des deux qui se trouvent à Bayonne de s'y rendre. Mettez-y un chef de bataillon d'artillerie que le général la Riboisière désignera, un officier du génie, un bon commandant, deux adjudants de place et un commissaire des guerres. Que tout cela soit fait promptement, afin que, lorsque je jugerai à propos de faire venir la division du général Merle à l'armée, je sois maître du poste important de la citadelle de Pampelune en y mettant un millier de conscrits. L'hôpital doit être dans la ville, de manière que la garnison puisse vivre isolée, si cela est nécessaire. Faites-moi connaître qui vous aurez nommé.

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7 mars 1808.

P. S. Activez tous les mouvements des corps des généraux Moncey et Dupont, de manière que le maréchal Moncey puisse s'emparer, le plus tôt possible, des montagnes qui séparent Burgos de Madrid.

Je suppose que vous serez le 12 à Burgos. Envoyez vos chevaux dans la direction d'Aranda, et suivez le mouvement du maréchal Moncey, qui sera en mesure d'entrer le premier à Madrid. Qu'il réunisse sa cavalerie et sa première division à trois ou quatre lieues en avant d'Aranda, sa seconde division à Aranda, et sa troisième division entre Aranda et Burgos; qu'il soit prêt à partir le 14, abondamment pourvu de vivres, et que sa cavalerie soit en tête.


Paris, 7 mars 1808

Au général Junot, commandant l'armée de Portugal

Je reçois votre lettre du 23 février. J'apprends que le général Solano est parti avec sa division pour se rendre à Badajoz, où, à ce qu'il paraît, il sera rendu le 10 mars. Pour peu que vous ayez de sens, vous avez dû faire suivre cette division par la moitié de votre cavalerie, par une division de 5 à 6,000 hommes et par dix-huit pièces de canon. Si vous ne l'avez pas fait, faites-le sur-le-champ. Que cette division, commandée par un de vos meilleurs généraux, se réunisse à Elvas, pousse des partis jusqu'à Burgos (ainsi à la minute; mais le sens demande Badajoz.) et ait l'oeil sur ce qui se passe. Ou le général Solano se rend à Cadix, ou il va à Madrid - s'il se rend à Cadix, cette division peut se reposer à Elvas, et, sous prétexte d'envoyer des officiers à Cadix, elle en enverra sur les pas du général Solano, pour le reconnaître et agir selon les circonstances; s'il se rend à Madrid, il faut supposer que la cour d'Espagne se méfie de moi; alors ce que vous devez faire, c'est de contenir le général espagnol et de l'empêcher de faire diversion. C'est aujourd'hui le 7; vous recevrez cette lettre le 17; si vous n'avez pas déjà réuni votre division à Elvas, vos troupes n'y seront que le 23. La destination du général Solano sera décidée, et, à peine arrivée à Elvas, votre division apprendra les événements qui seront arrivés, et elle agira en conséquence.

Je serai probablement le 12 mars à Burgos. Tâchez que j'y trouve un de vos aides de camp qui m'apporte de vos nouvelles. Votre armée doit être divisée en trois corps : un pour contenir Lisbonne , un pour pouvoir d'Elvas se transporter où il sera nécessaire, et l'autre partie pour contenir la division de Galice. Vous ne devez d'ailleurs avoir aucune inquiétude; j'ai des troupes pour faire face à tout. Vous n'avez rien à craindre des Anglais, la saison est encore trop mauvaise. Les Portugais peuvent vous servir. Ne parlez haut contre les Espagnols que quand les événements auront éclaté. Jusque-là il faut se contenter de simples insinuations.


Paris, 8 mars 1808

Au Grand-duc de Berg, Lieutenant de l'Empereur en Espagne.

Je reçois tous les états de situation qui étaient joints à vos lettres du 4 et du 5. Je suis indigné d'apprendre que la solde est arriérée de deux mois au corps du général Dupont, et qu'elle l'est également au corps du maréchal Moncey, puisqu'il n'a en caisse que des valeurs qu'on ne peut réaliser. J'envoie chercher Mollien pour lui témoigner mon mécontentement. Je donne ordre que le payeur du trésor, qui est à Bordeaux avec une caisse de 3 millions , en parte le plus tôt possible pour le quartier général. Il marchera désormais avec ma Garde. Donnez l'ordre à tous les généraux, officiers d'état-major qui se trouvent à Bayonne, de se rendre à Burgos. Exceptez-en Monthion et un officier d'état-major que Berthier doit avoir envoyé à Bayonne pour correspondre avec lui. Envoyez les deux premiers généraux qui arriveront à Burgos, l'un au maréchal Moncey, et l'autre au général Dupont, qui les mettront dans les divisions où il en manque.

Du moment que vous serez arrivé à Burgos, vous écrirez aux États de Burgos, d'Alava, de Guipuzcoa, de Biscaye et de la Vieille-Castille, une lettre que vous enverrez aux intendants de ces provinces. Cette lettre sera ainsi conçue :

Parti de Paris depuis quinze jours pour venir prendre le commandement des troupes de S. M. l'Empereur, je n'ai pas tardé à apprendre, à mon entrée en Espagne, que vos provinces avaient fait des avances considérables pour les troupes françaises, et que ces dépenses étaient supportées par les provinces mêmes. Sa Majesté m'a chargé de vous faire connaître que son intention était que ces provinces fussent remboursées exactement des frais qu'elles ont faits pour ses troupes. Je vous invite donc à en adresser sans délai les états à l'intendant de l'armée. Depuis que je suis au milieu de vous, j'ai recueilli les bons sentiments qui vous animent; j'en ai fait part à Sa Majesté, qui a tant d'estime et d'amitié pour les Espagnols et qui a tant à coeur de contribuer au bien de ce pays. 

Vous ferez traduire cette lettre en espagnol , et vous la ferez imprimer dans des gazettes, s'il y en a; sinon, vous la ferez mettre dans des petits bulletins à la main que vous ferez circuler sans affectation.

Je viens de voir Mollien. Il fait partir sur-le-champ une estafette qui porte au payeur l'ordre de se rendre avec un million à Bayonne, de manière qu'au 15 mars le général Dupont et le maréchal Moncey aient reçu les sommes dont leurs corps ont besoin. De votre côté, donnez des ordres positifs pour que les officiers soient payés de tout ce qu'il leur revient jusqu'au 1er mars. Il faut plutôt retarder la marche d'un jour, si cela est nécessaire. Mon intention est que le soldat ait toujours le gousset garni pendant sa marche, parce qu'alors il ne pillera pas, et achètera les objets dont il aura besoin.

Recommandez que les quartiers-maîtres soient exacts dans leurs distributions, et rendez un ordre du jour sévère là-dessus, ainsi que sur le maintien de la discipline.

Vous ferez également mettre ce qui suit à l'ordre de l'armée :

S. M. l'Empereur, instruit que les officiers et soldats de son armée en Espagne perdent considérablement sur le change des monnaies, a ordonné que la différence fût supportée par le trésor. Il sera fait, en conséquence, une revue particulière, à partir de l'entrée en Espagne, sur laquelle on accordera la différence de l'une à l'autre monnaie. Sa Majesté a appris avec plaisir la bonne discipline qu'a observée l'armée ; elle lui en témoigne sa satisfaction, et l'invite à continuer de même et à avoir les plus grands égards pour le peuple espagnol, estimable à tant de titres. Le soldat doit traiter les Espagnols comme il traiterait les Français eux-mêmes. L'amitié des deux nations date de longue main; elle doit être consolidée dans la circonstance actuelle, Sa Majesté n'ayant en vue que des choses utiles et avantageuses à la nation espagnole, pour laquelle elle a toujours eu la plus haute estime.

Vous aurez soin que, dès le lendemain de l'envoi de votre lettre aux États, cet ordre soit traduit en espagnol et répandu partout dans les deux langues.


Paris, 9 mars 1808

A M. de Champagny, ministre des relations extérieures

Monsieur de Champagny, je désire que vous expédiiez aujourd'hui quelqu'un en Espagne; vous pourriez envoyer le sieur Vandeul. C'est aujourd'hui le 9, il faut qu'il soit le 15 à Madrid. Il sera porteur d'une lettre de vous au sieur Beauharnais, par laquelle vous chargerez cet ambassadeur de faire connaître au généralissime, dans la journée du 15 ou dans celle du 16, que deux divisions françaises devant se rendre à Cadix séjourneront quelque temps à Madrid, et de demander que toutes les dispositions soient faites pour leur réception; qu'une de ces divisions sera détachée du corps qui est à Valladolid, et l'autre de celui qui est à Aranda ; que ces deux divisions réunies formeront 50,000 hommes.

Vous instruirez le sieur Beauharnais que le grand-duc de Berg est venu pour prendre le commandement de ce corps, et qu'il doit arriver le 14 à Burgos avec le corps de réserve, composé de deux autres divisions formant à peu près 50,000 hommes; que le général espagnol Solano a quitté, le 3 mars, le Tage avec sa division , qu'il doit arriver le 10 à Badajoz, et que, de là, il a dû se diriger sur Cadix on sur Madrid. S'il s'est dirigé sur Madrid, le sieur Beauharnais demandera quel est l'objet de ce rassemblement, et si c'est dans le but de s'opposer aux troupes françaises. Si le général Solano s'est dirigé sur Cadix, le sieur Beauharnais se plaindra seulement que ce général ait ainsi quitté le Portugal, et, par là, compromis l'existence de l'armée française dans ce pays. Le sieur Beauharnais ne manquera pas d'envoyer au grand-duc de Berg un agent sûr par Aranda et Burgos, pour l'instruire de ce qui se passe du côté de Madrid. Vous chargerez le sieur Vandeul de partir de Madrid le plus tôt possible, sans attendre la réponse de la cour d'Espagne, de manière à être à Aranda le 18, et le 19 à Burgos. Quand il sera à mi-chemin d'Aranda à Madrid, il expédiera quelqu'un au grand-duc de Berg pour l'instruire de ce qu'il apprendrait qui en valût la peine, et des mouvements de la division Solano, si de Badajoz elle se dirigeait sur Madrid ou sur Cadix. Vous ajouterez en chiffre, au sieur Beauharnais, qu'une armée française de 50,000 hommes entrera à Madrid le 22 ou le 23. Vous lui recommanderez de rassurer les partisans du prince de la Paix, du prince des Asturies, de répandre que mon projet est de me rendre à Cadix pour assiéger Gibraltar et me rendre en Afrique, et de voir en passant à régler les affaires d'Espagne, de manière qu'il n'y ait point de doute sur la succession de ce royaume. Si le prince de la Paix ou le prince des Asturies laisse entrevoir le désir de venir à Burgos, cela me sera très-agréable; n'importe qui viendra, il faut le recevoir. Le sieur Beauharnais doit prendre toutes les mesures pour que les vivres soient assurés à Madrid pour cette grande quantité de troupes.


Paris, 9 mars 1808

A M. Mollien, ministre du trésor public

Monsieur Mollien, je vous envoie un compte de M. Daru. Il est bon que vous ayez connaissance du tiers de ce compte. Établissez bien votre situation avec la Grande Armée au 1er janvier 1808, afin que nous puissions partir de là. Vous savez que vous avez 15 millions à céder à la Grande Armée ; comme il y a 12 millions de créances de 1806 que la Grande Armée doit payer, je ne sais donc comment vous persistez à penser que le payeur ne vous doit que 15 millions, puisqu'il ressort de cet état qu'il vous doit bien davantage. Je désire que vous me fassiez un relevé de la situation de la Grande Armée au ler janvier 1808, en recettes et en dépenses, afin que je voie si elle est conforme aux aperçus que j'ai faits. Expliquez-moi comment la solde est portée à 70 millions, qui, avec les 24 millions de 1806, font 94 millions. Il me semble que nous n'avions calculé que 71 millions.

Vous trouverez ci-joint le dernier état du payeur de la Grande Armée. Expliquez-moi ce que le payeur veut dire par cette note : conformément à la lettre du ministre, le payeur a crédité son compte dépôt de la somme de 6 millions, dont il a fourni son récépissé pour la solde de janvier et février 1808.

Donnez ordre que les comptes avec la Bavière me soient soumis et qu'il ne soit rien payé sans ordre.

Au conseil d'administration d'aujourd'hui, j'ai vu des choses sur la Garde qui ne me paraissent pas claires.


Paris, 9 mars 1808

A M- Daru, Intendant général de la Grande Armée

Monsieur Daru, après avoir lu attentivement le volume de comptes que vous m'avez rendu, intitulé Administration, j'en ai fait le relevé suivant; faites-moi connaître si je puis y compter. Je néglige toujours les troisièmes chiffres pour ne pas perdre de temps.

1e note. Le directeur des contributions de la Grande Armée avait reçu au 1er janvier 1808, 200 millions. Il en avait donné 104 au payeur, en avait envoyé 42 à la caisse d'amortissement, en avait 50 en caisse, et en avait consommé 2 en faux frais ou restitutions.

2e note. Le payeur de l'armée avait dépensé 119 millions; il en fallait encore 12 pour achever le payement de la solde de 1806 ; il fallait 12 autres millions pour solder 1807 ; je calcule 5 millions pour ce qui est à payer en argent comptant pour les services faits depuis le 1er octobre 1806. Je ne comprends là rien de ce qui peut se régulariser, soit en décomptes sur la Pologne, soit en décomptes sur les contributions. Total de la dépense au 1er janvier 1808, 148 millions. Pour l'intelligence de cela, il faut que vous sachiez que j'ai pris, il y a deux jours, un décret portant que la solde de 1806 serait payée par la Grande Armée, et je lui ai fait céder différentes terres et des rebuts de budget qui ne peuvent pas entrer au trésor; et que la solde de 1807 serait également payée par la Grande Armée; qu'à cet effet le trésor public tiendrait compte à la Grande Armée, 1° de 15 millions lui appartenant, que le payeur avait consommés au 1er janvier 1808; 2° de 14 millions que le trésor devrait à la Grande Armée, faisant partie d'une somme plus considérable que la Grande Armée lui prête; 3° de 18 millions de solde passés en compte à la Grande Armée, dont il serait fait recette pour ordre au trésor publie. J'observe, à cet égard, que nous avions évalué la solde de .1807 à 47 millions, celle de 1806 à 12 millions payables par la Grande Armée et à 12 millions à payer, c'est-à-dire 24 millions; total 71 millions. Je suis donc fort étonné de voir dans vos comptes que la solde payée se monte à 70 millions, ce qui, joint à 24 millions qui restent à payer, ferait 94 millions. Donnez-moi des explications là-dessus. Cela vient-il de ce que vous portez comme solde des objets qui ne le sont pas ? 94 millions pour dix-huit mois feraient 5 à 6 millions par mois.

3° note. - Les ressources du receveur des contributions en argent comptant étaient, au ler janvier, de 200 millions, auxquels il faut ajouter les 15 millions cédés par le trésor, c'est-à-dire 215 millions. Ce qui est mis pour solder la dépense se montera à 148 millions pour le payeur général, 2 millions pour faux frais et restitutions; il restera donc 65 millions, dont 42 ont déjà été envoyés à la caisse; il resterait donc à la caisse 23 millions. Faites-moi connaître si ces calculs sont exacts. Si cela est, faites payer aux officiers et administrateurs les quatre mois de 1806 qui sont dus. Je crois avoir également donné l'ordre que tout ce qui serait dû aux officiers jusqu'au ler janvier 1808 fût payé. Vous avez dû le faire payer au 3e corps ; vous pouvez le faire également payer à la garnison de Danzig et aux autres corps qui en ont besoin. Ayez soin que la solde de janvier, février et mars 1808 soit payée tous les mois aux officiers et aux soldats. Je pense que les retardements dans le payement de la solde courante donnent toujours lieu à des dilapidations.

Je vois que, dans l'ayant en caisse de 51 millions qu'a le receveur, il a 1,200,000 francs à Wesel, 10 millions à Mayence, 1 million en Hanovre, et 700,000 francs à Munster. Je désire fort qu'il mette
sans délai ces sommes à la disposition de la caisse d'amortissement.

Je désire également que tout ce que doivent Hambourg, Brême et Lubeck, soit envoyé le plus tôt possible à la caisse d'amortissement. Autre observation. Selon vous, la recette des contributions devrait être de 267 millions ; le sieur la Bouillerie n'en porte que 200 : différence, 67 millions. Vous en portez 41 pour fournitures , la différence n'est plus que de 26. Sur ces 26 millions, je suppose qu'au moins 20 sont rentrés ou doivent rentrer. Je vois 10 millions de différence aux villes hanséatiques. J'ai fort à coeur que la comptabilité soit arrêtée au ler janvier 1808, afin de pouvoir partir de là. Faites-moi connaître ce que rendent les États prussiens par mois, et remettez-moi en même temps votre état de contribution comparé avec celui du receveur, avec les observations qui les mettent d'accord. Faites-moi aussi le budget, au 1er janvier 1808, de ce que vous croyez qui rentrera au ler juillet 1808 sur les contributions de toute espèce, et surtout sur les contributions ordinaires. Comparez-le avec ce que coûte la Grande Armée. J'ai à coeur de payer tout ce que je dois en Pologne. Si je dois encore beaucoup lorsque mes créances sur le gouvernement polonais seront épuisées, j'affecterai à cela les créances que j'ai sur la Prusse.


Paris, 9 mars 1808

Au Grand-duc de Berg, Lieutenant de l'Empereur en Espagne

Je reçois votre lettre du 6 mars. Je vois avec plaisir que l'affaire de Saint-Sébastien a bien fini. La moindre hostilité sur ce point m'eût été très-désagréable. C'est aujourd'hui le 9. Je suppose que Vous êtes à l'heure qu'il est à Vittoria, d'où je recevrai de vos nouvelles.

Vous serez probablement le 14 à Burgos. Le principal est que le maréchal Moncey fasse filer ses 300,000 rations de biscuit sur Aranda (le général Dupont a déjà les siennes à Valladolid), et que les deux corps d'armée aient leur pain et leur biscuit avec eux pour une quinzaine de jours, afin d'éviter tout désordre et d'être sûr que l'armée marche en bon ordre. Le major général vous expédie des ordres de mouvement par un officier d'état-major qui vous arrivera avant l'estafette, puisqu'il part aujourd'hui à six heures du soir. J'espère que ma Garde sera toute réunie le 14 ou le 15 à Burgos, et que vous aurez assuré une escorte de Bayonne à Burgos. Je donne ordre au général Merle de laisser 1,000 hommes dans la citadelle de Pampelune et de se rendre à Vittoria, où il devra être le 15 ou le 16. Sa seconde brigade, composée de cinq bataillons de la réserve que je suppose devoir arriver le 12 ou le 14 à Bayonne, continuera également sa route sur Vittoria, ce qui portera la division du général Merle à 4,500 hommes d'infanterie et douze pièces de canon. Le régiment de marche qui arrive aujourd'hui à à Bordeaux, et qui probablement sera le 16 ou le 17 à Bayonne, dirigera également sa marche sur Vittoria pour augmenter encore la division Merle. Enfin la division Verdier, qui arrive aujourd'hui et demain à Bordeaux, arrivera le 17 et le 18 à Bayonne et formera la seconde division de réserve. Quatre régiments de marche de cavalerie, qui arriveront le 20 et le 21 à Bayonne, continueront leur route sur Vittoria, pour se ranger sous les ordres du général Merle. La seconde partie de ma Garde, composée des fusiliers et de plusieurs détachements de cavalerie, formant 3,000 hommes et 500 chevaux, arrivera à Bordeaux le 20, et continuera sa marche, ce qui formera sur mes derrières une réserve assez considérable, maintiendra ma communication avec Madrid, et fera face aux troupes espagnoles de Galice. Il faut que le général Merle fasse son mouvement de Pampelune de manière à ce qu'on s'en aperçoive le moins possible. Il laissera le général Darmagnac avec un millier d'hommes dans la citadelle.

Vous verrez par les ordres que vous recevrez du major général que, le 16, la deuxième division du maréchal Moncey devra être sur Aranda, et que sa troisième division partira le 15 de Burgos pour marcher sur Aranda, de manière que, le 17, le général Grouchy avec les deux brigades de cavalerie, ayant chacune trois pièces d'artillerie légère, la première et la deuxième division du maréchal Moncey, se mettent en marche sur la montagne de Somo-Sierra, pour arriver le 18 au soir au pied de cette montagne, la passer le 19, et y séjourner le 20, si vous ne recevez pas de nouveaux ordres. Cette journée du 20 sera employée à faire passer la troisième division du maréchal Moncey, de sorte que le 21 tout son corps se trouve réuni à une marche au delà de la montagne; que le général Dupont marchera de manière à se trouver le 19 à l'intersection des chemins de Ségovie et Saint-Ildefonse avec celui de Madrid; qu'il ne mènera avec lui que sa cavalerie, son artillerie et deux divisions, et qu'il laissera sa troisième division à Valladolid pour observer le corps espagnol qui est en Galice. Il est nécessaire que vous ayez des renseignements positifs sur le lieu où se trouve ce corps, et que le général qui commandera de ce côté ait soin de vous informer de tout ce qui viendrait à sa connaissance. Le maréchal Moncey doit marcher avec sa seconde division; vous, avec la troisième. Les divisions doivent camper par brigade, en conservant entre chaque brigade une distance d'une lieue, et une distance de six ou sept lieues entre la dernière brigade de l'armée et l'avant-garde. S'il arrivait que les Espagnols fussent en situation de se défendre à Madrid, le général Dupont doit se diriger sur Saint-Ildefonse, se réunir à vous et marcher sur Madrid pour donner ensemble, si cela est nécessaire.

Enfin l'armée doit être abondamment pourvue de tout, marcher dans le meilleur ordre. Retardez même votre mouvement d'un jour, pour peu que cela soit nécessaire, afin qu'il n'y ait pas de traîneurs. Du reste, il faut marcher avec confiance et en attitude de paix, en prenant cependant les précautions convenables. Envoyez de mon côté, sur Burgos et Bayonne, les hommes considérables que pourrait envoyer l'Espagne, le prince de la Paix, le prince des Asturies, s'ils venaient. Que tous vos propos soient pacifiques ; dites que vous marchez sur Cadix et sur Gibraltar. Je vous ai écrit hier que mon intention est qu'avant de partir la solde soit payée jusqu'au 1er mars aux officiers et aux soldats , et que le payeur de Bayonne a reçu des ordres en conséquence. Cela est très-important pour que le soldat ne pille pas et puisse acheter ce dont il a besoin. Il faut que les caisses soient abondamment pourvues, afin que, arrivé à Madrid , on paye la solde courante avec exactitude, et qu'on rembourse les pertes provenant du change des monnaies.

Le général espagnol Solano est parti de la rive gauche du Tage pour Badajoz, où il arrive le 10, afin de se diriger sur Cadix ou sur Madrid. L'important est de savoir laquelle de ces deux routes il suivra en partant de Badajoz.

Je serai probablement rendu à Burgos le 22. Je vous ai déjà recommandé de faire suivre par une brigade de mes chevaux la division du maréchal Moncey, et d'en envoyer une autre à la division du général Dupont. Ales chevaux doivent suivre votre quartier général, hormis une réserve, qui restera à Burgos. Menez, avec les chevaux qui suivront votre quartier général, une compagnie de 60 gendarmes d'élite, les mamelucks, 60 chasseurs, 60 grenadiers, 60 dragons et 120 Polonais avec trois pièces d'artillerie légère. Ces 3 ou 400 hommes vous formeront une réserve. Le reste de ma cavalerie sera répandu depuis Burgos jusqu'à Aranda, et depuis Burgos jusqu'à Bayonne, pour mon escorte. Faites en sorte qu'indépendamment de l'infanterie il y ait à Vittoria assez de cavalerie pour mon escorte et pour ma garde.

Donnez toutes les assurances possibles au prince de la Paix, au Roi, à tout le monde. Le plus important de tout est que le plus grand ordre soit observé pendant la marche. 

Je vous réitère encore qu'aucun des mouvements prescrits ci-dessus n'est pressé ; qu'il faut retarder un jour ou deux, si cela est nécessaire ; que les corps doivent être munis de quinze jours de vivres et de biscuit, être bien habillés, bien armés, avoir leurs cinquante cartouches par homme; enfin être en mesure, après avoir passé la montagne, de faire de grandes marches, s'ils en reçoivent l'ordre. Je vous ai dit qu'il fallait passer la montagne le 19. Il n'y a pas d'inconvénient à ne la passer que le 20 ou le 21 ; mais que le corps du général Dupont marche toujours en conséquence.


Paris, 10 mars 1808

A M. de Champagny, ministre des relations extérieures

Je vous envoie l'état des créances qu'avait Hesse-Cassel sur les différents princes de la Confédération du Rhin. La Bavière y est portée pour une dette de deux millions. Il faut en écrire au sieur Otto pour qu'il instruise les commissaires que cette somme doit entrer en compensation avec ce que je dois à la Bavière. Les douze millions que doit le duc de Mecklenburg-Schwerin doivent entrer également en compensation de ce qu'il a dépensé dans ses Etats pour les troupes françaises. Tout le reste, il faut le réclamer. Il faut faire une négociation avec le prince de Waldeck, qui doit 4,600,000 francs, et avec les autres petits princes; il ne faut en parler ni au Danemark, ni à l'Autriche, ni au prince de Gotha. Je vois que la Hollande doit 2,600,000 francs; il faut entamer une négociation à ce sujet avec le roi de Hollande. Enfin il ne faut rien laisser en suspens. Ce n'est pas que je veuille retirer les trente-cinq millions, mais j'entends que toutes ces créances soient éteintes. Le grand-duc de Bade doit plus de trois millions; il faut entrer en négociation avec cette cour. Je ne ferais pas de difficulté de lui laisser les deux tiers, et de lui faire faire, pour l'autre tiers, quatre ou cinq billets portant intérêt de 5 pour cent, et chaque billet payable par an ou même à une plus longue époque. La même chose pour le prince de Waldeck et pour les autres princes qui ne sont entrés que dernièrement dans la Confédération du Rhin. Je ferai volontiers présent au prince de Waldeck de la moitié de sa dette, pourvu qu'il me rembourse de l'autre moitié.


Paris, 10 mars 1808

NOTE POUR M. CRETET, MINISTRE DE L'INTÉRIEUR

L'Empereur a des doutes sur le projet définitif des Tuileries. Il est choqué de cette hypothèse qui isolerait les Tuileries du Louvre. Il voudrait, de son balcon, voir le Louvre réuni, mais il laisse M. Fontaine maître d'arranger son projet comme il l'entend, en faisant les travaux qu'il a projetés.

Il ne faut donc rien exécuter qui puisse préjudicier au projet de Sa Majesté.

Il n'y a aucune espèce de doute que la galerie puisse être continuée; Sa Majesté a mis sur le budget 600,000 francs. L'Empereur approuve que l'on dépense, sans gêner l'économie, deux autres millions cette année, de manière à la voir terminée le plus tôt possible. Sa Majesté croit que la dépense jusqu'aux Quinze-Vingts sera de quatre millions. Sa Majesté accordera les crédits dès que M. Fontaine aura fait les projets; et, s'il n'y a pas d'inconvénient, mettre de suite la main à l'ouvrage, en commençant par l'autre bout.

Il faut étudier les distributions de la nouvelle galerie, surtout dans la partie de l'intérieur, pour que M. Maret et le trésorier soient bien logés.

Au 1er janvier, M. Maret délogera et se logera chez M. l'archichancelier, mais sans dépenses. M. Duroc s'entendra avec M. l'archichancelier pour qu'il ne soit rien enlevé qui puisse détériorer le bâtiment. En donnant les meubles, je n'ai pas entendu donner les tentures et les glaces. M. Maret n'aura à porter que ses meubles.

D'ici au 1er, M. l'archichancelier sera dans sa nouvelle maison; on démolira alors M. Maret; et, l'année prochaine, vers juin ou juillet, s'il est nécessaire d'abattre la maison de M. l'archichancelier pour les nouveaux projets, M. Maret prendra son logement dans la galerie.

M. Fontaine fera faire, le plus tôt possible, en plâtre, son projet du Louvre et des Tuileries; cela sera exposé au prochain salon et on recueillera les critiques que fera le public.

S'il était possible d'avoir la cour, où je monte en voiture, libre par une grille transversale, on pourrait l'exécuter de suite.

Si M. Fontaine persiste dans son projet de faire partager la cour en trois, on interdirait au public le passage par le grand vestibule, et on lui donnerait une entrée au jardin par le pavillon des Enfants de France ; cela aurait l'avantage d'interdire le passage dans les cours de l'Empereur à ceux qui arrivent tard.

M. Fontaine fera aussi en relief un beau projet d'opéra à placer n'importe où; il sera exposé à la critique. Il faut une salle, sans colonnes, favorable à la vue et à l'oreille; grande loge au milieu pour l'Empereur, petite loge avec un appartement, à peu près comme celle de Milan.


Paris, 10 mars 1808

Au général Clarke, ministre e la guerre

Envoyez un courrier extraordinaire au général Duhesme pour lui donner l'ordre de rester dans Barcelone. L'ordre que lui a donné, le Grand-duc de Berg de prendre Figuières est une folie : il doit tenir ses troupes concentrées dans Barcelone. 18,000 hommes seront, à la fin de mars, sur les frontières; s'il était nécessaire, ces troupes occuperont Figuières. Je suppose que son payeur est arrivé avec la solde; je suppose également que ses officiers d'artillerie et du génie et ses dix-huit pièces de canon sont arrivés. Dites-lui que je donne l'ordre, sur les frontières et à Marseille, d'envoyer du blé en Catalogne; qu'il peut le faire connaître aux habitants et magistrats ; que l'exportation de ce qui sera demandé en France pour la nourriture de la Catalogne sera permise; lorsque son payeur sera arrivé, il doit restituer les 100,000 francs que lui a prêtés le capitaine général ; les lois de l'honneur l'exigent impérieusement, et il ne faut jamais capituler avec l'honneur. On va expédier des bâtiments chargés de biscuit pour la citadelle; qu'en attendant il se procure des farines et des vivres pour une quinzaine de jours; qu'il doit parler ferme et faire punir les soldats qui se comporteraient mal ; qu'il doit faire courir le bruit que je ne dois pas tarder à venir à Barcelone; que, quant aux inspecteurs aux revues, ils sont moins utiles en campagne; qu'il peut en faire faire les fonctions par son chef d'état-major, ou les faire lui-même. Apportez-moi demain, au lever, le décret pour que les masses soient payées aux régiments provisoires. Cela est important, on le demande de partout.


Paris, 10 mars 1808

Au général Clarke, ministre de la guerre

Monsieur le Général Clarke, il sera formé à Rennes un camp de réserve, composé de trois brigades d'infanterie et de trois régiments provisoires de cavalerie, avec dix-huit pièces de canon. La 1e
sera composée du 2e d'infanterie légère et du 15e de ligne, et se réunira à Pontivy. La 2e brigade sera composée du 4e régiment d'infanterie légère, d'un bataillon suisse et d'un bataillon des légions de réserve qui est à Rennes, et se réunira à Rennes. La 3e brigade sera composée du 12e léger et du 14e de ligne, et se réunira à Avranches et Vire.

Il sera formé un 7e et un 8e régiment provisoire de dragons, qui se réuniront à Rennes et qui seront composés chacun de neuf compagnies de 80 hommes montés, officiers et sous-officiers compris, savoir : le 7e régiment, d'une compagnie de 80 hommes de chacun des régiments de dragons suivants : du ler, du 3e, du 4e, du 5e, du 15e, du 9e, du 10e, du 2e, du 6e; le 8e régiment, d'une compagnie de 80 hommes de chacun des neuf régiments de dragons suivants : du 8e, du 11e, du l2e, du 18e, du 19e, du 20e, du 12e, du 25e, du 26e. Ce qui portera le complet de chaque régiment à 720 hommes, et des deux régiments à 1,400 chevaux. Vous donnerez l'ordre que ces détachements partent au ler avril. Les régiments qui ne pourront pas fournir 80 hommes en fourniront 40, et feront partir les 40 autres avant le ler mai. Le 7e régiment se réunira à Pontivy et le 8e à Rennes.

Il sera formé un 3e régiment provisoire de hussards, qui se réunira à Saint-Omer. Il sera composé de huit compagnies des huit régiments de hussards suivants, savoir : une compagnie de 80 hommes du ler régiment de hussards; une compagnie de 80 hommes du 2e; une compagnie de 80 hommes du 3e ; une compagnie de 120 hommes du 4e; une compagnie de 80 hommes du 7e; une compagnie de 80 hommes du 8e; une compagnie de 80 hommes du 9e; une compagnie de 80 hommes du 10e. Ce qui portera le complet de ce régiment à 680 hommes. Ce régiment sera sous les ordres du général Saint-Cyr, qui commande le camp de Boulogne.

Les régiments qui pourront fournir sur-le-champ leur contingent le fourniront; les autres en fourniront d'abord la moitié, et l'autre moitié dans le courant d'avril.

Il sera également réuni à Saint-Omer, aussitôt que possible, les 3e et 4e escadrons du 10e et du 22e de chasseurs. Un escadron fort de 200 hommes au moins devra être prêt au 1er mai, et le 4e escadron dans le courant de mai.

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P. S. Le 9e régiment d'infanterie légère partira le 15 mars ; le 4e partira le 20; le 12e partira le 25, et le 14e de ligne partira le 25. Il ne partira que deux bataillons de chacun de ces régiments.

Proposez-moi trois généraux de brigade Pour les commander.


Paris, 10 mars 1808

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie

Mon Fils, je reçois votre lettre du 4 mars, et la dépêche du général Miollis des 27 et 29 février. J'approuve en tout la conduite du général ; qu'il traite bien le soldat romain, chasse les mauvais officiers, en prenne d'autres, et les prenne à ma solde. Le cardinal Caraffa doit être responsable de la pierre qui a été jetée de sa maison, s'il ne trouve le délinquant. Renvoyez de Rome les cardinaux napolitains et les cardinaux qui sont mes sujets. Que Litta revienne à Milan; que les Génois rentrent à Gènes; les Italiens, dans le royaume d'Italie; les Piémontais, en Piémont; les Napolitains, à Naples. Cette mesure doit être exécutée de gré ou de force. Puisque ce sont les cardinaux qui ont perdu les États temporels du Pape par leurs mauvais conseils, qu'ils rentrent chacun chez eux.

Cavaletti m'a fort bien servi. Il est parti pour l'Espagne avec mes chevaux. Mes troupes sont à trente lieues de Madrid. Il se prépare là des événements importants.

J'attends avec impatience des nouvelles de mon escadre devant Corfou. Je suis étonné que le 21 il n'y ait encore rien; elle est partie le 10 de Toulon; il faut attribuer cela à quelque contrariété de mer.

La reine de Naples part après-demain pour Naples; elle sera à Turin du 15 au 20; elle se dirige par Rimini et Ancône; elle ne passera pas par Milan. Donnez ordre que, sur le territoire de mon royaume d'Italie, il lui soit rendu les plus grands honneurs. S'il arrivait qu'il y eût quelque chose de nouveau et que les routes ne fussent pas sûres dans l'État romain, vous l'arrêterez à Rimini ou à Ancône. Vous lui ferez fournir partout des escortes.

Vous sentez pourquoi, dans ce moment-ci, je ne vous fais pas venir à Paris, car il est possible que j'en parte dans cinq ou six jours. Envoyez quelqu'un savoir la situation du régiment toscan qui est à Parme; écrivez au maréchal Pérignon que je désire la connaître. Je désirerais fort qu'on pût diriger sur Turin autant de compagnies que l'on pourra, chacune de 120 hommes au moins.


Paris, 11 mars 1808

A M. Cretet, ministre de l'intérieur

Donnez des ordres pour autoriser l'exportation de grains des ports de Marseille, de Cette et de la frontière pour la Catalogne, en prenant toutes les mesures de précaution pour s'assurer que ces blés sont effectivement débarqués à Barcelone.

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P. S. Avant de prendre aucune mesure, rendez-moi compte de ceci.


Paris, 11 mars 1807

A M. de Montalivet, directeur général des ponts et chaussées

Monsieur Montalivet, je n'ai pas compris dans le budget les demandes que vous m'avez faites pour l'église de Pecquigny, l'écluse de Metz, l'entrepôt de Mayence. Ces dépenses doivent être prises sur les 25 pour cent de retenue que j'ai ordonnés par mon décret du mois d'août dernier sur le produit des droits de navigation. Ces 25 pour cent doivent produire environ 900,000 francs, si les bassins rendent autant que l'année passée. Faites-moi connaître la destination que vous donnez à ces fonds; il faudrait en employer 400,000 francs aux travaux de la Marne pour perfectionner sa navigation depuis Paris jusqu'à Saint-Dizier. Il serait bien urgent de finir l'écluse de Pont-de-l'Arche. Il paraît qu'il faut encore pour cela 280,000francs. Ne pourrait-on pas y employer 150,000 francs sur les fonds des
droits de navigation ?


Paris, 11 mars 1808

A M. de Montalivet, directeur général des ponts et chaussées

Monsieur Montalivet, j'ai lu avec attention le rapport que vous avez remis dans le dernier conseil d'administration. J'ai été fort satisfait de la clarté des comptes de la comptabilité. Vous me proposez d'établir une route qui irait de Tournus à Chambéry, ce qui aurait l'avantage d'abréger de trois journées d'étapes, c'est-à-dire de vingt-quatre lieues, la route de Paris au mont Cenis. Cet objet me paraît important sous tous les points de vue. J'attendrai, avant de donner des ordres, que vous me fassiez là-dessus un rapport bien précis. Vous verrez, par le budget que j'ai arrêté, que mon intention est de faire cette année, si cela est possible, la route de Chambéry an mont Cenis, la route du passage du mont Cenis et les habitations dont j'y ai ordonné l'établissement, et la route de Metz à Mayence. Voilà le moment des travaux arrivé, il n'y a plus un moment à perdre pour les pousser avec la plus grande activité.

Vous verrez que j'ai mis un fonds considérable pour la route de Bordeaux à Bayonne. Il est nécessaire d'activer de ce côté nos communications. Je croyais que vous aviez déjà entrepris la route de Venloo à Wesel.

Je désire également que cette année, si cela est possible, les ponts de Tours, de Roanne, de la Durance et de Kehl soient terminés.

J'attends des projets pour les ponts de Bordeaux, de la Scrivia, du Pô à Turin, et autres que j'ai ordonnés dans mon dernier voyage en Italie.

Le pont du Furens doit être entrepris et avancé cette année.

J'ai décidé que cette année il serait dépensé un million pris sur les revenus des bois, pour faire des canaux et des chemins qui améliorent l'exploitation des forêts. Je ne vois encore aucun mémoire, aucune recherche ni projet sur la distribution de ce million.

Je désirerais savoir si l'on ne pourrait pas faire un pont vis-à-vis les Invalides, comme le pont des Arts, et si l'on ne pourrait pas trouver une compagnie qui s'en chargeât.


 Paris, 11 mars 1808 (10 mars selon Ducasse)

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie

Mon Fils, je reçois votre lettre du 6 mars avec les lettres de Rome du ler. Je vous ai déjà fait connaître qu'il fallait que les cardinaux napolitains, ceux qui sont mes sujets comme Empereur ou Roi d'Italie, toscans, parmesans, génois, piémontais, doivent recevoir l'ordre de quitter sur-le-champ Rome et de retourner dans leur patrie.

On dit que le Pape veut établir de nouveaux impôts; voici la conduite que doit tenir le général Miollis : il doit déclarer qu'il ne souffrira aucune augmentation d'impôts; il doit même demander la suppression de la contribution extraordinaire qui a été imposée il y a quelques années. Il doit en outre déclarer que, si l'on persiste à vouloir établir de nouveaux impôts, il faut réunir les États des différentes provinces pour rendre compte dans cette assemblée de l'état des contributions existantes et de l'emploi des finances, qui ne servent qu'à organiser la révolte dans le pays et à solder les cardinaux napolitains qui se révoltent contre les souverains légitimes; et que les peuples de Rome ne payeraient rien que du moment que le Pape sortirait de l'état de rébellion temporelle où il se met contre l'Empereur.


Paris, 11 mars 1808

A Jérôme Napoléon, roi de Westphalie

Mon Frère, je reçois votre lettre du 6. Il n'est pas possible que vous envoyiez M. de Merveldt comme ambassadeur nulle part. Lorsque vous l'aurez employé quelques années et que sa conduite vous offrira une garantie, vous pourrez alors lui confier une mission à l'étranger. Quant à votre grand maréchal, je ne sais pas qui il est, je n'ai pas sous la main de documents qui me le fassent connaître. Si vous envoyez quelqu'un en Russie, il faut que ce soit surtout un homme considérable par sa naissance et par son éducation. Le roi de Naples a envoyé en Russie le due de Mondragone, d'une des premières maisons de l'Europe, immensément riche, très-attaché au Roi et le plus grand ennemi de la reine Caroline, qui l'a condamné à mort. Le roi de Hollande a envoyé aussi en Russie un M. Six, homme considérable et distingué sous beaucoup de rapports. Si vous n'avez pas un pareil choix à faire, il faut vous abstenir d'avoir un ambassadeur en Russie.


Paris, 11 mars 1808

A M. Fouché, ministre de la police générale

Il faut faire arrêter, saisir tous ses papiers et conduire à Fenestrelle le comte de Vargas-Bedmar, employé chez le roi de l'île de Sardaigne.

(Brotonne)


Paris, 12 mars 1808

A M. Cretet, ministre de l'intérieur

Monsieur Cretet, je viens d'arrêter le budget de 1808; je ne l'ai fixé qu'à 16 millions pour le service ordinaire; cela provient des réductions que j'ai faites d'une somme de 500,000 francs sur les bâtiments civils, d'un million sur les lycées. Mon intention est que les dépenses des lycées soient payées en partie par les communes, et qu'à compter du mois d'avril les Invalides, le Val-de-Grâce, la Charité, etc. , soient à la charge des hôpitaux ou de ces établissements eux-mêmes, qui feront ces dépenses avec plus d'économie. D'ailleurs, j'ai besoin de savoir ce que chacun de ces établissements me coûte, et je ne puis le voir que par ce qui est porté à son budget.

J'ai vu avec peine que l'école de Compiègne coûte plus de 540 francs par homme; il faut que chaque élève ne coûte pas plus de vingt sous par jour; ces élèves sont fils de soldats ou d'artisans peu aisés ; il est contre mon intention qu'on leur donne des habitudes de vie qui ne leur seraient que nuisibles.

Pour l'extraordinaire, je vous ai accordé 31 millions. Mon intention est que les dépenses soient faites avec la plus grande activité, surtout pour la route de Paris à Mayence, et de Chambéry an mont Cenis. La route du mont Cenis est d'une si grande importance, qu'on ne doit rien négliger pour la rendre commode et sûre, non-seulement en réalité, mais pour l'imagination. Vous m'avez proposé d'annuler des crédits de l'an XIII , je m'y suis refusé; je n'ai annulé pour le service ordinaire que ce qui était inutile; mais j'ai maintenu tout le service extraordinaire, et je désire qu'avant de faire des économies sur différents genres de travaux pour 1808 vous mainteniez les crédits de 1806 et de 1807, jusqu'à ce qu'ils soient épuisés. Le crédit pour un canal, un chemin déterminé, doit toujours être épuisé, le travail serait-il fait un an après.

J'ai prélevé 25 pour cent sur les coupes de bois appartenant aux communes, et j'en ai affecté le produit à l'Arc-de-Triomphe et à d'autres travaux; j'espère qu'il ne s'éloignera pas de la somme que j'ai affectée pour ces travaux. Comme cela est déposé à la caisse d'amortissement, faites-le verser en masse dans la caisse des travaux, afin de les pousser avec la plus grande activité.

Proposez-moi d'abattre la partie de l'Hôtel-Dieu qui doit être abattue. Il n'a été rien fait au quai Napoléon en 1807; il faut qu'il soit achevé en 1808.

J'ai également ordonné par un décret la construction d'un quai qui irait du Corps législatif au pont d'Iéna : donnez les ordres pour que les travaux soient entrepris et vivement poussés cette année. Si l'année se trouvait propice et que les eaux ne fussent point un obstacle, je ne refuserais pas d'accorder 500,000 francs pour activer ces travaux.

Faites-moi connaître ce qu'il y a à dire contre l'idée de faire le pont d'Iéna en fer comme celui des Arts; pourrait-il être fait par une compagnie ? Cette prolongation de promenade, des Champs-Elysées ne pourrait être qu'agréable.

Je crois n'avoir rien oublié dans le budget pour les travaux entrepris. Mon intention est que tout se trouve au budget, afin que l'on ne soit pas obligé de faire mille recherches pour trouver quelque chose.

Vous verrez que j'y ai relaté le décret qui met il votre disposition un million pour la construction de la Bourse. Je pense que vous pourrez en jeter les fondements à la mi-carême, et que cela peut être l'objet d'une fête que pourraient donner les agents de change et autres gens d'affaires qui fréquentent la Bourse. Présentez-moi définitivement le projet de cet établissement; je désire qu'il soit simple et beau.


Paris, 12 mars 1808

A M. de Champagny, ministre des relations extérieures

Monsieur de Champagny, répondez à mon ambassadeur à Naples que tout Français qui a prêté serment au roi de Naples depuis qu'il est roi de Naples n'est plus Français; mais que ceux qui sont au service de ce prince sans lui avoir prêté serment continueront à être considérés comme Français, et qu'ils recevront une permission signée de moi. Cette décision, vous la donnerez à mon ambassadeur en Hollande et au ministre de la justice du royaume de Westphalie.

Il faut communiquer à l'ambassadeur turc toutes les lettres de Bosnie pour lui faire voir de quelle manière on se comporte envers nous.


Paris, 12 mars 1808

A M. Dejean, ministre directeur de l'administration de la guerre

Monsieur Dejean, j'ai rendu un décret sur les masses des régiments provisoires de Portugal et d'Espagne. Mais je pense qu'il serait nécessaire de faire un règlement général qui fit connaître comment on doit se conduire en campagne pour les masses. Je pense qu'il faudrait régler que la moitié ou le tiers de la masse générale sera payé aux détachements comme à-compte, dont le commandant serait tenu de rendre compte au conseil d'administration du régiment, et qui serait employé pour la réparation à faire à l'habillement, pour les masses de ferrage, de harnachement, d'armement et autres objets dont le détachement aurait besoin. Il est absurde que nos règlements ne prescrivent rien là-dessus. Ainsi , par exemple, les régiments qui sont aux armées de Naples, de Dalmatie, ont leurs dépôts dans le royaume d'Italie, et bientôt ils les auront en Provence. Il faudrait déterminer ce qui doit leur être payé pour l'habillement et pour pourvoir au renouvellement et remplacement dudit habillement. Eu général, cela s'applique à toutes les circonstances. Le linge et chaussure est une masse par compagnie, mais le linge et la chaussure ne suffisent pas. Je désire là-dessus un mémoire. Combien faudrait-il passer au soldat pour son habillement , etc. ? voilà ce que je veux savoir. Je n'ai pas assez d'habitude des détails des corps pour avoir une idée faite là-dessus.


Paris, 12 mars 1808

NOTE SUR UN RAPPORT DU PRINCE JOACHIM POUR DIVERS CHANGEMENTS A OPÉRER DANS L'ARME DE LA CAVALERIE. 

Renvoyé au ministre de la guerre, pour proposer les changements convenables; c'est-à-dire, 1° régulariser l'uniforme des chasseurs; 2° placer le manteau des cuirassiers sur le devant de la selle et diminuer de beaucoup ce porte-manteau; l'expérience a prouvé que, quand il est trop grand, le soldat le remplit de choses inutiles; 3° faire des changements à l'arme des dragons, diminuer également le porte- manteau, leur donner une espèce de manteau à manches et le placer sur le devant de la selle; enfin ne donner à toutes les armes de cavalerie qu'un seul habit comme à l'infanterie; ce qui produira une grande économie et allégera beaucoup cette arme.

Le ministre me proposera dans la semaine les changements qui paraissent évidents, et il enverra le reste à la discussion d'une commission.


Paris, 12 mars 1808

NOTE SUR UN RAPPORT CONCERNANT LES FOURGONS DE LA. GRANDE ARMÉE

Renvoyé au ministre de la guerre, pour me proposer des mesures pour que la Garde ait un effectif de cent vingt fourgons; ils seront placés à la Fère. On aura soin que ces fourgons soient aussi légers que possible et faits avec le plus de soin. Je désire que la Garde ai ce nombre de fourgons, parce qu'elle forme une espèce de réserve dg l'armée, et que ces fourgons peuvent porter plus de cent mille rations de biscuit.


Paris, 12 mars 1808

A M. Fouché, ministre de la police générale

Vous réduirez les abonnements du journal italien à 500 et ne les paierez que 30 francs, ce qui au lieu de 60.000 francs ne fera qu'une somme de 15.000 francs.

(Brotonne)


Paris, 13 mars 1808

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie

Mon Fils, il faut laisser à Rome les ouvriers napolitains et les moines, pourvu qu'ils se comportent bien. Ce sont les cardinaux et les principaux seigneurs qui doivent retourner à Naples. Il faut bien traiter l'ancien roi de Sardaigne, qui a véritablement renoncé aux affaires, et lui donner des assurances qui lui ôtent toute inquiétude.


Paris, 13 mars 1808

A Élisa, princesse de Lucques et de Piombino

Ma Soeur, mon intention est, aussitôt que j'aurai l'état des domaines de Toscane, de vous donner un beau bien dans ce pays, rendant 2 à 300,000 francs de revenu net; ce qui fera un beau supplément à votre liste civile. Il est convenable de tenir cela secret. Comme vous êtes à portée de connaître le pays, voyez vous-même le bien qui pourrait vous convenir. Il n'est pas question de souveraineté, mais d'un bien particulier. Il faudrait le choisir tel qu'il ne gène pas trop la souveraineté du pays. Je viens d'ordonner qu'il vous fût donné pour votre fille des biens d'une valeur de 150,000 francs de revenu dans les États de Parme et de Plaisance, lesquels seraient, en cas de mort, réversibles à vous. Je viens également d'ordonner l'achat de la maison que vous avez à Paris pour 800,000 francs, qui seront placés sur le grand-livre en cinq pour cent au cours actuel de 85 francs, ce qui vous fera 48,000 francs de rente; j'ajouterai volontiers ce qui sera nécessaire pour porter ce revenu à 50,000 francs. Le grand-livre est le placement le plus sûr. Vous correspondrez pour cela avec le général Duroc, que j'en ai chargé. Lorsque j'aurai une connaissance exacte de ce qui compose les Etats de Toscane, je m'occuperai de vous donner l'agrandissement convenable. Mon intention est que, sur les 150,000 francs de rente que je donne à la princesse votre fille, on en retire tous les ans 30,000 pour son entretien, et que les 100,000 francs restants soient placés sur le grand- livre de France; on y ajoutera les intérêts de chaque année, de sorte que, lorsqu'elle sera en situation de se marier, elle ait, outre ses 130,000 livres de rente, une centaine de mille francs de rente sur le grand-livre. Je déduis des 150,000 francs de rente 20,000 francs pour les impositions.

Il est convenable que le prince Félix ne touche point son traitement de sénateur. Il doit écrire au trésorier du Sénat qu'il s'honore trop de son titre de sénateur pour y renoncer, mais qu'il n'en touchera pas le traitement, désirant qu'il bonifie la caisse du Sénat.


Paris, 14 mars 1808

A M. de Champagny, ministre des relations extérieures

Monsieur de Champagny, il faut désapprouver mon chargé d'affaires à Rome de tout le mouvement qu'il se donne pour nouer une négociation. Écrivez-lui de rester tranquille, de répondre à toutes les propositions qu'on lui fera qu'il vous en écrit, et de ne pas faire un pas. Il connaît bien peu les prêtres s'il ne sait pas que toutes ces confidences, ces conversations mystérieuses sont dans leur caractère, et ne sont que des ruses. Recommandez-lui de se borner à seconder le général Miollis pour empêcher qu'on ne mette de nouvelles impositions qui chargeraient le peuple sans raison.


Paris, 14 mars 1808

Au prince de Neuchâtel, major-général de la Grande Armée

Mon Cousin, présentez-moi un projet de lettre au prince de Ponte-Corvo, par laquelle vous lui ferez connaître que j'ai reçu la nouvelle que les Russes sont entrés en Finlande, et que les premiers coups de fusil ont été tirés contre les Suédois; que mon intention est qu'il active sa marche autant que possible; que, s'il arrivait, comme on croit avoir lieu de l'espérer, que les Belts vinssent à geler, il ne doit pas hésiter à les passer avec la division espagnole, sa division française et deux danoises, formant ensemble 30,000 hommes, et que, aussitôt que je saurai qu'il a passé, la division hollandaise et une division française se mettront en marche pour le soutenir.


Paris, 14 mars 1808

Au Grand-duc de Berg, Lieutenant de l'Empereur en Espagne

Le major général vous écrit pour vous faire connaître mes intentions par duplicata, par l'estafette et par un officier. Les lettres que j'ai reçues de Madrid, du 5 mars, ne parlent de rien de nouveau. J'ai ordonné que le 17 on demande le passage par Madrid d'un corps de 50,000 hommes destinés à se rendre à Cadix. Vous vous conduirez selon la réponse qui sera faite; mais tâchez d'être le plus rassurant possible.

Si les troupes de Madrid ne sont pas de plus de 15,000 hommes, vous n'entrerez dans cette ville qu'avec le corps du maréchal Moncey, et vous placerez le corps du général Dupont, la 3e division à Valladolid, la 2e à deux ou trois marches de Valladolid, et la 3e à une ou deux marches de Madrid. Si les Espagnols avaient plus de 20,000 hommes à Madrid, vous vous feriez joindre par la 1e division et les cuirassiers du général Dupont; vous placeriez la 2e division à Villacastin ou à Ségovie, et vous donneriez l'ordre à ce général de former des magasins et de construire des fours pour son approvisionnement. J'ai ordonné au général Merle de se rendre à Burgos ; la 2e brigade, composée des cinq 4e bataillons des légions de réserve, qui est arrivée à Bordeaux , continuera sa route sur Vittoria. Ma Garde restera à Burgos , et les 3, 000 hommes des fusiliers de ma Garde qui arrivent à Bayonne le 20 mars continueront, s'il est nécessaire, leur route sur Burgos. Moyennant ces forces réunies, je puis compter qu'au 1er avril le général Merle aura à Burgos 16,000 hommes, que les communications de Madrid avec la France seront assurées, et la division espagnole de Galice suffisamment contenue. Et, si vous en receviez l'ordre, vous pourriez attirer à vous le corps du général Dupont. Mais, du 20 au 30 mars, il y a dix jours, et il ne faut pas rester à découvert, exposer les communications à être interceptées, les malades à être menacés dans les hôpitaux; ce qui mettrait toute la population en mouvement.

D'un autre côté, 5 à 6,000 hommes d'infanterie française arrivent  le 30 à Perpignan. Ils doivent donc être dans la première semaine d'avril à Barcelone; ce qui portera le corps du général Duhesme à 13 ou 14,000 hommes; ce qui, joint aux forts de Barcelone qu'il occupe, le mettra sur un pied respectable, et lui permettra de disposer d'une division pour seconder vos opérations. Le général Junot doit également vous appuyer par une division dans le bas de l'Espagne. Quelles que soient les intentions de la cour de Madrid, vous devez comprendre que ce qui est surtout utile, c'est d'arriver à Madrid sans hostilités, d'y faire camper les corps par division pour les faire paraître plus nombreux, pour faire reposer mes troupes et les réapprovisionner de vivres. Pendant ce temps, mes différends s'arrangeront avec la cour d'Espagne. J'espère que la guerre n'aura pas lieu, ce que j'ai fort à coeur. Si je prends tant de précautions, c'est que mon habitude est de ne rien donner au hasard. Si la guerre avait lieu, votre position serait plus belle, puisque vous auriez sur vos derrières une force plus que suffisante pour la protéger, et sur votre flanc gauche la division Duhesme, forte de 14,000 hommes. Vous auriez aussi alors des nouvelles de la division du général Junot. L'ensemble de ces dispositions serait on ne peut plus favorable.

J'ai donné pour instruction primordiale à Tournon d'être rendu le 15 à Burgos. Faites-le guetter sur la route; il vous instruira de la situation des choses. Mon ambassadeur à Madrid a reçu également l'ordre de vous transmettre tous les renseignements qui pourront vous être utiles. Je veux rester ami avec l'Espagne et remplir mon but politique sans hostilités; mais j'ai dû me mettre en mesure pour que, s'il le fallait , je passe surmonter la résistance par la force.

Je vous ai envoyé l'ordre de faire payer aux troupes tout l'arriéré avant leur entrée à Madrid, afin qu'arrivées dans cette ville elles fassent de la dépense et ne fassent pas de violences.

Je suis obligé de retarder mon départ de quelques jours; mais, lorsqu'il le faudra, j'arriverai bien promptement. Mandez-moi de vos nouvelles le plus tôt que vous pourrez.

Quant aux affaires, vous me transmettrez toutes les propositions directes ou indirectes qui seraient faites , et vous répondrez que je serai à Burgos lorsque mes troupes arriveront à Madrid.

Comme il faut toujours marcher en bons militaires, il est fort important de veiller le corps espagnol de Galice. J'ai ordonné au général Junot de tenir une division prête pour se concerter avec la 3e division du général Dupont et avec le général Merle.


Paris, 14 mars 1808

DÉCISION

Le général Clarke, ministre de la guerre, propose de régulariser les dépenses du matériel de l'armée de Portugal, conformément au système usité à la Grande Armée, d'après lequel le major général présente chaque mois à la sanction de l'Empereur l'état de distribution de fonds pour chaque service.

L'établir en Portugal; demander le budget par chapitre pour janvier, février, mars, avril, mai et juin.


Paris, 15 mars 1808

A M. de Champagny, ministre des relations extérieures

Monsieur de Champagny, la commission qui est auprès du ministère n'a pas le sens commun. Je désire qu'elle soit dissoute. Je ne veux de responsable que le ministre. C'est la centième bêtise qu'elle me fait. Le sieur . . . . . . .est une trop vieille tête pour se mêler de mes affaires. Qu'il reste pensionnaire des relations extérieures et ne se mêle de rien. Les hommes qui ont servi la politique de Versailles ne peuvent diriger la mienne. Je désire qu'il sache que je n'ai pas été content de tout ce qu'il a fait. C'est une absurdité de mettre en doute si le roi de Naples doit être appelé grand-électeur et prince français; il n'y a pas le moindre doute à cela. Les usages de la Prusse ne sont pas une règle pour moi. Certes , à la cour de Vienne on n'y manquait pas. Est-ce défaut de zèle ou d'esprit ? Je n'en sais rien, mais j'ai toujours trouvé la commission dans ma ligne étroite et peu zélée. Renvoyez une nouvelle lettre au Roi, et faites sentir que je désapprouve cette erreur.

Vous répondrez que mon intention n'est pas que le roi de Saxe offre un nouvel Ordre au ministre Maret, qui n'a pas rendu plus de services qu'un autre, et qui a été suffisamment récompensé.


16 - 31 mars 1808