20 – 26 juin 1809

Schönbrunn, 20 juin 1809, trois heures du matin.

Au général comte de La Riboisière, commandant de l’artillerie de l’armée d’Allemagne, à Vienne

Monsieur le Général de la Riboisière, les petits mortiers que vous avez envoyés au duc d'Auerstaedt ont été envoyés devant Raab. Ils auraient besoin de trois-cents coups à tirer par pièce. Faites-les partir avant neuf heures du matin ; ils seront dirigés, comme le convoi d'hier, par des relais jusqu'à Raab. Faites partir également mille coups de 12 et mille coups d'obusier de 5 pouces 6 lignes. Joignez-y deux pièces de 12 de siége, en bronze, avec six cents coups à tirer. Dirigez la marche de ce convoi de manière qu'il arrive aujourd'hui devant Presbourg, et demain à Raab. J'ai prévenu le duc d'Auerstaedt pour qu'il fasse rétablir les relais qui ont servi au convoi d'hier.


Schönbrunn, 20 juin 1809, trois heures et demie du matin

Au maréchal Davout, duc d’Auerstaedt, commandant le 3e corps de l’armée d’Allemagne, à Kittsee

Mon Cousin, je reçois vos deux lettres du 19 juin à cinq heures du soir et du 19 juin à cinq heures et demie du soir, avec le rapport qui y était joint. Le convoi de quatre pièces de 18 et de deux obusiers prussiens attelés par cent chevaux n'a pu partir de Vienne qu'hier à trois heures après midi; ils auront été relayés à Ebersdorf par d'autres chevaux. Ainsi je suppose qu'ils arriveront aujourd'hui 20, dans la nuit, à Raab. Il partira aujourd'hui à huit heures du matin deux pièces de 12 de siége, en bronze, avec six cents coups à tirer, mille coups de canon de 12, mille d'obusier de 5 pouces 6 lignes et trois cents bombes pour les petits mortiers. Tout cela partira par la même voie et profitera de vos relais. Il est nécessaire que le général Marulaz suive la piste de la colonne d'insurgés, afin d'être assuré qu'elle ne se porte pas sur Graz, et qu'elle est tout à fait hors de notre système. La relation de l'ennemi sur l'affaire de Presbourg n'est que ridicule. J'attends avec intérêt le croquis du camp retranché que vous devez m'envoyer et la reconnaissance de la Raab. Je voudrais que vous me fissiez faire, par ceux qui y ont été, une note des ob­stacles qui s'opposent à ce qu'on aille directement de Kittsee au fau­bourg de Raab, et de là au quartier général du vice-roi, et ce qui oblige à faire ce grand détour.


Schönbrunn, 20 juin 1809, quatre heures du matin.

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Gönyö

Mon Fils, vous ne m'avez encore rien écrit sur les prisonniers, mais j'apprends indirectement que le général Marziani et les officiers autrichiens faits prisonniers sont libres sur parole. J'ai peine à croire à une pareille folie. Tous les prisonniers qu'on nous a faits sont en Autriche, et nous ne pouvons pas en avoir un. Vous seriez bien coupable si vous aviez fait cela sans mon ordre. Écrivez-moi un mot là­ dessus, ainsi que sur les prisonniers que vous avez faits en Italie. Il faut au moins envoyer l'état des officiers que vous avez ainsi relâchés sur parole, avec leur parole d'honneur signée. Je ne suis plus étonné que le général Rusca en ait fait de même à Klagenfurt. Faites arrêter le général Marziani, qu'on dit être à Pápa, et faites-le conduire ici.

En vérité, je suis bien mécontent de cela; c'est comme si l'on ne faisait pas de prisonniers. Car ils vont tous reservir chez eux. Vous avez bien peu d'expérience, mais les personnes qui sont autour de vous devraient en avoir davantage et vous instruire. Ne savez-vous pas que les armées ne pèchent jamais par défaut d'hommes, mais par défaut d'officiers ? Ordonnez à votre chef d'état-major de correspondre sur les détails plus fréquemment avec le major général. On me rend compte qu'une colonne de 400 prisonniers est enfin arrivée le 19 juin à OEdenburg.


P. S. Je n'ai point de nouvelles d'Italie; en avez-vous reçu ?


Schönbrunn, 20 juin 1809, dix heures du matin.

Mon Fils, par mes dernières lettres vous aurez vu que j'avais reçu celle que vous m'avez écrite le 16 à dix heures du soir, par le chef d'escadron Devaux. Ainsi il n'y en a eu aucune de prise. Des ponts volants et des bateaux n'ont rien de commun avec le pont; si vous ôtez à l'ennemi le pont de Komorn (Komorn était le nom allemand de l’actuelle ville de Komarom – en Hongrie – et de Komarno – en Tschéchie) , vous lui ôtez les moyens de reprendre l'offensive. Ce n'est pas avec des ponts volants qu'on peut faire passer une armée; mais, avec un pont permanent, l'ennemi peut reprendre l'offensive. Votre correspondance n'est pas satisfaisante; vous ne faites qu'effleurer les matières et vous ne donnez aucun détail. Vous me dites dans votre lettre du 15 que les caissons sont partis, mais vous ne me dites pas qui où vous les envoyez, combien il y en a, et ce qu'il faut faire pour les remplir promptement. Les cent caissons que je vous ai envoyés appartiennent aux corps de l'armée; si on ne les renvoie pas promptement, le service de l'artillerie va être désorganisé, et nous ne saurons plus où nous en sommes. Faites-moi connaître quel nombre on en a envoyé, où on les a dirigés, quel est leur ordre de route, et où il faut leur envoyer des ordres. La direction des affaires militaires n'est que la moitié du travail d'un général; établir et assurer ses communications est un des objets les plus importants. Il ne fallait pas réfléchir longtemps sur la carte pour savoir que, devant recevoir des munitions de Vienne, elles viendront, même sans pont, près de Raab, et que là l'échange s'en ferait.

Je dis que votre correspondance est légère : vous parlez des pri­sonniers, mais sans dire où vous les avez dirigés, en combien de colonnes ils sont, sous les ordres de qui. Il est inouï qu'un général de brigade qui a été pris depuis six jours ne soit pas encore arrivé près de moi. Vous croyez en avoir tiré tout le parti possible et l'avoir interrogé; vous vous trompez: l'art d'interroger les prisonniers est un des résultats de l'expérience et du tact de la guerre. Ce qu'il vous a dit vous a paru assez indifférent ; si je l'allais interrogé, j'en aurais tiré les plus grands renseignements sur l'ennemi. On ne sait où se trouve ce général, on dit même que vous l'avez renvoyé sur parole; on ne sait rien de rien.

Assurez bien vite votre communication. Si le pont de Komorn de­vait rester et que vous dussiez vous retirer devant des forces supérieures, c'est derrière la Raab et la Rabnitz qu'il faut faire votre mouvement, non par OEdenburg, mais par Kittsee et Hainburg.


Schönbrunn, 20 juin 1809, dix heures du matin.

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Gönyö

Mon Fils, je reçois votre lettre du 18 à huit heures du soir, et il n'est pas dit dans cette lettre à laquelle de mes lettres vous répondez. J'espère que les bateaux que vous aurez jetés contre le pont de Komorn l'auront brisé, ce qui est avantageux. Il ne faut pas le laisser rétablir; aussitôt qu'ils l'auront refait, il faut le détruire de nouveau. Hier, à quatre heures après midi, est parti de Vienne un convoi de quatre pièces de 18 et deux obusiers prussiens, lesquels, marchant par relais, arriveront demain soir à Raab. Aujourd'hui 20, à huit heures du matin, partiront deux pièces de 12 de siège, en bronze, avec six cents coups à tirer, mille coups de canon de 12, mille d'obusier de 5 pouces 6 lignes et trois cents bombes pour les petits mortiers. J'attends avec impatience d'apprendre que les ponts du général Lasalle et du général Piré sont faits, et que, si Raab tarde à se rendre, il y a des têtes de pont, et que vous pouvez manœuvrer directement sur Vienne sans faire aucun détour et sans tourner le lac. Faites lever le croquis du champ de bataille de Raab, et envoyez-le-moi le plus tôt possible, afin que je fasse graver la bataille.


Schönbrunn, 20 juin 1809

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie

Mon Fils, vous avez fait si peu de dispositions pour voltr expédition, que vous aurez beaucoup de monde de pris. Où diable avez-vous été imaginer que la route de Raab à Graz pouvait jamais être maintenue libre? Que cela vous serve pour l’avenir.

 

Vous avez perdu une forge, votre médecin et beaucoup de petits détachements. Les ordres à donner pour tracer sa route de communication, est l’une des grandes affaires d’un général.

 

(Eugène)

 


Schönbrunn, 20 juin 1809

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie

Mon fils, je reçois votre lettre du 19, à onze heures du soir; il est fâcheux qu’un colonel chef  d’état-major d’une division se soit exposé ainsi. La faute en est à ceux qui lui ont donné cet ordre. Cela fait du mal, parce que l’ennemi fait sonner cela très-haut, et que cela prive l’armée de bons officiers.

 

Vous m’annoncez que l’ennemi fait filer deux divisions sur Presbourg; faites-en autant. Rapprochez votre quartier général de Raab, afin de veiller vous-même à la construction des ponts et au siège de la place.

Investissez-la avec vos troupes; renvoyez la division Gudin. Faites évacuer vos blessés et vos embarras, et tenez-vous prêt à partir aussitôt que je vous en donnerai l’ordre, pour venir prendre part à la grande bataille. Laissez Macdonald à votre position actuelle, avec une bonne avant-garde d’infanterie, de cavalerie et d’artillerie. Les 4 pièces de 18 et les 2 obusiers prussiens que je vous ai envoyés doivent être arrivés. Le convoi que j’ai fait partir aujourd’hui de 2 pièces de 12 avec des munitions, vous arrivera probablement le 22; ainsi, voila plus que vous ne demandiez. Employez un grand nombre de travailleurs à démolir la partie du Camp retranché qui est du côté de Vienne, et qui ne peut nous être utile. Il ne fallait pas attendre qu’on eut 20 moulins pour les jeter; il fallait approcher la nuit ceux qu’on avait, les conduire aux avant-postes, et de là les jeter. Cette opération était infaillible. Je ne vous répéterai pas ce que je vous ai écrit jusqu’à la satiété sur votre ligne d’opération et sur vos approvisionnements.

 

Aussitôt que vous aurez fait investir Raab, il faut non-seulement renvoyer les troupes du général Lasalle et du général Gudin, mais aussi celles du général Lauriston, et insensiblement vos divisions recevront l’ordre de faire leur mouvement rétrograde pour s’approcher de Vienne.

 

Je désire recevoir les rapports du général Montbrun et des différents généraux de cavalerie; qu’ils fassent de gros partis dans toute la Hongrie. Je suppose que dans la journée de demain mon chargé d’affaires et ma légation arriveront aux avant-postes.

 

(Eugène)


Schönbrunn, 20 juin 1809, au matin

Au chef d’escadron Lubienski, commandant les chevau-légers de la garde détachés à Oedenburg

Je vous envoie des proclamations pour les Hongrois, que vous ferez répandre par vos partis. Vous trouverez ci-joint une lettre du général Marulaz sur la poursuite de la colonne ennemie; combinez ces renseignements avec ceux que vous donnent vos rapports, pour savoir où cette colonne peut être aujourd'hui et si c'est la même qui a paru dans vos environs. Envoyez savoir par un officier où sont les blessés de la bataille de Raab. Faites-les revenir tous à OEdenburg, et qu'ils ne restent point isolés dans les villes et villages, exposés à la première incursion des partisans ennemis. Faites connaître également où se trouvent les prisonniers ennemis; le vice-roi en annonce 4,200. La route d'OEdenburg à Raab doit être celle qui passe par Kapuvàr. Toutes les autres doivent être abandonnées, et même celle-là est en­core trop à droite. Prenez des mesures pour qu'aucun homme isolé ne se rende du côté de Raab; qu'on les réunisse à OEdenburg, afin qu'on puisse les faire passer, quand il en sera temps, réunis et bien organisés.

Faites connaître les convois d'artillerie qui se trouvent à OEdenburg, allant ou venant de l'armée.


Schönbrunn, 20 juin 1809, dix heures du soir.

Au général comte Lauriston, commandant les troupes détachées du 4e corps, au faubourg de Raab

Monsieur le Général Lauriston, vous avez dû recevoir les quatre pièces de 18. Il me tarde d'apprendre que les deux ponts sont faits. Faites-moi connaître quand vous espérez faire votre tentative contre Raab, surtout quand les ponts seront établis, de manière que le vice­-roi puisse repasser avec son armée et que les blessés et autres em­barras,soient évacués sur Bruck et sur OEdenburg. Cela est important. Plusieurs courriers qui me sont arrivés du quartier général du vice-roi ne m'ont pas apporté de vos nouvelles. Tâchez de profiter de toutes les occasions.


Schönbrunn, 20 juin 1809, dix heures du soir.

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Gönyö

Mon Fils, je reçois votre lettre du 19 à onze heures du soir. Il est fâcheux qu'un colonel, chef d'état-major d'une division, se soit ex­posé ainsi; la faute en est à ceux qui lui ont donné cet ordre. Cela fait du mal, parce que l'ennemi fait sonner cela très-haut et que cela prive l'armée de bons officiers.

Vous m'annoncez que l'ennemi fait filer deux divisions sur Presbourg; faites-en autant. Rapprochez votre quartier général de Raab, afin de veiller vous-même à la construction des ponts et au siége de la place. Investissez-la avec vos troupes.

Renvoyez la division Gudin. Faites évacuer vos blessés et vos embarras, et tenez-vous prêt à partir, aussitôt que je vous en donnerai l'ordre, pour venir prendre part à la grande bataille. Laissez Macdonald à votre position actuelle avec une bonne avant-garde d'infanterie, de cavalerie et d'artillerie.

Les quatre pièces de 18 et les deux obusiers prussiens que je vous ai envoyés doivent être arrivés; le convoi, que j'ai fait partir aujourd'hui, de deux pièces de 12 avec des munitions, vous arrivera probablement le 22; ainsi voilà plus que vous ne demandiez.

Employez un grand nombre de travailleurs à démolir la partie du camp retranché qui est du côté de Vienne et qui ne peut vous être utile. Il ne fallait pas attendre qu'on eût vingt moulins pour les jeter, il fallait approcher la nuit, ceux qu'on avait, les conduire aux avant-postes et de là les jeter. Cette opération était infaillible. Je ne répé­terai pas ce que je vous ai écrit jusqu'à la satiété sur votre ligne d'opération et sur vos approvisionnements.

Aussitôt que vous aurez fait investir Raab, il faut non-seulement renvoyer les troupes du général Lasalle et du général Gudin, mais aussi celles du général Lauriston, et insensiblement vos divisions recevront l'ordre de faire leur mouvement rétrograde pour s'approcher de Vienne. Je désire recevoir les rapports du général Montbrun et des différents généraux de cavalerie; qu'ils fassent de gros partis dans toute la Hongrie.

Je suppose que dans la journée de demain mon chargé d’affaires et ma légation arriveront aux avant-postes.


Schönbrunn, 20 juin 1809

RÉSUMÉ DE LA DISTRIBUTION DE L'ARTILLERIE DANS L’ÎLE LOBAU.

GAUCHE.

ILE MASSÉNA. – 1e batterie, deux pièces de 6; 2e batterie, deux pièces de 6.

ILE SAINT-HILAIRE. – 3e batterie, deux pièces de 12, trois pièces de 6. Cette batterie doit avoir pour but de détruire les ouvrages que l'ennemi aurait faits là et de protéger la tête de pont.

DROITE DE LA TÊTE DE PONT. – 4e batterie, deux pièces de 12 ; 5e batterie, deux pièces de 6; 6e batterie, deux pièces de 6. Ces trois batteries doivent pouvoir contenir dix-huit pièces; elles doivent être espacées l'une de l'autre, afin d'embrasser tout le système de la droite du pont, et même une des batteries doit battre la plaine.

Total des pièces de la gauche: quatre pièces de 12, onze pièces de 6.

 

CENTRE.

ILE ESPAGNE. – 7e batterie, quatre pièces de 12, quatre mortiers.

Cette batterie doit battre en écharpe l’ouvrage ennemi qui est sur la droite de la petite ville d'Enzersdorf.

PLAGE GAUCHE D’ENZERSDORF. – 8e batterie, dix pièces de 18, six mortiers et six obusiers. Cette batterie, de vingt-deux bouches à feu, doit avoir pour but de raser les murailles d'Enzersdorf, de mettre le feu dans la ville et d'annuler toutes les dispositions de l'ennemi pour défendre cette position.

ILE LANNES. – 9e batterie, 12 pièces de 18, dont quatre venant de Raab, huit mortiers et quatre obusiers. Cette batterie de vingt­ quatre pièces doit avoir le même but que la batterie n° 8. 10e batterie, quatre pièces de 6.

Total des pièces du centre: vingt-deux pièces de 18, quatre pièces de 12, quatre pièces de 6, dix-huit mortiers, dix obusiers.

 

DROITE.

ILE ALEXANDRE. – 11e  batterie, quatre pièces de 6; 12e batterie, dix pièces de 12 ; 13e batterie, quatre pièces de 6.

Les 10e, 11e, 12e et 13e batteries, formant vingt-deux pièces, sont destinées à protéger les troupes qui se trouveront à côté de la Maison-Blanche, et à tirer dans tous les sens; il faut donc que ces quatre batteries aient plus de mitraille que dans les proportions ordinaires. Ces batteries seront à barbette.

 

A L'EMBOUCHURE DANS LE DANUBE. -14e batterie, quatre pièces de 6. Total des pièces de la droite: dix pièces de 12, douze pièces de 6.

 

RÉSERVE.

Six pièces de 18, douze pièces de 6, pour être portées partout, selon les circonstances.

 

RÉCAPITULATION

Vingt-huit pièces de 18, dix-huit pièces de 12 , trente-neuf pièces de 6, dix-huit mortiers, dix obusiers ; total, cent treize bouches à feu.


Schönbrunn, 20 juin 1809

Au général comte Caffarelli, ministre de la guerre du royaume d’Italie, à Milan

Monsieur le Général Caffarelli, j'apprends qu'il y a du côté de Feltre et de Bellune des désordres commis par une irruption des Tyroliens. Il faut réunir un bon corps de troupes. Mandez au prince gouverneur général du Piémont de vous envoyer une demi-brigade provisoire. Tout cela peut vous faire, au commencement de juillet, un corps de 8 à 10,000 hommes. Mettez-vous à la tête de cette troupe et donnez la chasse à ces brigands .Je suppose que vous pouvez bien réunir huit ou dix pièces d'artillerie.


Schönbrunn, 20 juin 1809

A Joachim Napoléon, roi de Naples

Je reçois à l'instant la nouvelle que le Pape nous a tous excom­muniés (la Bulle d’excommunication a été apposée sur les murs de Rome dans la nuit du 10 au 11 juin). C'est une excommunication qu'il a portée contre lui-même. Plus de ménagements; c'est un fou furieux qu'il faut renfermer. Faites arrêter le cardinal Pacca et autres adhérents du Pape.

(Lecestre)


Schönbrunn, 20 juin 1809

Au comte Fouché, ministre de la police générale, à Paris

La grande-duchesse a eu tort d'empêcher l'exécution des mesures que j'ai ordonnées. Je ne veux point que Mme d'Albany demeure à Florence; mon intention est qu'elle reste à Parme.

Si vous avez lieu de penser que les plaintes qu'on porte d'Escoïquiz sont vraies, il faut d'abord l'éloigner des princes, après cela le faire  arrêter et mettre à Vincennes.

(Lecestre)


Schönbrunn, 21 juin 1809.

Au général Clarke, comte d’Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Général Clarke, il paraît qu'un corps de landwehr et de quelques troupes autrichiennes est entré en Saxe et qu'un autre corps est entré à Bayreuth. Ces deux corps se réuniront probablement pour marcher soit sur la Westphalie, soit sur ma ligne de communication.

J'ai donné au duc de Valmy l'autorisation nécessaire pour faire marcher la division du général Rivaud sur Würzburg et balayer la colonne ennemie qui est du côté de Bamberg et de Bayreuth; et, comme les circonstances ne peuvent être prévues, je lui ai donné pour instruction générale de se combiner avec une colonne de Bavarois et le corps du roi de Westphalie, ayant toujours pour premier but de s'opposer à ce que rien ne marche sur le Danube et sur ma ligne de communication.

Dans cet état de choses, je n'ai pas besoin de vous prescrire de veiller sur mes importantes places de Wesel et de Mayence; il doit y avoir assez de dépôts pour les mettre à l'abri d'un coup de main. Faites-les armer, et faites-y mettre un approvisionnement.

Je sais qu’il y a des partisans du côté de l'Italie; j'y ai expédié le général Caffarelli pour parer à tout; il a le commandement de toutes les troupes qui se trouvent dans le royaume d'Italie. Écrivez-lui à Milan de tenir mes places de Palmanova, Peschiera et Osoppo, à l'abri de tout événement.


Schönbrunn, 21 juin 1809.

Au général Clarke, comte d’Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Général Clarke, je reçois votre lettre avec la correspondance d'Espagne. Il faut écrire au roi que le nord passe avant tout; que, si Saragosse est enlevée et s'il perd l'Aragon, il se trouvera dans la plus fâcheuse position. Comment de Madrid ne fait-on rien ? Il faut écrire au général Sénarmont que toutes les demandes que fait l'artillerie sont ridicules; que je vois par son état qu'il a 6,000 chevaux, et qu'il peut d'ailleurs les recruter avec quelques mulets du pays

P. S. Il paraît que les Anglais se renforcent en Portugal; c'est de là que viendra le mal si l'on ne manœuvre pas bien à Madrid.


Camp impérial de Schönbrunn, 21 juin 1809.

ORDRE.

A dater de demain, il sera donné aux troupes qui sont dans l'île Lobau el à celles qui sont sur les bords du Danube une bouteille de vin et une ration de vinaigre par homme, ce qui sera la double ration d'été par jour.

L'intendant général fera transporter dans l'île, avant le 23, 200,000 bouteilles de vin et 15,000 pintes d'eau-de-vie, lesquelles formeront un magasin de réserve.

3° A dater de demain, on fera tous les jours aux fours de l'île 9,000 rations de pain, et, au 28, il y aura un magasin de farine de réserve capable de faire 30,000 rations.

4° On fera l'inventaire de toutes les caves de Vienne qui appartiennent soit aux princes, soit aux couvents et aux plus grands sei­gneurs, afin d'être assuré de l'approvisionnement de l'armée sans être obligé d’avoir recours aux caves des bourgeois et petits propriétaires.


Schönbrunn, 21 juin 1809, deux heures après midi.

Au général comte Lauriston, commandant les troupes détachées du 4e corps, au faubourg de Raab

Monsieur le Général Lauriston, je vous envoie la note du convoi qui n'a pu partir qu'hier au soir. Cela n'empêchera pas qu'il vous arrive demain 22. Ayez bien soin de ces munitions, car elles sont bien précieuses. Il me tarde d'apprendre que vous avez fait l'impos­sible pour vous emparer de Raab, car j'ai besoin de savoir à quoi m'en tenir. J’ai aussi besoin de vous avoir ici pour commander l'immense artillerie, qui exige un officier d'un grade supérieur. Le camp retranché de Raab ne peut nous servir à rien et peut servir contre Vienne; cela étant, faites démolir les ouvrages.


Schönbrunn, 21 juin 1809, quatre heures après midi.

Au maréchal Davout, duc d’Auerstaedt, commandant le 3e corps de l’armée d’Allemagne, à Kittsee

Mon Cousin, vous trouverez ci-joint la note du dernier convoi d'artillerie parti pour Raab. Faites en sorte qu'il arrive demain dans la matinée du côté de Raab. J'ai ordonné au vice-roi de rapprocher ses troupes de Raab, afin que la division Gudin tout entière puisse se rapprocher de vous. J’ai actuellement sur le Danube des ponts de bateaux et des ponts sur pilotis, aussi solides que l'ancien pont de Vienne. Il est probable que je ne tarderai pas à vous rappeler pour finir tout ceci par une grande bataille.

Faîtes travailler au château de Kittsee, si vous croyez que 3 ou 400 hommes puissent s'y défendre pendant cinq jours. On peut y mettre les quatre pièces de 12 et les deux obusiers que j'ai envoyés pour prendre Raab, qui forment une batterie redoutable. Voici quel est mon but: je laisserais un régiment de cavalerie avec deux pièces de canon et le bataillon hessois devant Presbourg, pour empêcher l'ennemi qui est dans l'île de passer; et enfin, si l'ennemi, sachant que nous avons quitté ce point, se hasarde à tenter le passage et culbuter ces troupes, l'infanterie se réfugierait dans le château; quant à la cavalerie, elle prendrait poste et empêcherait l'ennemi de pénétrer. Il est donc nécessaire que les ponts de l'ennemi soient dérangés le plus possible. Si même, en coupant une digue, on pouvait rendre plus considérable la séparation entre l'île et le continent, ce serait avantageux.


Schönbrunn, 21 juin 1809, cinq heures après midi.

Au maréchal Davout, duc d’Auerstaedt, commandant le 3e corps de l’armée d’Allemagne, à Kittsee

Mon Cousin, je reçois votre lettre du 21 à sept heures et demie du matin et celle du 21 à neuf heures du matin. Je vois avec plaisir que vous avez culbuté ces 400 hommes, mais il faut que le général Gilly-Vieux (Jacques-Laurent Gilly, 1769 – 1829) ait bien peu de monde avec lui pour n'avoir pas tout pris; il n'avait donc point de canon, car comment diable ont-ils pu se l'embarquer ? Donnez-moi une explication là-dessus; il me paraît honteux que ces 400 hommes n'aient pas été pris. J'apprends avec plaisir que les pièces de 18 sont arrivées. Le convoi de deux pièces de 12, également destiné au général Lauriston, vous arrivera dans la journée. Parlez-moi des quatre-vingts caissons, appartenant à dif­férents corps, qui avaient porté des munitions an vice-roi, et de la direction qu'ils ont prise. Puisque l'ennemi a gagné Marulaz, il est inutile que Bruyère se fatigue; il doit prendre position pour protéger la droite de Raab et s'éclairer au loin .

J’ai lu avec intérêt l'interrogatoire des prisonniers que vous m'avez envoyé. Ce que vous me dites du régiment de Hiller me paraît extraordinaire; ce régiment était entre Krems et Vienne il y a cinq jours. Je suppose que vous avez toujours l'œil sur M. de Metternich, et que mes ordres pour l'échange seront ponctuellement exécutés, qu'il sera traité comme le sera mon chargé d'affaires, c'est-à-dire qu'on le laissera passer avec ses papiers, si on a laissé passer ceux du sieur Dodun.

J'ai mandé au vice-roi de relever tous les postes de la division Gudin, pour que vous puissiez rappeler cette division du côté de Presbourg. Il est bien important d'éclairer les îles de Presbourg à Raab, afin que l'ennemi ne se loge dans aucune. Portez une atten­tion particulière à ce que les voitures appartenant aux différents corps rentrent au parc.


Schönbrunn, 21 juin 1809, six heures du soir

Au général comte Lauriston, commandant les troupes détachées du 3e corps, au faubourg de Raab

Monsieur le Général Lauriston, je reçois votre lettre datée du faubourg de Raab le 20 juin à cinq heures après midi. Vous ne me parlez pas des quatre-vingts voitures de munitions que vous devez avoir reçues depuis plusieurs jours et qui précédaient le convoi des pièces de 18 que je vous ai envoyées. Je vous ai déjà fait sentir qu'il est important que ces quatre-vingts voitures retournent toutes au parc de Vienne. Renvoyez de même toutes les voitures que vous auriez appartenant aux autres corps de l'armée. Déchargez les muni­tions et faites partir les voitures. Vous ne devez pas perdre de vue que si l'ennemi débouchait par Komorn, que le vice-roi donnât bataille, et que ..... dans tous les cas enfin, c'est par le pont de la Raab que doit être sa principale communication; il faut donc que ce pont soit bien solide. Faîtes-moi connaître les avantages de la position de Raab pour protéger le corps d'observation et empêcher l'ennemi de déboucher de ce côté.

Je suppose que vous avez renvoyé à Vienne les obusiers hors de service pour qu'on y mît un grain.


Schönbrunn, 21 juin 1809, six heures du soir.

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie

Mon Fils, je reçois votre lettre du 20, à minuit. Il ne faut pas penser dans ce moment à envoyer les cadres en Italie, la route est trop peu sûre. Nous verrons cela quand les affaires auront prit une tournure définitive. Pourquoi ne m’avoir pas envoyé le nommé Hurtel, employé autrichien venant d’Ofen ? Vous auriez pu le confier à mon officier d’ordonnance, qui l’aurait amené en poste. Vous ne me faites pas connaître à laquelle de mes lettres vous répondez. Je vous ai mandé de vous rapprocher de Raab, d’investir la place en force, et de rendre au duc d’Auerstaedt la division de cavalerie Lasalle et la division Gudin. J’ai reçu les différentes demandes de récompenses que vous m’avez envoyées, je vais les prendre en considération.

 

(Eugène)


Schönbrunn, 21 juin 1809, six heures du soir.

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie

Mon Fils, l'officier d'ordonnance Montesquiou m'apporte votre lettre du 20 juin à une heure du matin. Je vous ai envoyé quatre­-vingts caissons appartenant aux différents corps de l'armée. Je sais que, depuis, trente-quatre des vôtres, arrivés à Vienne, vous ont été renvoyés remplis de munitions. Voyez à faire revenir sur Vienne les quatre-vingts caissons qu'on vous a envoyés, et ne gardez que les munitions qui seront nécessaires pour remplir les vôtres. Je vois avec plaisir que l'on a fait un pont. Vous ne me parlez pas du général de brigade que vous avez fait prisonnier. Où est-il ? A-t-on interrogé les prisonniers que vous avez faits ? Si on les a interrogés, il faut que l'on m'envoie l'interrogatoire. Il me semble que vous ne devez plus avoir besoin du million de cartouches que vous avez à Neustadt, parce­ que les convois que j'ai dirigés sur vous ont dû vous fournir le mil­lion qui vous était nécessaire. Il ne faut pas vous embarrasser de munitions qui ne seraient pas attelées, puisque vous devez vous tenir prêt à revenir au premier ordre sur Vienne. Je donne ordre que ce million de cartouches qui est à Neustadt soit envoyé à Vienne.

Donnez ordre que tous les convois qui vous viennent d'Italie soient également dirigés sur Vienne; de cette place on pourra toujours vous tenir approvisionné dans tous les endroits où vous serez. Faites-moi connaître le nombre de blessés que vous avez encore sur la rive droite de la Raab. Continuez votre opération sur le pont de Komorn; puisque cela exige tant de peines, il faut qu'on soit encore loin de la ville. Je vous ai déjà envoyé l'ordre de relever les troupes du duc d'Auerstaedt autour de Raab, afin qu'elles puissent se reporter sur Presbourg, et de rapprocher les vôtres de Raab. Vous ne me faites pas connaître la position que vous avez choisie pour vous battre, si l'ennemi venait à déboucher par le pont de Komorn pour secourir Raab, ni par où vous devez faire votre retraite en cas d'événement. Tout cela doit être reconnu et préparé.


Schönbrunn, 21 juin 1809, sept heures du soir.

Au général comte de Lauriston, commandant les troupes détachées du 3e corps, au faubourg de Raab

Monsieur le Général Lauriston, je reçois votre lettre du 21 à trois heures du matin. Il est possible que l'ennemi tente quelque chose sur Raab, sinon pour en faire lever le siége, au moins pour en renforcer la garnison. Si 1,500 hommes passaient du côté de Medve, qui les empêcherait d'arriver à la pointe du jour dans Raab ? Répondez-moi à cette question, et surtout mettez-vous en mesure en faisant passer au général Piré une quantité suffisante d'infanterie pour empêcher l'ennemi d'aller à Raab, et activez le pont sur la Kis Duna.

Le vice-roi doit pousser des troupes autour de Raab afin de rendre celles du maréchal duc d'Auerstaedt; qu'il en envoie la quantité suffisante.

Faites achever le pont le plus tôt possible.


Schönbrunn, 21 juin 1809, huit heures du soir

Au maréchal Davout, duc d’Auerstaedt, commandant le 3e corps de  l’armée d’Allemagne, à Kittsee

Mon Cousin, je vous ai déjà mandé que j'avais donné l'ordre au vice-roi de se charger d'investir Raab el de vous renvoyer vos troupes. Vous devez y comprendre la division du général Lasalle; vous aurez quatre régiments de cavalerie que vous emploierez à éclairer le Danube. Vous aurez fait connaître au général Bruyère qu'il n'avait pas besoin de s'égarer sur la droite, puisque Marulaz a fait l'opération. Servez-vous de cette cavalerie pour éclairer le Danube depuis Raab jusqu'aux postes de la grosse cavalerie. Liez-vous avec les postes du général Nansouty; celui-ci doit se lier avec Ebersdorf, de sorte qu'il n'y ait aucune île du Danube qui ne soit surveillée. Correspondez avec le vice-roi, afin que, si l'ennemi tentait quelque chose entre vous pour secourir Raab, vous marchiez dans le même sens à la rencontre de l'ennemi. Ce qui m'importe beaucoup, c'est que toute la rive du Danube soit bien surveillée, afin d'être instruit à temps pour pouvoir culbuter l'ennemi avant qu'il se soit retranché. J'espère que la tête de pont de Sziget et Köz, que j'appelle l'Île de Raab, est fortifiée et à l'abri de toute insulte; car, si l'ennemi avait une opération raisonnable à faire, ce serait de jeter dans cette île 6,000 hommes, de s'en emparer et de ravitailler Raab et le camp retranché. C'est cette idée qui m'a fait attacher tant d'impor­tance à cette île du Danube, et qui est cause du mécontentement que j'ai éprouvé de ce que le général Lasalle ne l'avait pas fait occuper. Tout fait penser que l'ennemi ne tentera rien; mais s'il tentait quel­que chose, ce serait pour secourir Raab, dont la possession lui importe à beaucoup de titres. D'ailleurs, sans supposer à l'ennemi de si grandes vues, il pourrait essayer de jeter 2,000 hommes dans Raab; ce qui mettrait cette place à même de se défendre, car il ne paraît pas que la garnison actuelle soit assez forte pour faire une défense sérieuse. Or, cette dernière opération, il peut la faire en une nuit. C'est ce qui m'a fait attacher de l'importance à avoir sur la  Kis Duna un pont qui permit au général Lauriston et au général Baraguey d'Hilliers d'entrer rapidement dans l'île et de culbuter tout ce qui serait passé.

Comme vous êtes plus à portée de Lauriston, faites-lui cette question : si l'ennemi débarquait 1,500 hommes, ce qui peut se faire dans une nuit, vis-à-vis Medve, lesquels se porteraient sur-le-champ dans Raab pour en augmenter la garnison, de quelle manière pourra­-t-il l'empêcher ? S'il n'est pas préparé à cette tentative, qu'il se hâte d'achever le pont et qu'il fasse passer des troupes dans l'île pour résister à cette opération de l'ennemi, en se faisant soutenir par le général Baraguey d'Hilliers.

En résumé, vous me répondez du Danube depuis les postes de Nansouty jusque près do Raab; vous avez pour cela les divisions Gudin, Puthod et Lasalle. Vous ferez rejoindre Marulaz aussitôt qu'il le pourra. Pour le reste de la division Gudin, pressez le vice-roi de relever vos troupes devant Raab, afin que demain vous soyez parfaitement en règle.

Du reste, ces opérations me paraissent bien hardies pour l'ennemi; mais aussi Raab est bien précieux pour lui.


Schönbrunn, 21 juin 1809.

Au maréchal Kellermann, duc de Valmy, commandant le corps d’observation de l’Elbe, à Hanau

Mon Cousin, vous avez dû recevoir les ordres du major général pour porter la division Rivaud sur Würzburg et rejeter en Bohême les Autrichiens qui ont débouché par Bayreuth, et, s'ils étaient plus nombreux qu'il n'est probable qu'ils puissent l'être, manœuvrer constamment pour les empêcher de s'établir dans le haut Palatinat, et entre le Danube et la Bohême. Le général de brigade Laroche, avec une brigade de dragons, de Ratisbonne se porte dans le Palatinat pour se réunir à tout ce qu'on pourra tirer des places de Bavière. Le roi de Westphalie doit aussi manœuvrer, avec les troupes qu'il pourra réunir contre l'ennemi, entre la Bohême et le Danube. Le roi de Wurtemberg, de son côté, réunit une colonne qui pourra se coordonner avec la division du général Rivaud. Je vous envoie cette lettre par le retour d'un courrier du roi de Wurtemberg, comme duplicata des ordres que vous avez dit recevoir.


Schönbrunn, 21 juin 1809

Au général comte de La Riboisière, commandant l’artillerie de l’armée d’Allemagne, à Vienne

Monsieur le Général la Riboisière, donnez ordre à Neustadt et à Bruck que les munitions destinées pour l'armée d'Italie se dirigent sur Vienne. Il y a là, entre autres, un million de cartouches qui sont dans ce cas. Puisque nous approvisionnons l'armée d'Italie par des relais et des convois, ces munitions doivent rentrer au grand parc. Envoyez un officier avec un ordre positif de vous, à Neustadt et à Bruck, pour qu'il en soit ainsi. Donnez aussi les mêmes ordres à OEdenburg.


Schönbrunn, 21 juin 1809.

A Frédéric, roi de Wurtemberg, à Stuttgart

Monsieur mon Frère, je reçois la lettre de Votre Majesté du 17.

Le duc de Valmy a dû envoyer une division pour contenir les Autri­chiens. L'instruction générale est d'empêcher surtout l'ennemi d'ap­procher du Danube. Ainsi le duc de Valmy agira conformément an désir de Votre Majesté. Elle réunira de son côté toutes les forces qu'elle pourra employer.

Nous avons enfin établi sur le Danube des ponts sur pilotis aussi solides que le pont actuel de Kehl, et nous ne tarderons pas à livrer bataille à la grande armée autrichienne; cela finira toutes les inquiétudes. Il me parait impossible que cette armée se soit affaiblie d'autre chose que de quelques landwehr et d'un corps peu considérable de troupes.

Le général de brigade Laroche, avec un millier d'hommes de cavalerie, se porte également du côté de Nuremberg.

Le roi de Westphalie, avec une division hollandaise et d'autres troupes, se réunit à Erfurt, et sa première instruction est d'empêcher l'ennemi de s'établir entre Bayreuth et le Danube.

Je suppose que Votre Majesté m'enverra de nouveaux courriers lorsqu'elle aura des renseignements plus positifs, et qu'elle fera prévenir le général qui commande à Strasbourg, le général Beaumont et le duc de Valmy, de tout ce qui serait authentique et de nature à les intéresser. Les renseignements que j'ai jusqu'à présent portent que l'ennemi a deux bataillons d'infanterie et trois ou quatre bataillons de landwehr.

Je prends la précaution d'envoyer à Votre Majesté une lettre sous cachet volant pour le duc de Valmy. Cette précaution m'a paru n'avoir aucun inconvénient. Tout me porte à penser que la division du général Rivaud est suffisante pour contenir et battre l'ennemi.


Schönbrunn, 22 juin 1809.

Au maréchal prince de Ponte-Corvo, commandant le 8e corps de l’armée d’Allemagne, à Saint-Pölten

Mon Cousin, votre aide de camp m'apporte la lettre sur l'invasion de Dresde. Il est fâcheux que cette grande ville ne soit pas mise à l'abri d'être envahie par quelques partisans. Le corps de Hanau et celui du roi de Westphalie sont plus que suffisants pour réprimer cette incursion. Tout cela au reste tombera dans peu de jours par le résultat de la bataille qui anéantira la grande armée de l'Autriche.


Vienne, 22 juin 1809

VINGT ET UNIÈME BULLETIN DE L'ARMÉE D'ALLEMAGNE.

Un aide de camp du prince Joseph Poniatowski est arrive du quartier général de l'armée du grand-duché. Le 10 de ce mois, le prince Serge Galitzine devait être à Lublin et son avant-garde à Sandomir.

L'ennemi se complaît à répandre des bulletins éphémères, où il remporte tous les jours une victoire. Selon lui, il a pris 20,000 fusils et 2,000 cuirasses à la bataille d'Essling. Il dit que le 21 et le 22 il était maître du champ de bataille. Il a même fait imprimer et répandre une gravure de cette bataille, où on le voit enjambant de l'une à l'autre rive, et ses batteries traversant les îles et le champ de bataille dans tous les sens. Il imagine aussi une bataille qu'il appelle la bataille de Kittsee, dans laquelle un nombre immense de Français auraient été pris ou tués. Ces puérilités, colportées par de petites colonnes de landwehr comme celles de Schill, sont une tactique em­ployée pour inquiéter et soulever le pays.

Le général Marziani, qui a été fait prisonnier à la bataille de Raab, est arrivé au quartier général. Il dit que, depuis la bataille de la Piave, l'archiduc Jean avait perdu les deux tiers de son monde; qu'il a ensuite reçu des recrues qui ont à peu près rempli les cadres , mais qui ne savent pas faire usage de leurs fusils. Il porte à 12,000 hommes la perte de l'archiduc Jean et du Palatin à la bataille de Raab. Selon le rapport des prisonniers hongrois, l'archiduc palatin a été, dans cette journée, le premier à prendre la fuite.

Quelques personnes ont voulu mettre en opposition la force de l'armée autrichienne à Essling, estimée à 90,000 hommes, avec les 80,000 hommes qui ont été faits prisonniers depuis l'ouverture de la campagne; elles ont montré peu de réflexion. L'armée autrichienne est entrée en campagne avec neuf corps d'armée de 40,000 hommes chacun, et il y avait dans l'intérieur des corps de recrues et de landwehr; de sorte que l'Autriche avait réellement plus de 400,000 hom­mes sous les armes. Depuis la bataille d'Abensberg jusqu'après la prise de Vienne, y compris l'Italie et la Pologne, on peut avoir fait 100,000 prisonniers à l'ennemi, et il a perdu 100,000 hommes tues, déserteurs ou égarés. Il devait donc lui rester encore 200,000 hom­mes distribués comme il suit: l'archiduc Jean avait à la bataille de Raab 50,000 hommes; la principale armée autrichienne avait, avant la bataille d'Essling, 90,000 hommes; il restait 25,000 hommes à l'archiduc Ferdinand à Varsovie, et 25,000 hommes étaient dissé­minés dans le Tyrol, dans la Croatie, et répandus en partisans sur les confins de la Bohême.

 

L'armée autrichienne, à Essling, était composée du premier corps, commandé par le général Bellegarde, le seul qui n'eût pas donné et qui fût encore entier, et des débris du 2e, du 3e, du 4e, du 5e et du 6e corps, qui avaient été écrasés dans les batailles précédentes. Si ces corps n'avaient rien perdu et eussent été réunis tels qu'ils étaient au commencement de la campagne, ils auraient formé 240,000 hommes; l'ennemi n'avait pas plus de 90,000 hommes: ainsi l'on voit combien sont énormes les pertes qu'il avait éprouvées.

 

Lorsque l'archiduc Jean est entré en campagne, son armée était composée des 8e et 9e corps, formant 80,000 hommes; à Raab, elle se trouvait de 50,000 hommes; mais dans ces 50,000 hommes étaient compris 15,000 Hongrois de l'insurrection: sa perte était donc réellement de 45,000 hommes.

 

L'archiduc Ferdinand était entré à Varsovie avec le 7e corps, formant 40,000 hommes; il est réduit à 25,000 : sa perte est donc de 15,000 hommes.

 

On voit comment ces différents calculs se soutiennent et se vérifient.

 

Le vice-roi a battu à Raab 50,000 hommes avec 30,000 Français. A Essling, 90,000 hommes ont été battus et contenus par 30,000 Français, qui les auraient mis dans une complète déroute et détruits, sans l'événement des ponts qui a produit le défaut de munitions.

Les grands efforts de l'Autriche ont été le résultat du papier­ monnaie et de la résolution que le gouvernement autrichien a prise de jouer le tout pour le tout. Dans le péril d'une banqueroute qui aurait pu amener une révolution, il a préféré ajouter 500 millions à la masse de son papier-monnaie et tenter un dernier effort pour le faire escompter par l'Allemagne, l'Italie et la Pologne. Il est fort probable que cette raison a influé plus que toute autre sur ses déterminations.

Pas un seul régiment français n'a été tiré d'Espagne, si ce n'est la Garde impériale.

Le général comte Lauriston continue le siège de Raab avec la plus grande activité. La ville brûle déjà depuis vingt-quatre heures; et cette armée qui a remporté à Essling une si grande victoire qu'elle s'est emparée de 20,000 fusils et de 2,000 cuirasses, cette armée qui, à la bataille de Kittsee, a tué tant de monde et fait tant de pri­sonniers, cette armée qui, selon ses bulletins apocryphes, a obtenu de si grands avantages à la bataille de Raab, voit tranquillement assiéger et brûler ses principales places et inonder la Hongrie de partis, et fait sauver son impératrice, ses dicastères, tous les effets précieux de son gouvernement jusqu'aux frontières de la Turquie et aux extrémités les plus reculées de l'Europe.

Un major autrichien a eu la fantaisie de passer le Danube sur deux bateaux, à l'embouchure de la March. Le général Gilly-Vieux s'est porté à sa rencontre avec quelques compagnies, l'a jeté dans l'eau et lui a fait 40 prisonniers.


Schönbrunn, 22 juin 1809, six heures après midi.

Au général comte de Lauriston, commandant les troupes détachées du 3e corps, au faubourg de Raab

Monsieur le Général Lauriston, je reçois votre lettre du 22 à trois heures du matin; l'idée que j'aurai Raab dans la journée de demain on d'après-demain au plus tard me sourit beaucoup. Faites détruire tous les ouvrages du camp retranché, puisqu'il n'est bon à rien. Quand vous aurez Raab, faites-moi connaître la poudre et l'artillerie qu'il y a.


Schönbrunn, 22 juin 1809.

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, au camp sous Raab

Mon Fils, je reçois votre lettre du 21 à midi. Le général Marziani est arrivé. Je vois avec plaisir que la crainte que j'avais que vous n'eussiez relâché sur parole les officiers prisonniers n'est pas fondée. Faites-moi connaître s'il en a été de même pour les prisonniers que vous avez faits en Italie. La parole d'honneur que vous avez exigée d'eux de suivre la route qu'on leur a tracée est un bon usage qu'il faut maintenir. J'avais pris cela pour un renvoi sur parole.

Faites une proclamation pour pardonner à tous les insurgés c’est-à-dire les soldats de l’Insurrection hongroise) des cercles d'OEdenburg, de Raab et des pays que vous occupez, en citant un plus grand espace de pays et vous étendant dans votre proclama­tion jusqu'à Pest, et pour leur enjoindre de jeter leurs armes et de regagner leurs foyers.


Schönbrunn, 22 juin 1809, six heures après midi.

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, au camp sous Raab

Mon Fils, je reçois votre lettre du 21 à onze heures du soir. Vous ne me dites pas si le pont de Komorn est détruit; rien n'est plus facile que cette opération; il fallait en charger Montbrun; cela devrait être fait. Les mesures que vous avez prises pour les comtes allemands sont bien et montrent de la prudence; c'est ce qu'il fallait faire.

Si M. de Metternich n'est pas encore passé, faites-le passer de manière qu'il ne voie pas votre mouvement rétrograde; il est tout simple de lui faire faire un détour pour passer la Raab et arriver par votre droite. Vous avez vu, par le rapport du général Marulaz, qu'il croit que les débris du corps de Chasteler se sont jetés sur Veszprém. Si cela était vrai et qu'on pût les atteindre, ce serait fort heureux, car il ne serait pas impossible qu'ils cherchassent à rejoindre par Komorn. D'un autre côté, Broussier prétend qu'ils se portent sur Graz, où Marmont n'est pas encore arrivé; il paraît que les ponts de la Drave le retardent. Il n'est arrivé aujourd'hui aucun courrier d'Italie.


Schönbrunn, 22 juin 1809.

A Maximilien-Joseph, roi de Bavière, à Munich

Sire, j'ai eu l'honneur de prévenir Votre Majesté que le général Laroche se rendait à Passau, d'où il devait se diriger sur Nuremberg avec deux régiments de dragons. L'Empereur désire que Votre Majesté nomme un général de brigade ou un colonel pour réunir et former une petite colonne des soldats qui se trouvent dans les garnisons des places du Palatinat, lesquels y seront remplacés par des conscrits. L'Empereur pense que l'on pourrait former dans le Palatinat des bataillons de milice pour défendre Nuremberg. Dans la circonstance actuelle il serait utile que Votre Majesté adressât une proclamation à ses peuples, et qu'elle pût armer une dizaine de mille hommes de milice à Munich et dans les environs, ce qui mettrait sa capitale à l'abri de toute inquiétude. Elle pourrait aussi former dans le reste de ses états dix à douze bataillons de milice. Le général Laroche se trouvera bientôt du côté de Nuremberg à la tête de 2 à 3, 000 hommes des troupes tirées du Palatinat, de 2,000 dragons français et des bataillons de milice que vous pourrez mettre à sa disposition.

L'Empereur désirerait que Votre Majesté donnât des ordres pour qu'il·soit envoyé de suite au général Laroche quatre pièces de canon de campagne attelées et bien approvisionnées.

L'Empereur, Sire, pense que, dans les circonstances actuelles, votre ministère de la guerre n'a pas assez d'activité, ce qui est de la plus grande importance, car il faut sans cesse s'occuper de recruter l'armée, de réapprovisionner les magasins, enfin de réparer les pertes de la guerre.

L'Empereur est instruit qu'il circule beaucoup de pamphlets du côté de Nuremberg, et pense qu'il vaut mieux retarder deux on trois jours les postes que de répandre ces libelles. Je vais donner des ordres pour prendre des otages qui répondent des sujets de Votre Majesté enlevés dans le Tyrol.

Une chose essentielle, c'est que Votre Majesté fasse défendre autant que possible les communications sur les frontières de ses États avec la Bohême.


Schönbrunn, 23 juin 1809, deux heures du matin.

Au maréchal Davout, duc d’Auerstaedt, commandant le 3e corps de l’armée d’Allemagne, à Kittsee

Mon Cousin, je reçois votre lettre du 22 à trois heures après midi.

Je suppose que le vice-roi d'Italie aura pourvu à couvrir le siége de Raab et tiendra vis-à-vis Medve des troupes et du canon, afin que, si l'ennemi tentait un passage, on puisse déboucher promptement. Il me tarde que vous soyez réuni devant Presbourg, c'est-à-dire avec la division Lasalle et vos deux divisions, en ayant soin d'éclairer le Danube et ayant l'œil sur le siège de Raab. Mais il ne faut pas vous éloigner de Presbourg; l'armée d'Italie est assez forte pour pourvoir à cela. Ce ne serait que si elle était attaquée par Komorn, qu'il deviendrait important que vous gardassiez ses derrières. Vous ne manquez pas de cavalerie, puisque vous avez la division Lasalle. Ne laissez pas désorganiser votre artillerie. Veillez à ce que les caissons de votre parc qui seraient du côté de Raab vous reviennent. Il n'y a que les pièces de 12, que vous avez envoyées, qui sont nécessaires. Je n’attends que la prise de cette ville, si elle doit être prise, pour prendre mon parti, à peu près vers la fin du mois. Il faut donc avoir votre artillerie et tout bien en règle. Jusqu'à cette heure je ne vois rien qui indique que l'ennemi ait changé de position ; il est toujours devant Vienne, et le mouvement qu'on fait faire au prince Jean prouve que ce corps vient lui-même renforcer l'armée.


Schönbrunn, 23 juin 1809, neuf heures du matin.

Au maréchal Davout, duc d’Auerstaedt, commandant le 3e corps de l’armée d’Allemagne, à Kittsee

Mon Cousin, puisque par le rapport des prisonniers il résulte qu'on a fait à Presbourg des préparatifs de passage et que cette ville est un centre de magasins, il faut y mettre le feu et la brûler. Faites préparer d'avance vos batteries en conséquence, et, aussitôt que Raab sera pris, faites revenir vos mortiers et vos obusiers, les deux obusiers prussiens que j'ai envoyés et les mortiers et obusiers qu'on pourra trouver à Raab. Ayant ainsi réuni une dizaine de mortiers et d'obusiers, vous enverrez un trompette pour faire connaître à l'ennemi que vous le sommez d'évacuer les îles et de rentrer dans Presbourg, qu’alors vous ne tenterez aucun passage et respecterez la ville, mais qu'en cas de refus vous allez vous servir de vos mortiers et de vos obusiers. Vous ne ferez signer cette lettre que par un géné­ral de brigade. Si l'ennemi, comme cela est probable, refuse d'évacuer les îles, vous jetterez avec la plus grande rapidité deux ou trois mille obus dans Presbourg. Comme la communication est très­ rapide, je pourrai désigner moi-même le jour où elle devra se faire. Mon intention est que cette expédition ait lieu dans le même temps que les mouvements rétrogrades se feront sur Vienne, ce qui attirera toujours l'attention de l'ennemi. Vous avez donc deux ou trois jours pour vous préparer. J'espère que dans la journée nous aurons Raab, et que l'on y trouvera un peu de poudre ; je désirerais beaucoup que l'on pût y en trouver une quarantaine de milliers.


Schönbrunn, 23 juin 1809, neuf heures du matin.

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, au camp sous Raab

Mon Fils, je reçois votre lettre du 22 juin à midi. Les dispositions que vous avez prises sont fort bonnes. Je vois avec plaisir ce que vous me dites, que le commandant de Raab a tenu un conseil de guerre; j'espère donc que vous entrerez dans la journée dans cette place.

Je vous envoie un courrier d'Italie; je l'ai retenu deux heures pour connaître la situation de Vérone et de Venise. Caffarelli doit être arrivé dans ce moment; j'espère qu'il aura mis ordre à tout cela.

Débarrassez-vous de tous vos prisonniers, de vos blessés; donnez ordre que d'OEdenburg on les évacue sur Neustadt, hormis les plus blessés. Dans deux jours, il faut donner ordre qu'on ne passe plus par la route d'OEdenburg; pourtant il faut tourner le lac et se servir de la route de Bruck. Dites donc à Montbrun de jeter à bas le pont de Komorn; vous êtes bien malhabile de ne l'avoir pas encore fait. Aussitôt que vous serez dans Raab, la première chose que vous me ferez connaître, c'est la quantité de poudre et de bouches à feu qui se trouvent dans cette place. S'il y a dans Raab plus de trente milliers de poudre, mon intention est qu'on brûle Presbourg; j'en écris au duc d'Auerstaedt. Aussitôt que Raab sera pris, faites partir par relais pour Ebersdorf  les quatre pièces de 18 et les deux pièces de 12 de siége que je vous ai envoyées. Si elles n'ont point épuisé toutes leurs munitions, envoyez-en le reste avec ces pièces. Vous enverrez au duc d'Auerstaedt les obusiers prussiens et les mortiers pour servir à l'opération contre Presbourg.


P. S. Tous vos convois de munitions de guerre doivent se diriger de Bruck sur Vienne. Je vous ai mandé de faire lever le plan de la bataille sur une grande échelle, afin que j'y trace la bataille et que j'en fasse faire une relation, ainsi que de la bataille de la Piave. Aussitôt que Raab sera pris, remettez-le en état de défense, faites-y entrer des approvisionnements et remettez-moi un état de situation de la place.

 


Schönbrunn, 23 juin 1809, neuf heures du matin.

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, au camp sous Raab

Man fils, je suppose que voua couvrez le siège de Raab de tous les côtés, et que si l’ennemi tentait de passer du côté de Mestre 1,500 ou 2,000 hommes pour essayer de les jeter dans Raab, il y aurait sur le rivage assez de troupes pour l’empêcher de débarquer et de pénétrer jusqu’à Raab. Il me tarde d’apprendre que Raab soit pris ; faites-moi connaître quand vous aurez renvoyé au duc d’Auerstaedt toutes ses troupes, y compris la division Lasalle, et que vous n’aurez plus ni blessés ni embarras qui vous empêchent de faire un mouvement quelconque sans être retardé. Je suis toujours dans l’intention de frapper un grand coup vers la fin du mois.

 

(Eugène)


Schönbrunn, 23 juin 1809, dix heures du matin.

Au général comte de La Riboisière, commandant l’artillerie de l’armée d’Allemagne, à Vienne

Monsieur le Général La Riboisière, la bataille qui va avoir lieu doit préluder par une grande canonnade dans l'île. C'est donc une canonnade de quatre-vingt-six bouches à feu qui doivent être approvisionnées, chacune au moins de trois cents coups; cela fait donc vingt-cinq à trente mille coups de canon. Avez-vous la poudre nécessaire pour cela ? Quand les cent milliers de poudre qui viennent de Bavière seront-ils arrivés ? Je demande des calculs positifs: six heures d'intervalle gâteraient tout. Raab a demandé à capituler. II me tarde fort de savoir s'il y a de la poudre. Je me suis refusé à la proposition que vous m'avez faite de mettre des pièces de campagne pour compléter les quatre-vingt-six bouches à feu. Quand ce nombre de quatre-vingt-six pièces sera-t-il complété par celles qu'on tire de Vienne ? Il me semble que vous ne manquez pas d'affûts, mais que les affûts ne sont pas ferrés; quand le seront-ils ? Il vous faudrait au moins trois affûts de 18, trois de 12, trois de 6, trois d'obusier et trois crapauds de mortier de rechange. J'ai donné l'ordre que, dès que Raab sera pris, les quatre pièces de 18 et les deux pièces de 12 de siége que vous y avez envoyées reviennent par relais sur Ebersdorf; elles serviront en réserve. Si je demande encore dix-huit pièces de 18, pourrez-vous les fournir ? Vous avez les pièces, vous avez les boulets, les cent milliers de poudre doivent être arrivés; avez­ vous les affûts ? S'il ne s'agit que de les ferrer, ce doit être l'ouvrage de peu de jours. Si je demandais six obusiers à grande portée, pour­riez-vous les fournir ? Pourrez-vous fournir aussi deux pièces de 6 ?

Vous devez avoir les pièces, les boulets; restent les affûts, qui ne sont pas ferrés. Quand tout cela sera-t-il prêt ?

J'ai le projet de jeter deux mille obus dans Presbourg, pour obliger l'ennemi à évacuer les îles qu'il occupe, en le menaçant de brûler la ville. De quelle sorte d'obus faut-il se servir pour consommer les munitions les moins précieuses ?


Schönbrunn, 23 juin 1809, dix heures du matin

Au général comte Bertrand, commandant le génie de l’armée d’Allemagne, à Ebersdorf

Monsieur le Général Bertrand, il paraît par votre rapport que le pont et le bac sont faits. Je me rendrai ce soir à quatre heures dans l'île. Vous avez bien fait d'en commencer un second; faites-en commencer un troisième. Faites porter aussi dans le bras sept ou huit nacelles; cela peut se porter sur des voitures. Ces nacelles sont im­portantes. Nous y placerons des marins d'observation, pour contenir ce qu'on pourrait envoyer contre les ponts.

Raab a demandé à capituler; ainsi tout marche vers la grande opération .

J'ai vu avec plaisir l'expédition du capitaine Baste; je donnerai des récompenses aux officiers qui se sont distingués; sont-ils de la Légion ?

Mais ayez soin que toutes les opérations se fassent en haut pour inquiéter l'ennemi et s'accoutumer, et non pas du côté où nous devons faire la descente.

Quand aura-t-on les deux autres barques armées, et surtout la grande ?


Schönbrunn, 23 juin 1809.

A Alexandre, prince de Neuchâtel, major général de l’armée d’Allemagne, à Schönbrunn

Mon Cousin, donnez ordre au général de division Narbonne de partir sur-le-champ pour se rendre à Raab, où il prendra le comman­dement de cette place et de la partie de la Hongrie soumise à mes armes. Il mettra la place de Raab en état de soutenir un siège et reconnaîtra parfaitement la ligne de la Raab, mon intention étant que, les circonstances arrivant que le cordon qui sera laissé de ce côté fût obligé de se replier, il s'enferme dans la place pour s'y défendre. Quant à l'administration du pays, il aura soin de répandre le plus possible de mes proclamations aux Hongrois, et il lui sera envoyé des instructions ultérieures.


Schönbrunn, 23 juin 1809, quatre heures après midi.

Au maréchal Davout, duc d’Auerstaedt, commandant le 3e corps de l’armée d’Allemagne, à Kittsee

Mon Cousin, Raab s'est rendu. Je donne l'ordre que les quatre pièces de 18 et de 12, avec leur approvisionnement, soient renvoyées sans délai sur Ebersdorf; que, s'il y a plus de vingt milliers de poudre dans la place et plus de cinq cents milliers de cartouches, on fasse partir pour Vienne ce qu'il y aurait en sus; enfin qu'on vous envoie les deux obusiers prussiens et les mortiers pour bombarder Presbourg. Je suppose que vous pourrez commencer demain soir ou dans la nuit ce bombardement. Il faut avoir dix mortiers ou obusiers et dix-huit cents bombes ou obus à y jeter. Il faut faire précéder le bombardement par l'envoi d'un trompette dans l'île. Il sera porteur d'une sommation où vous direz "que, pour épargner les horreurs de la guerre à l'intéressante ville de Presbourg, vous demandez qu'il n'y soit fait aucuns retranchements ni fortifications, et que les troupes de l'île se retirent sur la rive gauche; qu'à cette condition vous ne ferez sur la rive droite aucunes fortifications et ne molesterez en rien la ville; que si, au contraire, les îles qui sont du côté du courant continuent à être retranchées et occupées, cette conduite, qui n'aboutit à rien, attirera la ruine de Presbourg. " Quand vous aurez lancé un millier de bombes, et que le feu se sera manifesté dans la ville, vous recommencerez la même sommation. S'il vous vient un officier parlementaire, vous lui ferez comprendre que, si on veut épargner les malheurs de la guerre aux grandes villes, il faut s'entendre; que vous ne demandez pas mieux que d'épargner Presbourg; que vous n'avez aucun projet de ce côté; qu'il suffit qu'on ne fasse pas de fortifications et qu'on ne tente pas d'attaques vis-à-vis cette ville; qu'ils ont tant d'autres points qui leur offrent les mêmes avantages que cette position, qu'ils doivent les préférer pour épargner ces malheureux habitants; sans quoi vous ne laisserez pas une maison dans la ville.

Nous avons besoin d'ancres; il doit y en avoir beaucoup dans les villages aux environs de Presbourg; dirigez sur Ebersdorf celles que vous trouverez. Nous avons également besoin de cordages; envoyez­ nous ce que vous pourrez. Vous avez offert de nous envoyer des bateaux; a-t-on envoyé des haquets pour les prendre ? Dans votre lettre vous disiez en avoir soixante et dix, mais ce nombre me paraît bien fort; envoyez-nous ceux dont vous pouvez disposer, ainsi que leurs agrès.


Schönbrunn, 23 juin 1809, quatre heures après midi.

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Raab

Mon Fils, je vous fais mon compliment de la prise de Raab. Il me tarde de savoir combien il y a de canons, de mortiers et de poudre. S'il y a dans la place plus de vingt milliers de poudre, faites-en partir sur-le-champ vingt milliers sur Vienne par des relais, pour que cela arrive plus vite. Renvoyez sur Ebersdorf les quatre pièces de 18 et les deux pièces de siége de 12 que j'ai envoyées à Raab, avec leur armement et approvisionnement.

Le major général vous écrit pour vous tracer la conduite que vous avez à tenir à l'égard des prisonniers. Il faut les retenir et les envoyer en France, à moins que le premier article de la capitulation ne soit adopté par le général autrichien et qu'on n'ait la signature ou du prince Jean, ou du prince palatin, ou du prince Charles, qui garantisse que ces prisonniers seront acceptés aux échanges qui auront lieu. Ayez soin qu'on prenne le nom des officiers prisonniers, qu'on leur fasse signer leur parole d'honneur, et que tout soit parfaitement en règle.

Vous sentez que, vous faisant venir sur Vienne pour assister à la bataille, je veux laisser un corps d'observation sur la Raab, composé d'infanterie, de cavalerie el d'artillerie. L'infanterie gardera la rivière tant qu'elle pourra, et se renfermerait dans la place si elle était forcée par des forces supérieures; la cavalerie se replierait. Il faut donc qu'il y ait dans la place des vivres pour 2,000 hommes et des muni­tions pour plusieurs mois. Il faut nommer un garde-magasin d'artillerie, un garde-magasin de vivres, un commissaire des guerres, un officier supérieur d'artillerie et un commandant de place. Vous allez y faire entrer vos embarras. S'il y a des réparations à faire aux ouvrages avancés, faites-les faire sans délai.


Schönbrunn, 23 juin 1809.

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Raab

Mon Fils, nous avons besoin d'ancres; il y en a beaucoup en Hongrie. On m'assure qu'il y en a un grand nombre à Raab et aux environs; envoyez-nous-en deux cents. Dirigez-les sur Ebersdorf. Nous avons aussi besoin de cordages; envoyez-nous ce que vous pourrez.


Schönbrunn, 23 juin 1809

Au maréchal Bernadotte, prince de Ponte-Corvo, commandant le 9e corps de l’armée d’Allemagne, à Saint-Pölten.

Mon Cousin, je reçois votre lettre sur les dispositions des Saxons.

Les Saxons qui sont du côté de Dresde se réunissent aux Hollandais et au corps du roi de Westphalie, qui doit se combiner avec le corps d'observation du duc de Valmy; ce qui fera près de 30,000 hommes. Les renseignements sont que l'ennemi a très-peu de monde du côté de Dresde et de Bayreuth. Votre corps m'est nécessaire pour la bataille qui va avoir lieu. Après cela vous et votre corps pourrez retourner, s'il est nécessaire, dans le nord de l'Allemagne. Tenez-vous prêt, et tâchez d'avoir avec vous quatre ou cinq jours de biscuit, quelques bœufs, vos cartouches et votre artillerie en règle, afin que vous puissiez figurer selon votre ordinaire à la bataille qui va avoir lieu.


P. S. Je reçois votre lettre du 22 avec celle de Würzburg du 18. Continuez à me donner les nouvelles que les Saxons recevront de leur pays. Vous voyez que tout cela n'est pas bien sérieux.


Schönbrunn, 23 juin 1809.

Au général Broussier, commandant la 1e division de l’aile droite de l’armée d’Italie, à Wildon (ville de Styrie situé entre Graz et Leibnitz)

J'ai reçu, Monsieur le Général Broussier, la lettre que vous m'avez adressée par M. Fromage, capitaine au 84e régiment. Je l'ai mise sous les yeux de l'Empereur. Sa Majesté a été surprise que vous ayez levé le siége et le blocus de la citadelle de Graz, car je vous avais fait connaître que vous ne deviez lever le siège que dans le seul cas où vous y seriez obligé par des forces supérieures ennemies, et que votre mouvement de retraite devait se faire sur Bruck, de manière à bien garder cette route. Vous êtes laissé tromper sur la posi­tion et sur l'approche de l'ennemi. Ensuite, vous avez eu une con­fiance aveugle en vous portant en avant sans avoir des nouvelles du général Marmont et sans pouvoir être sûr de conserver votre communication en abandonnant Graz.

Si le général Marmont était, comme vous le supposez, arrêté par la Drave et n'avait pas de pont, vous exposez votre division, puis­qu'elle peut se trouver aux prises avec des forces très-supérieures, sans que vous puissiez espérer du secours.

En abandonnant Graz, vous sentez que c'est exposer le flanc gauche de l'armée d'Italie.

Dans la situation des choses, si votre mouvement n'a eu aucune mauvaise suite, et que vous n'entendiez pas le canon du général Marmont, retournez à votre poste.

Comment avez-vous pu abandonner les blessés et les magasins !

Le prince de Neuchâtel


Schönbrunn, 23 juin 1809

ORDRE DU JOUR

L'empereur, en visitant ce matin les avant-postes dans l'île de Tabor, n'a point trouvé les canonniers à leur poste îles soldats du train étaient déshabillés et couchés, il n'y avait point de gardes aux pièces. Sa Majesté a fait mettre en prison le sergent qui commandait ce poste.

L'empereur recommande de porter une attention particulière à cette artillerie et ordonne qu’il y ait constamment des gardes et des plantons aux pièces.

(Brotonne)


Schönbrunn, 23 juin 1809

DÉCISION

Le général de division Foucher, à la date du 22 juin 1809, fait un rapport à l'Empereur sur l’armement des îles Alexandre, Lannes, Pouzet, Espagne, Saint-Hilaire et Masséna

 

Ce rapport serait satisfaisant, puisqu'il paraîtrait que les quatre-vingt bouches à feu pourraient être en batterie et prêtes à faire feu demain soir; mais ce qu'il importe de savoir, c'est que les approvisionnements à 150 coups ne sont rien; il faut 300 coups par pièce. On peut même mettre une dizaine de coups de mitraille par pièce.


Schönbrunn, 24 juin 1809.

Au maréchal Bernadotte, prince de Ponte-Corvo, commandant le 9e corps de l’armée d’Allemagne, à Saint-Pölten

Mon Cousin, je reçois votre lettre du 23. Le rapport du ministre de la guerre Cerrini est fort exagéré. Il n'est entré à Bayreuth que 2,500 hommes, et il y a tout au plus 6 à 7,000 hommes entrés en Saxe. Le roi de Westphalie a porté, le 18, son quartier général à Mülhausen, à la rencontre des Saxons, avec lesquels il aura près de 15,000 hommes pour marcher à l'ennemi avec ses forces. Le duc de Valmy a envoyé une partie de son corps à Würzburg. Ces détails feront plaisir aux Saxons, et ils ne tarderont pas à rentrer à Dresde. Il n'est pas vrai que ce soit le général Mayer qui commande les Autrichiens; c'est un général Am Ende dont on n'a jamais entendu parler.


Schönbrunn, 24 juin 1809

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie

Mon fils, je reçois vos quatre lettres du 23, à dix heures et demie du soir. Je viens d’envoyer six mortiers au duc d’Auerstaedt, ce qui, avec les trois que vous avez, et avec ses deux obusiers prussiens, fera onze, avec lesquels mon intention est qu’il brûle Presbourg, en y jetant 2 ou 3,000 bombes. Annoncez que vous marchez sur Pest, et que du moment que Raab sera approvisionnée et en état, vous avez l’ordre de vous porter sur cette ville. Préparez tout pour pouvoir partir le 25 et en cinq jours arriver sur Vienne, si cela est nécessaire, selon l’ordre que je vous enverrai.

 

(Eugène)


Schönbrunn, 24 juin 1809, deux heures après midi.

Au maréchal Davout, duc d’Auerstaedt, commandant le 3e corps de l’armée d’Allemagne, à Kittsee

Mon Cousin, je n'ai pas encore reçu de rapports de Raab, et j'ignore ce qu'il y a en poudre et en artillerie. Quoi qu'il en soit, je persiste dans le projet de jeter 2,000 à 2,500 boulets creux sur Presbourg, pour les obliger à cesser leurs travaux et à évacuer les îles. J'ai pensé qu'il ne fallait pas abîmer vos obusiers de campagne, qui seront si nécessaires pour la bataille; j'ai donc préféré faire partir d'ici six mortiers de fer de 11 pouces, jetant des bombes de 80 livres, avec 300 bombes par mortier, ce qui fera 1,800; vous aurez reçu de Raab trois petits mortiers avec 400 bombes, ce qui fera 2,200 ; vous emploierez les deux obusiers prussiens avec 400 obus, ce qui fera 2,600. Moyennant les relais, les mortiers vous arriveront demain matin, et les munitions vous arriveront à mesure que vous les consommerez; car toutes les six heures il partira un convoi de 600, et il partira trois convois. Ainsi vous pouvez faire votre dé­marche le 25 et commencer le feu le 26 au matin. Il faudra avoir soin que ces mortiers soient tirés à petite portée. Le feu durera trois jours; je suppose qu'une portée de 4 à 500 toises doit suffire pour atteindre le milieu de la ville. Il faut recommander aux officiers d'artillerie de mettre de l'intervalle d'un coup à l'autre, afin de ne pas trop échauffer ces mortiers. Recommandez à votre général d'artillerie de bien faire approvisionner ses caissons, afin que du 28 au 30 vos quatre-vingts pièces de campagne soient en état et parfaite­ment approvisionnées.


Schönbrunn, 24 juin 1809, six heures du soir.

Au maréchal Davout, duc d’Auerstaedt, commandant le 3e corps de l’armée d’Allemagne, à Kittsee

Mon Cousin, j'ai reçu vos trois lettres datées du 24 à huit heures du matin. Je crois que l'ennemi commence un pont sous Presbourg; je suis surpris que vous n'ayez pas sur-le-champ envoyé des obus et tiré des coups de canon pour l'en empêcher; je pense que vous devez le faire sans perdre de temps, et que vous ne devez rien épargner pour l'empêcher de construire ce pont. Les Badois doivent arriver sur vous ; ils ont aussi de l'artillerie; informez-vous où ils sont, et vous pourrez vous servir d'eux. Au reçu de cette lettre, commencez votre bombardement, si toutefois il est vrai qu'ils ont continué leur pont. Les mortiers qui vous arriveront, dans la journée de demain, de Raab et de Vienne, vous mettront à même de donner plus d'activité à votre bombardement. Indépendamment des munitions que vous avez, vous en pouvez aussi tirer de Raab, de celles que j'y ai envoyées et qui n'ont pas été employées. La mesure de ramasser des moulins pour détruire leur pont est bonne. Il faut aussi trouver quel­que emplacement pour mettre en batterie vos pièces de 12 et de 8 contre leur pont. Je suppose que la brigade du général Bruyère a rejoint le général Lasalle.


Schönbrunn, 24 juin 1809

Au comte Daru, intendant général de l’armée d’Allemagne, à Vienne

Monsieur Daru, il y a à Neusiedler vingt mille sacs de grains qui appartenaient à l'archiduc Albert. Vous pouvez les faire prendre pour l'approvisionnement de Vienne.


Schönbrunn, 24 juin 180

Au général comte Andréossy, gouverneur de Vienne

La garde bourgeoise de Vienne est mal menée et a un mauvais esprit. Je suis dans la croyance qu'elle n'est que de 6,000 hommes, dont 3,000 armés; et cependant on me rend compte qu'il y en a 13 à 14,000. Réunissez le tout demain; passez-en la revue; faites-moi connaître quels sont les commandants, et donnez-moi des renseignements précis sur cette garde. Je veux bien qu'il y en ait 6 à 7,000, mais qu'ils n'aient pas plus de l,500 à 2,000 fusils, et n'avoir rien à craindre.

Mon armée étant réunie à Vienne, c'est le moment de mettre de l'ordre.


Schönbrunn, 24 juin 1809

ORDRE.

TITRE ler. - DES PONTS,

Il y aura dans le canal de l'île Alexandre cinq bacs pouvant porter, chacun, 300 hommes et deux pièces de canon sur leurs rouages, 100 coups à tirer par pièce, dans des caisses, ainsi que 10,000 cartouches également dans des caisses.

Chacun de ces bateaux aura sur l'avant une espèce de mantelet en madriers à l'épreuve de la balle, qui servira à être jeté sur le rivage pour protéger le passage des pièces. A droite et à gauche de chaque bateau il sera placé un bordage de deux pieds de hauteur, servant à cacher les hommes et à les mettre à l'abri de la fusillade.

2° Le premier de ces cinq bacs portera le bout d'une cinquenelle avec un crochet en fer, et il sera désigné sur la rive gauche un arbre auquel sera attachée cette cinquenelle; un treuil sera placé sur la rive droite pour la tendre sur-le-champ; et les cinq trailles se servi­ront de la cinquenelle pour revenir. Le général d'artillerie désignera l'arbre auquel sera attachée la cinquenelle, et il fera placer le treuil vis-à-vis, dans les broussailles, le 26.

3° Le pont entier pour l'infanterie débouchera immédiatement après. On en réunira les deux ou trois parties dans la dernière partie du canal; après cela on les fera descendre le long du rivage. On plantera, le 26 des piquets, et on désignera le lieu où le pont doit être appuyé sur la rive opposée. On le placera plus bas que la Maison­ Blanche.

4° Le pont de radeaux sera construit un peu plus bas que l'extré­mité de l'île Alexandre.

5° Le pont de pontons sera construit sur la petite île en avant de l'île Alexandre. A cet effet, les bateaux, madriers, etc., seront portés, la veille, dans la dernière petite île.

6° Il y aura un bateau avec quelques chevalets, les madriers, poutrelles et cordages nécessaires pour faire un pont de quinze à vingt toises. Ce bateau et tous les agrès seront cachés sur la rive·droite vis-à-vis le petit bras qui sépare l'îlot du Danube de la Maison­ Blanche. Lorsque les troupes seront arrivées à cette hauteur, une escouade de pontonniers mènera ce bateau pour faire là un pont.

7° Il y aura dix pontons chargés sur des haquets attelés, avec les madriers, poutrelles, cordages et tous les objets nécessaires pour faire trois ponts de dix toises chacun. Cela se tiendra dans l'ouvrage de tranchée. Le pont qui doit être fait à l'embouchure dans le Danube sera réuni en portières, afin de gagner du temps et, par ce moyen, pouvoir le jeter en deux heures.

 

TITRE II. - DES BOUCHES A FEU.

8° La batterie de l'île Espagne sera augmentée de quatre mortiers, en fer, de 11 pouces. Ces mortiers jetteront des bombes dans la redoute que l'ennemi a de ce côté, pour en éteindre le feu, et aussi dans Enzersdorf, lorsque le feu sera éteint.

9° La batterie n° 9 de l'île Lannes sera augmentée de quatre pièces de 18 venant de Raab; ce qui, au lieu de huit, la portera à douze.

La même batterie sera augmentée de quatre mortiers; ce qui, au lieu de quatre, la portera à huit.

10° Pour épargner la poudre, il y aura deux charges pour les pièces de 18; cent coups de six 1ivres et cent coups de 4 livres. On ne tirera à 6 livres que lorsqu'il sera question de faire brèche et de tirer contre les maisons.

Il ° On aura en réserve six pièces de 18 et douze pièces de 6, ce qui fera dix-huit pièces, et le nombre d'affûts qu'on pourra ferrer d'ici au 29. Ces pièces serviront à construire des batteries contre celles que ferait l'ennemi pour contrarier nos projets, et surtout contre la batterie qu'il a du côté de la Maison-Blanche, pour pouvoir les éteindre sur-le-champ.

Les batteries des îles seront conformes au tableau ci-joint.

12° Le général d'artillerie et le général du génie donneront des ordres, chacun pour ce qui les concerne, pour l'exécution du présent ordre.


Schönbrunn, 24 juin 1809

A Frédéric-Auguste, roi de Saxe, à Francfort

J'ai reçu la lettre de Votre Majesté. Je suis fâché de tous les em­barras que cela doit lui occasionner. Elle doit toutefois être sans inquiétude. La division de 7 à 8,000 hommes que les Autrichiens ont dirigée sur ses états n'a de véritables soldats que trois bataillons. Le roi de Westphalie a dû se réunir avec les troupes de Votre Majesté, et la division Gratien; et la division du duc de Valmy, qui va se diriger sur Bayreuth, se réunira aussi au roi de Westphalie. Votre Majesté aura au moins 30,000 hommes pour rentrer dans ses états.

D'ailleurs ici les choses vont se décider. J'ai fait construire sur le Danube deux ponts de pilotis, aussi larges et aussi beaux que celui de Wittenberg, ayant chacun 440 toises de long. Ainsi le Danube ne doit pas se considérer comme un obstacle. La capitulation de la place de Raab a mis une position très-importante à notre disposition.

La ville de Dresde n'est pas une ville forte; mais cependant, avec les 3,000 hommes des troupes de Votre Majesté, elle aurait été à l'abri d'une incursion, si elle avait été armée. On a bien fait de la désarmer à l'ouverture de la campagne, où l'armée saxonne pouvait s'y trouver renfermée; mais, depuis la bataille de Ratisbonne, on n'a plus eu à craindre une incursion sérieuse. 3,000 hommes, avec le concours des habitants, étaient plus que suffisants pour mettre cette capitale à l'abri des misérables troupes qui sont entrées à Dresde.

Les choses marchent ici à ma satisfaction.

Aussitôt que Votre Majesté rentrera dans ses états, il sera convenable d'armer Dresde, d'y réunir les levées et la cavalerie, et de se mettre à l'abri des corps volants de l'ennemi, si toutefois alors il est encore maître de la Bohême.


Vienne, 24 juin 1809

VINGT- DEUXIÈME BULLETIN DE L'ARMÉE D'ALLEMAGNE.

La place de Raab a capitulé. Cette ville est une excellente position au centre de la Hongrie. Son enceinte est bastionnée, ses fossés sont pleins d'eau, et une inondation en couvre une partie. Elle est située au confluent de trois rivières; elle est comme le réduit d'un grand camp retranché où l'ennemi espérait réunir et exercer toute l'insurrection hongroise, et où il avait fait d'immenses travaux. Sa garnison, forte de 1,800 hommes, était insuffisante. L'ennemi complait y laisser 5,000 hommes; mais, par la bataille de Raab, son armée a été séparée d'avec la place. Cette ville a souffert huit jours d'un bombardement qui a détruit les plus beaux édifices. Tout  ce qu'on pouvait dire sur l’inutilité de sa défense était sans effet: elle s'était bercée de la chimère d'être secourue.

Le comte de Metternich, après être resté trois jours aux avant-postes, est retourné à Vienne. Le secrétaire d'ambassade Dodun et les personnes des légations alliées qui ne s'étaient pas encore retirées avant la prise de Vienne ont été évacués sur les confins de la Hongrie, lorsqu'on a appris à Bude la perte de la bataille de Raab.

Deux bataillons de landwehr, deux escadrons de uhlans et un bataillon de troupes de ligne, formant ensemble 2,500 hommes, sont entrés à Bayreuth. Ils ont, comme à l'ordinaire, répandu des proclamations et cherché à exciter des soulèvements. Au même moment, le général Am Ende (Karl Friedrich Am Ende, 1756 - 1810) est entré à Dresde avec trois bataillons de ligne, trois bataillons de landwehr el quelques escadrons de cava­lerie tirés de différents corps, tout cela formant 7 à 8,000 hommes.

Le Roi de Westphalie a réuni le 10e corps et s'est mis en marche.

Le duc de Valmy a mis en mouvement, de Hanau, l'avant-garde de l'armée de réserve qu'il commande.


Schönbrunn, 24 juin 1809

Au comte Fouché, ministre de la police générale, à Paris

Vous trouverez ci-joint la copie d’une dépêche du ministre de  Prusse. Tâchez de savoir quels gens il voit. C’est inconcevable les bêtises qu’il écrit à sa cour en parlant de ce qui a été mis dans le Moniteur pour Metternich.

(Lecestre)


Schönbrunn, 25 juin 1809, dix heures du matin.

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Raab

Mon Fils, faites entrer dans Raab tous les blessés que vous avez hors d'état d'être transportés; il ne faut pas qu'il en reste un seul en dehors. Le pays où vous êtes est celui des bons chevaux hongrois; demandez-en un millier, soit par réquisition, soit pour de l'argent. J'ai accordé à chaque colonel 40,000 francs pour se remonter; ordonnez-leur d'acheter des chevaux, je les ferai payer. Recommandez cela à Montbrun, à Lasalle, à Colbert.


Schönbrunn, 25 juin 1809, dix heures du matin

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Raab

Mon Fils, c'est aujourd'hui le 25. Je vous laisserai encore du côté de Raab le 26 et le 27, puisqu'il n'y a que vingt-six lieues de France d'ici à Raab et qu'il ne faut pas plus de trois jours pour les faire. Mon intention est que vous profitiez du 26 et du 27 pour faire une forte reconnaissance sur Komorn, afin de donner le change à l'ennemi, et que vous jetiez enfin ce pont à bas. Il est ridicule que cela ne soit pas fait. Il n'y a pas besoin de charger les moulins de sable; il faut les lancer tels qu'ils sont, mais les conduire vite. Si cela ne réussit pas, il faudra voir si avec quelques pièces de 12 vous pour­riez le rompre.

 


Schönbrunn, 25 juin 1809

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Raab

Mon Fils, je reçois votre lettre du 24 à deux heures après-midi, qui n’est arrivée que le 25 à neuf heures du matin. Il n’y a cependant d’ici à Raab que vingt-six lieues de France. Comme les Badois doivent venir à Vienne, mettez sous leur escorte les 2,500 prisonniers. Ils arriveront ici en trois jours; lorsqu’ils seront à Schönbrunn, nous aurons la réponse du quartier général autrichien, et nous verrons ce que nous aurons à faire. D’ailleurs, je verrai de quel pays ils sont; s’il y en a qui appartiennent à des princes de la Confédération, je les renverrai chez eux : il restera ainsi peu de monde. La capitulation ne dit pas par où ils seront rendus : je peux les rendre par Égra. Dirigez-les donc par ici. Faites-moi connaître de quels régiments et de quelle nation ils sont. Je suis fort embarrassé du parti à prendre pour Raab. Vous ne me rendez pas compte de la nature et de l’état des fortifications. Il faut que je connaisse quel est le revêtement, le relief, le nombre des bastions, etc. Quand je dis que je suis embarrassé sur Raab, c’est pour l’artillerie et les munitions.

Je pourrai y envoyer 20 pièces de 6 et des obusiers. J’y ferai retourner les obusiers prussiens et les mortiers que vous avez; mais la grande difficulté est la poudre, dont je n’ai que le nécessaire. Cependant je méditerai encore là-dessus. J’espère dans la journée recevoir des détails sur les fortifications. Envoyez-moi des renseignements sur la population et les ressources de la ville. - Commencez, par précaution, à faire venir à  Raab 1,000 boeufs, qui serviront à la garnison, si j’en laisse une, et qu’on pourra évacuer s’il n’y reste pas de garnison.

Les 3,000 quintaux de farine sont un bon commencement.

 

- Faites un appel de 6,000 quintaux de blé dans les environs, et réunissez-les dans la place, s’il y a des moulins dans la ville; vous pourriez envoyer ici 2,600 quintaux de farine, en les remplaçant par une pareille quantité de blé. Il faut que les moulins soient indépendants de la ville, pour que l’ennemi ne puisse pas les détruire; sans cela il faut en faire moudre tout le blé qu’on pourra. En résumé, envoyez à Schönbrunn les 2,500. Envoyez-moi le rapport des officiers du génie sur la place,  une statistique de la ville sur la population et les ressources; faites entrer dans la place 1,000 boeufs et 6,000 quintaux de blé. Envoyez-nous 2,000 quintaux de farine; faîtes approvisionner la place en bois, pour faire des blindages. Faites-moi connaître s’il y a des magasins et des casemates à l’abri de la bombe; faites mettre les batteries en état. Nommez un Chef de bataillon pour commandant avec trois adjudants de place, un chef de bataillon d’artillerie, un chef de bataillon du génie, trois officiers d’un grade inférieur de chacune de ces armes, des gardes-magasins du génie et de l’artillerie et un commissaire de guerre.

(Eugène)


Schönbrunn, 25 juin 1809

Au prince Cambacérès, archichancelier de l’empire, à Paris

Mon Cousin, j'ai reçu vos lettres des 17, 18 et 19. Votre correspondance n'est pas instructive et ne me dit rien de l'opinion de Paris et de ce que j'ai intérêt de savoir à une si grande distance. Ne serait-il pas possible de lui donner un tour plus intéressant et plus utile ?


Schönbrunn, 25 juin 1809

Au comte Fouché, ministre de la police générale, à Paris

Je réponds à votre lettre du 19. Je voudrais avoir des renseignements sur « ce salon des étrangers ». Il paraît que c'est là que les ministres étrangers puisent les ridicules nouvelles qu'ils envoient chez eux. Il serait facile de faire connaître dans cet endroit le véritable état des choses.


Schönbrunn, 26 juin 1809

Au général Andréossy, gouverneur de Vienne

La ville de Vienne est mal gouvernée. L'insolence du peuple vient de la négligence à réprimer les excès auxquels il s'est livré depuis un mois. Ces excès sont d'une nature telle qu'il n'en est aucun qui n'aurait dû être puni par la mort de plusieurs hommes. Si des exemples avaient été faits, la populace serait rentrée chaque jour de plus en plus dans le devoir. La coupable négligence dont on a usé a eu le résultat de rendre ce peuple insolent; c'est la première fois que je vois mes armes méprisées. On m'a laissé ignorer ces faits; on n'a donné suite à aucun. Tout est encore à organiser dans Vienne, et tout est dans la main des bourgeois et de nos ennemis. Les Français y sont vexés et jugés par les vaincus. Il faut que cet ordre de choses change promptement.

On me remet tous les jours un rapport ridicule et insignifiant sur des faits obscurs qui ne peuvent m'intéresser. Pas même à Paris, de pareils rapports ne viennent à ma connaissance : ils restent chez les autorités locales. Mais on ne me remet pas le rapport politique des délits de la populace contre les Français. Mon intention est que désormais vous me remettiez tous les jours un rapport des commandants des faubourgs sur les événements importants de la journée et sur les mesures prises pour maintenir l'ordre, pour découvrir les criminels et venger les affronts faits aux Français.

Vous devez d'abord vous assurer que les commandants des fau­bourgs parlent allemand; c'est un objet important. Vous attacherez à chacun des commandants de faubourgs un officier de Nassau, 2 sous-officiers et 15 hommes, lesquels formeront sa garde. Il se servira de ces Allemands pour bien éclairer ce qui se passe. Tout commissaire de police reconnaîtra le commandant du faubourg, lui rendra compte de ce qui se passe et fera toutes les dispositions pour exécuter ses ordres.

Il y aura également près le commandant de chaque faubourg un officier de garde bourgeoise et 8 hommes intelligents et pris dans cette garde, dont il se servira pour faire la police dans la populace et requérir les corps de garde de la force armée.

Tout Viennois arrêté par la garde bourgeoise pour dispute de police ordinaire sera envoyé devant le commissaire de police.

Toul Français arrêté pour des querelles avec un Viennois, ou tout Viennois arrêté par une patrouille française, sera traduit devant le commandant du faubourg, sans que les autorités locales aient à s'en mêler.

Si les commandants des faubourgs ne sont pas assez nombreux, il faut en augmenter le nombre. C'est sur eux que doit rouler la surveillance et la police de la ville.

Sous quelque prétexte que ce soit, aucun prisonnier de guerre allemand ne doit entrer à Vienne (des incidents s’étaient produits au passage de convois de prisonniers autrichiens). Le dépôt sera à Schönbrunn. Cet ordre a été donné plusieurs fois, mais les consignes ne s'exécutent pas, parce qu'on ne punit pas les commandants de corps de garde qui ont transgressé ces ordres.

Mon intention est que la garde nationale ne dépasse pas le nombre de 5 à 6,000 hommes, qu'elle n'ait pas plus de 1,500 fusils, et que tous les autres fusils, canons, etc., soient pris pour le service de mon armée. Vous me rendrez compte de la manière dont ce désar­mement doit se faire, et je vous autoriserai à le faire demain 26. Immédiatement vous publierez un ordre pour enjoindre à tout indi­vidu qui aurait des boulets et des canons, de les rapporter. Faites précéder cet ordre de la sentence de mort de celui chez lequel on a trouvé les trois canons. (Il s’agit de Jakob Eschenbach, exécuté le 26 juin)

Vous prendrez des mesures pour faire des visites domiciliaires et découvrir ceux qui continueraient à avoir des armes. Vous exciterez les dénonciations, en chargeant les commandants des faubourgs de donner récompense à ceux qui leur en feraient découvrir.

Vous ordonnerez que tous Anglais, étrangers et gens sans aveu, quels qu'ils soient, soient arrêtés.

Faites faire une liste des principaux grands propriétaires ou de leurs hommes d'affaires, et ordonnez-leur de faire venir du blé, dont ils ont une grande quantité dans leurs campagnes, tels que le prince Albert (Albert de Saxe-Teschen, l’oncle de l’archiduc Charles), qui a des grains à quelques lieues de Vienne, le prince Esterhazy; également les chefs de couvent, obligez-les à faire venir du blé. Je suis certain qu'il y a des magasins cachés dans la ville. Exercez une grande surveillance là-dessus, et faites saisir ce qui se trouverait à Vienne ou dans les environs. Faites-le mettre en magasin sous la responsabilité des communes.

Pour gouverner Vienne, il faut de la fermeté et de l'énergie. Pour vous donner un exemple de l'ignorance où on me laisse, on ne m'a rendu aucun compte de la prise d'une voiture de fusils qui a donné lieu à un événement important. Des injures sont faites journelle­ment aux patrouilles françaises, je n'ai pas encore eu un rapport là-dessus. Je vous envoie un rapport que j'ai demandé sur cette affaire de fusils ; il est important d'y donner suite, de savoir d'où viennent ces armes, où on les introduisait, où on voulait les porter.

(Lecestre)

 


Schönbrunn, 26 juin 1809, cinq heures du matin.

Au maréchal Davout, duc d’Auerstaedt, commandant le 3e corps de l’armée d’Allemagne, à Kittsee

Mon Cousin, j'ai passé hier la revue des divisions Friant, Morand, Frère, de ma Garde, de la brigade Pajol, et enfin de la division Dupas. Les Viennois ont été étonnés de voir 50,000 hommes de si belles troupes et cent quarante pièces de canon.

Je suppose que vous avez commencé aujourd'hui le feu. Je vous ai fait connaître que, si l'ennemi persiste à jeter le pont et à fortifier la ville, vous avez 2,000 bombes à jeter dessus. Vous devez savoir que pareille chose s'est faite autrefois à Mannheim, et je crois même que vous y étiez; l'ennemi a évacué la tête de pont pour épargner la ville. Si vous pouvez passer la revue de la division Puthod, passez-la et faites-moi connaître les places vacantes. Je crois qu'il n'y a qu'un général de brigade; faites-moi savoir si cela est, afin que, dans ce cas, j'en envoie un second. Je dirige quatre milliers de poudre,·trois mille boulets de 12, trois mille boulets de 3 et cinq pièces de 3 sur la place de Raab; c'est tout ce que je puis dans ces premiers moments. Il y a dix pièces de 12 ; cela fera donc quinze pièces, et ce nombre est suffisant pour mettre la place à l'abri d'un coup de main. D'ici à peu de jours je me propose d'y réunir quarante pièces avec leur approvisionnement; mais il faut pour cela qu'il m'arrive des convois de poudre que j'attends.

Je ne sais pas où est le général Marulaz, et je ne comprends pas bien ce que vous a dit cet officier; c'est contraire à tous les rapports qu'on m'a faits.


Schönbrunn, 26 juin 1809, six heures du matin.

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Raab

Mon Fils, donnez ordre aux Badois de retourner sur Presbourg avec leur artillerie. Donnez ordre au général Lauriston de venir me joindre,

Je reçois votre lettre du 24 à onze heures du soir. Voici ma déci­sion pour Raab. Je fais partir aujourd'hui cinq pièces de 3, trois mille boulets de 3, trois mille boulets de 12 et quatre mille livres de poudre; cela fera donc quinze pièces et six mille boulets. Vous y laisserez les deux pièces que vous avez prises à l'ennemi, avec huit cents coups à tirer, ce qui fera dix-sept pièces. Vous compléterez le nombre de cartouches jusqu'à quatre cent mille. Par ce moyen, la place ne sera pas brillamment armée, mais enfin elle pourra se défendre, d'autant plus que je ne la laisserai pas longtemps cernée. Dans quatre jours on y enverra dix pièces de 6 et cinq pièces de 3, quelques mortiers et obusiers; mais pour cela il faut qu'il m'arrive les convois de poudre que j'attends. Ainsi donc faites part de cela au commandant Narbonne. Donnez-lui un commandant du génie et deux officiers de cette arme, un chef de bataillon d'artillerie et trois offi­ciers d'artillerie, un commissaire des guerres, un garde-magasin des vivres, trois ouvriers d'artillerie, une compagnie d'artillerie, une escouade de sapeurs ou de mineurs, italiens ou français, un commandant d'armes du grade de chef de bataillon, deux adjudants de place du grade de lieutenants. Avec cet état-major, qu'il faut lui attacher, le commandant doit garder la place. Faites-lui connaître le peu d'artillerie qu'il aura d'abord, mais qu'elle sera ensuite augmentée; que c'est le défaut de poudre qui m'empêche de lui donner dans ce premier moment un plus grand nombre de pièces, mais que, dans tous les cas, je ne le laisserai pas cerné longtemps. Le maréchal duc d'Auerstaedt, lorsqu'il aura terminé son opération sur Presbourg, lui renverra des mortiers et des obusiers. En attendant que je désigne la garnison, placez-y un bataillon italien de 600 hommes et un dépôt français d'hommes éclopés de tous vos corps, au nombre de 300. Ordonnez qu'on travaille sans délai à rétablir les ponts-levis, les barrières, à relever les ouvrages avancés les plus importants, à tendre l'inondation, à bien organiser les magasins. Comme je vous le disais hier, faites jeter dans les fossés de la place cinq cents bœufs, avec la farine qui s'y trouve, six mille quintaux de blé et ses mou­lins, cette place sera approvisionnée. Remettez 20,000 francs au commandant du génie et 10,000 à celui de l'artillerie, pour mettre en état la place. Vous devez avoir trouvé de l'argent à OEdenburg, à Altenburg et à Raab, quoique cependant l'on m'assure qu'à Graz et à Klagenfurt vous n'ayez pas saisi les caisses. C'est une mauvaise méthode. Faites saisir les caisses de Raab, elles vous donneront les fonds nécessaires pour ces diverses dépenses.

Faites-moi connaître où est le général Marulaz. Le général Marmont doit être arrivé hier à Graz. Le général Broussier m'a fait toutes les folies imaginables ; mais enfin il n'en est arrivé aucun mal. Le général Broussier croit avoir en tête le général Chasteler et le général Gyulai, dont il porte les forces à 15,000 hommes; d'un autre côté, les rapports que je reçois disent que le général Gyulai marche sur Pápa. Vous trouverez ci-joint un rapport du chef d'esca­dron Lubienski que je tiens à OEdenburg. Il paraît probable que l'ennemi est du côté de Graz, et qu'une affaire a dû avoir lieu hier ou aujourd'hui; Marmont nous en donnera des nouvelles; de votre côté, voyez à y envoyer des espions pour savoir ce qui se passe. Si vous pouvez couper leurs détachements et tomber dessus, je retar­derai mes autres affaires pour vous en donner le temps. On m'assure que Marulaz s'est trompé sur le mouvement de la colonne qu'il a poursuivie, et que cette colonne s'est réunie sur Graz avec les au­tres. Faites-moi connaître ce que vous savez là-dessus. Je suis fâché que le général Montbrun n'ait pas été jusqu'à Tata : il aurait fallu inonder de cavalerie toute la plaine, et porter l'épouvante et des proclamations jusqu'aux portes de Bude. Vous verrez, par la déclaration ci-jointe d'un prisonnier, que l'archiduc Jean avec ses bonnes troupes se serait porté sur Presbourg, et que l'archiduc palatin serait resté, avec quelques régiments de nouvelle levée, entre Komorn et Bös.

Je vous recommande de nouveau de rompre le pont de Komorn , et de dire que vous vous portez en avant.

J'ai vu avec peine qu'un de vos courriers, qui a passé à OEdenburg, ait dit à tout le monde que vous reveniez.


Schönbrunn, 26 juin 1809, neuf heures du matin.

Au maréchal Davout, duc d’Auerstaedt, commandant le 3e corps de l’armée d’Allemagne, à Kittsee

Mon Cousin, je reçois votre lettre du 25 à six heures du soir. La distance de 6 à 700 toises me paraît un peu forte; il aurait été à souhaiter qu'on pût s'approcher à 4, ou 500 toises.

Je crois vous avoir mandé qu'il faut faire signer la sommation par un général de brigade. Je préférerais que cette sommation fût conçue en ces termes: « Monsieur, les Français, en faisant la guerre, épargnent le plus qu'ils peuvent les habitants. J'ai donc reçu l'ordre exprès de ménager la ville intéressante de Presbourg, à moins qu'on n'y fasse des fortifications et qu'on ne veuille en faire un point d'opérations de guerre. Les travaux que depuis quelques jours je vois faire à vos bateaux, les mouvements que je vois sur vos quais, les travaux que je vois faire sur vos hauteurs, la position des îles que vous occupez et que vous retranchez, tout me convainc que le cas prévu par mes instructions est arrivé et que je dois repousser la force par la force. J'ai voulu cependant vous prévenir et vous demander de faire cesser les travaux qu'on fait sur vos hauteurs, de porter ailleurs les bateaux qu'on rassemble le long de vos quais et d'évacuer les îles. Moyennant ce, tout restera tranquille. Dans le cas contraire, vous aurez à vous reprocher la destruction d'une des plus belles villes de votre pays. J'attendrai donc votre réponse là-dessus. »


Schönbrunn, 26 juin 1809, deux heures et demie de l'après-midi.

Au comte de Champagny, ministre des relations extérieures, à Vienne

Monsieur de Champagny, il faut expédier un courrier aujourd'hui à Saint-Petersbourg. Ce courrier portera vos dépêches à M. Bourgoing à Francfort, à Cassel, à Berlin et à Kœnigsberg. Vous enverrez dans ces différents endroits le dernier bulletin, et vous ferez connaître comment on envisage ici toutes ces incursions de l'Autriche en Saxe et ailleurs; que, d'un côté, le corps de réserve a dû marcher; que, de l'autre, le roi de Westphalie avec les Hollandais, les Saxons et ses propres troupes, aura plus de 20,000 hommes; qu'ainsi non­ seulement on reprendra bientôt Dresde et Bayreuth, mais encore que bientôt on entrera en Bohême par Dresde et par Bayreuth; que le général Laroche rassemble un autre corps à Nuremberg, et que ces trois corps se combineront pour entrer en Bohême; que du reste j'ai déclaré, et il faut le faire mettre dans tous les journaux, que toutes les contributions levées par les hussards et par les patrouilles autrichiennes seront remboursées et payées par les États héréditaires. Faites partir ce courrier. Dites à Caulaincourt que je suis satisfait de ma position; que j'ai ici les deux officiers de l'empereur de Russie, Czernitchef et Gorgoli; que j'en expédierai un aussitôt que le prince Gagarine sera arrivé. Vous lui enverrez la copie de l'ordre que j'ai donné au commandant de l'escadre russe à Trieste (voir au 16 juin) et copie de la réponse que me fait ce commandant. Vous lui ferez connaître que je ne suis pas satisfait de cette réponse, parce que je crains toujours d'exposer pour quelques mauvais matériaux l'honneur du pavillon russe et surtout les hommes; que je suppose que l'armée russe est actuellement arrivée à Cracovie; que je ne lui envoie aucun ordre puisque de Saint-Pétersbourg on ne m'a pas fait connaître que j'eusse à lui en donner; que je me suis toujours proposé d'écrire à l'empereur de Russie, mais que je le ferai par le retour de Czernitchef. Faites à Caulaincourt une peinture de nos ponts sur pilotis; parlez­ lui des avantages de la prise de Raab, et en général de la bonne position des choses.


Schönbrunn, 26 juin 1809, trois heures après midi.

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Raab

Mon Fils, le général Lauriston arrive et m'apporte votre lettre du 25 à sept heures du soir. Je vois que vous avez quinze cents coups de 12; le général La Riboisière vous en envoie·quinze cents autres. Vous avez deux pièces de 6 que vous avez prises à l'ennemi; le général La Riboisière vous en envoie quatre autres. Il vous envoie également trois mille boulets de 6 et quatre milliers de poudre. Vous laisserez des cartouches jusqu'à concurrence de quatre cent mille. C'est tout ce que je puis laisser, à cause de la rareté de la poudre. J'attends ces jours-ci soixante milliers de poudre; lorsqu'ils seront arrivés, je porterai le nombre des pièces à quarante. Aussitôt que le duc d'Auerstaedt aura fini son opération à Presbourg, j'ai ordonné que les deux obusiers qu'il a vous soient renvoyés. Je vous ai déjà mandé de m'envoyer deux mille quintaux de farine, des trois mille trois cents qui se trouvent dans la place, et treize mille quintaux de blé; ce qui fera quinze mille quintaux que vous aurez envoyés. Vous laisserez dans la place six mille quintaux de blé, et vous ordonnerez qu'on les fasse moudre dans les quinze moulins qui dépendent de la ville. Je ne vous reparle pas de l'artillerie et du génie; je ne vous reparle pas des cinq cents bœufs à laisser dans la place; vous devez en envoyer deux mille ici. Informez-vous si l'empereur ou quelque grand ont des haras dans les environs; faites-les enlever. Ordonnez aux colonels des chasseurs et des dragons d'acheter des chevaux.

On m'assure que le général. ..... ne s'est pas bien comporté à la bataille; voilà la seconde fois que cela lui arrive. Il faudrait renvoyer cet officier chez lui; il paraît qu'il en a assez de la guerre. Vous ne me parlez pas du général Marulaz.

Faites répandre à Komorn que le 28, à midi, M. de Metternich sera rendu aux avant-postes. Il faut qu'il soit traité absolument de la même manière que sera traité M. Dodun; que l'on retienne ses papiers, si l'on a retenu les papiers de M. Dodun; qu'on arrête quelqu’un de ses gens, si l'on a arrêté quelqu'un des gens de M. Dodun, etc.

PS. Sa Majesté montant à cheval, permet que cette lettre soit envoyée à Son Altesse Impériale sans être signée


Schönbrunn, 26 juin 1809.

A Alexandre, prince de Neuchâtel, major général de l’armée d’Allemagne, à Schönbrunn

Mon Cousin, je viens de l'île; il n'y a ni vin ni eau-de-vie. Présentez-moi des mesures pour y faire mettre demain 300,000 bouteilles de vin, 600,000 rations d'eau-de-vie et une grande quantile de riz. Je suppose que vous faites manger le pain biscuité qui se moisit. Remettez-m'en l'état; j'espère que j'en ai au moins 500,000 ralions.


Schönbrunn, 26 juin 1809.

Au maréchal Lefebvre, duc de Danzig, commandant le 7e corps de l’armée d’Allemagne, à Linz

L'ennemi ne doit pas être en force vis-à-vis de vous. La tête de pont doit être évacuée. Faites-moi connaître si une division ne serait pas suffisante pour la défense. Je désirerais que vous eussiez souvent des nouvelles de Salzburg et de Passau (ces deux points sont sous vos ordres), afin de les maintenir à l'abri de tout événement.

Faites-moi connaître combien il y a d'artillerie à la tête de pont indépendamment de l'artillerie bavaroise attelée. Envoyez-moi l'état de cette artillerie attelée, de votre cavalerie et de votre infanterie. Il est possible que j'aie besoin, d'un moment à l'autre, d'une bonne division, d'une quarantaine de pièces de canon, et du tiers de la cavalerie, laissant le reste pour la défense de Linz. Faites-moi connaître votre opinion.


Schönbrunn, 26 juin 1809.

Au général comte Bourcier, commandant les dépôts de cavalerie de l’armée d’Allemagne, à Passau

Monsieur le général Bourcier, un régiment provisoire de cavalerie est depuis longtemps à Ratisbonne. J'ai donné ordre au général Beaumont d'en envoyer un second sur le Danube pour joindre à celui-là. J'ai donné ordre au régiment des chasseurs de Berg, arrivé le 24 à Braunau et qui avait ordre de venir sur Vienne, de se porter sur Passau. Vous avez donc dans la main 2,000 chevaux. J'ai ordonné au général Laroche de prendre le commandement de cette brigade. Le roi de Bavière a envoyé un général-major pour tirer de ses places du haut Palatinat 3,000 hommes de bonnes troupes; ces 3,000 hommes seront joints à la brigade du général Laroche. Le général Laroche a donc un corps de plus de 4,000 hommes, infanterie et cavalerie, avec lequel il garantira le haut Palatinat. Il est sous vos ordres et doit n'en recevoir que de vous. Il doit prévenir le général Beaumont et le roi de Wurtemberg à Stuttgart, s'il y avait quelque chose de très-important. Son principal soin doit être de couvrir le haut Palatinat. S'il le peut, il attaquera l'ennemi qui voudrait se placer à Cham, Waldmünchen, Amberg. Ce but rempli, il doit appuyer la division qui marche sur Würzburg pour chasser l'ennemi de Bayreuth. Mais cette expédition sur Bayreuth n'est que momentanée. Immédiatement après, il doit prendre une position centrale à Waldmünchen, Cham et Amberg, et protéger le Danube jusqu'à Donauwœrth. S'il est forcé, il doit se retirer derrière le Danube, pour empêcher les partis ennemis d'arriver jusqu'à ma ligne de communication; et alors il serait renforcé par tout ce que vous auriez de disponible, par ce que fournirait le général Beaumont et par ce que le roi de Bavière pourrait envoyer de Munich. Si cela n'était pas suffisant pour couvrir mes derrières, chose que je ne place que comme hypothèse, il se bornerait à couvrir le point central de Passau. Vous êtes vous-même sous les ordres du duc de Danzig, qui est à Linz. Si le cas arrivait que ma ligne de communication qui passe par Landshut fût coupée, et que le général Laroche fût obligé de se replier sur le dépôt central de Passau, vous en préviendriez le duc de Danzig, qui marcherait pour vous soutenir.

Place de Passau. - Je suppose que vous avez dans chaque ouvrage avancé au moins trois pièces de canon; vous pouvez en prendre au château, en faire venir d'Augsbourg, même de Forchheim et des petites places du Palatinat. Je désire avoir un détail circonstancié des fortifications, de la résistance qu'elles peuvent opposer contre un coup de main. Je suppose qu'il y a un commandant pour chaque ouvrage dé­taché, et qu'en cas d'alarme chacun sait où il doit se porter.

Poudre. - J'ai ici cent milliers de poudre; le roi de Bavière doit m'en envoyer, qui passe par Passau; faîtes-moi connaître combien il en est passé.

Espionnage. - Vous avez un espionnage organisé sur les frontières de Bohême. Il faut que le général Laroche corresponde avec vous par des officiers. Vous lui enverrez également des officiers pour être instruit de tout ce qui se passe, et tous les jours vous expédierez à Linz un rapport, pour le major général ou pour moi, sur tout ce qui viendrait à votre connaissance. Vous adresserez vos rapports à Linz, au directeur de l'estafette. Enfin vous vous mettrez en rapport avec Augsbourg et avec le général Dutaillis (Adrien-Jean-Baptiste-Amable Ramon du Bosc, comte de Taillis, 1760 – 1851) à Munich, pour pouvoir, selon les circonstances, vous secourir mutuellement.

Si le régiment des chasseurs de Berg ne vous était pas utile, comme je le crois, gardez-le à Passau, faîtes-le reposer et exercer.

Dépôt de cavalerie. - Je n'entends pas dire que vous ayez acheté des chevaux et fait fabriquer des selles et tout ce qui est nécessaire pour monter promptement les hommes à pied du dépôt. A mesure qu'il y a 160 hommes de prêts, faites-les partir. Vous devez ne pas vous faire faute d'argent et vous procurer des chevaux et des selles. En attendant, utilisez les hommes de cavalerie qui n'ont pas de che­vaux, donnez-leur des fusils, organisez-les en bataillons el servez­ vous-en pour garder Passau; ce qui vous mettra à même d'envoyer du secours d'une portion de votre infanterie à la colonne du général Laroche.


Schönbrunn, 26 juin l809

ORDRE POUR M. GERMAIN, chambellan de l’Empereur

L’officier d'ordonnance Germain se rendra à Melk, d'où il m'adressera un rapport.

De Melk, il se rendra à Enns, à Linz et à Passau; de chacune de ces villes il m'adressera un rapport.

Il me fera connaître, à Melk, l'étal de l'hôpital, le nombre des malades, la situation des fortifications, le nombre des pièces en batterie, la situation de la garnison, quel est le commandant, et, en général, la situation de ce poste et celle du magasin de subsistances.

Il s'arrêtera à Amstetten pour connaître la situation de la garnison, de l'hôpital, et prendre des renseignements sur les postes qui sont le long du Danube.

A Enns, il m'enverra un rapport sur la situation de la manuten­tion, des magasins, de la tête de pont, de la garnison. Il ira à l'embouchure de l'Enns dans le Danube pour voir les travaux de la tête de pont, vis-à-vis Mauthausen.

A Linz, il verra la tête de pont, le nombre des pièces en batterie, la situation des magasins et des hôpitaux.

A Passau, il m'enverra un rapport sur la situation des ouvrages, sur les magasins, la garnison, les batteries, l'endroit où elles sont, les munitions d'artillerie, les convois de poudre, les magasins de subsistances, ainsi que ce qu'il pourra apprendre de la situation de l'ennemi du côté de Waldmünchen, Cham et vis-à-vis Passau, également ce qu'il apprendra du dépôt de cavalerie, des marchés qu'a faits le général Bourcier pour se procurer des chevaux et des selles, et ce qui l'empêche d'aller plus vite.

Si l'ennemi a fait effectivement quelque opération du côté de Cham ou de Waldmünchen, il ira joindre à Nuremberg la colonne du général Laroche. Cette colonne doit être composée de deux régiments de cavalerie et de 3 ou 4,000 Bavarois; et alors il m'écrira de Straubing, de Ratisbonne, de Nuremberg, et pourra même m'envoyer des courriers du haut Palatinat. Il m'enverra les nouvelles qu'on a de Bayreuth de la division Rivaud, qui doit avoir marché sur ce point.

Aussitôt qu'il croira n'être plus utile de ce côté, il me rejoindra. Il pourra envoyer par estafette sur Braunau des lettres pour être remises à l'estafette à son passage. S'il y avait quelque chose de pressé, il m'enverrait des courriers à Vienne. Il préviendra Bourcier de ce qu'il apprendrait d'important.


Schönbrunn, 26 juin 1809

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Raab

Mon Fils, vos lettres viennent d'Italie par estafette; c'est un mauvais moyen, elles sont livrées à des postillons allemands; il faut les faire venir par des courriers. Mes lettres viennent par estafette; mais j'ai établi, de Vienne à Strasbourg, des postillons français. Il est indispensable que vos lettres viennent par des courriers; cela a l'avantage qu'on peut interroger les courriers et en tirer des renseignements sur ce qui se passe sur vos derrières et en Italie.


Suite