1 – 15 mars 1809


 Paris, 1er mars 1809

Au comte de Champagny, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur de Champagny, je vous renvoie votre portefeuille. Faites une note à M. de Metternich, fort simple, dans laquelle vous lui transcrirez les passages des dépêches de mon ministre à Constantinople et de mon consul en Bosnie, relatifs à la conduite des agents autrichiens. Faites mettre aussi dans les journaux un article qui fasse connaître légèrement la conduite que tiennent ces deux agents contre la France.

Présentez-moi un projet de note en réponse à celle de M. Ver Huell, pour lui faire connaître que non-seulement il m'est impossible de renvoyer les troupes que le roi de Hollande a dans le nord, mais qu'il est nécessaire que ce prince mette promptement le reste de son armée en situation de défendre le pays contre les agressions de l'Angleterre.


Paris, 1er mars 1809

Au comte de Champagny, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur de Champagny, vous trouverez ci-joint un rapport sur des fabrications d'armes que l'on fait à Coburg pour le compte de l'Autriche. Vous donnerez ordre au sieur Bacher de se rendre sur-le-champ à Coburg, de témoigner mon extrême mécontentement de la conduite que tient cette Maison, et de déclarer qu'elle ait à rappeler sans délai ceux de ses membres qui sont au service d'Autriche; à défaut de quoi, je la citerai devant le Protecteur, pour rendre compte de sa conduite. Le sieur Bacher se mettra en route au reçu de cette lettre et fera diligence.


Paris 1er mars 1809

Au général Clarke, comte d'Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Général Clarke, j'ai à l'île d'Aix une escadre de douze vaisseaux de guerre et de six frégates. Il est donc indispensable d'avoir à l'île d'Aix assez de troupes pour la mettre à l'abri de toute attaque.

Donnez l'ordre au général commandant la 12e division de se rendre avec tout son état-major, à la Rochelle, où le siége de la division militaire sera fixé désormais.

Donnez ordre que le général de brigade commandant à l'île d'Aix n'en découche jamais.

Réunissez à l'île d'Aix, à Rochefort et à Oléron tout ce qu'il y a de disponible des 66e, 86e et 26e. Mon intention est qu'il y ait 1,800 hommes à l'île d'Aix, et à la Rochelle autant, pouvant se diriger sur l'île d'Aix, si elle était attaquée. Un général de brigade se tiendra constamment dans l'île d'Aix. Le général commandant la division sera prêt à se porter partout, de la Rochelle.

Donnez ordre à un officier général d'artillerie d'aller inspecter les batteries des îles d'Aix et d'Oléron et de s'assurer qu'elles sont suffisamment approvisionnées. Renouvelez l'ordre que l'approvisionnement de siège soit rétabli à l'île d'Aix.


Paris, 1er mars 1809

Au général Clarke, comte d'Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Vous donnerez ordre au général du génie Chambarlhiac de se rendre à Augsbourg; il commandera le génie du corps du général Oudinot. Après qu'il aura fait toutes ses dispositions pour organiser son arme à ce corps, il se rendra à Munich et à Passau. Il sera accompagné des capitaines du génie Mallet et Maillard et des gardes du génie Macaire et Poittier, qui ont dirigé les travaux de Praga. Vous lui ferez connaître que, arrivé à Passau, mon intention est qu'il reconnaisse la place, pour remplir le croquis ci-joint. Ce croquis est fait indépendamment du terrain, pour expliquer mon idée. Le réduit a été fermé à la gorge, loin de la rivière, parce qu'on se souvient que le faubourg est bas et que le coteau de la rivière est extrêmement rapide.

Voici l'instruction générale que vous lui donnerez:

1° Faire établir, sous la protection de la citadelle actuelle, sur les bords de la rivière, un local où 5 à 600,000 rations de biscuits, quelques milliers de quintaux de farine, quelques millions de cartouches, se trouvent en sûreté si l'ennemi prenait Passau;

2° Faire armer la citadelle de pièces de 24 et de 16 dans les parties basses qui battent la rivière (on m'assure qu'il n'y a que des pièces de 3);

3° Faire entrer dans la citadelle quelques autres pièces de 24;

4° Faire une reconnaissance de toute la ville, qui est environnée de murs;

5° Mettre des petites pièces dans les différentes tours, pour défendre les quais;

6° Faire un projet pour la défense de l'isthme, qui a je crois, un fossé plein d'eau et une contrescarpe, mais qui est dominé par une hauteur dont il faut projeter l'occupation; il paraît que Passau est couvert par le Danube et l'Inn, deux rivières importantes;

7° Tracer un ouvrage selon le croquis et les instructions ci-joints, de manière qu'il y ait une tête de pont pour résister à une attaque de vive force et empêcher le passage de l'Inn.

Vous ordonnerez à deux ingénieurs géographes de lever le pays aux environs de la place, de reconnaître les routes de Passau à Ratisbonne, en Bohême et à Linz, sur la rive gauche; la rive droite est suffisamment connue.

Vous écrirez au sieur Otto une lettre dont le général Chambarlhiac sera porteur. Vous le chargerez, après qu'il aura fini son travail sur Passau, de voir Burghausen, et de s'assurer s'il ne serait pas possible d'établir 3 à 4,000 hommes à l'abri de toute attaque.


Paris, 1er mars 1809

NOTE SUR PASSAU.

Passau est un poste important, surtout pour l'offensive. En marchant en Autriche, rien ne peut être plus avantageux que de suivre le Danube. Dès ce moment' l'armée ne peut manquer de munition, ni de vivres, et alors elle peut manoeuvrer comme elle veut.

Dans ce plan de campagne, Passau est appelé à jouer un grand rôle. Centre de l'armée, il doit contenir tous les magasins et en être l'entrepôt. Tout doit arriver par le Danube. Il faut donc avoir des magasins sur le bord de ce fleuve; il faut les avoir sur la rive gauche, c'est-à-dire du côté de la citadelle. Il est donc nécessaire de faire l'inventaire de ces magasins et de connaître la quantité de poudre et de biscuit qu'on peut y déposer. Il y a là des bâtiments qui paraissent considérables. Il faut que tout cela soit entreposé dans la citadelle, ou en bas dans les bâtiments qui seront protégés par elle. Ainsi ce premier besoin sera rempli.

La position de la citadelle de Passau rend maître du pont du Danube et aussi de celui de l'Inn, que la citadelle domine entièrement; mais on n'est pas maître du passage de l'Inn.

D'un autre côté, l'espace défendu par la citadelle est bien petit pour pouvoir être défendu par une armée; la ville tout entière ne serait point de trop. Cette ville parait d'une facile défense. Il faudrait un plan qui fit connaître la situation des murs et des quais sur une plus grande échelle. Il y a une muraille, et un fossé que sans doute on peut remplir d'eau, et qui dès lors est à l'abri d'un coup de main.

La hauteur qui est de ce côté n'est qu'à 200 toises et paraît devoir être facilement occupée. Moyennant cette occupation, la place se trouverait à l'abri d'un coup de main, Les troupes, les magasins, et 3 à 4,000 hommes qui se trouvent toujours sur les derrières d'une grande armée seraient à l'abri des attaques d'une division ennemie qui porterait sur les derrières de l'armée.

La citadelle actuelle exerce son action sur toute la rive gauche du Danube; mais la rive droite de l'Inn domine entièrement la rive gauche et la ville. Il est donc indispensable , par ces considérations et par des considérations plus importantes encore, d'être maître de ce passage de l'Inn, d'établir in un ouvrage sur la rive droite de l'Inn. Cet ouvrage, devant avoir plusieurs buts, doit pouvoir être défendu avec 400 hommes, et cependant doit avoir un développement assez grand pour servir de retraite à une armée. Dans cette situation, un système de fortification analogue au croquis qu'on joint ici paraît propre à remplir ce double but. Un réduit de quatre ou cinq cents toises, vêtu en bois de pin, et trois bastions détachés, se flanquant entre eux sur les hauteurs, construits comme des ouvrages de campagne réunis par un chemin couvert, semblent atteindre le but qu'on se propose.

Il y a, entre la tête de pont de Praga et celle de Passau, cette différence qu'à Praga on pouvait s'appuyer à la Vistule, le terrain étant à niveau, et qu'ici il faut occuper la hauteur, en se réunissant au fleuve par de simples lignes.

Ainsi donc on désire trois choses : 1 ° une reconnaissance exacte du pourtour de Passau; 2° Un tracé des ouvrages qu'on vient d'indiquer sur la rive droite de l'Inn; 3° un tracé de la gorge de la ville du côté de l'isthme, avec un projet pour occuper la hauteur.

La citadelle serait à l'abri d'un coup de main avec 4 ou 500 hommes; les ouvrages sur la droite de l'Inn seraient défendus avec 5 ou 600 hommes. On aurait 1,800 hommes pour surveiller la place et occuper la hauteur du côté de l'isthme. Ainsi, avec 3,000 hommes, on obligerait l'ennemi à un grand siége, et on aurait pour la guerre d'Autriche le plus grand avantage qu'on puisse avoir : un pont sur l'Inn et un pont sur le Danube. Il faut que ces ouvrages soient poussés de manière qu'à la fin de mai ils soient exécutés. On fera le plan des environs de la place à douze cents toises. Ainsi le premier dépôt de l'armée serait Ulm, Passau ensuite, el l'intermédiaire serait Ratisbonne ou Ingolstadt.


Paris, 1er mars 1809.

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie, à Milan

Mon Fils, je reçois votre lettre du 23 février. Rien n'est imminent entre l'Autriche et nous. La saison n'est pas assez avancée pour faire camper les troupes; je crains les maladies. Cependant j'approuve tout ce qui tend à approvisionner les magasins, à organiser les équipages d'artillerie, à armer les places et à faire avancer les corps qui sont le plus loin. Je suppose que vous avez un chiffre avec le général Marmont; cependant vous ne me le dites pas positivement; je désire savoir si vous lui en avez envoyé un. Ne lui écrivez plus désormais qu'en chiffre. D'ailleurs, de petits bateaux peuvent lui être expédiés facilement de Venise. Chargez-le de faire reconnaître les frontières de la Croatie et la position qu'il faudrait prendre pour tenir en échec le plus grand nombre de forces possible, et si peut-être le travail de quelques fortifications sur la ligne des frontières ne serait pas utile; car faîtes-lui bien comprendre qu'il faut qu'il serve à contenir une force autrichienne un tiers plus forte que lui, et que, s'il restait inactif sur Zara, il serait nul pour l'armée d'Italie.


Paris, 1er mars 1809

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie, à Milan

Mon Fils, je vois avec plaisir que la frégate la Caroline et les deux bricks le Lépante et le Mameluk sont entrés à Ancône. J'ai ordonné à toute la division que j'ai à Corfou de se rendre à Ancône; elle est composée de deux frégates et de plusieurs bricks. Nous aurons alors des moyens de communication avec la Dalmatie. J'ai fait remplacer les deux frégates de Corfou par deux frégates neuves. Je verrai avec plaisir que la frégate la Corona se rende également à Ancône.


Paris, 1er mars 1809.

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie, à Milan

Mon Fils, le mois de mars est encore trop froid pour réunir la division italienne à Montecchiaro; préparez tout pour cela, mais réunissez-la un peu plus tard. Il me semble que je vous ai fait venir deux bons généraux de brigade d'infanterie de l'armée de Naples. Je sens que vous avez besoin de deux généraux de brigades de cavalerie; je vous destine le général de brigade Broc, qui a été grand maréchal du roi de Hollande. Il faut penser à un bon général pour commander à Palmanova et à un bon colonel pour commander à Osoppo, à de bons gouverneurs pour Venise, Mantoue. Faites-moi connaître quand on commencera l'armement de Malghera. Faites-moi connaître la situation de Palmanova et quel est l'approvisionnement de siége et de guerre qui a été fixé pour cette place, ainsi que l'approvisionnement actuel, et quand il sera complet.


Paris, 1er mars 1809

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Milan

Mon fils, vous trouverez ci-joint l’extrait d’une lettre de mon consul en Bosnie. Faites vérifier ce qu’il peut y avoir de réel dans cette dépêche et instruisez-m’en : « Je cherche encore des renseignements positifs sur la marche des troupes autrichiennes de la Slavonie, et sur les bruits de guerre qui se sont répandus ici. Des marchands venus de Brood prétendent avoir vu passer trois régiments de cavalerie aux environs de la ville, et se dirigeant vers la Croatie. Des Turcs assurent que ces troupes se rassemblent avec beaucoup d’artillerie à Dubitza, où l’on a formé une espèce de camp retranché ; les Autrichiens ont déjà 12,000 hommes devant Isachich, Bihatsch et Ostrovitza, frontières ottomanes, très-rapprochées de la Dalmatie.

 

En attendant, les intrigues du consul d’Autriche semblent plus actives que jamais. Il a des correspondants à Zara, Sebénico, Spàlatro, Raguse et Cattaro. Je vais envoyer encore le messager infidèle qu’il a corrompu ; il sera adressé aux premières autorités de Dalmatie avec des dépêches peu importantes ; mais par un autre j’invite les fonctionnaires à faire observer mon messager pour savoir à qui il remet des lettres.

 

(prince Eugène)


Paris, 2 mars 1809.

Au comte de Champagny, ministre des relations extérieures, à Paris

Témoignez mon mécontentement au chef de division chargé de cette partie de ce qu'on a poussé la négligence au point de ne pas se faire adresser les journaux officiels des différentes cours de l’Europe. Il est honteux qu'on n'ait point aux relations extérieures les journaux de Vienne, de Saint-Pétersbourg, etc. Ce n'est pas la faute des ambassadeurs, mais de ceux chargés de correspondre avec eux. En général, les bureaux des relations extérieures ont besoin d'être remués.

Je désire que vous me présentiez un travail sur le budget des relations extérieures, qui va toujours en augmentant, et que vous me fassiez faire un état comparatif, chapitre par chapitre, des budgets des années IX, X, XI, XII, XIII, XIV, 1806, 1807 et 1808, avec les demandes que vous faites pour 1809. Les dépenses seront divisées en deux colonnes : la première, pour les sommes décrétées au commencement de l'année, et l'autre, des sommes dépensées; la seconde colonne sera intitulée Dépenses réelles. Les dépenses des relations extérieures augmentent, et cependant nous n'avons ni légation de Londres, ni légation de Lisbonne, de Rome, de Suède, etc.


Paris, 2 mars 1809

Au comte Régnier, Grand-Juge, ministre de la justice, à Paris

On m'assure qu'à Gènes, en 1808, il y a eu huit cents naissances qui n'ont pas été portées sur l'état civil. Probablement il y en aura davantage en Toscane, et u plus grand nombre dans les montagnes. N'y aurait-il pas quelques mesures à prendre pour obliger les parents à faire inscrire leurs enfants sur les registres de l'État civil ?


Paris, 2 mars 1809

Au général Clarke, comte d'Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

J'ai reçu votre rapport du ler mars sur les officiers à employer au corps d'observation de l'armée du Rhin. Nous ne connaissons pas de sous-chef d'état-major; cela complique l'administration et est même dangereux. Le général d'Hastrel se rendra au corps d'Oudinot, d'où il sera retiré selon les circonstances.

L'adjudant commandant Fourn a-t-il servi dans la cavalerie ?


Paris, 2 mars 1809.

Au général Clarke, comte d'Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Général Clarke, écrivez au général Mathieu-Dumas, qui se trouve à Grenoble, de passer en revue les régiments portugais et de vous faire connaître dans quel esprit ils sont, le cas qu'on peut en faire, et si on peut les employer dans une guerre en Allemagne.


Paris, 2 mars 1809.

A Frédéric, roi de Wurtemberg, à Stuttgart

Monsieur mon Frère, je reçois votre lettre du 21 février. Je vois avec plaisir que Votre Majesté est contente des troupes du général Oudinot. Dans le courant de mars, j'aurai un corps d'armée de vingt régiments d'infanterie et de cinq régiments de cavalerie, en Alsace. Le maréchal duc de Rivoli en prendra le commandement et aura son quartier général à Strasbourg. Si les circonstances me portent en Allemagne, je serai fort aise de passer quelques jours dans votre belle maison de Ludwigsburg. Votre Majesté ne doute point du plaisir que j'aurai de la revoir et de présenter mes hommages à la Reine.


Paris, 2 mars 1809

Au prince Cambacérès, archichancelier de l’Empire, à Paris

Présentez cette pièce à M. Regnaud et dîtes-lui que pareilles recommandations pour des Juifs ne peuvent lui faire que du tort.

(Brotonne)


Paris, 2 mars 1809

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Milan

Mon Fils, je vous ai mandé de faire armer Palmanova, mais il ne faut point pour cela faire d fausses dépenses. Cet armement doit consister à palissader les chemins couverts, ils l’étaient, je crois, déjà, et à armer les bastions et cavaliers de la place où l’on ne travaille pas. On armera les lunettes si cela peut se faire sans augmentation de dépenses ; on ne les armera pas s’il doit en résulter de nouveaux travaux, vu qu’après même une déclaration de guerre, on serait à temps de le faire. Cet armement se ferait sous la protection des cavaliers et batteries de rempart. Expliquez bien mon idée, et veillez à ce qu’elle soit suivie ; car e génie va me faire pour deux ou trois cent mille francs de dépenses et retarder d’un an les travaux de Palmanova et d’Osopo.

(prince Eugène)


Paris, 3 mars 1809.

Au comte de Champagny, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur de Champagny, faîtes connaître au sieur Bignon la réponse que j'ai faite, que je comprenais point le traité qui appelle les comtes de Hochberg à la succession de Bade; que, du jour où je l'aurai reconnu, je ne pourrais m'empêche de traiter les jeunes comtes comme princes de sang de Bade, et la définition de cette qualité est celle du droit du trône. Écrivez au sieur Bignon de n'être pas contraire à cette affaire, d'avoir beaucoup d'honnêtetés et d'égards pour les jeunes comtes, de cultiver leurs bonnes dispositions, de s'expliquer peu sur ces affaires, de dire à la comtesse que je ne suis point en opposition avec elle. Mais c'est une affaire à propos de laquelle il faut marcher avec circonspection, ménager le margrave et se tenir dans une mesure prudente. Recommandez au sieur Bignon d'envoyer fréquemment une chronique de cette cour sur le grand-duc, sur le prince héréditaire, sur la princesse, sur la comtesse, sur les comtes; faire connaître leurs noms, leur âge, leurs dispositions; également pour les filles, s'il y en a. Recommandez, en général, cela à tous mes ministres.

Le sieur Bignon doit éviter toute discussion avec le ministre de Russie et être bien avec lui.


Paris, 3 mars 1809

Au général Clarke, comte d'Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Général Clarke, je vous envoie le projet de formation d'une réserve de régiments provisoires, sur lequel je désire que vous me fassiez un rapport. Faites-moi connaître si je n'ai rien oublié et s'il y a des changements qu'il soit convenable de faire pour épargner les marches aux troupes. Enfin présentez-moi des états qui m'apprennent si les 5e bataillons pourront fournir ces quatre, trois ou deux compagnies pour concourir à ladite formation. Les 10,000 hommes de réserve que forme ma Garde sont destinés à compléter les 5e bataillons et à les mettre à même de fournir les hommes nécessaires. Il faut donc qu'une colonne des états que vous ferez dresser indique le nombre d'hommes qui leur manquera, après avoir épuisé tout leur monde; cette colonne sera la colonne de distribution des 10,000 hommes de la Garde. Il ne vous échappera pas que, par ce moyen, j'aurai 6,000 hommes à La Rochelle, 3,000 en Bretagne, 9,000 à Paris, 5,000 au camp de Boulogne, 2,500 pour la défense de l'Escaut, 2,500 pour garder Wesel, 5,000 à Strasbourg, 2,500 à Metz et 10.000 Français en Italie; total ; 45,500 hommes.


Paris, 3 mars 1809

A M. Bigot de Préameneu, ministre des cultes, à Paris

Faites moi connaître pourquoi l'archevêque d'Aix a ordonné une neuvaine parce que la reine Louise était malade, et pourquoi l'on fait prier les peuples pour des individus, sans la permission du gouvernement.

(Lecestre)


Paris, 3 mars 1809

Au maréchal Davout, duc d'Auerstaedt, commandant l'armée du Rhin, à Erfurt

Mon Cousin, expédiez un officier au général Oudinot pour savoir si les têtes de pont du Lech, que j'avais fait faire dans la dernière guerre, on été conservées, et combien de jours il faudrait pour les rétablir.


Paris, 3 mars 1809

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie, à Milan

Mon Fils, le 15 mars, vous ferez tracer la tête de pont du Tagliamento, et on y travaillera de suite. Je désire avoir sur ce pont un fort à étoiles de trois à quatre cents toises de développement, ayant de bons fossés pleins d'eau, faisant réduit, et quatre redoutes formant trois fronts de bastion ou un demi-hexagone de neuf cents à mille toises de développement. Ces redoutes seront fermées à la gorge; on mettra de l'eau dans les fossés, si cela est possible, pour qu'elles puissent se défendre isolément, et elles seront flanquées de manière à pouvoir se défendre entre elles. On liera, par la suite, ces redoutes par des fossés, des palissades et des chemins couverts, ce qui formera la tête de pont; le réduit en assurera le passage. Vous me ferez connaître ce qu'est devenue l'ancienne tête de pont de la Piave, et s'il y a des ouvrages de campagne à faire sur les rivières en avant de Palmanova.


Paris, 3 mars 1809

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie, à Milan

Mon Fils, je reçois votre lettre du 25 février, où vous me rappelez que j'ai trois camps en Italie: celui de Montecchiaro, celui d'Udine et celui de San-Daniele. Je connais le camp de Montecchiaro, mais je ne connais pas les deux autres; envoyez-m'en le tracé, et faîtes-moi connaître combien de bataillons ils peuvent contenir et de quelle manière ils sont disposés.


Paris, 3 mars 1809.

A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie, à Milan

Mon Fils, Cesarotti a laissé une histoire des Papes; faites-vous rendre compte de cet ouvrage, et, s'il tend à faire connaître le mal que les Papes ont fait à la religion et à la chrétienté, faites-le imprimer sans délai.


Paris, 3 mars 1809

Au comte Fouché, ministre de la police générale, à Paris

Je vois dans votre bulletin du 27 février que trois Piémontais très bornés parcourent le Piémont, se disant commissaires autrichiens. Pourquoi ne les arrête-t-on pas ? On dit que ceux qui ont reçu des bienfaits de moi ont demandé le consentement du Roi de Sardaigne. Quelles preuves en a-t-on ? On dit que le sieur Botton, juge de la cour de cassation, a tenu ce propos « que depuis qu’il est venu à Paris, il méprise les Français » Qui prouve ce propos-là et quel degré d’attention dois-je donner à ces assertions ?

(Brotonne)


Paris, 3 mars 1809

A Alexandre, prince de Neuchâtel, major-général de l’armée d’Espagne, à Paris

Mon Cousin, écrivez au maréchal Bessières pour savoir si le bataillon de Westphalie est habillé comme je l’avais ordonné. Si cela n’est pas fait, c’est très important à faire.

Donnez-lui l'ordre de faire partir pour Madrid les 158 hommes du 32e et les 90 du 58e qui sont à Duenas.  Ces détachements formant 248 hommes rejoindront leur régiment. Dans l'état de la place de Bayonne du 12 au 13 février je ne vois point de troupes. On dirait qu'il n'y a personne. Pourquoi n'ai-je l'état de situation de la place d'Aranda que du 15 février, celui de Pampelune que du 10 ? Prenez des mesures pour que j'aie plus promptement les états de situation,

(Brotonne)


Paris, 4 mars 1809

Au comte de Champagny, ministre des relations extérieures

Monsieur de Champagny, je pense qu'il faut envoyer un courrier à Saint-Pétersbourg.

Vous y enverrez la conversation que vous avez eue avec M. de Metternich, et la note que vous devez lui remettre. Vous ferez connaître que je fais réunir toutes les troupes de la Confédération, qu'il est indispensable de sortir de cet état de choses; qu'il paraît que l'Autriche fait marcher ses troupes; que je compte sur la promesse de l'Empereur de marché de son côté; qu'enfin la paix avec l'Autriche n'est faisable que lorsque le continent sera pacifié.


RAPPORT DE M. LE COMTE DE CHAMPAGNY A SA MAJESTÉ L'EMPEREUR

Paris, 2 mars 1809.

Sire,

J'ai l'honneur de mettre sous les yeux de Votre Majesté le précis de mon entretien de ce jour avec M. l'ambassadeur de la cour de Vienne.

L'Ambassadeur d'Autriche.  Monsieur le Comte, je viens vous annoncer l'arrivée du comte de Mier; il a mis neuf jours à se rendre de Vienne à Paris. Il trouvé la route encombrée de neige et de troupes. Je suis autorisé à vous prévenir que le courrier prochain m'apportera la réponse de ma Cour à différentes notes que vous m'avez adressées au sujet de cet officier italien insulté à Trieste et de l'acte de violence exercé contre un homme d'Udine. Sa Majesté l'Empereur mon maître a ordonné à cet égard des recherches dont on n'avait pas encore reçu à Vienne le résultat.

Le MINISTRE.  J'espère alors, Monsieur l'Ambassadeur, que votre courrier aura à m'annoncer la répression de ces attentats, dont j'ai regretté d'avoie si souvent de justes plaintes à vous porter.

L’Ambassadeur- J'ai aussi reçu l'ordre de ma Cour de prévenir Votre Excel1ence que, ainsi que je l'avais prévu, le retour de l'Empereur Napoléon, l'ordre donné aux princes de la Confédération du Rhin et enfin quelques articles insérés dans les journaux français et allemands, ont donné à ma Cour de justes inquiétudes, et qu'elle a cru devoir faire sortir ses troupes du pied de paix où elles ont été jusqu'à présent; mais que l'Empereur, mon maître, toujours animé des mêmes sentiments, ne prend de telles mesures que parce qu'il s'y voit forcé, et qu'il conserve toujours à l'égard de la France les dispositions les plus pacifiques.

LE MINISTRE. - Est-ce que vous voulez nous faire la guerre, Monsieur l' Ambassadeur ?

L'Ambassadeur. Si nous avions voulu voua faire la guerre, nous n'aurions pas attendu ce moment : avant le mois de janvier, nos troupes auraient été sur le Rhin.

Le MINISTRE. Cela n’eut pas été si facile, Monsieur de Metternich. Les moyens que avons à vous opposer en ce moment existaient au mois de janvier.

L’Ambassadeur. Mais l'Empereur était en Espagne .....

LE MINISTRE.  Oui, mais en 1805, vous étiez à Ulm qu'il était encore à Boulogne, et il n’est pas arrivé trop tard. Soyez vrai, si vous faîtes marcher des troupes, c'est que la faction anglaise a pris le dessus à Vienne. On affecte des alarmes pour séduire et entraîner l'Empereur; ceux qui sont au fait et qui dirigent ce qui sr passe chez vous n'en ont pas ; d'ailleurs, ils ne peuvent pu avoir. Comment seriez-vous alarmés dans ce moment, lorsque vous ne l'étiez pas au mois d’août dernier ? Alors l'Empereur n'était pas en Espagne; alors il couvrait toute l'Allemagne de ses troupes; il occupait sur vos derrières la Silésie et le duché de Varsovie; les troupes de la Confédération du Rhin étaient  campées, et cependant vous restiez tranquilles: vous vouliez attendre les évènements. Actuellement vous feignez des inquiétudes, vous vous alarmez du retour de l'Empereur, comme s'il avait dû rester toujours en Espagne; vous vous plaignez d'un avis donné aux princes de la Confédération, comme si ces avis, qu'a rendus nécessaires la continuation de vos armements, étaient autre chose que l'avis de se tenir prêts; et vous m'annoncez que vous faites marcher vos troupes ! Pas un homme n'a bougé de la part de la Confédération ni de la France. Si vous n'avez pas fait la guerre à l'Empereur, vous lui avez ôté la sécurité de la paix; vous avez précipité son retour; vous l'avez empêché de poursuivre les Anglais en personne et de leur fermer le chemin de la mer, vous avez arrêté des expéditions projetées contre l’Angleterre; des troupes qui se rendaient à Toulon et à Boulogne ont suspendu leur marche à Lyon et à Metz. Par les menaces que vous avez faites, vous avez servi l'Angleterre. Parlerais-je de cette fermentation dont on agite les États autrichiens ? De cette opinion qu'on a dirigée contre la France ? Des insultes faîtes à Trieste à des officiers français et italiens ? De l'assassinat de nos courriers si longtemps impuni ? Des articles de la gazette de Presbourg ? Des fausses nouvelles répandues sur l’Espagne ? De l'accueil  fait à Trieste aux officiers de la frégate espagnole  envoyée par les insurgés ? Du libelle de M. de Cevallos, répandus à Vienne avec profusion ?

L'AMBASSADEUR : Monsieur, cette brochure m’est venue de Munich.

Le MINISTRE, Ne pouvait-elle pas y être venue de Vienne ? Au reste, le livre s’est vendu à Vienne ; il s’est vendu avec la permission de la police. J’en ai vu l’annonce publique, et je sais qu’on annonce ainsi que les livres dont elle permet la vente.  Je continue…. Partout vos agents se sont montrés les ennemis de la France. Je cous mettrai sous les yeux des extraits de correspondance qui vous feront connaître la conduite de votre internonce à Constantinople et celle de votre consul en Bosnie.

L’AMBASSADEUR  Mais n’avons-nous pas à nous plaindre aussi  de M. de Latour-Maubourg, qui a, pour ainsi dire, déclaré la guerre entre la France et l’Autriche, en rompant toute communication entre les Français et leurs alliés et les Autrichiens ?

Le MINISTRE. Que devait donc faire M. de Latour-Maubourg ? Assister au triomphe des Anglais ? Vraiment, cela eût été trop complaisant.

Voilà donc les griefs que nous pourrions alléguer contre vous; et cependant  vous savez si notre conduite a été pacifique. A-t-on fait à votre cour une demande qui pût blesser le plus faible de ses intérêts ? Vous a-t-on dit un mot dont vous puissiez vous plaindre ? Vous avez répandu le bruit qu'on vous demandait Trieste, Fiume, la Croatie .....

L'AMBASSADEUR. C'est dans la Gazette d'Allemagne qu'on a imprimé cela.

LE MINISTRE. Mais par ordre de votre cabinet et par des lettres venues de Vienne et de Presbourg; mais c'est en Autriche aussi qu' on l'a imprimé. Et il vous était si facile de désabuser votre peuple; avez-vous dit un mot pour cela ?

L'AMBASSADEUR. Mais ici me parle-t-on davantage ? Si l'Empereur avait réellement des inquiétudes sur ce qu'on a appelé nos armements, pourquoi, au lieu de se taire avec moi et d'appeler les troupes de la Confédération, ne m'a-t-il pas parlé ? On se serait expliqué et probablement entendu.

LE MINISTRE. A quoi cela aurait-il servi ? A quoi ont servi des démarches semblables faites il y a cinq mois ? L'Empereur ne vous parle plus, Monsieur, parce qu'alors il vous a parlé en vain, parce que vous avez perdu auprès de lui, par des promesses trompeuses, le crédit qu'on accorde au titre d'ambassadeur.  Rappelez-vous qu'alors vous promîtes qu'il ne serait plus donné suite à vos mesures militaires; que les exercices de la milice discontinueraient avec la belle saison, que la reconnaissance du roi Joseph ne souffrirait aucune difficulté, et, sur tous ces points, vous vous disiez autorisé par votre Cour. D'ailleurs, je répondrai en un seul mot : l'Empereur a pu être réservé avec un ambassadeur que sa Cour avait, pour ainsi dire, désavoué, et qu'il a aussi considéré comme auteur de démarches hasardées que les faits ont démenties; mais il n'a pas fait appeler un seul homme de la Confédération. De l'avis de se tenir prêt à celui de marcher que vous avez donné, il y a loin. Les troupes qui étaient sur la Saône et la Meurthe y sont encore, et n'ont pas bougé.

L'AMBASSADEUR.  Mais une partie de ces promesses a été effectuée; on n'a rien ajouté à l'organisation militaire.

LE MINISTRE. On a tout fait pour inquiéter.

L'AMBASSADEUR.  Je ne crois pas que les exercices aient été continués pendant l'hiver.

LE MINISTRE. A Trieste, pendant l'hiver, les milices ont été exercées dans le vieux théâtre.

L’AMBASSADEUR. Enfin, si le roi Joseph n'a pas été reconnu, il faut l'attribuer à la conférence d'Erfurt. Certes, si l'Empereur avait voulu admettre à cette conférence l'Empereur mon maître, ou seulement s'il m'avait été permis d'y aller, ainsi que je l'avais proposé, la reconnaissance aurait été prononcée. Elle ne l'a pas été, parce que cette conférence a donné des soupçons, parce que la Russie est intervenue, parce que son langage, fort peu amical, a offensé, parce que cette réunion de deux grandes puissances, dont on ignorait les vues et les résolutions, a fait juger que cette affaire de la reconnaissance se trouvait liée à d’autres arrangements dont on a cru devoir exiger la connaissance.

LE MINISTRE. Votre promesse était absolue ; elle a été faite dans un temps où la conférence d’Erfurt était prévue ; elle était faite en retour d’une promesse du Gouvernement français d’évacuer la Silésie, promesse qu'il a effectuée. Au surplus, ce résultat de la conférence d'Erfurt vous a été connu. Vous savez bien qu’elle n’était pas dirigée contre vous. Pourquoi donc n'avez-vous pas fait cette reconnaissance.

L'AMBASSADEUR. - Mais le général Andréossy a rejeté la reconnaissance conditionnelle que nous avions offerte. D'ailleurs, si nous n'avons pas fait la reconnaissance, nous avons parlé de conserver des relations amicales avec le roi Joseph, comme roi d'Espagne.

LE MINISTRE. Monsieur l'Ambassadeur, je crains que vous ne vous trompiez; ces termes ne sont point dans la réponse de votre cour !. Est-ce en faisant impri­mer avec affectation les libelles des insurgés, est-ce en quittant Madrid et en suivant les insurgés que votre chargé d'affaires à Madrid a prouvé qu'il avait ordre d'être l'ami du roi .Joseph ? Au surplus, que prétendaient la France et la Russie en vous demandant cette reconnaissance ? Faciliter la paix avec l'Angleterre, ne laisser à cette puissance aucune chance de troubler le continent, et, par là, la porter à la paix dont tout le monde a besoin. Vous êtes venus à la traverse, vous avez pris le langage et embrassé la défense de l'Angleterre. Vous avez dit au public que vous armiez. Vos gazettes, qui sont d'une si grande circonspection, ont été pires que les plus mauvais libelles de Londres. La paix avec l'Angleterre n'a pas eu lieu. L'Angleterre triomphe à Constantinople de vous voir courir à la guerre. Qu'en espérez-vous ?

L'AMBASSADEUR.  Actuellement que nos troupes vont sortir de l'état de paix où elles étaient, on verra la différence entre cet état et celui où elles vont se placer.

LE MINISTRE. On verra les résultats de neuf mois de préparatifs. Croyez­-nous de bonne foi qu'ils puissent faire peur et en imposer à personne ? Au surplus, je vous le répète, l'Empereur, qui ne vous demande rien que de le faire jouir de la sécurité de la paix, ne veut pas la guerre; il la fera si vous l'y contraignez. Il ne vous  en a pas donné le plus léger prétexte. Je lui rendrai compte de la communication que vous de me faire. Je ne sais où vos mesures entraîneront; mais, si la guerre a lieu, c'est parce que vous l'aurez voulue.

L'AMBASSADEUR (en s'en allant). Je ne parle jamais de moi; mais vous savez comme je suis traité dans les cercles de la Cour. On m'a dit que l'Empereur se plaignait du traitement fait à son ambassadeur à Vienne. Je proteste que le général Andréossy a, jusqu'à ce dernier moment, été parfaitement traité par l’Empereur mon maître.

LE MINISTRE. Vous savez, Monsieur l'Ambassadeur, qu'il n'y a pas de rang établi à la Cour. L'Empereur ne se plaint pas de M. de Metternich ; mais il ne peut plus  accorder la même confiance à l'ambassadeur qui a été, pour ainsi dire, démenti par sa propre Cour. Votre Cour, en n'exécutant pas vos promesses, a seule blessé la dignité de votre caractère.


Paris, 4 mars 1809.

Au général Clarke, comte d’Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Général Clarke, mon intention est de changer la direction des divisions Boudet et Molitor, et de les diriger sur-le-champ, par le plus court chemin, sur Ulm. Je vous indiquerai demain la route qu’elle devront suivre.

Je désire, en conséquence, que les divisions Saint-Cyr et Legrand partent sans délai de Metz et arrivent le plus tôt possible à Strasbourg. Je suppose que cs deux divisions pourront partir après-demain, 6, de Metz, et pourront ainsi être arrivées à Strasbourg le 12 ou le 13.

Donnez ordre au général Montbrun d'être rendu à Strasbourg le 12 mars.

Donnez ordre au général Gudin d'être rendu au quartier général de Würzburg à la même époque.

Faîtes connaître au maréchal duc de Rivoli que je désire que son quartier général soit établi à Strasbourg dès le 12 mars, au lieu de l’être le I5.

Donnez ordre au général Songis d'être rendu le 15 de ce mois à Strasbourg, pour prendre le commandement en chef de l'artillerie des troupes que j'ai en Allemagne.


Paris, 4 mars 1809.

A Alexandre, prince de Neuchâtel, major-général, à Paris

Mon Cousin, écrivez au général Gouvion-Saint-Cyr, qu'une division allemande de 6,000 hommes est dirigée sur l'armée, pour faire le siège de Gérone, de concert avec une autre division de 10.000 hommes, qui est aux ordres du général reille. Envoyez votre lettre au général Reille, pour qu’il la fasse transcrire en chiffre et l’envoie par un exprès au général saint-Cyr.


Paris, 4 mars 1809

A Joseph Napoléon, roi d’Espagne, à Madrid

Mon Frère, je reçois votre lettre du 22 février. Vous avez eu tort d'envoyer du renfort à Saragosse; il y avait autant de troupes qu'il en fallait; il était plus nécessaire d'y envoyer des mineurs et des sapeurs. Les généraux demandent toujours; c'est dans la nature des choses. Il n'y en a aucun sur lequel on puisse compter pour cela. Il est tout simple que celui qui n’est chargé que d’une besogne ne pense qu’à cela ; plus il a de monde et plus il a de sûreté pour ce qu’il a à faire. C’est une grande faute qu’on fait lorsqu’on prend en considération   leur demande, si elle n'est pas de nature à être accueillie.


Paris, 4 mars 1809

A Jérôme Napoléon, roi de Westphalie, à Cassel

Mon Frère, je reçois votre lettre du 28 février. Les rapports que vous m'envoyez sur Vienne ne peuvent me servir, puisqu'ils sont sans date et que je ne puis les comparer à ceux que j'ai déjà.

Il est possible que les troupes qui sont de vos côtés (sic) partent; il faut alors une garnison pour occuper Magdeburg.


 Paris. 4 mars 1809

Au maréchal Davout, duc d’Auerstaedt, commandant l’armée du Rhin, à Erfurt

Mon Cousin, les troupes de Saxe et de Pologne étant sous vos ordres, vous devez, par le courrier expédié aujourd'hui pour porter aux troupes de votre corps d'armée l'ordre de se réunir à Bamberg, prescrire que toutes les troupes saxonnes se réunissent en deux camps autour de Dresde, de manière qu’il y ait, pour la défense de cette capitale et du territoire, 23,000 hommes d'infanterie et 3,300 chevaux, avec l'artillerie nécessaire. Envoyez des ordres en même temps pour que toutes les troupes polonaises se réunissent en trois divisions sous Varsovie. Il est nécessaire que les troupes saxonnes et polonaises soient ainsi placées pour le 20 mars. Les troupes qui sont en garnison dans les places de l’Oder doivent y rester. Praga, Sierock et Modlin seront occupées par la droite des troupes, de sorte que si les Autrichiens se dégarnissent en Galicie, ce corps, composé de 15.000 hommes, infanterie et cavalerie, puisse se diriger sur Cracovie. Le sieur Bacher cous donnera l’organisation de la 3e division, des corps réunis de Nassau, formant deux régiments, mais dont l’un est en Espagne ; d’un régiment de Würzburg, qui en a un autre en Espagne ; du régiment des maisons ducale de Saxe ; du régiment de Lippe et d’Anhalt et du régiment de Schwazburg, Reuss et Waldeck. Il est nécessaire que vous preniez des mesures pour les y diriger. Vous causerez de cela, en passant à Francfort, avec le sieur Bacher, qui est au fait de ces affaires.


 Paris, 4 mars 1809

A M. Otto, ministre plénipotentiaire de France, à Munich

J'envoie un officier d'ordonnance porter la réquisition de réunir l'armée bavaroise; je me suis décidé à cette mesure, parce qu'il pa­raît que les Autrichiens font sérieusement des mouvements. Cependant je ne les crois pas assez insensés pour commencer les opérations ayant l'armée russe sur les flancs. Recommandez au roi de faire armer et approvisionner Forchheim, Bamberg, Passau et Kufstein. Le duc de Rivoli sera le 12 à Strasbourg. La division Molitor et la division Boudet, que je voulais d'abord réunir à Strasbourg, reçoi­vent l'ordre de se détourner à Belfort, de passer par Huningue et, de là, de se diriger sur Ulm, où elles arriveront le 20; probablement qu'à cette époque le duc de Rivoli aura son quartier général à Ulm.

Les Wurtembergeois se réunissent à Neresheim, les Hessois à Mergentheim, les Saxons devant Dresde, et les Polonais entre Varsovie et Cracovie. Le duc d'Auerstaedt aura réuni à la même époque tout son corps d'armée à Bamberg. Ainsi les Autrichiens verront que nous sommes prêts. Je ne me presse pas d'arriver, parce que je ne pense pas que l'Autriche attaque, et, si je me prête à ces armements, ce n'est que pour éviter à la Confédération la honte de trembler.

L'armée d'Italie se concentre également. 6,000 hommes d'infanterie et 2,000 hommes de cavalerie, qui appartiennent aux régiments de l'armée du duc de Rivoli, vont traverser le Tyrol pour se rendre à Ulm.

 

Je suppose que le roi de Bavière aura établi des magasins à Ulm et à Augsbourg. Je désire qu'il en établisse aussi à Nördlingen, et qu'il fasse faire un million de rations de biscuit. Voyez Montgelas pour que cette fabrication ait lieu sans délai; je payerai.  Il faudrait que cet approvisionnement fût préparé sur les points suivants: 200,000 rations à Ulm; 200,000 à Ingolstadt; 200,000 à Passau; 200,000 à Munich et 200,000 à Augsbourg. Veillez à ce qu'on y travaille de suite.

 

Si des évènements extraordinaires arrivaient, je serais comme un éclair à Munich. Dans ce cas, voyez le Roi pour qu'il fasse tenir secrètement à ma disposition 5 ou 6 chevaux de main de ses écuries. Mais, encore une fois, je ne crois pas cela nécessaire, et les Autri­chiens ne tarderont pas à savoir qu'il y a plus de troupes en Allema­gne et en Italie qu'ils ne peuvent se l'imaginer.


Paris, 4 mars 1809

 

A Monsieur de Talhouet, Officier d’ordonnance de l’Empereur, à Paris

 

Monsieur de Talhouet, vous partirez sur-le-champ pour Karlsruhe; vous y porterez une lettre au grand-duc de Bade. De là vous irez à Stuttgart, où vous remettrez une lettre au roi de Wurtemberg. Vous continuerez votre route sur Munich, où vous remettrez au roi de Bavière la lettre ci-jointe.

 

En passant à Augsbourg, vous verrez le général Oudinot. Vous le préviendrez que j'établis une estafette de Mayence à Augsbourg, et que je désire qu'il écrive tous les jours par cette estafette au major général, qui est le prince de Neuchâtel, et qu'il corresponde fréquemment aussi avec le duc d'Auerstaedt.

 

Vous irez voir le prince de Neuchâtel, qui a des lettres pour l'Alle­magne; mais, si à neuf heures elles n’étaient pas prêtes, vous ne les attendrez pas.

 

Vous descendrez chez mes ministres, dans les différentes cours où vous irez, et vous attendrez des réponses. Si on vous parle de guerre, vous aurez le ton rassurant et direz que de nombreuses troupes­ marchent de tous côtés sur les frontières.

 


Paris, 4 mars 1809

 

A Charles, prince primat de la Confédération, évêque de Ratisbonne, à Francfort

 

Mon Frère, les nouvelles que je reçois de Vienne me font juger convenable de réunir sans délai les troupes de la Confédération. Il est donc nécessaire que le régiment de Nassau, celui des Maisons ducales de Saxe, celui de Würzburg, celui de Lippe et d’Anhalt, et celui de Schwarzburg, Reuss et Waldeck, se mettent en marche pour se réunir le 20 mars à Würzburg, où le maréchal duc d’Auerstaedt, sous les ordres duquel doivent se trouver ces régiments, aura son quartier général.

 


 

Paris, 4 mars 1809

 

A Charles-Frédéric, Grand-Duc de Bade, à Karlsruhe

 

Mon Frère, les nouvelles que je reçois de Vienne me font juger convenable de réunir sans délai les troupes de la Confédération. Il est donc nécessaire que Votre Altesse Royale donne des ordres pour que ses troupes, infanterie, cavalerie et artillerie, soient réunies à Rastadt et à Pforzheim du 15 au 20 mars, savoir : trois régiments d’infanterie de ligne complets, un bataillon d'infanterie légère, un régiment de cavalerie et douze pièces d'artillerie. Le 15 mars le maréchal duc de Rivoli sera rendu à Strasbourg, où il portera le quartier général du corps d'observation du Rhin, dont les troupes de Votre Altesse font partie.

 


Paris, 4 mars 1809

 

A Frédéric, roi de Wurtemberg, à Stuttgart

 

Monsieur mon Frère, les nouvelles que je reçois de Vienne me font juger convenable de réunir sans délai les troupes de la Confédération. Il est donc nécessaire que Votre Majesté donne des ordres pour que ses troupes, infanterie, cavalerie et artillerie, soient réunies du 15 au 20 mars, et cantonnées entre Aalen, Neresheim et Heidenheim. Dans peu de jours, le ministre de Votre Majesté recevra une note de mon ministre des relations extérieures, qui lui fera connaître l'état des choses et la convaincra de l'injustice et de la folie de l'Autriche.


Paris, 4 mars 1809

 

A Maximilien-Joseph, roi de Bavière, à Munich

Monsieur mon Frère, les circonstances me font juger convenable de réunir les contingents de la Confédération. Le 15 mars le quartier général du maréchal duc de Rivoli, commandant le corps d'observation du Rhin, sera à Strasbourg, prêt à passer le Rhin si les circonstances le rendent nécessaire. Le maréchal duc d'Auerstaedt aura son quartier général le 20 mars à Würzburg, et tout son corps d'armée sera réuni de Bamberg à Bayreuth. Tous les contingents de la Confédération ont ordre de se réunir.


Paris, 4 mars 1809

A Louis X, Grand-Duc de Hesse-Darmstadt, à Darmstadt

Mon Frère, les nouvelles que je reçois de Vienne me font juger convenable de réunir sans délai les troupes de la Confédération du Rhin, Il est donc nécessaire que Votre Altesse Royale donne des ordres pour que ses troupes soient réunies à Mergentheim le 20 mars, savoir : quatre bataillons d'infanterie de ligne, deux bataillons d'infanterie légère, trois escadrons de chevau-légers et une artillerie de six pièces de canon. Le 12 mars le maréchal duc de Rivoli sera rendu à Strasbourg, où il portera le quartier général du corps d'observation du Rhin, dont les troupes de Votre Altesse font partie; je la prie de lui en faire envoyer l'état de situation.


Paris, 4 mars 1809

DÉCISION

Je viens d'être informé que le général Jacopin, l'un des deux généraux de brigade que Sa Majesté m'a ordonné d'envoyer au corps du général Oudinot, se trouve par sa mauvaise santé hors d'état de pouvoir servir en ce moment à l'armée.

J'ai l'honneur de proposer à Sa Majesté pour le remplacer l'un des deux généraux de brigade Dalesme et Sarrazin que j'avais présentés en concurrence avec cet officier général et le général Lesuire qui est parti pour sa nouvelle destination.

Le général Sarrazin est

incapable. Je ne connais

pas l'autre général. Il faut

de bons généraux au corps

du général Oudinot

(Brotonne)


Paris, 5 mars 1809

 

Au vice-amiral Decrès, ministre de la marine, à Paris

 

Monsieur le Vice-Amiral Decrès, envoyez-moi, dans la journée, une relation de la sortie de l’escadre de Brest et du combat des frégates, afin que je la fasse mettre demain dans le Moniteur.


Paris, 5 mars 1809

A Eugène napoléon, vice-roi d’Italie, à Milan

Mon Fils, le 1er régiment de ligne italien a quatre bataillons en Italie, le 2e en a deux, le 3° en a quatre; ces trois régiments feront dix bataillons, qui, avec l'infanterie légère, pourront former une division active. Il faut presser le retour des 1er et 3e bataillons du 8c de ligne, qui sont à Tarente. Le 4e de ligne a 1,400 hommes en Italie. Vous verrez, par le décret que je viens de prendre et que vous enverra Aldini, que je donne ordre qu'il soit formé en Italie un nouveau 3c bataillon, en remplacement de celui qui est en Espagne avec les deux premiers, parce que j'évalue que les pertes que ce régiment aura faites en Espagne mettront dans le cas d'incorporer ce 3c bataillon dans les deux premiers. Par ce moyen, ce régiment aura en ligne, en Italie, le nouveau 3e bataillon et le 4c.

 

J'ordonne que le 5c de ligne, qui a quatre bataillons en Espagne, soit réduit à trois; il sera formé un nouveau 4e  bataillon en Italie. J'ai donné ordre que le 3c bataillon du 6e de ligne soit incorporé dans les deux premiers et que le cadre rentre en Italie. Prenez des mesures pour que ce régiment ait en Italie les 3c et 4c bataillons au grand complet et prêts à entrer en campagne. Faîtes rentrer à Livourne les deux bataillons qui sont à l'île d'Elbe. Le 7c régiment n'a que trois bataillons; j'ordonne que le 4e et le 5c soient formés. J'ordonne que les trois premiers bataillons du 1er régiment d'infanterie légère, qui sont en Espagne, soient réduits à deux; un nouveau 3e bataillon sera formé en Italie. J'ordonne la même mesure pour les trois bataillons du 2c d'infanterie légère. Cela fera donc onze bataillons, tant d'infanterie légère que d'infanterie de ligne, à mettre en campagne. Il faudra reformer sept nouveaux bataillons; alors l'armée d'Italie, composée de dix régiments, se trouvera avoir cin­quante bataillons, savoir : douze en Espagne, deux aux Sept-Îles, un en Dalmatie et trente-cinq en Italie, dont vingt-cinq bataillons de guerre et dix de dépôt. Faites organiser sans délai ces bataillons. Il est de la plus grande importance que mes divisions soient complétées, car les dispositions de l'Autriche deviennent de plus en plus hostiles. Complétez les deux escadrons de chasseurs du Prince royal, ce qui, avec les cadres des dragons de la Reine, formera six escadrons. Il faut donner ordre que le 4e escadron des dragons Napoléon soit incorporé dans les trois premiers, qui sont en Espagne, et que le cadre revienne en Italie; cela vous fera sept escadrons pour l'armée, ce qui devrait former 1,400 chevaux.

Faites effacer des contrôles, pour être portés à la suite, les hommes qui seraient prisonniers de guerre. Je vois qu'il manque au complet encore 9.400 hommes; il faut me proposer des mesures pour les compléter sans délai.

 


 

Paris, 6 mars 1809.

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

Monsieur le Vice-Amiral Decrès, j'ai reçu votre lettre sur les allé­gations du contre-amiral Willaumez. Je désirerais avoir la copie de la lettre que vous a écrite le préfet maritime de Brest, et dans la­quelle il assure que des signaux ont été faits. Pourquoi n'a-t-il pas envoyé un courrier ? Du 21 à la pointe du jour au 22 à cinq heures du soir, cela fait trente-six heures; et il n'y a de Brest à Lorient que trente-cinq lieues, route qu'un courrier aurait pu faire en douze heures. Pourquoi n'a-t-il pas établi des signaux par batteries de canon, puisqu'il est prouvé que la transmission des signaux par les télégraphes n'est pas sûre ? Si tout ceci avait été bien mené, comme le comportait le bien de mon service, on aurait été prévenu à Lorient le 21, avant la fin de la journée à Rochefort. Je ne vois pas non plus ce qui a empêché le contre-amiral d'appareiller de l'île d'Aix, ni ce qui a pu l'autoriser à passer la nuit dans une rade où la sûreté de son escadre était exposée. Quant au capitaine Bergeret, je ne vois pas ce qui peut l'excuser de n'avoir pas appareillé; il devait appareiller avec un vaisseau, s'il n'avait qu'un vaisseau disponible. Je crois vous avoir mandé d'appeler le contre-amiral Willaumez et le  capitaine Bergeret, pour rendre compte de leur conduite.

Vous avez dû expédier un courrier au contre-amiral Allemand, pour qu'il aille prendre le commandement de mon escadre de l'île d'Aix. Faites-moi un rapport sur la situation actuelle de celte esca­dre; je désire savoir si je puis encore m'en servir pour envoyer des secours à mes colonies, qui en ont grand besoin. Cette expédition serait d'autant plus utile que j'ai des troupes à l'île d'Aix, el qu'il serait possible d'embarquer sur l'escadre environ 2,000 hommes; ce qui mettrait la Martinique à l'abri de tout  évènement.

Je suppose que vous avez fait passer les équipages des Sables sur les frégates que j'ai à  Nantes; ainsi, à l’heure qu’il est, les frégates la Clorinde et la Renommée doivent être prêtes à partir. Donnez ordre qu’on profite de ce moment  où il n’y a pas de croisière devant Lorient pour y faire passer le Vétéran. Vous aurez sans doute donné l’ordre que le vaisseau l'Eylau soit armé avec l'équipage de nos frégates; ainsi je suppose que j'aurai prêtes à partir de Nantes deux frégates, la Clorinde et la Renommée et de Lorient l'Eylau et le Vétéran et la corvette la Diligente. Mon intention n'est donc pas d'envoyer aucun homme de mon escadre de Boulogne à Nantes, ni au Havre. Je désire ne retirer de Boulogne que ce qui est nécessaire pour armer mon escadre de Flessingue et la porter à dix vaisseaux. Présentez-moi un projet de décret là-dessus. La perte du Jean-Bart doit donner des marins disponibles pour armer le Triomphant. Donnez des ordres et prenez des mesures pour que le Triomphant soit mis en rade avant le 15 avril, et que l'équipage du Jean-Bart lui soit destiné. Envoyez­ moi un état de la situation de ma marine au 1er mars. Les frégates la Clorinde et la Renommée se rendront à Cayenne et ensuite croise­ront. Les troupes d'embarquement à Bayonne, à Bordeaux, à la Rochelle, à Lorient et au Havre ne manquent point. Présentez-moi à signer les ordres pour la partance de ces bâtiments.

Activez les armements à Bayonne, afin que, cet été, je puisse envoyer des mouches et des bricks dans mes colonies. Faites faire des paquets de gazettes contenant les nouvelles des événements d'Espagne et les proclamations du Roi. Écrivez même à M. Laforest, à Madrid, pour qu'il demande aux ministres du Roi les paquets qu'ils auraient à faire passer aux colonies. Beaucoup de lettres qui arrivent en Espagne disent que ces colonies sont encore très-incertaines, et que les gens de bon sens y prévoient l'issue qu'auront les événements d'Espagne.

Réitérez à mon escadre de Flessingue l'ordre de se tenir prête à partir. Mandez à l'amiral qu'il visite lui-même les batteries de la côte, pour s'assurer qu'elles sont en bon état.


Paris, 6 mars 1809.

Au général Clarke, comte d’Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Faites-moi un projet de lettres patentes sur parchemin, avec le grand sceau de l'État, qui donne le commandement de Palmanova au général Walther .

Après la formule et le préambule d'usage, qu'il lui soit ordonné expressément de ne s'éloigner de l'intérieur de la place que d'une portée de fusil, et tout au plus d'une portée de fusil; qu'il est spécialement chargé de conserver le complet de l'organisation, de la surintendance, des approvisionnements d'artillerie et des magasins; qu'il ne doit, sous aucun prétexte, rendre la place. Investi et assiégé, être sourd à tout ce que l'ennemi pourra dire: que les Français repassent les Alpes, que Paris est pris, etc., etc. En général, peu de communications avec l'ennemi.

Enfin il perdra notre estime, encourra la rigueur des lois qui condamnent à mort lui et tout l'état-major s'il livre la place, même quand les deux lunettes seraient prises, le corps de la place ouvert. Que si l'ennemi avait fait sauter la contrescarpe, il doit alors retrancher le bastion et s'exposer aux hasards d'un assaut. Que la vie d'un Français n'est rien en comparaison de son honneur et qu'il ne doit pas avancer la reddition d'une heure, sous prétexte d'une rédaction honorable.

Rédigez ces lettres patentes avec soin; elles serviront de lettres patentes pour les autres places.


Paris, 6 mars 1809.

Au général Clarke, comte d’Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

12,000 prisonniers arrivent de Saragosse. Il en meurt 3 à 400 par jour; ainsi on peut calculer qu'il n'en entrera pas en France plus de 6,000. Mon intention est que les officiers soient séparés et envoyés du côté du nord. Quant aux soldats, vous en ferez diriger 4,000 sur Niort, où on les emploiera au desséchement des marais de cette côte. Ils seront répartis de la manière suivante: 1,000 à Niort, 1,000 à Saintes, 1,000 à la Rochelle, et 1,000 à Rochefort.

Ces prisonniers seront sous les ordres du général Dufour, qui les fera garder par la brigade qu'il réunit en ce moment. Le cinquième mille sera envoyé en Dauphiné, où il sera employé aux travaux de desséchement ordonnés dans cette contrée. Enfin le sixième mille sera dirigé sur le Cotentin, où il travaillera au desséchement des marais. Vous recommanderez un régime sévère, et que des mesures soient prises pour faire travailler ces individus de gré ou de force. Ce sont pour la plupart des fanatiques qui n'exigent aucun ménagement. Commencez par donner dans la journée vos ordres au duc de Valmy et au général Dufour, et après concertez-vous avec le ministre de l'intérieur.

(Lecestre)


Paris, 6 mars 1809.

A Alexandre, prince de Neuchâtel, major-général, à Paris

Mon Cousin, prévenez le maréchal duc d'Auerstaedt que j'ai donné ordre à M. Otto de demander au roi de Bavière qu'il soit fabriqué un million de rations de biscuit, savoir : 200,000 à Ulm, 200,000 à Ingolstadt, 200,000 à Passau, 200,000 à Augsbourg et 200,000 à Munich. Chargez le maréchal de tenir la main à l'exécution de cette disposition. Donnez ordre au duc d'Auerstaedt de faire diriger sur le point le plus près du Danube, soit sur Ratisbonne, sur Ingolstadt, soit sur Neuburg ou Donauwoerth, la plus grande partie des souliers et biscuit qui sont dans les magasins de l'armée d'Allemagne. Il y a des souliers à Magdeburg, à Hanovre: il faut les faire venir; il faut faire venir ce qu'il y a dans les magasins de Stettin, de Glogau et de Küstrin. Il y a aussi des souliers à Mayence; il faudrait les diriger sur Ulm. Les magasins de Magdeburg contiennent 5,000 habits d'infanterie et d'artillerie, 1,200 vestes, 1,600 capotes, 10,000 chemises, etc. Faites diriger tout cela sur Ulm et Donauwoerth. Il y a 400,000 rations de biscuit à Magdeburg, 200.000 à Forsheim, 160.000 à Kronach, 130.000 à Bamberg, 220.000 à Würzburg, total, 1.110.000 rations ; je ne parle pas de ce qui est à Dantzig, Stettin, Gloggau, Küstrin. Il serait bon de diriger une grande partie de ces magasins sur Donauwoerth. Mon intention est que le premier magasin de l’armée du Rhin soit formé à Donauwoerth. Il y aura sur ce point un magasin d’habillement, un magasin de subsistances et un magasin de cartouches. De là, ces effets pourront être dirigés sur le Danube, selon les ordres que je donnerai.


Paris, 6 mars 1809

A Joseph Napoléon, roi d’Espagne, à Madrid

Mon Frère, je reçois votre lettre du 25. Pourquoi le maréchal Ney n'enlève-t-il pas les Asturies ? A quoi sert-il qu'il borde la côte ? Si les neiges ne rendent pas le pays impraticable, il devrait déjà l'avoir soumis.


Paris, 6 mars 1809

A Louis Napoléon, roi de Hollande, à La Haye

Mon Frère, je m'empresse de vous annoncer que j'ai jugé convenable de nommer le prince Napoléon-Louis, votre fils, grand-duc de Berg.


Paris, 6 mars 1809

A M. de Lespinay, officier d’ordonnance de l’Empereur, à Paris

Monsieur Lespinay, vous vous rendrez en toute diligence à Metz. Vous vous informerez si la division de quatre ·régiments westphaliens est arrivée dans cette place. Vous verrez dans quel état elle est et quelle tournure ont les hommes. De là, vous irez à Mayence. Vous m'enverrez de cette ville l'état de situation des troupes qui s'y trouvent, celui du régiment de marche de l'armée du Rhin, en me faisant connaître leur tenue et s'il ne leur manque rien. Vous me ferez, de Mayence comme de Metz, un rapport par écrit. Vous continuerez votre route sur Dresde, et si le Roi n'y est pas, vous irez jusqu'en Pologne, à Varsovie, où vous resterez deux ou trois jours, et vous me rapporterez la réponse à la lettre ci-jointe que vous remettrez au roi de Saxe. Arrivé à Erfurt, vous remettrez la lettre au roi de West­phalie à l'officier qui commande dans celle place, pour qu'il l'envoie à  Cassel par un exprès. Vous me ferez connaître de Dresde, par un rapport, ce que fait l'armée saxonne et dans quel état elle est.


Paris, 6 mars 1809

A Frédéric-Auguste, roi de Saxe, à Dresde

J’envoie à  Voire Majesté, mais pour elle seule, la conversation qui vient d'avoir lieu entre M. de Champagny et M. de Metternich, qui lui fera connaître l'état des choses. Celle déclaration a été suivie d'effets; car, depuis, il m'est revenu tous les jours de Trieste, de Munich, de Dresde, de Vienne et de différents points de l'Autriche, que tout est sur pied. Je me suis donc décidé à faire un appel aux troupes de la Confédération. J'ai dû faire lever mes cantonnements de la Saône, du Rhône et de la Meurthe, et faire passer le Rhin à des troupes que j'avais destinées aux camps de Boulogne et de Toulon, et que les mouvements hostiles de l'Autriche m'avaient fait arrêter au milieu de la France. J'ai ordonné au prince de Ponte-Corvo de se rendre à Dresde, pour prendre le commandement d'un corps d'armée dont le contingent de Votre Majesté fait partie. Ainsi, au 20 mars, quand Votre Majesté recevra cette lettre, j'aurai des armées à Ulm, à Bamberg, à Augsbourg et sur tous les points de la Confédération, pour en protéger le territoire. L'empereur de Russie est aussi étonné que moi de l'esprit de vertige qui s'est emparé des Autrichiens. Ses troupes doivent s'être approchées des frontières de la Hongrie.

Votre Majesté donnera sans doute le commandement des troupes polonaises au prince Poniatowski; en attendant que les affaires se décident, il faut qu'elles menacent la Galicie; ce qui obligera les Autrichiens à y tenir des forces considérables. Les postes de cavalerie polonaise doivent s'avancer le plus possible vis-à-vis Cracovie,  sans quitter cependant le territoire du duché. Je ne vois pas d'inconvénient à ce que Votre Majesté en retire tous les Saxons qui s'y trouvent pour les réunir à Dresde, en laissant à Danzig ce qui s'y trouve, et les garnisons des places de l'Oder. Encore Votre Majesté pourrait-elle retirer de Danzig son beau régiment de cuirassiers, et, par ce moyen, tâcher de compléter une trentaine de mille hommes, à Dresde, des troupes de Votre Majesté, qui mettent son pays à l’abri de toute incursion.

Ces préparatifs vont tous nous ruiner. L’Autriche est en train de se ruiner depuis longtemps. Tout ceci amènera-t-il la guerre ? C’est ce qui est encore douteux. Quant à moi, je n'ai point envie d’attaquer, car je n'ai pas l'habitude de me battre sans raison. J’attendrai que le mystère de la conduite de l'Autriche soit expliqué, el qu'on voie l'issue que tout ceci doit avoir.


Paris, 6 mars 1809

A Jérôme Napoléon, roi de Westphalie, à Cassel

Mon Frère, je reçois votre lettre du 1er mars. Les armes de la division Morio vous seront renvoyées de Metz; je la ferai armer avec des armes françaises. J'ai donné ordre au prince de Ponte-Corvo de porter son quartier-général à Hanovre. Les Saxons prennent position devant Dresde. Le duc d'Auerstaedt réunit tout son corps d'armée à Bamberg. Le maréchal duc de Rivoli sera le 20 mars à Ulm, avec un corps venant de France. Les Bavarois campent, en trois divisions, à Munich, à Straubing et à Landshut; les Wurtembergeois, à Nereisheim; les troupes de Hesse-Darmstadt, à Mergentheim; les Badois, à Pforzheim. Les régiments de Nassau, des Maisons ducales de Saxe et des autres petits princes se dirigent sur Würzburg, où le duc d'Auerstaedt aura, le 20 mars, son quartier général. Je laisserai reposer, pendant quelques jours, votre division à Metz, et, quand on m'aura rendu compte de sa situation, je verrai quel parti j'aurai à prendre.

Renforcez vos troupes le plus possible, pour pouvoir d'abord maintenir l'ordre chez vous, réprimer une insurrection qui éclaterait dans le Hanovre, et même, si vous aviez un corps respectable, vous porter où les circonstances l’exigeraient. Si vous pouvez former un corps de 10,000 hommes et de 1,500 chevaux avec douze pièces d'artillerie, vous pourrez faire parler de vous d'autant plus glorieusement que vous agirez avec vos propres troupes. Mais il ne faut point lever trop de corps, car je ne sais pas jusqu'à quel point on peut se fier aux soldats que vous avez.

La Russie fait marcher ses armées sur les confins de l'Autriche. La Prusse, du moins la Cour, paraît vouloir se bien comporter.

Envoyez-moi, tous les cinq jours, un état de situation de vos troupes fait dans la forme de celui-ci. Ayez soin d'y faire mettre le nombre de compagnies et de bataillons par régiment.


Paris, 6 mars 1809

A Frédéric, roi de Wurtemberg, à Stuttgart

Monsieur mon Frère, je reçois la lettre de Votre Majesté du 2 mars; elle s'est croisée avec celle par laquelle je lui mandais que le maréchal duc de Rivoli serait le 20 mars à Ulm avec un corps d'armée assez considérable, dont une partie passera le Rhin à Huningue, du 12 au 15, et l'autre partie à Strasbourg, à la même époque. Votre Majesté a dû recevoir l'avis de la réunion de ces troupes. L'empereur Alexandre a témoigné à M. de Schwarzemberg son étonnement des mouvements de l'Autriche; et ce prince m'annonce avoir fait marcher des troupes sur les confins de la Hongrie. Je crois avoir déjà mandé à Votre Majesté que le duc d'Auerstaedt aura, le 20 mars, son quartier général à Würzburg. J'envoie le duc de Danzig pour prendre le commandement des troupes bavaroises qui sont campées à Munich, à Landshut et à Straubing. Les troupes de Hesse-Darmstadt seront réunies à Mergentheim, et les troupes de Bade à Pforzheim, à la même époque.

PS. Le prince de Ponte-Corvo se porte pour couvrir Dresde, où le roi de Saxe fait réunir 30,000 hommes.


Paris, 6 mars 1809

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Milan

Mon Fils, je reçois votre lettre du 25 février à six heures du soir. Toute 1’Autriche est en mouvement. J’ai requis toutes les troupes de la confédération. Les divisions Saint-Cyr, Legrand, Molitor et Boudet, se portent sur Ulm, sous les ordres du maréchal duc de Rivoli. Le Corps d’Oudinot est à Augsbourg; la division de cuirassiers Espagne est avec ce corps. Le duc d’Auerstaedt reste avec son corps d’armée sur les frontières de la Bavière. Il paraît que les Autrichiens ont perdu la tête. Les Russes et moi sommes réunis. L’armée russe campe sur les frontières de l’Autriche. Ayez soin de répandre et de faire mettre dans les journaux des nouvelles qui fassent connaître que les Russes et nous, sommes ensemble. Il n’est pas convenable qu’aucun officier français passe sur le territoire autrichien pour se rendre en Dalmatie. Si le général Vignolle est à Milan, gardez-le, c’est un bon officier qui connaît l’Italie, et qui sera plus utile qu’en Dalmatie.

 

(prince Eugène)


Paris, 6 mars 1809

Au général Caulaincourt, ambassadeur à Saint-Pétersbourg

J'ai reçu votre lettre du 3 février. J'ai vu avec plaisir les détails que vous me donnez sur la présentation de M. de Schwartzenberg. Cette fameuse lettre à l'empereur d'Autriche dont on se plaint, M. de Romanzoff l'a entre les mains. Si vous ne la connaissez pas encore, vous pouvez lui en demander la communication. Quant aux propos que j'ai tenus à M. de Vincent, ils sont dans le même sens que ceux que j'ai tenus à M. de Metternich devant tout le corps diplomatique. L'Autriche aurait-elle cherché ses principes de conduite dans la fable du Loup et l'Agneau ? Il serait curieux qu'elle m'apprit que je suis l'agneau, et qu'elle eût envie d'être le loup. Le sieur de Champagny vous a expédié un courrier qui vous porte sa conversation avec M. de Metternich. Vous aurez soin de montrer cette pièce à l'empereur. Je vous envoie une lettre de Dresde, qui vous fera connaître jusqu'à quel point on est alarmé à la cour de Saxe; il en est de même à celle de Bavière.

Après la déclaration de M. de Metternich, j'ai dû faire marcher mes troupes, qui étaient en route pour le camp de Boulogne, pour Brest et pour Toulon, mais que les mouvements insensés de l'Autriche m'avaient obligé de faire arrêter sur la Saône et la Meurthe. Depuis cette déclaration, tout est en mouvement sur tous les points de la France. Le 20 mars, le duc de Rivoli sera à Ulm avec 20 régi­ments d'infanterie, 10 régiments de cavalerie, el 60 pièces de canon. Le général Oudinot, avec un corps double de celui qu'il avait dans les campagnes précédentes, c'est-à-dire 18,000 hommes d'infanterie, 8,000 de cavalerie et 40 pièces de canon, est à Augs­bourg. Le duc d'Auerstaedt, avec 4 divisions d'infanterie formées de 20 régiments, une division composée de tous les régiments de cuirassiers, et 15 régiments de cavalerie légère, est à Bamberg, Bayreuth et Würzburg. Les troupes bavaroises forment 3 divisions qui campent à Munich, Straubing et Landshut : cette armée est de 40,000 hommes, et sera commandée par le duc de Dantzig. Les Wurtembergeois sont rassemblés à Neresheim; les troupes de Hesse-Darmstadt à Mergentheim; celles de Bade, au nombre de 6,000 hommes, sont à Pforzheim. L’armée saxonne, forte de 30,000 hommes, se réunit à Dresde. Le prince de Ponte-Corvo s'y porte avec des troupes de Saxe. Le roi de Westphalie commandera une réserve prête à se porter partout où cela sera nécessaire. Le prince Poniatowski commande les Polonais, qui appuient leur gauche à Varsovie et étendent leur droite jusque devant Cracovie. Dans peu de jours, je fais partir de Paris 1,500 chevaux de ma garde, ainsi que 3,000 hommes d'infanterie. Tout le reste est en route. La tête a déjà passé Bordeaux. Mon armée de Dalmatie cam­pera sur les confins de la Croatie, ayant son quartier général à Zara, où elle a un camp retranché et des vivres pour une année. L'armée d'Italie, composée de 6 divisions d'infanterie française et de 2 divi­sions d'infanterie italienne, sera réunie à la fin de mars dans le Frioul. Elle approche de 100,000 combattants. Les Autrichiens s'apercevront que nous n'avons pas tous été tués sur le fameux champ de bataille de Roncevaux.

 

Tout ce qui arrive de Vienne n'est que folie. Je compte que l'empereur Alexandre tiendra sa promesse et fera marcher ses armées. Alors, si l'Autriche veut en tâter, j'ai fort en idée que nous pourrons nous réunir à Vienne. Le sieur de Champagny vous expé­diera demain un courrier, par lequel vous recevrez la note qui va être remise à M. de Metternich; elle vous fera connaître l'état de la question. Les Anglais ont publié les pièces de la négociation et la lettre d'Erfurt. Tout cela est tronqué et falsifié: ce qui m'oblige à faire une communication au Sénat, afin de rétablir le texte de toutes ces pièces. Ayez le ton haut et ferme envers M. de Schwart­zenberg. L'état actuel des choses ne peut durer. Je veux la paix avec l'Autriche, mais une paix solide, et telle que j'ai droit de l'exiger, après avoir sauve trois fois l'indépendance de cette puissance.

J’ai fait sortir ma flotte de Brest. J'avais pour but de faire débloquer Lorient, afin d'en faire sortir 5 vaisseaux: que j'envoie dans les colonies. Cette première opération a réussi. Secondement, la flotte devait se rendre à Rochefort, pour se joindre à l'escadre de l'île d'Aix et s'emparer de 4 vaisseaux anglais qui avaient eu la sottise de venir mouiller dans la rade du Pertuis-Breton. Mon imbécile de contre-amiral s'est amusé à chasser 4 vaisseaux ennemis qu'il a rencontrés sur sa route, ce qui a donné aux 4 autres vais­seaux qui étaient à l'ancre le temps d'être avertis et de gagner le large. On ne les a manqués que de quelques heures, et leur prise eût été infaillible sans cette perte de temps; mais la jonction a eu lieu à l'île d'Aix, et j'y ai 16 vaisseaux de ligne et 5 frégates. Si le camp de Boulogne avait été formé, si j'avais eu 30,000 hommes à Brest et 30,000 à Toulon, je donnais de la besogne aux Anglais : c'est ce que j’espérais de mon alliance avec la Russie.

Vous avez vu dans le Moniteur deux lettres du gazetier de Vienne au rédacteur de la Gazette de Hambourg. Ces lettres paraissent peu importantes au premier abord; mais, pour les hommes qui veulent réfléchir, c'est une manière de correspondre avec l'Angleterre et d'entretenir les espérances des ennemis de la France en étalant les forces de la maison d'Autriche. On y parle des dispositions peu favorables de la Russie, parce qu'on sait qu'il ne serait pas possible d'en imposer à cet égard, et qu'en avouant sans détour son alliance avec la France, on veut persuader que l'Autriche est en état de soutenir la lutte contre ces deux empires.

L'Autriche doit désarmer tout à fait et se contenter de nos garanties réciproques, ainsi que M. de Romanoff l'avait proposé. Quant aux provinces de cette monarchie vaincue, je n'en veux rien pour moi: nous en ferons ce que nous jugerons convenable. On pourrait séparer les trois couronnes de l'empire d'Autriche, ce qui serait également avantageux à la France et à la Russie, puisque cette opération affaiblirait en même temps la Hongrie, qui menace la Pologne, le royaume de Bohême, qui jalousera longtemps les pays de la Confédération, et l'Autriche, qui regrette sa domination sur l'Italie.

Quant à la crainte qu'on pourrait inspirer de moi à la Russie, ne sommes-nous pas séparés par la Prusse, à qui j'ai rendu intactes des places que je pouvais démanteler, et ne sommes-nous pas aussi séparés par les États de l'Autriche ?

Lorsque ces derniers États auront été ainsi divisés, nous pourrons diminuer le nombre de nos troupes, substituer à ces levées géné­rales qui tendent à armer jusqu'aux femmes, un petit nombre de troupes régulières et changer ainsi le système des grandes armées qu'a introduit le feu roi de Prusse. Les casernes deviendront des dépôts de mendicité, et les conscrits resteront au labourage. La Prusse en est déjà là : il faut en faire autant de l'Autriche. Quant à l'exécution, je me charge de tout, soit que l'empereur Alexandre veuille venir me joindre à Dresde à la tête de 40,000 hommes, soit qu'il marche directement sur Vienne avec 60 ou 80,000 hommes. Dans toutes les hypothèses, je me charge de faire les trois quarts du chemin.

Si les choses en venaient au point que vous eussiez besoin de signer quelque chose de relatif à la séparation des trois États, vous pouvez vous y regarder comme suffisamment autorisé. Si l'on veut même, après la conquête, garantir l'intégrité de la monarchie, j'y souscrirai également, pourvu qu'elle soit entièrement désarmée. J'ai été de bonne foi à Vienne. Je pouvais démembrer l'Autriche. J'ai cru aux promesses de l'empereur et à l'efficacité de la leçon qu'il avait reçue. J'ai pensé qu'il me laisserait me livrer entière­ment à la guerre maritime. L'expérience, depuis trois ans, m'a prouvé que je me suis trompé, que la raison et la politique ne peuvent rien contre la passion et l'amour-propre humilié. Il serait possible que la Pologne autrichienne pût devenir un objet d'inquié­tude à Saint-Pétersbourg; mais elle n'est un obstacle à rien. On pourrait la partager entre la Russie et la Saxe, ou bien en former un État indépendant.

L'empereur Alexandre doit être convaincu par la déclaration du roi d'Angleterre que, tant qu'il aura l'espoir de brouiller le conti­nent, il n'y aura point de paix maritime, et que, si l'Autriche ne consent pas à désarmer et qu'on perde du temps, c'est autant de temps de gagné pour l'Angleterre et de perdu pour l'Europe. Cepen­dant un, deux ou trois mois me sont égaux; mes troupes resteront campées en Allemagne jusqu'à ce que mon concert avec la Russie soit bien établi. Nous sommes encore dans le mois de mars : on peut parlementer jusqu'au mois d'août; mais, à cette époque, il faut que l'Autriche ait pris son parti ou qu'on l'y force. L'honneur de nos couronnes l'exige, et l'intérêt du monde nous en fait la loi.

(Lecestre)


Paris, 7 mars 1809

Au général Clarke, comte d’Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Général Clarke, la légion portugaise est composée de cinq régiments; ce qui devrait donner dix compagnies de grenadiers et dix de voltigeurs; mais ces régiments sont si faibles, que la plupart n'ont pas même l'effectif de  560 hommes qu'il faudrait, par régiment, pour les compagnies de grenadiers et voltigeurs.

Je désirerais tirer de ces régiments trois bataillons d’élite, qui auraient l’organisation suivante :

1er bataillon : deux compagnies de grenadiers, tirées du 1er régiment, à 120 hommes par compagnie, 240 hommes ; deux compagnies de voltigeurs, tirées du même régiment, 240 hommes ; total 480 hommes.

2e bataillon : une compagnie de grenadiers du 2e régiment, 120 hommes ; une compagnie de grenadiers du 5e régiment, 120 hommes ; deux compagnies de voltigeurs du 2e régiment, 240 hommes ; total : 480 hommes.

3e bataillon : une compagnie de grenadiers du 4e régiment, 120 hommes; une compagnie de grenadiers du 3e régiment, 120 hommes; et deux compagnies de voltigeurs du 4e, 240 hommes; total, 480 hommes;

Ce qui ferait une demi-brigade d'élite d'à peu près 1.500 hommes, qui prendrait le n° 13. Elle serait commandée par le meilleur général de brigade portugais, par un colonel, trois chefs de bataillon; chaque bataillon ayant un adjudant-major et un adjudant sous-officier, et chaque compagnie commandée par quatre officiers.

Vous chargerez le général Muller, s'il est de ce côté, ou le général qui commande la division, de faire sur-le-champ l'organisation de cette demi-brigade et de la diriger sur Besançon.

Aussitôt que les trois bataillons seront formés, on mettra à l'ordre que, ayant eu lieu d'être satisfait de la conduite de la légion portugaise, à son passage à Bayonne et pendant son séjour en France, j'ai voulu en donner une preuve en appelant quelques-uns de ses bataillons à faire partie du corps des grenadiers; que je compte sur leur fidélité et sur leur bravoure; que, si quelque soldat voulait rester, il en est fort le maître, parce que je ne veux que des hommes de bonne volonté.

Présentez-moi un projet de décret pour cette formation, et consultez le général Mathieu Dumas, qui vient de faire l'inspection de ces régiments. Donnez des ordres pour que l'on active l'habillement, et que ces hommes partent bien habillés, bien armés et bien équipés.

J'ai deux vues en faisant ceci: d'abord de rendre utiles ces 1,500 hommes, ensuite de dégarnir les provinces méridionales d'un rassemblement trop considérable d'étrangers.

Présentez-moi aussi les moyens d'employer les généraux de brigade portugais, qui pourraient être plus utiles ailleurs qu'en restant là oisifs. Vous ne laisserez que les officiers supérieurs strictement nécessaires pour commander les légions. Enfin donnez ordre aux autres bataillons portugais de se recruter, pour que je puisse les appeler  aussi à l'artillerie, lorsqu'ils seront complets. Autorisez-les, à cet effet, à recevoir des Espagnols, des Portugais, des Suédois, des Prussiens, tous déserteurs quelconques. Proposez-moi d'envoyer un cadre à Strasbourg, où il sera plus à portée de recevoir les déserteurs et d'arriver promptement à son complet.


Paris 8 mars 1809

Au général Clarke, comte d’Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le général Clarke, j'ai au delà du Rhin dix-sept régiments de cavalerie légère; mon intention est de prendre tous les moyens pour porter chacun de ces régiments à une force d'environ 900 ou 1,000 hommes. Pour cela, il y a deux moyens : d'abord, envoyer aux dépôts de ces dix-sept régiments l'ordre de diriger sans délai tout ce qu'ils ont de disponible sur Strasbourg, où les détachements seront organisés en escadrons de marche pour rejoindre les escadrons de guerre; le deuxième moyen, c'est de prendre dans les dépôts des régiments de chasseurs et de hussards qui sont en Espagne tout ce qui est disponible, pour renforcer les régiments des armées d' Allemagne et les y incorporer.

Pour le premier moyen, il suffit d'un simple ordre, que vous expédierez aux dépôts des 5e, 7e, 8e et 9e de hussards, et à ceux des 1er, 2e, 3e,  7e, 11e, 12e, 13e, 16e , 20e de chasseurs, d'envoyer à Strasbourg tout ce qu'ils ont de disponible. Faites-moi connaître combien ces treize régiments pourront envoyer à Strasbourg.

Vous recommanderez au général chargé d'organiser les escadrons de marche d'avoir bien soin de se conformer, pour cette formation, à celle des brigades de cavalerie légère de l'armée du Rhin. En conséquence, il réunira les différents détachements, et escadrons de marche, de la manière suivante, savoir: 1er escadron de marche, composé des détachements des 1er, 2e et 12e de chasseurs,; 2e escadron, des détachements des 5e, 7e de hussards et 11e de chasseurs; 3e escadron, des détachements des 8e de hussards et 16e de chasseurs, 4e escadron, des détachements du 13e de chasseurs;  5e escadron, des détachements des 9e de hussards, 7e et 20e de chasseurs. On dressera procès-verbal de cette opération, et vous m'en rendrez compte à temps, pour que je puisse ordonner le mouvement de ces escadrons au delà du Rhin.

Quant au deuxième moyen, qui est de tirer des dépôts de cavalerie légère de l’armée d’Espagne, j’y ai pourvu par le décret qui vous sera adressé.

Je sais que le 10e, le 22e, et le 26e de chasseurs ne sont pas compris dans cette mesure ; mais ces trois régiments exigent un rapport particulier, vus qu’ils peuvent me fournir un ou deux escadrons, et que je serai toujours à temps de les faire agir sans incorporation.

Quant aux cinq régiments qui ont leurs dépôts en Piémont, j’ai ordonné que ces dépôts dirigeassent sans délai des détachements sur Plaisance. Donnez ordre que de Plaisance ces détachements continuent leur route sur Vérone. Le 15e de chasseurs, ayant ses esca­drons de guerre en Espagne, incorporera dans le 14e les 100 hommes qu'il a disponibles à son dépôt.

Lorsque toutes ces opérations seront terminées, je désire que vous me fassiez connaître quel sera l'effectif de mes dix-sept régiments de cavalerie légère en Allemagne.

Je désirerais avoir en Allemagne 14,000 chasseurs ou hussards, 13,000 cuirassiers et 3,000 dragons; total, 30,000 hommes de cavalerie. J'attends votre rapport sur les dragons, pour la formation des quatre ou cinq régiments provisoires de dragons.

Chargez le général sénateur Beaumont de se rendre à Strasbourg, pour y être spécialement chargé de la formation de cette division.


Paris, 8 mars 1809

Au général Clarke, comte d’Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

J'ai formé seize cohortes de 10,000 conscrits de ma Garde. Présentez-moi la nomination de quatre élèves de l'école militaire de Saint-Cyr pour remplir les places de sous-lieutenant dans chacune de ces cohortes; ce qui fera l'emploi de 64 élèves. Ces jeunes gens seront sons les ordres des officiers de ma Garde, les aideront à former les conscrits el rempliront le rôle d'adjudant. Ils pourront servir aussi à marcher avec les détachements pour les régiments où ils auront une destination définitive; ce qui, avec les 104 élèves nécessaires pour les 5e bataillons, fera 168 élèves que l'école devra fournir cette année. Présentez-moi 168 jeunes gens pour remplacer ceux-là à Saint-Cyr.

Faites-moi connaître ce que l'école de la Flèche et les lycées pourraient fournir.  J'ai quarante lycées; si chacun peut fournir 10 élèves âgés de dix- huit ans, ce serait 400 caporaux fourriers que j'enverrais, 200 dans les différents régiments, et 200 dans les corps de l'armée du Rhin. Il faut voir si l’École polytechnique ne pourrait pas fournir une cinquantaine d'officiers. Faites demander aussi si l'école de Compiègne ne pourrait pas fournir une cinquantaine de jeunes gens âgés de plus de dix-sept ans, pour incorporer dans les compa­gnies d'ouvriers d'artillerie.


Paris, 8 mars 1809

Au général Clarke, comte d’Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

J'ai été voir hier l'école militaire de Saint-Cyr; je l'ai trouvée moins bien qu'à Fontainebleau. Il m'a paru qu'on s'était relâché beaucoup sur la tenue et l'instruction. J'en ai témoigné mon mécontentement au commandant et au vice-connétable, qui aurait dû y faire de fréquentes visites pour s'assurer que l'intégrité des règlements était maintenue.

Il m'a paru mauvais: 1° qu'on n'ait point mis l'infirmerie dans le nouveau bâtiment, au lieu de la placer an milieu des corps de logis; 2° qu'il n'y eut que 18 élèves qui travaillassent à l'équitation. Cependant il y a 18 chevaux qui peuvent servir à exercer 72 élèves. Vous savez le besoin qu'a la cavalerie d'officiers intelligents et connaissant le cheval. Il me semble que tenir un manége pour 18 élèves, c'est ne pas remplir mon but et perdre un temps utile. 3° Je n'ai pu qu'être très-mécontent de voir que les règlements n'étaient point exécutés; que les chambrées étaient détruites, des servants introduits; que les élèves ne vont plus à la cuisine prendre leur ordinaire, et n’apprennent plus à connaître le détail de la vie du soldat, ce qui rend ridicule de les faire manger à la gamelle. 4° Les travaux en terre sont négligés ; aucun élève ne manie la hache ni la pioche; aucun ne sait faire un gabion ou un saucisson. 5° L'artifice est encore plus négligé. La plupart des élèves m'ont dit qu'il fallait une livre de poudre pour faire dix cartouches; on ne leur a donné aucune idée sur la confection des artifices; ils ne connaissent ni la poudre, ni aucune des manières de l'employer. 6° Les détails de l'artillerie sont aussi négligés; les pièces sont sans prolonges. Les élèves n'ont aucune idée des manœuvres de force. Aucun n'a jamais prononcé le mot de but-en-blanc. Beaucoup m'ont dit qu'un fusil portait à dix-huit cents mètres. Aucun n'a idée du poids et de la charge d'un canon. Ils ne savent pas, , comme officiers d’artillerie, ce qu’il importe à un officier d’infanterie de savoir. Ce qu'ils ne sauront qu'avec le temps, on pourrait le leur apprendre en quinze jours avec l'intelligence naturelle à leur âge. Je les ai trouvés plus avancés sur l'administration militaire; mais peu savent ce que c'est que du biscuit, une ration d’eau­ de vie, etc. Quant à des gabions, à des palissades, saucissons, jamais ils n'en ont fait, ni vu faire; aucun n'a manié un outil de pionnier. Je n'ai pas reconnu l'école de Fontainebleau. J'irai visiter cette école tous les mois. Il faut qu'on revienne, en tout et pour tout, à ce qui se faisait à Fontainebleau et ne s'en éloigner en rien. A-t-on pu oublier mes intentions au point de faire entrer en ligne des hommes qui n'ont fait d'exercice qu'en blanc, qui n'ont jamais fait l'exercice à feu, tiré à la cible ? Tandis que j'entendais qu'un élève sortant de l'école militaire tirât comme un chasseur baléare. Il faut que chaque élève use dix cartouches à balle par jour en tirant an but, et apprenne à manier son fusil. En effet, ils ont moins d'expérience et sont plus jeunes que le dernier soldat de la compagnie qu'ils sont appelés à commander. On m'a donné pour raison qu'on n'avait pas de magasin à poudre; mais un seul caisson suffit, et la poudre ne gâte rien, ni ne fait mal à rien. Que, sous quinze jours, il y ait à Saint-Cyr un caisson chargé de vingt mille cartouches à poudre et de dix mille à balle. Les élèves feront les cartouches, les étoupilles, les lances à feu, etc. Qu'une cible soit établie sous quarante-huit heures, et que les 150 élèves qui me sont nécessaires pour entrer dans la ligne tirent dix cartouches à balle par jour. Donnez l'ordre qu'on leur fasse faire des pieux, des palissades, qu'on trace sans retard un ouvrage de for­tification et qu'on les y fasse travailler.

L'artillerie est entièrement négligée à cette école. L'officier qui y est m'a paru peu apte; d'ailleurs il est seul. J'avais établi à Fontainebleau deux maréchaux des logis. Il faudrait un officier d'examen qui portât plus de zèle dans l'instruction des jeunes gens, et auquel vous prescrirez d'employer plusieurs heures par jour à faire répéter aux élèves les détails de l'artillerie et la théorie des armes.

L'officier du génie n'est point logé, parce que, dit-on, il n'y a pas de logement; c'est une mauvaise raison; qu'il soit établi dans le bâtiment de l'École dès lundi prochain, et qu'il fasse travailler ces jeunes gens aux détails d'exécution de son arme. Les ouvrages de campagne doivent être tracés par l'officier du génie; un officier d'infanterie doit lui servir d'aide et diriger les élèves dans les travaux à faire.

Les élèves sont plus instruits sur la première partie de l'administration militaire, mais peu connaissent l'administration d'une armée en campagne; que cette seconde partie soit imprimée sans délai et montrée aux premières classes, et que le commissaire des guerres chargé de cette partie de l'instruction ne découche point.

Il faut que les élèves arrivant à leur corps en sachent plus que les vieux officiers d'infanterie; qu'ils connaissent un peu de mathématiques, un peu de fortification, moins de littérature; pourvu qu'ils sachent écrire, cela leur importe moins que de savoir, à leur entrée au corps, ce qu'ils ne sauront qu'en cinq ou six ans d'expérience, si on ne leur montre point au collège.

Je n'ai pas vu de grue, de chèvres, etc. Donnez des ordres pour que le système actuel soit promptement changé, qu'on en revienne à la stricte exécution des règlements, et pour que je n'aie que des louanges à donner à un établissement qui, sous tant de titres , a des droits à mon approbation, à ma première visite, que je ferai à la fin de mars.


Paris, 8 mars 1809

Au général Clarke, comte d’Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le général Clarke, il y a quelques bandes de voleurs qui s'organisent dans les départements de Maine-et-Loire el de la Sarthe. Donnez l'ordre qu'un chef d'escadron du 26e de chasseurs, et, s'il n'y a pas de chef d'escadron, un capitaine, parte de Saumur avec un escadron de 200 chasseurs, composé d'hommes de choix, et dans lequel il entre beaucoup d'officiers et de sous-officiers, afin de pouvoir former de cet escadron huit pelotons composés de 25 hommes chacun et commandés par un officier. Cet escadron se rendra à Angers, où il sera sous les ordres du colonel de la gendarmerie, et se mettra à la poursuite des brigands.

Mandez au préfet et au commandant de la division cet ordre, que vous enverrez, par un de vos aides de camp, qui ira sur les lieux. Écrivez que j'attends de la bravoure et de l'activité de cette troupe que ces brigands seront bientôt arrêtés.

Je donne ordre au colonel Henry, de la gendarmerie d'élite, de partir demain, à la pointe du jour, avec 80 gendarmes d'élite, pour se rendre en toute diligence au Mans, où il sera rendu en six jours.

Vous donnerez l'ordre, à Tours, au régiment provisoire de dragons qui s'y trouve, de faire partir un chef d’escadron ou un capitaine, avec un escadron de 250 dragons partagés ainsi qu’il suit : un officier et 50 hommes d du 3e, un officier et 50 hommes du 10e ; un officier et 50 hommes du 8; un officier et 50 hommes du 14; un officier et 50 hommes du 25; lesquels se rendront au Mans, où ils seront sous les ordres du colonel Henry.

Vus donnerez ordre au colonel Henry d'être rendu au Mans demain dans la nuit. Il prendra ces 250 dragons qui, avec ses 80 gendarmes d’élite, lui feront 330 hommes, et, de concert avec les 200 chasseurs qui partent de Saumur, il se mettra à la poursuite des brigands de ce département. Vous donnerez au colonel Henry l'ordre de se porter partout où les brigands se réfugieraient, et de ne pas revenir qu'il ne les ait entièrement extirpés; il verra, avant de partir, le ministre de la police, que je charge de lui donner l2,000 francs pour les dépenses extraordinaires et secrètes de cette expédition.

Vous chargerez le colonel Henry d'une lettre par laquelle vous le constituerez commandant d'une colonne mobile pour poursuivre les brigands partout où ils se  réfugieraient.


Paris, 8 mars 1809

Au général Clarke, comte d’Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Je ne puis approuver la mesure que propose le général Morgan de capituler avec les brigands. Un fonctionnaire public ne doit point faire de pacte avec des brigands. Veut-on par cette faiblesse ressusciter la Vendée ? Ordonnez à ce général de rendre compte de sa con­duite et de ne se mêler à l'avenir que de faire exécuter les lois.

(Lecestre)


Paris, 8 mars 1809

Au comte Fouché, ministre de la police générale, à Paris

Il y a des mouvements dans la Mayenne et la Sarthe; il ne faut point jouer avec. J'ai ordonné au ministre de la guerre de faire partir de Tours 250 dragons. J'ordonne qu'on fasse partir demain de Paris 80 gendarmes, qui seront réunis au Mans en six jours, et de Saumur 200 hommes du 26e de chasseurs; ce qui, joint à la gendarmerie du département et de la compagnie départementale, fera une force de 600 hommes. Le colonel de la gendarmerie d'élite Henry sera rendu au Mans demain, dans la nuit. Il viendra prendre vos instructions avant de partir. Vous lui remettrez 12,000 francs pour dépenses secrètes, dont il emploiera la moitié en frais d'espionnage el dépenses secrètes, et l'autre moitié à faire des avances à la troupe, pour qu'elle ne fasse point essuyer de vexations aux habitants et qu'elle soit bien.

Vous lui remettrez des lettres pour les préfets de la Sarthe, de la Mayenne, de Maine-et-Loire, et pour les colonels de gendarmerie. Vans leur ferez connaître que le colonel Henry est constitué commandant de forces mobiles, et qu'ils aient à le seconder dans la recherche et la poursuite des brigands sur le territoire de ces départements, de la division militaire et de toute la légion de gendarmerie. Le colonel Henry ne doit pas revenir que tous les rassemblements ne soient dispersés.


Paris, 8 mars 1809

Au général  Savary, duc de Rovigo, commandant la gendarmerie d’élite, à Paris

Monsieur le Général Savary, il a paru dans le département de la Sarthe trois ou quatre bandes de brigands de dix à douze hommes chacune. Mon intention est que 80 gendarmes d'élite partent demain, à la pointe du jour, et arrivent en six jours au Mans. Ils seront commandés par quatre officiers des plus intelligents. Je donne ordre également que 250 hommes des dragons qui sont à Tours se rendent an Mans (ils y seront dans trois jours), et que 200 hommes du 26e de chasseurs se rendent à Angers. Tontes ces forces, auxquelles se réunira la gendarmerie du pays et, s'il est nécessaire, la garde départementale, formeront plus de 600 hommes.

Donnez ordre au colonel Henry de se rendre demain, avant neuf heures, chez le ministre de la police, qui lui remettra 12,000 francs, dont 6,000 seront pour dépenses secrètes, et 6,000 pour avances à faire aux troupes, afin qu'il n'y ait aucun prétexte pour vexer le pays. Le ministre lui remettra en outre des lettres qui feront connaître aux autorités que je l'ai nommé commandant des colonnes mobiles; enfin il lui remettra une note instructive sur les événements qui se sont passés dans ces deux départements. Vous recommanderez au colonel Henry de s’entendre avec les préfets de la Sarthe et de Maine-et-Loire et avec les commandants de gendarmerie. Il fera donner des cartouches à ses troupes; il les divisera en douze colonnes, chacune de 50 hommes, composée de gendarmes d'élite, de gendarmes du département, de dragons et de chasseurs. Il prendra ainsi ses mesures pour arrêter tous ces brigands; il les poursuivra partout où ils se retireraient, et ne devra point retenir qu'ils ne soient tous pris. Il aura soin de maintenir la plus sévère discipline. Je n'approuve aucune espèce de pardon que s'est permis le préfet de la Sarthe : il n'y a pas de pardon pour les criminels; ils doivent être arrêtés, traduits devant les tribunaux de Paris.

Il est nécessaire que le colonel Henry soit de sa personne, demain dans la nuit, au Mans, pour prendre tous les renseignements sur les lieux et faire toutes les dispositions convenables avant l'arrivée de sa troupe. Il partira après avoir pris les ordres des ministres de la guerre et de la police.


Paris, 8 mars 1809

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Milan

Mon Fils, je suppose que vous avez écrit en chiffre au général Marmont, par terre et par mer, pour lui apprendre mes préparatifs en Allemagne, et lui faire connaître qu'au 20 mars mes armées seront en présence. Je n'ai point l'intention d'attaquer. Je suppose qu'à la même époque les divisions Seras, Broussier, Grenier, Lamarque et Barbou seront en ligne, c'est-à-dire sur la rive gauche de l'Adige. Aussitôt que les probabilités d'hostilités deviendraient plus imminentes, il faudra que Miollis s'approche avec sa division. J'ordonnerai dans ce cas au roi de Naples d'envoyer occuper Rome. Faites connaître au général Marmont qu'il doit choisir et tracer son camp retranché sur les frontières de la Croatie, afin de tenir en échec une force égale à la sienne, ou de ne pas compromettre le pays s'il l'abandonnait.


Paris, 8 mars 1809

A Joachin Napoléon, roi des Deux-Siciles, à Naples

Toutes les troupes autrichiennes sont campées sur les frontières de la Bohême et de la Bavière et couronnent les Alpes Juliennes et l'Isonzo. Vous avez dû recevoir l'ordre du ministre de la guerre de disposer vos troupes de manière à avoir une division disponible pour marcher sur Rome. J'attends que ces dispositions soient faites, pour faire entrer dans la haute Italie les troupes du général Miollis.


Paris, 9 mars 1809

Au comte de Champagny, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur de Champagny, faites connaître à M. de Dreyer que j'ai ordonné qu'il fût remis au roi de Danemark cent milliers de poudre, indépendamment des cent milliers qui lui ont déjà été livrés. Je viens de donner un nouvel ordre pour mettre à la disposition de ce prince trois cents pièces de canon en fer, qui se trouvent dans la Poméranie suédoise, avec affûts, et la moitié des fers coulés de la Poméranie pour approvisionnement.


Paris, 9 mars 1809

A M. Cretet, comte de Champmol, ministre de l’intérieur, à Paris

Monsieur Cretet, mon intention est que le projet du sieur Legrand pour Saint-Denis, qui a été approuvé, soit exécuté et qu'il n'y soit rien changé. Ainsi, au lieu de 500,000 francs, il ne faudra plus que 300,000 francs. Vous avez un crédit de 130,000 francs pour cet objet. Lorsque ce crédit sera épuisé, on pourvoira aux autres 130,000 francs.

Je désire que vous me fassiez le détail des travaux qui doivent coûter les 500,000 francs qu'on demande, pouvoir s'il n'y a pas des économies à faire. Ce qu'on propose me paraît une folie: on propose de faire un rang de chapelles parallèles. J'ai été à Saint­ Denis, je n'y ai vu que deux choses à faire, le carrelage el le revêtement en marbre de deux colonnes. Voyez si vous pouvez, avec le crédit que vous avez, faire faire ce carrelage et revêtir de marbre les colonnes. Faîtes faire la statue de Charlemagne en marbre. Mon intention est que le Chapitre puisse officier le 1er août prochain.

Il restera à voir ce qu'on doit faire des bâtiments. La nature des choses demande un établissement religieux; on peut y établir, ou les Sœurs de la charité, ou l'école normale, ou le séminaire métropolitain de Paris, ou tout autre établissement de ce genre. Faites-moi un rapport là-dessus. Faites-moi aussi un rapport sur Sainte­ Geneviève; il ne faut point qu'on m'entraîne dans de folles dépenses.


Paris, 9 mars 1809

Au comte Régnier, Grand-Juge, ministre de la justice, à Paris

Vous écrirez aux procureurs criminels de Mayenne, Sarthe et Maine-et-Loire que des crimes ont été commis ce mois sur divers points de ces départements, concernant des individus affiliés, des chefs de bandes organisées. Les magistrats paraissent pactiser avec ces brigands et accorder l’impunité à leurs crimes. Ni préfets ni généraux n’ont le droit de faire grâce et de faire taire le respect des lois. Poursuivre les individus réunis en bandes  et criminels de crimes quelconques  compromettant la société et l’État.


Paris, 9 mars 1809

Au général Clarke, comte d’Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Général Clarke, je reçois votre rapport du 8. Je vois que l'artillerie, les bataillons du train, qui sont en Allemagne, manquent de soldats. Ne serait-il pas possible de tirer de ceux d'Espagne, qui sont trop considérables, des hommes pour les incorporer dans les premières compagnies ? .Je l'ai fait pour les régiments de chasseurs et de hussards. Cela porterait au complet les bataillons du train en Allemagne.

Le général Lemoine est nommé commandant d'armes de Wesel.


Paris, 9 mars 1809

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

Monsieur le Vice-Amiral Decrès, je désire avoir un des bataillons de la flottille à l'armée du Rhin. Voici quel serait mon but; faites­ moi connaître s'il serait rempli. 1,200 marins seraient fort utiles cette année pour le passage des rivières et pour la navigation du Danube. Mes marins de la Garde m'ont rendu de grands services dans les dernières campagnes, mais ils faisaient un service qui était indigne d'eux. Les marins qui composent les bataillons de la flottille savent- ils tous nager ? Sont-ils tous capables de mener un bateau dans une rade ou dans une rivière ? Savent-ils l'exercice d'infanterie ? S'ils ont cette instruction, ils me seront fort utiles. Il faudrait envoyer avec eux quelques officiers d'artillerie de marine et une centaine d'ouvriers avec leurs outils. Ce serait d'une grande ressource pour le passage el la navigation des rivières.


Paris, 9 mars 1809

Au vice amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

Je vois qu'il n'y a plus de vaisseaux en construction. Je vois que les ateliers diminuent beaucoup. Si les trois bâtiments qui sont à la mer éprouvaient un accident, ils ne seraient pas réparés cette année. Il doit y avoir à Anvers neuf vaisseaux; il n'y en a que sept. Quand le Conquérant et le Superbe seront-ils commencés ? Combien à l'eau cette année ? Le Tilsit et le Friedland pourront-ils être finis celle année et porter Flessingue à douze vaisseaux ? A Brest, il n'y a plus rien sur le chantier; serait-il possible de finir le Nestor ? A Lorient, il n'y a plus que trois vaisseaux sur le chantier ; il n’y en a jamais eu moins. A Rochefort, il n'y en a que trois, Je suppose que le Triomphant pourra remplacer le Jean-Bart, et que vous mettrez à l'eau l’Iéna pour remplacer un des vaisseaux de l'escadre qui aurait des accidents et maintenir Rochefort à onze vaisseaux. Il faudrait commencer à élever un autre bâtiment sur le chantier à Toulon. Je ne vois pas pourquoi l'Annibal n'est pas réparé, de manière à avoir quatorze vaisseaux français et deux russes. Je vois sur le chantier l'Ulm; sa mise à l'eau portera l'escadre de Toulon à quinze vaisseaux. Il faut se dépêcher de mettre à Toulon deux vaisseaux sur le chantier.

Faîtes-moi un rapport qui me fasse connaître où en est le port de la Spezia. Pourquoi n'y a-t-on pas mis un bâtiment en construction ? Je vois deux frégates et un brick; est-ce à Gènes ou à la Spezia qu'ils sont en construction ? .Ie ne le vois pas bien par l'état de situation.


Paris, 9 mars 1809

A Alexandre, prince de Neuchâtel, major-général, à Paris

Mon Cousin, donnez ordre que la partie de ma Garde qui est restée à Valladolid, c'est-à-dire l'infanterie, la cavalerie et l'artillerie, se dirige sur Vitoria, où elle recevra de nouveaux ordres, de sorte qu'il n'y ait plus personne de ma Garde au delà de Vitoria. Donnez le même ordre pour mes chevaux et le service de mes écuries qui seraient encore à Valladolid.


Paris 9 mars 1809

Au vice-amiral Ganteaume, commandant l’escadre de la Méditerranée, à Toulon

Monsieur le Vice-Amiral Ganteaume, je reçois votre lettre du ler mars, j'ai appris avec plaisir la prise de la frégate anglaise la Proserpine. En faisant sortir fréquemment des escadres légères, vous obtiendrez beaucoup de succès de cette espèce, vous prendrez même des vaisseaux; mais, pour cela, il faut bien organiser vos signaux jusqu'à la Spezia et Livourne, et, lorsque vous serez instruit de la station de quelques bâtiments anglais, les faire envelopper par des forces supérieures. Quel que soit le résultat de ces expéditions, j'en approuverai toujours la conception, quand même je devrais y perdre quelques bâtiments. C'est l'inaction dans laquelle on s'est constamment renfermé qui a inspiré aux Anglais cet excès d'audace de bloquer nos côtes avec des bricks, el de ne pas même se donner la peine de tenir des vaisseaux contre les escadres renfermées dans mes rades.


Paris, 9 mars 1809

Au général Clarke, comte d’Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Général Clarke, le commandant du Mont Cenis ne donne pas de paille aux détachements qui passent.

Il me revient que, dans la 27e et dans la 28e division militaire, les commandants et les municipalités envoient les détachements beaucoup trop loin, et à cinq ou six lieues dans les terres; ce qui fatigue et excède le soldat. Recommandez aux commandants de veiller à ce que les détachements ne soient point fatigués.


Rambouillet, 11 mars 1809

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Milan

Mon Fils, faites partir le régiment de marche de cuirassiers, qui est à Brescia, pour Augsbourg, où chaque détachement rejoindra con corps; qu'il franchisse le Tyrol aussi promptement que possible, en faisant de bonnes journées et sans séjours. Faîtes-lui donner en partant la solde jusqu'au ler avril. Je ne sais où en est la Chiusa vénitienne, près de Pontebba. Si on peut la mettre à l'abri d'un coup de main en six semaines ou deux mois, vous pouvez y faire travailler. Faites bien reconnaître la position entre Tarvis et Osoppo, pour empêcher les Autrichiens de passer par là. Je suppose que les hauteurs d'Osoppo sont en état de défense; pressez tous les petits ouvrages d'Osoppo. Je suppose que vous aurez placé un poste sur les confins, du côté de Tarvis, avec un officier intelligent pour explorer ce qui se passe en interrogeant tous les passants et empêchant tontes les com­munications.

Faites-moi connaître comment les régiments qui sont en Italie se procurent des souliers. Ceux qui ont leurs dépôts en Italie ne sont pas en peine, mais comment feront ceux dont les dépôts sont en France ? Les souliers sont-ils bons en Italie ? Y sont-ils chers ?


Rambouillet, 11 mars 1809

A Louis Napoléon, roi de Hollande, à La Haye

Je reçois votre lettre du 26   février. Pourvoyez à la défense de la Hollande et organisez au moins 20,000 hommes présents sous les armes, sans compter ce que vous avez en Allemagne et en Espagne, afin de mettre votre pays à l'abri de toute incursion, car la guerre est imminente. Toutes mes troupes sont employées, et vous serez sûrement attaqué au mois de juin ou de septembre.


Rambouillet, 11 mars 1809

A Joseph Napoléon, roi d’Espagne

J'ai lu un article de la Gazette de Madrid qui rend compte de la prise de Saragosse. On y fait l'éloge des brigands qui ont défendu cette ville, sans doute pour encourager ceux de Valence et de Séville. Voilà en vérité une singulière politique ! Certainement il n'y a pas un Français qui n'ait le plus grand mépris pour ceux qui ont défendu Saragosse. Ceux qui se permettent de pareils écarts sont plus dangereux pour nous que les insurgés. Je crois bien qu'O'Farill ne l'a pas fait dans une mauvaise intention; mais j'ai déjà eu occasion de remarquer de pareilles inconvenances dans une proclamation où il parla de Sagonte, de Numance, etc.

(Lecestre)


Rambouillet, 12 mars 1809

Au général Clarke, comte d’Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Général Clarke, il y a à l'armée du Rhin vingt et un régiments d'infanterie; treize ont les grenadiers et voltigeurs de leur 4e bataillon avec les bataillons de guerre et viennent de recevoir l’ordre d'envoyer les 1e et 2e compagnies de fusiliers, pour porter ces  4e bataillons à quatre compagnies.

Le 7e d'infanterie légère doit recevoir le même ordre. C’est par erreur que, dans mes lettres précédentes, on a mis le 5e régiment d’infanterie légère. Les grenadiers etr voltigeurs de ce régiment sont au 4e bataillon. ; faîtes-les partir, sans délai, avec ce qu’il y a de disponible des compagnies de fusiliers, de sorte que ce régiment ait quatre compagnies  de son 4e bataillon avec ses bataillons de guerre.

Le 17e de ligne et le 21e ont déjà leur 4e bataillon à l’armée du Rhin.

Quatre régiments, savoir : le 13e régiment d’infanterie légère, le 25e, le 48e et le 108e, ont leur 4e bataillon aux camps de Boulogne et d’Anvers. Ces 4e bataillons ne pourront partir pour l’Allemagne que lorsqu’on aura pourvu, par l'organisation des réserves, à la défense des camps. Le 15e régiment d'infanterie légère a son 4e bataillon en Espagne. Ainsi l'armée du Rhin devrait avoir 84 bataillons; mais un bataillon est en Espagne et quatre sont retenus momentanément dans les camps de Boulogne et d'Anvers; total, cinq bataillons à déduire. Il devrait rester à l'armée du Rhin 79 bataillons. Mais il y a encore une autre déduction à faire sur ce nombre. Quatorze régiments ne pourront envoyer les 5e et 6e compagnies de leur 4e bataillon que lorsqu'elles auront été complétées par la conscription de 1810; ce qui fait vingt et une compagnies de moins, ou la valeur de près de quatre bataillons à déduire. Ainsi l'armée du Rhin aura donc, au 1er avril, 75 bataillons, qui, à 840 hommes chacun, doivent donner une force de 63,000 hommes.

Lorsque l'armée du Rhin aura reçu les quatre bataillons de Boulogne, 3,360 hommes, sa force se trouvera portée à  66,360 hommes, Enfin, lorsqu'elle aura reçu les vingt et une compagnies que les 4e bataillons ont de moins en ce moment, 2,940 hommes, la force totale de l'armée sera définitivement de 69,000 hommes.

Le corps d'Oudinot doit être composé de douze demi-brigades, chacune forte de trois bataillons, ce qui devrait faire trente-six bataillons; mais il y en a quatre, savoir : le bataillon du 28e, celui du 46e, celui du 50e et celui du 75e, qui ne pourront passer le Rhin que lorsqu'il aura été pourvu à la défense des côtes. Resteraient donc trente-deux bataillons. Mais ces trente-deux bataillons n'ont encore chacun que quatre compagnies, hormis les tirailleurs corses et les tirailleurs du Pô, qui en ont chacun neuf; il manque donc deux compagnies à chacun des trente autres bataillons, ce qui fait soixante compagnies de moins, ou la valeur de dix bataillons à déduire.

Ainsi l'armée d'Oudinot aura donc, au 1er avril, vingt-deux bataillons, qui, au complet de 840 hommes, doivent présenter une force de 18,480 hommes. A quoi il faut ajouter une treizième demi­ brigade, formée de trois bataillons portugais et forte de 1,500 hom­mes environ; ce qui portera la force du corps du général Oudinot, au 1er avril, à 19,980 hommes. Lorsque ce corps aura reçu les quatre bataillons de Boulogne, il devra former un total de 23,340 hommes. Enfin, lorsqu'il aura reçu les 5e et 6e compagnies que les 4e bataillons complètent en ce moment (soixante compagnies à 140 hommes, 8,400 hommes), le corps du général Oudinot devra définitivement être fort de 31, 740 hommes.

Le corps d'observation du Rhin est de douze régiments, ce qui devrait faire 48 bataillons ; mais sept bataillons sont en Espagne, un au camp de Boulogne et quatre sont au corps du général Oudinot; total, douze bataillons à déduire. Le corps d'observation du Rhin, au lieu de 48 bataillons, ne peut être composé, au 1er avril, que de 36, ce qui doit faire une force de 30,240 hommes, et, lorsque le bataillon que ce corps d’armée a sur les côtes aura pu le rejoindre, sa force totale sera alors de 37 bataillons et de 31,080 hommes.

Le corps des villes hanséatiques a deux régiments, ce qui devrait faire huit bataillons; mais le 5e d'infanterie légère a deux bataillons en Espagne et le 19e de ligne en a un au camp de Boulogne, ce qui fait trois bataillons à déduire; restent donc cinq bataillons, qui, au 1cr avril, doivent présenter une force de 4,200 hommes, et, lorsque le bataillon que ce corps a au camp de Boulogne aura pu rejoindre en Allemagne, la force du corps des villes hanséatiques se trouvera être de 5,040 hommes.

Ainsi on peut résumer des trois manières suivantes l'aperçu de la situation de mes armées en Allemagne :

 

1°Au 1er avril.

2° Après le retour des

bataillons de Boulogne.

3° Après l'arrivée

des 5e et 6e compagnies des 4e bataillons

 

CORPS

 

Bataillons.

Hommes.

Bataillons.

Hommes.

Bataillons.

Hommes.

Armée du Rhin

73

63.000

79

66,360

83

69,000

Corps des villes hanséatiques

5

4.200

6

5,040

6

5,040

Corps d’Oudinot

25

19.980

29

23,340

39

31,740

Corps d'observation du Rhin

36

30,240

37

31,080

37

31.080

 

141

117,420

151

125,820

165

136,860

 


Rambouillet, 12 mars 1809

Au général Clarke, comte d’Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

J'approuve l'organisation de l’artillerie du corps d'observation du Rhin, avec cette modification, qu’au lieu de 32 caissons d'infanterie, il faut en mettre 44, pour avoir 1,500,000 rations attelées, et calculer sur 25,000 baïonnettes. Il faut, pour chaque division, une compagnie d’artillerie à pied et quatre à cheval ; ce qui fait quatre compagnies à pied et quatre à cheval. Il n’y a que trois compagnies d’artillerie à pied et une à cheval ; c’est donc trois compagnies à cheval et une à pied à envoyer.  En ajoutant deux compagnies au parc, cela ferait trois compagnies d’artillerie à pied et trois à cheval à envoyer, ou six compagnies.

Il y a cinq compagnies à pied qui arrivent de Valence; il y en aura donc deux de reste, qui seraient à la disposition du général Songis pour le parc général. Il vient de Valence deux compagnies à cheval;  ce sera donc une autre à fournir. Au général Clarke, comte d’Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris


Rambouillet, 12 mars 1809

Au général Clarke, comte d’Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

J'ai donné l'ordre, et vous le réitérerez, pour que les cadres des 3e et 4e escadrons des vingt-quatre régiments de dragons qui sont en Espagne se rendissent en France. Vous donnerez ordre au dépôt d'Auch que tous les officiers et sous-officiers des 3e et 4e escadrons des mêmes régiments de dragons se dirigent sur-le-champ sur Versailles.

J'ai donné l'ordre, et vous le réitérerez, que les hommes sans chevaux des régiments qui sont en Espagne se dirigent sur Bayonne. Donnez ordre à Bayonne qu'ils soient dirigés sur leurs dépôts.

J'ai donné des ordres, et vous les réitérerez, pour que tous les hommes montés ou non montés du dépôt de Niort, ou qui y arrive­ront, se dirigeassent sur leurs dépôts, hormis les hommes montés en état d'entrer en campagne, qui se dirigeront sur Strasbourg.

J'aurai, par ce moyen, en France quarante-huit escadrons de dragons. Ces quarante-huit escadrons, à 200 hommes chaque, feront 9,600 hommes. Je composerai alors douze régiments provisoires de quatre escadrons des 3e et 4e escadrons de chaque régiment.

Faites-moi un état à plusieurs colonnes, indiquant le nombre de chevaux existant en France, y compris les dépôts d'Auch, de Niort, et le régiment provisoire de Tours; 2° le nombre de dragons annoncés comme partis d'Espagne et sans chevaux; 3° le nombre de conscrits à recevoir de 1810. Je suppose que toutes ces parties réu­nies ne doivent pas former moins de 10,000 hommes. Vous me ferez faire un second état, indiquant le nombre de chevaux existant aux dépôts, en comprenant les dépôts de Niort, d'Auch, et le régiment provisoire de Tours, le nombre de chevaux dont les marchés ont été passés, enfin ceux pour l'achat desquels le ministre Dejean a pour six millions dans son budget de 1809. Je suppose que tout cela ne doit pas aller loin de 9 à 10,000 chevaux. Faites-moi faire le même travail sur les selles.

Je verrai alors ce qu'il faudra faire pour compléter mes quarante­ huit escadrons ou mes douze régiments provisoires. Mais mon intention est d'utiliser ceux que j'ai aujourd'hui, puisque je ne puis maîtriser les circonstances et qu'il serait ridicule que je laissasse oisifs  4 ou 5,000 chevaux de dragons que j'ai, lorsqu'ils peuvent être de quelque poids dans la balance.

Donnez donc l'ordre, demain matin: aux hommes montés en état de faire la guerre, appartenant aux 3e et 4e escadrons qui sont au dépôt d'Auch, officiers, sous-officiers et soldats, de se diriger sur Strasbourg; à tous les hommes montés en état de faire la guerre du dépôt de Niort, de se diriger sur Strasbourg; à tout le régiment provisoire de Tours, de se diriger sur Strasbourg. Deux cents hommes ont été mis sous les ordres du colonel Henry; donnez-lui l'ordre de les renvoyer sur Strasbourg dès qu'il n'en aura plus besoin. En­voyez en même temps des ordres aux dépôts des régiments de dragons qui sont en France de faire partir, vingt-quatre heures après la réception de votre ordre, tous les hommes disponibles montés, pour Strasbourg. Prenez vos mesures pour que les plus éloignés effectuent leur départ avant le 15 mars. Donnez également l'ordre à ces dépôts de faire partir, du 20 mars au 1er avril, pour Strasbourg, tous les hommes qu'ils auront disponibles, et toutes les fois qu'ils en auront dix en état de partir, en faisant comprendre aux commandants des dépôts quel est mon but. J’aurai ainsi à Strasbourg, le ….. les cadres de vingt-quatre compagnies de dragons.

Par des états que j'ai, plus récents que les vôtres, les dépôts de France peuvent fournir, au lieu de 900 hommes, 1,500 hommes; 200, an moins, partiront d'Auch, 1,000 de Tours, 200 de Niort. J'aurai donc 3,000 dragons rendus à Strasbourg dans les premiers jours d'avril.

Chargez le sénateur, général de division Beaumont, de se rendre à Strasbourg avant le 20 mars, afin de passer la revue et d'organiser quatre régiments provisoires. Vous désignerez quatre majors pour commander les quatre régiments provisoires.

Le 1er régiment provisoire se compose de six compagnies des 4e escadrons des 1er, 3e, 4e, 5e, 9e et 15e de dragons ; le 1er de dragons peut faire partir, après-demain, 120 hommes de Versailles ; il peut en faire partir 13 de Niort ; ce qui portera le cadre de cette compagnie à 130 hommes. Le 3e peut faire partir 110 hommes de Versailles et 16 de Niort ; ce qui, comme vous voyez, fera un bel escadron de 250 hommes. Le 4e régiment peut faire partir sur-le-champ 30 hommes de son dépôt ; il recevra 110 hommes du régiment provisoire de Tours et 20 hommes de Niort ; ce qui portera cette compagnie à 160 hommes. Le 5e peut faire partir 88 hommes de Versailles; le dépôt de Niort fournira 65 hommes; ce qui portera cette compagnie à 148 hommes. Le 9e recevra de son dépôt 90 hom­mes et 40 hommes de Niort. Le 15e recevra de son dépôt 78 hommes et 80 hommes du dépôt de Niort; ce qui fera qu'au 1er avril ce 1er régiment provisoire sera composé de 800 hommes prêts à entrer en campagne, indépendamment de ce que le dépôt d'Auch pourra envoyer directement.

Le 2c régiment pourra fournir 140 hommes de son dépôt ; il rece­vra 78 hommes du régiment provisoire de Tours, ce qui fera plus de 200 hommes; ainsi de suite pour les autres régiments. Il en est plusieurs, tels que le 25c, qui, ayant 120 hommes an régiment provisoire de Tours, 100 hommes à recevoir de son dépôt, pouvant en recevoir encore une vingtaine du dépôt d'Auch, auraient 250 hommes. Dans ce cas, vous devez recommander qu'au lieu de faire partir le cadre d'une compagnie on fasse partir tout le 4c escadron.

Mettez-moi sous les yeux un projet qui organise ces quatre régiments provisoires conformément au présent ordre. Vous aurez le temps, en expédiant les ordres demain matin, d'arrêter l'organisation et la formation de ces régiments avant l'arrivée des détachements à Strasbourg.

Mandez aux chefs des dépôts que les officiers qui sont au dépôt de Niort ou au régiment provisoire de Tours doivent se joindre à Stras­bourg avec les régiments; qu'ainsi ils doivent calculer en conséquence. Toutes les fois que les détachements réunis d'un même régiment feraient moins de 150 hommes, le cadre seul d'une com­pagnie sera suffisant; s'ils passent 200 hommes, le cadre du 4e esca­dron entier partira, de manière à former deux compagnies.

Dans la destination que j'ai donnée aux détachements des différents régiments qui concourent à la formation d'un même régiment pro­visoire, j'ai eu égard à l'emplacement des dépôts.

Si les circonstances ne deviennent pas pressantes, je laisserai à ces quatre régiments provisoires le temps de s'organiser à Strasbourg et d'y recevoir des renforts. Vous sentez qu'il me sera facile de former huit régiments de ces quatre, aussitôt que chaque régiment pourra envoyer son escadron complet, puisqu'alors j'aurai vingt-quatre escadrons que j'organiserai à trois escadrons par régiment. Du moment que j'aurai les quarante-huit escadrons, je ferai douze régiments provisoires que je porterai à quatre escadrons, mais en réunissant toujours les escadrons d'un même régiment dans le même régiment provisoire. C'est dans cet esprit que je n'ai point adopté la proposi­tion que vous m'avez faite de laisser subsister le régiment provisoire de Tours. Il s'ensuivrait que le 25e, par exemple, qui a à son dépôt plus de 100 hommes, aurait au régiment provisoire de Tours 100 autres hommes. Ce serait du désordre el de la confusion, et il n'y aurait rien à attendre de ce régiment. J'ai en Espagne trop de régiments de dragons, je n'en rappelle aucun; je me contente de rappeler les cadres et les hommes qui n'ont pas de chevaux. Avant la fin de l'année, les quarante-huit escadrons qui s'y trouvent n'en formeront pas probablement vingt-quatre.


Rambouillet, 13 mars 1809

Au général Clarke, comte d’Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Général Clarke, je désire que dimanche on me pré­sente, à la parade, une compagnie de chacun des 5e bataillons des 32e et 58e de ligne, 2e, 4e, 12e et 15e d'infanterie légère, complétée à 140 hommes; ce qui ferait un beau bataillon provisoire de six compagnies. Il faut que tous les hommes soient bien équipés et bien habillés, On me présentera également 300 hommes du 3e bataillon du 122e, en bon état.

Faites-moi connaître le nombre de conscrits de 1810 arrivés aux corps, et le nombre de ceux qui sont habillés.

Les conscrits de la Garde de 1810 me présenteront, à la parade de dimanche, tout ce qu'ils auront d'habillé et en formeront autant de compagnies qu'il y aura de fois 200 hommes. Quant aux conscrits  des quatre années antérieures à 1810, on me les présentera dans l'uniforme des corps auxquels ils sont destinés.

On me présentera également, à la parade de dimanche, les chasseurs du grand-duché de Berg, s'ils sont en état de paraître.

Vous donnerez ordre au général Durosnel de passer la revue de 1,300 chevaux des dépôts qui sont à Versailles, et vous m’en rendrez un compte particulier . On pourrait faire partir pour l’armée un millier de ces 1,300 chevaux.

Vous donnerez ordre au général Mouton de passe une revue particulière des 3,000 hommes des dépôts d’infanterie qui sont à Paris, de réformer tout ce qui est à réformer, et de vous faire connaître ce que le reste pourra fournir de disponible.


Rambouillet, 13 mars 1809, minuit.

Au général Clarke, comte d’Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Général Clarke, je reçois votre travail du 12 mars sur la formation d'un corps de réserve, composé des 5e bataillons de l'armée. Je vous le renvoie pour que vous y fassiez faire quelques changements que je vais vous indiquer.

Lorsque j'ai passé la revue du 86e en Espagne, j'ai ordonné que les quatorze compagnies revenant de Portugal fussent formées en douze compagnies et composassent les deux premiers bataillons; ce qui, avec le 4c bataillon, qui était de l'ancienne armée d'Espagne, fait trois bataillons au delà des Pyrénées. Le 8c bataillon, qui doit être réorganisé, et le 5e se trouvent donc en Bretagne. Donnez ordre que tout ce qui appartient à ce régiment et se trouve en ce moment à Bordeaux et à Saintes, arrivant du Portugal, rentre dans la 18e division militaire, et que le 3c bataillon soit reformé sans délai. Ce 3e bataillon complété à 800 hommes, et le 5e bataillon fort de 800 hommes, feront partie du 1er régiment, qui se réunira à Pontivy.

J'ai donné l'ordre que le 8e bataillon du 70c, qui était à Saragosse, envoyât tous ses hommes disponibles à Madrid, et que le cadre retournât en Bretagne. Il faut réitérer cet ordre et prendre des mesures pour que le 8e bataillon soit également formé à 840 hommes; ce qui, avec le 5c bataillon du 70c, formé à 800 hommes, réunira 1,640 hommes.

Vous formerez alors de la manière suivante la brigade destinée à la défense de Pontivy: 1er régiment, composé du 3e bataillon du 70e, 840 hommes; du 5e bataillon du 70e, 800 hommes; du 5e bataillon du 70e, 800 hommes; total, 2,440 hommes; 2e régiment, composé du 3e bataillon du 86e, 840 hommes; du 5e bataillon du 86e, 840 hommes; du 5e bataillon du 15e de ligne, 800 hommes; total, 2,440 hommes. Total de la brigade qui se réunira à Pontivy, 4,880 hommes, près de 5,000 hommes .

Je n'ai aucune observation à faire sur le 2e régiment, qui désormais sera le  3e, ni sur le suivant.

Au 4e régiment, je vois que le 12e de ligne est porté comme devant faire partir pour l'armée du Rhin 560 hommes, c'est-à-dire les quatre compagnies de fusiliers du 4e bataillon; mais il serait nécessaire aussi de porter en compte le nombre d'hommes nécessaire pour compléter les grenadiers et voltigeurs de ce même 4e bataillon; or vous n'avez rien porté pour cette destination. En général, on a bien complété les grenadiers et voltigeurs du corps d'Oudinot, mais on n’a pas complété les grenadiers et voltigeurs des 4e bataillons de l'armée du Rhin. Il est vrai qu'ils doivent être complétés dans les 3e bataillons de guerre; mais alors c'est autant d'hommes à envoyer de plus aux bataillons de guerre.

Il faut faire ces changements sur votre état, qui, d'ailleurs, me paraît bien conçu.

Quant au 10e régiment, qui a été oublié, il faut en former un nouveau régiment qu'on réunira à Metz.

Il y il déjà à Metz le 12e régiment, qui devient le 13e, par suite des changements faits pour la formation de la brigade de Pontivy. Le nouveau régiment sera alors le 14e; ces deux régiments formeront une brigade. Il me semble que ce 14e régiment pourra être composé de la manière suivante: 1er bataillon, deux compagnies du 25e léger, deux compagnies du 6e léger, deux compagnies du 24e léger; 2e bataillon, deux compagnies du 26e léger, deux du 16e léger, deux du 32e léger; 3e bataillon, deux compagnies du 96e de ligne, deux du 22e de ligne, deux du 54e, deux du 15e de ligne. Il manque deux compagnies pour le 2e bataillon; on prendra les deux compagnies du 32e léger qui sont à Toulon.

Ainsi une brigade composée de deux régiments et forte de 5,000 hommes se réunira à Pontivy; une brigade composée de trois régiments et forte de 9,000 hommes se réunira à Paris; une brigade composée de deux régiments et forte de 5,000 hommes se réunira à Boulogne; une brigade composée de deux régiments et forte de 5,000 hommes se réunira à Gand et à Wesel; un régiment de 2,500 hommes se réunira à Madrid; une brigade forte de 5,000 hommes se réunira à Strasbourg; une brigade forte de 5,000 hommes se réunira à Metz; enfin deux brigades formant cinq régiments seront en Italie.

Quant à la formation de cette réserve, rien ne presse. Il me paraît qu’il est d’abord nécessaire d’achever de compléter les bataillons de guerre qui sont en Allemagne et les 4e bataillons qui doivent les rejoindre. Pour terminer cette opération importante, j’ai besoin que vous me remettiez les états suivants : !° un état de l’armée du Rhin, qui me fasse connaître la situation de l’effectif de tous les corps ; cette situation comprendra l’effectif des bataillons de guerre au 1er février, et l’augmentation résultant des envois de détachements partis jusqu’au 15 mars, et que l’on supposera arrivés au même nombre qu’ils sont partis ; une colonne fera connaître ce qui manque encore pour porter ces bataillons au grand complet; 2° un état de situation détaillé des 4e bataillons de l'armée du Rhin; cet état indiquera l'emplacement, le cadre, la situation de chaque compagnie et le nombre d'hommes, en comptant comme reçus ceux dont vous aurez appris le départ, et faisant connaître ce qui manque au complet.

Tous les 4e bataillons de l'armée du Rhin doivent avoir leurs grenadiers et voltigeurs et deux compagnies de fusiliers déjà partis; mais je crois que ces compagnies partent très-incomplètes, et qu'il y manque beaucoup de monde. Une colonne fera connaître les dispositions que j'ai prises pour distribuer en leur faveur une portion des conscrits de la Garde. Une autre colonne fera connaître ce qu'il faut prendre encore pour compléter les grenadiers et voltigeurs et les deux premières compagnies de fusiliers. Cela fait, il faudra pourvoir à compléter les 3e et 4e compagnies de fusiliers.

Les deux états que je viens de vous demander pour l'armée du Rhin, je vous les demande aussi pour le corps d'Oudinot et pour le corps d'observation. Enfin vous me présenterez dans une récapitula­tion : 1° le total de mes armées en Allemagne au 1er avril, en supposant reçu ce qui est parti pour les renforcer; 2° ce que devrait être leur situation au complet; ce qui manque. Par là je connaîtrai ce qui me reste encore à envoyer pour porter mes armées d'Allemagne au complet, et ce n'est qu'après que ces armées et les 4e bataillons qui doivent les rejoindre seront complétés, qu'on pourra travailler à la formation du corps de réserve.

Les régiments du corps de réserve qu'il importe le plus de former promptement sont les deux de Saint-Omer et celui de Gand; mais il manque 3,300 hommes pour les compléter. Il est donc convenable que vous me proposiez de faire venir les cadres de ces différents régiments à Paris, pour y prendre 3,000 conscrits de la Garde et les conduire à Saint-Omer et à Gand, où ils compléteront les régiments; mais, pour cela, il faudrait que les cadres des bataillons fussent déjà formés. Vous me ferez donc connaître ceux des régiments qui, dès aujourd'hui, ont le cadre du 5e bataillon et ceux qui ne l'ont pas.

Par ce moyen, ces trois régiments se trouveront organisés; ce qui me mettra à même de disposer des dix 4e bataillons qui sont actuellement au camp de Boulogne, composés de conscrits des quatre années, et que je destine aussi à rejoindre les bataillons de guerre en Allemagne. Proposez-moi cette mesure, qui est des plus urgentes. Il me tarde aussi d'apprendre que les officiers de l'École militaire et les sous-officiers des vélites sont partis.

Je désire que vous m’apportiez mercredi l'état ci-joint, avec les changements et avec le travail que je viens de vous demander.


Paris, 13 mars 1809

ORDRE POUR LES TRAVAUX DES FORTIFICATIONS A EXÉCUTER EN 1809.

Kehl, 300,000 francs. - Finir entièrement l'escarpe des deux fronts d'attaque, de manière qu'on puisse les armer à la fin du mois d'août, 150,000 francs; faire l'escarpe de la lunette H, de manière qu'elle puisse être armée au mois d'août, si cela est nécessaire, 120,000 francs; épis, 30,000 francs; total, 300,000 francs. Le pont sera fait l'année prochaine, et, si Kehl était menacé, on ferait le barrage en bois provisoirement.

KASTEL, 620,000 francs. - Pour achever l'escarpe et contres­carpe des trois lunettes, 250,000 francs; achever les escarpes des deux fronts commencés, 200,000 francs; de manière qu'au mois d'août on puisse armer les trois lunettes et les deux fronts. Pour faire les terrassements et l'escarpe de la lunette n° 12, 150,000 francs; de manière que les quatre lunettes soient finies et puissent être armées au mois d'août. Pour achever de masser le front de gauche, de manière qu'il puisse être armé, 20,000 francs; total, 620,000 francs. Le réduit sera fait une autre année.

Quant à Mombach, le tracé qui m’est présenté ne me plaît pas. Revêtir tout ce fort, me paraît fort inutile et me paraît d’une grand dépense. Approcher de 2550 toises le bastion n° 2 de la hauteur, c’est le soumettre immédiatement au commandement de ladite hauteur. Je crois qu’il n’y a d’utile que de revêtir le bastion n° 4 et de donner à ce bastion un tracé tel que les faces n’en soient pas enfilées de la hauteur. A la manière dont il est tracé, il y a une face qui est tout à fait enfilée. Je désire donc qu’on ne fasse rien à cet ouvrage, jusqu’à ce qu’on m’ait présenté un autre tracé qui soit économique.

Les bastions 1, 2, 3, peuvent être en terre. Je n’ai désiré un réduit en maçonnerie que pour garder cet ouvrage avec moins de monde, et le mettre à l’abri d’une attaque de vive force, contre une colonne qui passerait sous le fort Meusnier et qui descendrait perpendiculairement sur le Rhin ; or du moment qu'il y a un réduit de maçonnerie qui met à l'abri de cette insulte, l'ennemi n'attaquera plus par Mombach, qui était précédemment un des points les plus faibles de la place. On sait assez les inconvénients qu'il y a à cheminer dans un marais.

La position de la France étant aujourd'hui plutôt offensive que défensive, je préfère donc que tous les moyens soient portés cette année sur Kastel, qu'il est important de finir. Les ouvrages 39, 38, 37 sont tout à fait à créer. Il faut donc affecter tous les fonds aux travaux de Kastel, suivant la répartition de 620,000 francs que j'ai faite.

WESEL, 500,000 francs. - Pour finir l'escarpe des trois fronts d'attaque de la citadelle Napoléon, 350,000 francs; pour continuer les bâtiments à l'épreuve de la bombe dans la citadelle de la place, 100,000 francs; pour divers travaux d'amélioration dans la place, 40,000 francs; fascinages, plantations, etc. dans la citadelle Bonaparte, 10,000 francs; total, 500,000 francs.

La citadelle Bonaparte semble la partie la plus forte de la place de Wesel, et les choses ont été arrangées pour que la citadelle de Wesel, la citadelle Bonaparte et la citadelle Napoléon forment une place très-forte. Ainsi l'ennemi ne s'amusera pas à prendre la ville, puisque, après l'avoir prise, il n'aura rien du tout. Il attaquera donc la citadelle de la place ou la citadelle Napoléon. S'il attaque la citadelle Napoléon, il faut que la citadelle Bonaparte soit tellement élevée que les ouvrages A, C battent l'ennemi dans la citadelle Napo­léon. Dans ce cas, on reste toujours maître de la place de Wesel, de la citadelle et de l'île de Büderich. C'est donc en réalité dans la citadelle Bonaparte que devraient être faits les magasins à poudre qu'on propose de construire; c'est là que devraient être les magasins de vivres et de bouche. L'étendue du camp retranché est de près de 600 toises; la courtine de la pièce A à la pièce B est de 150 toises , les courtines de la pièce B à la pièce C et de la pièce C à la pièce A sont chacune d'environ 150 toises et cela fait donc 300 toises de bâtiments qu'on peut construire à l'abri de la bombe; ce qui doit être un espace suffisant pour renfermer tous les magasins de la place, magasins d'artillerie, de vivres, manutentions, magasins d'habillement. Je désire donc que le magasin à poudre qu'on propose de construire soit placé dans la citadelle Bonaparte. La citadelle Napoléon sera longtemps la partie la plus faible de la place; les magasins doivent donc être dans l'île, puisque cette citadelle est conservée dans tous les cas, qu'elle est prise la dernière, et peut résister fort long­ temps lorsque tout le reste est pris.

JULIERS, 200,000 francs. - Pour achever le front 13, 10, 14, 100,000 francs, de manière que ce front soit terminé et que la place soit terminé et que la place soit fermée ; pour finir la lunette E, 15,000 francs; pour finir les trois lunettes A, B, C, 15,000 francs; pour fonder l'escarpe des trois lunettes A, B, C, 70,000 francs; total, 200,000 francs.

VENLOO, 50,000 francs. - Pour continuer les escarpes du fort Saint-Michel, 50,000 francs.

ANVERS, 110,000 francs. - Pour achever l'escarpe, les terrassements et chemins couverts de la lunette E, 40,000 francs; pour achever la lunette H et commencer le second souterrain, 10,000 francs; pour achever la lunette F et construire un souterrain, 30,000 francs; pour achever la lunette 1, 30,000 francs; total, 110,000 francs.

Il faut diriger les travaux de manière que les trois ouvrages de la rive gauche et de la lunette y soient entièrement finis avant juillet, époque à laquelle commencent les opérations de l'ennemi sur l'Escaut ; et, si les fonds pour la lunette 1 n'étaient pas suffisants, on en attribuerait sur les fonds de réserve de cette année.

FLESSINGUE, 300,000 francs. - Pour finir sur-le-champ et avant le mois de juillet les lunettes A et B, de manière qu'elles puissent être armées à la fin de juillet, tant pour battre le fleuve que pour défendre les approches de la place, 300,000 francs. Il faut me faire un rapport particulier sur Flessingue, me faire connaître combien on y a dépenser depuis mon passage, jusqu'où s'étend l'inondation, et me remettre à cet effet un grand plan.

ILE DE CADZAND, 500,000 francs. - Pour terminer l'ouvrage en terre cette année, s'il est possible, j'accorde 500,000 francs. Il faut tracer cet ouvrage autour de la batterie A, suivant les règles de l’art et le terrain, m’en adresser le projet, et le plus tôt possible commencer les travaux.

OSTENDE, 50,000 francs. Pavé et fascinage de la digue, 30,000 francs ; autres travaux, 20,000 francs ; total, 50,000 francs.

BOULOGNE, 300,000 francs – Pour le fort du moulin à huile, 100,000 francs ; pour le fort du renard, 150,000 francs ; Mont-Lambert, 40,000 francs ; fond de réparations, 10,000 francs ; total, 300,000 francs.

ILE SAINT-MARCOUF, 50,000 francs – Pour fermer les voûtes, 45,000 francs ; réparation, blockhaus, etc., etc. 5,000 francs ; total, 50,000 francs.

QUIBERON ; 50,000 francs - pour achever la caserne, 50,000 francs.

BELLE-ÎLE, 100,000 francs. Pour achever les mouvements de terre de cinq lunettes et de leurs chemins couverts, 60,000 francs; et pour construire un réduit dans une des lunettes et en fonder un second ,1,0,000 francs.

ÎLE D’AIX, 150,000 francs. Pour achever le réduit de la gorge, creuser son fossé et améliorer le front de terre, 60,000 francs; pour construire deux lunettes, 80,000 francs; pour les baraques à construire, 10,000 francs; total, 150,000 francs.

ALEXANDRIE, 3,600,000 francs. - Article ler. Demi-couronne de Saorgio, 390,000 francs. - Art. 2. Demi-couronne de Montenotte, 210,000 francs. - Art. 3. Couronne de Dega, 535,000 francs. ­- Art. 4. Demi-couronne de Marengo et pour les quais, déversoirs, écluses, 680,000 francs.- Art. 5. Demi-couronne de Mondovi, 285,000 francs. - Art. 6. Demi-couronne de Lodi, 290,000 francs. - Art. 7. Demi-lune CD, 58,000 francs. - Art. 8. Mur du quai du Tanaro, 305,000 francs. -Art. 9. Polygone d'artillerie, 25,000 francs. -Art. 10 Entretien, 2,000 francs. - Art. 11. Citadelle du Tanaro, 246,000 francs. - Art. 12. Fonder l'ouvrage de l'île du Tanaro, 145,000 francs. - Art. 13. Entretien, 4,000 francs. - Art. 14. bâtiments, etc. 425,000 francs. - Total, 3,600,000 francs.

GÊNES, 40,000 francs. - Pour achever les forts Richelieu et Quezzi, 30,000 francs; réparer les deux môles et le mur d'enceinte du côté de la mer, 10,000 francs.

LA SPEZIA. - Il faut m'en présenter les projets dans l'année.

CORFOU, 100,000 francs. - Pour la place, les batteries et les îles dépendantes, 100,000 francs.

VINCENNES; 70,000 francs. - Pour rétablir l'arche du pont du parc, 15,000 francs; un chemin de ronde, 20,000 francs; achever les deux tours, 30,000 francs; réparations, 5,000francs; total, 70,000 francs.

NAPOLÉON-VILLE, 50,000 francs. - Pour construire la caserne, 50,000 francs.

LANS-LE-BOURG, 60,000 francs. – Pour élever les maçonneries el couvrir la caserne, 60,000 francs.

CHAMBÉRY, 200,000 francs. - Pour les casernes et le pavillon, 200,000 francs.

AJACCIO. - Je désire pour l'hôpital d'Ajaccio un projet qui ne coûte pas plus de 100,000 francs.

TRAVAUX ORDINAIRES ; Fortifications. - 10 Communications mari­times, 120,000 francs; 2° réparations de vieilles places, 1,600,000 francs; 30 fonds imprévus, 164,000 francs; 4°· Écoles et dépôts, 110,000 francs; total, 2,000,000 francs.

Bâtiments. - 1 ° Loyers de casernes, 145,000 francs; 2° traite­ments de portiers, concierges, 75,000 francs; 3° établissements de paratonnerres, 30,000 francs; 4 ° réparation de vieilles casernes dans les places de guerre, 1,750,000 francs; total, 2,000,000 francs.

RÉCAPlTULATION. - Travaux extraordinaires, 7,450,000 francs; travaux ordinaires, 4,000,000 francs; total général, 11,450,000 francs.


Rambouillet, 14 mars 1809

A M. de Champagny, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur de Champagny, je pense qu'il est convenable d'envoyer aux sieurs Otto à Munich, Durand à Stuttgart, Bourgoing à Dresde, et à mes ministres à Carlsruhe et à Darmstadt, une copie de votre note à M. de Metternich el de votre conférence avec l'ambassadeur (voir plus haut).  L’une et l'autre de ces pièces sont bonnes à montrer.


NOTE DU COMTE DE CHAMPAGNY AU COMTE DE METTERNICH

Paris, 10 mars 1809.

Le soussigné, ministre des relations extérieures, a rendu compte à S. M. l'Em­pereur, son maître, de la communication qui lui a été faite par S. Ex. M. le comte de Metternich du retour de M. le comte de Mier, et de la résolution qu'avait prise le cabinet de Vienne de mettre ses armées sur le pied de guerre.

L'Empereur Napoléon a été peiné de cette résolution. Les armements de l'Autriche, la conduite peu amicale de ses légations à Constantinople et en Bosnie, des écrits répandus avec profusion dans toute la monarchie contre la France, faisant craindre à Sa Majesté que la faction anglaise ne prît du crédit à Vienne, l'avaient décidée à arrêter sur la Meurthe et la Saône la marche de ses divisions qui se portaient sur Boulogne, Brest et Toulon.  Sa Majesté avait en même temps engagé les princes de la Confédération à se tenir prêts à tout événement, pour pouvoir, au besoin, réunir leurs troupes et être en état, s'il le fallait, de repousser toute agression. Mais, après la déclaration de M. de Metternich, Sa Majesté a donné l’ordre que ses troupes se portassent de l'intérieur de la France au delà du Rhin, pour veiller à la sécurité de ses alliés et confédérés, et que les troupes de ceux-ci fussent mises, sans délai, sur le pied de guerre.

Ainsi des armées seront opposées à des armées. L'initiative de l'inquiétude, des menaces et des armements, sera provenue de l'Autriche. C'est à elle à faire connaître quand cet état devra cesser. Comme aucun différend n'existe entre les eux cours, et que, depuis le traité qui a été suivi de l'évacuation de Braunau par l'armée française, il n'y a aucun sujet de litige entre les deux puissances, Sa Majesté ignore entièrement à qui on en veut et ce qu'on prétend. Mais de son côté elle désire voir l'Europe jouir du calme et de la sécurité de la paix, et ses peuples recueillir le fruit des économies qui en sont le résultat. Le soussigné est chargé d'exprimer ce vœu à Monsieur l'ambassadeur. Il prie Son Excellence, etc.


Rambouillet, 14 mars 1809

Au comte de Champagny, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur de Champagny, j’avais demandé les gazettes de Vienne, de Presbourg et de Cracovie depuis le mois d’octobre de l’année dernière ; je ne les ai pas encore reçues.


Rambouillet, 14 mars 1809

Au général Clarke, comte d’Hunebourg, ministre de la guerre, à Paris

Faire faire au dépôt de la guerre une carte des étapes d'Allemagne, telles que je les avais marquées dans mes guerres en Allemagne, depuis le Rhin jusqu'à Austerlitz et la Vistule. Je désire que cette carte ne soit pas plus grande qu'une carte d'étapes de France, et que j'y voie bien le nombre de journées.


Rambouillet, 14 mars 1809.

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

Monsieur le Vice-Amiral Decrès, je désirerais avoir à l'armée du Rhin 2,000 hommes de marine. D'abord un équipage de la flottille, qui serait armé de fusils et porterait, au lieu de briquets, des outils. La première compagnie, par exemple, aurait des haches, la seconde des pioches, la troisième des pics-boyaux, la quatrième des pelles. Ces outils seraient portés en bandoulière en place de briquets. Je voudrais ensuite avoir un bataillon de conscrits ouvriers de la marine, de quatre compagnies, qui seraient commandées par des officiers d'artillerie de la marine qui eussent servi, s'il est possible, dans les ouvriers. Chaque compagnie serait de 140 hommes. Le bataillon serait commandé par un chef de bataillon d'artillerie de la marine qui ait servi dans les ouvriers. Ces ouvriers porteront également des outils en bandoulière en guise de briquets et seront armés de fusils. Ces compagnies d'ouvriers seront du même ordre que celles qui sont dans l'artillerie. Ces deux corps seront attachés au génie de l'armée. Ils seront utiles pour le passage des grandes rivières et pour conduire de petites embarcations armées ou des bateaux pour la navigation. Il faudrait qu'il y eût dans ces compagnies d'ouvriers quelques calfats, contremaîtres, charpentiers, et par compagnie un officier-ingénieur de marine ayant l'habitude de construire des vaisseaux, des bateaux, ou de les réparer.

Occupez-vous de cela sans délai, et présentez-moi un projet mercredi.


Rambouillet, 14 mars 1809

A Alexandre, prince de Neuchâtel, major-général, à Paris

Mon Cousin, je remarque que, dans le projet remis par le général Songis, il porte seize pièces en excédant de ce qu'il demande. Mais il ne faut pas les réformer; il est nécessaire qu'il y ait quelques pièces à chacun des parcs des trois armées. Je voudrais bien qu'il fut pos­sible, sans faire trop de dérangement, de n'avoir qu'une seule espèce d'obusiers à l'armée.

Les 200 hommes d'artillerie qui sont à Danzig peuvent être réduits à 100. Les 100 hommes d'artillerie qui sont à Stralsund y sont inutiles. Les 200 hommes qui sont à Magdeburg peuvent être réduits, également à 100. Les 3,400 canonniers à pied que demande le général Songis ne me paraissent pas suffisants. Il y aura Passau et d'autres places à garnir. Il faut porter à 4,500 les canonniers à pied. 1,000 hommes d'artillerie à cheval ne sont pas non plus suffisants; il faut les porter à 1,500 hommes, ce qui ferait 6,000 hommes artillerie. Les 600 pontonniers ne me paraissent pas suffisants; il faudrait au moins huit compagnies à 120 hommes chacune.

Il faut également me présenter un projet pour l’organisation de l’arme du génie, répartie entre les trois corps suivants : armée du Rhin, corps du général Oudinot, corps d’observation du Rhin. Il faut à chacun un officier du génie, au moins huit officiers, au moins deux compagnies de sapeurs, une compagnie de mineurs au moins par corps, et trente mille outils pour toute l'armée, à raison de dix mille outils par corps. Je nomme le général du génie Bertrand, mon aide de camp, pour commander le génie de mes armées d'Allemagne. Concertez-vous avec lui pour l'organisation de son arme et des propositions à me faire.

J'ai demandé au ministre de la marine un des quatre équipages de la flottille de Boulogne formant 1,200 marins, pour servir au passage et à la navigation des rivières. Entendez-vous avec ce ministre pour pourvoir à l'armement et à l'habillement de cet équipage, et proposez­ moi sans délai sa mise en activité. Il faut qu'il soit commandé par un officier de marine intelligent. On pourrait y nommer le capitaine Baste, qui a déjà fait la guerre de terre et qui paraît s'y être distingué.


Rambouillet t, 14 mars 1809

Au général Lacuée, comte de Cessac, directeur général des revues et de la conscription militaire, à Paris

La conscription en Toscane va mal; la cause en est bien simple, c'est qu'il n'y a pas d'officiers pour ramener les conscrits. On a confié cette mission à des vétérans qui se sont comportés comme partout, c'est-à-dire avec négligence. Je pense donc nécessaire que vous char­giez un détachement d'officiers et de sous-officiers du 113e d'être répartis dans la Toscane comme pour les autres départements.


Rambouillet, 14 mars 1809

À Davout

Mon cousin, je désire avoir un itinéraire des routes qui, de la Bohême, aboutissent sur le Danube depuis Passau jusqu'à Ulm, surtout de celles de la traversée des montagnes. Envoyez-moi également une note sur la situation actuelle des fortifications de Prague.


A Rambouillet, 14 mars 1809

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Milan

Mon Fils, je reçois votre lettre du 8. Je pense qu'il est indispen­sable d'envoyer deux régiments de cavalerie au général Seras, le 6e de hussards et le 8e de chasseurs; il les placera sur l'Isonzo et le Tagliamento, en ayant soin de les mettre dans des lieux sains, et de leur faire faire le service d'avant-postes pour savoir ce que font les Autrichiens.

Passé le 20 mars, je vous laisse maître de faire occuper les camps d'Udine, de San-Daniele et de Montecchiaro, et d'approcher davantage mes troupes; mais ce que je vous recommande, c'est de faire ces mouvements doucement et sans précipitation, et surtout de ménager la santé de mes troupes. Il n'y a pas grand'chose à craindre des Autrichiens, les maladies sont plus redoutables. Si les pluies de la saison rendaient les camps peu sains, vous ferez cantonner mes troupes dans les villages; je vous recommande d'en avoir grand soin.

Écrivez au général Marmont par mer, et instruisez-le des mouve­ments des Autrichiens; réitérez-lui l'ordre de prendre des positions sur les frontières, de manière à les menacer au moindre événement. Il peut même commencer à faire travailler à quelques redoutes pour former un camp retranché et à assurer sa communication avec Zara. Faites-lui bien comprendre que, la guerre déclarée, il doit envahir tout le pays et marcher à la rencontre des Autrichiens, s'ils n'ont pas devant lui un corps plus considérable que le sien.


Rambouillet, 14 mars 1809

A Maximilien-Joseph, roi de Bavière, à Munich

Monsieur mon Frère, je reçois le lettre de Votre Majesté du 4 mars. Votre Majesté aura reçu, depuis, la mienne, qui lui aura fait connaître les positions que je désirais que prissent ses troupes. Je dois lui parler franchement. Si la guerre a lieu, ses troupes doivent agir sérieusement. Le prince royal, quelque privilégié qu’il puisse être de la nature, n’a jamais appris ni fait la guerre, il ne peut la savoir.  Ce serait donc me priver de l’utilité que j’attends de vos 40,000 hommes que de ne pas mettre à leur tête un homme sûr et ferme. J’ai nommé pour les commander le duc de Danzig, qui est un vieux soldat. Les troupes bavaroises sont aujourd’hui trop nombreuses et les circonstances sont trop graves pour que je dissimule la pensée à Votre Majesté. Quand le Prince Royal aura fait six ou sept campagnes dans tous les grades, il pourra les commander. Du reste, on peut se tirer facilement de là; le Prince Royal pourra venir avec moi. J'ai ordonné qu'une estafette fût établie de Paris à Munich, afin d'être instruit le plus promptement possible. J'ai fait connaître à Votre Majesté mes dernières dispositions : Bamberg, Würzburg et Bayreuth sont les points de réunion de mes troupes. Du 20 au 30 mars, mes armées seront concentrées; toutes les troupes de la Confédération seront également réunies et prêtes à recevoir les Autrichiens, s’ils se présentent. Le maréchal duc de Rivoli sera rendu pour cette époque à Ulm. Les nouvelles de Russie sont toujours les mêmes. L’empereur de Russie est indigné de la conduite de l'Autriche et fait marcher des troupes. Le colonel Gorgoli, aide de camp de ce prince, qui arrive à l'instant, m'apporte de nouvelles assurances de ces dispositions.


Rambouillet, 14 mars 1809

Au comte Fouché, ministre de la police générale, à Paris

Palafox, sa mère et sa femme doivent être arrivés ou arriver (sic) à Bayonne. Palafox sera conduit comme un criminel à Vincennes, et il sera mis au secret, de manière qu'on ne sache pas qui il est. Sa mère et sa femme seront envoyées au château de Ham pour rester comme otages pour une quantité de Français qui sont aux mains des insurgés.

Vous ferez transporter le prince de Castelfranco de Fénestrelle à Naples, où il sera mis au château de Gaëte et à la disposition du roi de Naples.

Faites arrêter le vicaire de Noyon qui s'est permis, dans un ser­mon, des expressions inconvenantes sur la conscription. Vous le ferez venir à Paris et interroger par un des conseillers d'État. Vous me rendrez compte de l'interrogatoire.

(Lecestre)


Rambouillet, 15 mars 1809

Au comte de Champagny, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur de Champagny, la réponse du duc d'Oldenbourg m'étonne. Il faut écrire à son ministre une lettre dans laquelle on fasse sentir légèrement que, lorsqu'on a pris des engagements, on doit les remplir, et qu'il y a peu de loyauté dans cette conduite.

Parlez au ministre de Mecklenburg pour qu'il envoie un courrier, afin que les troupes de Strelitz se rendent sur-le-champ à Stralsund

Il ne faut point ratifier les traités faits avec les princes de Lippe, mais les approuver. Vous en enverrez une copie au ministre de la guerre; faites-en faire aussi une copie pour mon cabinet.


Rambouillet, 15 mars 1809.

 Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Milan

Mon Fils, il paraît que les Autrichiens veulent opposer à l'armée d'Italie deux corps: l'un de 30 à 40,000 hommes, qu'ils réunissent à Klagenfurt ou à Villach; l'autre de 20 à 30,000 hommes, qu'ils réunissent à Laybach. Il serait nécessaire d'avoir un officier d'état­ major intelligent, parlant allemand, établi à l'extrémité de la frontière du côté de Pontebba, qui reçut les déserteurs, les encourageât et vous en envoyât tes interrogatoires sur la force de l'ennemi de ce côté; un aux débouchés de Cividale par Caporetto, et un sur la grande route de Palmanova à Trieste. La comparaison de ces trois rapports réunis vous fera bientôt connaître ce qu'il y a d'ennemis de ce côté et le projet qu'ils pourraient nourrir.

Vous sentez que, s'il arrivait que le corps de Klagenfurt eût l'in­tention de se porter sur Lienz dans le Tyrol, il serait important que, moyennant le mouvement que vous feriez sur Klagenfurt, il fût retenu et obligé de vous faire tête.


Rambouillet, 15 mars 1809

Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Milan

Mon fils, l'ouvrage que j'ai ordonné sur la tête de pont du Tagliamento doit être construit de manière que l'on puisse, successivement, sans en déranger le tracé, et profitant de ce qu'on a fait le premier jour, finir par avoir une place importante. Le Tagliamento n'a pas d'eau les trois quarts de l'année; cependant très-souvent il déborde. Mon but est que, lorsqu'il déborde, cet ouvrage serve de tête de pont et puisse favoriser le passage de l'armée. Mais, indépendamment de cet avantage, je veux aussi obtenir celui de pouvoir laisser là des magasins de cartouches, de biscuit et des hôpitaux, à l'abri d'un coup de main; eu sorte que, l'armée étant en avant, un parti ennemi de plusieurs milliers d'hommes, qui, avec de l'artillerie de campagne, viendrait à se porter sur le Tagliamento et à le passer, ne pût pas forcer cet ouvrage placé à la tête du pont, et fût du moins arrêté assez de temps pour que l’armée puisse revenir. Je désire également que, dans le cas où l'on prendrait position sur la rive droite du Ta­gliamento, pour observer le siège de Palmanova, cette tête de pont puisse, ainsi qu’Osoppo, servir de point d'appui à l'armée. Toutes ces propriétés ne pourront probablement pas s’obtenir dès cette campagne ; mais il est nécessaire de les avoir en vue, pour ne pas construire des ouvrages qu’il faille ensuite défaire.


Rambouillet, 15 mars 1809

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Milan

Mon Fils, je reçois le projet d’approvisionnement des places de Palmanova et d’Osoppo. Je pense qu’il faut mettre à Osoppo trois autres pièces de 24, enfin d’autant plus que les boulets y existent. Je remarque qu’à Osoppo il n’y a plus d’obus de 24. Il n’y a pas suffisamment d’outils de pionniers, ni à Palmanova ni à Osoppo. Il n’y en a à Palmanova qu’un millier, tandis qu’il en faudrait 1,200 pour l’artillerie au moins, 6 mille pour le génie et 4 mille pour être distribués à l’armée qui aura toujours besoin d’en prendre, quoi qu’on fasse. Il faudra donc encore 10 mille outils à Palmanova, il en faudra 2 milles à Osoppo. Cet objet est très-important, car, sans outils, on ne peut remuer la terre : ne perdez pas de temps à y en envoyer. Je vois à Palmanova 600 milliers de poudre de 16 onces ou de 1 kilogramme. Cette quantité me parait très-considérable. Je vois que l’approvisionnement de Palmanova est de 3,000 hommes pendant six mois; cet approvisionnement me parait assez satisfaisant. Je désirerais qu’il y eût de la farine, du froment ou du biscuit pour un an. L’approvisionnement d’Osopo pour quatre mois me parait également suffisant, mais il faut y mettre de la farine ou du biscuit pour un an. Ordonnez ces augmentations; indépendamment de cela, ayez, entre

Palmanova, Osopo et la tête de pont de Tagliamento, 1 million de rations de biscuit, et 2 millions de rations de farine. Je suppose que vous vous êtes assuré qu’il y a à Palmanova des moyens de moudre le blé. S’il n’y en a pas, il faut donner ordre que le blé soit converti en farine.

 

(prince Eugène)

 


Paris, 15 mars 1809

 

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Milan

 

Mon Fils, je reçois votre lettre du 9. Faîtes-moi connaître si la place de Venise, c’est-à-dire Brandolo et la Malghera peuvent être armées. Il faut préparer cet armement. Faîtes travailler en toute hâte, pour que Brandolo et Malghera puissent être armées.

 

(prince Eugène)

 


Rambouillet, 15 mars 1809

A Jérôme Napoléon, roi de Westphalie, à Cassel

Je reçois votre lettre du 7. Je n'ai pu la lire qu'avec étonnement.

Personne en France ne parle de vous. J'ignore ce qu'a pu vous faire écrire Madame. Vous croyez que je suis mécontent de votre luxe, et en cela vous ne vous trompez pas. Mais, puisque vous me parlez de votre luxe et que vous me mettez à même de vous dire là­ dessus ma façon de penser, je ne vous cache pas que je le trouve impolitique et ruineux pour vos États.

Je ne vous connais pas de dettes envers moi à moins que ce ne soit celle de la caisse d'amortissement. Je croyais que vous l'aviez payée; car elle vous l'a fait à terme. Il faut être scrupuleux, et il vaut mieux tenir ses engagements que de faire des présents. Un nommé Morio est venu ici; je ne l'ai pas vu. Il vous a fait du tort par ses propos indiscrets ... (plusieurs lignes illisibles)

Ne faites point de folles dépenses. Vous dites que vous implorez mon indulgence; je ne puis juger que par vos actions. Réformez donc vos dépenses de manière à avoir sur votre liste civile de grosses économies. Le roi de Prusse, dans sa plus grande prospérité, n'a jamais mangé plus de 3 millions. Vienne a encore un état de maison qui ne va pas à la moitié du vôtre. De fausses idées de grandeur, une générosité peu réfléchie vous ont fait donner une baronnie à Morio (une ligne illisible) ... Si cela est, je puis penser que vous êtes peu désireux de me plaire, et que, faisant peu de cas de mes conseils, je ne dois plus vous en donner.

Je vous ai demandé de me faire connaître l'état exact de vos troupes, afin de faire mes calculs en conséquence.

Je suis fâché d'apprendre que votre santé est mauvaise. Couchez­ vous de nonne heure, et ayez un peu de régime.

(Lecestre)


16 – 31 mars 1809